Droit pénal des mineurs (Mme Guérin) PDF

Summary

Ce document traite du droit pénal des mineurs, explorant les situations où les mineurs sont auteurs ou victimes de crimes. Il décrit les conditions de la responsabilité pénale des mineurs et les mesures de protection spécifiques mises en place en France. Il souligne l'importance du juge des enfants et l'évolution des politiques criminelles concernant la jeunesse.

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Jeunesse et violence(s) Sur Moodle, droit pénal des mineurs, clé d'inscription : DPM2024-25 Les mineurs peuvent être confrontés à la justice pénale dans deux situations, soit qu'ils ont été victimes de violence soit qu'il en ont été l'auteur. Ils peuvent avoir été auteur d'infractions et à certaine...

Jeunesse et violence(s) Sur Moodle, droit pénal des mineurs, clé d'inscription : DPM2024-25 Les mineurs peuvent être confrontés à la justice pénale dans deux situations, soit qu'ils ont été victimes de violence soit qu'il en ont été l'auteur. Ils peuvent avoir été auteur d'infractions et à certaines conditions, ils vont engager leur responsabilité pénale et le cas échéant subir une peine. Mais compte-tenu de leur âge et de leur personnalité qui est encore en voie d'évolution et de consolidation, cette responsabilité est soumise à des conditions tant substantielles que procédurales. Ils dépendent de la justice pénale des mineurs dont le fonctionnement particulier justifie l'existence d'un code particulier qui le Code de la justice pénale des mineurs. Ils peuvent aussi être victimes de violences et d'infractions. Notre législation pénale les protège par l'existence d'infractions spécifiques. Les infractions de droit commun, qui s'appliquent quelque soit l'âge de la victime, peuvent donner lieu à une aggravation des peines lorsque la victime est mineure, renforçant ainsi la protection des mineurs victimes de violence grâce à des infractions de droit commun aggravées. Les mineurs victimes de violence bénéficient de règles procédurales aménagées à l'occasion du procès de l'auteur de ces violences. Ils seront particulièrement protégés en tant que victime présente au procès et partie à la procédure pénale. Ces règles se sont densifiées dans la seconde moitié du 20ème s. et ont posé l'émergence d'une sous-branche du droit pénal qui est le droit pénal des mineurs. D'emblée, les auteurs ont distingué ces deux situations différentes, celle du mineur auteur d'infractions et celle du mineur victime d'infractions. Cette distinction est surtout didactique/pédagogique mais elle ne recouvre pas les faits, la pratique des tribunaux parce que souvent ces catégories se mélangent en pratique. Un adolescent délinquant a pu être victime de violence dans son enfance et peut encore être victime de violences au moment où il est poursuivi en tant que délinquant. Il est à la fois auteur et victime de violences. Et inversement, le délinquant peut subir des violences ultérieures, de la part de son entourage par exemple, et un mineur victime a des risques de tomber dans la délinquance. En pratique, ces adolescents dépendent du juge des enfants, juge spécialisé du tribunal judiciaire dans les questions de l'enfance. Il a une place privilégiée dans la justice pénale des mineurs. Mais aussi, c'est le juge de l'assistance éducative, procédure qui est mentionnée aux articles 375 et suivants du code civil et qui s'adresse aux mineurs en danger physique, éducatif, moral, sexuel. C'est une prise en charge civile et le juge des enfants statue en matière civile. Plus tard, si ce jeune entre dans la délinquance il va se retrouver devant le juge des enfants. À ce moment-là, il bénéficiera peut-être encore d'une assistance civile éducative et le juge des enfants saisi au pénal pourra remplacer cette mesure éducative civile par une mesure éducative judiciaire propre au traitement des délinquants pénal. S'il s'agit d'infractions peu graves, éventuellement pouvant justifier une alternative aux poursuites, la mesure éducative civile pourra être maintenue. Il est également possible que cette mesure éducative civile ne soit pas remise en cause par le juge des enfants même si le mineur est finalement poursuivie dans la mesure où la prise en charge pénale est conciliable avec cette mesure éducative civile. Lorsque le Parquet est saisi d'une affaire concernant un mineur auteur d'infractions, il peut décider, si les faits sont peu graves, qu'une réponse civile d'assistance éducative est suffisante et vaut réponse pénale, ça signifie que le mineur est suivi par des éducateurs en milieu ouvert, il bénéficie d'une assistance éducative en milieu ouvert (AEMO) ou alors qu'il est placé dans un établissement dépendant de l'ASE et qu'il cohabite avec des enfants victimes de violences. Ce qui peut poser problème pour les mineurs qui l'environnent. D'un autre côté, les psychologues ont tendance à dire que le mineur qui commence à s'acheminer vers des actes délinquants sera mieux pris en charge dans un environnement non délinquant. Le code de la justice pénale des mineurs indique que cette réponse civile vaut réponse pénale. Ces risques d'un mineur placé au civil qui commence à commettre des infractions, nous permettent de comprendre que le juge des enfants préfère faire cesser cette mesure éducative et substituer les prises en charge éducatives pénales. Le mineur sera accueilli dans des structures ou des foyers où il n'y a que des délinquants chapeautés par la PJJ. Ça va conduire à ce qu'un même juge connaisse un même mineur en tant qu'auteur et que victime. Il est peut-être difficile d'appréhender un adolescent comme un auteur sachant qu'on s'occupe de lui comme une victime. Pourtant, c'est un point fort de la justice pénale des victimes. Mais aussi un point faible parce que cette double casquette a pu être critiquée au début du 21 ème s., dans la deuxième moitié des années 2000, où le gouvernement a entamé une politique criminelle plus dure à l'égard des jeunes délinquants et on a fortement critiqué cette double casquettes, les pouvoirs publics suspectant les juges des enfants de trop de clémence à l'égard des enfants, il a été question de supprimer cette double compétence civile et pénale. Depuis, la structure du fonctionnement de la justice pénale des mineurs a évolué, et le juge des enfants détient un rôle moins prépondérant au sein de la justice pénale des mineurs, ce qui a affaiblit les critiques. À coté de lui, comme magistrat devenu important, on trouve le Parquet mineur avec le procureur de la République à sa tête mais aussi le substitut désigné spécialement dans les affaires de mineurs. Les Parquets détiennent des pouvoirs importants d'orientation de la procédure qui a un impact important sur l'issue de la procédure notamment l'application de peines ou de mesures éducatives. Le juge des enfants n'est plus aussi central, il partage l'importance de ses fonctions avec les Parquets. Les Parquets sont aussi compétents en matière civile, notamment pour demander au juge des enfants l'ouverture d'une assistance civile éducative. Titre 1. La protection pénale spécifique des mineurs victimes d'infractions Cette protection passe, d'abord, par l'aménagement des règles de droit commun soit en prévoyant des circonstances aggravantes en fonction de la minorité de la victime pour certaines infractions, soit par l'existence de règles procédurales spécifiques lorsque la victime de l'infraction est mineure. Mais nous avons aussi des infractions spécifiques protégeant les mineurs dans des situations où ils sont particulièrement vulnérables. Les conventions internationales insistent sur la nécessité de protéger les mineurs de toute forme de violence, à commencer par la Convention Internationale des Droits de l'Enfant dans laquelle les états signataires s'engagent à assurer à l'enfant une protection contre toute forme de violence, d'atteinte ou de brutalité physique ou mentale, d'abandon ou de négligence, de mauvais traitement ou d'exploitation y compris la violence sexuelle. Cette convention signée dans le cadre de l'ONU et ratifiée en France est complétée par un protocole additionnel du 25 mai 2000 relative à la vente d'enfants, à la prostitution des enfants et à la pornographie mettant en scène des enfants/pédopornographie/pornographie infantile. Ces normes sont relayées en Europe, par exemple, par une Convention du Conseil de l'Europe datant du 25 octobre 2007 sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels ou encore dans le cadre de l'Union Européenne par la directive européenne du 13 décembre 2011 relative à la lutte contre les abus sexuels et exploitation sexuelle des enfants ainsi que la pédopornographie. La Convention Européenne des Droits de l'Homme permet une protection particulière des mineurs puisque la Cour Européenne des Droits de l'Homme a dégagé sur le fondement de l'article 3 (interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants) de la Convention, une obligation positive, à l'égard des états, de protéger les mineurs contre les maltraitances. Lorsque l'on pense à l'enfance maltraitée on pense prioritairement à des violences de la part des adultes et notamment dans l'environnement familial en raison de la fragilité des jeunes et des adolescents. La maltraitance peut provenir de d'autres enfants mineurs ou adolescents. On songera d'abord aux viols et agressions sexuelles, qui peuvent être commis entre mineurs, y compris au sein d'une fratrie. L'inceste dans les fratries est une problématique dont les éducateurs commencent à prendre conscience depuis quelques années, dans les familles, y compris dans les institutions de prise en charge éducative. Mais ces violences entre jeunes peuvent aussi prendre la forme de comportements ou de propos relevant d'un harcèlement et notamment dans le cadre scolaire. Le harcèlement scolaire est un phénomène qui a été pris en considération depuis quelques années et a permis au législateur de créer une nouvelle infraction qui figure désormais à l'article 222-33-2- 3 du code pénal. Ce texte figure dans une section du code pénal qui incrimine le harcèlement moral. Le législateur considère le harcèlement scolaire comme une forme de harcèlement moral à côté du harcèlement moral au travail ou conjugal. Le harcèlement scolaire est constitué aux conditions suivantes : → d'abord des conditions générales prévues par l'infraction de harcèlement moral général : → il faut des propos ou des comportements répétés sauf dans deux circonstances où cette répétition n'est pas nécessaire (art. 222-33-2-2): → lorsque le harcèlement est causé à une même victime par plusieurs personnes de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles alors même que chacune d'entre elles n'a pas agi de façon répétée → lorsque les propos ou comportements sont imposés à une même victime successivement par plusieurs personnes qui même en l'absence de concertation savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition → ces propos ou comportements doivent avoir eu pour objet ou pour effet des conditions de vie se traduisant par une altération de la santé physique ou mentale → il faut que s'ajoute la condition spécifique au harcèlement scolaire (art. 222-33-2-3) : → ce harcèlement moral doit être commis à l'encontre d'un élève par toute personne étudiant ou exerçant une activité professionnelle au sein du même établissement d'enseignement Le texte ajoute que l'infraction se poursuit lorsque le harcèlement continue alors que l'auteur ou la victime n'étudie plus ou n'exerce plus dans l'établissement. Cette définition qui conjugue les conditions du harcèlement moral général et les conditions propres à l'environnement scolaire permettent de réprimer des harcèlements très divers. Les peines encourues varient en fonction de l'incapacité totale de travail (ITT) qui a résulté de ce comportement : → 3 ans d'emprisonnement et 45.000€ d'amende pour une ITT égale ou inférieure à 8 jours ou en l'absence d'ITT → 5 ans d'emprisonnement et 75.000€ pour une ITT supérieure 8 jours → 10 ans d'emprisonnement et 150.000€ si la victime s'est suicidée ou a tenté de se suicider Le harcèlement conjugal est aggravé lorsqu'il