Finances Publiques - Approche Théorique et Pratique (PDF)
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2018
Mor Fall, Ibrahima Touré
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Summary
Cet ouvrage traite des finances publiques au Sénégal, se concentrant sur le cadre institutionnel, les opérations budgétaires, le rôle du Trésor public, et le financement du déficit budgétaire. Il s'adresse aux étudiants, aux fonctionnaires et aux économistes. L'ouvrage est une ressource précieuse pour comprendre le circuit de la dépense publique et son financement au Sénégal.
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« (…) L’ouvrage est un précieux document sur le cadre Mor Fall Mor Fa...
« (…) L’ouvrage est un précieux document sur le cadre Mor Fall Mor Fall (Inspecteur général d’État) et Ibrahima Touré (Inspecteur principal du Trésor) institutionnel et les opérations budgétaires au Sénégal. Les auteurs (Inspecteur général d’État) exposent avec une grande clarté des questions analytiques (place de la politique budgétaire dans la gestion macroéconomique), le et Ibrahima Touré cycle budgétaire et le contrôle de l’exécution du budget, le rôle du (Inspecteur principal du Trésor) Trésor public qui est le banquier de l’État, le financement du déficit budgétaire. Cet ouvrage qui s’adresse à un large public (étudiants de premier et deuxième cycles, candidats aux concours de la fonction publique, fonctionnaires des régies financières et des corps de contrôle, économistes financiers) se lit aisément et apporte une contribution majeure à la compréhension du circuit de la dépense publique et de son financement au Sénégal. Finances publiques (…) Le mérite de Mor Fall (Inspecteur général d’État) et Ibrahima Touré (Inspecteur Principal du Trésor), est d’avoir fait preuve d’une grande Finances générosité intellectuelle en partageant, à travers cet ouvrage, leur expertise de hauts fonctionnaires, leur riche expérience de praticien des finances publiques et d’enseignant à l’École Nationale d’administration (ENA) et à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar où ils ont formé plusieurs promotions d’inspecteurs du Trésor et publiques d’étudiants en master. » Approche Mor Fall, Inspecteur général d’État est un haut fonctionnaire de l’Administration sénégalaise en service à la Présidence de la République du Sénégal. Depuis 1997, Mor FALL intervient comme enseignant en Finances publiques et en Statistiques de Finances publiques. Breveté théorique de l’École nationale d’Administration et de Magistrature (ENAM) du Sénégal en 1990 comme Inspecteur du Trésor, il a réussi, en 2009, le concours d’entrée au corps des Inspecteurs généraux d’État (IGE). Ibrahima Touré, Inspecteur principal du Trésor, est breveté de l’École nationale d’Administration (ENA) du Sénégal en 2002. Il occupe actuellement les fonctions de Receveur municipal de Dakar, après avoir et pratique été Percepteur de Mbour et de Rufisque. Monsieur Touré dispense des cours de finances publiques à la FASEG/UCAD et des cours de finances locales à l’École Nationale d’Administration (ENA). Illustration de couverture : © Sergey Nivens - 123rf.com ISBN : 978-2-343-14689-8 38 € 9 782343 146898 Finances publiques Approche théorique et pratique Mor FALL Ibrahima TOURE Finances publiques Approche théorique et pratique Préface de Pr. Birahim Bouna NIANG © L’Harmattan-Sénégal, 2018 10 VDN, Sicap Amitié 3, Lotissement Cité Police, DAKAR http://www.harmattansenegal.com [email protected] [email protected] ISBN : 978-2-343-14689-8 EAN : 9782343146898 Ce qui importe est moins l'étendue de notre ignorance que le degré de fausseté de ce que nous croyons savoir Mark Twain (1835-1910), écrivain, essayiste et humoriste américain. 7 SOMMAIRE REMERCIEMENTS................................................................................................................... 11 PRÉFACE..................................................................................................................................... 13 AVANT-PROPOS........................................................................................................................ 15 INTRODUCTION........................................................................................................................ 19 PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES FINANCES PUBLIQUES......................................... 19 TITREI LES FONDAMENTAUX ET CARACTÉRISTIQUES DES FINANCES PUBLIQUES CHAPITRE I LA PLURIDISCIPLINARITÉ DES FINANCES PUBLIQUES............................................ 25 CHAPITRE II L’ORIGINALITÉ DES FINANCES PUBLIQUES............................................................... 29 CHAPITRE III LE RÔLE ET LA PLACE DES FINANCES PUBLIQUES DANS LES SYSTÈMES ÉCONOMIQUES.................................................................................................................... 37 CHAPITRE IV L’ÉLARGISSEMENT DU DOMAINE DES FINANCES PUBLIQUES............................ 51 TITREII L’ÉLABORATION DU BUDGET DE L'ÉTAT CHAPITRE I LA LOI DE FINANCES ET LE BUDGET............................................................................ 59 CHAPITRE II LES CATÉGORIES DE LOIS DE FINANCES..................................................................... 63 CHAPITRE III LE CONTENU ET LA PORTÉE DE LA LOI DE FINANCES............................................. 69 CHAPITRE IV LA LOI DE FINANCES : UNE LOI SPÉCIALE SOUMISE À DES RÈGLES ET PRINCIPES BUDGÉTAIRES................................................................................................ 97 CHAPITRE V LA PRÉPARATION DU BUDGET.....................................................................................126 TITRE III L’EXÉCUTION ET LE CONTRÔLE DU BUDGET DE L’ÉTAT CHAPITRE I L’EXÉCUTION DU BUDGET DE L’ÉTAT.......................................................................147 CHAPITRE II LE CONTRÔLE DU BUDGET DE L’ÉTAT......................................................................243 9 TITREIV LE FONCTIONNEMENT DU CIRCUIT FINANCIER PUBLIC CHAPITRE I TRÉSOR PUBLIC ET GESTION DES LIQUIDITÉS........................................................303 CHAPITRE II BESOINS DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT ET APPUI BUDGÉTAIRE........................341 BIBLIOGRAPHIE..................................................................................................................... 373 10 REMERCIEMENTS Au-delà des ouvrages, textes et travaux consultés et exploités, la rédaction de l’ouvrage s'est inspirée, notamment, des cours et modules de formation dispensés à l’École nationale d’Administration et de Magistrature (ENAM), devenue l’École nationale d’Administration (ENA), au Centre Ouest africain de Formation et d’Études bancaires (COFEB) de la BCEAO et au CESAG. Parmi les différents animateurs de ces cours de finances publiques, de statistiques de finances publiques, d’analyse économique et de politique économique, dispensés sur une période de trente ans, on peut citer : M. Malick Kamara Ndiaye, actuel Président de la Cour des comptes de l’UEMOA, M. Ibrahima Sarr, ancien ministre délégué chargé du Budget, M. Abdoulaye Diop, ancien ministre délégué chargé du Budget, M. Oumar Sylla, ancien Secrétaire général du ministère de l’Économie et des Finances, M. Mamadou Sarr, ancien Directeur général de la Comptabilité publique et du Trésor, M. Mor Fall, Inspecteur général d'État, et M. Mor Diouf, ancien Coordonnateur à la Direction générale de la Comptabilité publique et du Trésor. Des communications et analyses ont été également exploitées dans l’ouvrage, notamment celles de Monsieur Mamadou Abdoulaye Sow, ancien ministre délégué chargé du Budget et de Madame Khady Ndao Diagne, ancienne Directrice du Budget. L’idée de la rédaction d’un ouvrage de finances publiques à mettre à la disposition des étudiants, candidats à des concours, fonctionnaires, agents des organismes publics et chercheurs, est venue du Professeur Birahim Bouna Niang, agrégé de sciences économiques, actuel Doyen de la Faculté des Sciences économiques et de Gestion (FASEG) de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD). En effet, au moment où il exerçait les fonctions de Directeur du Centre de Recherche et de Formation pour le Développement économique et social (CREFDES) de la FASEG, le Professeur Niang avait fortement suggéré, compte tenu de l’indisponibilité répétée de l’un des formateurs, eu égard à ses nouvelles fonctions de vérificateur, que le cours de finances publiques dispensé aux étudiants du Master 2 de Gestion macroéconomique et administrative, puisse être publié sous forme d’ouvrage à laisser aux générations actuelles et futures d’étudiants. C’est dans ce cadre que le cours, qui était dispensé par M. Mor Fall jusqu'en 2011, puis par Monsieur Ibrahima Touré à partir de 2012, a été actualisé, perfectionné et adapté pour donner lieu à la présente publication. Enfin, la qualité de l’ouvrage a été améliorée grâce aux observations pertinentes et avis expérimentaux de nos lecteurs que sont : le Professeur 11 Birahim Bouna Niang, le Professeur Ahmadou Aly Mbaye, le Professeur Cherif Sidy Kane, Directeur du CREFDES, le Professeur Ismaïla Madior Fall, l’Inspecteur général d’État Ngouda Fall Kane, l’Inspecteur général d’État Falilou Mbacké Diagne et d’éminents responsables et collègues du Trésor, y compris ceux de la Recette-Perception municipale (RPM) de Dakar. Que toutes ces personnes trouvent ici l’expression de notre profonde gratitude. 