Droit Pénal du Travail Revision PDF
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Ce document traite du droit pénal du travail, en couvrant les aspects historiques, de la structure et des différentes responsabilités des individus et des entreprises. Il touche aux premières législations, aux évolutions de la protection des travailleurs. Il détaille les catégories de personnes responsables, avec une attention particulière aux entreprises et à la détermination du chef d'entreprise.
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# Droit Pénal du Travail ## Introduction Le droit du travail a toujours été marqué par le droit pénal. Les dispositions du Code Pénal (CP) en 1810 sanctionnaient majoritairement les "salariés". En réalité le terme "salarié" n'existait pas juridiquement à cette époque, car le contrat utilisé était...
# Droit Pénal du Travail ## Introduction Le droit du travail a toujours été marqué par le droit pénal. Les dispositions du Code Pénal (CP) en 1810 sanctionnaient majoritairement les "salariés". En réalité le terme "salarié" n'existait pas juridiquement à cette époque, car le contrat utilisé était le contrat de **louage**. Le terme salarié faisait plutôt référence aux **travailleurs**. Parmi les sanctions prévues dans le CP on retrouve le _délit de coalition_, réprimé davantage lorsque les coalitions étaient celles de **travailleurs** contre la **force publique**. Le recours à la force pénale pour garantir l'application du droit du travail est apparu au milieu du 19ème siècle, pendant la période libérale du Second Empire. Il s'agit alors de garantir l'effectivité des normes impératives ayant pour objectif de protéger la partie **faible** au contrat. Pour ce faire, il existait un corps de **fonctionnaires** chargés de faire respecter les premières **législations du travail** tel que nous le connaissons aujourd'hui : **l'inspection du travail**. Cela s'est fait en deux étapes : - Loi du 19 mai 1874 - Loi du 2 novembre 1892 La loi du 5 juillet 1972 portant réforme des pénalités en droit du travail a été adoptée pour accroitre l'efficacité du droit du travail. Cette loi a modelé la structure du droit pénal du travail tel que nous le connaissons aujourd'hui et a donné aux **inspecteurs du travail** la compétence de constater les infractions au droit du travail. La promulgation le **2 juillet 1973** d'un nouveau Code du Travail (CT) a permis de rassembler dans un même code les infractions pénales en matière de droit social qui existaient préalablement. Dans les années 70, le droit pénal avait une orientation qui visait une vision individuelle du **travailleur** en matière d'hygiène et de sécurité. Par la suite, on a observé un phénomène de déplacement des valeurs protégées vers la protection des **rapports collectifs**. A partir de la **loi du 6 décembre 1976**, le domaine de la protection du salarié en tant qu'individu a été élargi notamment avec la prise en compte de la dignité du salarié. Sont apparues dans le droit des notions telles que la discrimination, le harcèlement mais aussi les conditions de travail indignes. Le **1er mars 1994** a été adopté un nouveau Code du Travail (CP) qui a instauré les délits d'imprudence largement mobilisés en matière d'hygiène et de sécurité ainsi que la **responsabilité pénale** des personnes morales, qui disposent d'un impact majeur en droit du travail. C'est par ailleurs une loi du 9 mars 2004 qui a généralisée la responsabilité pénale des personnes morales. Le droit pénal du travail semble donc avoir acquis une certaine maturité. On peut se demander si nous ne sommes pas dans une période **de dépénalisation** du fait. En effet, les statistiques mettent en lumière le décalage entre le nombre de procès verbaux et le **champ d'opportunité** des poursuites. Cela signifie qu'une nombre important d'infractions prévues en droit pénal du travail ne sont pas ou très peu mobilisées. La majorité des condamnations pénales portent sur le **travail illégal**, la durée du travail ainsi que les **blessures**, les **homicides involontaires** ou les infractions touchant aux normes d'hygiène et de sécurité. ## Le droit pénal du travail est divisé en 3 branches : - La procédure pénale (ensemble des règles d'organisation de compétence des juridictions pénales) - Le