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Ce document est un support de cours de neuropsychologie pour la deuxième année de licence en psychologie, à l'Université Paris Cité. Il comprend des rappels de neuro-anatomie, des définitions de la neuropsychologie, des explications sur le B.A.BA des aphasies et leurs sémiologies. Ces notes sont issues des cours suivis par les étudiants et sont une ressource complémentaire, ne remplaçant pas les cours.

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Notice d’information du support « CM/TD NEURO2 » Les règles générales du contrat d'engagement de l'Adhérent s’appliquent à tous les étudiant.e.s inscrit.e.s dans une formation de psychologie proposée par l'Institut de Psychologie d'Université Paris Cité ayant adhéré à l’ADE...

Notice d’information du support « CM/TD NEURO2 » Les règles générales du contrat d'engagement de l'Adhérent s’appliquent à tous les étudiant.e.s inscrit.e.s dans une formation de psychologie proposée par l'Institut de Psychologie d'Université Paris Cité ayant adhéré à l’ADEPsy, désigné.e.s individuellement ci-après comme « l’Adhérent ». Ces supports de cours ne représentent qu'une simple interprétation d'étudiant.e.s de cours duquel iels ont assisté, et dont iels ont généreusement donné leurs prises de notes à l'ADEPsy. Ces cours, destinés à l’usages strictement privé, ne sont pas suffisants au suivi de l’enseignement complet de l’Adhérent et ne constituent qu’une ressource complémentaire à sa formation. Le présent support est issu du cours de Neuropsychologie de deuxième année (abrégé NEURO2) de la licence de psychologie d’Université Paris Cité, parcours « Sciences Psychologiques » (Institut de Psychologie). Ces notes ont été prises durant l’année universitaire 2023-2024, et reflètent donc le programme de l’année précédente. Le présent support est protégé par le Code de la propriété intellectuelle. En application de l’article L335-3 de ce Code, constitue un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur. En l’application de l’article L335-2, ce délit est puni de 3 ans d’emprisonnement et de 300 000€ d’amende. L’Adhérent doit prendre donc en considération ces informations dans son utilisation des supports de l’ADEPsy. L’ADEPsy n’est pas responsable de l’utilisation des documents qu’elle transmet à l’Adhérent. Tout manquement au Code de la propriété intellectuelle et/ou des recommandations de ce document sera alors de la responsabilité de l’Adhérent, tel que convenu dans son contrat de l’Adhérent. L’ensemble de l’ADEPsy lui souhaite la meilleure réussite possible ! Associativement vôtre, L’Association Des Etudiants de Psychologie CM01 NEUROPSYCHOLOGIE Introduction et aphasies I/ LES RAPPELS DE NEURO 1 A. Définition de la neuropsychologie et rappels de quelques concepts fondamentaux La neuropsychologie est une sous-discipline de la psychologie dont l’objet est l’étude des liens entre le fonctionnement du cerveau et le comportement, c’est-à-dire entre les capacités cognitives du sujet et les structures cérébrales. On s’intéresse au fonctionnement normal mais aussi aux dysfonctionnements. C’est l’étude du fonctionnement et des dysfonctionnements cognitifs, émotionnels et comportementaux : - faisant suite à une lésion cérébrale - apparaissant dans un contexte développemental - dans le cadre d’une pathologie qui engendre directement/indirectement des dysfonctionnements cérébraux Les fonctions cognitives sont très vastes. Les principaux domaines d’étude de la neuropsychologie sont : le langage, la mémoire, les gnosies (capacités de reconnaissance), les fonctions spatiales (héminégligence, trouble du schéma corporel), les praxies (capacités de gestualité), les fonctions exécutives (la métacognition) et la cognition sociale. Les principales étiologies (= ce qui cause les déficits chez les patients) des troubles neuropsychologiques sont : les accidents vasculaires cérébraux (AVC), les traumatismes crâniens, les tumeurs, les maladies neurodégénératives, la sclérose en plaques, les troubles développementaux, les maladies psychiatriques etc. On distingue les troubles acquis des troubles développementaux : - Les troubles acquis résultent d’une altération d’une fonction cognitive précédemment acquise (aphasie, alexie, apraxie…). C’est un individu qui a eu un développement cognitif normal, puis, suite à un événement neurologique, des difficultés nouvelles apparaissent : c’est un trouble acquis. (préfixe « a » privatif.) - Les troubles développementaux émergent au cours de l’enfance et n’impliquent pas d’atteinte cérébrale avérée. Il doit y avoir une incapacité durable à développer une fonction donnée. Ils sont en lien avec le développement des apprentissages (dysphasie, dyslexie, dyspraxie). On oppose une aphasie (trouble acquis) à une dysphasie (enfant qui n’a jamais eu de fonction langagière normale). Cependant, ce n’est pas parce qu’un enfant a des troubles cognitifs qu’il s’agit nécessairement d’un trouble développemental. De plus, il existe une exception majeure : le syndrome dysexécutif, qui peut être présent dans un trouble acquis ou développemental. B. Le B.A.ba de la neuro-anatomie Le cerveau est constitué de 4 lobes et de 52 aires de Brodmann par hémisphère. Le cerveau possède une certaine hiérarchie dans sa fonctionnalité. Le cerveau possède des structures souscorticales. Il existe certaines zones sous-corticales critiques pour le fonctionnement cognitif, comme le corps calleux (transfert information entre ≠ hémisphère, syndrome de dysconnexion calleuse), les noyaux gris centraux (maladie de Parkinson) ou le thalamus, par exemple. C. Origines et méthodes d’études 1860 et 1980 : mise en relation entre anatomie et comportement → corrélation anatomo-clinique : syndrome observé chez patient, faire Théorie localisationniste hypothèse existe lien direct entre région cérébrale touchée et symptôme observé // théorie localisationniste postule existence centres dans cerveau spécialisés dans une fonction précise syndrome = association de symptômes, apparaissent en même temps corrélation entre région cérébrale donnée et concordance de signes cliniques Méthode des associations association de symptômes = la co-occurrence de déficits (symptômes) de symptômes (approche consécutifs à une lésion cérébrale : syndrome syndromique) systématisation syndromique du dysfonctionnement du comportement permet mieux comprendre difficultés patients + générer hypothèses sur fonctionnement normal cerveau // substrat lésionnel permet formuler hypothèses approche psychométrique = basée sur tests, permet comparer les performances à un groupe de référence, approche faire passer tests patients, évaluer plusieurs fonctions, scores patient comparés à groupe de référence (=normes), utilise épreuves standardisées, construction tests spécifiques Approche psychométrique permet isoler trouble spécifique Exemple : tâche dénomination consiste à présentation images. 3 images présentées patient doit dénommer items, obtient score sur 80, score donne informations sur normal ou pathologique d’un pdv statistique. analyse qualitative permet expliquer type d’erreurs produit : certains patients bien reconnus image mais possèdent difficultés dénommer mot, certains vont mettre plus temps dénommer mot, certains vont donner autre mot, certains pas reconnaître l’image Dissociation simple : objectif montrer lésion peut altérer une fonction/processus spécifiquement, lésion cérébrale peut toucher un processus spécifiquement et pas un autre. Exemple : après lésion cérébrale, patient peut avoir aphasie, donc langage touché mais pas troubles mémoire, fonctions cognitives fonctionnent avec certaine modularité, sein langage peut avoir atteinte capacités de production Méthodes des du langage mais pas forcément atteinte de dissociations compréhension, donc dissociation entre capacités de production et de compréhension. Double dissociation : observe chez patient dissociation inverse, présente déficit mémoire mais pas déficit langage, observer sein aphasies patients présentent troubles compréhension mais pas troubles l’expression, nous permet réaliser inférences sur fonctionnement psychologique normal II/ LES APHASIES ET LEUR SEMIOLOGIE Une aphasie est un déficit dans la production et/ou la compréhension du langage oral et/ou écrit à des niveaux d’intensité variable. C’est un syndrome acquis en rapport avec une atteinte cérébrale majoritairement de l’hémisphère gauche (lésion frontale ou temporale, ou parfois pariétale), souvent consécutive à des lésions focales (lésion délimitée dans l’espace du cerveau, à un endroit précis ≠ lésion diffuse) et qui peut affecter le langage oral et écrit. agraphie : trouble de l’écriture // alexie : trouble de l’écriture Les aphasies excluent les troubles moteurs de la parole (= le patient ne va jamais produire d’erreurs dans la production du langage : sa seule difficulté est d’articuler les mots), un défaut d’acquisition du langage de l’enfant (dysphasies, retards de langage…), les discours incohérents de certaines psychoses, les troubles de la pensée (langage incohérent qui n’est pas forcément un langage aphasique) et le mutisme (= le patient ne parle plus du tout, où les causes sont aussi fonctionnelles (psychogènes) sans lésions psychologiques (organiques) avérées). La première étape pour étudier la sémiologie des aphasies est de dresser l’inventaire le plus exhaustif possible des troubles du langage pour déterminer le syndrome aphasique dont souffre le patient → évaluation des difficultés de production et de compréhension du langage. Il faut préciser ce que le patient peut faire et ne peut pas faire, au niveau du langage (production, compréhension, et répétition du langage). Il existe différents troubles de production qu’il faut évaluer, pour caractériser un syndrome aphasique : les troubles de la fluence (réduite : beaucoup de temps pour faire une phrase / augmentée : logorrhée = patient qui parle tout le temps très rapidement) les troubles de l’articulation (observation de l’articulation du patient) les manques du mot (observation du patient qui cherche ses mots, mais aussi dans les tests qui a des difficultés à trouver des mots) les paraphasies (remplacer un mot par un autre) - phonémiques (déformation de la phonologie du mot, ajout de syllabe…) - verbales (le patient prononce un mot sans rapport avec celui qu’il doit dire) - sémantiques (le patient donne un mot sémantiquement lié à l’item