a été commis alors que le mineur était présent ou y a assisté (art. 222-33-2-1). Les peines étant de 5 ans d'emprisonnement et 75.000€ d'amende. Nous reconnaissons le souci du législateur de protéger le mineur des violences adultes dont il peut être témoin. Les psychologues ont mis en évidence que le fait, pour un mineur, d'assister à des violences conjugales, a un impact négatif sur sa sensibilité voire sur son développement. Quelques soient les formes de violence auxquelles sont exposés le jeune, nous sommes en présence de maltraitances qui sont des phénomènes difficiles à détecter pour les autorités répressives car elles se déroulent dans la sphère familiale ou intime de la part de personnes auxquelles le mineur est lié affectivement et qu'il ne va pas dénoncer a priori, ne sachant peut-être même pas que ces comportements sont illicites ou relèvent de la loi pénale. C'est pourquoi la législation pénale prévoit des dispositions afin de faciliter la dénonciation de ces maltraitances de la part de toute personne au contact de ces enfants. On a deux mécanismes de détection : → une procédure d'alerte qui consiste, de la part des personnes relevant du monde éducatif ou de la santé qui consiste à transmettre au conseil départemental une information préoccupante c-à-d une information relative à un risque de danger qui est recueillie par la CRIP (Cellule de Recueil des Informations Préoccupantes). L'information est adressée à l'ASE et si cette alerte apparaît justifiée, l'ASE met en place un accompagnement socio-éducatif auprès de la famille qui peut suffire mais s'il est insuffisant alors l'ASE saisi le Parquet afin qu'il sollicite une assistance éducative ou une mesure judiciaire d'investigation éducative (MJIE) qui peut être ordonnée autant au civil qu'au pénal. La mesure judiciaire d'investigation éducative permet à des éducateurs et à des assistantes sociales de mener des investigations sur l'environnement du mineur. Le Parquet pourra demander au juge des enfants l'ouverture d'une assistance éducative, le prononcé d'une MJIE, éventuellement l'adoption d'une ordonnance provisoire de placement en cas d'urgence ou alors le Parquet peut décider de déclencher l'action publique si le comportement des parents relève d'une ou de plusieurs infractions commises contre l'enfant. Lorsque le Parquet est saisi, on parle de signalement judiciaire. Toute personne peut saisir le Parquet et faire un signalement judiciaire si elle a des soupçons ou si elle a connaissance d'un crime ou d'un délit commis contre l'enfant de la part de son entourage. L'alerte administrative que constitue la transmission d'une information préoccupante à l'ASE est plutôt utilisée par les personnels, spécialisés, éducatifs, santé, etc. → le code pénal oblige dans certaines circonstances et certaines personnes à dénoncer des phénomènes de maltraitance. obligation qui prend la forme juridique d'infractions de non- dénonciation. Nous avons 3 infractions pertinentes : → art. 434-1 du code pénal qui incrimine la non-dénonciation de crimes de manière générale. Les peines prévues étant de 3 ans d'emprisonnement et 45.000€ d'amende. C'est une infraction générale mais qui peut s'appliquer à un mineur. Cette infraction incrimine la non- dénonciation d'un crime par toute personne en ayant connaissance et dont il est possible de prévenir ou de limiter les effets ou si les personnes susceptibles d'en commettre de nouveau peuvent en être empêchées. Concernant les mineurs, ce texte est pertinent en cas de viol commis sur les mineurs qui sont souvent incestueux et donc susceptibles de se reproduire. Ce texte ne sera applicable que si la personne qui s'est tut avait vraiment connaissance du crime donc ça implique une certitude. Les personnes astreintes au secret professionnel échappent à l'infraction sauf quand la loi en dispose autrement. Cette infraction n'est pas applicable à l'entourage immédiat de l'auteur ou des complices du crime : les parents, les conjoints des parents, les frères et sœurs, les conjoints des frères et sœurs et les conjoints de l'auteur ou du complice. Cette exemption légale ne joue pas lorsque le crime est commis sur un mineur parce que souvent ces actes ne seront pas dénoncés par la victime mineure. Les dénonciations émanent souvent de personnes proches de l'enfant sans faire partie de sa famille qui auront des soupçons. → art. 434-3 du code pénal qui incrimine notamment la non-dénonciation de maltraitances de mineurs quelque soit son âge. Les peines prévues étant de 3 ans d'emprisonnement et 45.000€ d'amende. Le texte incrimine la non-dénonciation aux autorités administratives ou judiciaires de la part de quiconque ayant connaissance de privation, de mauvais traitement, d'agressions sexuelles ou d'atteintes sexuelles infligés à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger. Lorsque la victime est mineure, les peines sont aggravées pour un mineur de moins de 15 ans, elles sont de 5 ans d'emprisonnement et 75.000€ d'amende. On peut appliquer ce texte même s'il s'agit d'un viol pour éviter la discussion sur la qualification. De plus, la certitude de l'infraction n'est pas exigée par le texte, il suffit de la connaissance de privation ou de mauvais traitement. Le domaine d'application de l'infraction est plus large que la précédente. Les personnes astreintes au secret professionnel échappent à l'infraction sauf quand la loi en dispose autrement. → art. 434-4-1 du code pénal qui incrimine la non-dénonciation d'une disparition de mineur de 15 ans. Les peines prévues étant de 2 ans d'emprisonnement et 30.000€ d'amende. Cette infraction consiste à ne pas avertir les autorités administratives ou judiciaires d'une disparition d'un mineur de 15 ans en vue d'empêcher ou de retarder la mise en œuvre de la procédure d'enquête qui est prévue par l'article 74-1 du code de procédure pénale. Ce type d'enquête permet de mettre en œuvre des moyens coercitifs d'enquête, en dehors d'une enquête de flagrance ou d'une instruction ouverte. Les enquêtes de disparition suspectes le permettent également pour accélérer la découverte de la personne disparue. Le fait de ne pas dénoncer la disparition d'un mineur de 15 ans peut permettre de couvrir, par exemple, l'enlèvement d'un enfant par un de ses parents ou par toute autre personne dans le cadre de mouvements sectaires ou de traite des être humains. L'incrimination de l'abstention d'avertissement des autorités de cette disparition, protège le mineur contre des violences qu'il subira à la suite de sa disparition. Les personnes astreintes au secret, si elles violent le secret professionnel, se voient appliquer l'article 226-13 du code pénal qui incrimine le délit de violation du secret professionnel, ce qui explique que les infractions de l'article 434-1 ou 434-3 ne soient pas applicables. L'article 226-14 indique que le délit de violation du secret professionnel n'est pas applicable lorsque la loi autorise la révélation du secret professionnel et notamment dans certaines circonstances. Ces personnes sont face à une alternative, une liberté de choix qui choque beaucoup les intervenants auprès de l'enfance en danger qui souhaiteraient que les professionnels tenus au secret professionnel aient l'obligation de dénoncer les maltraitances. Le personnel de santé dénonce systématiquement. L'article 226-14 indique que : → la violation du secret professionnel n'est pas applicable à toute personne tenu au secret professionnel qui informe les autorités médicales, judiciaires ou administratives des privations ou des sévices, y compris des atteintes ou mutilations sexuelles dont elles ont connaissance et qui ont été infligées à un mineur. Lorsque la victime est mineure, l'accord de la victime n'est pas requis. → le délit de violation du secret professionnel n'est pas applicable aux médecins ou à tout autre personnel de santé qui dans l'exercice de sa profession constate des sévices ou privations physiques ou psychiques et qui en informe le procureur de la République ou la CRIP si ces privations ou sévices lui permettent de présumer des violences physiques, sexuelles ou psychiques. Lorsque la victime est mineure, l'accord de la victime n'est pas requis. Depuis la loi du 10 mai 2024 visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires et à améliorer l'accompagnement des victimes, le législateur a ajouté un autre cas faisant échapper les personnes tenues au secret professionnel au délit de violation de ce secret. Le médecin ou tout autre personnel de santé y échappe s'il révèle au procureur de la République des faits relevant de l'article 223-15-3 qui incrimine le placement ou le maintien ou l'abus frauduleux d'une personne dans un état de sujétion psychologique ou physique. Ce qui peut concerner une emprise sectaire s'il estime que cette sujétion a pour effet de causer une altération grave de sa santé physique ou mentale ou de la conduire à un acte ou à une abstention gravement préjudiciable. Lorsque la victime est mineure, l'accord de la victime n'est pas requis. De nombreux professionnels de la protection de l'enfance peuvent être choqués par ce choix laissé aux professionnels. Ils invoquent la possibilité d'appliquer à ces professionnels une infraction pénale pour les contraindre à dénoncer, qui serait la non-assistance à personne en péril, avec cette idée qu'un professionnel qui ne dénonce pas des signes de maltraitance met en danger l'enfant, ou du moins, ne lui apporte pas le secours qu'il devrait lui être dû. Néanmoins, il s'agit d'une infraction pénale qui est strictement définie par le droit pénal et nous savons qu'en droit pénal, l'interprétation des textes est extrêmement stricte, on ne peut pas aller au-delà des prévisions du texte. Ici, les éléments constitutifs de cette infraction ne rendent pas son application évidente. L'infraction est définie à l'article 223-6 du code pénal et comprend deux alinéas : → le premier alinéa vise le fait de s'abstenir volontairement, d'empêcher par son action immédiate, sans risque pour soi ou pour les tiers, soit un crime soit un délit contre l'intégrité corporelle d'une personne. L'abstention doit être volontaire. Il s'agit d'un délit passible de 5 ans d'emprisonnement et 75.000€ d'amende. → le deuxième alinéa : les mêmes peines sont applicables à celui qui s'abstient volontairement de porter à une personne en péril, l'assistance que sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui porter, soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours. Le dernier alinéa de ce texte précise que les peines sont aggravées à 7 ans d'emprisonnement et 100.000€ d'amende la personne en danger est un mineur de 15 ans. Concernant l'application du premier alinéa, ce texte n'a pas vocation à s'appliquer en cas de non- dénonciation et notamment de maltraitances, le texte vise le fait de s'abstenir physiquement ou matériellement par une action immédiate. La chambre criminelle en 1990 avait précisé que ce délit n'imposait pas une obligation de dénonciation. Quant au deuxième alinéa , qui concerne à proprement parler la non-assistance à personne en péril, il n'est pas vraiment adapté non plus, il vise une abstention d'une action personnelle ou une abstention quant à la provocation d'un secours. En réalité, ces textes n'étaient pas prévus pour ça. Il y a des textes spécifiques dans le code pénal, c'est le délit de violation du secret professionnel et les exemptions prévues au texte suivant. Avoir recours à l'infraction de non-assistance à personne en péril pour forcer les professionnels à dénoncer ne semble pas être un argument juridique convaincant. Le législateur serait sensible à une évolution de la législation si on observe, par ailleurs, qu'il fait son possible pour faciliter cette dénonciation. Par exemple, une loi du 5 novembre 2015 qui a porté sur la clarification de la procédure de signalement des maltraitances par les professionnels de santé. Cette loi a ajouté un dernier alinéa à l'article 226-14 du code pénal qui prévoit expressément que les auteurs de signalements mentionnés à ce texte ne peuvent pas engager leur responsabilité pénale, civile ou disciplinaire dans la mesure