Droit Administratif 2 PDF
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Université Paris Nanterre
Jonathan Layn
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These notes cover the fourth part of administrative law, focusing on the legal acts of the administration. They define administrative acts, differentiate from other types of acts, such as legislative, jurisdictional and governmental acts. The document further categorizes administrative acts into unilateral acts, acts under private law and administrative internal measures.
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lOMoARcPSD|36365031 CM Droit administratif II Droit administratif (Université Paris Nanterre) Scanne pour ouvrir sur Studocu Studocu n'est pas sponsorisé ou supporté par une université ou un lycée Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 DROIT ADMINISTRATIF II QUATRIÈME...
lOMoARcPSD|36365031 CM Droit administratif II Droit administratif (Université Paris Nanterre) Scanne pour ouvrir sur Studocu Studocu n'est pas sponsorisé ou supporté par une université ou un lycée Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 DROIT ADMINISTRATIF II QUATRIÈME PARTIE : LES ACTES JURIDIQUES DE L'ADMINISTRATION Définition G. Cornu : opération juridique (negotium) consistant en une manifestation de la volonté (publique ou privée, unilatérale, plurilatérale ou collective) ayant pour objet et pour effet de produire une conséquence juridique (établissement d'une règle, modification d'une situation juridique, création d'un droit, etc.). Cette définition met l'accent sur l'essentiel : l'acte est une manifestation de volonté qui modifie l'ordonnancement juridique par les droits qu'elle confère ou les obligations qu'elle crée. La définition de G. Cornu est matérielle : elle s'attache au contenu de l'acte, à ce qu'il prescrit (negotium). Pour analyser complètement un acte, il faut la compléter par une approche formelle qui s'attache à son contenant, à l'enveloppe (l'instrumentum). Ex : Ainsi l'entrée en fonction d'un agent public (acte au sens matériel) peut être contenue selon les cas dans plusieurs « enveloppes » différentes (acte au sens formel), par exemple un décret, un arrêté ou un contrat (les droits, les obligations et les protections sociales seront les mêmes). CHAPITRE 1 : L'ACTE ADMINISTRATIF UNILATÉRAL L'acte administratif unilatéral est le principal mode d'expression de la volonté des autorités administratives. C'est le plus pratiqué car le plus performant. Contraignant pour les destinataires il est aussi très encadré par le droit et très aisément contrôlable par le juge. SECTION 1 : LA NOTION §1 : Définition L'acte administratif unilatéral est d'abord un acte juridique. Il nait de la seule volonté d'une autorité administrative et modifie l’ordonnancement juridique ; il ajoute quelque chose aux normes en vigueur, leur enlève quelque chose ou les modifie. Il ne requiert pas le consentement formel de ceux à qui il s'applique. On rappelle que certaines personnes privées peuvent avoir la qualité d'autorité administrative et donc prendre des actes administratifs unilatéraux. On trouve dans la doctrine et la jurisprudence l'expression « décision administrative » : elle n'est pas synonyme d'AAU, car toutes les décisions administratives ne sont pas des actes : ainsi des mesures d'ordre intérieur. Quant à l'expression « décision exécutoire » que l'on doit à la doctrine de la fin du XIXe siècle, on ne peut en faire l'économie : sa signification a d'ailleurs varié dans le temps et selon ses domaines d'emploi. Le « décision faisant grief » est propre au vocabulaire contentieux. Elle comporte une dimension objective, synonyme d'AAU mais elle a en outre une dimension subjective : seules les personnes auxquelles l'acte fait grief (c'est-à-dire, aux intérêts desquelles il porte atteinte) sont recevables à en demander l'annulation au juge. §2 : Exclusions A. Les actes unilatéraux de l'État qui ne sont pas administratifs Doivent être écartés de la catégorie des AAU, des actes qui sont unilatéraux, émanent de l'État et expriment la puissance publique mais qui ne sont pas pris par une autorité administrative. Ainsi bien sûr des actes législatifs qui émanent de la volonté d'un organe législatif, les actes juridictionnels et les actes de gouvernement. B. Les actes unilatéraux des autorités administratives soumis au droit privé Les actes unilatéraux pris par des autorités administratives mais soumis au droit privé (et au juge judiciaire en cas de contentieux) ne sont pas des actes administratifs. En effet, ils règlent des situations régies par le droit privé ou interviennent dans les rapports de droit privé. Entrent dans cette catégorie : – d'une part, les actes individuels pris par le gestionnaire d'un service public industriel et commercial envers les agents et les usagers du service ; – d'autre part, des actes, autres que réglementaires, que les personnes publiques prennent en tant que propriétaires pour la gestion de leur domaine privé ; en revanche, les actes de disposition qui concernent ces biens (acquisition, vente..) sont en général considérés comme administratifs. Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 Les personnes publiques sont propriétaires des biens relevant du domaine public et de ceux qui relèvent du domaine privé (toutes les forêts domaniales, terrains militaires, un certain nombre de constructions possédées par les personnes publiques). Ce domaine privé relève du droit privé (pas du code civil mais d'un droit privé spécial) et donc nécessite un contentieux judiciaire. C. Les décisions unilatérales des autorités administratives qui ne sont pas des actes (les mesures d'ordre intérieur) Notion : Les mesures d'ordre intérieur sont de véritables décisions unilatérales émanant d'une autorité administrative et prises dans l'exercice d'une activité ou mission administrative. Pourtant elles ne sont pas considérées comme des actes administratifs unilatéraux et ne peuvent faire l'objet d'un recours en annulation. POURQUOI ? Cela tient à leur portée qui est si faible qu'elles ne modifient pas l'ordonnancement juridique. La mesure d'ordre intérieur est typiquement un instrument de politique jurisprudentielle : le CE ne veut pas être submergé par des recours contre des décisions de très modeste importance (« de minimis non curat praetor » : « le juge ne s'occupe pas d'affaires mineures ») et on le comprend. Il modifie à sa guise la liste des mesures d'ordre intérieur. Sont des mesures d'ordre intérieur les décisions d'organisation interne du service : fixation des horaires de travail, affectation des agents à l'une des tâches de celui-ci, désignation d'une pièce pour y avoir son bureau, ainsi que les avertissements adressés aux militaires sans être inscrits à leur dossier.. Du moins ces mesures sont-elles d'ordres intérieur aussi longtemps qu'elles restent dans les limites de ce que permet le statut des agents concernés ou qu'elles ne portent pas atteinte à leur situation, droits et obligations statutaires. Car au-delà, leur portée cesserait d'être minime et elles deviendraient des actes administratifs unilatéraux, susceptibles de recours contentieux. À l'égard des usagers du service, sont des mesures d'ordre intérieur certaines punitions infligées aux élèves (retenues, devoirs supplémentaires individuels ou collectifs..). Mais, ici aussi, dès que l'on passe de la simple punition à la véritable sanction (telle que l'exclusion d'un élève, même temporaire du lycée), on passe dans la mesure d'ordre intérieur à l'acte administratif unilatéral. Réduction : Les mesures d'OI peuvent être douloureusement ressenties par les intéressés, malgré leur absence d'effets statutaires. Surtout à une époque où le respect de leur dignité devient une exigence forte des citoyens. Ceux-ci admettent mal l'immunité juridictionnelle dont elles bénéficient. Le juge administratif influencé par la jurisprudence de la Cour EDH, en tient compte. Il réduit petit à petit leur liste : ainsi certaines punitions infligées aux militaires (telles que les arrêts : CE 17 février 1995, Hardouin) ont cessé d'être qualifiées comme des mesures d'OI pour devenir des AAU. C'est à l'égard des détenus que l'évolution est aujourd'hui la plus spectaculaire. Le CE mène une véritable politique jurisprudentielle qui se développe dans plusieurs directions (notamment la responsabilité) mais porte surtout sur les mesures d'OI. Les diverses décisions prises par l'administration pénitentiaire étaient systématiquement considérées comme telles. Dans la foulée de son arrêt Marie (17 fév. 1995), le CE a entrepris de requalifier beaucoup d'entre elles en AAU afin d'offrir un recours juridictionnel aux personnes concernées. Il ne se fonde plus sur une analyse abstraite de la décision mais sur l'examen de ses effets concrets pour le requérant (CE, S., 30 novembre 2009, Garde des Sceaux c. Kehli). Les décisions pénitentiaires ne forment plus une grande catégorie unique : elles ont éclaté en sous-catégories fines dont les plus sensibles sont devenues des AAU et les plus bénignes restent des mesures d'OI. Reste un point suffisamment délicat (chap.3) : les circulaires ministérielles et les autres documents dans lesquels l'Administration expose sa doctrine d'action. On se bornera à dire qu'elles sont des mesures d'OI si elles ne sont pas impératives et des AAU dans le cas contraire. D. Les actes préparatoires Les actes préparatoires ressemblent aux mesures d'OI : ils ne produisent pas d'effet immédiat sur l'ordonnancement juridique et sont donc susceptibles de recours. Mais contrairement aux mesures d'OI, leur légalité peut être examinée par le juge à l'occasion d'un recours intenté contre l'acte qu'ils préparaient. SECTION 2 : LES CATÉGORIES D'ACTES ADMINISTRATIFS UNILATÉRAUX §1 : La distinction selon la forme de l'acte A. La variété des catégories formelles d'actes Nous envisageons ici l' « enveloppe » de l'acte, l'instrumentum, la forme sous laquelle il se présente au lecteur. DÉCRET : L'acte administratif le plus solennel est le décret. Aux termes de la constitution, seules deux autorités peuvent signer un décret : le PDR et le PM. Il n'existe pas de décret ministériel. Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 Selon l'art.13 de la C, « le PDR signe les ordonnances et les décrets délibérés en conseil des ministres ». Ils doivent être contresignés par le PM et par le cercle restreint des « ministres responsables » (art.19). Le PM signe les autres décrets, de loin les plus nombreux mais pas forcément les moins importants. Ils doivent être contresignés par le cercle large des « ministres chargés de leur exécution » (art.22). Lorsque la loi impose la consultation préalable des formations administratives du CE, on parle de « décret en CE ». ARRÊTÉ, DÉLIBÉRATION, DÉCISION : L'arrêté est la forme la plus usuelle d'acte administratif unilatéral. Toute autorité administrative individuelle peut y recourir : arrêté ministériel (ou interministériel), préfectoral, municipal,etc. Lorsque l'autorité est collégiale, on parle de délibération (du conseil municipal par ex) : le mot désigne ici un acte, mais il a dans le vocabulaire juridique, un deuxième sens, celui de discussions ou de débats internes (c'est à ce deuxième sens que renvoie l'expression « secret des délibérations »). Le mot « décision » est lui aussi très employé. Au-delà de ces formes classiques, le droit administratif fait preuve d'une imagination inhabituelle : sauf lorsqu'un texte impose une forme déterminée, l'acte peut être contenu dans des enveloppes très variées. Ce qui compte, c'est l'effet qu'il produit sur l'ordonnancement juridique. Il ne faut donc pas se fier aveuglément aux apparences : le plus souvent, une lettre, un télex, un avis, une recommandation, un communiqué.. ne sont pas des actes faute d'être normatifs. Mais la jurisprudence donne des exemples où les uns ou les autres ont été qualifiés d'actes en raison de leurs effets. C'est une attitude réalise qui fait prévaloir le fond sur la forme mais qui conduit parfois à des résultats surprenants. CIRCULAIRES ET RECOMMANDATIONS : Régime compliqué. Certaines circulaires ou recommandations, ou certains passages de circulaires ou de recommandations sont des AAU et d'autres des mesures d'ordre intérieur. Quelques fois certains mots parfois sont suffisamment normatifs pour être des actes susceptibles de recours. AVIS : En principe, l'avis n'est pas un AAU, mais un acte préparatoire d'un futur AAU. En lui-même un avis n'est pas normatif, il se borne à donner un conseil à l'autorité qui décidera. À ceci près que le juge administratif considère certains avis comme de véritables AAU et accepte d'en examiner la légalité, dans quel cas, lorsque l'avis en réalité lie au moins en partie le décideur final. Alors cet avis-là, en tant qu'il lie la compétence du décideur final, produit un effet de droit et peut être qualifié d'AAU. En certains cas, s'agissant des sanctions disciplinaires des fonctionnaires, parfois l'avis du conseil de discipline interdit au supérieur hiérarchique de prononcer une sanction plus sévère que celle qu'a proposé le conseil de discipline. Le supérieur hiérarchique garde un pouvoir discrétionnaire dans une certaine mesure puisqu'il peut renoncer à sanctionner, prononcer la sanction suggérée par le conseil, ou prononcer une sanction moins sévère. En revanche, sa compétence est liée en ce qu'il ne peut pas prononcer une sanction plus sévère que ce qu'a suggéré le conseil de discipline : l'avis est considéré comme un AAU par le juge administratif, puisqu'il produit des effets de droit, il limite la compétence du décideur final. B. Les actes immatériels Rien ne s'oppose à ce qu'un acte soit immatériel ou dématérialisé, c'est-à-dire dépourvu de « support papier ». L'expression n'est pas très heureuse car ces actes sont matériellement des décisions : au sens strict, ils sont donc plus « informels » qu' « immatériels ». Avant l'ère de l'informatique, on peut leur trouver des précédents dans des exemples anciens et rares d'actes verbaux, voire gestuels : la seule difficulté qu'ils soulèvent est de prouver leur existence. Le précédent le plus notable est celui des décisions tacites ou implicites qui résultent du silence de l'Administration. L'adjectif « immatériel » s'est imposé aujourd'hui pour désigner les procédés électroniques. Il s'agit en réalité d'un acte écrit (ce que l'on oublie trop souvent) mais dépourvu de « support papier » aussi longtemps qu'il n'a pas été imprimé par un lecteur. La procédure d'édiction d'un acte se plie aisément à la voie électronique : les formulaires administratifs peuvent être téléchargés et remplis en ligne ; sauf texte contraire, les actes administratifs unilatéraux peuvent revêtir la forme d'un courriel et être publiés ou notifiés par voie électronique (v. Art 1369-1 et s. du C.civ). En revanche, le contenu de l'acte lui-même ne peut pas résulter entièrement d'une pure application informatique. Il doit avoir formellement pour auteur, non un logiciel mais un agent compétent pour le signer. La règle de l'examen individuel du dossier l'exige. L'article 10 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés interdit qu'une décision produisant des effets juridiques à l'égard d'une personne soit prise « sur le seul fondement d'un traitement automatisé destiné à définir le profil de l'intéressé ou à évaluer certains aspects de sa personnalité ». Cependant, pour l'application de ce texte, les décisions satisfaisant les demandes de la personne concernée ne sont pas regardées comme prises sur le seul fondement d'un traitement automatisé. §2 : La distinction selon le contenu de l'acte Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 La classification matérielle des AAU s'attache à leur contenu (le negotium). Elle distingue l'acte réglementaire, l'acte non réglementaire et rarement l'acte qui n'entre dans aucune de ces deux catégories. Elle produit des effets très importants sur leur régime. A. L'acte réglementaire L'acte réglementaire est un acte administratif unilatéral général et impersonnel. Il s'adresse anonymement à ceux auxquels ils s'appliquent. Le nombre des intéressés importe peu, il peut être considérable (les usagers de la voie publique, les étudiants), modeste (les exploitant de services de communication audiovisuelle) voire réduit à un (le défenseur des droits). L'important est que l'autorité qui prend l'acte veut qu'il s'applique à tous ceux qui entrent dans son champs d'application, quelle que soit leur identité. Bien sûr, seule une autorité disposant du pouvoir réglementaire peut prendre des actes réglementaires dans la limite de sa compétence. B. L'acte non réglementaire individuel (ou collectif) L'acte individuel est un acte administratif unilatéral nominatif : il vise une ou plusieurs personnes dénommées. Il peut être pris aussi bien par une autorité investie du pouvoir réglementaire que par une autorité qui en est dépourvue, dès lors que l'une ou l'autre est compétente pour l'adopter. La liste des auteurs d'actes non réglementaires est donc plus grande que celle des auteurs d'actes réglementaires. L'acte individuel est plus précis et moins général que l'acte réglementaire. Il mène le processus administratif à son terme ultime, en désignant individuellement les titulaires des droits et obligations institués par la législation et la réglementation : avec lui, on passe de l'anonymat des destinataires à leur désignation personnelle. Lorsque l'acte vise nommément une série de personnes dont le sort est lié on parle d'acte collectif : ainsi de la délibération d'un jury déclarant admis les candidats reçus à un concours administratif en les classant par ordre de mérite. C. L'acte non réglementaire et non individuel Certains actes ne sont ni réglementaires, ni individuels ou collectifs. Que l'on ne parvienne pas à leur trouver un nom (la doctrine les appelle parfois « actes intermédiaires » ou « décisions d'espèce ») montre qu'ils forment une catégorie incertaine et hétéroclite. Sans entrer dans le détail on peut dire que la plupart d'entre eux ont pour objet d'appliquer la législation ou une réglementation (qu'ils ne modifient pas) à un bien immobilier ou de l'inscrire sur une liste. N'étant pas généraux et impersonnels, ils ne sont pas réglementaires ; visant un terrain et non une personne désignée (ou ne visant pas que cette dernière), ils ne sont pas individuels : par exemple, la déclaration d'utilité publique préalable à une expropriation, le classement d'un site, la création d'une zone d'urbanisme. Mais la catégorie contient aussi d'autres décisions telles que les arrêtés autorisant l'ouverture d'un concours de recrutement de la fonction publique (CE 27 juin 2011, Association Sauvons l'université et a.). Ces actes suivent un régime qui emprunte certains de ses éléments à l'acte réglementaire, et d'autres à l'acte individuel. Les différences concernent surtout le contentieux. §3 : Croisement et importance des distinctions formelle et matérielle Pour connaître entièrement un acte administratif, il faut croiser les distinctions formelles et matérielles qui viennent d'être présentées. Le décret portant statut du préfet de police de Paris ? Est-ce un acte individuel ? Un acte réglementaire ? En principe, toute forme d'acte est susceptible d'avoir un contenu réglementaire ou un contenu non réglementaire. Il existe ainsi des décrets réglementaires (par exemple un décret relatif aux attributions du préfet de police de Paris qui s'applique anonymement à tous ceux qui se succèdent dans cet emploi) et des décrets non réglementaires (par exemple la nomination de M. ou Mme X.. comme préfet de police de Paris). De même, les arrêtés, décisions, délibérations sont réglementaires ou non réglementaires en fonction de leur contenu. Cependant en vertu des textes ou des usages, certaines formes d'actes sont matériellement toujours réglementaires : c'est par exemple le cas des ordonnances non ratifiées ou des avis (dans les rares cas où ils constituent des actes, et non des mesures d'ordre intérieur). Une précision importante et simplificatrice : en principe, un acte est entièrement réglementaire ou entièrement non réglementaire ; il n'est pas partiellement réglementaire et partiellement non réglementaire. Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 Classer un acte dans la grille qui résulte du croisement des deux distinctions est indispensable pour en déterminer le régime. De manière générale, la distinction matérielle a des effets plus importants que la distinction formelle. On verra dans la suite du chapitre que la publicité des actes, leur motivation, leurs effets, leur application dans le temps, les pouvoirs du juge administratif et ceux du juge judiciaire ne suivent pas les même règles selon que les actes sont réglementaires ou non réglementaires. Mais la loi et la jurisprudence semblent aller vers l'unification. Nous le disons avec prudence car cette tendance est parfois contredite par une autre, celle du « sur-mesure » qui soumet des catégories particulières d'actes à des règles particulières. §4 : La distinction des actes créateurs de droit et des actes non créateurs de droit Cette distinction a moins d'effets sur le régime des actes que leur distinction formelle et leur distinction matérielle. Elle est cependant déterminante pour la modification et la disparition des actes et de leurs effets car le respect des droits acquis limite logiquement la liberté d'action de l'Administration. A. Le cas général Sont considérés comme créateurs de droits les actes individuels qui accordent à une personne, de manière en principe définitive, un avantage, administratif (une autorisation, une nomination..) ou financier. La distinction entre actes individuels créateurs et non créateurs de droits est assez délicate à mettre en œuvre (CE, S, 12 octobre 2009, M.Fontanille). Dans l'immense majorité des cas, ces droits profitent aux destinataires de l'acte ; exceptionnellement, ils peuvent être acquis au bénéfice de tiers. Ex : Une nomination est créatrice de droit pour la personne nommée. Une délibération de jury d'examen déclarant des étudiants admis est créatrice de droit pour ces étudiants. La décision d'octroi d'une subvention à une association est créatrice de droit. Une sanction n'est pas créatrice de droits pour la personne sanctionnée : ce n'est jamais un avantage accordé à cette personne. Quelles sont les décisions qui ne sont pas créatrices de droits ? En revanche, les règlements ne sont pas créateurs de droits. Cela peut surprendre mais s'explique aisément. Des droits peuvent naitre sur le fondement d'un règlement mais ce dernier ne les crée pas. Seuls les actes individuels qui en font application, attribuent précisément aux personnes qu'ils visent les droits que le règlement a prévus au bénéfice d'un public anonyme. Ex : C’est bien parce que le règlement des examens dit que l’étudiant qui a plus de 13 obtient Assez Bien. Mais ce n’est pas le règlement qui confère directement le droit. C’est la décision du jury appliquant le règlement. Ne sont pas non plus créateurs de droits les actes individuels suivants : – les nominations d'agents publics à des emplois « à la décision du gouvernement » (les plus hauts fonctionnaires) = le Président, le PM, les ministres : membres des cabinets et directeurs des directions centrales. Ces collaborateurs peuvent être révoqués à tout moment, ils sont à la discrétion du Gouvernement. C'est aussi le cas des préfets, des officiers exerçant les commandements les plus importants. C'est une exception à la tradition apolitique. – les décisions obtenues par fraude = si on apprend qu'un étudiant a obtenu sa L1 pour fraude, il faut le renvoyer en première année. Il peut être retiré à tout moment par l'autorité administrative qui découvre la fraude. – les actes sous condition tant que la condition n'est pas remplie = je vous accorde cette subvention à condition que vous fournissiez des comptes certifiés par un comptable pour les 5 derniers exercices. Tant que la condition n'est pas satisfaite, le droit reste en suspension. B. Cas particulier des autorisations La jurisprudence considère les autorisations comme créatrices de droits, à l'exceptions des autorisations de police et des autorisations d'occupation du domaine public. Ces deux sortes d'autorisations sont en effet « précaires et révocables » (comme le dit expressément l'art. 2122-2 CGPPP pour les secondes). Elles peuvent donc être rapportées par l'Administration à tout moment (mais pour des motifs légaux) : les droits qu'elles donnent à leur titulaire ne sont pas définitivement acquis. Cette situation repose sur de solides raisons traditionnelles : l'ordre public que poursuit la police et l'intérêt général que poursuit la gestion du domaine public sont des enjeux trop importants pour que la puissance publique puisse avoir les mains liées par les droits des titulaires d'autorisation. Classiquement délivrées sans limitation de durée ou pour une durée très longue, les autorisations doivent pouvoir être remises en cause si des circonstances nouvelles l'imposent. Cette remise en cause, lorsqu'elle est légale, ne donne pas lieu à indemnisation des titulaires car le coût de l'indemnisation pourrait être un obstacle à des évolutions nécessaires. Au demeurant, le titulaire n'est pas pris en traitre : il sait dès le début que son droit à exercer l'activité autorisée n'est pas définitivement acquis. Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 Mais, et c'est une question importante pour l'évolution du droit administratif, ces raisons sont de moins en moins convaincantes. Dans l'ordre économique, la précarité et la révocabilité des autorisations de police et d'utilisation du domaine public perturbent les anticipations légitimes des investisseurs. Les textes récents limitent systématiquement la durée des autorisations, ce qui devrait conduire à les considérer comme stables dans cette période. Leur abrogation relève de moins en moins du pouvoir discrétionnaire des autorités qui les ont délivrées : la législation la subordonne souvent à des motifs strictement énuméré (en général liés à la sécurité des personnes et des biens, au fait que le titulaire ne satisfait plus aux conditions nécessaires pour les obtenir ou ne remplis pas les obligations qu'elles lui imposent). Il est raisonnable de penser que les autorisations de police et d'occupation du domaine public perdront progressivement leur caractère précaire et révocable et seront peu à peu considérées comme créatrices de droits. La jurisprudence a déjà fait un pas en ce sens : les autorisations d'utilisation des fréquences hertziennes (qui appartiennent au domaine public) sont créatrices de droits pour leurs titulaires (CE, 30 juin 2006, Soc. Neuf Télécoms). Ce sujet est corrélé avec un autre que nous ne ferons qu'évoquer en dépit de son importance économique : les autorisations administratives n'ont pas de valeur patrimoniale selon l'analyse classique du droit administratif (en principe, car il y a des exceptions). Mais cette analyse est de plus en plus contestée car elle est peu réaliste aujourd'hui (du moins dans le cas des autorisations qui permettent l'exercice d'une activité économique). Les autorisations administratives sont toujours intuitu personae et donc en principe incessibles. Le titulaire de l'autorisation ne peut pas la vendre, ce qui est une gêne pour lui. Ex : une entreprise a une autorisation indispensable pour exercer son activité. Elle veut fusionner avec une autre entreprise, céder l’entreprise à un tiers… Le droit administratif classique considère qu’elle ne peut pas, du moins sans l’accord de l’administration. Sauf que la chambre commerciale de la Cour de cassation considère l’autorisation administrative comme un élément du fonds de commerce, et donc comme ayant une valeur patrimoniale. Ex : et si c’est toujours la même personne morale mais le capital change de main. Quid de l’autorisation détenue par cette personne morale. Est-ce qu’elle tombe, ou ne tombe pas ? Pour une activité stratégique, l’autorisation regarde de près. Puis il y a des mouvements de capitaux et parmi les acquéreurs, des gens soupçonnés d’argent sale, des oligarques russes, ou une activité stratégique pour le France. Que doit faire l’administration ? Cette analyse du droit administratif est obsolète. Elle n’est plus vraie : pratiquement toutes les autorisations sont délivrées pour des durées déterminées et des durées généralement courtes. Souvent pour être conforme aux directives européennes. Il devient déraisonnable de dire qu’elles ne sont pas créatrices de droits. Il faudrait considérer qu’elles sont créatrices de droits pour la durée fixée. Les investisseurs devraient avoir une certaine visibilité sur la durée d’autorisation. Qu’ils n’aient pas de droit au renouvellement, c'est sûr. Mais dans la période, on devrait considérer que l’autorisation est créatrice de droits. Les droits cessent ou peuvent cesser si le titulaire de l’autorisation commet une faute. Ce sont les procédures de sanction administratives, dont le retrait de l’autorisation. Mais en dehors des cas de faute commise, le droit administratif devrait renoncer au caractère précaire et révocable des autorisations de police et d’occupation du domaine public, ce qui permettrait de donner une valeur patrimoniale à ces autorisations, qu’elles ont en réalité. C’est un point important dont on parle peu, parce qu’on s’arrange toujours. Sans grands mouvements mais pans du droit pas pans du droit, on aménage. Les autorisations administratives sont en principe incessibles, sauf si une loi permet la cession. Or ces lois se multiplient : - L’audiovisuel : la cession, y compris la cession de parts du capital, est soumise à l’agrément du CSA. Les autorisations d’équipement hospitaliers : sans lesquelles aucun hôpital ne pourrait fonctionner. Une loi récente autorise non seulement les cliniques privées, mais aussi les hôpitaux publics, à céder tout ou partie de leurs autorisations, sous le contrôle des agences régionales de santé (ARS). Paris 2 délivre la licence en droit : diplôme national et grade. Paris 2 est habilité par le ministère de l’enseignement supérieur et de la rechercher. Accepterions-nous que ce titre soit cédé à une autre Université ? Ce serait invraisemblable. Actualité : Loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’administration publique territoriale et d’affirmation des métropoles : amplification de la tendance à la métropolisation avec des dispositions spécifiques pour les métropoles de Lyon, Lille, Marseille. Pour Paris, le Grand Paris devient une métropole, lorsque la loi entrera en vigueur. Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 Ordonnances en référé : droit comme art du choix. 1. Ordonnance Dieudonné Elle sera dans la fiche de TD sur la police. Contestable en droit. Référé-suspension. 2. Ordonnance du TA de Chalons en Champagne du 16 janvier 2014 : affaire Lambert Référé-liberté. Le TA avait ordonné au CHU de Reims de ne pas interrompre l’alimentation d’une personne en état pauci-relationnel alors que l’équipe médicale avait estimé qu’il convenait de le laisser mourir. Ce n’est pas un problème de qualité de la loi qui est en cause (Leonetti). Le problème est de fait et peut survenir quelque soit la législation en vigueur. Dans les deux cas, ce sont des ordonnances de référé. Les décisions en référé ne préjudicient pas au fond. SECTION 3 : DURÉE DE L'ACTE ADMINISTRATIF UNILATÉRAL ET DE SES EFFETS Le droit administratif doit arbitrer entre des exigences contradictoires : d'un côté le respect de la légalité et la possibilité pour l'Administration de faire évoluer ses actes ; de l'autre, le respect de la sécurité juridique et des droits acquis. Plusieurs logiques s'entrecroisent, avec un résultat qui peut ne pas toujours paraître logique et auquel la jurisprudence ou la loi apportent constamment des nuances et précisions nouvelles, difficiles à intégrer dans l'ensemble. De manière générale, les distinctions les plus importantes opposent : – d'une part les actes réglementaires aux actes non réglementaires, l'Administration ayant plus de liberté envers les premiers qu'envers les seconds (mais la tendance est au rapprochement des deux) ; – d'autre part, parmi les actes non réglementaires, entre les actes non créateurs de droits et les actes créateurs, l'Administration ayant plus de liberté envers les premiers qu'envers les seconds pour lesquels elle est limitée par le respect des droits qu'ils ont créés. Très souvent, la vie de l'acte (de sa signature à sa disparition) ne coïncide pas avec la chronologie des effets qu'il produit. On verra ainsi qu'un acte signé ne produit pleinement ses effets qu'après que sa publicité l'a rendu opposable, qu'il produit des effets avant sa signature dans les cas exceptionnels où il peut être légalement rétroactif, que ses effets survivent en principe à sa disparition, etc. §1 : Entrée en vigueur de l'acte et de ses effets A. Naissance de l'acte L’acte administratif unilatéral naît par la signature par l’autorité compétente ou le titulaire d’une délégation de pouvoir. La signature est un acte extrêmement important et relativement solennel. Tant qu’un acte n’est pas signé, il n’existe pas. La signature doit être lisible, il faut que le citoyen sache qui a pris la décision. La signature engage la responsabilité du signataire. B. Entrée en vigueur des effets de l'acte Publicité et opposabilité de l'acte : Pour qu'un acte produise vraiment ses effets, il doit être opposable. L'opposabilité signifie que l'Administration, les destinataires et les tiers pourront imposer ou exiger le respect de l'acte, c'est-à-dire invoquer dans leurs relations les droits et les obligations qu'il créé. Un acte inopposable est dépourvu de force obligatoire (CE, 28 décembre 2007, C. c/ min. Défense). Or l'opposabilité ne dépend pas de la signature de l'acte mais de la publicité qui lui est donnée. Elle n'est pas une condition d'existence ni de légalité mais d'efficacité de l'acte. 1. Publicité de l'acte réglementaire Le mode de publicité d'un acte réglementaire est sa publication. Elle vise à faire connaître l'acte à un public anonyme, ce qui est logique puisqu'il s'adresse anonymement à ses destinataires. La publication répond à une exigence simple : elle doit permettre à tous ceux auxquels l'acte peut s'appliquer, d'être informés de son existence. « Sauf lorsqu'elle justifie, sous le contrôle du juge, de circonstances particulières y faisant obstacle, l'autorité administrative est tenue de publier dans un délai raisonnable les règlements qu'elle édicte. » (CE, 12 décembre 2003, Syndicat des commissaires et hauts fonctionnaires de la police nationale). Le procédé le plus courant est la publication dans un journal ou un recueil. En particulier, au JO de la République française, dans lequel doivent notamment être publiés tous les décrets. Mais aussi dans les Bulletins officiels des ministères, dans les Recueils des actes administratifs des préfectures ou de certaines collectivités territoriales. Les communes doivent aussi afficher leurs actes réglementaires concernés par les articles L. 2131-1 et 2 du CGCT. Publication particulière par des textes spéciaux → les panneaux de sens interdit.. sont des formes obligatoires de publication c'est-à-dire d'information du public, des sujets de la voirie. Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 La signalisation routière est une autre forme de publication, obligatoire pour les dispositions réglementaires prises en vertu du code de la route et de toute manière commandée par le simple bon sens. Au delà des minutieuses prescriptions légales et réglementaires, domine une règle réaliste d'adaptation de la publication à la situation du public concerné Effets pratiques : arrêté municipal interdisant le stationnement n'est opposable que s'il est lisible. Lisible c'est-à-dire qu'un panneau endommagé ou masqué par la boue n'assure plus la publication de l'arrêté interdisant le stationnement et donc l'automobiliste qui enfreindrait cette arrêté ne risque rien. 2. Publicité de l'acte non réglementaire La publication adéquate est la notification (= une information personnelle, individuelle du destinataire de l'acte). L'acte individuel ou collectif non réglementé est un acte nominatif, un acte qui désigne une ou plusieurs personnes. Il est donc logique que la publication dans ce cadre soit elle aussi nominative, individualisée, personnelle. Les formes de notification sont générales mais en réalité c'est assez souple ce qu'importe c'est : – que la personne concernée soit bien informée. – que l'Administration puisse faire la preuve que cette personne a bien été informée. C'est pourquoi le mode le plus sûr est la lettre avec l'accusé de réception. Jurisprudence unique de la Cour de cassation comme du CE : la force probante d'une simple lettre recommandé est très faible (sans accusé de réception). Cela prouve simplement que la lettre a été envoyée. Seul l’accusé de réception témoigne du fait que la lettre a bien été reçue. Mais d'autres procédés sont utilisés : pour les agents publics, on les convoque dans un bureau et on leur demande de signer un accusé. Dans les cas les plus importants, où les exigences de preuve sont lourdes, c'est la signification de la décision par l'huissier. Tous les actes non réglementaires doivent être notifiés, un certain nombre d'entre eux doivent en outre être publiés. Le législateur impose la publication en plus de la notification lorsqu'il lui semble important que les tiers soient également informées de la décision. Deux exemples : la nomination ou la révocation des hauts fonctionnaires est publiée au JO. Mais on estime qu'il est important que l'ensemble des citoyens connaissent les princes qui les gouvernent. L'affichage des permis de construire : ceux-ci sont des décisions individuelles mais on estime que le voisinage a intérêt à être informé. Donc les permis de construire/démolir doivent être publiés par affichage sur le terrain français. Une précision à propos de la notification : un certain nombre de décisions individuelles non seulement doivent être notifiées dans leur contenu mais doivent être motivés, c'est-à-dire doivent aussi comporté l'indication des motifs de droit et de fait sur lesquels l'auteur de droit s'est appuyé pour prendre la décision. C'est le cas de toutes les décisions individuelles défavorables. La loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs impose cette notification des motifs avec la notification des décisions et l'impose à peine de nullité. C'est une matière assez délicate. Il ne faut pas se tromper sur les mots : lorsque la loi de 1979 parle de « motivation », cela veut dire les motifs doivent aussi être notifiés. Par ailleurs, tout acte réglementaire ou individuel doit avoir des motifs de droit et de fait légaux. Le mot « motivation » ne concerne donc pas l'existence des motifs, ils doivent toujours existé et porté à la connaissance du juge en cas de litige. Motivation signifie simplement information explicite, formelle, de l'intéressé sur les motifs de la décision. C'est une question assez subtile. (Illustration aux doc 6 et 4 de la fiche de TD). La publicité, qu'il s'agisse de publication ou de notification a un autre effet essentiel : elle fait courir les recours en contentieux. Effet procédural : à partir de la date de publication ou de notification, commence à courir le délai de 2 mois du REP et donc elle est à cet égard importante. C'est aussi pourquoi l'Administration et le citoyen ne doit avoir aucun doute sur la date de publicité. L'article R421-5 du CJA énonce que « les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision.» Il impose que pour les décisions notifiés donc individuelles, la notification comporte la date. Si cette information n'est pas portée à la connaissance d'un intéressé le délai ne commence pas à courir, il ne risque pas d'expirer, l'acte devient indéfiniment attaquable (même au-delà des 2 mois). B. La non rétroactivité de l'acte administratif unilatéral Un acte c'est pour l'avenir et ne peut remettre en cause des situations juridiques acquises. Le principe de non rétroactivité est un PGD : Arrêt d'Assemblée du 25 juin 1948, Société du Journal L'Aurore : un acte ne peut pas produire d'effets pour la période antérieure à sa signature (cas des actes individuels créateurs de droits) ou à sa publicité (cas des autres actes). C'est une question de sécurité. Les exceptions à la non-rétroactivité sont nombreuses. Elles reposent d'abord sur la loi (ou une convention internationale) : une loi rétroactive justifie, voire impose des mesures d'application rétroactives. Certes, selon l'article 2 du Code civil :« la loi ne dispose que pour l'avenir elle n'a point d'effet rétroactif ». Mais cette règle Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 d'interprétation n'est constitutionnelle qu'en matière répressive où elle interdit la rétroactivité d'une loi plus sévère. Dans les autres matières, elle n'a que valeur législative : le législateur peut donc y déroger et autoriser l'Administration à y déroger. La Cour EDH admet également la rétroactivité de la loi lorsqu'elle est justifiée par d'impérieux motifs d'intérêt général. L'un des exemple classique autorisant l'Administration a agir rétroactivement est les lois de validation. Pourquoi ne peut-on pas opposer cet article à une loi elle-même rétroactive ou autorisant l'Administration à prendre un AAU ? → Hiérarchie des normes. Cet article du Code civil est une loi. Or ce qu'une loi a dit, une loi plus récente et plus spéciale peut le contredire. Les lois doivent être interprétés pour ne produisant que pour l'avenir, mais ce n'est pas une règle constitutionnelle. Si cet article était contenu dans la C°, où si le CC en faisant un principe fondamental, alors oui, elle empêcherait le législateur d'agir rétroactivement et l'Administration de même. Mais elle n'est pas constitutionnelle mais législative. C'est ce que l'on appelle les lois de validation. Il arrive que devant le trouble qui en résulte, le législateur dise que cet AA je le fais revivre pour le passé ou pour l'avenir. Hors autorisation législative, la rétroactivité est encore permise à l'Administration pour s'acquitter de son obligation de tirer les conséquences nécessaires de la chose jugée : l'annulation d'un acte par le juge étant rétroactive, elle laisse parfois dans les situation juridiques des plaies qui ne peuvent être cicatrisées que par des mesures elles-mêmes rétroactives (CE 26 décembre 1925, Rodière). La rétroactivité est admise et même s'impose. Par exemple, un fonctionnaire fait l'objet d'une sanction disciplinaire en 2014 par exemple une rétrogradation. En 2016, sur son recours cette sanction est annulée. Pour exécuter pleinement la chose jugée, l’Administration va devoir faire comme s'il n'avait pas fait l'objet d'une sanction, comme s'il avait continué normalement sa carrière. Donc les mesures prises en 2016 seront rétroactives. Autrement dit, le fonctionnaire dont la révocation est annulée, a droit à la reconstitution de sa carrière pour recréer la situation dans laquelle il aurait dû se trouver s’il n'avait pas été évincé illégalement pendant un certain temps : cette reconstitution ne peut être que rétroactive. Il y a des cas où la rétroactivité est admise parce que l'on ne peut tout simplement pas faire autrement. Les retards administratifs : une mesure de revalorisation de telle prestation aurait du intervenir au 1er janvier puis retard et l'Administration ne réussit à prendre des actes nécessaires qu'en février. Pour que ceux qui ont droit à ces prestations ne soit pas lésés ces décisions vont devoir être censé s'être appliquée au 1er janvier donc c'est rétroactif. Dans ce cas, il n'y a jamais de recours. En pratique, il est donc courant qu'un service débordé prenne avec retard des décisions qui s'appliquent à compter d'une date antérieure ; mais comme il s'agit en général de décisions usuelles, obligatoires et favorables aux intéressés, ceux-ci se disent mieux vaut tard que jamais et se gardent de les attaquer. §2 : La disparition de l'acte et de ses effets Manifestation de puissance publique, un acte administratif unilatéral ne peut prendre fin qu'en vertu d'une autre manifestation de puissance publique, administrative le plus souvent, législative ou juridictionnelle parfois. Elle peut prendre des formes diverses. A. Modification ou abrogation de l'acte 1. Définition Modification : Un AAU doit être modifié et mis à jour pour être adapté. Abrogation : terme plus technique. L'abrogation c'est l'anéantissement d'un acte. L'acte abrogé disparaît de l'ordonnancement juridique. Ce qu'il faut bien comprendre est que l’abrogation n'a d'effets que pour l'avenir. L'abrogation est l'anéantissement d'un acte. Constatant que l'acte n'est plus légal ou plus nécessaire, son auteur y met fin pour l'avenir, sans remettre en cause les effets qu'il a produits durant sa vie active. L'abrogation d'un acte qui abroge un acte antérieur ne fait pas revivre ce dernier, sauf si la volonté de l'Administration de le remettre en vigueur ne fait pas de doute (CE 28 octobre 2009 Soc. Coopérative agricole l’Armorique maraichère). La modification ne met fin ni à l'acte, ni à ses effets passés : l'acte demeure mais ses effets sont désormais ceux qui résultent de ses dispositions nouvelles. Devant un acte administratif qui n'est plus en phase avec les règles ou les circonstances de fait, l'Administration a en général le choix entre modification et abrogation, quitte dans ce dernier cas, à le remplacer immédiatement par un autre. L'abrogation ne s'impose que lorsqu'aucune modification n'est susceptible de le sauver (par exemple, par ce qu'il avait été pris pour l'application d'une loi qui disparaît). 2. Règles de procédure Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 La règle est simple : c'est le principe dit du « parallélisme des formes » : l'acte modificatif doit avoir la même nature que l'acte modifié (il faut un décret pour modifier un décret) et être pris par la même autorité et selon la même procédure (il faut consulter les mêmes organes que lors de l'édiction de l'acte modifié). Ex : Si c'est un arrêté ministériel il faut un arrêté ministériel pour l'abroger. Il y a cependant difficulté lorsque les règles de compétence et de procédure ont changé entre la signature de l'acte modifié et celle de l'acte modificatif : l'autorité qui a pris le premier a été supprimée ou sa compétence transférée à une autre ; l'organe consulté a disparu ou à changé. On résout cette difficulté en appliquant les règles en vigueur au moment où l'acte modificatif est pris ou en tentant de s'approcher du parallélisme des formes autant qu'il est raisonnablement possible : ainsi, comme il est impossible de reconstituer un comité qui avait été consulté initialement mais qui a disparu depuis des années, on consulte celui qui l'a remplacé s'il y en a un. 3. Règles de fond L'abrogation de l'acte réglementaire : Si sujet de dissertation : l'acte réglementaire et l'acte non réglementaire : il faut rappeler point 1 et 2. Comme l'acte réglementaire n'est pas créateur de droits, la règle est que nul n'a de droit acquis au maintien en vigueur d'un règlement. Cette règle a été illustré par l'arrêt du CE, S., 27 janvier 1961 Vannier. Par conséquent, l'Administration dispose d'un pouvoir discrétionnaire pour modifier ou abroger à tout moment un règlement légal. Quand peut-elle le faire ? L'Administration a donc toujours le droit de modifier ou abroger un règlement dans la limite de la légalité, quitte à le remplacer par un règlement moins favorables aux administrés. Sa compétence devient liée lorsque le règlement est illégal : le principe de légalité impose la correction ou la disparition de celui-ci. Il incombe à l'Administration d'y procéder spontanément. A défaut, elle doit le faire lorsqu'on le lui demande (CE, S, 10 janvier 1930, Despujol) Après avoir connu de nombreuses évolutions, la règle a été précisée par l'arrêt du CE, A, 3 fév. 1989, Compagnie Alitalia dont la solution a été reprise aujourd'hui par la loi du 20 décembre 2007 relative à la simplification du droit : « l'autorité compétente est tenue d'office ou à la demande d'une personne intéressé d'abroger expressément tout règlement illégal ou sans objet, que cette situation existe depuis la publication