attendu (ex : dire couteau au lieu de fourchette)) les néologismes (invention de nouveaux mots) le jargon (tellement de production anormale dans le langage qu’on ne comprend plus la forme d’un discours du patient) les troubles de la syntaxe (agrammatisme = production d’erreurs grammaticales dans les phrases, discours télégraphiques, verbes non conjugués…) les troubles de la compréhension (différents niveaux de complexité de la compréhension, token test) les troubles de répétition (distinction de répétition de mots simples (exemples : bonjour, enfant, papier…), de la répétition de mots complexes sur le plan phonologique (exemple : Tchécoslovaquie), de la répétition de phrases courtes ou longues…). Dans toutes les formes d’aphasie, la dénomination va être touchée. A. Aphasie de Broca L’aphasie de Broca a été la première identifiée par Broca qui rencontra le patient Leborgne, en 1861. Ce patient n’est plus capable de s’exprimer autrement qu’en répétant la syllabe « tan ». Il s’exprime verbalement, mais la seule chose qu’il est capable de produire est la syllabe “tan”. Le patient meurt quelques temps après d’une gangrène. Broca observa son cerveau post-mortem. Ce patient présenta une lésion focale frontale inférieure de l’hémisphère gauche, le reste du cerveau étant relativement beaucoup mieux préservé. L’aire 44 de Brodmann est impliquée dans la production du langage. Elle est maintenant désignée comme l’aire de Broca. Caractéristiques de l’aphasie de Broca − discours peu fluent (fluence du discours perturbée, débit de parole très lent), réduction du langage d’intensité variable (stéréotypies verbales = mot répété inlassablement) − difficultés articulatoires des mots, des paraphasies phonémiques (remplacer des syllabes dans les mots, inverser les syllabes…) − préservation de la compréhension Dans le cas d’une grande réduction du langage : − discours limité à des stéréotypies (répétée mots/ syllabes, exemple : « tan ») − agrammatisme (trouble de la syntaxe, style télégraphique, quasi exclusivement observé dans les formes aphasiques de Broca), Le patient est conscient de ses troubles. Le patient pense correctement mais ne peut pas exprimer ses pensées correctement. De plus, il peut y avoir une dissociation automatico-volontaire, c’est-à-dire que, quand le patient essaie de s’exprimer volontairement, le patient est beaucoup plus en difficulté que lorsqu’il répond de manière automatique (exemple : répondre à « les pompiers sont venus éteindre le… »). B. Aphasie de Wernicke Wernicke fait une première description de ce type d’aphasie en 1874. Il est le premier à décrire un syndrome aphasiologique différent de celui décrit par Broca. C’est une aphasie touchant le pôle réceptif du langage, c’est-à-dire qu’il touche la compréhension. Le patient a des difficultés majeures de compréhension. Après une analyse post-mortem du cerveau, Wernicke observe une lésion temporale supérieure, avec deux aires touchées à la jonction temporo-pariétale. Les aires de Wernicke sont les aires 22 et 42. Ainsi, il conclue que ces aires sont impliquées dans la compréhension du discours. Caractéristiques de l’aphasie de Wernicke − discours fluent, voire logorrhée (= pas de réduction de la fluence du discours) − compréhension massivement atteinte − paraphasies de tous types (production pas complètement normale : des paraphasies de tous types vont être produites : phonémiques, verbales, sémantiques) − néologismes (construire de nouveaux mots) − jargon (discours incompréhensible) − pas de trouble de la réalisation phonétique (articulatoire) Le patient n’a pas conscience des troubles atteints : c’est l’anosognosie (manque de consciences de ces troubles, incapacité à apprécier correctement ses propres capacités). Broca/Wernicke → il y a une double dissociation entre les aphasies de Broca et Wernicke entre la fluence et la compréhension : les deux fonctions cognitives sont indépendantes l’une de l’autre. Deux aphasies opposées ? Wernicke : associationnisme = certaines altérations de fonctions cérébrales résultent de l’interruption des voies unissant les centres (≠ lésion focale). On peut observer ce type de syndrome pas uniquement après une lésion du centre de l’expression (Broca) ou de la compréhension (Wernicke), on peut également observer ce type de syndrome dans le cas de lésion de faisceaux e fibres qui relient les deux centres. Si ce faisceau de fibre est touché par une lésion cérébrale, il est possible d’observer un syndrome aphasiologique. C. Aphasie de conduction L’aphasie de conduction résulte d’une lésion du faisceau arqué. Symptômes : − perturbation du langage spontané et surtout difficultés de répétition − manque du mot +++ − paraphasies phonémiques et verbales(morphologiques : ressemblent mots cibles) +++ − fluence normale du discours − compréhension quasiment normale − conscience des troubles préservée D. Aphasie globale L’aphasie globale résulte d’une lésion de l’aire de Broca et de l’aire de Wernicke, par exemple après AVC hémorragique. Symptômes : − altération de la compréhension et de la production − expression nulle ou très réduite − compréhension nulle ou très réduite E. Aphasie transcorticales Les aphasies transcorticales sont secondaires à des lésions situées à proximité des aires classiques du langage (soit à proximité de l’aire de Broca, soit à proximité de l’aire de Wernicke). Cliniquement, elles se différencient des précédentes aphasies par l’absence de troubles de la répétition de mots/phrases. − réduction massive du langage spontané qui peut aller jusqu’au mutisme − manques du mot Aphasie − préservation des capacités de répétition (incapacité produire discours transcorticale spontané mais capable répéter mots leur dit), le discours peut même être motrice écholalique (répétition fin des phrases / phrases complètes de manière automatique) → consécutive à une lésion de la région pré-motrice (en avant de l’aire de Broca). − perturbation de la compréhension Aphasie − intégrité de la répétition avec tendance écholalique, voire jusqu’au psittacisme transcorticale (répétition mécanique sans comprendre) sensorielle → consécutive à une lésion en arrière de l’aire de Wernicke. Aphasie − tableau d’une aphasie globale transcorticale − intégrité de la répétition mixte (capacités de répétition préservées) F. Aphasie anomique (syndrome important pour compréhension des modèles du langage et du fonctionnement du langage en neuropsychologie) L’aphasie anomique est une aphasie fluente caractérisée par : − un important manque du mot − un défaut d’accès au lexique : les patients ont donc des difficultés à trouver des mots dans leurs discours → consécutive à une lésion pariétale gauche (région gyrus angulaire, importante dans capacités langage écrit) III/ EN RESUME Aphasies non-fluentes Aphasies fluentes Sans trouble de Avec trouble de Sans trouble de Avec trouble de compréhension compréhension compréhension compréhension Aphasie de Broca Aphasie globale Aphasie de conduction Aphasie de Wernicke Aphasie transcorticale Aphasie transcorticale Aphasie anomique Aphasie transcorticale motrice mixte sensorielle CM02 NEUROPSYCHOLOGIE Mémoire épisodique et amnésies I/ La mémoire : définition IV/ Les troubles de la mémoire épisodique II/ La mémoire épisodique V/ L’évaluation clinique de la mémoire épisodique III/ Fonctions de la mémoire épisodique VI/ Conclusion La mémoire épisodique est un système mnésique parmi d’autres systèmes mnésiques. On parle d’amnésie, lors d’une perturbation de ce système. La neuropsychologie est le lien entre le fonctionnement du cerveau et le comportement. Les fonctions cognitives : langage, mémoire, gnosie, fonctions spatiales, praxie, fonctions exécutives, cognition sociale. I/ LA MEMOIRE : DEFINITION Exemples d’utilisation de la mémoire au quotidien : - Émission de jeu télé pour répondre à une question posée - Création d’une image mentale de quelque chose : fermer les yeux et se remémorer une madeleine, par exemple - Retenir un numéro de téléphone le temps de trouver de quoi le noter - Évoquer un souvenir de vacances datant de plusieurs années - Effectuer une séquence de gestes ou d’opération cognitive apprise précédemment : jouer de la musique ➔ Existe-t-il une seule mémoire ou plusieurs sous-systèmes spécialisés ? La mémoire permet d’encoder, de stocker et de récupérer différents types d’informations. Il y a 3 processus mnésiques : → Encodage : étape d’« enregistrement de l’information », qui peut être intentionnel (retenir une définition pour un examen) ou incident (retenir un visage dans le métro) → Stockage : « maintien de l’information », selon les délais variables (secondes, jours, années) → Récupération : « restitution de l’information » consciente ou implicite La mémoire est multiple, organisée en sous-systèmes interconnectés mais néanmoins dissociés. Exemples historiques : - Mémoire à court-terme / Mémoire à long terme : William James a fait l’hypothèse de sous-systèmes mnésiques qu’il a appelé mémoire primaire et mémoire secondaire avec un système qui permet de maintenir une information à court terme et l’autre pour maintenir une information sur le long terme. - Mémoire explicite / mémoire implicite (épisode de l’épingle) : Edouard Claparede avait dans son service une patiente amnésique. En la saluant plusieurs fois dans le même matin, il a eu l’intuition qu’au bout de la troisième fois, il y avait une trace mnésique de cette salutation. Il a placé une épingle dans la main de sa patiente qui lui a piqué. Puis, 10 minutes plus tard, il revient lui serrer la main et la patiente refuse de le faire car elle pense qu’elle pourra avoir mal, mais sans se souvenir pourquoi. L’information aurait été mémorisée, mais la mémorisation de l’information n’atteint pas un niveau de conscience suffisant pour qu’elle puisse justifier cela avec des mots. II/ LA MEMOIRE EPISODIQUE La mémoire épisodique permet de se souvenir des événements personnellement vécus avec leur contexte d’encodage (date, lieu et état émotionnel). « Découverte » de la mémoire épisodique Approche syndromique : l’étude des symptômes consécutifs à une lésion cérébrale pour générer des hypothèses sur le fonctionnement normal du cerveau. Double dissociation neuropsychologie : si une fonction A peut être perturbée en épargnant B, et inversement, alors A et B sont des fonctions cognitives autonomes. Principe localisationniste En 1972, le psychologue Endel Tulving a découvert la mémoire épisodique. Pour