où ils ont agi de bonne foi. Depuis quelques années, le législateur se montre très attentif à la protection des mineurs. La loi du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l'inceste a ajouté un alinéa à l'article 8 du CPP sur le régime de la prescription des délits. Les infractions de non- dénonciation sont des délits et le législateur a prévu un mécanisme de report du point de départ du délai de prescription du délit de non-dénonciation des maltraitances lorsque la victime est mineure. Ainsi le délit commence à courir à la majorité de la victime, de la même manière qu'en matière de crimes et délits sexuels sur mineur. Ce qui a pour conséquence pratique de favoriser la poursuite de ce délit de non-dénonciation. Plus précisément, l'article 8 al. 5 du CPP : "l'action publique du délit mentionné à l'article 434-3 du code pénal se prescrit, lorsque le défaut d'information concerne une agression ou une atteinte sexuelle commise sur un mineur, par dix années révolues à compter de la majorité de la victime et, lorsque le défaut d'information concerne un viol commis sur un mineur, par vingt années révolues à compter de la majorité de la victime". Les agressions et atteintes sexuelles sont des délits et le viol est un crime. Mais ici, cet alinéa ne concerne pas la prescription concernant ces crimes ou délits sexuels mais la prescription concernant la non-dénonciation de ces crimes ou délits sexuels donc des faites graves qui ne donnent pas lieu à dénonciation et donc on comprend qu'il faille reporter les points de départ du délai de prescription et l'allonger parce que le délai de droit commun en matière de prescription des délits c'est 6 ans. Cette modification législative est intervenue à la suite d'une affaire médiatisée impliquant un cardinal qui avait été accusé de pas avoir dénoncé des actes de pédophilie très anciens d'un prêtre de son diocèse, avant même qu'il prenne la direction de son diocèse. Ce cardinal fut finalement relaxé, l'affaire ayant été jusque devant la cour de cassation. La cour de cassation a rendu un arrêt le 14 avril 2021 juste avant la réforme mais l'affaire était de toute façon pendante et faisait déjà beaucoup de bruit dans la presse. Compte tenu du droit positif de l'époque, la cour de cassation n'aurait pas pu prendre une autre solution, mais cette affaire a démontré qu'il était choquant que l'auteur de cette non-dénonciation bénéficie d'un délai de prescription de 3 ans à l'époque. Ce délai est extrêmement bref dans des affaires où les filles de dénoncent et donc cette affaire a motivé ce changement législatif. Ces dispositions générales accentuent la protection des mineurs. Chapitre 1. L'incrimination des atteintes spécifiques aux mineurs Ici, nous n'étudierons que les incriminations spécifiques qui protègent les mineurs. Pour ce qui est des infractions spécifiques, le code pénal les regroupe dans un chapitre consacré aux atteintes aux mineurs et à la famille qui comprend les articles 227-1 à 227-28 du code pénal. Les infractions relevant de ce chapitre peuvent donner lieu à l'application de peines complémentaires (c-à-d prononcées en complément des peines principales) si elles apparaissent adaptées à la personnalité de l'auteur des faits et aux circonstances de l'infraction. Les derniers textes de ce chapitre prévoient des peines complémentaires applicables aux personnes physiques et aux personnes morales. Le juge n'est pas obligé de les prononcer, mais il peut les prononcer ou en prononcer certaines. Concernant les personnes physiques, les peines prévues sont énumérées à l'article 227-29 du code pénal et sont souvent adaptées en fonction de l'infraction commise par le condamné. Pour certaines, on ne voit pas le lien immédiat avec la protection des mineurs, mais selon les circonstances, elles peuvent être pertinente. Ce texte vise la suspension du permis de conduire pour une durée maximale de 5 ans ou l'annulation du permis de conduire avec interdiction d'en solliciter un autre pendant 5 ans. Autre peine complémentaire, qui selon les circonstances, peut être pertinente, l'interdiction pour une durée de 5 ans ou plus, de quitter le territoire notamment lorsqu'il s'agit d'une affaire d'enlèvement d'enfants dans le cadre de conflits conjugaux entre parents divorcés ou anciens compagnons pacsés. Nous avons, dans ce même article des peines complémentaires chargées de prévenir la récidive d'infractions facilitées par des activités au contact de la jeunesse ou des mineurs. Le signalement du texte prévoit la peine d'interdiction à titre définitif ou pour une durée maximale de 10 ans, d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs. Toutefois, la loi du 21 avril 2021 ajoute que cette peine est prononcée à titre définitif concernant certaines condamnations. Sont visées par le texte : les infractions à caractère sexuel (atteintes sexuelles notamment), la tentative de ces infractions sexuelles et les délits de provocation à commettre certains crimes et délits contre les mineurs (le proxénétisme de mineurs, la corruption de mineurs, la pédopornographie ou les atteintes sexuelles). Pour ne pas heurter le principe d'individualisation des peines, la juridiction peut prendre la décision de ne pas appliquer cette peine par décision spécialement motivée au regard des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. Donc si la juridiction ne souhaite pas prononcer cette interdiction définitive, elle peut ne pas la prononcer mais ça ne l'empêche pas de la prononcer pour une durée de 10 ans ou plus. Cet article 227-29 mentionne une autre peine complémentaire qui est une peine d'interdiction d'exercer certaines activités sociales ou professionnelles, ces interdictions étant prévues de manière générale à l'article 131-27 du code pénal. Ce texte comprend deux alinéas : → le premier alinéa concerne l'interdiction d'exercer une fonction publique ou d'exercer une activité professionnelle ou sociale. Il peut s'agir d'une interdiction définitive ou temporaire (maximum 5 ans). Ce premier alinéa est pertinent puisque de nombreux professionnels au contact de mineurs exercent en réalité une activité professionnelle ou sociale, voire une fonction publique. → le deuxième alinéa comprend les interdictions d'exercer une profession commerciale ou industrielle ou d'administrer directement ou indirectement une entreprise commerciale ou industrielle. L'interdiction peut être prononcée en tant qu'interdiction définitive ou temporaire mais lorsqu'il s'agit d'une interdiction temporaire, la durée maximale est de 15 ans. Cet alinéa vocation à s'appliquer en droit des affaires. Ce deuxième alinéa est pertinent dans la mesure où certaines institutions de prise en charge des mineurs peuvent êtres des institutions privées, à but lucratif le cas échéant. L'article 227-30 prévoit l'affichage ou la publicité de la décision de condamnation pour certaines infractions : provocation à l'abandon d'enfant ou les infractions d'entremise illicite en matière d'adoption ou en matière de mère porteuse. L'article 227-31 contient une peine de suivi socio-judiciaire (SSJ) qui est prévue de manière générale aux articles aux articles 131-36-1 et suiv. du code pénal. Cette peine doit être prévue en tant que peine complémentaire et le juge qui la prononce soumet le condamné à un ensemble d'obligations ayant pour but de prévenir la récidive, ce qui est particulièrement pertinent en matières d'infractions sexuelles et également en matière de pédophilie ou d'infractions à caractère sexuel concernant les victimes mineurs. Ces obligations sont les obligations générales de la probation (art. 132-44 du code pénal), les obligations particulières de la probation (art. 132-45 du code pénal), ce qui explique que la peine de SSJ soit inapplicable dans le cadre d'un sursis probatoire puisque dans le cadre d'un sursis probatoire, le condamné est soumis à des obligations donc ça ferait doublon. Le SSJ emporte obligation de se soumettre à une injonction de soins qui sera prononcée si, après expertise médicale, il apparaît que le condamné peut faire l'objet d'un traitement. Les obligations du SSJ sont impératives, en cas d'inexécution, le condamné encourt une peine d'emprisonnement. Ces obligations s'appliquent, si le condamné est incarcéré, à la sortie de détention. Il s'agit d'une mesure de soutien à la prévention de la récidive, ce qui n'empêche pas les soins d'être débutés durant l'incarcération. À la sortie de prison, notamment s'il y a eu incarcération, une condamnation à peine ferme, le SSJ peut comprendre une mesure de sûreté qui est le placement sous surveillance électronique mobile. Le condamné porte un bracelet émetteur, à son poignet ou à sa cheville, qui permet de contrôler ses déplacements (encadré par les obligations du SSJ) en temps réel (131-36-9 et suiv.). Le prononcé de ce PSEM est soumis à plusieurs conditions : il n'est applicable qu'aux personnes majeures au moment des faits, aux majeurs condamnés à une peine privative de liberté égale ou supérieure à 7 ans ou, en cas de récidive, à 5 ans. Le PSEM ne peut être prononcé qu'après expertise médicale ayant constaté la dangerosité du condamné et la mesure doit être indispensable pour prévenir la récidive. La juridiction ne peut prononcer la peine qu'après avoir vérifié la faisabilité technique de la mesure. Concernant le seuil de la condamnation pénale qui permet de recourir au PSEM, il faut noter que, depuis la loi du 23 mars 2019 (loi de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice), le PSEM est applicable pour personnes condamnées pour violences sur ses enfants ou sur ceux de son conjoint, partenaire ou concubin lorsqu'il s'agit d'une condamnation à une peine privative de liberté d'une durée supérieure ou égale à 2 ans. Dans ces circonstances, il y a un abaissement du seuil de condamnation à partir duquel le PSEM peut être prononcé. Idem en cas de menaces sur ses enfants ou sur ceux de son conjoint, partenaire pacsé ou concubin, menaces punies d'au moins 5 ans d'emprisonnement. On voit, ici encore, la volonté du législateur de protéger les mineurs contre les violences domestiques intrafamiliales et de prévenir leur récidive. Pour ce qui est des infractions à caractère sexuel, le condamné, à des fins de prévention de la récidive, peut faire l'objet, avec son accord et sur décision du médecin traitant, d'un traitement inhibiteur de libido (castration chimique). Ces dispositifs d'exécution des peines ont vocation à protéger les mineurs victimes, passées ou potentielles, d'infractions sexuelles de la part des majeurs. Qu'il s'agisse d'un condamné personne physique ou personne morale, l'article 227-33 prévoit la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie des biens de la personne, meubles ou immeubles, divis ou indivis, quelque soit leur nature et cela aussi de certaines condamnations. Ce texte vise la corruption de mineurs de 15 ans, la corruption de mineurs commise en bande organisé et la pédopornographie. Nous en arrivons à un dispositif très important qui est le retrait de l'autorité parentale lorsque l'infraction a été commise par les titulaires de cette autorité parentale. La règle relève de l'art 378 du code civil mais ce texte a été modifié par la loi du 18 mars 2024 visant à mieux protéger les enfants victimes et co-victimes de violences intrafamiliales. Cette loi a créé un nouvel article dans le code pénal qui est l'article 228-1. L'article 378, antérieurement à cette loi, ne prévoyait qu'une obligation de se prononcer sur ce retrait mais il ne prévoyait aucune obligation de retirer l'autorité parentale. Nous avons un tournant législatif vers plus de protection des mineurs. Le législateur a tranché, désormais, il est prévu l'obligation, pour la juridiction pénale de jugement, de prononcer le retrait total ou partiel de l'autorité parentale à l'auteur, au co-auteur ou aux complices de certaines infractions donc certaines commises par les parents sur les enfants. Pour certaines infractions, il y a une obligation de retrait total, pour d'autres infractions moins graves, il y a une obligation de se prononcer sur le retrait total ou partiel de l'autorité parentale ou de son exercice. D'abord, en cas d'obligation de retrait total : en cas de condamnation d'un parent pour crime d'atteinte à la personne1 ou d'agression sexuelle incestueuse sur son enfant ou en cas de condamnation d'un parent pour crime d'atteinte aux personnes commis sur l'autre parent 2, la juridiction de condamnation doit prononcer le retrait de l'autorité parentale, elle peut ne pas le faire sauf décision contraire spécialement motivée. Si elle ne le fait, elle peut prononcer le retrait partiel ou le retrait de l'exercice de l'autorité parentale sinon elle devra motiver son choix. Au stade de l'instruction, les poursuites suspendent de plein droit l'exercice de l'autorité parentale et le droit d'hébergement et de visite du parent poursuivi (art 378-2 du code civil). Si l'autre parent est déchu de ses droits ou est décédé, l'enfant sera remis à un tiers de confiance ou à l'ASE (art. 380 du code civil). Donc, les articles 378 du code civil et 228-1 du code pénal prévoient l'obligation de retrait dans les circonstances qu'on vient d'évoquer. 