droit pénal général - Le droit pénal spécial Les règles de droit pénal général ont vocation à s'appliquer à toutes les règles de droit pénal spécial dont font partir les règles de droit pénal du travail. Par conséquent, pour comprendre ce cours il faut se reporter au CP et au CT. # Titre 1 : Les personnes responsables ## En droit pénal du travail on retrouve 2 catégories de personnes responsables : - **Personnes physiques** - **Personnes morales** ## Chapitre 1 : Les personnes physiques responsables Le principe de responsabilité personnelle ressort de l'article 121-1 du CP : "nul n'est pénalement responsable que de son propre fait". Il s'agit d'un principe essentiel du droit pénal. Le principe de la responsabilité personnelle, individuelle, signifie qu'une personne ne peut voir sa responsabilité pénale engagée si elle n'a pas elle-même participé à la perpétration de l'infraction soit en tant qu'auteur soit en tant que **complice**. Cela exclut d'office la responsabilité du fait d'autrui. La majorité du temps la personne responsable est le chef d'entreprise car c'est lui qui dispose de prérogatives particulières. Mais pour autant, les textes de droit pénal ne se limitent pas à incriminer l'employeur et ses représentants. Les textes de droit pénal se divisent en 2 catégories : >* Textes visant exclusivement une catégorie de personnes (employeur, salarié...) >**Exemple**: Article L.1227-1 : révélation des secrets de fabrication >* Texte visant des personnes de manière plus large au delà de l'employeur et des représentants. >**Exemple**: Art L1152-1 CT et art 222-33-2 CP, qui ne vise personne en particulier. Cela peut concerner l'employeur mais également un collègue de travail, un supérieur, un subordonné... ## Section 1. La détermination du chef d'entreprise ### I. Identification du chef d'entreprise en cas d'entreprise unique #### A. Généralité sur la notion de chef d'entreprise **Chef d'entreprise**: personne physique à laquelle les organes de l'entreprise ont donné la permission générale de diriger et de représenter la personne morale. En revanche le chef d'entreprise n'est pas forcément l'employeur. Il est courant que dans le contrat de travail l'employeur soit la personne morale. Evidemment dans le cadre d'une entreprise individuelle employeur et chef d'entreprise se confondent. En application de l'article 121-1 CP, seul le chef d'entreprise qui était en fonction le jour de la commission de l'infraction peu voir sa responsabilité pénale engagée (CCass ch. soc. 3 avril 2013 12-82.551). Il existe néanmoins une exception : la responsabilité pénale "du fait d'autrui" du chef d'entreprise en matière d'hygiène et de sécurité. L'employeur peut être poursuivi pour des infractions en matière d'hygiène et de sécurité qu'il n'a pas commis personnellement mais révélée par les agissements des ses salariés dans le cadre de leur travail. Il s'agit d'une jurisprudence très ancienne de la ch. soc. de la CCass datant du 28 janvier 1859, qui a fondé sa décision sur l'autorité de l'employeur. En effet puisque l'employeur dispose du **pouvoir de contrôle et de sanction**, il est également garant du **respect de la loi** par ces salariés. La ch. crim de la CCass le 29 janvier 1985: "les chefs d'entreprise doivent s'assurer personnellement et à tout moment de la stricte et constante exécution des règles de sécurité des travailleurs qu'ils emploient." L'engagement de la **responsabilité pénale** du chef d'entreprise est alors apprécié strictement puisqu'il faut à la fois que le fait fautif soit commis par le salarié et que cela soit commis dans le cadre de l'activité de l'entreprise. L'obligation du chef d'entreprise dans ce cas est une obligation de **résultat**. Par conséquent, il est logique que sa responsabilité pénale soit engagée. Il pourra néanmoins y échapper s'il démontre qu'il a réalisé une **délégation de pouvoir**. Le chef d'entreprise pourra également être poursuivi pour les autres infractions commises par ces salariés (ex: infraction au code de la route). La CCass a notamment considéré dans un arrêt récent que le chef d'entreprise ne pouvait pas s'exonérer de sa responsabilité par la preuve qu'il n'utilisait pas le véhicule au moment de l'infraction. Elle estime qu'en tant que chef d'entreprise, il est peu