du règlement ou quelle résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date. » Il faut lire en réalité tenu d'abroger ou de modifier. La jurisprudence Alitalia et la loi de 2007 s'appliquent aussi bien aux règlements qui étaient illégaux dès leur signature qu'à ceux qui légaux à l'origine, ont cessé de l'être du fait de circonstances ultérieures. Les circonstances de droit sont faciles à constater : il s'agit en général de normes communautaires ou de lois nouvelles auxquelles le règlement n'est pas conforme. Un changement des circonstances de fait est plus difficile à identifier car il résulte souvent d'une évolution lente : c'est lorsque l'acte n'est manifestement plus en phase avec la réalité que sa modification ou son abrogation s'impose. Cependant, cette obligation n'existe en matière économique que si le changement a le caractère d'un bouleversement imprévisible et tient à des causes indépendantes de la volonté des intéressés (CE, A., 10 janvier 1964, Min. Agriculture c. Simonnet). Nonobstant cette nuance, il résulte de ce qui précède que l'Administration a une obligation de veille permanente sur la qualité juridique de ses règlements. Elle doit en permanence s'assurer que les législations internationales et nationales n'affectent pas la conformité des règlements à ces règles nouvelles et doit s'assurer en permanence que le règlement est toujours adapter aux circonstances de faits. Elle s'en acquitte plus ou moins bien, elle peut aussi compter sur le concours des citoyens qui vont attirer son attention sur un règlement qu'elle n'avait pas surveiller. L’abrogation de l'acte non réglementaire : La règle est moins stricte que pour les actes réglementaires. En premier lieu, Arrêt du CE du 30 juin 2006, Société Neuf Télécom, Le CE juge que « l'autorité administrative n'est tenu d'abroger une décision administrative non réglementaire devenue illégale à la suite d'un changement de circonstances de droit ou de fait que lorsque la décision en question n'a pas créé de droits au profit de son titulaire et n'est pas devenue définitive. » La décision non non : non réglementaire et non créatrice de droit peut être abrogé et doit l'être puisqu'elle est devenue illégal. En second lieu, lorsque l'acte individuel est créateur de droit (faire attention au nom de la sécurité juridique de la personne) il y a des droits individuels à respecter, l'Administration n'est plus tenue de Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 l'abroger lorsqu'elle est définitive. Les droits individuels s'opposent à l'obligation pour l'Administration de remettre les choses en l'état légal. Elle n'est plus tenue (pas de compétence liée) d’abroger cet acte mais est ce qu'elle peut le faire ? La solution est un compromis entre le respect nécessaire de la légalité et le respect des droits acquis. Étendant à l'abrogation de sa jurisprudence Ternon sur le retrait, le Conseil d'État a décidé que « sous réserves de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'Administration ne peut retirer ou abroger une décision expresse individuelle créatrice de droits que dans le délai de quatre mois suivant l'intervention de cette décision et si elle est illégale » (CE, S, 6 mars 2009, Coulibaly) ; encore faut-il que lorsqu'elle abroge (ou retire) l'acte à la demande de son bénéficiaire, elle ne porte pas atteinte aux droits des tiers ( CE, 2 février 2011, Soc. TV Numéric). Les règles particulières sont nombreuses : ainsi, c'est normalement la mise à la retraite d'un fonctionnaire qui abroge sa nomination ; ce que l'on nomme à tort le « retrait » d'une autorisation (il s'agit en réalité d'une abrogation) met fin à celle-ci, selon des procédures très diverses qui sont souvent des procédures de sanction du titulaire qui manque à ses obligations. Le principe est donc que si elle est légal elle ne peut pas être abrogé. Si elle est illégal, l'Administration peut l’abroger mais seulement tout au début de l'existence de cette décision. Après les 4 mois, la sécurité juridique l'emporte. Rappel : compétence liée = l'Administration n'a pas le choix. Pouvoir discrétionnaire : elle a le choix entre plusieurs décisions légales. 4. Conséquences de l'abrogation pour les effets de l'acte Le caractère définitif des effets Une fois que l'acte l'abrogeant est opposable, l'acte abrogé ne peut plus produire d'effets mais ceux qu'il avait eus pendant sa durée d'application, lui survivent : l'abrogation n'est pas rétroactive. Ainsi, lorsqu'un fonctionnaire quitte ses fonctions, il ne peut plus prendre les décisions qu'elles impliquaient mais les décisions qu'il a prises pendant qu'il les exerçait, demeurent en vigueur. De même, il y a 10 ans une grande réforme de l'enseignement supérieur à instauré le système LMD. Le M est apparu en 2002, il s'est substitué aux anciens DEA et DES. Il y avait une abondante réglementation sur les DEA et DES et maintenant sur le Master. À partir du moment, où les textes réglementaires régissant les DEA et DES ont été abrogés, les universités n'ont plus eu de nouveaux DEA et DES. Mais les effets de ceux-ci, dont de l'ancienne réglementation le instituant continue à se produire. Ceux qui ont obtenu un DEA reste titulaire d'un DEA avec tous les effets qui s'attachent à la possession de ce dernier. La disparition dans l'ordonnancement juridique de ces réglementations n'a pas mis fin aux effets de ce DEA et DES. De même, la modification empêche les dispositions modifiées de produire de nouveaux effets mais ceux qu'elles avaient produits sont en principe définitifs. L'application de réglementations nouvelles aux situations existantes C'est une question assez délicate, très fréquente mais mal réglée, c'est une question de sécurité juridique et d'égalité. Il arrive très souvent que la modification ou l'abrogation d'un règlement porte souvent atteinte aux situations légalement constituées sous l'empire de ce règlement. Cela n'est pas toujours du goût des personnes concernées et notamment des entreprises dont les anticipations peuvent être bouleversées. Formellement, il n'y a pas de rétroactivité puisque le texte nouveau ne s'applique que pour l'avenir. Pratiquement, il y a cependant remise en cause de ce qui paraissait légalement acquis. Ce type de situation pourrait dont être la terre d'élection du principe de confiance légitime, s'il était admis en droit administratif français, ce qui n'est pas le cas sauf dans le champ d'application du droit communautaire. Toute une série d'activités ont été crées sous l'empire d'une réglementation instituant un certain nombre de normes. Cette réglementation est abrogée, une nouvelle réglementation plus sévère s'applique-t-elle aux situations en cours ? L'instabilité du droit français affecte la compétitivité du pays. C'est un problème complexe car il n'y a pas de réponse unique. S'il fallait trouver une réponse unique ce serait celle-ci mais la formule est très simplificatrice : En principe, les réglementations anciennes survivent. Mais s'il y a un motif véritable de sécurité publique, alors la norme nouvelle s'applique tout de suite, ou s'applique dans un délai que l'autorité réglementaire fixe et qui est généralement bref. C'est le cas dans des exemples récents en matière de médicaments ou de prothèse. Réponse : Pour les règles de fond, le principe de non-rétroactivité interdit l'application de la réglementation nouvelle aux situations constituées sous l'empire de la réglementation antérieure. Cependant, ce principe connait des exceptions lorsque des motifs de sécurité ou de santé publique imposent l'application immédiate de la réglementation nouvelle. Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 Le droit transitoire Pour éviter les inconvénients pour les administrés de la remise en cause brutale d'une réglementation sur laquelle ils croyaient pouvoir compter, l'Administration ménage fréquemment des périodes transitoires, en reportant dans le temps l'entrée en vigueur de la réglementation nouvelle afin qu'ils puissent se préparer à l'appliquer ou en leur donnant un délai pour se mettre en conformité avec elle. Cette possibilité est devenue obligation dans certains cas. L'arrêt Société KPMG CE, A, 24 mars 2006 pose la nouvelle règle suivante : « il incombe à l'autorité investie du pouvoir réglementaire d'édicter, pour des motifs de sécurité juridique, les mesures transitoires qu'implique, s'il y a lieu, une réglementation nouvelle ; il en va ainsi en particulier, lorsque les règles nouvelles sont susceptibles de porter une atteinte excessive à des situations contractuelles en cours qui ont été légalement nouées ». Cette spectaculaire illustration du principe de sécurité juridique a immédiatement été désignée par la Doctrine sous le nom de droit transitoire. Elle suppose que l'Administration pèse les intérêts en cause pour déterminer dans quels cas des mesures transitoires s'imposent. Si l'acte réglementaire ne comporte pas de mesures transitoires alors qu'il aurait dû en prévoir selon le juge, ce dernier annule l'acte mais seulement en tant qu'il est dépourvu de telles mesures. L'affaire KPMG concernait une réglementation portant sur des contrats. Mais elle s'applique aussi lorsque la situation des administrés résulte d'actes unilatéraux : CE, S, 13 décembre 2006, Mme Lacroix. Cette jurisprudence doit être rapprochée des décisions Association AC ! (CE, A, 11 mai 2004) et Société Techna (CE, S, 27 octobre 2006) : elle procède du même souci de protéger au nom de la sécurité juridique, les administrés contre un changement brusque de l'ordonnancement juridique. B. Le retrait Le retrait de l'AAU a un effet/élément commun avec l'abrogation → il met fin aux effets de l'acte pour l'avenir. Mais contrairement à l'abrogation, il anéantit en outre l'acte et ses effets pour le passé : l'acte est réputé n'avoir jamais été signé et n'avoir jamais produit d'effets. C'est une fiction bien sûr, puisqu'en réalité il en a produit avant d'être retiré, mais juridiquement, on doit faire comme s'il n'en avait pas eus. Le retrait fait donc exception aux principes de non-rétroactivité et du caractère définitif des effets. Il est parfois appelé « annulation non contentieuse » car il a les mêmes effets qu'une annulation par le juge. Mais il s'en distingue par son origine (il est prononcé par l'auteur de l'acte ou son supérieur hiérarchique) et il ne bénéficie évidemment pas de l'autorité attachée aux décisions de justice. Une mesure aussi perturbatrice de l'ordonnancement juridique ne peut reposer que sur un motif très sérieux : lorsqu'il est permis, le retrait ne peut être prononcé que parce que l'acte est illégal. Il est impossible à l'Administration de retirer un acte légal qu'il soit réglementaire ou individuel. Pour l’abrogation, c'est toujours possible. La question du retrait ne se pose que pour les actes illégaux. Première hypothèse : l'acte illégal créateur de droit (sous-entendu forcément non réglementaire, donc individuel illégal créateur de droit). Pour les actes explicites, la règle a été posé en 2001 par un arrêt critiqué par la doctrine CE Ass. 26 octobre 2001, Ternon. « Sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il satisfait une demande du bénéficiaire, l'Administration ne peut retirer une décision explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de 4 mois suivant la prise de cette décision ». Il en résulte que : – le retrait est possible à tout moment si le bénéficiaire des droits créés par l'acte illégal le demande lui-même (ce bénéficiaire n'y a en fait intérêt que s'il espère le remplacement de l'acte par un autre qui lui serait plus favorable) ; – il l'est aussi si une loi ou un règlement le prévoit ; – dans les autres cas, le retrait ne peut intervenir que dans un délai de quatre mois à partir de la signature de l'acte (et non pas de sa publication) ; au delà, le retrait est impossible. Cela nous rappelle l'arrêt Coulibaly de 2009. En 2009, le CE a unifié sur ce point précis les actes illégaux créateurs de droit, le régime de l'abrogation et du retrait. Cette règle joue, sauf règles législatives ou réglementaires contraires (et il y en a