Cadre institutionnel de l'Union européenne - PDF

Summary

Ce document traite du cadre institutionnel de l'Union européenne, en abordant sa nature, ses caractéristiques, ses finalités, ses orientations et les traités qui l'ont façonnée. Il détaille les traités fondamentaux, les valeurs de l'UE et les principes qui la régissent, ainsi que les compétences dévolues aux institutions européennes. Le document présente un historique de l'évolution de l'Union européenne.

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I. Le cadre institutionnel de l’Union européenne et équilibre institutionnel Chapitre préliminaire : la nature et caractères de l’Union européenne A. La nature de l’UE L’UE est le fruit d’une construction, suite d’autres organisations créées dans le passé qui ont été modifiées,...

I. Le cadre institutionnel de l’Union européenne et équilibre institutionnel Chapitre préliminaire : la nature et caractères de l’Union européenne A. La nature de l’UE L’UE est le fruit d’une construction, suite d’autres organisations créées dans le passé qui ont été modifiées, améliorées ou détériorées pour correspondre aux aspirations du plus grand nombre. a. La communauté européenne du charbon et l’acier (CECA) ð Établie en 1951 ð Signé par 6 États Membres: le Luxembourg, la Belgique, le Pays-Bas, l’Italie, la France et l’Allemagne ð Organisation sectorisée, se limitant à la mise en commun des facteurs d’industrialisation ð Le but était d’empêcher les États membres de faire la guerre entre eux ð Une haute autorité veillerait au respect des conditions ð Traité à durée déterminée, plus applicable depuis juillet 2002 ð À la suite de la CECA, les États membres ont très vite voulu créer d’autres organisations, ex. La Communauté européenne de défense, ratification devant l’Assemblée nationale en France échoué en 1954 o « l’Europe ne se fera pas d’un coup » - R. Schuman b. La communauté européenne de l’énergie atomique (CEEA) et la communauté économique européenne (CEE) ð Traité de la CEEA ð Traité de Rome 1957 o Signé le 25 mars 1957 o Structure permettant d’améliorer la circulation des personnes, matériaux, capitaux, etc. entre les États membres o Réglementation en commun les questions qui pouvaient l’être, ex. agriculture, mais pas encore en mesure d’adopter des dispositions sur les questions sociales o Évolution considérable c. Le Traité de Maastricht 1992 ð La CEE devient la CE (communauté européenne) o Caractère économique dépassé ð Nouvelles mesures attachées à des nouveaux secteurs ð Citoyenneté européenne + reconnaissance aux citoyens des États membres un certain nombre des droits ð Création d’une nouvelle organisation : UE ð 2 nouveaux volets de coopération : o Politique étrangère o Coopération en justice ð Royaume-Uni empêcheur des négociations (ex. proposition d’une Union fédérale par la Belgique) d. Constitution européenne 2004 ð Échoué en 2005 après referenda en France et aux Pays-Bas e. Traité de Lisbonne 2007 ð Compromis entre solution des traités conventionnels et le traité constitutionnel ð Remplacement de la CE par l’UE ð Construction européenne ne repose plus sur un système de piliers = gain de simplicité UE considérée par reste du monde comme une organisation internationale (plutôt qu’une organisation sui generis ou « objet juridique non-identifié ») Organisation internationale : association d’États dotée d’une constitution et d’organes communs à laquelle on a attribué une personnalité juridique Union européenne : composée d’États, seuls des États sont membres de l’UE o Art. 49 TFUE : adhésion d’États européens o Art. 13 TUE : énumération des institutions européennes o Art. 47 : personnalité juridique B. Les caractères principaux, les finalités et orientations de l’UE Citoyenneté, valeurs => c’est pour cela qu’on a pu dire que c’est une organisation sui generis Chapitre 1 : Les finalités et orientations de l’UE Destinée à conjurer la guerre entre les peuples européens. Nécessité d’établir des objectifs concrets afin de rapprocher ces peuples => une union pour éviter le besoin ou l’envie de se faire la guerre. Finalités et orientations se déclinant dans les traités constitutifs => missions confiées, principes directeurs que doivent toujours respecter les États membres. A. Les valeurs Dirigeants partageaient valeurs communes qu’il fallait proclamer pour savoir à quoi été attachée la construction de l’UE. ð Préambule TUE : Développent des valeurs universelles (= droits inviolables