crédible qu'aucun planning ne gère l'utilisation du véhicule (arrêt du 21 novembre 2023). ### B. Attribution de la qualité de chef d'entreprise au dirigeant de droit #### 1. Le cas de l'entreprise individuelle L'attribution de la qualité de chef d'entreprise au dirigeant de droit ne pose pas vraiment de difficulté dans le cadre d'une entreprise individuelle. Elle est créée par une personne physique et dirigée en son nom propre. Dans le cadre d'une entreprise individuelle, la personne physique est non seulement le chef d'entreprise mais aussi l'employeur. Elle sera donc considérée par principe responsable des infractions commises à la législation du travail. #### 2. Le cas de la personne morale La désignation du dirigeant de droit est plus complexe lorsque l'entreprise repose sur une ou voir plusieurs sociétés ou entités jouissant de la personnalité morale. Cela amène à une dissociation de la figure de l'employeur de celle du dirigeant. La qualité de chef d'entreprise revient de manière générale à la personne qui détient la plénitude des pouvoirs de direction sur le personnel et les biens affectés à l'activité. La détermination du chef d'entreprise dépend donc du type de personne morale, il faut donc dans le cadre de l'entreprise s'en remettre au **droit des sociétés**. ##### a. La SARL La SARL permet d'avoir un associé unique. Dans ce cas, seul ce gérant est responsable (alinéa 2 art L.223-1 Ccom). La difficulté apparait lorsqu'on est face à une pluralité de dirigeants. Dans ce cas, la jurisprudence retient un principe de **responsabilité cumulative**, dans la mesure où tous les gérants sont censés être investis des mêmes pouvoir de direction. Une décision de la ch. crim. du 12 septembre 2000 99-88.011 souligne la position de la CCass et estime que "chacun des co-gérants de droit ou de fait à le devoir d'assurer le respect de la réglementation relative à la sécurité des travailleurs". Cette position a été confirmée par un arrêt plus récent où la CCass a précisé que les juges du fond devaient rechercher dans les statuts la répartition des pouvoirs des co-gérants (arrêt 9 juin 2015). Il existe néanmoins une exception à la responsabilité cumulée des co-gérants. En cas de répartition de la gestion entre les gérants, la responsabilité pénale revient au gérant chargé d'appliquer la **responsabilité sociale** dans l'entreprise (25 septembre 1991 ch. Crim. 89-86.910). ##### b. La société en nom collectif ou en commandite Pour les sociétés en nom collectif ou en commandite, qu'elles soient simples ou en action, la même solution que les SARL s'applique, y compris le cas de co-gérance avec la responsabilité cumulative sauf en cas de répartition de la gestion, que ce soit des gérants de droit ou de fait. Cela a été rappelé par la CCass du 29 janvier 1985 et dans un arrêt du 30 septembre 2003. ##### c. Société anonyme avec conseil d'administration Dans cette hypothèse, le chef d'entreprise est par principe le président du conseil d'administration. La loi NRE du 15 mai 2001 a permis d'aménager la modalité d'exercice du pouvoir en disposant que "la direction régional de la société peut être assurée par une autre personne physique dénommée directeur général". Dans ce cas, la responsabilité pénale engagée est cumulativement celle du président du conseil d'administration et celle du directeur général. Dans ce cas, les juges du fond doivent évaluer la part respective des dirigeants dans la réalisation de l'infraction (ch. crim. 23 novembre 2010). #### d. Société anonyme avec conseil d'entreprise de surveillance et directoire La direction de la société anonyme avec conseil d'entreprise de surveillance et directoire revient au directoire. Le directoire est un organe collectif et collégial doté d'un président. La jurisprudence retient la responsabilité pénale de principe du président du directoire (arrêt ch. crim. 9 octobre 1984). La CCass avait retenu la responsabilité du président du directoire pour infraction à la règle du repos obligatoire. Cette jurisprudence a été maintenue (14 octobre 2003). En cas de répartition des tâches, ce sera le membre en charge de la gestion sociale qui sera pénalement responsable. La ch. com. de la CCass a estimé dans un arrêt du 30 mars 2010 que "commet une faute individuelle chacun des