beaucoup). Parait-il raisonnable que des dispositions réglementaires puissent contredire un principe jurisprudentiel ? Le CE en a décidé ainsi. Un règlement peut affecter la règle jurisprudentielle issue de telle loi. Cette règle n'est pas un PGD. Deuxième hypothèse : l'acte illégal non créateur de droit Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 Les actes illégaux non créateurs de droits devraient logiquement pouvoir faire l'objet d'un retrait à tout moment : le rétablissement de la légalité l'impose et aucun droit acquis par les administrés ne s'y oppose. Mais la jurisprudence la plus récente du Conseil d'État semble considérer que le retrait d'un règlement illégal n'est possible si le règlement a reçu application, que dans le délai du recours contentieux ou si le règlement a fait l'objet d'un recours gracieux ou contentieux formé dans ce délai (19 mars 2010, Syndicat des compagnies aériennes autonomes et a.). On rappelle qu'un règlement illégal qui n'a pas été retiré dans ces conditions, doit de toute manière être abrogé. Pour le retrait de l'acte légal → toujours impossible qu'il soit réglementaire ou individuel et créateur de droits ou non. Pour les actes non créateurs de droits et illégaux → retrait rétroactif possible mais non obligatoire cet acte soit réglementaire ou individuel. Pour les actes individuels créateurs de droits et illégaux → Décisions explicites, c'est la jurisprudence Ternon, retrait possible. Pour les décisions implicites → doutes. C. Les effets du temps L'acte peut encore disparaître par l'effet du temps. En premier lieu, son auteur a pu lui fixer un terme au delà duquel l'acte cesse de s'appliquer, sans qu'il soit nécessaire de prendre un acte contraire : ainsi d'un arrêté municipal interdisant la circulation dans une rue pour la durée des cérémonies du 14 juillet ou des autorisations administratives délivrées pour une durée déterminée. En second lieu, un acte peut disparaître par caducité (c'est-à-dire disparaît par non usage), mais celle-ci ne peut être constatée par l'Administration que si une loi l'a prévue : cela est rare et ne concerne guère que certaines autorisations administratives (comme le permis de construire) dont le titulaire n'a pas fait usage dans le délai fixé par la loi. En revanche, en dehors de ces hypothèses, le temps qui passe n'a aucun effet sur l’existence d'un acte : faute d'être prévues par une manifestation de puissance publique, la désuétude, la péremption, la prescription extinctive n'existent pas contre un acte administratif unilatéral. Même très ancien, même oublié de tous, un acte administratif unilatéral demeure en vigueur aussi longtemps qu'un acte contraire n'y a pas mis fin. SECTION 4 : L'APPLICATION DE L'ACTE ADMINISTRATIF §1 : Le caractère exécutoire Le caractère exécutoire des actes administratifs unilatéraux est la règle fondamentale du droit public ( CE, A, 2 juillet 1982, Huglo). Par cette proclamation solennelle (« la règle » et non pas « une règle »), le CE a entendu marquer l'importance qui s'attache à l'exécution des actes administratifs unilatéraux. On dit aussi qu'un acte administratif a l'autorité de chose décidée selon une expression due à Maurice Hauriou en 1911. Cette autorité est moins forte que l'autorité de chose jugée, mais elle confère aux acte administratifs une effectivité caractéristique de la puissance publique très supérieure à celle des actes privés. §2 : Exécution par l’administration A. Exécution des actes légaux C'est un point que l'on oublie parfois : l'Administration est tenue d'appliquer les actes légaux qu'elle a pris ; ils lui sont en effet opposables. Si elle ne les respectait pas, non seulement elle commettrait une illégalité et une faute, mais encore il n'y aurait plus que le règne de son bon plaisir, c'est-à-dire le contraire du droit administratif. Or l'une des faiblesses actuelles de celui-ci vient de ce que les autorités administratives, négligeant les aspects juridiques de leur action, ne se sentent pas toujours tenues de respecter les règles qu'elles ont posées ou qui ont été posées par une autorité supérieure. Les citoyens doivent se charger de rappeler cela à l’administration. Une fois que l’acte a fait l’objet d’une mesure de publicité, il est opposable, dans les deux sens : par l’administration aux citoyens mais tout autant des citoyens aux autorités administratives. Si un acte administration légal gêne l'Administration, il lui faut non pas le violer, mais l’abroger ou le modifier. B. Exécution des actes illégaux 1. Les actes réglementaires La réponse de la jurisprudence est constante : avis du CE du 9 mai 2005, Marangio : « En vertu d’un principe général, il incombe à l’autorité administrative de ne pas appliquer un règlement illégal ». Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 Cela est logique car pèse sur l'Administration une obligation constante de vigilance envers les règlements et lorsque l'Administration s'aperçoit que le règlement est illégal, il lui incombait de le corriger par modification ou abrogation. 2. Les actes individuels créateurs de droits Une fois passé le délai de 4 mois (Jurisprudence Ternon) dans laquelle l'administration peut abroger ou modifier un acte individuel, l'acte est intangible et l'Administration doit lui donner son plein effet. Il existe des AAU illégaux et qui s'appliquent donc. Elle doit donner plein effet à l'acte individuel irrégulier qui n'a été ni rapportée, ni annulé, ni déclaré illégal par une juridiction (CE, 16 décembre 2005, Lacroix). Ainsi, en matière réglementaires, c’est le respect de la légalité qui prime toujours, en matière d’actes individuels créateurs de droits, c’est le respect de droits acquis par les administrés qui prime, une fois passé le délai de 4 mois. §3 : Exécution par l’administré A. Observation générale L'administré doit exécuter, appliquer, respecter les actes administratifs qui lui sont opposables. S'il est convaincu de leur illégalité, il doit utiliser auprès de l'Administration ou du juge les voies de recours qui lui sont ouvertes mais tant qu'elles n'ont pas abouti, il ne peut pas se soustraire à l'autorité de chose décidée. La vie en société l'exige impérieusement. L'Administration a le privilège du préalable (expression d'Hauriou) qui signifie que les décisions de l'Administration s'imposent aux administrés sans qu'elle ait à demander à un juge qu'il leur donne force exécutoire. Elles sont en effet présumées légales. L'autorité administrative n'est d'ailleurs pas quitte de ses obligations en prenant un acte : elle doit encore veiller à son exécution par ceux à qui il s'applique. Certes, il peut lui arriver pour des raisons inégalement honorables, de fermer les yeux sur certaines violations de la réglementation. Mais les tolérances administratives ne font pas droit et peuvent engager la responsabilité de la personne publique envers ceux à qui elles causent un dommage. B. L’exécution forcée / exécution d’office Lorsqu'un administré n'exécute pas un acte administratif qui s'impose à lui, le privilège du préalable ne va pas jusqu'à permettre à l'Administration d'user aussitôt de la force publique Elle doit en principe obtenir d'abord du juge (presque toujours pénal) la condamnation de l’administré récalcitrant. L'exécution par la force publique n'est licite que dans des cas strictement délimités : l'administré, condamné par le juge pénal, persiste dans son refus d'exécuter l'acte ; encore le recours à la force doit-il être précédé d'une mise en demeure infructueuse. Que se passe t-il lorsque l'acte n'est pas pénalement sanctionné ? La violation d'un AAU n'est pas toujours érigé en infraction par la loi pénale et dans ce cas là, il n'y a pas de recours possible au juge pénal de la part de l'Administration pour obtenir condamnation. C'est une figuration assez rare pour les actes réglementaires surtout en matière de police car il existe dans le code pénal une disposition qui permet une sanction pénale → Art. R. 610-5 du CP (« disposition balai ») : « la violation des interdictions ou le manquement aux obligations édictées par les décrets et arrêtés de police sont punis par les contraventions de la 1ere classe. » S'il n'y a pas de sanction pénale, l'Administration peut utiliser la force de suite après mise en demeure infructueuse. L'existence d'une infraction pénale protège le citoyen : elle retarde le moment où l'Administration veut employer la force, et parce qu'elle donne à ce citoyen récalcitrant les garanties très forte de la procédure pénale avant même que l'Administration agisse. Le juge pénal a plénitude de juridiction, il est compétent pour vérifier la légalité des actes sanctionnés. Cette compétence fait que cette question de légalité est une question préalable. Autrement dit, le citoyen poursuivi sur le fondement d'un texte spécial ou sur le fondement de l’article R 610-5 peut dire au juge « vous ne pouvez pas me condamner parce que l'acte est illégal ». Si le juge lui donne raison, le citoyen ne sera pas condamné et l'exécution forcée sera impossible. L'existence d'une infraction pénale est en réalité protectrice des intérêts et des droits des administrés, puisque dans un premier temps au moins, elle les met à l'abri d'une exécution forcée. Nous avons cependant des exceptions. Même s'il y a sanction pénale, l'exécution forcée est immédiate et possible en cas d'urgence. S'il y a une véritable urgence (ex : un arrêté municipal interdit un accès car une tempête est en cours et des hommes s'y risquent quand même. Les policiers sont là pour surveiller, il y a urgence et vont procéder à une exécution forcée car nous n'avons pas le temps de saisir le juge pénal) Autre exception, la loi. Elle peut autoriser l’exécution forcé d'un AAU sans détour par le juge. C'est assez fréquent. L'article L. 325-1 du code de la route, c'est le texte qui autorise l'enlèvement immédiats des Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 véhicule en stationnement gênant. L'article L 523-1 du code de l'entrée du séjour des étrangers dispose que « l'arrêté prononçant l'expulsion d'un étranger peut être exécuter d'office par l'Administration ». Ces règles sont toutes très libérales et purement prétoriennes. Elles ont été posé par un arrêt du TC, 2 décembre 1902, Société immobilière de Saint-Just. Cela dit, cette présentation est tronquée car depuis une trentaine d'année, l'Administration dispose de plus en plus largement du pouvoir de prononcer elle même des sanctions administratives contre des citoyens n'appliquant pas la réglementation. Cela n'est pas une exécution par la force que d'infliger à un citoyen une sanction financière, mais c'est bien la sanction d'une inexécution et d'une violation du règlement et de la loi. C'est de plus en plus par là que passe désormais la sanctions des administrés récalcitrants. 