Psychologie du travail digitali_5_1 PDF
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This document discusses the concept of appropriation of technologies in the context of work psychology. It explores the social aspect of using tools and how individuals adapt them to their practices and needs. It also touches upon the idea of technology as an element shaping activity, making it more complex than a pure transfer or mediation.
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1. De l’usage à l’appropriation des technologies L’usage renvoie au cadre social, notamment organisationnel, dans lequel se déroule l’utilisation des outils. Il est donc un construit social qui se façonne en fonction des groupes d’utilisateurs. Il se situe au confluent de la logique technique du...
1. De l’usage à l’appropriation des technologies L’usage renvoie au cadre social, notamment organisationnel, dans lequel se déroule l’utilisation des outils. Il est donc un construit social qui se façonne en fonction des groupes d’utilisateurs. Il se situe au confluent de la logique technique du concepteur, de la logique cognitive de l’usager, de celle sociale de son lieu d’utilisation ainsi que de la logique stratégique que lui insuffle l’organisation qui la déploie (Brangier et Barcenilla, 2008). L’usage est donc toujours situé. Ce sont les éléments du contexte d’usage qui vont donner du sens à l’outil dans sa finalité, son utilisation, son appréciation. On n’utilisera ainsi pas de la même manière et avec la même facilité un automate de billetterie SNCF en période de pointe (où l’on ressent la forte pression de la file d’attente derrière soi) et en soirée, avec une affluence moindre. Quant au terme d’appropriation, elle introduit la dimension processuelle ou la trajectoire au cours de laquelle se construisent les usages (Dubois, 2006 ; Benedetto-Meyer et Chevallet, 2008). S’approprier une technologie renvoie donc au fait d’imprimer sa marque, son style à l’outil. Autrement dit, de l’adapter à une pratique (personnelle, professionnelle), de construire une utilisation singulière et de développer des usages spécifiques adaptés à ses modes de fonctionnement et aux exigences de l’activité à réaliser. Le concept d’appropriation est également lié à l’idée d’une maîtrise des outils où les individus concernés deviennent aptes à gérer l’usage de la technologie qui leur est transmise, voire d’en assumer eux-mêmes le développement, par l’enrichissement ou le détournement de l’outil (notion de catachrèse déjà abordée précédemment). L’acte d’usage apparaît donc comme un acte de recréation : non seulement de l’outil lui-même, mais aussi de notre rapport à l’activité et à son objet. L’activité médiatisée par la technologie ne saurait en effet être la simple transposition de l’activité initiée et pensée. Elle est autre chose. Elle peut être plus, elle peut être moins, mais elle est souvent différente. Il y a donc, pour paraphraser Vygotski (1997) « un devenir de l’activité par la technologie… ». L’interaction avec la technologie serait alors le lieu de réalisation de l’activité, de sa construction et de ses développements, possibles et impossibles : « [Le sujet] voit dans l’objet d’autres usages possibles que ceux qu’il pratique, imagine ou auxquels il a renoncé. Ce changement de la façon de percevoir l’objet est un changement potentiel de l’action, une nouvelle affordance » (Fernandez, 2004, p. 147). Ces horizons ne sont pourtant possibles que si la technologie et ses modalités d’usage ont été conçues avec suffisamment de souplesse, de plasticité et de flexibilité pour autoriser des variations d’usage : « Sans invention il n’y a pas d’outil, sans réinvention, il n’y a pas d’usage », affirme Béguin (2010). C’est pourquoi la santé dans le travail médiatisé ne peut se construire que dans cette capacité à créer de nouvelles normes, à imaginer de nouveaux usages avec ces TIC. Le bien-être repose dès lors sur la capacité d’affecter (au sens de transformer) cet environnement technologique de travail par son initiative afin d’éviter d’être affecté soi-même par celui-ci (au sens d’être fragilisé). En somme, la réappropriation de l’objet technique témoignerait d’une bonne santé ; son empêchement serait source de souffrance. Par ailleurs, nous soutenons que l’appropriation est le préalable nécessaire à l’acceptation de toutes technologies : sans adaptation de l’outil, pas d’adoption possible. C’est parce que l’individu peut s’approprier l’outil qu’il peut justement se reconnaître en lui, lui donner du sens et donc l’accepter. L’appropriation est donc fondamentalement liée à une affirmation : « Elle s’inscrit toujours dans une culture donnée ; elle mobilise des savoir-faire, des savoir- être, des savoir-dire préexistants. On ne s’approprie [et on n’accepte, NDA] que ce dans quoi on peut finalement se reconnaître » (Kouloumdjan, Armellio et Montandreau, 1997, p. 17). L’appropriation permet de passer d’un artefact transmis à un instrument construit et instruit pour l’activité et ses finalités. Si l’appropriation paraît être un prérequis pour un usage réussi, d’autres facteurs et conditions sont néanmoins nécessaires pour soutenir l’adoption des technologies dans l’activité.