membres du conseil d'administration ou du directoire d'une société anonyme qui par action ou abstention, participe à la prise de décision fautive de cet organe, sauf à démontrer qu'il s'est comporté en administrateur prudent et diligent, notamment en s'opposant à cette décision". ##### e. Société par actions simplifiées Pour les société par actions simplifiées (SAS), l'article L.227-6 dispose que le président de la société possède le pouvoir de gérer et de représenter la société dans les limites fixées par l'objet social. C'est donc le président de la SAS qui est pénalement responsable. Néanmoins, l'alinéa 3 prévoit la possibilité de désigner une autre personne en tant que directeur général ou directeur général délégué. Dans ce cas, il sera également possible d'engager leur responsabilité pénale. ##### f. Les associations Les associations peuvent embaucher des salariés et peuvent donc être considérées comme des entreprises au sens du droit du travail. En cas d'infraction à la législation du travail, le dirigeant de droit est en principe responsable. Le dirigeant de droit est le président de l'association et ce, quelque soit l'étendue des pouvoirs qui lui ont été conférés. ##### g. L'administrateur judiciaire L'administrateur judiciaire est la personne qui remplace le chef d'entreprise dans le cadre des procédures collectives. Lorsqu'ils sont nommés par le tribunal, les administrateurs judiciaires peuvent avoir à assumer toutes les obligations légales et conventionnelles du chef d'entreprise. Dans un tel cas, l'administrateur judiciaire assume également une responsabilité pénale de principe. >**Exemple**: ch. crim. CCass 3 mars 1998, un administrateur judiciaire a été reconnu pénalement responsable de l'infraction de blessure involontaire dont à été victime un salarié parce qu'au moment de l'accident l'administrateur était le seul investi des obligations incombant au chef d'entreprise. ## C. Attribution de la qualité de chef d'entreprise au dirigeant de fait (dirigeant réel) ### 1. La responsabilité du dirigeant de fait : un aspect du réalisme du droit pénal du travail Un aspect du **réalisme** parce que le dirigeant de fait est une notion propre du droit pénal du travail. **Dirigeant de fait**: toute personne qui exerce en toute indépendance une activité positive de gestion et de direction de la société (arrêt 1er décembre 2015). Comment déterminer un dirigeant de fait ? On peut s'appuyer sur plusieurs indices comme celui qui prend les décisions d'embauche, de licenciement et d'organisation du travail. C'est un aspect partagé entre le droit du travail et le droit pénal. On retrouve notamment cet aspect de réalité dans la qualification du contrat de travail qui échappe à la volonté de partie (arrêt Labal). L'attribution de la qualité de chef d'entreprise, donc la désignation de la personne en principe responsable en droit pénal du travail ne s'applique que tant que le dirigeant de droit exerce effectivement le pouvoir de direction de l'entreprise. Dans le cas contraire, la jurisprudence n'hésite pas à écarter la responsabilité du dirigeant de droit pour retenir celle du dirigeant de fait. >**Exemple**: Arrêt 11 juillet 2017 16-86.092 qui condamne un dirigeant de fait pour prêt de main d'œuvre illicite. Il a été déterminé que c'était le dirigeant de fait car il possédait des parts et qu'il disposait d'un pouvoir de direction. D'autant que le dirigeant de droit était sa fille. ### 2. La possibilité d'une coresponsabilité d'un dirigeant de droitt et d'un dirigeant de fait La coresponsabilité d'un dirigeant de droit et d'un dirigeant de fait découle d'un arrêt du 12 septembre 2000 où la CCass considère que les gérants de droit et de fait d'une même société peuvent simultanément être tenus comme co-responsables d'une infraction à la législation pénale. Par conséquent, même quand la responsabilité d'un dirigeant de fait est reconnue, cela n'écarte pas automatiquement la responsabilité d'un dirigeant de droit. ### 3. L'absence de responsabilité d'un dirigeant de droit 2 situations doivent être abordées dans lesquelles les juges utilisent la méthode du **faisceau d'indice** : - Société de fait Tout d'abord, il est déjà arrivé à la CCass de reconnaître la responsabilité pénale d'un dirigeant d'une société créée de