1 les crimes d'atteinte à la personne comprennent par exemple le meurtre, l'empoisonnement, l'assassinat, le viol, les violences volontaires mortelles, la torture et les actes de barbarie, les violences criminelles, la traite (qui devient un crime lorsqu'il s'agit d'une traite de mineurs) et le crime d'enlèvement 2 par exemple, les féminicides et les violences ayant entraîné la mort ou une mutilation ou une infirmité permanente Ensuite, en cas d'obligation de se prononcer sur le retrait : en cas de condamnation d'un parent pour délit d'atteinte à la personne et délits autres qu'une agression sexuelle incestueuse sur son enfant ou en cas de condamnation d'un parent pour délit d'atteinte à la personne sur l'autre parent ou si ce délit a été commis par son enfant. Il s'agit de sanctionner le parent négligent dont la négligence explique, pour partie ou totalement, la délinquance de l'enfant. La décision quelle qu'elle soit est assortie de plein droit de l'exécution provisoire et le retrait peut être prononcé à l'égard des autres enfants du parent condamné. Lorsque les poursuites ont lieu en cour d'assises, la cour statue sur cette question sans l'assistance du jury criminel, elle statue donc seule sur la question du retrait de l'autorité parentale. Section 1. Les violences relatives à l'environnement familial et éducatif du mineur Sous-section 1. La véracité du lien de filiation Les textes internationaux précisent que l'enfant a le droit d'être élevé par ses pères et mères, cela signifie qu'il faut protéger les bébés voire l'enfant à naître du trafic d'enfants par certaines infractions : 1. La provocation à l'abandon d'enfant (art. 227-12 al. 1 du CP) La provocation à l'abandon d'enfants est prévue à l'art. 227-12 du code pénal qui indique que le fait de provoquer les parents ou l'un d'entre eux à abandonner un enfant né ou à naître est puni de 6 mois d'emprisonnement et 7.500€ d'amende, si cette provocation a été faite dans un but lucratif et a été manifestée par des dons, promesses, menaces ou un abus d'autorité. Par conséquent, un simple conseil ne relève pas de la répression pénale. Du point de vue de l'élément moral, l'infraction est intentionnelle. Pour rappel, en matière de délits, si la nature de l'élément moral n'est pas précisée, cela signifie que le délit est intentionnel (art. 121-3 du code pénal). 2. L'entremise illicite en matière d'adoption (art. 227-12 al. 2 et 3 du CP) Ce texte prévoit deux autres alinéas qui sont des infractions complémentaires : → le deuxième alinéa incrimine le fait de faire office d'intermédiaire dans un but lucratif entre un parent désirant adopter et un parent désirant abandonner son enfant. Les peines prévues sont de 1 an d'emprisonnement et de 15.000€ d'amende. → le troisième alinéa incrimine le fait de s'entremettre entre une mère porteuse (c-à-d une personne acceptant de porter un enfant en vue de le remettre) et des parents désirant adopter. Les peines sont portées au double si l'activité est habituelle ou effectuée dans un but lucratif. Pour ce qui concerne les intermédiaires, c'est l'activité à titre lucratif qui est sanctionnée, parce que des organismes qui prennent en charge l'adoption en France, ne sont pas des entreprises privées à but lucratif. Pour ce qui est des mères porteuses, c'est l'entremise seule qui est incriminée. La jurisprudence, en matière d'infraction d'habitude, considère que l'habitude est constituée à partir du deuxième acte. Le texte ajoute que la tentative d'entremise est incriminée. Les délits de ces deux derniers alinéas sont des infractions intentionnelles. Le fait de s'entremettre en matière de mères porteuses est une infraction alors qu'il y a un débat, à l'heure actuelle en France, sur la légalisation de ces pratiques. Pour l'instant, l'article 16-7 du code civil précise que toute convention portant sur la procréation et la gestation pour le compte d'autrui est nulle. Donc la GPA demeure interdite en France mais les personnes désirant recourir à une mère porteuse le font dans des pays où c'est autorisé. Dans ce contexte, la personne ou l'organisme qui a recours à ces pratiques à l'étranger ne tombe pas sous le coup de la loi pénale puisque la loi pénal est d'application territoriale (art. 113-2 du code pénal) et ce n'est qu'à titre exceptionnel que la loi pénal française s'applique à des infractions commises à l'étranger. D'abord, en matière conventionnelle, la double incrimination est exigée en France mais aussi dans l'état où est commis l'infraction et, par définition, cette double incrimination n'existe pas dans ces circonstances et il faut que l'auteur ou la victime soit de nationalité française mais qui est la victime et l'auteur n'est pas de nationalité française. La question a pu se poser mais le tribunal de grande instance de Créteil avait refusé et donc déclaré irrecevable la demande d'ouverture d'information requise par le Parquet pour une ordonnance en 2004. À l'heure actuelle, en France, des organismes de mise en relation opèrent ouvertement sur le territoire français. Si on pouvait poursuivre ces organismes, on aurait un moyen de pression important. Il est arrivé que certaines personnes aient recours à des mères porteuses sans intermédiaire et elles relèvent de la loi pénal si l'acte est commis sur le territoire. Il est arrivé que les choses finissent par ce savoir. Exemple d'un jugement du tribunal correctionnel de Blois en 2016 : une dame prêtait son corps pour être mère porteuse et elle gagnait de l'argent. Elle entrait en contact par Internet avec des parents désirant adopter. Cette dame, à plusieurs reprises, a changé d'avis au contact des futurs parents et se rétractait. Des parents ont fini par porter plainte, cette dame est poursuivie pour escroquerie. Donc ça peut arriver mais la répression ne suit pas. 3. L'échange clandestin de nouveaux-nés (art. 227-13 du CP) L'échange clandestin de nouveaux-nés est prévu par l'article 227-13 du code pénal : il s'agit de la substitution volontaire, de la simulation ou de la dissimulation ayant entraîné une atteinte à l'état civil d'un enfant et ces actes sont passibles de 3 ans d'emprisonnement et de 45.000€ d'amende. Au niveau de la qualification des faits, la substitution vise le fait d'échanger deux enfants nés de deux femmes différentes. Au plan juridique, nous avons deux enfants qui ont deux états civils faux. Le texte vise aussi la simulation et la dissimulation. À chaque fois, cela met en scène deux femmes, l'une va simuler d'être enceinte et d'accoucher et une autre va dissimuler sa grossesse et son accouchement. L'enfant né avec un état civil qui est faux. Les peines ne sont pas élevées mais l'acte est grave parce que ce mensonge initial va faire obstacle à toutes les actions relatives à la filiation au civil. Ces infractions sont des délits intentionnels. S'il s'agit d'une erreur, l'infraction n'est pas applicable. Lorsque le juge pénal est saisi de ces infractions, il doit surseoir à statuer dans l'attente d'une décision du juge civil sur la réalité du lien de filiation. C'est précisé à l'article 319 du code civil : en cas d'infraction portant atteinte à la filiation d'une personne, il ne peut être statué sur l'action pénale qu'après le jugement passé en force de chose jugée sur la question de la filiation donc ça veut dire que le juge pénal sursoit à statuer et pose une question préjudicielle au juge civil sur la filiation. Ces infractions posent des problèmes de poursuite car elles sont difficiles à déceler, c'est la raison pour laquelle la chambre criminelle de la cour de cassation a estimé que ces infractions étaient clandestines par nature, selon l'ancienne formule utilisée en jurisprudence jusqu'à la réforme de la prescription pénale du 27 février 2017, c-à-d que le point de départ de la prescription se situe au jour où elles sont apparues et ont pu être constatées dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique. Cette solution a été dégagée par la chambre criminelle dans un arrêt du 23 juin 2004 (bulletin criminel n°173). À la suite de la réforme de la prescription pénale, ces infractions doivent être considérées, par application de l'article 9-1 du CPP, comme des infractions occultes (catégorie légale qui correspond à l'ancienne catégorie jurisprudentielle des infractions clandestines par nature). L'infraction occulte est définie de la manière suivante : par ses éléments constitutifs, l'infraction occulte ne peut être connue ni par la victime ni par les autorités judiciaires. Le mensonge est consubstantiel à la nature de l'infraction. Cela a pour conséquence que le point de départ du délai de prescription ne commence à courir qu'à compter du jour où l'infraction est apparue dans des conditions qui en permettent la poursuite dans la limite de 12 ans révolus à compter des faits. 4. Le défaut de déclaration de naissance Le code civil prévoit l'obligation de déclarer la naissance des nouveaux-nés et en l'absence de déclaration, l'enfant risque de ne pas avoir d'état civil, il n'est donc pas protégé par rapport à son lien de filiation. Le code pénal prévoit deux incriminations : l'une correctionnelle, l'autre contraventionnelle en fonction de l'élément moral. Si le défaut de déclaration est dû à une négligence, à un oubli, à une inattention, il s'agira d'une contravention de cinquième classe passible d'une amende de 1.500€ (art. R645-4 du CP). Si l'abstention est intentionnelle, il s'agit d'un délit incriminé par l'art. 433-18-1 du CP passible de 6 mois d'emprisonnement et de 3.750€ d'amende. Dans un cas comme dans l'autre, l'infraction est définie matériellement de la même manière : il s'agit, par une personne ayant assisté à un accouchement, de ne pas faire la déclaration prescrite par l'art. 56 du code civil et cela dans les délais fixés par l'art. 55 du même code. Généralement, l'obligation de déclaration pèse sur le père de l'enfant ou à défaut sur le médecin, la sage femme ou le personnel de santé ou à défaut sur toute autre personne qui a assisté à l'accouchement. Les mêmes peines sont applicables à celui qui trouve un nouveau-né et ne le déclarepas comme c'est exigé par l'art. 58 du code civil qui indique que 'toute personne qui a trouvé un nouveau-né est tenue d'en faire la déclaration à l'officier de l'état civil du lieu de la découverte". Cette déclaration doit être faite dans les 5 jours sauf dérogation en raison de l'éloignement du lieu de naissance. À défaut, l'infraction est applicable. L'infraction est analysée comme une infraction instantanée. C'est une infraction rare, qui préserve la véracité du lien de filiation mais qui permet de prévenir les trafics d'enfants. Il s'agit de la première protection dont bénéficie le nouveau-né. Sous-section 2. Intégrité et valeur de l'exercice de l'autorité parentale ou de la prise en charge éducative du mineur La protection du mineur passe par la stabilité de son milieu familial et l'art. 371-1 du code civil précise que l'autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant. Elle appartient aux parents qui doivent protéger l'enfant dans sa sécurité, sa santé et sa