12 PRÉFACE Dans le contexte des pays de la zone CFA marqué par la mise en œuvre d’une politique monétaire prudente qui tient aux mécanismes de fonctionnement propres à l’union monétaire, la politique budgétaire constitue un des principaux leviers de la stratégie de développement économique et social. En outre, dans la mesure où le secteur privé n’atteint pas une taille critique dans les pays en développement à revenu intermédiaire ou faible, l’État constitue un agent économique dont le rôle est prépondérant. Aussi, les opérations budgétaires (collecte des impôts et taxes, mise en place d’infrastructures collectives, soutien aux entreprises et aux ménages, etc.) ont- elles un impact considérable. L’influence de l’action de l’État sur la situation des agents et l’équilibre économique et social passe par plusieurs canaux : impact de la fiscalité sur la rentabilité des secteurs d’activité et l’offre de travail, amélioration de l’environnement physique, accès à la commande publique, distribution de revenus sous forme de salaires ou de transferts, action sur la productivité des facteurs. Une politique budgétaire bien avisée permet de promouvoir le développement économique et social à travers la mise en place d’un système fiscal adapté aux spécificités de l’économie, l’offre de biens et services publics de qualité aux différentes couches de la population, la réduction des inégalités et de la pauvreté. Elle concilie également les impératifs de court terme (réduction des fluctuations de l’activité à travers les effets contracycliques) et de moyen-long terme (stimulation de la croissance avec l’amélioration du capital physique, du capital humain et de la productivité des facteurs). Cependant, les problèmes d’économie politique (influence des groupes d’intérêts sur le processus de décision public) ou d’autres facteurs tels que la logique d’une économie de rente peuvent inhiber les réformes susceptibles d’améliorer l’efficacité de la politique budgétaire. Dès lors, différents types d’inefficacité et d’effets pervers peuvent prospérer : - faiblesse des performances fiscales, beaucoup d’activités échappant à l’impôt, - inefficience de la dépense publique, - montée des déficits budgétaires et de l’endettement public, - faible incitation à investir et éviction du secteur privé. La politique budgétaire est ainsi au cœur des politiques de développement dont elle est la traduction à court, moyen et long terme. 13 Le mérite de Mor Fall (Inspecteur général d’État) et Ibrahima Touré (Inspecteur Principal du Trésor), est d’avoir fait preuve d’une grande générosité intellectuelle en partageant, à travers cet ouvrage, leur expertise de hauts fonctionnaires, leur riche expérience de praticien des finances publiques et d’enseignant à l’École Nationale d’administration (ENA) et à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar où ils ont formé plusieurs promotions d’inspecteurs du Trésor et d’étudiants en master. L’ouvrage est un précieux document sur le cadre institutionnel et les opérations budgétaires au Sénégal. Les auteurs exposent avec une grande clarté des questions analytiques (place de la politique budgétaire dans la gestion macroéconomique), le cycle budgétaire et le contrôle de l’exécution du budget, le rôle du Trésor public qui est le banquier de l’État, le financement du déficit budgétaire. Cet ouvrage qui s’adresse à un large public (étudiants de premier et deuxième cycles, candidats aux concours de la fonction publique, fonctionnaires des régies financières et des corps de contrôle, économistes financiers) se lit aisément et apporte une contribution majeure à la compréhension du circuit de la dépense publique et de son financement au Sénégal. Birahim Bouna NIANG Professeur titulaire Doyen de la Faculté des Sciences économiques et de Gestion de l’Université Cheikh Anta Diop 14 AVANT-PROPOS La publication de cet ouvrage est encouragée, comme précisé ci-dessus, par les responsables du Centre de Recherche et de Formation pour le Développement économique et social (CREFDES) de la Faculté de Sciences économiques et de Gestion (FASEG) de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) dans le cadre du programme de formation pour l'obtention du Master professionnel de Gestion macroéconomique et administrative. La publication a également vu le jour sur maintes demandes des étudiants et élèves des écoles de formation, mais aussi des journalistes spécialisés sur les questions économiques, membres du COJES, des collègues de l’Inspection générale d’Etat (IGE) et des parlementaires, au sortir des différentes sessions de formation et d’échanges sur le thème des finances publiques. Nous espérons que ce manuel de finances publiques permettra : aux étudiants et élèves, de maîtriser les notions essentielles de finances publiques et de comprendre les mécanismes fondamentaux et les principes essentiels de la politique financière des États ; aux élèves, étudiants et cadres préparant des concours ou passages de grade, de trouver au niveau du précis, les éléments nécessaires pour soutenir leur argumentaire écrit et oral ; aux agents des secteurs public et privé, mais aussi aux intellectuels tout court, de disposer d’un référentiel pouvant aider sur le plan professionnel ou dans le cadre de leurs recherches ; aux décideurs de l’État et de ses démembrements, de trouver à travers l’ouvrage un outil d’aide à la décision leur permettant de définir et de mettre en œuvre une politique de finances publiques dans le contexte des mutations profondes amorcées dans les pays de l'UEMOA. Pendant longtemps, les étudiants des universités recevaient, en finances publiques, des enseignements axés, en grande partie, sur le droit budgétaire (étudiant de sciences juridiques) et sur l’économie des finances publiques (étudiants de sciences économiques). Pendant ce temps, le contenu des modules de finances publiques dispensés aux élèves des écoles de formation mettait essentiellement l’accent sur les procédures d’élaboration, d’exécution et les principes budgétaires ainsi que sur les opérations de trésorerie. Le manuel essaye d’apporter des innovations en revisitant et en passant en revue les différentes théories et instruments permettant, notamment, de comprendre, avant élaboration du budget et exécution des opérations, le bien- fondé, les mécanismes et les conséquences qu’un fait juridique, économique 15 ou social, peut avoir sur le budget, en particulier, et de façon générale, sur les équilibres extérieurs (balance des paiements) et intérieurs (croissance, stabilité des prix, emploi), la compétitivité, etc. Ainsi, l’ouvrage aborde les aspects théoriques et pratiques du domaine des finances publiques et de son environnement, notamment : les fondamentaux en finances publiques (concepts, particularités, instruments, formulations de politiques économiques et financières) sans lesquels les tâches sont exécutées aveuglément, sans discernement et sans jugement ; les procédures et techniques budgétaires dont la compréhension conceptuelle et pragmatique est gage d’efficacité, d’économie et d’efficience ; les règles de la comptabilité publique qui permettent l’exécution et le contrôle, suivant les normes en vigueur ; le fonctionnement du circuit financier public dont la compréhension des méandres, contours, détours et sinuosités, est nécessaire, voire indispensable à tout citoyen. L’alliance entre théorie et pratique, adoptée ici, est d’autant plus importante qu’Albert Einstein, mathématicien, physicien, scientifique (1879 - 1955) disait que : « La théorie, c'est quand on sait tout et que rien ne fonctionne. La pratique, c'est quand tout fonctionne et que personne ne sait pourquoi. » Mais là où notre approche se démarque de Einstein, c’est quand il ajoute : « Si la pratique et la théorie sont réunies, rien ne fonctionne et on ne sait pas pourquoi. » Sur ce point, nous faisons nôtre l’acception de Régis Debray (La Révolution dans la révolution) pour qui : « Entre une pratique sans tête et une théorie sans jambes, il n'y aura jamais à choisir. » Par conséquent, même si l’ouvrage ne saurait être une panacée à tous les cas théoriques et pratiques rencontrés en finances publiques, il s’emploiera à mettre en exergue l’essentiel des concepts et leur mise en œuvre, de sorte que les utilisateurs puissent y trouver les explications de ce qui marche et de ce qui ne marche pas, mais aussi les raisons. En tout état de cause, les dispositions et procédures décrites dans l’ouvrage sont conformes aux directives, lois et règlements en vigueur, notamment : la loi n° 2001-09 du 15 octobre 2001, modifiée, portant loi organique relative aux lois de finances et le décret n°2003-101 du 13 mars 2003 portant Règlement général sur la Comptabilité publique, issus respectivement des anciennes directives n°05/1997/CM/UEMOA et n°06/1997/CM/UEMOA du 16 décembre 1997 ; la loi n°2016-34 du 23 décembre 2016 modifiant la loi n° 2011-15 du 8 juillet 2011 portant loi organique relative aux lois de finances et le décret n°2011-1880 du 24 novembre 2011 portant Règlement général sur la Comptabilité publique, issus respectivement de la transposition, dans le droit 16 interne sénégalais, des nouvelles directives n°06/2009/CM/UEMOA et n°07/2009/CM/UEMOA du 26 juin 2009. Une grande partie des dispositions de ces textes à caractère communautaire et national restent applicables pour une période transitoire et même au-delà pour certaines, notamment celles portant sur la comptabilité patrimoniale. De ce point de vue, le manuel est obligé de décrire ces procédures et dispositions encore en vigueur, jusqu’à la fin de la période transitoire. Il va sans dire que l’ouvrage fera l’objet, le moment venu, d’une réactualisation pour tenir compte des procédures résultant de la nouvelle situation. À ce propos, il convient de préciser que la loi n° 2011-15 du 8 juillet 2011 portant loi organique relative aux lois de finances est entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2016, même si certaines de ses innovations avaient commencé à être appliquées à partir de 2013. Il s’agit, notamment, de l’élaboration du document de programmation budgétaire et économique pluriannuelle (DPBEP), de l’organisation au niveau du Parlement d’un débat annuel d’orientation budgétaire (DOB), de la production de rapports trimestriels sur l’exécution du budget ainsi que de l’élaboration, pour chaque ministère, d’un document de programmation pluriannuelle des dépenses (DPPD).Ainsi, conformément aux dispositions transitoires de la loi organique n° 2011-15, devaient être effectives, en principe, à compter du 1er janvier 2017, les dernières grandes innovations de la LOLF, à savoir le budget programme et la déconcentration de l’ordonnancement. Cependant, les pays de l’UEMOA n’étant pas tous prêts pour une application simultanée de la réforme des finances publiques, est intervenue la loi organique n°2016-34 du 23 décembre 2016 modifiant la loi organique n°2011-15 du 08 juillet relative aux lois de finances aux motifs suivants : Par ailleurs, à compter du 1er janvier 2017 et à titre provisoire, le ministre chargé des Finances peut assurer la fonction d’ordonnateur principal de tout ou partie des crédits d’un ministère ou d’une institution constitutionnelle, lorsque les conditions techniques ne permettent pas à la structure concernée d’assumer, sans risque significatif, cette fonction. ; Toutefois, les ministères peuvent disposer d’une période