et inaliénables se rattachant à la personne, ainsi que la liberté, la démocratie, l’égalité, l’État de droit) à partir des héritages culturels, religieux, humanistes de l’UE ð Art. 2 TUE consacré aux valeurs : respect de la dignité humaine, liberté, démocratie, égalité, État de droit, respect des droits de l’homme ð Valeurs destinées aux États qui souhaitent adhérer à l’UE = non-respect empêche l’adhésion o Les 27 États membres respectent-ils ces valeurs ? § Difficultés d’ordre économique, politique, sociale o La Commission peut engager des procédures d’infraction contre les États qui ne respectent pas l’État de droit § Ex. la Pologne, la Hongrie o Sanction juridictionnelle peut être adoptée – arrêt de manquement o Sanction politique : art. 7 TUE B. Les objectifs généraux Art. 3 §1 TUE : objectifs généraux en ce sens que ces objectifs correspondent à ceux assignés aux premières communautés européennes : ð Promotion de la paix : objectif de la CECA ð Promotion de ses valeurs en son sein et à l’extérieur : nouvel objectif énoncé dans le Traité de Lisbonne ð Bien-être de ses peuples Les objectifs doivent toujours être prises en compte lorsque l’UE décide d’agit dans tel ou tel secteur. C. Les missions Art. 3 §2-5 TUE : énoncées dans les traités constitutifs depuis l’origine mais depuis Lisbonne il y a un changement de priorité : nouvelles missions promus alors que missions classiques rétrogradées ð §2 : établir un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures au sein duquel la liberté de circulation des personnes est assurée => avec maintien de frontières extérieures, règles appropriées concernant l’immigration, la criminalité et la lutte de celle-ci ð §3 : o Développement durable, établissement d’un marché interne, élaboration de politiques communes o Préservation de la qualité de l’environnement o Combattre l’exclusion sociale et exclusions des discriminations => pas un objectif premier de l’UE o Promotion de la cohésion économique, sociale, territoriale et promotion de la solidarité o Respecter de la diversité culturelle, linguistique ð §4 : établir une union économique et monétaire o Imparfait : seulement 20 États membres font partie de la zone Euro ð §5 : promouvoir ses valeurs, protéger ses citoyens, contribuer à la paix, à la sécurité, au développement durable de la planète D. Les principes directeurs Au-delà des objectifs et missions, l’UE est tenue à un certain nombre des principes directeurs commandant son action : dispositions du TUE ð Art. 4 §2 : Respect des droits fondamentaux des États membres ð Art. 9 et 10 : respect du principe d’égalité des citoyens et de la démocratie représentative ð Respect des compétences étatiques o Art. 4 §1 TUE : toute compétence non attribuée à l’UE appartient aux États membres o Principe d’attribution régit la délimitation de compétences de l’UE o Compétences faisant l’objet de plusieurs de dispositions dans le TFUE § Art. 2-6 TFUE : énonçant une série de compétences attribuées à des degrés divers à l’UE => gradation expliquée par les rapports à chaque matière Art. 3 : compétences exclusives, ex. douanes Art. 4 : compétences partagées, ex. protection de l’environnement Art. 5 : principe de subsidiarité Art. 6 : compétences ni exclusives, ni partagés mais de simples compétences d’appui, de soutien, ex. santé ð Respect des droits fondamentaux/humains o Art. 2 TUE o Art. 6 TUE § §1 : reconnaissance des droits et libertés consacrés dans la Charte des droits fondamentaux => Lisbonne a fait de ce texte un engagement de l’UE § §2 : UE adhère à la CEDH § §3 : droits fondamentaux font partie du droit de l’UE en tant que principes généraux Art. 54 CDF PGD Chapitre 2 : Les sources du droit de l’UE Système conçu dans un esprit de cohérence. Les sources du droit de l’UE obéissent à une logique commune => caractères communs mais se singularisent A. L’indentification des sources du droit de l’UE Supports officiels reconnus comme tels qui contiennent des règles de droit : soit issues des traités constitutifs de l’UE, soit adoptées par les institutions de l’UE. 4 catégories de sources (5 si on en fait pas référence à un adjectif qui se rapporte à l’élément primaire, secondaire et aux éléments qui suivent) Traités relatifs à l’UE => source première, engage les États membres Charte des droits fondamentaux de l’UE => fruit d’élaboration complexe, la même valeur que les traités Actes des institutions et organes de l’UE : actes pris par des institutions et