moralité pour assurer son éducation et permettre son développement dans le respect dû à sa personne. Les garanties éducatives, qui peuvent être conférées à l'enfant, relèvent donc de l'exercice de l'autorité parentale dont il faut s'assurer que cet exercice peut intervenir sans obstacle (intégrité) et dans l'intérêt de l'enfant (valeur). §1. Intégrité de l'exercice de l'autorité parentale ou de la prise en charge éducative du mineur Le code pénal sanctionne trois types d'atteintes qui peuvent portées à l'autorité parentale et qui consistent à enlever l'enfant des mains de ses parents ou des mains de l'autre parent. → non-représentation d'un enfant mineur : s'applique majoritaire dans les relations entre parents séparés lorsque l'un des parents ne représente pas l'enfant à l'autre parent dans le cadre de l'exercice de son droit de garde ou de son droit de visite ou d'hébergement. Cette infraction est incriminée par l'art. 227-5 du CP, elle est passible d'1 an d'emprisonnement et 15.000€ d'amende. C'est une infraction d'abstention. → les infractions de soustractions d'enfant : le code pénal distingue cette soustraction selon qu'elle est le fait d'un ascendant ou de quiconque : → si c'est le fait d'un ascendant : l'infraction est incriminée par l'art. 227-7 du CP, elle est passible d'1 an d'emprisonnement et 15.000€ d'amende : ce sont les ascendants qui sont visés, il peut s'agir du père ou de la mère mais aussi d'un grand-père ou d'une grand-mère qui vont enlever l'enfant et l'extraire de son milieu éducatif exercé par l'autre parent ou les deux parents. Lorsqu'il s'agit d'enlever l'enfant des mains de l'autre parent, il faut distinguer la non-représentation de la soustraction. La non-représentation, par exemple, c'est le fait pour un parent de ne pas ramener l'enfant à l'issue du week-end pendant lequel il exerçait un droit d'hébergement. La soustraction c'est le fait en plus, par exemple, d'emmener l'enfant en dehors du territoire sans donner de nouvelles pour qu'il soit soustrait de l'éducation de l'autre parent. → si c'est le fait de quiconque : c-à-d si personne qui n'est pas un ascendant de l'enfant mais c'est une soustraction sans fraude ni violence. Elle est incriminée par l'art. 227-8 du CP. Elle est passible de 5 ans d'emprisonnement et 75.000€ d'amende. S'il y a fraude ou violence, il y a un enlèvement de droit commun. Concernant les parents séparés l'infraction la plus couramment appliquée est celle de non- représentation de l'enfant mais parfois, elle est peut être poursuivie cumulativement à l'infraction de soustraction par ascendant. Le code pénal précise que la tentative de ces infractions est incriminée (art. 227-11 du CP). Ces infractions sont aggravées dans les circonstances suivantes, concernant la non-représentation et la soustraction par ascendant : → lorsque le mineur est retenu au-delà de 5 jours sans que ceux qui ont le droit de le réclamer sachent où il se trouve → si l'enfant mineur est retenu indûment en dehors du territoire de la République → si l'auteur de l'infraction a été déchu de l'autorité parentale Les peines passent à 3 ans d'emprisonnement et 45.000€ d'amende. A- La non-représentation d'enfant (art. 227-5 du CP) La non-représentation d'enfant est définie comme le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer. Le code pénal prévoit un délit obstacle prévu à l'art. 227-6 et passible de 6 mois d'emprisonnement et de 7.500€ d'amende concernant la personne chez qui réside habituellement l'enfant et qui transférerait son domicile sans notifier ce changement, dans un délai d'un mois, aux personnes susceptibles d'exercer un droit de visite ou d'hébergement à l'égard de l'enfant en vertu d'un jugement de divorce, d'une convention judiciairement homologuée de divorce ou d'une convention de divorce devant notaire. Compte-tenu de la généralité des termes employés par la définition de l'infraction, les personnes susceptibles de commettre l'infraction sont nombreuses. Il s'agira du parent qui a la garde de l'enfant au détriment de l'autre parent qui exerce son droit de visite ou d'hébergement ou vice- versa. Il peut aussi s'agir de toute autre personne en charge occasionnelle de l'enfant. Concernant les personnes qui ont le droit de réclamer l'enfant. Ce droit peut résulter de la loi dans le cadre de parents non-séparés et peut aussi résulter, dans le cadre de parents séparés, d'une décision judiciaire de divorce, d'une convention judiciaire homologuée en matière de divorce ou de la convention de divorce par consentement mutuel non judiciaire (acte sous seing privé déposé devant un notaire). Ces diverses décisions et conventions règlent les modalités d'exercice de l'autorité parentale en cas de séparation des parents. La séparation des parents est sans incidence sur l'exercice de l'autorité des parents (art. 373-2 du CC). La résidence de l'enfant va être fixée, soit en alternance au domicile de chacun des parents, soit au domicile de l'un avec un droit de visite ou d'hébergement au profit de l'autre. Le droit de réclamer l'enfant dépendra donc des prévisions de la décision judiciaire ou de la convention. Le refus de représenter l'enfant, qui consomme l'infraction, va prendre des formes différentes selon la source de l'obligation, selon qu'elle repose sur une convention ou un jugement. Il y aura refus si les prévisions judiciaires ou conventionnelles ne sont pas respectées. Quant à la consommation de l'infraction, il s'agit d'une infraction d'omission. La première question qui se pose est de savoir si l'infraction est continue ou instantanée. La jurisprudence a répondu en indiquant qu'il s'agit d'un délit instantané (chambre criminelle 14 février 1957 – bulletin criminel n°150). Selon la chambre criminelle, l'infraction est commise à chaque obstacle mis à l'exercice du droit de visite ce qui continue des délits successifs mais il ne peut y avoir des délits successifs que s'il y a des délits instantanés. La chambre criminelle considère que l'infraction est consommée en un trait de temps, dès que l'enfant est réclamé en vain. Quant au régime juridique de l'infraction, si le refus concerne une représentation de l'enfant qui aurait dû avoir lieu à l'étranger, on considère que le lieu de commission de l'infraction est l'endroit où la représentation aurait dû avoir lieu. Dans cette hypothèse, l'infraction est commise hors du territoire national et ne peut relever de la loi pénale française que si l'auteur est de nationalité française (ou si la victime est de nationalité française mais déterminer la victime dans ce genre d'infractions est plus hasardeux), à condition que le délit soit également incriminé à l'étranger et la poursuite ne pourra avoir lieu en France qu'à la requête du procureur de la République sur dénonciation des autorités de l'état de commission. Si le refus de représentation a lieu en France, la jurisprudence a précisé que le tribunal compétent est celui du lieu où l'enfant aurait dû être représenté. Cette solution a été indiquée par la chambre criminelle du 4 janvier 1990 (bulletin criminel n°8). Autre problème qui se pose quant au régime juridique de cette infraction : il arrive souvent que l'un des parents refuse de représenter l'enfant en raison de l'intérêt de l'enfant avec des arguments tenant à un risque pour l'enfant, risque pour sa santé (en cas d'éventualité de mauvais traitement), risque d'enlèvement à l'étranger, risque de maltraitance. Ces arguments sont souvent soulevés dans un contexte conflictuel entre parents séparés. La jurisprudence admet que le parent puisse échapper à responsabilité pénale mais seulement dans des circonstances exceptionnelles. Chambre criminelle du 12 mai 1954 (bulletin n°175) : cette solution a été "reconduite" après l'entrée en vigueur du code pénal nouveau en 1994. Depuis, les faits justificatifs doivent être prévus par la loi, et elle ne prévoit pas en la matière de faits justificatifs. La jurisprudence criminelle conserve la référence à des circonstances exceptionnelles, par exemple, dans un arrêt du 10 juin 2015 rendu par la chambre criminelle (n° de pourvoi : 14- 82.154). Ce qui tend à faire penser que la vieille jurisprudence sur les circonstances exceptionnelles continue à être pertinente. À cet égard, elle a été développée au 20ème s., la jurisprudence précisant que des circonstances exceptionnelles ne peuvent être admises que s'il elles sont dûment caractérisées mais aussi à condition que le parent prévenu ait usé de toute son autorité pour se faire obéir de son enfant au cas où le refus de représentation viendrait de l'enfant lui-même. Ainsi, il est arrivé, par exemple en 1972, que la chambre criminelle admette des circonstances exceptionnelles en présence d'un enfant de 15 ans qui avait opposé une farouche résistance à sa mère. La chambre criminelle l'avait également admis en 1976, concernant une mère relaxée, relaxe approuvée par la chambre criminelle, parce que lors du précédent hébergement par le père, ses filles avaient subi des maltraitances. Quels sont les faits justificatifs prévus par le code pénal? La chambre criminelle se montre très restrictive. Par rapport à une contrainte éventuelle, qui est prévue par l'art. 122-2 du CP qui exige une force irrésistible. La contrainte est rarement admise par la chambre criminelle et elle n'est jamais admise lorsqu'il s'agit d'une contrainte morale. S'il s'agit de la résistance physique du mineur, on pourrait envisager une contrainte physique. Mais pour ce qui est d'une contrainte morale, dans un arrêt du 5 novembre 1997 (n° de pourvoi : 95-85.244), la chambre criminelle a refusé de l'admettre. La cour d'appel avait admis les circonstances exceptionnelles mais la chambre criminelle casse la relaxe. Il s'agissait d'une mère qui avait refusé d'envoyer sa fille chez son père pendant les vacances parce que le père avait refuser de la ramener lui-même et qu'il aurait fallu que la petite fasse le long trajet toute seule en train. La chambre criminelle a refusé d'y voir des circonstances insurmontables au titre de la contrainte. Il est arrivé que la chambre criminelle statue au visa de l'état de nécessité (art. 122-7 du CP), et notamment dans un arrêt du 2 septembre 2004. La mère alléguait des risques d'atteinte sexuelle lors de l'exercice d'un droit de visite de la part du père. Cet argument n'était pas très convaincant, parce que les visites étaient médiatisées chez les grands-parents sur décision de justice et la mère avait fait preuve de beaucoup de mauvaise foi pendant la procédure. Il arrive que l'argument soit plus convaincant et pour autant, par exemple, dans un arrêt du 3 octobre 2012, la chambre criminelle refuse d'y voir des circonstances exceptionnelles au titre d'un état de nécessité. Elle refuse de prendre en compte des abus sexuels commis par le père de l'enfant alors qu'il avait déjà été condamné pour des abus sexuels sur l'enfant au pénal. La chambre criminelle justifie sa décision de la manière suivante : la mère aurait dû saisir immédiatement le JAF afin de faire modifier la décision relative aux droits du père. À partir de là, la jurisprudence de la chambre criminelle a été constante. Au fond, les juges répressifs refusent d'empiéter sur la compétence du JAF. En cas de maltraitances, il faut immédiatement saisir le JAF. Ainsi, la chambre criminelle statue maintenant en ce sens, par exemple dans un arrêt rendu par la chambre criminelle le 4 avril 2024 (n° de pourvoi : 23-84.683). Ici, la mère qui avait été condamnée devant la cour d'appel, soulevait une QPC (question prioritaire de constitutionnalité) mettant en cause la constitutionnalité de l'infraction en cas de danger plausible encouru par l'enfant ou de résistance de l'enfant à la représentation. Il est allégué que l'infraction serait contraire au principe de la légalité criminelle (art. 7 DDHC), de la nécessité des peines (art. 8 DDHC), des droits de l'enfant et de la protection de la famille (art. 10 et 11 préambule de 1946). La chambre criminelle refuse de renvoyer la QPC devant le conseil constitutionnel et estime que la question n'est pas sérieuse et indique que, dans ce cas, le parent doit saisir le JAF, ce qui