complémentaire d’adaptation, sans pouvoir excéder la période couverte par leur document de programmation pluriannuelle des dépenses de la même année.. Il est également important de préciser que cette réforme nécessite des préalables, comme précisé dans le rapport de présentation de la loi organique n°2016-34 : « … les évaluations les plus récentes démontrent que beaucoup de structures administratives n’ont pas encore atteint le niveau nécessaire, au plan technique comme sur le plan des ressources de toute nature, pour gérer sans risque majeur la fonction budgétaire telle qu’envisagée par la nouvelle LOLF, 17 force étant de reconnaître que ladite fonction n’est pas exempte de sophistication et de complexité. ». D’ailleurs, même la France qui a adopté cette réforme de la LOLF en 2001, a dû se préparer pendant quatre années pour passer à son application. En effet, la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) de la France, promulguée le 1er août 2001, a institué de nouvelles règles d’élaboration et d’exécution du budget de l’État. Elle a introduit, notamment, une démarche de performance pour améliorer l’efficacité des politiques publiques qui permet de faire passer l’État, d’une logique de moyens à une logique de résultats. Ainsi, après plus de quatre années de travaux pour sa mise en œuvre pratique, la loi est entrée pleinement en application le 1erjanvier 2006. La loi de finances pour 2006, préparée à l’automne 2005, a été la première loi de finances annuelle à être intégralement préparée, adoptée et exécutée selon le nouveau cadre budgétaire. Les dates clés de la réforme en France sont répertoriées ainsi qu’il suit : 1eraoût 2001 : promulgation de la LOLF 17 juin 2002 : création d’un ministère délégué au Budget et à la Réforme budgétaire ; 21 janvier 2004 : présentation au Parlement de la première maquette du budget selon les principes de la LOLF avec une année d’avance sur le plan initial ; 2 juin 2005 : rattachement du ministère de la Réforme de l’État à celui du Budget ; 5 juillet 2005 : présentation au Parlement du projet envisagé pour le budget 2006 ; 12 juillet 2005 : promulgation de la loi organique modifiant la LOLF 1er octobre 2005 : publication des premiers projets annuels de performances (PAP) ; 1er janvier 2006 : entrée en vigueur du premier budget voté selon les principes de la LOLF ; 29 mai 2007 : premier exercice de certification des comptes de l’État par la Cour des comptes ; 1er juin 2007 : publication des premiers rapports annuels de performances (RAP) ; 23 juillet 2008 : révision constitutionnelle consacrant les lois de programmation des finances publiques (art. 34 de la Constitution) ; 9 février 2009 : première loi de programmation des finances publiques. Outre l’introduction portant sur une présentation générale des finances publiques, l’ouvrage est composé de quatre parties : - Titre I : Fondamentaux et caractéristiques des finances publiques ; - Titre II : Élaboration du budget de l'État ; - Titre III : Exécution et contrôle du budget de l'État ; - Titre IV : Fonctionnement du circuit financier public. 18 INTRODUCTION PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES FINANCES PUBLIQUES Les finances publiques constituent une discipline particulière à faciès multiples, évoluant dans l’espace et dans le temps, avec un champ d'application bien déterminé. I.- DÉFINITION ET ÉVOLUTION DU CONCEPT DE FINANCES PUBLIQUES Les finances publiques désignent l'étude des règles et des opérations relatives aux deniers publics. Selon le critère organique, les finances publiques peuvent aussi être présentées comme l’ensemble des règles gouvernant les finances de l’État, des collectivités locales, des organismes de sécurité sociale, des établissements publics et de toutes autres personnes morales de droit public. Elles se présentent comme l'étude des aspects juridiques et économiques des recettes et des dépenses des collectivités publiques (État, Collectivités locales)1. Les finances publiques constituent un vaste champ situé à la croisée du droit fiscal, du droit constitutionnel et de la comptabilité publique. L’enseignement des finances publiques et la manière dont cette discipline est appréhendée ont évolué suivant plusieurs étapes. - La première étape est fondée sur une analyse en termes de législation financière. Au XIXème et au début du XXème siècle, les finances publiques étaient uniquement considérées sous leur aspect juridique. C’est une conception qui va prédominer jusqu’aux années 1950. - La deuxième étape est fondée sur une approche basée sur l’économie financière publique. Elle est apparue à partir des années 1 Raymond Muzellec, « Finances publiques », Éditions Sirey, Collection Notions essentielles, septembre 2000. 19 1950, lorsque l’État a été obligé d’intervenir de façon massive dans la vie économique. - La troisième étape est caractérisée par une approche suivant l’optique de la gestion financière publique. Le souci de mieux gérer le secteur public est apparu au début des années 1980. La crise financière de l’État a conduit à rechercher de nouvelles manières de gérer le secteur public. C’est à partir de ce moment que commence l’adaptation des méthodes de gestion de l’entreprise à celles de la gestion publique. De nos jours, les finances publiques occupent une place, de plus en plus importante dans les problèmes contemporains. Elles constituent une préoccupation centrale, aussi bien des décideurs et des gouvernants, que des chercheurs et des citoyens des pays organisés. Une des raisons de ce regain d’intérêt s’explique par l’impact économique et social des opérations financières des administrations publiques, singulièrement depuis l’avènement des politiques uniformes ou harmonisées, mises en œuvre à la suite des regroupements et expériences d’intégration des États, notamment au sein de l’Union européenne, de l’Union économique et monétaire ouest-africaine, etc. II.- CHAMPS D'APPLICATION DES FINANCES PUBLIQUES Le champ d’application des finances publiques peut être circonscrit suivant plusieurs approches. 1.- Approche en termes de branches La science des finances publiques était devenue, dans les anciennes Facultés de Droit, l’une des matières les moins privilégiées, aussi bien par les étudiants que par les enseignants. Toutefois, au début des années 70, une série d’études spécialisées et de constats laissaient déjà prévoir un renouveau, souhaité par beaucoup, si l’obstacle constitué par le manque ou l’insuffisance de bons manuels de base était levé. L’un des acteurs ayant grandement contribué à l’inversion de cette tendance de désintéressement de l’enseignement de la discipline des finances publiques, a été, sans conteste, le Professeur Pierre LALUMIERE qui, dès 1971, mettait à la disposition du public, un précis intitulé « Finances publiques 2». 2 Pierre LALUMIERE, « Finances publiques », Paris, paru le 1/1/1973, collection U, Ed.A. Colin 20 L’originalité de l’ouvrage de Pierre LALUMIERE apparaît essentielle pour plusieurs raisons, notamment à travers l’approche sociologique qui lui permet de donner une vue scientifique des phénomènes financiers à travers l’étude des décisions et de leurs moyens d’exécution. Ceux-ci permettent aux gouvernants d’assurer la répartition entre les groupes sociaux des charges publiques résultant de la gestion administrative et du développement économique et social de la nation (approche sociologique). Si dans tous les pays coexistent un secteur public et un secteur privé, les finances publiques constituent l’expression de l’intervention de l’État dans la vie économique et sociale par le biais du Budget qui est défini schématiquement comme l’ensemble des recettes et des dépenses de l’État, inscrites suivant des principes budgétaires pour une année, et exécutées conformément à des règles propres (approche économique). Mais si dans le langage courant les finances publiques sont souvent assimilées à l’ensemble des ressources pécuniaires de l’État (approche littéraire), on peut aussi les appréhender comme une discipline juridique comportant de nombreux aspects (politique, économique, social) et ayant pour objet l’étude des règles et procédures relatives aux opérations de recettes et de dépenses d’une collectivité publique (approche juridique). En d’autres termes, les finances publiques ont pour objet : - l’étude des problèmes financiers concernant les collectivités publiques ; - l’étude des mécanismes qui s’y rapportent ; - et l’étude des règles juridiques qui leur sont appliquées. Les finances publiques relèvent des sciences sociales et ont pour objet l'étude du phénomène financier public dans sa globalité : ressources, charges, trésorerie, procédures budgétaires et comptables, politique budgétaire, etc., et dont les principaux protagonistes sont les États et leurs démembrements. Sont ainsi appréhendées dans le champ des finances publiques, l’ensemble ou l’essentiel des opérations de recette, de dépense ou de trésorerie des États (institutions et administrations), des collectivités territoriales, des entreprises publiques (établissements à caractère industriel et commercial, sociétés nationales, sociétés à participation publique majoritaire), des autres établissements publics (à caractère 21 administratif, professionnel, scientifique et technique, de santé), les organismes sociaux (de prévoyance et de retraite) et tous les autres organismes assimilés (agences, autorités, Fonds, Observatoires…) soumis aux règles de la comptabilité publique ou recevant un appui de la puissance publique (approche administrative ou dominante). 2.