cela, il a utilisé l’approche syndromique. Le patient « KC » a été victime d’un accident de la voie publique, suite auquel il a eu un traumatisme crânien, déclenchant des crises d’épilepsie. Pour cesser ses crises, il a subi une opération : une lobectomie temporale (des deux hémisphères). L’hippocampe lui a été retirée. Il a eu une perte bilatérale quasi complète de l’hippocampe soit syndrome bi-hippocampique. L’hippocampe se situe dans la partie interne des lobes temporaux. Ainsi, selon la théorie localisationniste, la mémoire épisodique est sous-tendue par l’hippocampe. COMPARAISON MEMOIRE EPISODIQUE VS SEMANTIQUE La mémoire épisodique (=mémoire des souvenirs) se distingue de la mémoire sémantique (= mémoire des connaissances et des concepts). III/ FONCTIONS DE LA MEMOIRE EPISODIQUE La mémoire épisodique permet la conscience autonoétique (le voyage mental dans le temps (passé et futur) et le sentiment d’identité et de continuité (self). La mémoire épisodique est spécifique à l’espèce humaine Clayton : Des oiseaux ont été mis dans une cage. L’expérimentateur cache des graines et des vers dans un coin de la pièce. Les oiseaux vont préférer les vers de terre. Ensuite, on retire les oiseaux de la pièce pendant un certain temps et on les remet dedans ensuite. Les oiseaux mémorisent où était la denrée alimentaire et depuis combien de temps la nourriture était là. Un syndrome amnésique est une perturbation de la mémoire épisodique. ➔ Trouble affectant la mémoire à long-terme en l’absence de difficultés dans des tâches perceptives, motrices, langagières et de mémoire de travail. IV/ LES TROUBLES DE LA MEMOIRE EPISODIQUE TROUBLES CARACTERISTIQUES → étiologies possibles : lobectomie temporale, AVC des artères cérébrales postérieures, encéphalite herpétique → amnésie antérograde massive (oubli à mesure) le syndrome → amnésie rétrograde variable (gradient de Ribot : souvenirs anciens plus bi-hippocampique résistants à pathologie que souvenirs récents, car souvenirs épisodiques anciens vont se sémantiser et représentation neuronale de souvenir va quitter l’hippocampe pour rejoindre aires spécifiques corticales) → désorientation temporo-spatiale → autres systèmes de mémoires sont préservés → capacités intellectuelles sont préservées (syndrome pur). → étiologie possible : alcoolisme chronique (déficit en vitamine B, très présente dans le foie) → amnésie antérograde massive (oubli à mesure) → amnésie rétrograde importante le syndrome de Korsakoff → autres systèmes de mémoire sont préservés → désorientation temporo-spatiale → anosognosie (patient inconscient de ses troubles, pour lui mémoire bonne) → distorsions mnésiques (fabulations, fausses reconnaissances). → étiologies possibles : choc émotionnel, stress intense, effort physique → transitoire (durée < de 24H) → amnésie antérograde massive (questions itératives, désorientation spatio- l’ictus amnésique temporelle) idiopathique → amnésie rétrograde variable → autres systèmes de mémoire sont préservés → état anxieux → amnésie lacunaire → étiologie : psychiatrique (IRM normal) → pas d’amnésie antérograde : patient perdu anciens souvenirs, toujours l’amnésie psychogène capable d’apprendre nouvelles informations (dissociative, fonctionnelle) → amnésie rétrograde variable et souvent transitoire → perturbation de la mémoire autobiographique (informations sémantiques à son sujet). → étiologies possibles : atrophie hippocampique causée par une hypoxie du cerveau, crises d’épilepsie les amnésies → amnésie antérograde (incapacité à créer des souvenirs) développementales → mémoire sémantique préservée : développement « normal » (réussir acquérir connaissances sémantiques demandées l’école, mais pourront jamais raconter journée à parents). V/ L’EVALUATION CLINIQUE DE LA MEMOIRE EPISODIQUE Pour évaluer la composante antérograde, on dispose de matériel verbal (liste de 15 mots (Rey, 1964), 15 mots sans lien sémantique, rappels libres et reconnaissance), de matériel visuel (figure géométrique (Osterrieth, 1944), encodage incident, rappel différé à 20 min). Pour évaluer la composante rétrograde, on dispose de matériel autobiographique (test épisodique de mémoire du passé autobiographique (TEMPau, Piolino et al., 2000). VI/ CONCLUSION La mémoire est composée de systèmes mnésiques interconnectés mais dissociés. La mémoire épisodique permet de se souvenir des événements vécus dans leur contexte spatio-temporel et émotionnel d’acquisition. Une perturbation de la mémoire épisodique engendre un syndrome amnésique. Il existe des tests normés pour évaluer la mémoire épisodique dans un contexte clinique. CM03 NEUROPSYCHOLOGIE Atteintes des autres systèmes de mémoire I/ Rappels IV/ La mémoire de travail et ses troubles II/ Les cinq systèmes de mémoire V/ La mémoire procédurale et ses troubles III/ La mémoire sémantique et ses troubles VI/ Conclusion I/ RAPPELS La mémoire épisodique est sous-tendue par l’hippocampe. C’est la mémoire des souvenirs, permettant la conscience autonoétique. Elle a été découverte par Endel Tulving, qui a observé une dissociation avec la mémoire sémantique. Il existe plusieurs troubles de la mémoire épisodique : le syndrome bi-hippocampique, le syndrome de Korsakoff, l’ictus amnésique idiopathique, l’amnésie psychogène et l’amnésie développementale. II/ LES CINQ SYSTEMES DE MEMOIRE Modèle d’organisation des systèmes mnésiques (Tulving, 1995) : En haut de ce modèle, on retrouve les systèmes les plus évolués, c’est-à-dire que l’état de conscience associé à la récupération de l’information dans ce système est de plus en plus élaboré. En effet, lorsqu’on récupère un souvenir de la mémoire épisodique, cela implique une conscience autonoétique, tandis que lorsqu’on récupère un souvenir de la mémoire sémantique, cela implique une conscience noétique. Dans le cas de la mémoire procédurale et des systèmes de représentations perceptives, on parle de conscience anoétique. Les informations en mémoire épisodique et en mémoire sémantique transitent vers la mémoire de travail. Ce qui n’est pas le cas pour les autres types de mémoire. III/ LA MEMOIRE SEMANTIQUE ET SES TROUBLES La mémoire sémantique constitue la mémoire des connaissances et des concepts, stockés en dehors de tout contexte d’acquisition (conscience noétique). On parle de thésaurus mental, c’est-à-dire de savoirs organisés qu’un individu a sur le monde. On peut modéliser la mémoire sémantique par des étiquettes verbales des concepts. Caractéristiques de la mémoire sémantique (Collins & Quillian, 1969) : Les concepts sont organisés par classes hiérarchiques : il y a d’abord la classe suprahiérarchique qui comprend des sous-catégories. Dans chacune des sous-catégories, on retrouve des exemplaires qui appartiennent à cette catégorie. Chaque concept comprend des propriétés et peut être associé à d’autres concepts en raison de caractéristiques communes : par exemple, le concept « oiseau » une fois récupéré en mémoire sémantique, peut, par association, aller (pré)activé le concept « avion » car ils ont une caractéristique commune « peut voler ». A chaque nœud sémantique, il y a des propriétés qui peuvent être partagées avec d’autres. Tout en bas, on retrouve les propriétés distinctives, qui permettent de distinguer des concepts à priori très similaires. Les concepts sont organisés entre eux en fonction des propriétés qu’ils partagent. SUBSTRATS NEURONAUX (lobe temporal anterieur gauche ; Bonner & Price, 2013): Plus un concept est facilement visible, plus il se situera dans la partie inférieure du lobe temporal. A l’inverse, plus un concept est abstrait, plus il se situera dans la partie postérosupérieure du lobe temporal. Il a été proposé que la représentation neuronale de différents concepts suit une topographie selon le gradient antéro- postérieur et inféro-supérieur. Dans la partie postérieure du lobe temporal externe, on retrouve les concepts qui sont plutôt basiques, et plus on va dans la partie antérieure plus on trouve des concepts complexes. Dans la partie inférieure, on trouve des concepts qui sont très visuels alors que dans la partie supérieure, ce sont des concepts difficiles à visualiser. Par exemple, le concept de « chat » est plutôt basique et très visuel, on peut facilement s’évoquer une image visuelle d’un chat, ce concept serait situé dans la partie inféro-postérieure du lobe temporal externe. Tandis que, pour un concept plus abstrait, moins visuel comme « embarras » qui est une émotion sociale, ce concept serait plutôt situé dans la partie antéro-supérieure. On observe des dissociations inter-catégories des troubles de la mémoire sémantique, c’est-à-dire que certains concepts d’une catégorie vont rester tandis que d’autres vont disparaître. La démence sémantique est une maladie neurodégénérative qui entraine une disparition des connaissances et des concepts (perte de sens, de caractéristiques et de spécificité), une perte des souvenirs autobiographiques anciens (gradient de Ribot inversé) mais avec la préservation des autres systèmes de mémoire. L’EVALUATION CLINIQUE DE LA MEMOIRE SEMANTIQUE : − Subtests vocabulaire et information de la WAIS o Vocabulaire : définition des concepts « instruire », « conjecture » o Information : répondre à des questions « où se trouve le Brésil ? », « quelle invention a permis le développement des ordinateurs personnels ? ». → Pour comparer les performances du patient à son groupe de référence, il faut tenir de son niveau socio-culturel. − Tâches de dénomination (« Qu’est-ce que c’est que ça ? » *montre un objet*) − Tâches de désignation (« Montrez-moi la montre ») IV/ LA MEMOIRE DE TRAVAIL ET SES TROUBLES La mémoire de travail permet de stocker et de manipuler des informations pendant de courtes périodes et lors de la réalisation d’une activité. (ex : se rappeler d’un numéro le temps de trouver où le noter) Modèle de Baddeley et Hitch (1974) : Double tâche, manipulation/mise à jour, résistance à l’interférence Le stock phonologique est responsable du stockage des informations auditives de manière passagère. Il a une capacité de stock de 7 plus ou moins deux items et d’une durée de 20 secondes, à moins qu’il y ait un rafraichissement de l’information, aussi appelé récapitulation articulatoire, pour éviter que l’information ne disparaisse. Le calepin visuo-spatial a une capacité de stockage de 5 plus ou moins deux items. Il a également une capacité de stockage d’une durée de 20 secondes. Le scribe interne sert