détruit l'argument de disproportionnalité des peines ou un problème de légalité criminelle ou un problème tenant à l'intérêt de l'enfant. Du point de vue de l'élément moral, l'infraction est intentionnelle, ce qui suppose la conscience et la volonté de l'auteur de ne pas respecter son obligation de représenter l'enfant à l'autre parent. Il est possible que le prévenu ait fait une erreur sur ses droits et ses devoirs, notamment en cas de divorce. Ici, on imaginera plutôt qu'il s'agisse d'une erreur de droit sur les dispositions conventionnelles ou judiciaires. L'erreur de droit est admise, à des conditions très restrictives, par la jurisprudence criminelle (art. 122-3 du CP) qui ne l'admet qu'en cas d'erreur provoquée par l'autorité judiciaire ou administrative donc il faudrait que l'erreur soit incontestable ou insurmontable dans la décision judiciaire ou la convention. Il arrive que le père, la mère ou l'ascendant soit également poursuivi pour soustraction d'enfant par ascendant, si la non-représentation se cumule avec un enlèvement plus long de l'enfant. B- La soustraction d'enfant par ascendant (art. 227-7 du CP) C'est une infraction qui ne peut être commise que par un ascendant. Elle est définie par le fait, par tout ascendant, de soustraire un enfant mineur des mains de ceux qui exercent l'autorité parentale ou auxquels il a été confié ou chez qui il a sa résidence habituelle. L'acte incriminé est une soustraction ce qui implique des actes positifs d'exécution. C'est une infraction de commission. Ces actes peuvent faire penser à un enlèvement. La question qui se pose est la suivante : n'y aurait-il pas un concours idéal d'infraction (conflit de qualification) entre la soustraction de mineur par ascendant et l'infraction générale d'enlèvement. L'enlèvement est incriminé à l'art. 224-1 du CP comme le fait d'arrêter de détenir ou de séquestrer ce qui suggère une absence de consentement de la victime. Cette soustraction peut parfois être violente, hors l'enlèvement est un crime passible, selon les circonstances, de 20 ou 30 ans de réclusion criminelle et si la victime est un mineur de 15, les peines sont aggravées respectivement à 30 ans de réclusion de criminelle et à la réclusion à perpétuité. Nous avons une infraction spéciale et une infraction générale. Specialia generalibus derogant (les lois spéciales dérogent aux lois générales) donc on va appliquer l'infraction spéciale (ici, la soustraction par ascendant). Il est logique que la soustraction soit moins sévèrement réprimée parce qu'on peut penser que le parent qui enlève l'enfant le fait parce qu'il pense qu'il mieux élever l'enfant que ce qu'a décidé le JAF en ne lui laissant qu'un droit de visite ou d'hébergement. La jurisprudence est plus complexe. Il est arrivé que les tribunaux appliquent l'infraction d'enlèvement de droit commun. Notamment, dans un arrêt de la chambre criminelle de la cour de cassation du 3 septembre 2008 (n° de pourvoi : 08-84.201). Le père naturel d'un enfant qui venait de naître n'avait pas reconnu l'enfant et refusait d'en entendre parler. Il avait enlevé le bébé de quelques mois qui est décédé à la suite des négligences du père. La chambre criminelle, saisie sur pourvoi au stade de l'instruction, a approuvé le renvoi du père devant la cour d'assises du chef d'enlèvement d'un mineur de 15 ans suivi de mort, à l'exclusion du délit de soustraction de mineur. La chambre criminelle indique que l'acte résultait clairement de la volonté du père de porter atteinte à l'enfant au-delà de sa situation familiale. Du point de vue du régime juridique, la soustraction d'enfant par ascendant est un délit continu selon la jurisprudence de la chambre criminelle. Par exemple, un arrêt 23 février 2000 (bulletin criminel n°83), où la chambre criminel précise que le délit se poursuit aussi longtemps que son auteur persévère dans sa volonté de porter atteinte à l'exercice de l'autorité parentale. Cette précision était utile en l'espèce, puisque la soustraction avait eu lieu en Irlande puis l'enfant a été acheminé par la France jusqu'à Marseille. Cette solution permet à la territoire de considérer que l'infraction s'est déroulée sur le territoire de la République dans la mesure où l'infraction est continue, ce qui permet d'appliquer la loi pénale française aux faits et la compétence des tribunaux français puisqu'en matière pénale, la compétence juridictionnelle suit la compétence de la loi. Puisque c'est une infraction continue, le délai de prescription court à compter de la cessation de l'infraction donc au moment où le mineur est remis dans les mains de la personne à laquelle il a été soustrait. C'est un délit intentionnel parce qu'il requiert des actes positifs donc nécessairement l'intention d'agir. On peut s'interroger sur la frontière entre les qualifications de non-représentation et de soustraction. On peut se demander si la non-représentation n'absorberait pas la soustraction dans certains (ex : un parent qui récupère l'enfant lors de son week-end de garde et qui, à l'issue du week-end ne représente pas l'enfant). Il n'y a pas de réponse en jurisprudence. Parfois les poursuites sont cumulées, comme dans un arrêt de 2024, où on cumule les poursuites pour non- représentation et soustraction, sans précision particulière. C- La soustraction d'enfant par une personne autre qu'un ascendant sans fraude ni violence (art. 227-8 du CP) L'infraction est définie comme le fait par toute personne autre que celles mentionnées à l'art. 227- 7 de soustraire sans fraude ni violence un enfant mineur des mains de ceux qui exercent l'autorité parentale ou auxquels il a été confié ou chez qui il a sa résidence habituelle. Le fait que soit visée une soustraction sans fraude ni violence fait qu'il n'y a pas de conflit de qualification avec l'enlèvement de droit commun. Puisque c'est une soustraction qui est visé, il faut bien un déplacement physique du mineur mais qui peut être avec le consentement du mineur et parfois même à son initiative. C'est une vieille infraction qui avait pour but, jusqu'à l'adoption du code pénal nouveau, de sanctionner les soustractions à connotation amoureuse ou sexuelle de jeunes filles en désaccord avec les parents. C'est que l'on appelait anciennement le détournement de mineur. L'infraction a été conservée dans le code pénal mais a un domaine d'application plus large maintenant. Elle peut, par exemple, sanctionner un détournement de mineur par des mouvements sectaires ou par des adultes exerçant une influence se substituant à celle des parents sur le mineur, incitant le mineur à fuguer. Ces adultes peuvent être des membres de la famille ou des membres extérieurs au noyau familial. L'infraction va aussi s'appliquer à un majeur qui accueille chez lui un mineur en fugue. Par exemple, la chambre criminelle, dans un arrêt du 3 septembre 2014 (n° de pourvoi : 13- 83.268) a admis l'application de l'infraction à l'égard d'un professeur qui avait accepté chez lui un mineur en fugue sans prévenir les parents. Le consentement du mineur est sans incidence sur la consommation de l'infraction. Une question s'est posée anciennement : faut-il que la soustraction dure un certain temps pour entrer dans le domaine de l'infraction. Cette question se pose parce que sous l'empire du code pénal ancien, la jurisprudence estimait que le détournement de mineur n'était pas applicable à de simples sorties amoureuses. Sous l'empire du code pénal actuel, la chambre criminelle de la cour de cassation, dans un arrêt rendu le 21 juin 2009, admet l'application de l'infraction dans les circonstances suivantes : une jeune fille était en conflit avec ses parents et entretenait une relation amoureuse et sexuelle avec un homme plus âgé, elle le voyait quotidiennement pendant des heures (elle fuguait de son établissement scolaire et de son domicile) et cet homme avait une mauvaise influence sur elle. La Cour parle de relation dépravée. La mineure avait plus de 15 ans donc il n'y avait pas trop d'infractions pour la protéger du point de vue de cette relation amoureuse. Les juges approuvent la soustraction de mineur à l'encontre de cet homme en précisant qu'il avait commis des détournements répétés exerçant sur la mineur une emprise destinée à la soustraire à une autorité parentale qu'il jugeait néfaste. Il est possible, à la suite de cette jurisprudence, de retenir l'infraction pour des soustractions de brève durée mais quasi-quotidiennes sur une longue période. L'infraction est instantanée. Elle se renouvelle à chaque refus de restitution du mineur. La solution est ancienne, rendue sous le coup de l'ancien délit de détournement de mineur, chambre criminelle du 30 juin 1981 (bulletin criminel n°233). L'infraction est intentionnelle. L'élément intentionnel ne sera retenu que si l'auteur présumé des faits connaissait l'âge du mineur et sa minorité, notamment dans le contexte de détournement de mineur et de relations sexuelles et amoureuses. On peut admettre l'erreur de fait qui détruit l'intention à condition d'être crédible donc prouvée. §2. Valeur de l'exercice de l'autorité parentale ou de la prise en charge éducative ou financière du mineur Les infractions sont nombreuses et importantes en gravité. A- La protection de la santé et de la sécurité du mineur La protection de la santé et de la sécurité du mineur est garantie par les infractions de délaissement de mineur et de privation de soins ou d'aliments 1. Le délaissement de mineur (art. 227-1 et 227-2 du CP) Le délaissement de mineur est synonyme d'abandon définitif du mineur et plus particulièrement dans des conditions qui ne permettent pas de garantir sa sécurité et sa santé. La mère est autorisée légalement à abandonner son enfant à la naissance mais le code civil et le code de l'action sociale et des familles encadrent rigoureusement l'accouchement sous X. Ce que veut éviter le législateur, c'est l'abandon "sauvage" d'enfant le mettant en danger. L'infraction est définie par l'art. 227-1 comme délaissement d'un mineur de 15 ans en un lieu quelconque sauf si les circonstances du délaissement ont permis d'assurer la santé et la sécurité de celui-ci. Elle est sanctionnée de 7 ans d'emprisonnement et 100.000 € d'amende. L'infraction est criminalisée si le délaissement a entraîné un dommage pour l'enfant. S'il a entraîné une infirmité ou une mutilation permanente, les peines encourues sont de 20 ans de réclusion criminelle et s'il s'en est suivi la mort du mineur, la peine encourue est de 30 ans de réclusion criminelle. S'il s'agit d'un crime, l'infraction est intentionnelle. S'il s'agit d'un délit, la jurisprudence a eu l'occasion de préciser que le délit ne sera retenu qu'en cas de volonté irrévocable d'abandonner l'enfant. On peut y voir un dol spécial requis. Cette précision a été apportée par la chambre criminelle dans un arrêt du 13 novembre 2007 (bulletin criminel n°273) qui concernait le délaissement d'une personne vulnérable incriminé par l'art. 223-3 du CP. Avant l'entrée en vigueur du code pénal actuel, le délaissement était incriminé en une infraction unique visant les mineurs de 15 ans et les personnes vulnérables. Le code pénal actuel distingue deux infractions. On peut faire l'analogie entre le régime juridique du délaissement de personne vulnérable et celui du délaissement de mineur. Dans cette affaire de 2007, il était question d'un délaissement de personne vulnérable et plus particulièrement, une personne avait été poursuivie pour avoir refusé une aide ménagère à ses parents âgés et la chambre criminelle a estimé que le délit n'était pas applicable car il fallait démontrer une intention d'abandonner définitivement la victime (ici, les parents âgés ). On peut en déduire qu'en matière de délaissement des mineurs, il faudra démontrer une volonté irrévocable d'abandonner le mineur. La chambre criminelle de la cour de cassation avait déjà fait une précision en ce sens, au sujet du délaissement de mineur, dans un arrêt 23 février 2000 (bulletin criminel n°84). Deux mineurs (11 et 14 ans) étaient en vacances chez le père, leur père les avait renvoyé prématurément par ferry et à la sortie du ferry, il n'y avait personne pour accueillir les enfants parce que la mère et son compagnon n'était pas à la sortie du bateau pour récupérer les enfants en raison d'un malentendu. Des poursuites ont été intentées pour délaissement de mineur mais la chambre criminelle a abandonné les poursuites car il n'y a pas, dans cette abstention, une volonté irrévocable d'abandonner les enfants. 