- Approche en termes de secteurs et composantes Le champ des finances publiques ne couvre pas uniquement le budget de l’État, mais l’ensemble des administrations publiques, qui s’organisent en quatre secteurs: l’État, les administrations publiques locales, les administrations de sécurité sociale et les organismes divers d’administration centrale composés essentiellement des établissements publics et des agences. Il est généralement défini à partir de quatre composantes : - les dépenses ; - les recettes ; - le solde, constitué de la différence entre les recettes et les dépenses ; on utilise de manière équivalente le terme de déficit, lorsque la différence entre les dépenses et les recettes génère un solde négatif ; - la dette, résultant du financement des déficits publics accumulés, actuels et passés. La dette de l'année est, en effet, égale à la dette de l'année précédente augmentée du déficit de l'année. La relation entre ces quatre composantes des finances publiques est schématisée dans le tableau ci-après : DÉPENSES - RECETTES = ------------------- DÉFICIT + DÉTTE DE L’ANNÉE PRECEDENTE = ------------------ DÉTTE DE L’ANNEE Relation entre les quatre éléments fondamentaux des finances publiques 22 TITRE I LES FONDAMENTAUX ET CARACTÉRISTIQUES DES FINANCES PUBLIQUES Le concept défini et son champ d’application délimité, l’ouvrage se veut didactique en commençant, tout d’abord, à faire l’économie politique des finances. L'expression « économie politique » revêt une connotation particulière dans la culture et la pensée économique anglo-saxonnes. Pour les économistes de langue anglaise, l'expression présente deux acceptions: - une branche de la science économique qui décrit et analyse l'activité économique par rapport aux données politiques, qui a pour objet d'expliquer le fonctionnement et de trouver les lois qui régissent l'activité économique par rapport à l'action des pouvoirs publics. À ce titre, elle renvoie à la Politique économique ; - une branche de la science économique qui applique à un système politique donné les outils de l'analyse économique permettant d'expliquer le choix des politiques publiques en fonction des besoins des agents économiques (ménages, entreprises, etc.) et des objectifs propres des dirigeants. Ce volet fait référence à la Théorie du choix public. Cette première partie analysant les fondamentaux en finances publiques permettra de maitriser les concepts et d’avoir un pré- acquis de compréhension de la logique des articulations entre la programmation, l’élaboration, l’exécution, la reddition des comptes et la gestion courante portant sur les finances publiques. Ainsi, les finances publiques apparaissent comme une science pluridisciplinaire (1), présentent une certaine originalité par rapport aux finances privées (2) et occupent une place de plus en plus croissante dans les systèmes économiques (3). 23 CHAPITRE I LA PLURIDISCIPLINARITÉ DES FINANCES PUBLIQUES Les finances publiques constituent une discipline transversale de l’économie, de l’administration, du droit et de la sociologie. Cette pluridisciplinarité des finances publiques s’apprécie tant par les relations avec les autres disciplines que par les phénomènes appréhendés. SECTION 1 LA PLACE DES FINANCES PUBLIQUES DANS LES AUTRES DISCIPLINES PARAGRAPHE I LES FINANCES PUBLIQUES DANS L’ÉCONOMIE L’économie s’est aujourd’hui profondément immiscée dans les procédures et règles financières publiques. Pour en avoir une opinion plus éclairée, il suffit de remarquer que : - les finances publiques sont le reflet de la vie économique, en ce sens que les opérations financières sont intimement liées à la vie financière et économique. Les recettes publiques reflètent la situation économique du pays, notamment la structure et le montant des recettes fiscales ainsi que la santé économique du pays ; - les finances publiques sont également un instrument d’action économique. Pour s’en convaincre, il suffit de revisiter la théorie keynésienne, où les dépenses publiques constituent le moteur de l’économie. Au plan communautaire, le traité de l’UEMOA et le pacte de convergence, de stabilité et de croissance de l’UEMOA, imposent une discipline financière renforcée aux États membres, en termes de ratios de premier et de second rang, liés au solde budgétaire, à l’accumulation d’arriérés, à la pression fiscale, à la masse salariale, à l’endettement, etc. 25 Au plan national, la loi organique relative aux lois de finances pose des exigences de transparence, d’efficacité dans les comptes, mais aussi de contrôle de l’utilisation des deniers publics. PARAGRAPHE II LES FINANCES PUBLIQUES DANS L’ADMINISTRATION S’il est admis que l’administration de chaque personne publique ou entité autonome gère ses finances, il est établi que l’État unitaire conserve le contrôle de cette matière éminemment régalienne, notamment en matière d’assiette et de recouvrement des recettes fiscales, y compris celle des collectivités territoriales. Sur ce plan, les tâches sont bien réparties entre les différentes autorités financières publiques que sont : - Les autorités financières politiques composées : du Gouvernement qui élabore et exécute le budget de l’État ; du Parlement qui vote le budget et contrôle son exécution avec l’appui de la Cour des comptes ; de la Cour des comptes qui juge les comptes des comptables publics et vérifie l’exactitude des comptes de l’État. - Les autorités financières administratives composées : du ministre chargé des Finances qui, disposant d’un pouvoir d’expertise mais aussi d’intervention dans le domaine financier et fiscal, est chargé d’exécuter les opérations de recettes et de dépense de l’État, et d’assurer l’équilibre du budget ; de la Direction chargée du Budget qui coordonne l’élaboration du budget de l’État et détermine, avec chaque administration, le montant des crédits dont elle a besoin ; de la Direction générale de la Comptabilité publique et du Trésor qui exécute les opérations de recettes et de dépenses, gère tous les circuits financiers économiques de l’État, émet les emprunts et assure la gestion quotidienne de la trésorerie et des deniers publics ; de la Direction générale des Impôts et des Domaines et de la Direction générale des Douanes chargées d’asseoir et de liquider les droits et recettes fiscales perçus au cordon douanier et à l’intérieur des frontières. 26 PARAGRAPHE III LES FINANCES PUBLIQUES DANS LE DROIT Le droit des finances publiques s’est progressivement élaboré au fil du temps pour arriver, aujourd’hui, à une situation où les textes les régissant occupent une place importante dans la hiérarchie des normes et des sources du droit. C’est ainsi que la Constitution : - définit le domaine des lois de finances qui déterminent les ressources et les charges de l’État dans les conditions et sous les réserves prévues par la loi organique ; - encadre la procédure législative en matière de loi de finances ; - autorise le droit d’amendement dont elle établit une procédure législative spéciale. SECTION 2 LES FINANCES PUBLIQUES ET LES PHÉNOMÈNES Le droit des finances publiques est récemment devenu la 4ème branche du droit public avec le droit constitutionnel, le droit administratif et le droit international. Elle constitue "une science carrefour" en raison de la diversité des phénomènes qu'elle appréhende : (les phénomènes constitutionnels, les phénomènes politiques, les phénomènes économiques, les phénomènes sociaux). PARAGRAPHE I LES PHÉNOMÈNES CONSTITUTIONNELS Conformément à l'article 68 de la Constitution du Sénégal : « Le Parlement vote les projets de lois de finances dans les conditions prévues par une loi organique. Le projet de loi de finances de l’année, qui comprend notamment le budget, est déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, au plus tard le jour de l’ouverture de la session ordinaire unique. Le Parlement dispose de soixante jours au plus pour voter les projets de lois de finances… » Par le contrôle du budget, le Parlement exerce un contrôle sur le Gouvernement. En effet « le débat budgétaire est l'instance privilégiée 27 où le Parlement peut exercer la plénitude de son contrôle sur l'action du Gouvernement et sur les administrations de l'État. »3 PARAGRAPHE II LES PHÉNOMÈNES POLITIQUES Les choix du Gouvernement et les impacts des groupes de pression se ressentent parfaitement dans les choix budgétaires. En effet, c'est dans le budget que l'on peut déceler les choix du pouvoir exécutif. Quel type de dépenses est jugé prioritaire ? Quelle est la part consacrée par exemple à l'éducation et celle dédiée à la prise en charge de la demande sociale?... En somme, le budget est l'indicateur par excellence des intentions de l'équipe au pouvoir. PARAGRAPHE III LES PHÉNOMÈNES ÉCONOMIQUES Interaction évidente, le budget est élaboré pour répondre aux besoins de l’économie et celle-ci réagit en conséquence. L'économie conditionne les opérations de recettes et de dépenses de l'État et vice- versa. D'ailleurs, c’est l’étude de cette interaction entre l’économie et les finances qui a donné naissance à une nouvelle branche appelée Économie financière. Aujourd'hui, nul ne songe à négliger les aspects économiques des finances publiques. PARAGRAPHE IV LES PHÉNOMÈNES SOCIAUX Les budgets, qui proviennent eux-mêmes de certains rapports de forces, influencent les mouvements sociaux. En effet, l'histoire montre que le changement dans les rapports de force entre les différents groupes sociaux est le plus souvent à la base de modifications des règles budgétaires, du mode d'affectation des ressources budgétaires, du système fiscal ou du mode de calcul des impôts. 3 M. Poher ancien Président du Sénat Français - allocution de clôture du 20 décembre 1974 (Raymond Muzellec, Finances publiques, op.cit. page 1) 28 CHAPITRE II L’ORIGINALITÉ DES FINANCES PUBLIQUES La particularité des finances publiques viendrait de ce qu'elles soient, dans plusieurs milieux, nettement distinguées des finances privées. Or l’examen approfondi et l’analyse comparative montrent que la délimitation entre les deux concepts n'est pas si aisée. SECTION 1 DIFFÉRENCE ENTRE FINANCES PUBLIQUES ET FINANCES PRIVÉES « Finances publiques »et « finances privées » diffèrent aussi bien au niveau des objectifs que des moyens et conditions d’action : PARAGRAPHE I AU PLAN DES OBJECTIFS D'ACTION L'État assure des fonctions d'intérêt général et n'a pas pour vocation, contrairement à l'entreprise privée, à tirer profit de son activité. Les biens produits par l’administration sont généralement des biens non marchands (éducation, santé, sécurité, état civil, etc.), le prix à payer pour certaines opérations ne constituant que le remboursement d’une partie des frais supportés. Toutefois, dans certaines conditions, l’État est obligé de suppléer un secteur privé carentiel ou inexistant. PARAGRAPHE II AU PLAN DES MOYENS D'ACTION Le volume des recettes ou des ressources d’un État est généralement plus élevé que celui d’une entreprise ou d’un particulier de cet État. Un État a donc plus de moyens qu’une entreprise ou un simple particulier. D'autre part, l'État est le principal employeur dans un pays, notamment dans un pays en développement. 