organes mis en place par les traités de l’UE o Droit vivant o Droit dérivé de l’UE Accords internationaux liant l’UE avec des partenaires (d’autres organisations internationales ou des États tiers) o Statut particulier car engagement de l’UE o Obligation de respect des traités et de la Charte o L’emportent sur le droit dérivé Sources non-écrites : la jurisprudence de la CJUE et PGD (art. 6 §3 TUE) B. La caractérisation II. Les traités constitutifs et les actes des institutions Traité de Lisbonne (1.12.2009, signé en 2007) : établit le TUE et le TFUE Chapitre 1 : Les traités relatifs à l’Union européenne Traités constitutifs =/= traités modificatifs 1. Les traités constitutifs de l’Union européenne UE mise en place en 1992 par le Traité de Maastricht => composée de 3 communautés européennes et 2 piliers de coopération : 4 traités constitutifs d’organisation européenne Traité CECA : plus en vigueur depuis 2002 Traité CE : devenu CE, puis TFUE Traité CEEA : maintenu en vigueur dans l’UE malgré son caractère spécifique Traité englobant ces 3 traités : TUE = restructuration considérable en 2007 Cette structure complexe a duré pendant plusieurs années jusqu’au traité de Lisbonne (2007, 2009) => simplification de la structure et diminution du nombre des traités constitutifs Depuis Lisbonne : UE est fondée sur 2 traités constitutifs (art. 1 al. 3 TUE), pas par volonté d’être générale, mais en 2005 la Constitution européenne a échoué. Le TUE n’est pas supérieur au TFUE. A. Le Traité sur l’Union européenne (TUE) Texte composé de 55 articles dans lesquelles les États membres ont voulu maintenir l’essentiel s’agissant de la présentation, des valeurs, de séries de questions. TUE structuré en 6 titres : ð Titre 1 : dispositions communes o Art. 1 : établissement de l’UE o Art. 2 : valeurs o Art. 3 : objectifs et missions o Art. 4 : droits des États membres o Art. 5 : attribution des compétences o Art. 6 : ancrage de l’UE dans la protection des droits fondamentaux o Art. 7 : sanctions en cas de non-respect des valeurs et de certains droits fondamentaux (aussi des valeurs) o Art. 8 : politique de voisinage de l’UE ð Titre 2 : principes démocratiques o Art. 9-12 : mise en lumière de l’ancrage de l’UE dans l’exigence du respect des principes démocratiques : démocratie représentative, participative, initiative citoyenne européenne ð Titre 3 : Institutions de l’UE o Art. 13-19 : présentation du cadre institutionnel ð Titre 4 : Coopérations renforcées o Art. 20 ð Titre 5 : Dispositions relatives à l’action extérieure et Dispositions spécifiques relatives à la PESC (politique étrangère et de sécurité commune) o Art. 21-46 ð Titre 6 : Dispositions finales o Art. 47-55 : personnalité juridique, langues, versions qui font foi et dispositions marquantes Texte homogène mais méritant approfondissement en se reportant au TFUE. B. Le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) Comportant 358 articles, suite du TUE tel que revisité à Maastricht, Amsterdam et Nice, ainsi qu’avec les modifications de Lisbonne. À la fin du traité, il y a une table de correspondance des dispositions du traité CE (plus en vigueur) et TFUE. Structuré en parties, comportant des titres, chapitres et sections. Le TFUE ne se limite pas à la mécanique, au fonctionnement stricto sensu, mais comportant des aspects constitutionnels => traitant de multiples questions techniques institutionnelles et financières => présentation de toutes les politiques (internes ou externes sauf PESC) de l’UE. 7 parties : ð Partie 1 : Les principes => dispositions très importantes pour la bonne marche de l’UE o Art. 1-17 o Titre 1 : Les compétence de l’UE o Titre 2 : Dispositions d’application générale ð Partie 2 : Non-discrimination et citoyenneté o Art. 18-25 ð Partie 3 : Politique et action interne de l’UE => agriculture, protection des consommateurs, éducation, tourisme, fiscalité, transport, énergie… tous les domaines de la vie économique et sociale visés à des degrés divers o Art. 26-197 ð Partie 4 : L’association des pays et territoires d’outre-mer => pas de référence aux départements d’outre-mer (Guyane, Martinique, Guadeloupe… mais référence à la Nouvelle-Calédonie), statut intermédiaire entre statut État membre et statut État tiers o Art. 198-204 ð Partie 5 : Action extérieure => action avec les États tiers sauf PESC (visée dans le TUE) o Art. 205-222 ð Partie 6 : Dispositions institutionnelles et financières o Art. 223-334 ð Partie 7 : Dispositions générales et finales => langue, durée de l’engagement… o Art. 335-358 Complexité accrue par les Protocoles ayant la même valeur que les traités constitutifs en vertu de l’art. 51 => 37 protocoles, parfois en rapport avec la situation particulière d’un État membre (e.g. Danemark, France) ou matière donnée (Schengen) ou matière et État membre (disposition de la Charte applicable à la Pologne et au Royaume Uni). 