de rafraichissement de l’information. Après 20s, à moins d’être rafraichie par l’administrateur central, l’information est oubliée ou bien elle passe dans les systèmes de mémoire à long-terme. SUBSTRAT NEURONAUX : La mémoire de travail serait sous-tendue par un réseau fronto-pariétal qui servirait de gestion des ressources attentionnelles. Elle va activer les aires du langage, par la boucle phonologique, et les aires visuelles, qui vont activer le calepin visuospatial. La mémoire de travail est fréquemment perturbée lors d’AVC ou de traumatismes crâniens. Elle est très impliquée dans les apprentissages et les activités de la vie quotidienne. Elle est très impliquée dans la rééducation cognitive. Elle est très importante à évaluer dans un contexte clinique. ÉVALUATION CLINIQUE DE LA MEMOIRE DE TRAVAIL : − Empan verbal endroit − Empan verbal envers − Empan visuo-spatial endroit − Empan visuo-spatial envers. Exemple : les blocs de Corsi (1972) Des cubes sont disposés sur une planche sur lesquels des chiffres sont indiqués. Le patient ne voit pas les chiffres, il ne voit que des cubes de couleur uniforme, Le neuropsychologue touche différents chiffres, avec un nombre de cubes de plus en plus grand, et le patient doit toucher les mêmes cubes dans le sens inverse ou bien dans le même sens, selon la consigne. On regarde jusqu’à combien de chiffres le patient est capable de se souvenir, c’est-à- dire s’il est capable de se souvenir d’une information à court-terme. V/ LA MEMOIRE PROCEDURALE ET SES TROUBLES La mémoire procédurale « permet l’encodage, le stockage et la récupération des procédures sous-tendant les habiletés motrices, verbales et cognitives » (Cohen & Squire, 1980). La mémoire procédurale permet l’automatisation d’habiletés. Elle est implicite et peu verbalisable (conscience anoétique) : elle s’exprime dans le comportement du sujet par l’amélioration progressive des performances. La mémoire procédurale peut être perturbée dans la maladie de Parkinson et la maladie de Huntington. La mémoire procédurale est très impliquée dans la rééducation cognitive. L’apprentissage procédural cognitive (Adaptative Control of Thoughts, Anderson, 2001) : Dans un apprentissage procédural, il y a une première phase, appelée la phase cognitive, où la mémoire de travail est impliquée. Puis, petit à petit, au fur et à mesure des entraînements, il y a un apprentissage cognitif qui s’effectue et on rentre dans une phase autonome où la mémoire procédurale est impliquée. Un patient qui a un trouble de la mémoire procédurale ne pourra pas passer de la phase cognitive à la phase autonome, il va effectuer certaines tâches de manière contrôlée tout le temps. ÉVALUATION CLINIQUE DE LA MEMOIRE PROCEDURALE : − Tâche de poursuite de cible (mémoire procédurale motrice) : le patient doit maintenir le plus longtemps possible le stylet sur la pastille blanche sur le cercle qui est en mouvement, on mesure l’amélioration progressive des performances au fur et à mesure des essais − Tour de Hanoï (mémoire procédurale cognitive): le patient doit déplacer la pyramide de cercles de la tige à gauche vers la tige opposée en essayant de faire le moins de mouvements possibles et en ne devant pas mettre un grand cercle sur un petit. − Tâche de lecture en miroir (mémoire procédure verbale) : le patient doit lire les mots écrits à l’envers et on mesure le temps qu’il met à les lire. VI/ CONCLUSION Modèle d’organisation des systèmes mnésiques de Tulving (1995) CM04 NEUROPSYCHOLOGIE Syndrome frontal, fonctions exécutives et comportement I/ GENERALITES SUR LE LOBE FRONTAL A. …Anatomiques et fonctionnelles Il existe deux lobes frontaux : un à gauche et un à droite. Le lobe frontal est situé à l’avant du cerveau. Il est limité, à l’arrière, par la scissure de Rolando, qui distingue le lobe frontal du lobe pariétal, où l’on y trouve les aires motrices et prémotrices. Le lobe frontal est limité, en bas, par la scissure de Sylvius, qui sépare le lobe temporal du lobe frontal. Le lobe frontal représente une superficie assez importante : cette masse frontale représente environ 1/3 de la superficie totale du cerveau. Le lobe frontal est très développé chez l’Homme. Mais, ce n’est pas le cas pour toutes les espèces. L’approche phylogénétique nous permet de faire des inférences sur l’importance de certaines régions cérébrales dans certaines fonctions. Cette anatomie comparée a permis à la phrénologie d’affirmer que, si cette zone du cerveau occupe autant de places chez l’Homme, c’est probablement car elle sous-tend des fonctions spécifiques à l’Homme, sous- entendue les compétences les plus développées. Le lobe frontal était considéré, par la phrénologie, comme l’« organe des fonctions supérieures spécifiques à l’Homme ». L’imagerie par tenseur de diffusion permet d’observer des trajets de fibres. C’est une imagerie dite structurale, car elle nous permet d’observer les connexions de fibres du cerveau. On observe la diffusion de molécules d’eau, grâce à une technique d’imagerie spécifique. On fait l’hypothèse que ces molécules d’eau se déplacent selon des trajets de fibres de substance blanche. Ainsi, on observe énormément de connexions entre le lobe frontal et différentes zones du cerveau. Le lobe frontal est largement connecté aux autres structures. Ces connexions peuvent être proches, et d’autres beaucoup plus à distance. Par exemple, il y a différentes connexions proches entre les aires du lobe frontal et les aires temporales antérieures. Il y a également des connexions très étendues qui relient des aires frontales à des aires occipitales, à l’arrière du cerveau. Il y a donc beaucoup plus de raisons d’observer les signes cliniques faisant penser à une lésion frontale, même si les lésions cérébrales se situent ailleurs : une lésion, à l’arrière du cerveau, peut provoquer une perturbation des faisceaux de fibres, ce qui peut nous faire penser à une lésion frontale alors que la lésion se situe dans une région antérieure. Le cortex sensori-moteur est le premier à se développer : la motricité globale, puis la motricité fine, sont les premières fonctions que l’on observe chez le bébé. Vers 8-10 mois, le cortex pariétal et temporal se développent, notamment pour les compétences visuo-spatiales. Puis, plus tardivement, entre 4 et 8 ans, le cortex dit pré-frontal se développe. Les fonctions sous-tendues par ce cortex préfrontal font parties de celles qui se développent le plus tard, chez l’enfant. On peut donc supposer à nouveau que le lobe frontal sous-tend les fonctions du plus haut niveau. Le lobe frontal a une maturation lente. Le cortex pré-frontal termine son développement assez tard, vers la fin de l’adolescence. Les compétences qui se développent le plus tard sont aussi celles qui sont particulièrement sensibles aux effets du vieillissement. En effet, les premières fonctions qui vont décliner avec l’âge sont les fonctions exécutives. Le cortex préfrontal se trouve à l’avant du cortex moteur. Au sein de ce cortex préfrontal, on peut faire des subdivisions anatomiques, mais aussi fonctionnelles. On distingue principalement deux régions : 1. Le cortex pré-frontal dorso-latéral : cette région sous-tend essentiellement le fonctionnement exécutif. 2. Le cortex préfrontal ventro-médian: cette région sous-tend, plus largement, la cognition sociale et le comportement. B. Quelques considérations historiques Après la phrénologie… Les études de cas clinique : Cas de Phineas Gage (Harlow, 1868) : − chef de chantier, travaillait construction voie ferrée, accident à 25 ans − suite explosion, barre métal, 3cm sur 1m10 de long, traversé boîte crânienne, passant l’orbite de l’œil − pas séquelles cognitives, ni exécutives, mais, « Gage n’était plus Gage » concerne sa personnalité − modifications comportementales : avant accident : équilibré et persévérant après accident : humeur changeante, grossier, intolérant contraintes capricieux. ➔ première preuve anatomique du rôle direct d’une région cérébrale dans le comportement de l’individu : c’est le début de la neurologie comportementale. Le siège cérébral du comportement serait plutôt frontal. C’est un chercheur qui, bien plus tard, a montré, grâce à l’imagerie en 3D, que la région la plus impactée par la traversée de la barre est la région orbitofrontale. Bien plus tard, des études de cas cliniques ont été développées, notamment grâce aux cérébro-lésés de guerre qui ont permis de faire des corrélations anatomocliniques entre des lésions cérébrales et des troubles présentés après la lésion. Ces études ont permis la description de certains aspects comportementaux, notamment la « double polarité », avec, d’une part, des troubles affectifs/comportementaux et, d’autres part, des troubles cognitifs, en fonction de la pathologie frontale. Les premières études de groupes (Goldstein, 1936) : Goldstein a permis de préciser les troubles cognitifs post-lésions frontales. Il observa un point commun chez des patients frontaux-lésés : ils ne présentent pas de modifications au niveau de l’intelligence. Les échelles d’intelligence ne semblent pas sensibles aux troubles des patients ayant des lésions frontales. La plupart des patients atteints de lésions frontales sont peu sensibles aux tests classiques d’intelligence. En revanche, il décrit une modification de l’attitude abstraite. Ces patients présentaient une altération de l’attitude abstraite. → Altération de l’attitude abstraite : « La mise à distance par rapport au réel, le passage volontaire d’un aspect d’une situation à une autre, la réalisation d’un choix, la possibilité de garder présent à l’esprit différents aspects de la situation, la capacité à saisir l’essentiel dans un ensemble donné, de scinder un tout en ses parties et de les isoler volontairement, de penser de tête ou d’agir symboliquement, etc. » (= flexibilité mentale, prise de décision, division des capacités attentionnelles, capacités de synthèses, de déductions et de raisonnements). Goldstein fit donc la description de troubles exécutifs. L’approche cognitive (Luria, 1966) : Luria fit la première proposition théorique sur le rôle des lobes frontaux, selon une approche anatomo-clinique. Selon Luria, les lobes frontaux seraient responsables de : − L’intégration de l’information : permet d’intégrer les informations qui proviennent de plusieurs sources, Le lobe frontal recevrait des informations (input visuel, spatial, temporel, de mémoire…) et son rôle serait de faire