150 000e est le maximum légal. §4 : Suspension et exception d'illégalité Le juge administratif peut suspendre l'exécution d'un AAU normalement par le bais d'un référé suspension mais éventuellement par la voie d'un référé liberté. L'acte existe toujours mais ne produit pas d'effets. L'administré ne peut pas refuser par lui même d'appliquer et dispose d'une voie de recours rapide et efficace qu'est le référé. Si le juge ordonne la suspension de l'acte jusqu'à ce qu'il statut dans le fond, l'acte ne s'applique pas. Le juge administratif peut ne pas appliquer à l'espèce en cours un AAU qu'il estime illégal par voie d'exception : si le juge estime que l'acte est illégal il ne l'annule pas car l'annulation ne lui a pas été demandée, mais il ne l'applique pas à l'espèce. L'acte devient fragilisé car chacun sait désormais qu'il est illégal, qu'il ne sera pas appliqué par le juge et que ce dernier n'en sanctionnera pas la violation. CONCLUSION : Le régime de l'acte administratif unilatéral offre à lui tout seul un concentré de droit administratif, dont il constitue l'un des pans les plus sophistiqués. L'importance de ce procédé de puissance publique et la fréquence de son utilisation expliquent l'attention que lui portent la jurisprudence, la Doctrine et depuis peu la législation. Mais les progrès de la sécurité juridique et l'attention des droits portés aux citoyens suscitent des changements rapides qui se traduisent par des solutions de plus en plus détaillées qui se parcellisent au contact des réalités individuelles. L'érosion des règles générales altère intelligibilité du régime : les utilisateurs du droit ne doivent pas leur faire une confiance aveugle ; une vigilance constante s'impose pour détecter les évolutions et dans les cas particuliers. CHAPITRE 2 : LE CONTRAT ADMINISTRATIF Le contrat est un acte juridique qui naît de l'accord des volontés de deux ou plusieurs personnes. Ici, le tableau est contraire. Le droit de référence en matière de contrat est le droit civil. La théorie du contrat administratif est beaucoup moins performante que le droit civil des obligations contractuelles. Il n'en reste pas plus que les personnes morales de droit public ont pu conclure chaque jour une masse énorme de contrats. Ce procédé de plus en plus utilisé est double. En effet, l'Administration recourt abondamment au droit privé et les contrats qu'elle signe avec d'autres personnes se répartissent entre deux catégories de contrat : les contrats de droit privé de l'Administration et les contrats administratifs de l'Administration. Faut-il distinguer en droit administratif convention et contrat comme le fait le droit privé ? Cela n'est pas nécessaire. Il y a des habitudes de langage qui conduisent à parler parfois de convention, parfois de contrat, mais les deux expressions peuvent être considérées comme synonymes. Les règles du contrat administratif évoluent par saccades : – les règles de qualification et de fond, prétoriennes, ont été fixées au début du XXème siècle et aménagées au milieu de celui-ci – Les règles de conclusion, de plus en plus établies par des lois de transposition de directives de l'Union européenne, ont été renouvelées depuis une vingtaine d'années. – Les règles de contentieux font actuellement l'objet d'une reconstruction de la part du législateur et du Conseil d'Etat. SECTION 1 : LA QUALIFICATION DU CONTRAT ADMINISTRATIF Nous avons un contrat signé par une personne publique et par une/plusieurs autres parties. Il est essentiel de déterminer si c'est un contrat de droit privé ou un contrat administratif car le régime juridique des uns et des autres diffère sur beaucoup de points. Si c'est un contrat de droit privé, c'est pleinement le Code civil ou code du travail qui s'applique et c'est le juge judiciaire qui est exclusivement compétent. Si c'est un contrat administratif, les règles de fond ne sont plus les mêmes. En cas de contentieux, c'est le juge administratif Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 qu'il convient de saisir. Il faut savoir que les parties n'ont pas le choix de cette qualification. Ce sont des éléments objectifs liés au contenu même du contrat qui aiguille vers un contrat de droit privé ou un contrat administratif. Les méthodes de qualification en matière de contrats sont très souples : en principe, ce sont des critères jurisprudentiels mais il y a de la législation §1 : Les critères jurisprudentiels de qualification Ici, nous avons une méthode de qualification par critères dégagés par la jurisprudence c'est-à-dire à partir d'élément dont un seul est suffisant pour emporter la qualification. Il faut d'abord en principe qu'une personne publique figure parmi les parties du contrat. Mais ce critère organique n'est pas suffisant : il doit être complété par des critères matériels. A. Contrat entre personnes publiques Le Tribunal des Conflits a essayé de simplifier les choses avec un arrêt du 21 mars 1983, UAP en adoptant une présomption de bon sens : « les contrats entre personnes publiques sont réputés a priori administratifs, sauf dans les cas où, eu égard à son objet, il ne fait naitre entre les parties que des rapports de droit privé ». La présomption d'administrativité repose sur une considération organique qui paraît de bon sens. En réalité, cette présomption ne sert pas à grand chose. Dans la pratique, il faut la vérifier, par usage des critères, que les rapports entre les personnes publiques parties au contrat ne sont pas de droit privé (s'ils le sont, le contrat est de droit privé). Malgré la tentative de simplification de cet arrêt, les critères jurisprudentiels de qualification des contrats entre personnes publiques sont les mêmes que ceux entre personnes publiques et privées. L'arrêt « UAP » n'a pas eu la portée que l'on pouvait en attendre et n'est que faiblement simplificateur. B. Contrat entre personne publique et personne privée Le critère organique suppose la présence d'une personne publique parmi les parties. Mais cette condition n'est jamais suffisante. Pour être administratif, le contrat doit en outre satisfaire à l'un des deux critères matériels que l'on va présenter. Il y a donc deux critères alternatifs, c'est-à-dire qu'il y a deux manières de qualifier un tel contrat. Chacun des critères est auto-suffisant, il n'y a pas besoin que le contrat cumul les deux critères. La jurisprudence les utilise concurremment sans hiérarchiser leur importance. Il faut d'abord savoir qu'a priori un contrat entre personne publique et personne privée est supposé de droit privé. Cependant, le contrat devient administratif s'il contient une clause exorbitante de droit commun ou le critère de service public. 1. La clause exorbitante de droit commun Principe. Le premier critère tient au contenu du contrat : la présence dans le contrat d'au moins une clause exorbitante de droit commun le rend administratif. Ce critère est apparu avec l'arrêt du CE, 31 juillet 1932, Société des granits porphyroïdes des Vosges lorsqu'il y a une clause exorbitante (une seule suffit) de droit commun dans un contrat, c'est tout le contrat qui devient administratif. Au-delà de son importance pour le contrat, il est célèbre à un autre titre : il a été l'un des premiers à compromettre la théorie naissante qui entendait faire du service public le critère unique d'application du droit administratif et de la compétence du juge administratif ; en l'espèce, le contrat de fourniture de pavés à la ville de Lille a été jugé de droit privé faute de clause exorbitante, alors que les pavés devaient permettre à la ville de mener une mission de service public et même de travaux publics. Une clause exorbitante de droit commun est une clause qui sort de l'orbite du droit privé c'est-à-dire qui serait illicite en droit privé alors qu'elle peut être parfaitement légal dans un contrat administratif. De manière générale, elle exprime une inégalité des parties au profit de la personne publique : ainsi d'une clause qui permet à cette dernière de modifier ou de résilier unilatéralement le contrat, même sans faute de la personne privée contractante. C'est le cas de la clause qui n'est pas habituelle en droit privé, pas nécessairement illicite mais on ne la retrouve pas dans le droit privé. Ex: l'obligation par la personne privée de fournir à la personne publique une masse considérable d'informations sur elle-même, sur ce qu'elle fait mais aussi sur ses salariés. C'e n'est pas nécessairement illicite au droit privé mais très inhabituel dans le droit privé donc le juge peut estimer cette clause inhabituelle comme étant une clause exorbitante de droit public. De même, d'une clause qui serait abusive au sens du Code de la consommation, mais qui est justifiée par les exigences du service public. En revanche, le simple référence dans le contrat à un cahier des charges n'est exorbitante que si ce dernier contient lui même des clauses exorbitantes (ce qui est en général le cas). Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 Variations. Il est cependant une hypothèse dans laquelle le contrat est toujours de droit privé, même s'il contient une clause exorbitante : le contrat entre la personne publique qui gère un service public industriel et commercial et l'usager. Les relations entre ce type de service et ses clients forment un effet en bloc de droit privé et de compétence judiciaire. Par exception à la jurisprudence UAP, il en va ainsi même si le client est lui aussi une personne publique. En sens inverse, la jurisprudence s'est parfois affranchie du critère de la clause exorbitante pour qualifier directement comme administratif un contrat passé par un établissement public industriel et commercial (EPIC) et soumis par la loi ou le règlement à un régime particulier excluant l'application du droit privé. Ce fut le cas des contrats d'achat par EDF de l'électricité produite par les producteurs indépendants. Mais cette jurisprudence intervenue dans une situation révolue (EDF est devenue en 2004 une société commerciale et a perdu son monopole), paraît abandonnée. Mais une autre méthode de qualification directe est apparue : est administratif le contrat passé par un établissement public industriel et commercial pour l'exercice « d'activités qui, telles que la réglementation, la police ou le contrôle, ressortissent par leur nature de prérogatives de puissance publique ». 2. L’exécution du service public Le second critère matériel de qualification du contrat administratif tient à l'objet de ce dernier : est administratif le contrat par lequel une personne publique confie à son cocontractant l'exécution même d'une mission de service public. Ce critère a été inventé par l'arrêt Thérond du CE le 4 mars 1910 mais avait été ensuite éclipsé par la clause exorbitante. Il est réapparu en tant que critère alternatif avec un arrêt du CE, 20 avril 1956, Epoux Bertin et l'arrêt Min de l'agriculture c. Grimouard Donc, est administratif le contrat par lequel une personne publique confie l'exécution même d'un service public à une personne privée. Son emploi est fréquent, mais délicat. En premier lieu, il faut que l'on soit bien en présence d'un service public, ce qui n'est pas toujours le cas. Si c'est bien le cas, il faut, en second lieu, que la participation du contractant privé au service public soit assez intense pour que l'on puisse considérer qu'il a bien été chargé d'une partie au moins des missions de service public qui relèvent de la personne publique. La jurisprudence est souple mais exige que le contractant privé contribue véritablement à la délivrance aux usagers des prestations du service public. L'exemple type est la délégation de service public. Par extension, elle considère comme administratif un contrat qui ne confie pas une mission de service public au partenaire de l'Administration mais est pour celle-ci un moyen d'exercer l'une de ses missions de service public. Mais cette extension paraît limitée aux interventions économiques des pouvoirs publics et n'a pas connu un grand développement. C. Contrat entre personnes privées 1. Contrat conclu entre personnes privées Un contrat entre personnes privées ne peut pas être administratif car il ne satisfait pas au critère organique (CE, 13 déc 1963, Syndicat des praticiens de l'art dentaire au département du Nord et Merlin ). Il faut remarquer l'absence de parallélisme sur ce point entre le contrat et l'acte unilatéral : on a vu qu'une personne privée peut prendre un acte administratif unilatéral opposables à des personnes privées mais elle ne peut pas conclure avec celles-ci des contrats administratifs, quels qu'en soient les clauses ou l'objet. → La jurisprudence est simple : un contrat entre personnes privées est un contrat de droit privé. Pour qu'un contrat soit administratif, il faut avant cela qu'il y ait une personne publique parmi ses signataires. Evidemment, le principe a ses exceptions. Un contrat entre personne privée peut devenir administratif si l'une de ces personnes agit au nom et pour le compte d'une personne publique (mandataire d'une personne publique). Il y a bien en réalité une personne publique partie au contrat qui n'est présente que via son mandataire. Pour ce contrat, dont une des parties privées est mandataire d'une personne publique, il faut en plus qu'il contienne une clause exorbitante ou bien qu'il fasse participer une personne privée à l'exécution d'un service public. Il en est ainsi des « associations transparentes » c'est-à-dire créées, financées, organisées et contrôlées par une commune et qui agissent en réalité pour le compte de celle ci : les contrats qu'elles passent avec d'autres personnes privées peuvent être administratifs, à condition, bien sûr, qu'ils comportent une clause exorbitante du droit commun ou fassent participer cette autre personne au service public que la commune à confié à l'association. 