2. Les traités modificatifs de l’Union européenne Idée de « construction européenne » = pragmatique, évolutive L’agression de l’Ukraine a poussé les États membres à reconsidérer des éléments de construction. Pour faire évoluer, il faut passer par des modifications du droit dérivé, mais ça montre très vite des limites tant que le droit primaire reste figé – important d’être en mesure de faire évoluer les traités constitutifs. Modification sur deux plans : ð Perfectionnement, approfondissement ð Élargissement de l’UE o Ne suffit pas pour rendre compte de l’évolution o Il faut aussi en parallèle voir le retrait A. Les traités visant au perfectionnement et à l’approfondissement Inutile d’énumérer tous les traités adoptés en vue de la modification des traités constitutifs depuis l’origine. Des petits traités de modifications ont été suivies par des traités d’envergure : ð Acte unique européen 1986 o Facilité procédure décisionnelle o Ajoute politiques, ex. l’environnement o Invente coopération politique entre États membres o Notion nouvelle : le marché intérieur § Avant : marché commun § Abolition des frontières o Preuve d’audace ð Traité de Maastricht 1992 o Union économique et monétaire (monnaie commune) o Citoyenneté européenne o Nouvelles politiques communes : protection consommateurs o Coopérations o Encore beaucoup d’audace Au fil des ans, la créativité s’est amoindrie => Traités d’Amsterdam et de Nice ð Mode de révision des traités conduisant à des blocages permanents Ce processus toujours prévu par les traités eux-mêmes. États membres toujours souverains, mais doivent respecter processus de révision des traités : Procédure normale/ordinaire Procédures de révision simplifiée Procédures spécifiques ð Art. 48 TUE o Procédure normale/ordinaire : art. 48 §2-5 TUE § Initiative § Droit à son tour de transmettre le projet au Conseil européen § Ratification o Procédure de révision simplifiée : art. 48 §6 TUE § Révision d’une partie du TUE avec procédure plus courte qui ne passe pas par la convocation d ;une autre convention ni même d’une conférence intergouvernementale § Touche aux politiques internes de l’UE, qui nécessitent des adaptations occasionnelles § Initiative pas État membre, Parlement ou Conseil § Adoption par Conseil lui-même avec exigence de l’unanimité § Acceptation par tous les États membres § Ne peut pas avoir pour finalité d’accroître les compétences de l’UE § Utilisé à plusieurs reprises, notamment en matière financière § Nouvelle disposition ajoutée à l’art. 136 TFUE o Procédures spécifiques § Pas prévues par art. 48 TUE, mais dans dispositions du TFUE qui se rapportent à telle ou telle question § Rares, mais nécessaires § Modifications techniques § Ex. avec CJUE : Articles du statut concernant la CJUE peuvent être modifié Statut CJUE a le valeur de traité, inscrit en protocole Procédure spécifique : Art. 281 TFUE Procédure législative ordinaire o Acte du Parlement et du Conseil (de l’UE) o À la demande du Parlement après l’avis de la CJUE ou par la CJUE avec l’avis de la Commission Réforme récente : filtrage des pourvois contre les décisions du Tribunal UE devant la CJUE B. Les traités visant à l’élargissement et au retrait Expressément envisagés par TUE : art. 49 et 50 a. Procédure Aucun parallélisme entre les deux procédures recherché. i. Procédure d’adhésion Art. 49 TUE : 3 phases Initiative Adoption Ratification ii. Procédure du retrait Pas envisagé dans les traités constitutifs originels, c’est au moment du traité pour une constitution européenne qu’une disposition de retrait a été introduite, par les représentants du Royaume-Uni. Considéré comme processus irréversible, d’un caractère absolutiste. Avec le Traité de Lisbonne, les Anglais ont voulu garder des apports du traité constitutif. Donc, art. 50 TUE = retrait : deux phases (pas de ratification lorsque décision prise) Initiative o Art. 50.1-2 o Décision révocable ? § CJUE, 2018, Wightman o Prévoit négociation § Art. 218 TFUE Adoption Le Brexit a provoqué plusieurs problèmes de commerce. Notamment, actions