la somme de toutes ces informations et de les intégrer et leur donner du sens. − La régulation de l’activité de l’organisme : permet à l’individu de réguler son fonctionnement cognitif et comportemental − L’élaboration et la programmation des actions les plus complexes et du contrôle de leur réalisation (et réajustements) − La résolution de problèmes (raisonnement au sens large) − La planification (organiser, anticiper…). Les lésions frontales s’expriment à tous les niveaux d’activité de l’organisme (= désordres non limités à une catégorie de comportement), dès que l’action n’est pas automatisée. Différents syndromes ont été décrits selon la localisation des lésions. Il distingue les désordres cognitifs des désordres affectifs/motivationnels. Il raccroche la polarité cognitive et comportementale du patient à la localisation de la lésion, au sein du lobe frontal. II/ SYNDROME FRONTAL Les lobes frontaux peuvent être touchés par de nombreuses pathologies : Traumatismes crâniens (très fréquent après traumatisme crânien observer lésion frontale) Vasculaires (altère cérébrale moyenne irrigue toute face inférieure lobe frontal, altère cérébrale antérieure irrigue toute face médiane lobe frontal, ainsi, lésions altères provoquent troubles frontaux) Épilepsies (si foyer épileptique frontal, obtient troubles potentiels, si épilepsie trouve autre endroit dans cerveau, observer troubles exécutifs et/ou comportement du fait connexions différentes zones cérébrales). Tumeurs cérébrales (si tumeur cérébrale frontale, obtient troubles potentiels, si tumeur endroit cerveau, observer troubles exécutifs et/ou comportementaux du fait connexions différentes zones cérébrales) Pathologies neurodégénératives (notamment dans le cas de la démence fronto-temporale) Alcoolisme chronique Pathologies psychiatriques (disfonctionnements exécutifs + ou - massifs, alors n’existe pas lésions cérébrales, cas schizophrénie) Le syndrome frontal est un syndrome (association de symptômes) consécutifs à des lésions du lobe frontal, ou des lobes frontaux. On peut retrouver : − des troubles des fonctions exécutives − des troubles comportementaux − d’autres troubles pouvant être associés : troubles moteurs ou les troubles du langage Ces différents troubles ne sont pas forcément tous présents : on peut avoir uniquement des troubles exécutifs, ou uniquement des troubles du comportementaux, ou bien uniquement d’autres troubles A. Les troubles exécutifs Les fonctions exécutives représentent un ensemble de fonctions de haut niveau nécessaires à la réalisation d’un comportement dirigé vers un but. Elles sont mises en jeu lors de tâches complexes qui nécessitent la collaboration et la coordination de plusieurs fonctions cognitives (ex : écouter le cours et le noter en même temps). Elles facilitent l’adaptation aux situations nouvelles (tout ce qui n’est pas automatisé) et interviennent dans le contrôle cognitif et comportemental Selon les différents modèles cognitifs, le nombre de composantes exécutives retenues diffère : − Initiation : capacité du sujet à se mettre en route, à commencer une tâche, et à la poursuivre (évaluation de l’initiation : test de fluence verbale) − Inhibition (ou résolution de conflits) : capacité du sujet à ne pas engager son attention, ou à la désengager, d’une information qu’il sait non pertinente pour la tâche en cours − Flexibilité : capacité du sujet à switcher son focus attentionnel, nécessaire pour adapter un plan en cours, face à de nouvelles consignes ou face à des erreurs − Stratégies (planification, anticipation) : capacité à élaborer un plan − Déduction de règles : capacité d’abstraction à élaborer des règles − Maintien attentionnel : capacité à rassembler ses ressources attentionnelles et les maintenir dans le temps On peut utiliser le terme de « syndrome dysexécutif », mais ce n’est pas un trouble développemental. De plus, le syndrome dysexécutif n’est pas synonyme de syndrome frontal. Plusieurs raisons à cela : 1. Le syndrome frontal peut inclure un syndrome dysexécutif, mais pas uniquement. 2. Le syndrome frontal n’est pas nécessairement associé à un syndrome dysexécutif : on peut avoir uniquement des troubles du comportement, par exemple. 3. Le syndrome dysexécutif peut être observer chez un patient qui n’a pas de lésions frontales, à cause des connexions avec les autres aires cérébrales Exemples de plaintes faisant évoquer des troubles exécutifs : « j’ai du mal à suivre plusieurs conversations » « je n’arrive plus à organiser mes différentes activités professionnelles » « je ne peux plus faire plusieurs choses en parallèle comme avant » « avant, c’est moi qui planifiait tout pour les vacances en famille, et, maintenant, j’en suis incapable ». ÉPREUVES NEUROPSYCHOLOGIQUES « SPECIFIQUES » : ❖ STROOP : ce test est constitué de 3 étapes 1) le patient doit dénommer les couleurs de gauche à droite le plus vite possible (mesure de la vitesse du traitement de l’information : initiation) 2) le patient doit lire les mots le plus vite possible de gauche à droite, lignes après lignes (capacités de lecture) 3) si les deux premières étapes sont normales, alors on lui propose de dénommer la couleur de l’encre des mots, et donc de ne pas lire les mots (résolution de conflits, inhibition). ❖ TRAIL MAKING TEST : Partie A (initiation) : le patient relie les chiffres entre eux dans l’ordre croissant Partie B (flexibilité) : le patient doit relier les chiffres dans l’ordre croissant et les lettres dans l’ordre de l’alphabet, à condition d’alterner un chiffre avec une lettre (A-1, B-2…) ❖ WISCONSIN CARD SORTING TEST : Il teste la déduction de règles, c’est-à-dire la capacité du sujet à élaborer des règles abstraites. Le patient a 4 cartes devant lui. Puis, un tas de cartes lui est présenté. Pour chacune des cartes présentées, le patient doit dire avec laquelle des 4 cartes cette carte devrait bien aller : couleur, forme et nombre. Il y a plusieurs versions de ce test. Un trouble exécutif peut avoir des répercussions sur d’autres fonctions cognitives. Exemples d’évaluation du retentissement sur d’autres fonctions cognitives La mémoire : test de mémorisation d’une liste de mots. Organisation stratégique du matériel lors de l’encodage : si le patient a des difficultés à mettre en place des stratégies, il se peut que les performances de ce patient soient perturbées, sans que ce soit à cause d’un trouble de la mémoire. Organisation stratégique lors de la récupération (comparaison en rappel libre au rappel indicé): si le patient a des troubles de mises en place de stratégies, il peut être en grande difficulté lors du rappel des mots. Certaines épreuves de mémoire peuvent être perturbées, non pas à cause de troubles de la mémoire, mais à cause de troubles dysexécutifs. Les capacités visuo-constructives : test de figure de Rey Exemple : défaut de planification dans la copie d’une figure complexe B. Les troubles du comportement On distingue classiquement deux grands profils, selon la localisation des lésions Hypoactivité globale / Apathie Hyperactivité / Euphorie → Réduction de l’activité, manque d’intérêt et de motivation pour les activités quotidiennes : trouble de → Comportement impulsif, désinhibé, inapproprié. la motivation. → Perte des conventions sociales. → Apparente indifférence affective, plus rien ne → Les lésions provoquant ce type de semble les affecter. à « pseudo-dépression » : patients profils sont des lésions du cortex qui peuvent être interprétés comme dépressifs, mais ils préfrontal ventro-médian/orbito- ne sont pas tristes, ils sont seulement apathiques. frontal (en rose/bleu ciel). → Les lésions provoquant ce type de profils sont des lésions du cortex préfrontal dorso-latéral (en bleu/violet). Il existe d’autres troubles du comportement fréquents : Les comportements stéréotypés (gestes sans buts) L’indifférence affective (perte d’empathie) L’anosognosie (non-conscience des troubles) Les troubles du comportement alimentaire, sexuels, sphinctériens et du sommeil. Lhermitte a décrit des comportements spécifiques aux lésions frontales : → La dépendance environnementale (Lhermitte, 1983) : − Comportements d’imitation (le patient ne peut s’empêcher d’imiter son interlocuteur, même si on lui dit de ne pas le faire ) − Comportements d’utilisation (le patient ne peut s’empêcher d’utiliser un objet dans son environnement direct, même qd on lui dit de ne pas le faire) Comportements qui reflètent une adhérence à l’environnement : le patient ne peut pas s’empêcher d’imiter la personne en face de lui, ou d’utiliser les objets devant lui Evaluation ? − Entourage (questionnaires) − Observation clinique du psychologue − Tests de cognition sociale ? C. Les autres troubles Troubles moteurs Troubles « réflexes » Troubles du langage Troubles praxiques Hémiplégie Aphasie de Broca (lésion frontale de Certaines apraxies sont Troubles de la marche Grasping (préhension) l’hémisphère gauche) consécutives à une lésion frontale Négligence motrice Aphasie transcorticale mixte CM05 NEUROPSYCHOLOGIE Métacognition I. DEFINITIONS ET CONCEPTS A. Utilisation de la métacognition dans la vie quotidienne La métacognition est utilisée dans différents moments de la vie quotidienne. C’est un processus cognitif d’ordre supérieur. Exemples : − On l’utilise pour réviser nos examens, de manière consciente, en essayant d’évaluer ce que nous savons. Ainsi, nous pouvons décider d’un éventuel plan de révisions. → auto-évaluation − Après une compétition, un sportif, qui n’a pas atteint les performances qu’il espérait, va ajuster ses entraînements pour améliorer ses performances en vue d’une prochaine compétition. − Lorsqu’on lit un livre, on se rend compte qu’on n’a pas compris ce qu’on est en train de lire, car on pensait à autre chose, alors on revient en arrière pour relire la phrase. − Une personne, atteinte d’une pathologie neurodégénérative, va évaluer ce qu’elle est encore capable de faire de manière autonome. B. Étymologie Le préfixe « méta » est tiré du grec « meta », qui se traduit par « au-dessus (de), avec, après » et qui induit l’idée de transcendance, de niveau supérieur. « Cognition » est tiré du latin « cognitio », qui signifie « le processus d’acquisition de la connaissance », ou plus largement le fait de connaître. La métacognition est donc la cognition de la cognition. On pourrait définir la cognition comme un niveau supérieur d’acquisition de la connaissance. Il existe autant de domaines de