fait. Dans ce cas, la CCass recherche la personne physique qui dispose de la qualité de dirigeant de fait dans une société créée de fait. C'est ce dernier qui sera considéré comme responsable. >**Exemple**: Dans un arrêt du 16 mars 1971, 3 personnes effectuaient le forage d'un puit et une d'entre elle a été blessée lors d'un accident. Les juges ont retenu la création d'une société de fait entre ces 3 personnes. La personne responsable était la personne qui avait pris la direction des opérations de forage, que la CCass a considérée comme le dirigeant de fait. - Le dirigeant réel C'est notamment recherché lorsque le dirigeant de droit n'exerce plus ses fonctions et que le dirigeant de droit n'est pas encore nommé. Dans ce cas, ce sera la personne physique désignée ou agissant temporairement en tant que dirigeant qui verra sa responsabilité pénale engagée. >**Exemple**: ch. crim. 10 mars 1998, en l'espèce le chef d'un chantier de direction, suite au départ d'un dirigeant de droit s'est vu reconnaître comme responsable pénalement des infractions aux règles d'hygiènes et de sécurité. ## II/ Identification du chef d'entreprise en cas de pluralité d'activité Il y a des cas où plusieurs entreprises, juridiquement distinctes, sont concernées par la même situation. Dans ce cas qui est responsable pénalement ? Par principe, le responsable est le chef d'entreprise dont le personnel a été victime de l'infraction. Ce principe a été posé par la ch. crim. de la CCass dans un arrêt du 2 février 1966. Il existe des nuances : la coexistence des entreprises et la mise à disposition des salariés. Cette hypothèse recouvre 2 situations : ### A. Travail en commun #### 1. La direction unique On parle de travail en commun lorsque plusieurs entreprises coopèrent sur un même chantier. La définition a été donnée par la ch. crim. de la CCass dans un arrêt du 20 février 1973 où elle estime que lorsque les préposés de plusieurs entreprises, bien que ce livrant à des tâches différentes, travaillent simultanément pour un objet et un intérêt commun (critère 1) et sous une direction unique (critère 2), et que l'accident est dû à la faute soit de celui qui assure la direction soit de l'un des exécutants placés sous ses ordres (critère 3), le responsable sera le chef d'entreprise car on est dans le cadre d'une direction unique. Seul le chef d'entreprise peut être pénalement responsable. La **direction unique** est un élément constitutif de la notion de travail en commun qui implique une concertation préalable, des représentants des 2 entreprises concernées sur la façon d'accomplir une tâche de manière simultanée (CCass ch. soc. 15 novembre 2001). La responsabilité pénale du chef du salarié victime peut être écartée si la direction des travaux a été placée sous une responsabilité unique autre que la sienne. Cette solution est applicable quelque soit la nature des travaux exercés en commun et n'est subordonnée à aucune condition contractuelle. Il s'agit d'une appréciation de fait pour déterminer qu'elle entreprise pilote les travaux. Cela suppose une appréciation souveraine par les juges du fond. Il en va ainsi dans le cas de la **sous-traitance** lorsque l'entrepreneur principal assure de fait la surveillance de l'ensemble du personnel présent sur un chantier. #### 2. La direction unique contractuellement aménagée Il en est de même lorsque la direction unique a été contractuellement ménagé. Il en est ainsi dans le secteur du bâtiment lorsque l'entreprise de gros œuvre a pour mission de gérer l'ensemble des corps de métier et prend la responsabilité d'assurer la sécurité de l'ensemble des membres du chantier. En cas d'infraction, le chef d'entreprise qui a créer une telle responsabilité de gestion sera alors considéré comme le chef d'entreprise pénalement responsable. Ce transfert de responsabilité doit cependant être précisé dans les documents contractuels (CCass 9 octobre 2007). A défaut, l'entrepreneur de gros œuvre ne sera en principe responsable que de la sécurité de ces propres escalier. #### 3. Le cumul des responsabilités Dans la cadre d'un travail en commun il est possible qu'une pluralité de responsabilités soit retenue contre les dirigeants des diverses entreprises intervenantes. Cette possibilité reste à l'appréciation des juges