en justice par citoyens britanniques en Europe pour réclamer citoyenneté européenne, CJUE donne tort : la citoyenneté est liée à la situation de l’État membre, pas de citoyenneté pour l’éternité. Compte tenu de proximité de l’État, décision de conclure un accord de commerce et coopération : 30 décembre 2020, entré en vigueur 1 mai 2021. Le Royaume-Uni a repris certain éléments du droit européen parce qu’il était déjà tellement intégré dans son droit domestique. b. Les effets i. Les accords d’adhésion Modifient les traités constitutifs et les protocoles qui en font partie intégrante. Particulièrement, un certain nombre de dispositions institutionnelles, ex. nombre de sièges du Parlement européen. Ex. prévoir un protocole spécial adapté au nouvel État membre La traité d’adhésion reste traité interétatique, ne sera pas inférieur aux traités constitutifs. Agrégation des nouveaux États membres au système préexistant. CJUE, 1992, Portugal et Espagne c. Conseil : ð L’adhésion de nouveaux États membres se réalise au moyen d’actes qui ont valeur de droit primaire et qui peuvent modifier, dans n’importe quel domaine, les situations préexistantes ð L’acquis européen étant la règle générale o Ex. libertés de circulation, protection des droits fondamentaux ii. L’accord de retrait Art. 50 §3-5 : les traités cessent d’être applicable à l’État concerné L’État qui s’est retiré de l’UE peut demander à adhérer à nouveau à l’Union, demande sera soumise à la procédure d’adhésion normale de l’art. 49. Remariage expressément prévu par les traités. Chapitre 2 : Les actes des institutions de l’UE L’UE constitue une organisation vivante, elle ne se limite pas à agir sur la base des traités fondateurs, mais elle adopte des actes multiples de façon à accomplir ses missions. Aujourd’hui : 25000 actes de l’UE forment la législation européenne. Au début des années 90s : transparence, accessibilité 1992 : Conseil européen de Birmingham : institutions invités par le Conseil à réagir => simple efficace (mais les institutions n’y sont pas parvenus : rédaction n’est pas claire) ð Explication de la complexification du droit dérivé de l’UE : textes de loi de plus de 2 pages ð L’exigence de règlementation affutée : volonté des institutions de : o Consolider des textes (= intégrer les modification dans le texte) o Codifier des textes (= réunir des textes qui se rapportent à la même matière dans un code) § Méthode proposée par la France, mais les États membres pas séduits, car beaucoup d’inconvénients, plus que d’avantages § CCL : échec total de la codification Les institutions essaient de faire mieux en respectant le plus possible la nomenclature des actes (art. 288 TFUE) – règlements, avis, etc. afin d’éviter que les actes prennent des formes diverses menant à une impossibilité de caractériser les effets des actes. 1. Les actes typiques Actes présentés dans la nomenclature de l’art. 288 TFUE. La nomenclature a pour but de distinguer les catégories d’actes, non pas en fonction de leurs auteurs, mais de leurs effets et de leurs portées, afin de connaître le caractère obligatoire ou non d’un acte. La CJUE peut procéder à la requalification d’un acte lorsqu’elle est saisie pour la contrôle d’un acte. Les actes typiques s’agissent des règlements, directives, recommandations et avis. A. Les règlements Constituent le même type d’acte pris par les institutions car ils sont contraignants. Art. 288 al. 2 TFUE : portée générale, obligatoire, directement applicable dans tous les États membres. ð Pas de caractère erga omnes a. Une portée générale La CJUE définie très tôt dans sa jurisprudence le sens de ce caractère (CJCE, 1962, Fédération nationale de la boucherie en gros) : ð Le règlement s’applique à des situations déterminées objectivement ð Les personnes auxquelles il s’applique : catégorie de personnes envisagées dans leur ensemble et abstraitement et non à des destinataires détermines (sinon : décision) La CJUE est indifférente aux intitulés des textes : la Commission ou le Conseil déguisent une décision en règlement avec un texte de décision mais avec apparence de règlement => requalification en cas des conflits. ð Portée générale =/= application uniforme du texte : règlement peut s’appliquer différemment dans les États membres s’il le prévoit ou ne s’applique pas que dans une partie des États membres o Ex. le règlement sur le cognac ou le champagne ne s’applique qu’en France b. Un caractère obligatoire/concluant ð Obligatoire