2. L'infraction de privation de soins ou d'aliments (art. 227-15 et 227-16 du CP) L'infraction de privation de soins ou d'aliments vise a préserver la santé ou la sécurité du mineur (art. 227-15 du CP). Il s'agit du fait, par un ascendant ou toute autre personne exerçant à son égard l'autorité parentale ou ayant autorité sur un mineur de 15 ans, de priver celui-ci d'aliments ou de soins au point de compromettre sa santé. Le texte comprend un deuxième alinéa : constitue une privation de soins, le fait de maintenir un enfant de moins de 6 ans sur la voie publique ou dans un espace affecté au transport collectif de voyageurs, dans le but de solliciter la générosité des passants. Les peines sont de 7 ans d'emprisonnement et 100.000€ d'amende. L'infraction est criminalisée en cas de privation ayant entraîné le décès du mineur, les peines étant portées à 30 ans d'emprisonnement (art. 227-16 du CP). Le deuxième alinéa de l'art. 227-15 du CP a été ajouté en 2003 par le législateur. Il vise le fait de se servir d'un mineur de 6 ans pour mendier sur la voie publique. Or, dans le code pénal, ces actes sont déjà incriminés par ailleurs en tant qu'exploitation de la mendicité d'autrui et notamment d'un mineur prévu par art. 225-12-6 du CP qui vise les mineurs quelque soit leur âge. Les peines prévues sont de 5 ans d'emprisonnement et 75.000€ d'amende. Comment articuler ces deux infractions ? L'intérêt du deuxième alinéa de l'art. 227-15 est de permettre une répression accrue permettant de protéger les jeunes enfants. Pour que ce deuxième alinéa s'applique, il faut que les conditions de privation de soins ou d'aliments soient réunies. Il est nécessaire de caractériser une privation au point de compromettre la santé de l'enfant. La chambre criminelle, dans un arrêt du 12 octobre 2005 (bulletin criminel n°259), a refusé l'application de l'infraction de privation de soins ou d'aliments dans des circonstances où une mère avait été arrêté en train de mendier sur la voie publique avec un enfant de moins de 6 ans mais l'arrêt précise que cet acte n'a pas compromis la santé de l'enfant. L'infraction peut être commise par les ascendants, les personnes exerçant l'autorité parentale et toute autre personne sous l'autorité de laquelle le mineur est placé. Le domaine de l'infraction est large et vise à protéger la santé de l'enfant au-delà du cadre strict de l'exercice de l'autorité parentale car l'enfant peut être confié momentanément à des personnes autres qui pourront se voir appliquer l'infraction en cas de privation de soins ou d'aliments. L'infraction est peu appliquée mais lorsqu'elle est appliquée ce n'est pas seulement à des parents. Après la deuxième guerre mondiale elle a été appliquée au personnel et à la directrice d'un foyer d'enfants qui avait détourné de la nourriture destinée aux enfants en période de pénurie alimentaire. L'infraction est applicable au compagnon.e, au concubin.e ou au partenaire pacsé de la mère ou du père. La jurisprudence fournit un exemple au 21ème s. de privations de soins ou d'aliments ayant compromis la santé des enfants, jurisprudence de la cour d'appel de Douai par arrêt du 15 février 2006. Il s'agissait d'une affaire une mère laissait habituellement ses enfants dans une maison sans gaz, ni eau, ni électricité et les enfants se trouvaient à charge du voisinage. L'infraction protège les mineurs de 15 ans et pas au-delà parce qu'on suppose qu'au-delà ils peuvent demander de l'aide aux institutions sociales, à l'école, etc. L'infraction est instantanée. La privation de soins peut prendre la forme d'un refus d'actes médicaux compromettant la santé de l'enfant. Lorsque cela résulte d'une privation d'aliments on pourrait se demander si ça relève d'une infraction continue ou d'une infraction instantanée, la doctrine estime plutôt qu'il s'agit d'une infraction instantanée donnant lieu à des infractions successives. Le délai de prescription commence à courir à compter du dernier acte de privation. La tentative n'est pas incriminée. L'infraction est intentionnelle. B- La protection des moyens de subsistance du mineur par l'infraction d'abandon pécuniaire de famille Il s'agit de protéger les mineurs bénéficiaires d'une pension alimentaire, de les protéger contre le non-paiement de cette pension de la part du parent débiteur et ce en cas de non-paiement d'une durée de 2 mois. Afin de faciliter le paiement de ces pensions, une loi du 23 décembre 2021 a prévu un mécanisme d'intermédiation financière permettant de prévoir par convention que la pension alimentaire sera recouvrée par la CAF ou par la MSA (Mutuelle Sociale Agricole) afin de garantir ce paiement. La pension est versée par le débiteur à la CAF ou à la MSA. Dans cette hypothèse, le délit sera consommé en cas d'abstention de paiement pendant un délai de 2 mois. Cela garantit au créancier le paiement de la pension. Le CP prévoit un délit obstacle pour prévenir le non-paiement des pensions. L'art. 227-4 du CP prévoit deux délits obstacles punis de 6 mois d'emprisonnement et 7.500€ d'amende : → le premier délit : omettre de notifier un changement de domicile au créancier dans un délai d'un mois → le deuxième délit : omettre de la part du débiteur de transmettre les pièces nécessaires à la CAF ou à la MSA et permettant la mise en œuvre de l'intermédiation financière. Comprend également le fait d'omettre de mentionner le changement de situation à ces organismes. Pour ce qui est du délit d'abandon pécuniaire de famille, c'est un délit dont les éléments constitutifs dépendent de l'obligation de paiement qui est d'origine civile. L'application du délit dépend du droit civil et lorsque c'est le cas, en droit pénal, on considère que ça constitue une condition préalable au délit. Quelle est cette condition préalable ? Il faut qu'existe une obligation pécuniaire de famille résultant d'une décision judiciaire ou d'un titre prévu par l'art. 373-2-2 du code civil (2° jusqu'au 5°) et qui traite des pension alimentaires qui résultent, selon ce texte, d'une convention homologuée par le juge, d'une convention de divorce ou de séparation de corps par consentement mutuel prévu par l'art. 229-1 ou acte reçu en forme authentique par un notaire ou une convention à laquelle la CAF ou la MSA ont donné force exécutoire pour mettre en œuvre une intermédiation financière. Ces titres visent à protéger les enfants bénéficiaires d'une pension alimentaire afin de garantir leur subsistance. Le délit d'abandon pécuniaire de famille est plus large que ça. Le texte visant une obligation pécuniaire de famille qui peut être due à un ascendant ou à un descendant. Il peut également s'agir des prestations compensatoires prévues dans le cadre du divorce au bénéfice des ex- conjoints. Ce délit dépasse le cadre strict de la protection des mineurs. La doctrine a coutume de dire que c'est un délit qui protège le respect dû aux décisions de justice en matière d'obligation pécuniaire de famille. Lorsque l'obligation tire sa source d'une décision judiciaire, il faut que la décision soit exécutoire afin que le délit s'applique, ce qui signifie qu'elle doit être définitive. Si elle n'est pas définitive, elle peut être exécutoire si l'exécution provisoire a été prononcée. Si l'obligation résulte d'une convention de divorce non judiciaire (art. 229-1 et suiv. Du code civil), la convention est exécutoire dès qu'elle acquiert une date certaine. La chambre criminelle de la cour de cassation estime, de manière ancienne et constante, que l'obligation alimentaire ne cesse pas de plein droit à la majorité de l'enfant, le délit peut donc être commis alors que l'enfant est majeur ce qui permet à un jeune adulte de poursuivre ses études supérieures jusqu'à parvenir à une autonomie financière. L'élément clef de l'infraction tient en l'écoulement d'un délai de 2 mois. La cour de cassation dans un arrêt du 20 janvier 1993 (n° de pourvoi : 92-82.538) avait estimé qu'il fallait qu'il agisse de deux mois consécutifs, les juges estimant que le texte mentionne le fait de demeurer sans payer pendant deux mois. Une partie de la doctrine est assez critique là-dessus car elle estime que cela laisse impuni le fait pour un débiteur de payer la pension un mois sur deux. D'un point de vue classique, on a tendance à penser qu'il faut 2 mois consécutifs. L'infraction se consomme instantanément à l'issue des 2 mois, faisant courir la prescription à ce moment là. Si la pension n'a jamais été payée, la prescription commence à courir à la date où le titre est devenu exécutoire. Le délai de prescription est de 6 ans. Au plan matériel, il faut un refus d'exécution (non-paiement) qui s'appréciera au regard des prévisions du titre qui fondent l'obligation de paiement (titre de créance). La modification ultérieure de la situation du débiteur n'a pas d'effet sur la constitution du délit. Si les conditions d'application du délit sont remplies au moment de l'inexécution, il s'appliquera même s'il y a une modification ultérieure de la situation du débiteur, même si cette modification est rétroactive remettant en cause le titre qui fonde la créance. Par exemple, si le titre est relatif à un mariage qui est ensuite annulé, l'annulation étant rétroactive, tout se passe comme si le débiteur et le créancier n'avait jamais été mariés et s'il y a eu un refus de paiement de la pension alimentaire, par le mécanisme strict du droit civil, cette pension n'aurait jamais dû être payée puisqu'elle n'avait pas de fondement. Pour autant, le chambre criminelle estime que dans ce cas, le délit demeure constitué parce qu'il l'était au moment du non-paiement. La même solution doit être adoptée en cas de réformation en appel de la décision judiciaire qui fonde la créance ou encore, en cas de réduction de la pension alimentaire ultérieure au non-paiement (ch. crim., 4 juin 2008). Donc la modification ultérieure de la situation des parties, notamment du débiteur au regard de ses obligations familiales, ne remet pas en cause la consommation du délit s'il y a eu non paiement d'un titre exécutoire dans les conditions qui existaient au moment de l'abstention. On voit bien l'autonomie du droit pénal. L'infraction est conditionnée par un contexte civil mais le droit pénal poursuit la protection d'un intérêt général plus global et c'est pour cela que la doctrine considère que c'est un délit qui protège le respect dû aux décisions de justice. C'est une infraction intentionnelle (conscience et volonté d'accomplir les actes interdit par la loi). Il faut que le débiteur connaisse l'étendue de ses obligations. Cette connaissance est présumée dès lors que la décision de justice lui a été notifiée et si ça n'a pas été le cas, la jurisprudence criminelle estime que le paiement volontaire de la pension rend inutiles les formalités de notification, notamment si le débiteur de la pension était présent à l'audience donc s'il commence à s'acquitter volontairement de la pension, cela dispense des formalités de notification. Un arrêt de la chambre criminelle de la cour de cassation a admis la contrainte physique pour faire échapper le débiteur à une condamnation du chef de cette condamnation, en 1937, dans une situation où le prévenu était atteint d'une grave affection cardiaque le privant de la possibilité de travailler, il était redevenu à charge de ses parents et ne pouvait plus payer de pension alimentaire et la chambre criminelle a estimé qu'il ne devait pas être condamné pour abandon pécuniaire de famille. La chambre criminelle exige que le débiteur apporte la preuve de son impossibilité absolue de payer, ce qu'elle a précisé dans un arrêt du 19 janvier 2022 (n°de pourvoi : 20-84.287). Les peines prévues sont de 2 ans d'emprisonnement et de 15.000€ d'amende. La jurisprudence considère que l'infraction est consommée au lieu de résidence