qui analyse les faits. >**Exemple**: Arrêt 18 janvier 1973 >En l'espèce, 2 ouvriers de l'entreprise A fesaient une soudure sur une cuve qui venait d'être peinte par l'entreprise B. Les vapeurs émanant de la peinture ont entraîné une explosion qui a tué les 2 ouvriers. Dans cet arrêt la ch.crim de la CCass a approuvé les juges du fond pour avoir retenu la responsabilité pénale de l'entreprise A et de la société B puisque ce sont les activités conjugées des 2 entreprises qui sont à l'origine de l'accident. C'est donc lorsqu'il existe un manquement cumulé de la part de plusieurs entreprises qui est possible d'engager l'ensemble de leur responsabilité pénale. >**Exemple**: Arrêt 30 janvier 2001 ### B. Travaux effectués dans un établissement par une entreprise extérieure et distincte Le CT prévoit des dispositions particulières pour les travaux effectués dans un établissement par les entreprises extérieures et ceci afin de parer au risque professionnel pouvant résulter de la simultanéité et de l'interférence des activités de l'entreprise utilisatrice et de la ou des entreprises intervenantes. C'est l'hypothèse d'une entreprise qui fait intervenir ses salariés dans l'établissement d'une autre entreprise : l'entreprise utilisatrice. Les faits et le contrat pouvaient aménager la répartition de la responsabilité pénale mais ici c'est le règlement qui prévoit une répartition de la responsabilité pénale. >**Exemple**: Une entreprise réalise un travail au sein d'une autre entreprise. Dans ce cas, l'entreprise d'accueil est responsable de la coordination du travail selon l'art R.4511-5 CT. Si un manquement à la coordination est relevé, le chef d'entreprise de l'entreprise d'accueil sera pénalement responsable. En cas de travail temporaire comme l'intérim, le CT répartit finement les responsabilités aux art L.1255-1 et suivent du CT. L'article L.1255-2 dispose que "l'entreprise de travail temporaire est responsable du <start_of_image> breakdowns for art 1255-3 to 1255-10 and art 1255-21 to 1255-23 need to be written out manquement aux obligations de conclusion du contrat de travail". Les articles **L.1255-3 à L.1255-10** disposent que les entreprises utilisatrices sont responsables **du détournement de l'objet du travail temporaire**. Enfin, les articles **L.1255-21 à L.1255-23** prévoit que pour ce qui est **de la sécurité** cela relève de la responsabilité de l'entreprise utilisatrice. ## Section 2: Exonération de responsabilité Une fois que la responsabilité de principe a été déterminée, il est encore possible de savoir si la personne peut s'exonérer de sa responsabilité en montrant qu'il est irresponsable soit en démontrant que sa responsabilité a été transférée (ex: délégation de pouvoir). ### I. L'irresponsabilité du droit pénal général En cas d'irresponsabilité, la responsabilité pénale est effacée. Les causes d'irresponsabilité sont énumérées aux articles 122-1 à 122-9 du CP. #### A. Les cas d'irresponsabilité pénale admis La contrainte (art 122-2 CP) "N'est pas pénalement responsable la personne qui a agi sous l'empire d'une **force ou d'une contrainte** à laquelle elle n'a pas pu resister". La contrainte peut avoir plusieurs aspect: - Contrainte physique sur le corps du prévenu - Contrainte morale sur la volonté de l'individu La contrainte physique est un événement **imprévisible** et **insurmontable**. Avec une telle conception, la jurisprudence rejette quasiment toute la conception de la force majeure par les chefs d'entreprise. Un des rares exemples où elle fut admise est en 1951. Un chef d'entreprise était poursuivi pour défaut d'enregistrement d'un contrat de travail mais qui a été relaché car c'est l'administration qui a refusé d'enregistrer le contrat alors qu'il avait accompli la transmission (arrêt 8 novembre 1951). Ce n'est pas le cas lorsque la contrainte morale est invoquée par un salarié : salarié obligé d'agir contre son propre gré en raison du lien de subordination et que cela a donné lieu par exemple à un accident du travail. La contrainte morale a été déclarée irrecevable par les juges qui estiment que l'ordre provenant de l'employeur, même **illégale**, ne peut exonéré le salarié de sa responsabilité (arrêt 26 juin 2002 CCass ch. crim.) - L'erreur de droit (art 122-3 CP) N'est pas pénalement