la métacognition qu’il existe de processus cognitifs. C. Première définition de la métacognition (Flavell, 1970) Pour comprendre le fonctionnement de la métacognition, il est important de comprendre le fonctionnement des différents processus cognitifs. De plus, la métacognition est un phénomène multidimensionnel. Il y a autant de sous-domaine de la métacognition qu’il y a de fonction cognitives (métamémoire, métalangage, métapraxies etc.). Dans la littérature scientifique, il existe un grand débat autour de ce qu’est la métacognition. Ainsi, ceci explique le fait que la toute première définition de la métacognition est assez récente. Dans les années 1970, le psychologue Flavell donne une première définition claire de la métacognition : « la métacognition se réfère aux connaissances du sujet sur ses propres processus et produits cognitifs (…). Elle renvoie aussi au contrôle actif, à la régulation et à l’orchestration de ces processus ». Dans cette définition, on retrouve déjà deux des composants de la métacognition : les connaissances métacognitives et les régulations métacognitives. La métacognition fait le lien entre nos connaissances et la façon dont on orchestre nos fonctions cognitives, par rapport à la tâche en cours. La métacognition renvoie à ce que l’on sait de nos processus cognitifs et comment on va pouvoir les contrôler par rapport à la tâche à réaliser. ➔ Selon les deux aspects, la cognition est multidimensionnelle car elle est composée de différents aspects (connaissance et régulation) mais aussi de différent domaine (autant de processus métacognitif que de fonction cognitive). Il a un rôle déterminant dans des tâches cognitives complexes car il est responsable de la sélection et de la mise en œuvre des stratégies, du monitoring de leur efficacité et de leur ajustement (si nécessaire). La métacognition a un grand impact direct sur l’utilisation de nos ressources cognitives. II. LES COMPOSANTS METACOGNITIFS Quels sont les composants métacognitifs ? Les connaissances métacognitives (définition de Flavell) Les expériences métacognitives (définition de Flavell) Les régulations métacognitives (n’apparait pas dans définition Flavell mais plus tard, lors apparition nouveaux modèles). A. Les connaissances métacognitives Les connaissances métacognitives ont été décrites par Flavell, en 1979. Elles représentent l’ensemble des connaissances et des croyances dont l’individu est porteur au sujet des facteurs et des variables qui influencent les activités cognitives. Les connaissances métacognitives représentent les connaissances que l’on a sur nos fonctions cognitives, nos propres connaissances individuelles… Elles nous permettent de réguler nos activités cognitives. Aujourd’hui, on considère que les connaissances que l’on a sur le fonctionnement cognitif des personnes qui nous entourent font parties des connaissances métacognitives (métacognition sociale = capacité de réfléchir et de réguler notre fonctionnement en termes de cognition sociale). Exemple : dire « je suis bon en français mais pas en math » relève des connaissances métacognitives. On peut diviser ces connaissances métacognitives en différents types, de manière détaillée. B. Les expériences métacognitives Les expériences métacognitives ont également été décrites par Flavell, en 1979, comme étant « toute expérience consciente cognitive ou affective accompagnant toute activité cognitive ». Ce sont tous les sentiments, les ressentis que l’on a au moment de la réalisation d’une tâche spécifique. Les expériences métacognitives sont des expériences conscientes qui se produisent en même temps qu’une activité cognitive en cours. Lorsque nous sommes en train de faire une tâche, nous prenons conscience de la tâche cognitive en cours, ce qui nous permet d’évaluer l’activité cognitive que nous sommes en train de réaliser. Cela peut simplement être un sentiment par rapport à ce que l’on est en train de faire. Les expériences métacognitives ont un impact direct sur la tâche en cours et sur nos connaissances métacognitives : elles peuvent conduire à l’abandon de la tâche ou revoir le but de ce que l’on est en train de faire. Les expériences métacognitives nous permettent de nous évaluer. Exemple : si je révise dans un endroit bruyant, que je me rends compte que je suis distraite et que je n’arrive pas à me concentrer (expérience métacognitive), je vais alimenter mes connaissances métacognitives de la constatation « je ne peux pas réviser dans un environnement bruyant ». ➔ Les expériences métacognitives et les connaissances métacognitives sont dépendantes. C. Les régulations cognitives Les régulations cognitives représentent une composante qui a été ajoutée par Efklides, en 2002. Elle se réfère à l’utilisation délibérée de stratégies dans la visée de contrôler sa cognition. Les régulations cognitives représentent les stratégies que l’on peut mettre en place pour éventuellement ajuster notre fonctionnement cognitif, afin d’atteindre le but que l’on s’est fixé. Exemple : quand je programme des révisions, je vais allouer plus ou moins de temps en fonction de mes expériences et de mes connaissances métacognitives. L’attribution du temps est la régulation métacognitive. La régulation métacognitive est la capacité d’utiliser un stock de stratégies pour adapter notre fonctionnement cognitive pour réaliser un but précis. Au début, la régulation métacognitive n’était pas distinguée des 2 autres. Elle doit sa considération comme une composante à part entière aux études cliniques ayant permis de se rendre compte que les 3 composantes pouvaient être impactées par des pathologies de manière relativement séparée.  Ces trois éléments (connaissances métacognitives, expériences métacognitives et régulations cognitives) sont reliés les unes aux autres et s’alimentent par différents processus ascendants et descendants. III. LES PRINCIPAUX MODELES DE LA METACOGNITION On abordera ici les 3 modèles principaux, ceux qui font consensus dans la littérature scientifique. Ces différent modèles se sont attachés à des aspects différents dans la métacognition. Il existe trois principaux modèles de la métacognition : 1. Le modèle de Flavell (1979) Flavell a commencé ses travaux sur la métacognition chez les enfants, car il s’est rendu compte que l’enfant n’avait pas les mêmes capacités d’apprentissage que les adultes. Le modèle de Flavell est un modèle du contrôle cognitif. Il est composé de quatre phénomènes, dont deux constituent la métacognition (expériences + connaissances métacognitives) : Les buts cognitifs (= les objectifs que l’on se pose et qui nous permettent d’enclencher une activité) Les stratégies cognitives (= les stratégies que l’on met en place pour atteindre un but spécifique) Les expériences métacognitives (= les expériences qui nous permet de nous évaluer au cours d’une tâche) Les connaissances métacognitives (= l’influence des connaissances globales que l’on a sur notre fonctionnement cognitif). L’idée du modèle est que tous les composants sont liés, vont s’influencer les uns les autres. Flavell a distingué trois types de connaissances métacognitives : Les connaissances métacognitives relatives aux personnes : ce sont les capacités du sujet et d’autrui, et les connaissances générales sur le fonctionnement cognitif humain. En résumé, ce sont les connaissances sur les capacités cognitives de l’individu, d’autrui et générales sur l’humain. Les connaissances métacognitives relatives aux tâches : ce sont les particularités de la tâche à réaliser, permettant aux individus d’évaluer le degré de difficulté de réalisation d’une activité donnée, Les connaissances métacognitives relatives aux stratégies : ce sont les processus de contrôle et d’autorégulation qui permettent au sujet de piloter et réguler les stratégies cognitives. On acquiert des connaissances générales grâce à la mémoire sémantique, donc une personne présentant des troubles de la mémoire sémantique aura des difficultés avec les connaissances métacognitives. Selon le modèle de Flavell, les expériences métacognitives représentent toute prise de conscience lors de la réalisation d’une tâche, d’une expérience cognitive particulière. Elles permettent au sujet d’évaluer son niveau de maîtrise de la tâche et de juger des progrès nécessaires à la réalisation de la tâche. Les expériences métacognitives vont se bénéficier des connaissances métacognitives, et les connaissances métacognitives alimentent les expériences métacognitives : il y a un échange entre ces deux composants. En revanche, Flavell n’a pas expliqué le fonctionnement des liens entre ces différentes composantes. 2. Le modèle de Brown (1978, 1980) Le modèle de Brown représente la métacognition et deux de ses composantes : les connaissances de la cognition et la régulation de la cognition. Brown a essayé de distinguer les différences entre ses deux composantes : ➔ Les connaissances métacognitives sont des connaissances stables, qui se développent au fur et à mesure du développement, avec l’âge. De plus, elles sont verbalisables et déclaratives. ➔ Les régulations métacognitives sont instables, dans le sens où elles changent à chaque tâche cognitive engagée, et sont relativement indépendantes de l’âge. Elles ne sont pas déclaratives. Elles feraient parties de notre mémoire procédurale. À partir de différentes caractéristiques : déclarativité (les connaissances sont verbalisables/déclaratives alors que la régulation métacognitive ne l’est pas), stabilité (les connaissances métacognitives sont stables même si elles sont sous l’influence de l’âge, alors que la régulation métacognitive varie à chaque nouvelle tâche) et développer. Brown distingue différentes activités, impliquées dans les régulations de la cognition : - La planification, qui représente la capacité d’identifier et de sélectionner des stratégies appropriées et d’opter pour une bonne allocation des ressources. - Le monitoring/la surveillance, qui représente la capacité à contrôler sa propre activité cognitive et à intégrer les informations pertinentes, - L’évaluation, qui représente la capacité à apprécier le bon déroulement de son propre fonctionnement et les manières pour y arriver. ➔ Ces activités sont dépendantes les unes des autres. 