29 On peut donc dire qu'il y a une forte disproportion au niveau des moyens financiers. Il en est de même au niveau des moyens juridiques. En effet, alors que les opérations financières des personnes privées (physiques ou morales) se fondent sur le contrat, l'État quant à lui, met en œuvre des moyens de contrainte et d'autorité, à travers notamment ses prérogatives exorbitantes de droit comme le pouvoir de lever l'impôt et d’autres prélèvements obligatoires. PARAGRAPHE III AU PLAN DES CONDITIONS D'ACTION Contrairement aux personnes privées, l'État n'est pas strictement limité dans ses ressources. Il évalue d'abord ses dépenses, dont certaines sont inévitables (justice, défense, police..), et détermine, ensuite, les moyens de les couvrir. Il peut même dépenser plus qu'il ne recouvre et recourir à la contrainte (prélèvements obligatoires, emprunts obligatoires ou forcés, etc.). Par ailleurs, l'État est enfermé dans un cadre comptable strict et des règles parfois contraignantes (séparation des fonctions d'ordonnateurs et de comptables, procédures de passation des marchés, etc.). Enfin, les responsabilités de la puissance publique sont plus étendues mais plus diffuses, car il n'y a pas de sanction précise à sa gestion comme la faillite dans le secteur privé. Il n’est pratiquement pas possible qu'un État moderne soit à la banqueroute. En tant que personne morale de droit public, mais à caractère très spécial, l’État n’est pas une entreprise où : - les associés souscrivent au capital et reçoivent des dividendes, même si les citoyens peuvent bénéficier des retombées économiques, la prise en charge des besoins (éducation, santé, etc.) et l’offre de biens collectifs, chacun en fonction de sa situation et de sa position ; - le règlement judiciaire, la liquidation des biens et les voies d’exécution, au sens juridique, lui sont applicables ; - l’activité marchande et la rentabilité financière ne constituent pas son objet principal, même si l’on sait que certaines opérations commerciales peuvent être les siennes et que les notions de rentabilité économique, d’efficacité, d’efficience et d’économie ne sont plus étrangères à un État de type moderne. 30 Malgré les différences entre "finances publiques" et "finances privées, des ressemblances ne sont pas exclues entre les deux domaines. SECTION 2 RESSEMBLANCES ENTRE FINANCES PUBLIQUES ET FINANCES PRIVÉES Il existe des convergences entre les finances publiques et les finances privées aussi bien au niveau des objectifs, des moyens d'action que du contrôle : PARAGRAPHE I AU NIVEAU DES OBJECTIFS Il faut noter que, de plus en plus, les collectivités publiques mettent au centre de leurs préoccupations les problèmes de coût et de rendement. Ainsi, « à défaut de dépenser plus, dépenser mieux » qui est une pratique et un comportement qui participent à la rationalisation des choix budgétaires "RCB". PARAGRAPHE II AU NIVEAU DES MOYENS D’ACTION La politique financière, depuis quelques années, s'inspire dans la plupart des États, davantage du néolibéralisme avec une politique de désengagement de l'État, une harmonisation des conditions de concurrence avec les banques, etc. Deux exemples peuvent être donnés pour illustrer cette similitude : - les taux d'intérêt applicables par les institutions financières dans l'UEMOA, avec des fourchettes ajustées, de temps à autre, pour attirer l'épargne, sont similaires aux mécanismes utilisés par les États membres de l’UEMOA ; - les placements sur les marchés financier et monétaire ou interbancaire obéissent aux mêmes règles et mécanismes : bons du Trésor (pour le Trésor), bons de caisse (pour les banques), livrets d'épargne (pour les caisses d'épargne), billets de trésorerie (pour les entreprises). 31 PARAGRAPHE III AU PLAN DU CONTRÔLE La nature du contrôle évolue : au contrôle de régularité anciennement exercé par l'administration vient s'ajouter un contrôle d'opportunité axé plus sur l'efficacité. Il y a enfin l'audit utilisé aujourd'hui par les administrations publiques comme moyen de contrôle approfondi. Enfin, l’administration utilise l’évaluation économique et financière, ex ante et ex post, dans des opérations de financement des projets et programmes. SECTION 3 INTERRELATIONS ENTRE LE SECTEUR DES FINANCES PUBLIQUES ET LES AUTRES SECTEURS DE L’ÉCONOMIE La Comptabilité publique, caractérisée par la tenue des comptes et des opérations de l’État par des administrations financières, notamment le Trésor, à des fins de contrôle et de responsabilité financière, se distingue de deux autres systèmes de données, à savoir : Les Statistiques de finances publiques : qui ont pour objet de faciliter l’analyse des activités des administrations publiques ainsi que leur influence sur l’ensemble de l’économie et sur des secteurs particuliers ; la Comptabilité nationale : qui reprend les données relatives à l’activité des administrations sous une forme commune à tous les secteurs de façon à mesurer la production, le revenu, la consommation, l’accumulation de capital et les opérations de financement de chacun d’eux, à les agréger et à retracer les opérations intersectorielles. Chacun de ces trois systèmes de données (Statistiques de finances publiques, Système de Comptabilité publique et Système de Comptabilité nationale) répond à des besoins particuliers. Chaque système est également organisé en fonction de son objet : - le contrôle administratif, par le Système de Comptabilité publique (SCP); 32 - l’analyse économique des opérations des Administrations publiques, par le Système de Statistiques de finances publiques (SFP); - l’analyse intégrée de l’économie, dans son ensemble, par le Système de Comptabilité nationale (SCN). Cependant, ces systèmes sont interdépendants. En effet, les Statistiques de finances publiques se fondent sur la Comptabilité publique et fournissent aux Comptes nationaux les informations nécessaires à l’établissement des données sur les administrations publiques. En d’autres termes, les SFP tirent leurs données de la comptabilité publique et fournissent les leurs au SCN. Cette interdépendance s’étend à trois autres systèmes constitués : du Secteur réel (revenu, consommation, investissement, importation, exportation, etc.) : caractérisé par les transactions économiques réelles d’une économie, avec comme principaux acteurs les ménages, les sociétés non financières, les sociétés financières, les administrations publiques et le reste du monde ; du Secteur monétaire et financier (masse monétaire, crédit bancaire, avoirs extérieurs nets, etc.), qui est le secteur de l’économie nationale chargé de l’intermédiation des ressources financières ; du Secteur extérieur ou "Reste du monde" (importations, exportations, revenus, balance commerciale, balance des paiements, etc.) : regroupant les transactions économiques, les créances financières et les engagements financiers des non-résidents d’une économie. Le tableau des interrelations ci-après, illustrant un cas pratique avec les données fictives d’un pays X, met en exergue les interdépendances du système des Statistiques de finances publiques (incluant les opérations de la Comptabilité publique) avec les systèmes, formant avec eux les secteurs permettant de vérifier le cadrage macroéconomique. Le Secteur privé est constitué ici comme un secteur résiduel, après détermination du Secteur public. 33 Tableau 1 : Les interrelations entre secteurs SECTEUR SECTEUR SECTEUR SECTEUR SECTEUR REEL PUBLIC PRIVE MONÉTAIRE EXTÉRIEUR Comptes SCN SFP (TOFE) BDP monétaires REVENU -20190 6058 14132 0 CONSOMMATION 14932 -5077 -9855 0 I 5761 -1576 -4185 0 X 8141 -8141 0 M -8497 8497 0 REVENU -973 973 0 TRANSFERT 826 -826 0 SOLDE 0 -595 92 0 503 0 BESOIN FINANCEMENT 595 -92 0 -503 0 FINANCEMENT 595 -92 0 -503 0 FINANCEMENTS EXTERIEURS 501 282 -280 -503 0 DONS 43 19.6 -62.6 0 INVESTISSEMENTS DIRECT 249.2 -249.2 0 EMPRUNT 458 17 0 -475 0 - TIRAGE 1545 -1545 0 - AMORTISSEMENT -1070 1070 0 AUTRES 0 -3.8 79 -75.2 0 AEN 0 -359 359 0 FINANCEMENTS INTERIEURS 94 -374 280 0 PRÊTS NETS -58 58 0 - CRÉDIT BANCAIRE -122 468 -346 0 - CREDIT NON BANCAIRE 274 -274 0 - MASSE MONÉTAIRE -575 575 0 AUTRES 0 -51 51 0 0 0 0 0 0 Avec : - AEN : les avoirs extérieurs nets ; - BDP : la balance des paiements ; - TOFE : le tableau des opérations financières de l’État ; - C : la consommation ; - I : l’investissement ; - X : les exportations ; - M : les importations. Les Calculs résiduels entre secteurs sont opérés par le signe "moins" (-) ou "plus" (+) selon la provenance/destination et par déduction (secteur privé par rapport au secteur public). Ainsi : - un décaissement de -8497 pour importation équivaut à un encaissement de + 8497 par l’extérieur ; - pour Y,C,I : PRIVE = - (REEL + GOUVERNEMENT) ; - pour X, M, Tirage, Revenu = - (EXTERIEUR) ; - pour le FINANCEMENT EXT. : PRIVE = - (GOUVERN. + MONNAIE + EXT.) ; - pour le FINANC. INT. : PRIVE = - (GOUVERN. + MONNAIE). Les principaux ouvrages de référence pour l’établissement des données du tableau sont : - le Manuel de statistiques monétaires et financières du FMI ; - le Manuel de statistiques de finances publiques du FMI, version 1986 ; - le Manuel de statistiques de la balance des paiements du FMI ; - le Manuel de comptabilité nationale du FMI. L’obtention de la valeur nulle (zéro) comme somme, aussi bien en horizontal qu’en vertical, reflète un équilibre parfait du cadrage entre secteurs. Cela démontre, entre autres, que tous les besoins de financement trouvent leurs sources de financement. 36 CHAPITRE III LE RÔLE ET LA PLACE DES FINANCES PUBLIQUES DANS LES SYSTÈMES ÉCONOMIQUES Les collectivités publiques, dans le cadre de la gestion des finances publiques, effectuent des opérations déterminées qui ont une incidence directe ou indirecte sur le fonctionnement des systèmes économiques. Dès lors, le rôle et la place des finances publiques dans les systèmes économiques sont analysés, tant au niveau des opérations et tâches des collectivités publiques, que par rapport à la place des finances publiques dans les systèmes économiques. SECTION 1 OPÉRATIONS ET TÂCHES DES COLLECTIVITÉS PUBLIQUES Les collectivités publiques sont au service du public pour le compte duquel elles effectuent des opérations destinées à des tâches bien précises. PARAGRAPHE I LES DIFFÉRENTES TÂCHES DES COLLECTIVITÉS PUBLIQUES Il ressort de l’examen de la place des finances publiques dans la vie économique et sociale en général, qu’une bonne partie des opérations financières d’un pays s’opèrent pas le biais de l’activité économique des collectivités publiques et en particulier par celle de l’État et ses démembrements : son administration centrale, ses entreprises publiques, son Trésor public surtout. En effet, dans le cadre de l’exécution de ces diverses tâches, l’État doit exécuter des dépenses : - pour l’achat de biens : matériel, fourniture…; - pour le paiement de services : entretien, traitements et salaires, service de la dette (paiement des intérêts et remboursements du principal ou amortissement) ; 37 - pour financer des dons, accorder des prêts et subventions, faire des legs… PARAGRAPHE II LES OPÉRATIONS LIÉES À L’EXÉCUTION DES TÂCHES Ces opérations requièrent des fonds prélevés sur l’économie générale du pays avant d’y être reversés après avoir transité par le Trésor public sous forme de circuit économique. I.