2. Transformation d’une personne publique en personne privée Nous avons un contrat signé entre une personne publique à l'origine et une/des personne(s) privée(s). La partie publique devient privatisée (ex : établissement public qui devient société commerciale). L'État en a donc changé le statut et en a fait une personne privée. Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 Ce contrat change t-il de nature en cours d'exécution ? Qu'advient-il de ceux qu'elles avaient conclus avant leur privatisation ? Restent-ils administratifs ou deviennent-ils des contrats de droit privé ? Ce serait logique puisqu'il n'y a plus de personne publique mais en même temps c'est le même contrat qui s'exécute. Modifier implicitement le régime et donc le juge compétent en cas de contentieux peut être très éloigné de l'intention des parties. La jurisprudence a hésité et le Tribunal des Conflits, dans une décision du 16 octobre 2006, Caisse centrale de réassurance, a opté pour la continuité du fond, du contrat malgré le changement de nature de l'une des parties. En effet, la nature d'un contrat s'apprécie à la date de la signature de ce dernier. Elle ne change donc pas avec le statut des parties, sauf dispositions législatives contraires. Cela a deux conséquences : – la conséquence pratique est que l'intention du législateur ou de l'autorité administrative de privatiser une personne publique n'est pas immédiatement suivi d'effets pour ses contrats. – Cette solution raisonnable du TC entraine une nouvelle exception : en principe, un contrat entre personne privée est d'ordre privée sauf pour les contrats qui ont été conclu à un moment où une des personnes privées avaient le statut d'une personne publique. §2 : La qualification administrative Il y a des qualifications jurisprudentielles mais aussi l'intervention exceptionnelle du législateur qui est venu simplifier les choses dans un certains nombres de cas en disant lui même que telle catégorie de contrat forme un contrat administratif. Nous n'avons pas à nous poser la question de la clause exorbitante ou des critères de service public. – Les contrats de cession de biens immobiliers de l'État. Beaucoup de ces biens immobiliers, les contrats de cession sont nécessairement des contrats administratifs en vertu de l'article L 3331-1 du Code général de la propriété des personnes publiques. – Même chose pour ce qui est en vertu de la loi des marché de travaux publiques. Tous les marchés de travaux publiques sont des contrats administratifs. – Les contrats portant occupation du domaine public en vertu de l'article L 2331-1 du CGPPP – Les contrats soumis au code des marchés publics en vertu de la loi MURCEF du 11 décembre 2001. – Les contrats de partenariat qui sont nécessairement administratifs en vertu de l'article L. 1414 du CGCT. SECTION 2 : LE RÉGIME DU CONTRAT ADMINISTRATIF Le contrat administratif s'inspire pour son régime de deux textes fondamentaux du Code civil : – l'article 1134 (« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. ») & – l'article 1135 (« Les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature. ») qui sont liés au phénomène contractuelle que le droit administratif ne peut pas nier. Mais parce qu'il est administratif, le contrat déroge considérablement à la logique des articles 1134 et 1135 selon les nécessités de l'intérêt général, en donnant à la partie publique des pouvoirs que son cocontractant privé n'a pas et en lui imposant des obligations spécifiques. L'égalité des parties qui est la règle en droit privé, est fortement malmenée en droit administratif. Elles n'ont pas à consentir à ce déséquilibre : il s'impose à elles, comme le ferait une règle d'ordre public en droit privé. §1 : La conclusion du contrat administratif A. La question de la liberté contractuelle La liberté contractuelle existe t-elle en droit administratif ? Est-elle constitutionnelle ? Il s'agit bien d'une règle constitutionnelle. Les juridictions suprêmes ont longtemps tourné autour du pot et s'orientent maintenant vers la direction suivante : dans un premier temps, le Conseil constitutionnel s'est bien gardé d'affirmer le caractère constitutionnelle de la liberté de conclure un contrat même en droit public car il ne voulait pas paralyser le législateur. En effet, il a sanctionné plusieurs fois des lois qui affectaient la liberté contractuelle mais il l'a fait de manière indirecte, en se fondant sur les atteintes que ces lois porteraient à d'autres droits et libertés constitutionnellement garantis. Puis, le Conseil constitutionnel a rusé en rattachant la liberté constitutionnelle à la liberté de la DDHC. Ensuite, il a franchi le pas le 19 décembre 2000 dans sa décision de Financement pour la sécurité sociale pour 2001 en donnant spécifiquement une valeur constitutionnelle de la liberté contractuelle des personnes privées et dans une décision du 30 novembre 2006, Secteur de l'énergie, il a étendu la valeur constitutionnelle de la liberté contractuelle Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 aux personnes publiques. Il est clair que le CC considère que la liberté contractuelle a une valeur constitutionnelle aussi bien aux personnes privées que publiques. Mais le CC continue a autoriser très largement le législateur et l'Administration à apporter des exceptions à cette liberté contractuelle. Le CE voit, quant à lui, un principe général du droit dans la liberté contractuelle. Dès lors, l'Administration ne peut lui porter atteinte que si la loi l'y autorise. En somme, les deux juridictions admettent qu'il existe un principe de liberté contractuelle mais hésitent à en fixer précisément la place dans la hiérarchie des normes. Pour les contrats entre personnes privées (et les contrats de droit privé auxquels sont parties des personnes publiques), elles estiment que la protection des principes du Code civil et de la volonté des parties contre des atteintes législatives et réglementaires est convenablement assuré par la liberté générale de l'article 4 de la DDHC et le respect des autres principes et droits constitutionnellement garantis. En revanche, la jurisprudence répugne à accorder une protection identique à la liberté contractuelle dans les contrats administratifs : on peut le souhaiter notamment au nom de la liberté de la concurrence ou redouter que cela remette en cause bien des habitudes et fragilise la jurisprudence relative aux obligations et pouvoirs propres à l'Administration contractante. Comme en droit privé, la liberté contractuelle dépend aussi de la puissance de négociation de chacune des parties : le rapport de force n'est pas toujours favorable à l'Administration, surtout lorsqu'il s'agit de petites collectivités territoriales face à de grandes sociétés privées. Mais, ce sont surtout des données juridiques qui pèsent sur la liberté de détermination du contenu des contrats administratifs et sur la liberté de choix de son cocontractant par l'Administration. B. Le contenu des contrats Ce contenu est-il libre ? Les parties peuvent-elles mettre les clauses qu'elles veulent ? Il faut opter pour une réponse théorique positive : le contenu des contrats est libre à condition de ne pas enfreindre la loi. Mais nous avons vu que le législateur et l'Administration peuvent s'immiscer. Le contenu est très contraint par des clauses interdites mais surtout par des clauses imposées par la législation et la réglementation en vigueur. Les contrats administratifs sont rarement sui generis. La plupart de temps, ils entrent dans une catégorie déterminée. Ainsi la liberté du contenu se heurte aux contraintes qui résultent de l'existence de grandes catégories de contrats, dont chacune obéit à des règles propres. ( ex: conventions d'occupation du domaine public, contrat d'emprunt public, les partenariats..) Une fois cela fait, le contrat est totalement modélisé par un décret en vigueur. Comme grandes catégories de contrat, nous citerons : – – Les contrats de marché public sont des contrats par lesquelles une personne publique (l'acheteur public) se procure des prestations moyennant le versement d'un prix. Ces prestations sont elles mêmes déterminées par des sous catégories réglementaires. Ces contrats sont minutieusement régit par le Code du marché public qui est exclusivement déterminé par un décret. Dans le marché, le risque économique pèse sur la personne publique. Les délégations de service public, par lesquelles la personne publique confie à une autre personne (le plus souvent privée) la gestion d'un service public, avec une rémunération substantiellement liée aux résultats de l'exploitation. La délégation de SP pèse sur l'exploitant privé. La DSP a été inventé et est régie par la loi dite Sapin du 29 janvier 1993 et les articles L. 1411-1 et suiv. du CGCT. Ce qu'il faut souligner est que non seulement il y a les Codes mais que toutes les grandes catégories de contrats administratifs font l'objet d'un cahier des charges (qui n'est plus obligatoire). On rencontre aussi des cahiers des charges dans les DSP. En outre, il existe des contrats-types qui, sans être strictement obligatoires, s'imposent en pratique. Les contrats administratifs sont souvent constitués d'un ensemble de document qui précisent progressivement leurs stipulations → les documents contractuels. La liberté contractuelle des parties envers les stipulations des contrats est donc variable, et généralement moindre qu'en droit privé. Et sur un point, elle est inexistante : il y a des règles qui s'imposent aux parties, quand bien même elles ne seraient par formellement reproduites dans le contrat. En outre, les contrats sont soumis à de nombreux contrôles internes et externes, dans le détail desquels on n'entrera pas. C. Le choix du cocontractant La théorie civiliste des vices du consentement est applicable aux contrats administratifs. Mais elle est rarement sollicitée car la procédure de conclusion de ces contrats est si minutieuse qu'elle devrait exclure de tels vices. Tous les contrats administratifs sont intuitu personae (en raison de la personne). Il faut que la personne publique choisisse soigneusement la personne de son co-contractant et que le consentement des parties soit sain → théorie civile des vices du consentement. Mais la personne publique n'est pas Téléchargé par Jonathan Layn ([email protected]) lOMoARcPSD|36365031 entièrement libre de choisir son partenaire. Mais c’est très théorique : la procédure et l’objet des contrats administratifs, rend invraisemblable une erreur, un dol ou une lésion. Théoriquement, un contrat administratif est nul si le consentement de l’une des parties a été vicié mais cela est très rare car le choix du co-contractant résulte d’une procédure très encadrée, qui limite très sérieusement la liberté contractuelle. La procédure de conclusion d’un contrat administratif est lourde, longue, minutieuse et contrôlée. Cette procédure a beaucoup évolué depuis 20 ans, en application de directives de l’UE et suscite un contentieux communautaire et national abondant. La tradition française opposait les délégations de service public dans lesquelles l'Administration avait une grande liberté de choix de son cocontractant et les marchés dans lesquels sa liberté était très réduite. Ces différences subsistent, mais elles se sont considérablement atténuées depuis une vingtaine d'années, en application de directives communautaires qui ont rapproché les deux régimes. Poursuivant la réalisation du marché unique que prévoit le Traité de Rome, le législateur communautaire a ouvert, étape par étape, les contrats administratifs à toutes les entreprises des Etats-membres. La France a amendé sa législation et ses pratiques. L’idée qui inspire cette