3. Le modèle de Nelson et Narens (1990, 1994) Le modèle de Nelson et Narens est un modèle qui a comme focus la relation entre les différents aspects de la métacognition et de la cognition. Ils étudient comme ces différents composants se lient les uns aux autres et s’influencent. Ce modèle a initialement été développer lors de l’étude de la méta mémoire, puis il a été étendu à la métacognition. C’est un système métacognitif à 2 niveaux : - Le niveau méta (celui de la métacognition). Le niveau méta est le niveau supérieur de la métacognition - Le niveau objet (le niveau des fonctions cognitives). Le niveau de l’objet est le niveau cognitif Le niveau méta et objet sont inter-reliés par les processus de régulation et de surveillance. Il y a un échange d’informations entre ces deux niveaux, ce qui nous permet de distinguer les mécanismes ascendants et descendants de régulation. Il y a une liaison entre la cognition et la métacognition, qui s’alimentent à partir de processus de contrôle et de régulation. Exemple : On voit la tâche à réaliser (le problème mathématique). On a d’un côté la réalisation de ce problème et de l’autre l’aspect métacognitif. Dans l’aspect métacognitif, on a les 3 types de connaissances métacognitives citées par Flavell (tâche, stratégie, personne). A partir de ça, je vais employer un processus descendant (du niveau méta au niveau objet) de contrôle, de planification. Ensuite, à partir du moment où je commence à exécuter la tâche, je vais surveiller et évaluer si à partir de cette planification, je peux résoudre le problème. Si j’y arrive, rien ne se passe. Si je n’y arrive pas, je vais utiliser mes connaissances métacognitives pour réajuster la planification. IV. ÉVALUATION DE LA METACOGNITION On distingue l’évaluation des connaissances métacognitives de l’évaluation des expériences métacognitives. Évaluation des connaissances métacognitives : Évaluation « off-line », indépendante de la tâche cognitive Évaluation des expériences métacognitives : Évaluation « on-line », au cours de la tâche cognitive. Exemple de l’évaluation de la méta mémoire : ➔ Une évaluation indépendante de la tâche (mesure off- line) serait le recueil sans réalisation simultanée d’une tâche mnésique. On demande au sujet ➔ Une évaluation dépendante de la tâche (mesure on- line) serait effectuée au cours de la réalisation effective et simultanée de tâches mnésiques. A. Mesures indépendantes Questionnaire Metamemory Questionnaire Multifactorial Memory In Adulthood (MIA) Questionnaire (MMQ) Il permet d’étudier les connaissances des sujets par rapport à ses capacités mnésiques dans la vie de tous Il se de compose de 57 items, visant à mesurer trois les jours. Il est composé de 108 questions, basées sur dimensions de la méta mémoire : le contentement de sept dimensions : l’utilisation de stratégies, la la mémoire, l’auto-évaluation de la capacité de la connaissance des tâches, la connaissance de ses mémoire et l’utilisation de la stratégie dans la vie propres capacités, la perception des changements, la quotidienne. mémoire et l’anxiété, la motivation d’accomplissement et la capacité de contrôle. ➔ 7 dimensions à 3 dimensions => problème de consensus afin de diviser la mémoire. B. Mesures dépendantes Monitoring (surveillance de la tâche) ou la métamémoire à différents moments du processus mnésiques (encodage, stockage et récupération) : Jugement global des performances Jugement d’apprentissage Jugement de sentiment de savoir (juger son sentiment de connaitre l’information, de savoir la récupérer) Jugement de confiance (pendant la récupération, on lui demande à quel points il est sûr de sa réponse) Exemple :. On va demander au sujet d’évaluer ses capacités à différent moments de la tâche mnésique : jugement d’apprentissage (suite à l’encodage, on peut lui demander combien il pense avoir mémoriser de mots). Le sujet donne une réponse et on évalue son jugement de confiance dans la réponse. En revanche, si le sujet ne donne pas de réponse on lui demande son jugement de sentiment de savoir la bonne réponse, et on peut ensuite lui donner une tâche de reconnaissance. Concrètement, avec une tâche de mémoire sémantique (ex : quelle est la couleur de l’émeraude ?), s’offre à nous 2 possibilités : soit le patient donne la réponse, et on lui demande dans ce cas sa confiance dans la réponse (on compare la confiance avec l’exactitude de la réponse donnée), soit le patient ne donne pas de réponse, et dans ce cas on peut juger le sentiment de savoir (à quel points il a l’impression de savoir la réponse). Dans le deuxième cas, on fait un test de reconnaissance et on demande à la personne de choisir, parmi une possibilité de réponse, celle qui est exacte. Régulation (contrôle de la tâche) : Cela permet d’évaluer à différents moments de l’apprentissage les processus de contrôle métacognitifs. − Allouer une durée d’apprentissage : on donne au sujet une liste de mot à apprendre mais on lui laisse choisir le tps qu’il veut passer pour l’apprendre. Cela fait appel à la régulation métacognitive. − Stopper l’apprentissage : on demande à la personne de stopper l’apprentissage toute seule. Cela permet d’évaluer les capacités de régulation de métamémoire en demandant à la personne de stopper Il est nécessaire d’évaluer la métacognition, car elle peut être impactée dans un très grand nombre de pathologie. La métamémoire est beaucoup moins étudiée que les capacités de surveillance de la métamémoire. C. Substrats neuronaux de la métacognition Les substrats neuronaux de la métacognition sont encore débattus dans la littérature actuelle, et ceux pour 2 raisons: cela dépend du composant métacognitif que l’on va analyser et du sous domaine de la métacognition (la métamémoire ne fait pas appel aux mêmes régions que le métalangage etc.). En effet, les régions cérébrales s’activent différemment en fonction des processus métacognitifs. Il y a donc un réseau très étendu qui est impliqué au niveau neuronal de la métacognition. Elle fait notamment appel à de nombreuses régions du lobe frontal, mais aussi à différentes régions médiales, au niveau du cortex singulaire mais aussi au niveau de l’insula. Ce dernier points est important car le cortex singulaire et l’insula font partie du système limbique, lié à nos émotions, ce qui indique que la métacognition est très influencée par nos états émotionnels. D. Les troubles de la métacognition La métacognition est perturbée dans de nombreuses pathologies : la schizophrénie, la bipolarité etc. Un déficit au niveau des connaissances métacognitives entraîne un trouble de la conscience de soi, et donc une difficulté à apprécier de manière adéquate ses propres capacités. Le manque de conscience de la pathologie, ou des troubles associés, appelé anosognosie, peut ainsi être considéré comme une conséquence d’un trouble métacognitif. Par exemple, dans la maladie d’Alzheimer, 30% des patients présentent un degré d’anosognosie. Cela a un énorme impact sur le patient et son aidant. On constate des baisses des performances en méta mémoire fréquente, notamment pour le sentiment de savoir dans des tâches de mémoire épisodique, qui est corrélé avec le degré d’anosognosie CM06 NEUROPSYCHOLOGIE La cognition sociale I. INTRODUCTION HISTORIQUE ET CONCEPTUELLE D’après Wallon, les relations sociales sont essentielles à l’Homme. Cette nécessité de relations sociales serait quelque chose d’inné, comme si le bébé était précablé, d’un point de vue neuro-anatomique, pour avoir, dès la naissance, ce type de relations sociales. En effet, selon lui, « L’être humain est un être essentiellement social. Il l’est non pas suite de contingences extérieures mais par suite d’une nécessité intime. Il l’est génétiquement. » (Wallon, 1941). Dès la naissance, les relations sociales sont essentielles. ❖ Les échanges avec nos semblables jouent un rôle crucial dans le développement et la construction de l’identité (Bowlby, 1987 ; Horton-Cooley, 1926). Les échanges sociaux jouent un rôle essentiel dans le développement cognitif, émotionnel et social de l’enfant et dans la construction de l’identité. ❖ L’absence de contact social a un effet néfaste pour le développement (cf. « hospitalisme » ; Spitz, 1946). Le syndrome d’hospitalisme décrit les conséquences d’une absence de relations sociales chez les jeunes enfants en très bas âges. On y retrouve des symptômes dépressifs ou encore un retard psychomoteur, du fait de cette privation de relations sociales. C’est un constat prégnant en psychologie sociale et en psychologie du développement. Nos relations sociales sont sous-tendues par la cognition sociale, au sens large. Paradoxalement, l’étude des émotions et des interactions sociales a été négligé par les sciences cognitives jusqu’à la fin du XXème siècle. Cela peut s’expliquer, en partie, par l’héritage du dualisme cartésien (Descartes, 1649), qui sépare le corps et l’esprit. Aujourd’hui, on sait qu’il y a une interaction directe entre notre cognition et nos émotions. Quelques repères historiques : Certains auteurs ont réalisé un travail préliminaire très important sur les émotions: − En 1862, le neurologue français Duchenne de Boulogne va décrire différentes expressions émotionnelles chez l’Homme, à partir des contractions musculaires du visage, grâce à l’utilisation d’impulsions électriques minimes, en plaçant de légères impulsions électriques à différents endroits du visage. Il décrit ainsi le sourire, le dégoût, la colère, la tristesse etc. − En 1872, le naturaliste Charles Darwin s’est intéressé au rôle adaptatif des émotions. Il publie un ouvrage sur l’expression des émotions chez l’Homme et chez les animaux, dans lequel il démontre que l’espèce humaine présente six états émotionnels fondamentaux : la joie, la surprise, la peur, le dégoût, la colère et la tristesse. Toutes les autres émotions secondaires ne sont que la composition de ces différentes émotions de base. Il s’intéresse également à l’universalité des émotions. Ces émotions de base seraient universelles. Selon lui, elles existeraient et s’exprimeraient de la même manière dans toutes les cultures. − En 1868, Harlow décrit le cas de Phineas Gage. C’est le premier cas à interroger le lien entre le cerveau et le comportement social, mais il sera finalement étudié bien plus tard par Damasio, en 1995 ! − En 1939, les physiologistes Kluver et Bucy décrivent un certain nombre de modifications émotionnelles et comportement, après des lésions bilatérales de l’amygdale, provoquées chez le singe : docilité excessive, disparition de la peur, hyperoralité et hyper sexualité. L’amygdale se situe en profondeur du lobe temporal médian. Ce sont les tous