dans tous ses éléments – objectifs et moyens o Distinction avec directives (obligatoire que dans les objectifs fixés et non des moyens mis en œuvre pour réaliser les objectifs) o Concerne les personnes susceptibles d’être concernées : § Lorsque les institutions adoptent un règlement, elles fixent des obligations qu’elles-mêmes et d’autres doivent respecter § Un règlement peut s’imposer aux entreprises et aux individus Ex. Règlement 1/2003 en droit de la concurrence Ex. Règlement sur la téléphonie ou sur les retards et annulations des vols § L’UE a agi car il y avait une carence considérable et parfois il est préférable pour l’UE d’intervenir car un seul État membre n’aurait pas pu faire grande chose c. Le caractère d’applicabilité direct ð Directement applicable dans tous les États membres ; les règlements n’ont pas besoin d’être reprises dans un texte de droit national pour produire ses effets ð La CJUE confère au règlement l’effet direct (=produisant des droits que les justiciables peuvent invoquer devant une juridiction nationale) B. Les directives Art. 288, al. 3 : la directive lié tout État membre quant au résultat, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens. ð « Instrument qui intrigue et qui dérange » - contraignant pour les États membres dont les effets restent indéterminés ð Instrument médiat (=/= immédiat) ð La directive ne suffit pas à elle-même – impose des mesures de transposition ð Dans le domaine de compétences partagées ð Directives considérables : o Égalité en fonction de l’âge, de la race, orientation sexuelle, etc. – Directive 2000/78 o TVA o Protection des consommateurs : clauses abusives, sécurité des produits, etc… o Environnement ð Peut produire des effets directs a. Une portée non-générale Les États membres sont les seuls destinataires possibles des directives. Dans la plupart des cas, les directives sont notifiées aux États membres en vue d’être transposées. b. Un caractère obligatoire partiel Partiel car la directive lie quant au résultat tout en laissant les États membres libres quant aux moyens pour atteindre le résultat. ð Distinction formelle entre objectifs obligatoires et moyens mais à relativiser au regard de la pratique et de la jurisprudence de la CJUE Ex. Directive 93/13 : protection donnée dans le droit des consommateurs au moyen des clauses abusives. Directive sur la publicité comparative : publicité destinée à informer le consommateur Directive sur TVA 2006 : objectif = taxe applicable lors de la commercialisation de produits et services qui serait uniforme dans l’UE ð Le résultat doit être atteint dans un certain délai (notifié dans la Directive) o Si non respect du délai : procédure de non-transposition ou transposition tardive ð Liberté des États membres quant aux formes à adopter pour l’acte de transposition, tant qu’acte de transposition est effectif et correct o Acte législatif : loi, ordonnance o Acte administratif o Acte conventionnel ð Liberté des États membres quant aux moyens mais cette liberté n’est pas toujours utilisée par les États membres ð La jurisprudence de la CJUE o Durcissement des obligations pesant sur les États membres o 1er constat : mesures de transposition doivent être contraignantes o 2ème constat : mesures de transposition doivent être effectives § Texte doit assurer au profit des personnes protégées par la directive une sécurité juridique au moyen de textes clairs, prévisibles, avec des obligations définies de manière précise § Les juridictions nationales doivent appliquer les directives => obligation d’interprétation conforme du droit national par rapport à la directive, de choisir l’interprétation plus conforme possible à l’esprit et à la finalité des directives (CJCE, 1990, Marleasing) C. Les décisions Art. 288 al. 4 : modification considérable par le Traité de Lisbonne, la décision est obligatoire dans tous ses éléments ; lorsqu’elle désigne des destinataires, elle n’est obligatoire que pour ceux-ci. a. Une portée en principe non-générale Originellement : caractère individuel donc de portée non-générale, mais changement depuis Lisbonne vers une portée variable. Le plus souvent, adressées à un ou plusieurs destinataires : ð États membres : décisions prises par la Commission se rapportant sur les aides d’États (Art. 107 TFUE) ð Entreprises : décisions infligeant des amendes ð Institutions de l’UE : mais cas de figure beaucoup plus restreints Art. 86 §4 TFUE : coopération judiciaire en matière pénale Art. 