responsable la personne qui justifie avoir cru par une **erreur sur le droit**, qu'elle n'était pas en mesure d'éviter, pouvoir **légitimement** accomplir l'acte. Une circulaire du ministère de la justice défini 2 hypothèses d'erreurs de droit: - Information erronée fournie par l'autorité administrative interrogée préalablement à l'acte - Erreur posée par l'absence de publication d'un texte normatif Dans la pratique l'erreur de droit n'est pas admis en raison du principe selon lequel "**nul n'est censé ignorer la loi**. En revanche, lorsque l'erreur a été provoqué par l'administration, notamment en cas d'administration erronée donné par l'inspecteur du travail, l'erreur de droit est reconnnu dans un arrêt du 24 novembre 1998, un employeur a été poursuivi pour non respect de la durée de travail des salariés alors même qu'il avait appliqué un accord professionnel élaboré par un médiateur professionnel du gouvernement. - L'état de nécessité (art 122-7 CP) "N'est pas pénalement Responsable la personne qui face à un danger **actuel ou imminent**, qui la menace elle-même, autrui ou un bien, accomplie un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien sauf s'il y a disproportion de l'acte face à la menace". Il n'y a jamais eu d'application de l'état de nécessité en droit pénale du travail. Cependant le droit pénal du travail reconnait des situations qui s'en rapproche notamment en se qui concerne la mise en œuvre de travaux urgent dont l'objectif est d'éviter des accidents imminents ou effectuer des opérations de sauvtage. Dans cette situation il sera possible d'écarter les règles concernant le repos hebdomadaire ou le travail de nuit des mineurs. L'état de nécessité peut être reconnu dans le cadre de la production de documents soustrait à son employeur par un salarié plaideur afin de se constituer des éléments de preuves dans le cadre d'un litige qui l'oppose à se dernier. Cependant il y a des conditions: il faut que les documents soient strictement nécessaire à l'exercice des droits de la defense du prévenu dans le litige l'opposant à son employeur (arrêt 11 mai 2004 et arrêt du 16 juin 2011) #### B. Les cas d'irresponsabilité pénale rejetés - Le commandement de l'autorité légitime (art 122-4 CP) "N'est pas pénalement responsable la personne qui accomplie un acte commandé par l'autorité légitime sauf si cet acte est manifestement illégal". Ce motif d'exonération n'a jamais été reconnu étant donné que ce texte ne vise que les autorités publiques et non les autorités privées que sont les employeurs. >**Exemple**: Arrêt 13 mars 1997 : "le salarié ne peut s'exonérer de la responsabilité d'avoir exécuté un acte illégal au prétexte que l'ordre lui a été donné par son employeur". . - Le consentement de la victime Ce motif n'a jamais été reconnu ni en droit pénal général ni en droit pénal du travail. >**Exemple**: Ccass ch. crim. 5 décembre 1989 : "le fait que les salariés ont accepté de prendre leur repos hebdomadaire un autre jour que le dimanche n'exonère pas l'employeur de sa responsabilité pénale d'avoir enfreint l'obligation du repos dominical". Il en est de même dans le cas où les salariés refusent de porter leur équipement de travail et ont un accident, cela n'exonère pas l'employeur. Certains articles n'ont jamais été invoqués car ils n'ont aucune chance d'aboutir: - Art 122-1 CP: le défaut de **discernement** en raison d'un trouble mental. - Art 122-5 et 122-6 CP: légitime défense. - Art 122-9 CP: lanceur d'alerte >Ce texte a fait l'objet d'un seul arrêt du 17 octobre 2018. ## II. La délégation propre au droit pénal du travail En cas de délégation, la responsabilité pénale n'est pas effacée, elle est simplement **transférée**. Dans la délégation, le délégant donne au délégataire une **délégation de pouvoir**. La délégation de pouvoir entraîne le transfert de la **responsabilité pénale**, éventuelle, le but étant de sanctionner celui qui a le pouvoir d'éviter la commission de l'infraction. C'est un mécanisme ancien dans la mesure où il a été reconnu dès 1902 (arrêt CCass ch. crim. 28 juin 1902). La jurisprudence a très vite admis ce dispositif en partant du constat que le dirigeant ne pouvait pas forcément tout surveiller lui-même. Elle cherche donc à inciter la délégation en faisant en sorte que