premiers travaux montrant que certaines lésions spécifiques peuvent altérer le comportement socio- émotionnel. − A la fin du XXème siècle, quelques grands cas en neuropsychologie contemporaine ont permis d’étudier le comportement socio-émotionnel. En 1985, le patient EVR, décrit par Eslinger et Damasio, fut appelé : cas de sociopathie acquise. Du fait de sa lésion cérébrale, il a développé un comportement social extrêmement inapproprié. De plus, en 1994, la patiente SM, surnommée « the woman without fear », fut étudiée par Adolphs et al.. Cette patiente avait une maladie génétique, qui lui provoquait une calcification des amygdales, et qui présentait une absence de sentiments de peur. − Le développement des méthodes d’imagerie cérébrale, de 1990 jusqu’à aujourd’hui, notamment l’IRMf, a permis le développement de l’intérêt pour les circuits neuraux impliqués dans les émotions et les interactions sociales. C’est l’émergence des « neurosciences sociales » (aussi appelées neurosciences affectives). II. DEFINTIONS A. COGNITION SOCIALE La cognition sociale est un concept étudié par le prisme de nombreuses disciplines différentes : la philosophie, la psychologie du développement, la psychologie sociale, la psychanalyse… L’approche choisie en fera varier la définition. Selon le point de vue de la neuropsychologie et des neurosciences : La cognition sociale représente l’ensemble de processus grâce auxquels l’individu perçoit, traite et interprète les informations émanant d’autrui, ou portant sur autrui, lui permettant de guider et de réguler son comportement dans les interactions sociales. B. LES DIFFERENTES COMPOSANTES IMPLIQUEES DANS UN PROCESSUS NON UNITAIRE La cognition sociale est un ensemble de processus. Aujourd’hui, la cognition sociale ne dispose pas de modèles théories aboutis. Leur nombre n’est pas consensuel dans la littérature, mais les principaux processus étudiés sont : l’attention envers la perception des stimuli sociaux, l’identification des émotions, l’attribution d’états mentaux (appelée la « théorie de l’esprit »), l’empathie, la pragmatique de communication et la cognition morale. 1. L’identification des émotions L’identification des émotions représente la capacité de traitement, implicite et explicite, des informations émotionnelles véhiculées par autrui. Il existe deux niveaux de traitement : des traitements automatiques inconscients (implicites) et des traitements plus conscients (explicites). Dans certaines pathologies, il peut exister des dissociations entre ces différents niveaux de traitement. C’est la première étape qui permet ensuite d’accéder à la compréhension de l’état émotionnel d’autrui. Dans la vie quotidienne, les êtres humains peuvent s’appuyer sur différents indices : les expressions faciales, la prosodie émotionnelle, le regard, les gestes et le contexte. TEST D’EKMAN : Un certain nombre de visages sont présentés uns par uns à un sujet. Le sujet va devoir dire si la personne est neutre ou bien si elle exprime une des six émotions de base et laquelle. Ce test n’est pas écologique (ne ressemble pas à la vie réelle), car il est en noir et blanc. 2. L’attribution des états mentaux L’attribution des états mentaux (théorie de l’esprit), représente l’ensemble des connaissances conceptuelles à propos des états mentaux ainsi que les processus de prise de perspective qui permettent de raisonner explicitement à propos de nos propres états mentaux et de ceux d’autrui. Le niveau de traitement est purement explicite, ici. L’attribution des états mentaux permet de prédire les comportements. On fait une distinction, selon le type d’état mental inféré, entre les états mentaux cognitifs (intentions, croyances, connaissances) et les états mentaux affectifs (émotions). On distingue la théorie de l’esprit cognitive de la théorie de l’esprit affective. TACHES DE FAUSSES CROYANCES (Duval et al., 2011) : ToM 15 : Ce test est construit sur la base des tâches de fausses croyances chez l’enfant, permettant d’évaluer la théorie de l’esprit cognitive. Il dispose de deux niveaux de complexité : le premier ordre et le second ordre. Dans le niveau de complexité de premier ordre, on demande au sujet ce qu’il pense que Maxime pense. Dans le niveau de complexité de second ordre, on demande au sujet ce que Maxime pense que sa mère pense. ATTRIBUTION D’EMOTIONS, LES FAUX PAS SOCIAUX (Delbeuck et al., 2011) : Il n’y a pas de tâches de théorie de l’esprit affective. En revanche, il existerait des tâches qui évalueraient la théorie de l’esprit cognitive ET affective. Test des faux pas : Des petites histoires, mettant en scène des situations sociales, sont lues. On demande au sujet de faire des inférences sur les intentions et les émotions des personnages de l’histoire, sur la base du repérage et de l’identification d’une potentielle transgression sociale. L’attribution d’émotion nécessite des états mentaux cognitifs pour comprendre qu’une personne a dit quelque chose de maladroit et de manière non intentionnelle (versant cognitif). Elle nécessite également de prédire la réaction émotionnelle de l’interlocuteur (versant affectif). 3. L’empathie L’empathie représente la capacité à ressentir et à comprendre les expériences affectives d’autrui. L’empathie implique notamment des processus de théorie de l’esprit (affective), mais, elle implique également une contagion émotionnelle (résonance émotionnelle) et d’autres processus de haut niveau. Il faut que le sujet ait lui-même une réaction émotionnelle. L’empathie et la théorie de l’esprit ne sont pas synonymes Elle est difficile à évaluer de manière comportementale sans associer des mesures physiologiques ou d’imagerie cérébrale. → Questionnaires d’empathie : Le sujet évalue ses propres compétences. Si le patient est anosognosie, le questionnaire n’est pas approprié. De ce fait, l’empathie n’est pas vraiment mesurée. 4. La cognition morale La cognition morale joue un rôle fondamental dans la régulation du comportement social. Il s’agit de la connaissance du bien et du mal, mais également de tout ce qui concerne la prise de décision. Les patients développement des comportements qui ne sont plus en accord avec les normes morales et sociales. La « sociopathie acquise » désigne l’apparition de comportements antisociaux et amoraux suite à des lésions cérébrales (exemple : patient EVR). Dans la cognition morale, il y a au moins deux processus impliqués : − Les connaissances des conventions morales et sociales (« je sais que cela se fait et que cela ne se fait pas»), permettant de repérer ce qui est une transgression et ce qui n’en est pas une − Le jugement du bien et du mal, impliquée à la prise de décision (« je sais que cela est mal, mais je le fais quand même »), permettant d’agir de manière adéquate par rapport à ces normes. Il peut y avoir une dissociation entre ces deux processus. En effet, dans le processus de prise de décision, il y a une contribution à la réaction émotionnelle à l’idée de transgresser les règles. Un patient peut ne pas agir en adéquation avec ses connaissances, malgré la connaissance des normes. ÉVALUATION DE LA COGNITION MORALE : Tâche de jugements moraux et conventionnels : Cette tâche consiste à étudier si le patient peut distinguer si une action ou un comportement est moralement acceptable ou non. Elle questionne la permissibilité de l’acte, la gravité de l’acte et la théorie sur l’acte. Il peut y avoir des différences culturelles sur les conventions sociales. Dilemmes moraux : Ces paradigmes consistent à étudier si la prise de décision dans des situations où des lois morales sont en conflit l’une avec l’autre. On dit aux sujets que, si le train continue tout droit, quatre personnes vont être tués. En revanche, on lui dit qu’il a la possibilité d’actionner un levier pour faire dévier le train et qu’il ne tuera ainsi plus qu’une seule personne. Le sujet peut faire un choix émotionnel, c’est-à-dire qu’il ne fera rien, car, sinon, il deviendra responsable du fait d’avoir tué une personne. Le sujet peut faire un choix « utilitarien», c’est-à-dire qu’il décide d’actionner le levier pour sauver quatre personnes. Ces décisions ne sont pas pathologies, car il y a autant de personnes saines dans chaque type de choix. En revanche, les patients frontaux, avec déficit émotionnel, vont toujours faire le choix utilitarien. III. REPERES ANATOMIQUES ET FONCTIONELS Quelles sont les structures cérébrales impliquées dans la cognition sociale ? Un réseau largement distribué est impliqué dans la cognition sociale. Il n’existe pas une structure sous- tendant chacune de ses différentes composantes. Toutefois, on retrouve quelques grandes structures souvent impliquées dans les études en neuropsychologie clinique (lésions cérébrales) et en neuroimagerie fonctionnelle. ❖ L’amygdale La patiente SM, ayant une lésion de l’amygdale, présentait des difficultés variées, mais qui concernaient toujours le traitement émotionnel de la peur à partir de visages. En effet, elle ne reconnaît pas bien les émotions sur les visages d’autrui (Adolphs et al., 1995 ; Feinstein et al., 2011). De plus, on constate que, peu importe les situations présentées, elle ressent significativement moins la peur que les sujets sains. ❖ Le cortex préfrontal médian : La théorie de l’esprit est sous-tendue par le cortex préfrontal médian antérieur. Les losanges bleus représentent les tâches de théorie de l’esprit : ils sont tous localisés dans une zone médiane du lobe frontal. Cette section doit être impliquée dans les processus de théorie de l’esprit. ❖ Le cortex orbito-frontal : Le patient EVR avait une tumeur frontale, qui a été retirée, mais qui avait déjà causé des lésions cérébrales, en plus des séquelles liées à l’acte chirurgical. Ce patient présentait des troubles du comportement depuis une opération, notamment des troubles des conduites sociales. Il a subi plusieurs licenciements et divorces en moins de deux ans, dû faire face à une perte du capital accumulé et de l’argent emprunté à sa famille et ses amis, à cause de spéculations désastreuses (choix risqués). De plus, il est incapable de tenir compte des conséquences de ses actes pour les décisions ultérieures (troubles de la prise de décision) (Eslinger & Damasio, 1985 ; Damasio, 1994). ➔ Ainsi, le cortex orbito-frontal fait partie des zones cérébrales impliquées dans le ressenti émotionnel et de la prise de décision. ➔ Selon la t

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