- Au plan des recettes Les prélèvements au profit du Trésor public sont essentiellement constitués des impôts et taxes perçus sur les revenus des personnes physiques et morales sur la base d’opérations : - de production ou de commerce (IR, IS) ; - de consommation (TVA) ; - de mutation de patrimoine (enregistrement) ; - de circulation de biens et services ou d’importation (droits de porte) ; - d’exploitation du patrimoine (revenu du domaine forestier, minier, maritime, immobilier) ; - diverses (droit de timbre, intérêts reçus, redevances et participations, stabilisation pétrolière, péréquation sucre, prélèvement riz…). II.- Au plan des dépenses Les traitements et salaires payés par l’État constituent une part importante des dépenses publiques et par rapport aux recettes (plus de 50% dans la plupart des pays en voie de développement). Ces deux ratios (masse salariale/recette fiscale et masse salariale/dépense totale du budget) sont des critères de performances très prisés dans l’analyse de la structure d’une économie : le critère de convergence UEMOA (masse salariale/recette fiscale ≤35 %) est imposé aux États membres dans le cadre de la surveillance multilatérale ; le critère (masse salariale/dépense totale du budget ≤ 40%).) est fixé, par des circulaires, aux collectivités locales comme critère d’appréciation de la capacité de recrutement d’une collectivité locale 38 D’autre part, les dépenses de fonctionnement (matériels, fournitures, entretien, réparation, subventions, transferts) ont un effet multiplicateur sur l’économie. Par ailleurs, les dépenses d’investissements jouent un rôle moteur dans la détermination du PIB et constituent par conséquent un facteur essentiel de la croissance économique. Cependant, ces dépenses d’investissement induisent aussi des charges récurrentes supplémentaires (entretien, fonctionnement) qui sont souvent importantes mais malheureusement perdues de vue à l’occasion des programmations budgétaires). Enfin, les relations entre le Trésor public (au sens de l’État dans ses attributions financières), le système bancaire (la Banque d’émission et les banques commerciales), de par le contrôle de change et les différents contrôles sur les agrégats macro-financiers, représentent un segment important de l’économie au sens large du terme. SECTION 2 PLACE DES FINANCES PUBLIQUES DANS LES SYSTÈMES ÉCONOMIQUES Il y a une interaction entre les finances publiques et le système économique d’une nation. En effet, l’activité financière des collectivités publiques est susceptible d’être mise au service du développement à travers la politique budgétaire. La politique budgétaire se traduit, entre autres, par l'ensemble des mesures et des modifications portant sur l'imposition ou les dépenses publiques. Elle consiste à utiliser certains instruments budgétaires (dépenses publiques, endettement public, prélèvements fiscaux) pour influer sur la conjoncture économique. La politique monétaire (mise en œuvre par la Banque centrale délégataire de l’État ou des États) et la politique budgétaire (mise en œuvre par l’État lui-même) sont les deux mamelles de la politique conjoncturelle. Les deux composantes de la politique budgétaire sont : les dépenses publiques qui sont un facteur important dans la promotion du développement : dépenses sociales (niveau des minima sociaux), aides aux entreprises, investissements en infrastructures publiques, aides à la recherche, exonérations fiscales, hausse des 39 salaires des fonctionnaires, hausse de l'emploi public, emplois aidés, etc. les recettes dont les actions s’exercent sur l’activité économique, tant de par leur volume que par leur composition : niveau des taux d'imposition et des bases fiscales des différents impôts, niveau global de l'imposition dans le PIB, emprunts, recettes exceptionnelles (sur gisements miniers, ressources halieutiques, portefeuille d'actifs publics...), etc. Le budget est un instrument de politique économique à court terme, au même titre que le Taux de change et le taux d’intérêt. Dans le cadre des politiques économiques de court terme (ou politiques de stabilisation), le budget est utilisé pour la lutte contre l’inflation, la réduction du déficit de la balance des paiements et la relance de la production. Le budget est, en somme, un instrument pour le rétablissement ou le maintien des équilibres internes (croissance, stabilité des prix, emploi) et externes (balance des paiements). Une bonne compréhension des relations qui existent entre les finances publiques et les autres secteurs économiques, est absolument nécessaire pour mesurer toutes les conséquences d’une situation budgétaire sur le reste de l’économie. En effet, il ne sert à rien de former les élèves des écoles d’administration et étudiants des universités, mais aussi de renforcer les capacités des fonctionnaires et des parlementaires sur des notions classiques et répétitives (élaboration, exécution, contrôle, principes budgétaires), sans leur faire comprendre, auparavant, les mécanismes et relations que les finances publiques entretiennent avec les autres secteurs, notamment les effets d’un déficit budgétaire sur les différents agrégats macro-économiques et macro-financiers. Le lien entre le budget et ces agrégats macro-économiques et macro- financiers est analysé ci-après, de façon très simplifiée, dans le juste objectif de faire comprendre. PARAGRAPHE I DÉFICIT BUDGÉTAIRE ET INFLATION Le déficit budgétaire est lié à l’inflation par deux relations : directe et indirecte. 40 I.- Déficit budgétaire et inflation : une relation indirecte Le déficit budgétaire agit sur les prix car l’excès de demande par rapport à l’offre se traduit plus par une augmentation de prix que par un accroissement de la production en raison de la non-réponse de l’offre à la demande liée à la faiblesse de la capacité productive. Cette relation est illustrée par l’équation suivante dite de Fisher ou théorie quantitative de la monnaie : MV = PT Où : - M est la masse monétaire ; - V, la vitesse de circulation de la monnaie ; - P, le niveau général des prix ; - T, le revenu réel. En considérant que le déficit budgétaire est financé par émission de monnaie (financement monétaire), les économistes supposent que l’accroissement de l’offre de monnaie (MM), au-delà de ce qui est nécessaire pour effectuer les paiements correspondants à la production, se traduit par une augmentation proportionnelle du niveau général des prix (P), étant considéré que le revenu réel (T) est relativement stable à court terme et que la vitesse de circulation de la monnaie (V) est indépendante de la masse monétaire. Par ailleurs, en cas d’inflation, les unités de production et agents économiques cherchent plus à augmenter leurs prix pour préserver leurs encaisses qu’à relever le niveau de leur production, d’où l’effet négatif de l’inflation sur l’emploi. Une bonne politique consiste donc à réduire le déficit budgétaire pour lutter contre l’inflation et le sous- emploi. II.- Déficit budgétaire et inflation : une relation directe La relation entre le déficit budgétaire et l’inflation apparaît de manière plus directe dans l’équation du déficit budgétaire suivant : Gt – Tt = ∆D + ∆M Avec : - G, représentant les dépenses publiques ; 41 - T, représentant les recettes fiscales ; - D, illustrant l’encours dette publique ; - M, matérialisant la masse monétaire. Le déficit budgétaire (Gt – Tt) est financé par la variation de la dette publique et celle de la masse monétaire (∆D + ∆M). PARAGRAPHE II DÉFICIT BUDGÉTAIRE ET BALANCE DES PAIEMENTS La relation qui existe entre le solde budgétaire et la balance des paiements est donnée par l’identité suivante : In = Sn + Se (1) Où : - In est l’investissement national ; - Sn est l’épargne nationale ; - Se est l’épargne extérieure (emprunts et dons) correspondant au solde de la balance des paiements. En d’autres termes, l’investissement national est financé par l’épargne nationale et les apports en capitaux de l’extérieur. L’équation (1) peut être transformée comme suit en différenciant les épargnes et investissements des secteurs privés et publics : In = Sn +Se Ce qui donne l’équation (2) : -Se = Sn -In Sachant que : - l'épargne nationale est constituée de l'épargne privée (Spv) et de l'épargne publique (Spb) : Sn = (Spv+SPb) ; - l'investissement national est constitué de l'investissement privé (Ipv) et de l'investissement public (Ipb) : In = (Ipv+Ipb), L’équation (2) devient : -Se = (Spv+SPb)- (Ipv+Ipb) ; (3) -Se = (Spv- Ipv)) + (SPb-Ipb) (4) 42 La dernière partie de l’équation (4) c’est-à-dire (S public - I public) correspond au solde budgétaire de l’État. Il résulte de l’identité (4) que toute détérioration du solde budgétaire entraîne une détérioration du solde de la balance des paiements. À court terme, il convient donc de réduire le déficit budgétaire pour ne pas détériorer le solde de la balance des paiements. Cette règle n’est pas en contradiction avec l’approche économique d’équilibre de la balance des paiements par la théorie de l’absorption4. Cette approche part de l’équilibre général en économie ouverte : Y+M=C+I+X Avec : - Y est le Revenu national ; - M représente les Importations ; - C est la Consommation ; - I est l’Investissement ; - X représente les Exportations. Par transposition et permutation des termes, l’équation devient : Y-(C+I)=(X-M). Si l’on considère que (C+I) est l’absorption (A) et que la balance commerciale (X-M) symbolise grosso modo la balance des paiements (BDP), Y- A = BDP BDP = Y-A BDP = Y - A exprimant la variation. Pour améliorer la balance des paiements (BDP), il y a deux possibilités : - soit accroître la Production (Y) ; - soit diminuer les dépenses ou l’absorption (A), principalement les dépenses de fonctionnement, surtout de prestige. 