la personne titulaire du pouvoir de surveillance et de contrôle soit au plus près de l'entité au sein de laquelle la réglementation de travail sera appliquée. L'étude de la délégation de pouvoir impose que soit explicité les conditions de sa validité et de sa mise en oeuvre. ### A. les conditions de validité #### 1. Le domaine de la délégation Le 11 mars 1993, la ch. Crim. de la CCass a rendu 5 décisions fixant le principe en la matière. Le principe est que le domaine de la délégation de pouvoir est le plus étendu en ce qui concerne les infractions. La CCass estime que "sauf si la loi en dispose autrement, le chef d'entreprise, qui n'a pas personnellement pris part à la réalisation de l'infraction, peut s'exonérer de sa responsabilité pénale s'il apporte la preuve qu'il a délégué ses pouvoirs à une autre personne pourvu de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires". Cette solution a été codifiée au 1ère alinéa de l'art R.4511-9 du CT: "Pour l'application des dispositions du présent titre, le chef de l'entreprise extérieure ne peut déléguer ses attributions qu'à un travailleur doté de l'autorité, de la compétence et des moyens nécessaires. Ce dernier est désigné, lorsque c'est possible, parmi un des travailleurs appelés à participer à l'exécution des opérations prévues dans l'établissement de l'entreprise utilisatrice." Ainsi, en principe, la délégation de pouvoir concerne l'ensemble des infractions, surtout en matière d'hygiène et des sécurité sur le lieu de travail Mais certaines prérogatives ne peuvent pas faire l'objet d'une délégation de pouvoir. Ainsi, en est-il de l'obligation de consulter le CSE avant une décision qui l'exige (3 mars 1998). De manière générale, tout ce qui appartient au pouvoir de direction proper au chef d'entreprise ne peut pas faire l'objet d'une délégation de pouvoir. #### 2. Conditions tenant au délégant - Impossibilité de veiller personnellement au respect de la réglementation Cela signifie que c'est seulement lorsque l'entreprise dépasse une certaine taille et une certaine complexité dans son organisation que les tribunaux acceptent la délégation de pouvoir. Dans le cas contraire, le chef d'entreprise conserve la possibilité de veiller lui-même au respect de la réglementation dans son entreprise. Ce n'est donc que lorsque le chef d'entreprise ne dispose plus de la possibilité de veiller lui-même au respect de la réglementation que la délégation prend effet. Cette évaluation est laisser aux juges du fond. Ils se basent sur le nombre de salariés, les moyens utilisés par l'entreprise ou son organisation structurelle.. - relations d'autorité entre le délégant et le délégataire Elle tient également à la relation entre le délégant et le délégataire. En effet, la délégation de pouvoirs suppose la capacité pour le chef d'entreprise, de transférer une partie de ses pouvoirs. Cela suppose donc une relation d'autorité entre le délégant et le délégataire. En principe, le délégataire est donc un salarié de l'entreprise. Il existe également ou des hypothèses où le délégataire est une personne tierce à l'entreprise. > - Groupe de société Dans ce cas le chef d'entreprise peut désigner comme délégataire un dirigeant d'une société juridiquement distinctes. Cette solution a été admise en matière d'hygiène et de sécurité dans un arrêt du 26 mai 1994. > - Entreprises travaillent sur un même lieu Une personne peut se voir désigner délégataire chargée de faire respecter les règles relative à l'hygiène et à la sécurité sans que pour autant cette personne appartiennent obligatoirement à l'une des entreprises (possibilité d'une tierce personne). C'est notamment le cas dans un arrêt du 14 décembre 1999 et cette solution a été confirmée dans un arrêt du 23 novembre 2010. >**Parenthèse**: >Un employé commet une infraction au code de la route, est-ce que le chef d'entreprise est responsable? "lorsqu'il y a une infraction avec un véhicule de fonction, le propriétaire du véhicule (personne morale ou physique) doit identifier l'individu qui était au volant de la voiture. C'est l'idée qu'un chef d'entreprise ne peut pas s'exonérer de sa responsabilité pénale au motif qu'il ne connaîtrait pas l'identité du chauffeur. - La subdélégation Subdélégation: le titulaire d'une délégation de pouvoir