L'Agriculture, Une Activité Insérée Dans La Société - CM4

**L'AGRICULTURE, UNE ACTIVITÉ INSÉRÉE DANS LA SOCIÉTÉ** **Le modèle agricole productiviste : un projet émancipateur visant l'autosuffisance alimentaire** 1. **Origine et caractéristiques du modèle** A la fin des années 1940, après la seconde GM, l'agriculture ne permet plus de répondre aux besoi...

**L'AGRICULTURE, UNE ACTIVITÉ INSÉRÉE DANS LA SOCIÉTÉ** **Le modèle agricole productiviste : un projet émancipateur visant l'autosuffisance alimentaire** 1. **Origine et caractéristiques du modèle** A la fin des années 1940, après la seconde GM, l'agriculture ne permet plus de répondre aux besoins de la société, d'où la nécessité de proposer une nouvelle organisation de l'agriculture pour répondre aux attentes sociétales. L'État décide de réorganiser la production agricole vers un **modèle productiviste**. Il défend une action volontariste pour augmenter les rendements : - **Lois d'orientation agricole** : remembrement agricole = regroupement des parcelles, soutien de la mécanisation, développement des formes sociétaires - **Recherche agricole** : INRA (sélection génétique animale et végétale) - **Formation agricole** : apprentissage d'une profession Le **modèle agricole productiviste** s'appuie sur une intensification et maximisation de la production dans une finalité de nourrir la population : utilisation des intrants, énergies fossiles, machines et techniques. Il vise aussi à moderniser les mœurs de l'agriculture pour permettre l'émancipation de la nouvelle génération vis-à-vis de la tutelle parentale. Le métier d'agriculteur devient un métier comme un autre, avec des savoirs à apprendre sur les bancs de l'école. L'agriculture devient une activité économique, marchande, industrielle qui s'appuie sur la science. La modernisation de l'agriculture suit un processus de **rationalisation**, c'est-à-dire le fait d'avoir une majorité d'actions rationnelles en finalité (actions qui ont un but utilitaire à partir desquelles on fixe des objectifs pour atteindre une certaine efficacité), ce qui se démarque des conceptions antérieures (actions traditionnelles et affectives). Les conséquences manifestes sont variées : - Adéquation entre fins et moyens - Mise en place de procédures - Segmentation des taches - Mécanismes de contrôle - Quantification et calculabilité Cependant, des conséquences latentes apparaissent. La rationalisation poussée à l'extrême peut avoir des conséquences négatives non intentionnelles : déshumanisation des travailleurs (« iron cage », perte de sens dans le travail et sentiment d'oppression), oligarchie/capacité d'action limitée... 2. **Conséquences manifestes du modèle productiviste** *Exemples :* *Conséquences manifestes : exportation, satisfaction des besoins alimentaires, grande production* *Conséquences latentes : diminution de petites exploitations, population agricole minoritaire, pollution* En 30 ans (1950-80), le modèle productiviste a permis d'atteindre les objectifs fixés : - Autosuffisance alimentaire - Modernisation des campagnes - Harmonisation du niveau de vie des agriculteurs avec celui des autres citoyens La spécialisation des exploitations agricoles était une volonté de ce modèle et a eu lieu à deux échelles : - Échelle de l'exploitation : par les OPEX (= orientations technico-économiques des exploitations) - Échelle de la région : par bassin de production (structuration des filières) Le phénomène d'industrialisation de l'agriculture est passé par une mécanisation de la production, une amélioration de la productivité par travailleur, l'usage d'intrants externes et la généralisation du recours aux semences produites par des firmes spécialisées, permettant une augmentation considérable des rendements (notamment en céréales et production de lait et viande bovine).  On assiste aussi au développement des **chaines alimentaires longues**. Les **filières agroalimentaires** couvrent toutes les étapes de la production agricole d'aliments, de la production à la transformation, au commerce, à la distribution et à la consommation. La spécialisation des taches permet un gain d'efficacité et on assiste à l'émergence de bassins de production. Mais cela est associé à un changement des attentes sociétales et un rôle du consommateur qui augmente. Il faut donc comprendre les attentes du consommateur. 3. **Conséquences latentes du modèle productiviste** Le modèle productiviste est aujourd'hui de plus en plus remis en question du fait des conséquences latentes. Des **limites environnementales** apparaissent : - Pollution des nappes phréatiques - Salinisation des sols - Perte de matière organique dans les sols - Apparition de phénomène de résistance et d'accoutumance - Érosion de la biodiversité Des **limites économiques et sociales** également : - Exode rural - Diminution du nombre d'exploitations et d'agriculteurs - Création d'écarts au sein de la profession (ceux qui ont les moyens investissent, les autres sont contraints de partir) - Perte des liens sociaux (interconnaissance) au sein de l'espace rural et entre espace rural et urbain - Crise identitaire (rôle de l'agriculture) : question de la gouvernance des espaces ruraux puisque les agriculteurs deviennent minoritaires dans leur espace de travail (comment faire entendre sa voix) *[Modèle Treadmill (du « tapis roulant ») de Cochrane] : raisons expliquant pourquoi l'introduction d'une nouvelle technologie entraine une augmentation de la taille des exploitations et une pression sur les agriculteurs**. Sur une exploitation agricole, on introduit une nouvelle technologie (ex : acquisition d'un nouveau tracteur). Le premier adoptant obtient des avantages compétitifs avec un gain financier. Les voisins investissent à leur tour dans la machine pour gagner en compétitivité. L'adoption de la machine par d'autres agriculteurs permet une augmentation de la production donc de l'offre et par conséquent une diminution des prix. Pour maintenir un niveau de revenus constant, il faut accélérer la cadence de production. Les agriculteurs ayant les moyens investissent dans de nouvelles technologies, ceux qui ne peuvent plus suivre le rythme sortent du modèle.* *C'est un cercle vicieux : il y a une tendance à l'agrandissement permanent d'où une pression constante sur les agriculteurs avec un besoin perpétuel de s'adapter/se renouveler.* Les chaines alimentaires longues créent une distanciation entre consommation et production donc une incompréhension consommateurs/producteurs. Le nombre d'étapes de la chaine de production est toujours plus grand, il y a une concentration du pouvoir avec des acteurs intermédiaires. Cela impose aux agriculteurs un agrandissement de leurs exploitations pour maintenir un même niveau d'efficience (revenu) Des questions d'ordre sociologique se posent : - Rapports entre population agricole et consommateur anonymisé : absence de contact direct - Sentiment d'aliénation des agriculteurs : perte de contrôle, perte de sens (produire pour qui, pourquoi...), subissent leur profession, difficulté à faire entendre sa voix **Contexte actuel de l'activité agricole** Les consommateurs n'ont jamais été aussi impliqués dans leurs choix de consommation/réglementation sans réelles connaissances de la réalité, du métier, du terrain, ce qui peut créer des débats stériles et sans fin. Les conséquences sont directes avec une remise en question du fait de : - Perte de maîtrise du produit et du prix =\> questionnement sur la traçabilité, perte de confiance du client envers la production - Perte de reconnaissance et connaissances des filières en amont =\> distance et rupture entre population agricole/non agricole - Dissociation entre acte de production et de consommation Les agriculteurs sont devenus une population minoritaire dans leur espace de travail qui évolue. De nouvelles fonctions sont attribuées aux campagnes : - Campagne ressource - Campagne cadre de vie - Campagne loisir - Campagne nature Les stratégies d'adaptation peuvent être de s'appuyer sur une récupération de valeur ajoutée par association circuits courts/circuits longs ou le développement d'activités de niche.