4 M. Makhtar Diouf, Economie politique, volume 2, Nouvelles Éditions africaines, 1979 43 C’est au niveau de ces deux possibilités qu’apparaissent les options ou orientations de la Banque Mondiale (BM) et du Fonds monétaire international (FMI). En effet, là où la BM privilégie la première option en mettant des financements concessionnels (guichet IDA) ou non concessionnels (guichet BIRD), le FMI met l’accent sur la deuxième option consistant à aider les pays à maîtriser, voire diminuer leur absorption, notamment en limitant leurs dépenses à leurs ressources ; d’où l’importance de l’équilibre budgétaire dans les interventions du FMI. PARAGRAPHE III FISCALITÉ ET PRODUCTION L'idée que « trop d'impôt tue l'impôt » est ancienne. En effet, des économistes libéraux anciens avaient, en leur temps, déjà mené une réflexion sur ce phénomène, notamment Adam Smith qui suggérait le phénomène en précisant que « L'impôt peut entraver l'industrie du peuple et le détourner de s'adonner à certaines branches de commerce ou de travail », et surtout Jean-Baptiste Say qui concluait « qu'un impôt exagéré détruit la base sur laquelle il porte ». Mais il revient à l'économiste américain Arthur Laffer, à la fin des années 1970, d'avoir tenté de théoriser ce qu'il nommait « l'allergie fiscale », et de l'avoir popularisée (au point d'être évoquée dans le débat et les choix politiques), à l'aide de la courbe suivante qui porte le nom de Laffer. Recettes fiscales Taux d'imposition 44 En abscisse, il y a le taux d’imposition , et en ordonnée les recettes fiscales. Lorsque le taux d’imposition , alors les taxes fiscales. Lorsque le taux d’imposition appliqué est supérieur au taux d’imposition optimal ( ), le taux d'imposition est dissuasif et les recettes fiscales totales de l'État baissent et sont inférieures à. LAFFER a cherché à mettre en évidence, par une courbe théorique, la liaison entre les taux marginaux d’imposition, les recettes fiscales et la production. Quand le taux d’imposition augmente, on se situe dans une première phase d’accroissement des recettes qui augmentent, cependant, de façon moins accélérée, car on décourage de plus en plus l’utilité de travail. Le sommet de la courbe représente la situation idéale (ou optimum) où les recettes fiscales sont maximisées (T= Tmax) et où le taux d’imposition est le meilleur (t = t*). La partie de droite de la courbe est décroissante car la forte pression fiscale rend inutiles le travail et la production. La faiblesse de la production entraîne, à son tour, une baisse des recettes fiscales ; ce qui peut être préjudiciable à l’équilibre budgétaire. Arthur Betz Laffer (né le 14 août 1940 à Youngstown) est un économiste libéral américain et chef de file de l'école de l'offre ("supply side"). Il est diplômé en Sciences Economique de l'université de Munich, il est aussi diplômé de l'université Stanford où il obtient son doctorat de Sciences économiques en 1972. Arthur Laffer est l'auteur de la courbe portant son nom et qui tente de montrer que « trop d'impôt tue l'impôt ». Arthur Laffer est un ardent défenseur d'une politique de réduction des impôts. Son influence fut importante au cours des années 1980. En effet, dès 1978 il soutint la Proposition 13 visant à une réduction de l'impôt foncier en Californie. Par ailleurs, il influença la politique fiscale de Ronald Reagan en impulsant des réductions d'impôts massives. Cette influence ne se limite pas aux seuls États- Unis puisque de telles politiques de réduction des impôts voient le jour en Europe. C'est le cas en Grande-Bretagne à partir de 1979 sous le gouvernement de Margaret Thatcher et jusqu'en 1997 sous le gouvernement de John Major. Par ailleurs, le gouvernement d'Helmut Kohl s'applique aux mêmes diminutions à partir de 1982. Enfin, en France, après l'échec de la politique de relance de Pierre 45 Mauroy en 1982, une partie des gouvernements qui se succèdent mettent en place de telles politiques. Par exemple, l'impôt sur les sociétés passe de 50 % à 33,33 % en 1987. Le taux de l'IRPP (Impôt sur le Revenu des Personnes physiques) diminue lui aussi avec certaines réformes fiscales dont la dernière eut lieu en 2007 avec le bouclier fiscal qui limite la pression fiscale à 50 % des revenus d'un individu. Informations disponibles en ligne sur https://fr.wikipedia.org PARAGRAPHE IV FINANCEMENT BUDGÉTAIRE ET TAUX D’INTÉRÊT Le financement du déficit s’opère en partie par l’utilisation du crédit bancaire disponible avec une incidence sur le taux d’intérêt et sur l’investissement privé. La relation entre le déficit budgétaire et le taux d’intérêt est donnée par l’identité suivante, représentant l’équilibre de la situation d’une autorité monétaire : M2 = AEN + AIN - M2 est la variation de la masse monétaire composée ici des pièces, des billets, des comptes à vue, du CCP et des dépôts à terme ; - AEN est la variation des avoirs extérieurs nets ou réserves en devises de la balance des paiements ; - AIN est la variation des avoirs intérieurs nets ou crédit intérieur (CI) qui peut être décomposé en : o Crédit au gouvernement (AINg) ; o Crédit au secteur privé (AINp). D’où l’équation : M2 = AEN + (AINg + AINp) AEN = M2 - (AINg + AINp) Il résulte de cette équation que toute augmentation du crédit intérieur (AIN), plus rapidement que celle de la masse monétaire (M2), entraîne une détérioration des avoirs en devises (AEN). Par ailleurs, le financement du déficit budgétaire de l’État par le crédit intérieur (AINg) entraîne une diminution de l’épargne 46 disponible pour l’investissement privé et un renchérissement du prix de l’argent (taux d’intérêt). Cette hausse du taux d’intérêt est répercutée sur les coûts de production et sur les prix, avec comme conséquence, une augmentation des prix pouvant entraîner l’inflation. Le mécanisme est connu sous l’appellation d’effet d’éviction (de l’investissement privé). Il est donc recommandé de réduire le déficit budgétaire afin de relancer l’investissement privé et limiter l’inflation. Cette approche justifie la surveillance du crédit au gouvernement ou position nette du gouvernement (PNG) introduite comme critère de performance dans les programmes d’ajustement conclus avec les bailleurs, notamment le FMI, ou dans le cadre de la surveillance multilatérale. PARAGRAPHE V SOLDE BUDGÉTAIRE ET TAUX DE CHANGE Le lien entre le budget et le taux de change part de l’équation suivante : TER = TEN * PR Le taux de change effectif réel (TER) est l’indicateur de la compétitivité internationale de l’économie nationale. Il est égal au taux de change effectif nominal (TEN) ou taux officiel, multiplié par les prix relatifs (PR). Les prix relatifs constituent le rapport entre les prix extérieurs et le niveau général des prix intérieurs. D’où TER = (TEN * Prix Extérieurs) / Prix Intérieurs. La compétitivité est meilleure lorsque le TER est élevé, c’est-à-dire lorsque la parité de la monnaie locale correspondant à la monnaie étrangère est élevée. Dans ce cas, les biens exportables (matières premières notamment) sont compétitifs à l’étranger et les biens importés deviennent plus 47 chers ; d’où le recours, pour les États qui en ont la possibilité, de recourir à la modification de la parité de la monnaie (dévaluation précisément) pour pousser leur économie à être plus compétitive. Toutefois, une attention particulière doit être portée à la condition de Lerner-Marshal, notamment sur les élasticités. La condition de Marshall-Lerner (des économistes Alfred Marshall et Abba Lerner), appelée aussi théorème des élasticités critiques, permet de résoudre dans un modèle économique prenant en compte le solde commercial de la balance courante (exportations moins importations), l'indétermination sur celui-ci d'une variation du taux de change (réel ou non) : Le solde de la balance commerciale est une fonction décroissante du taux de change réel si et seulement si la somme des élasticités-prix des importations et exportations en valeur absolue est supérieure à 1. Nous savons que les exportations en volume (en quantités) dépendent négativement du taux de change (elles diminuent quand ce taux augmente). Et, si le taux de change augmente, les importations en volume ont tendance à augmenter puisque les biens nationaux sont moins compétitifs par rapport à la production étrangère. Ainsi, cet effet sur les deux composantes qualifié d'effet volume joue en faveur de la dégradation de la balance commerciale. Toutefois, l'augmentation des taux de change tend à diminuer le prix relatif (exprimé en monnaie nationale) des biens étrangers importés. Ainsi s'ils coûtent moins cher, cela tend à améliorer le solde de la balance commerciale. Cet effet se nomme effet valeur. On ne peut donc pas d'entrée de jeu savoir quel est l'effet qui va l'emporter. La condition de Marshall-Lerner compare les élasticités- prix, qui mesurent les sensibilités respectivement des exportations et des importations par rapport aux prix. Comme pour une élasticité- prix direct, plus elle est élevée, plus l'augmentation du taux de change va inciter à exporter moins et à importer plus en volume. L'effet volume l'emporte sur l'effet valeur et cela va jouer en défaveur du solde de la balance commerciale. Attention : dans la réalité, les deux effets ne peuvent pas intervenir en même temps. Les prix s'ajustent immédiatement (à court terme) tandis que les quantités s'ajustent sur le moyen et le 48 long terme. Ainsi, au cours du temps, la balance commerciale située initialement en équilibre se détériore suite à une dévaluation du taux de change (c'est l'effet prix qui l'emporte). Mais petit à petit l'ajustement par les quantités (effet du même nom) permet d'améliorer le solde et de dépasser celui de l'équilibre initial : c'est la condition de Marshall-Lerner. Source : https://fr.wikipedia.org En résumé, une dévaluation n’a des chances de réussir que si la somme des élasticités-prix des produits importés et exportés est supérieure à la valeur 1. Ce qui veut dire que le degré d’élasticité permet de faire jouer les réactions (possibilité de répondre, de façon autonome, aux demandes d’importation ou d’exportation). Dès lors, une dévaluation sans respect de la condition peut entrainer des effets pervers. Il en est ainsi si un pays dévalue alors qu’il n’a rien à exporter (à la suite de sécheresse ou autres calamités) ou qu’il ne peut se passer de l’importation (certains biens qu’il ne produit pas comme le riz, le pétrole ou certains biens d’équipement). En dehors d’une dévaluation où c’est le taux de change officiel (TEN) qui est modifié, l’amélioration de la