du créancier de l'obligation. La solution est ancienne et correspond à une disposition de l'art. 382 du CPP qui dispose qu'en cas d'abandon de famille, le tribunal compétent peut être celui du domicile ou de la résidence de la personne créancière de l'obligation alimentaire, en plus des règles de droit commun des compétences territoriales en matière pénale. On détermine le tribunal répressif compétent en fonction du lieu d'arrestation, du domicile du prévenu, du lieu de détention ou du lieu de commission de l'infraction. Cela peut donner lieu à des complications, par exemple, si le créancier est à l'étranger (pas de problème dans le cas inverse) et le débiteur en France, alors l'infraction est commise à l'étranger. C'est un cas d'application de la loi pénale française (art. 113-6), à certaines conditions. Il faut d'abord la double incrimination et les poursuites en France ne peuvent avoir lieu que sur dénonciation de l'autorité du pays de commission, de la victime ou de ses ayant droit, et les poursuites, en France, ne peuvent exercés que sur requête du ministèrepublic (art. 113-8 du CP). C- La protection de la qualité de l'exercice de l'autorité parentale 1. La violation des obligations d'une ordonnance de protection en cas de violences de couple (art. 227-4-2 et 227-4-3 du CP) Le CP incrimine la violation des obligations d'une ordonnance de protection en cas de violences de couple ou d'une ordonnance provisoire de protection immédiate (OPPI). Cette infraction est prévue par l'art. 227-4-2 du CP. Elle suppose qu'ait été adoptée une ordonnance de protection. Il s'agit, pour la victime de violences conjugales, d'obtenir de la part du JAF, une ordonnance civile de protection dont le but est d'éviter la répétition de violences en mettant en place, des mesures de protection, des obligations à la charge de l'auteur présumé des violences. Cette ordonnance de protection est prévue pour protéger la victime contre un conjoint, concubin ou partenaire pacsé ou un ancien conjoint, concubin ou partenaire pacsé, qu'il y ait eu cohabitation ou pas. Ce mécanisme intéresse les psychologues qui se sont aperçus que les enfants témoins de violences conjugales pouvaient souffrir durablement de ces évènements. L'ordonnance civile de protection comprend dans ses conditions de prononcé la prise en compte de la protection nécessaire des enfants, qu'il s'agisse des enfants de la victime, du couple ou d'autres enfants. Ceci explique que l'infraction figure dans le chapitre du Code pénal consacré à la protection des mineurs et de la famille. L'ordonnance sera prononcée par le JAF, saisi par la victime ou par le procureur de la République avec l'accord de la victime, sans qu'une plainte ne soit nécessaire. Il rendra l'ordonnance de protection en cas de danger pour la victime, les enfants (du couple ou non), en cas de raison sérieuse de considérer comme vraisemblables les violences alléguées et le danger pour la victime ou les enfants. L'ordonnance doit être prise dans un délai de 6 jours et peut comprendre diverses obligations ou interdictions à l'encontre du conjoint violent. La première obligation c'est une interdiction de contact avec la victime ou les enfants qui peut s'accompagner d'un dispositif de bracelet électronique anti-rapprochement qui va être porté par l'auteur présumé des faits et qui permet de vérifier à distance le respect de cette obligation. Il y aussi l'interdiction de fréquentation de certaines personnes, l'interdiction de fréquenter certains lieux, l'interdiction de port d'arme ou la remise des armes détenues à la police et la prise en charge de la personne violente d'un point social, psychologique ou sanitaire. Cette personne peut également être astreinte à accomplir un stage de responsabilité parentale ou de sensibilisation aux violences de couple. Cette ordonnance de protection peut avoir pour but de prévenir un mariage forcé et dans ce cas, elle peut prévoir une interdiction temporaire de sortie du territoire de la victime. L'ordonnance peut également prévoir l'inscription de l'interdiction de sortir du territoire au fichier des personnes recherchées. Le JAF peut prévoir d'autres dispositions relatives, à la résidence des conjoints, aux modalités de l'exercice de l'autorité parentale, aux contributions à l'éducation et à l'entretien des enfants. Le JAF peut autoriser la victime à dissimuler son domicile ou à élire domicile chez son avocat. Le législateur a admis la possibilité d'obtenir une OPPI (art. 519-13-1 du code civil) où l'ordonnance devrai être délivrée dans un délai de 24h avec des mesures d'urgence comme une interdiction de contact, une interdiction de certains lieux, une interdiction de port d'arme, une suspension du droit de visite ou d'hébergement de l'auteur présumé des violences à l'égard des enfants. Le JAF peut également prévoir que la victime dissimule son nouveau domicile. Ces mesures vont cesser lorsque l'ordonnance de protection est adoptée dans les 6 jours donc elles ne vont pas cesser mais être reconduites par l'ordonnance de protection. On comprend que le législateur ait incriminé le non respect de ces obligations au titre des infractions de protection de la famille et du mineur et des mineurs à l'art. 227-4-2 qui prévoit 3 ans d'emprisonnement et 45.000€ d'amende en cas de violation des obligations prévues par l'ordonnance de protection ou par l'OPPI. Le délit a vocation à s'appliquer dès les premières mesures d'urgence. Le délit s'applique aussi aux violations commises dans un autre état de l'Union Européenne en vertu d'un règlement européen en date du 12 juin 2013 sur le caractère exécutoire des ordonnances civiles de protection en Europe. Pour compléter ce dispositif, le législateur a prévu un délit obstacle à l'art. 227-4-3 lorsque l'ordonnance a prévu le versement de subsides au de la contribution aux charges du ménage et de l'entretien et de l'éducation des enfants. Le texte incriminant le fait, de la part du débiteur de ces subsides ,de ne pas notifier un changement de domicile au créancier dans un délai d'un mois à compter du déménagement. E délit obstacle est puni de 6 mois d'emprisonnement et 7.500€ d'amende. 2. La violation parentale des obligations de protection de la sécurité, de la moralité ou de l'éducation du mineur (art. 227-17 du CP) La violation parentale des obligations de protection de la sécurité de l'enfant, de la moralité ou de l'éducation du mineur. L'art 227-17 prévoit un délit passible de 2 ans d'emprisonnement et 30.000€ d'amende, défini comme le fait, par le père ou la mère, de se soustraire sans motif légitime à ses obligations légales au point de compromettre la sécurité, la moralité ou l'éducation de son enfant mineur. Le texte fait réserve d'un motif légitime (pas d'exemple en jurisprudence où un motif aurait été reconnu comme légitime). Il doit s'agir d'un enfant mineur mais il n'y a pas de seuil d'âge. Ici, il est question pour les juges d'apprécier la qualité de l'autorité parentale et des engagements et des décisions éducatives des parents. Cette appréciation va dépendre des standards éducatifs de l'époque. Dans les années 1990 et au début des années 2000, à quelques années d'intervalle, la chambre criminelle rend deux décisions contraires concernant un même choix éducatif. Dans un arrêt du 11 juillet 1994, la cour de cassation approuve la condamnation de parents qui avaient envoyé leur fils âgé d'à peine 6 ans, seul dans une école dépendant d'une secte indienne de yoga en Inde. Les poursuites avaient été intentées sur constitution de partie civile de la grand-mère qui avait été choquée. La cour d'appel avait condamné et la chambre criminelle avait approuvé. La chambre criminelle ,quelques années plus tard, a approuvé la relaxe de la décision en appel de parents qui avaient pris une décision analogue (ch. crim. 17 octobre 2001). L'enquête s'appuyait sur une attestation fournie par un instituteur qui démontrait que l'enfant à son retour d'Inde ne présentait aucuns troubles psychiques ou aucunes graves lacunes pour le suivi de sa scolarité. Les juges doivent caractériser la compromission de la sécurité, la moralité ou la santé du mineur. Dans une affaire plus récente, la cour de cassation a adopté une solution difficile à contester. Chambre criminelle du 20 juin 2018 (n° de pourvoi : 17-84.128). La chambre criminelle approuve la condamnation en appel d'une mère fichée S qui était partie en Syrie rejoindre les combattants de l'état islamique avec de très jeunes enfants. Elle était partie pour Raqqa avec trois de ses enfants (elle en avait 6 ans) mineurs (un de 2 ans, un handicapé à 80% et un autre). Son dossier indique qu'elle était en voie de radicalisation depuis 2014. La Cour d'appel relève qu'elle a exposé ses enfants à un environnement d'une extrême dangerosité en les faisant séjourner dans une zone de combat et a compromis leur équilibre par leur déscolarisation et par leur rupture avec leur environnement familial et social. Ainsi, elle a gravement compris leur santé, leur moralité et leur éducation. Les enfants restés en France présentaient eux aussi des problèmes dont on peut penser qu'ils étaient dus à un défaut d'encadrement familial suffisant. Elle a été condamnée à 18 mois d'emprisonnement sans sursis. Cette condamnation avait vertu d'exemple pour les autres mères. C'est une infraction dont il n'est pas évident de déterminer si elle est continue ou instantanée parce que la mauvaise qualité éducative suppose l'écoulement d'un certain temps. Certains auteurs estiment qu'elle devrait être considérée comme continue. 3. La violation de l'obligation de scolarisation (art. 227-17-1 du CP) Le délit de violation de l'obligation de scolarisation. L'art. 227-17-1 incrimine le non-respect de l'obligation de scolarisation, passible de 6 mois d'emprisonnement et 7.500€ d'amende. Il s'agit du fait, par les parents d'un enfant ou toute personne exerçant à son égard l'autorité parentale ou une autorité de fait de façon continue, de ne pas l'inscrire dans une établissement d'enseignement sans excuse valable en dépit d'une mise en demeure de l'autorité de l’État compétente. Ce qui est incriminé c'est le fait de ne pas respecter une mise en demeure d'inscription. Il faut qu'il y ait eu un contrôle, que la situation ait été révélée puis qu'il y ait eu une mise en demeure. Pourquoi cette précaution ? Pendant longtemps, il a été possible de faire l'école à la maison et l'obligation de scolarisation était plus souple qu'à l'heure actuelle. Aujourd'hui, elle est extrêmement rigoureuse. Section 2. Les violences morales et sexuelles infligées aux mineurs Sous-section 1. La protection de la moralité du mineur Il s'agit de protéger le mineur en raison de sa vulnérabilité face à des comportements adultes qui peuvent les déstabiliser ou les mettre en danger. Les personnes morales peuvent être déclarées responsables (art. 227-28-1 du CP). Elles encourent des peines. Parmi ces peines figurent l'interdiction d'exercer l'activité au cours de laquelle l'infraction a été commise et permettent ainsi d'éviter sa réitération. §1. Les infractions de provocation à des actes déviants Ces provocations peuvent intervenir dans le cadre d'une personne morale mais aussi par voie de presse ou par Internet. L'art 227-28 du CP prévoit que lorsque c'est le cas, il faut appliquer les règles de détermination des personnes responsables prévues par le droit de la presse ou par le droit relatif aux communications audiovisuelles ou numériques. Le risque c'est l'anonymat de l'auteur de l'infraction qui mettrait dans l'impossibilité de sanctionner l'infraction à défaut de pouvoir identifier les auteurs. Il est indispensable d'avoir recours aux règles spéciales de droit de la presse que l'on appelle le mécanisme de la responsabilité pénale en cascade prévu, par le droit de la presse, par l'art. 42 de la loi du 29 juillet 1881. On parle de responsabilité pénale en cascade, afin de toujours avoir un responsable, même si l'auteur des propos litigieux est anonyme ou inconnu. Ce texte prévoit que sont pénalement responsables des infractions de presse, les directe

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