compétitivité de l’économie nationale passe par la diminution de l’inflation interne, donc de la demande intérieure (consommation publique et privée). PARAGRAPHE VI ACCUMULATION D’ARRIÉRÉS DE PAIEMENTS ET INFLATION Les études de la Banque Mondiale sur l’efficacité de la dépense publique ont permis de dégager les trois relations suivantes : - il existe une relation négative entre l’évolution ou variation (∆) rapide de la consommation publique ou du gouvernement (Cg) et la croissance du Produit intérieur brut (PIB) réel : +∆Cg => - ∆PIB - ∆Cg => +∆PIB ; - il existe une relation positive entre la croissance des Investissements publics (Ig) et la croissance du PIB réel : +∆Ig => +∆PIB - ∆Ig => - ∆PIB ; 49 - il existe une relation positive entre l’évolution du taux d’inflation et l’accumulation des arriérés intérieurs : +∆ arriérés => +∆ inflation - ∆ arriérés => - ∆ inflation. Cette relation entre accumulation d’arriérés de dépenses publiques et l’inflation est schématisée comme suit : 50 CHAPITRE IV L’ÉLARGISSEMENT DU DOMAINE DES FINANCES PUBLIQUES Le système financier d’un État est étroitement lié à ses instruments politiques, aux doctrines économiques et aux luttes des divers groupes sociaux. Aussi est-il nécessaire de l’étudier dans une perspective historique pour en connaître les fondements et les arguments essentiels constitutifs de la base du passage d’un système financier libéral à un système financier moderne. SECTION 1 LE SYSTÈME FINANCIER CLASSIQUE OU LIBÉRAL L’étude du système financier libéral suppose nécessairement quelques rappels sur les origines du Budget. Le droit budgétaire français, essentiellement hérité par plusieurs pays anciennement colonisés par l’Hexagone, s’est forgé principalement au 19ème siècle sous l’influence du régime financier anglo-saxon5. Il convient de noter que le principe du consentement des contribuables à l’impôt qui était traditionnel en France, s’est de plus en plus affaibli pour faire place au droit royal d’imposer les sujets de sa propre autorité. C’est ainsi que 1439 a été l’année de création de la taille qui est un impôt direct sur les roturiers6. En 1628, la Grande-Bretagne est marquée par l’opposition au principe de la légalité de l’impôt non consenti par le Parlement. Cette vieille théorie renait au moment de la Révolution française de 1789. Auparavant en 1714, la constitution conférait au Parlement le pouvoir de fixer les dépenses, et d’établir la périodicité du budget. 5 Relatif au régime financier des pays et peuples de civilisation britannique. 6 Considérés comme des personnes non nobles, de classe inférieure. 51 La science financière classique, telle que ses maximes (principes) ont été exprimées par le baron Louis, Léon Say et Gaston Jèze, était liée à l’État libéral du 19ème siècle. Le baron Joseph-Dominique Louis, également appelé l’abbé Louis, est un homme politique et diplomate français né à Toul (province des Trois-Évêchés) le 13 novembre 1755 et mort à Bry- sur-Marne (Val-de-Marne) le 26 août 1837. Il s'imposa comme un remarquable technicien des finances publiques et fut à cinq reprises ministre des Finances, sous les deux Restaurations et la monarchie de juillet. En 1780, il devint conseiller-clerc à la troisième chambre des enquêtes du parlement de Paris, où l'on ne tarda pas à remarquer ses aptitudes en matière financière. Il commença à fréquenter les cercles parisiens, et rencontra le financier Panchaud et l'abbé de Périgord, agent général du Clergé de France. Le gouvernement napolitain voulut lui confier la création et la direction de plusieurs institutions financières. On en parla à l'Empereur qui refusa de le laisser partir : « Quel est donc cet homme, dit-il, pour lequel tout le monde demande et qui, lui, ne demande rien ? ».Louis fut alors créé baron de l'Empire (9 décembre 1809) et appelé à la présidence du conseil de liquidation établi en Hollande (1810), puis en Westphalie, avant d'entrer dans les bureaux du Trésor public alors dirigé par le comte Mollien, où il fut chargé de la direction du contentieux, et d'être nommé conseiller d'État en 1811. Premier passage au ministère des Finances (1er avril 1814 - 20 mars 1815) :en 1814, le baron Louis se trouvait dans le sillage de son ami Talleyrand, qui le fit nommer ministre des Finances le 1er avril par la commission du gouvernement provisoire. Deuxième passage au ministère des Finances (9 juillet - 26 septembre 1815) : le baron Louis suivit le roi à Gand lors des Cent- Jours et vint reprendre son portefeuille le 9 juillet 1815. Troisième passage au ministère des Finances (30 décembre 1818 - 19 novembre 1819) :le 30 décembre 1818, il reprit le portefeuille des finances dans le ministère Dessolles, dirigé en réalité par Élie Decazes. Le baron Louis obtint de nouvelles avances de fonds des receveurs généraux en leur donnant un intérêt direct dans les bénéfices qu'ils procuraient au Trésor. Quatrième passage au ministère des Finances (31 juillet - 2 novembre 1830): Le baron Louis prit une part active au renversement de Charles X et à l'établissement de la monarchie de juillet. Il fut nommé à nouveau ministre des Finances le 31 juillet 1830. 52 Jean-Baptiste Léon Say, né le 6 juin 1826 à Paris où il est mort le 21 avril 1896, est un économiste et homme politique français. Il est fils de Horace Émile Say (1794-1860), petit-fils de Jean-Baptiste Say (1767-1832) auteur de « la loi des débouchés » et petit-neveu de Louis Say (1774-1840), tous trois économistes de renom. Journaliste, il rédige de nombreux articles attaquant la gestion financière du baron Haussmann dans le Journal des débats. Il se lance en politique en 1869. Il est élu à l'Académie des sciences morales et politiques en 1874 et à l'Académie française en1886. Gaston Jèze (Toulouse, 2 mars 1869 - Deauville, 5 août 1953) est un professeur de droit public français, président de l'Institut de droit international, fondateur et directeur de la Revue de science et de législation financière (à partir de 1903), directeur de la Revue de droit public (de 1904 à 1953). Gaston Jèze fut l'un des principaux promoteurs de la science financière comme enseignement autonome dans les universités. Dans les milieux universitaires, il est souvent considéré comme le "pape" des finances publiques. C'est également l'un des juristes qui a contribué à remplacer la notion de puissance publique par celle de service public comme justification de l'État et du droit public, ce qui explique qu'on le rattache généralement à l'"École du service public" de Léon Duguit. Son engagement dans le conflit qui opposa au milieu des années 1930 l'Éthiopie à l'Italie mussolinienne (il avait accepté d'être le conseiller d'Hailé Sélassié, négus d'Éthiopie, chassé d'Addis-Abeba par les troupes italiennes) suffira pour enflammer une jeunesse étudiante en majorité acquise alors aux idéaux d'une droite nationaliste et xénophobe. Il fut l'un des premiers grands juristes français et professeur de droit, à protester contre les mesures antisémites du régime nazi. Il fut un universitaire renommé. Spécialiste de finances publiques et de droit administratif, Gaston Jèze fut l'un des premiers universitaires à revendiquer une étude des phénomènes juridiques comme des phénomènes financiers qui tienne compte de tous les facteurs, qu'ils soient juridiques, économiques, financiers, sociaux ou politiques. Il s'élève également contre les "dogmes métaphysiques" qui continuent selon lui de polluer la science juridique ou la science financière. Dans le domaine des sciences économiques, il est reconnu comme celui ayant fait des finances publiques une véritable branche de l'analyse économique, notamment à travers sa loi dite "loi d'équilibre" ou "loi de Jèze". Sources : https://fr.wikipedia.org Le principe fondamental de la science financière classique était de limiter au minimum les activités de l’État en les confinant autant que 53 possible aux missions traditionnelles de Sécurité, de Justice, d’Armée et de Diplomatie. Dans le domaine économique, l’État devait s’abstenir et laisser librement jouer les initiatives individuelles, la libre concurrence, en un mot la loi du marché. L’État est ainsi qualifié d’État-gendarme. L’État-gendarme est rattaché au principe de liberté économique (école classique), ce qui conduisait l’État à « laisser faire » les individus et « laisser passer » les produits. Ainsi, l’État doit se limiter à assurer les fonctions régaliennes traditionnelles (armée, justice, police) et à veiller au libre jeu de la concurrence. L’objectif de ces Finances publiques classiques était de fournir à l’État les moyens ou ressources nécessaires à la couverture de ses charges relatives aux missions de souveraineté citées ci-dessus. C’est dans ce cadre qu’il faut trouver l’explication de la masse limitée des dépenses, même si celles-ci ont augmenté dans le temps. Cette croissance des charges publiques était donc modérée du fait que, d’une part, le champ des finances publiques ne couvrait qu’une faible proportion du Revenu national et, d’autre part, leur effet économique était négligeable. SECTION 2 LE SYSTÈME FINANCIER MODERNE Le système financier public moderne est marqué par des transformations importantes se résumant par : - un développement important de l’Administration ; - des progrès techniques dans l’Administration ; - un développement économique et social notoire ; - la conduite de la politique économique et sociale par l’État ; - la création d’établissements publics et de sociétés nationales par l’État ; - l’aménagement de comptes d’avance et de prêt. De ce qui précède, l’État est qualifié d’État-providence ou d’État faustien (du nom de Faust7 pour un État de rêve) ou Welfare state. Il 7 Faust est le héros d'un conte populaire allemand ayant fait florès au XVIe siècle, à l'origine de nombreuses réinterprétations. Cette histoire relate le destin d'un 54 est marqué par l’accroissement de la masse budgétaire ainsi qu’une technicité et une complexité plus grandes du budget. L’État providence est une expression usitée pour qualifier la nature actuelle des États modernes qui tentent, par leurs interventions, de rechercher le progrès économique et social. La protection sociale constitue ainsi le cœur de l’État providence qui a deux missions principales : - prévenir les risques par l’assurance obligatoire ; - redistribuer les revenus. La croissance de l’après-Seconde Guerre mondiale a permis la montée en puissance de l’État providence. Mais lorsque la croissance économiq