218 §6 TFUE : Le Conseil adopte une décision portant la conclusion d’un accord négocié préalablement b. Un caractère obligatoire absolu Obligatoire dans tous ses éléments : quant au résultat et quant aux moyens à mettre en œuvre pour y parvenir. Pas besoin d’être transposées, elle se suffisent à elles-mêmes et produisent des effets sur les États membres, les personnes privées et les institutions. Art. 299 TFUE : les actes qui imposent une obligation pécuniaire forment titre exécutoire dans les États membres sans même besoin de les transformer dans l’État membre concerné D. Les recommandations et avis Art. 288 al. 5 : recommandations et avis ne lient pas, donc n’ont pas de force obligatoire La CJUE a rarement dû prendre position par rapport aux recommandations et avis. ð S’agissent d’actes juridiques mais se distinguent o Recommandation : processus conduisant une institution à recommander un comportement à une autre institution, à un État membre ou à la société civile o Avis : adopté par une institution au cours d’un processus législatif ou administratif constituant l’expression du point de vue de ‘institution, destiné à éclairer sans contraindre La CJUE s’est limitée à observer que les recommandations et avis devaient être dûment pris en considération (CJCE, 1989, Grimaldi) : actes juridiques que les autorités nationales sont tenues de prendre en considération. 2. Les actes atypiques Définition : actes adoptés par les institutions qui soit n’ont pas été prévus par les traités et qui empruntent des noms, des formes, non prescrites par les traités constitutifs (ex. livre vert), soit prennent des formes empruntées à l’art. 288 mais qui n’ont pas les effets décrits par l’art. 288 (ex. avis qui aurait un caractère contraignant). A. Les actes atypiques visés par les traités Référence aux règlements, aux directives, aux avis dans un sens précis qui ne correspondent pas aux actes typiques décrits par les traités : ð Référence aux règlements intérieurs à une institution : pas des textes obligatoires dans tous leurs éléments et qui ont une portée générale => seulement fixer les règles pour le bon fonctionnement de l’institution ð Directives : art. 218 TFUE => procédure d’adoption des accords internationaux, qui ne font pas l’objet d’aucune transposition ð Décisions : employées à tort et à travers par rédacteurs des traités constitutifs ð Avis et recommandations : art. 218 TFUE §11 B. Les actes non prévus par les traités Définition : les actes prises par les institutions par lesquels les traités n’ont pas fait référence. ð Accords interinstitutionnels : o Nés de la pratique o La Commission, le Conseil et le Parlement s’engagent à respecter certaines lignes, ex. domaine budgétaire, mieux légiférer (adopter des actes plus simples, plus claires, plus lisibles, plus compréhensibles, etc.) o Ex. La Charte des droits fondamentaux (puis valeur primaire adoptée par le Traité de Lisbonne) ð Actes innomés tentant d’établir des lignes directrices pour encadrer des activités économiques et sociales : résolutions, communications (le plus souvent), calendriers, programmes, livres verts ou blanc, selon la finalité de l’acte adopté : o Pas de force juridique o Il est possible d’imposer à l’institution le respect de la communication qu’elle a élaboré => possibilité d’annuler ou d’invalider la communication § Ex. CJUE, 2013, Total III. La Charte des droits fondamentaux 1999 : décision de fonder la CDF de l’UE à Copenhague => droits et principes auxquels l’UE est engagée et qu’elle s’engage à respecter au même titre que les États membres qui la composent ð États membres déjà respectaient la Charte car membres de la CEDH ð Importance de posséder un texte sur les droits fondamentaux 7 décembre 2000 : Conseil européen de Nice (trois présidents : Conseil européen, Conseil des ministres et Commission) ont décidé de proclamer la Charte des droits fondamentaux, dite la Charte de Nice. Pendant 9 ans : texté de droit dérivé adopté seulement par les institutions de l’UE => ne pouvant pas avoir valeur de traité Traité de Lisbonne : maintien de la Charte, mais avec référence dans TUE et TFUE en tant que source de droit primaire => modification d’art. 6 TUE Art. 52 §7 CDF : les explications élaborées en vue de guider interprétation de la Charte sont dûment prises en considération. A. Diversité des droits et principes consacrés Droits et principes rangés dans 6 chapitres : ð Dignité : les droits plus forts, intangibles, indérogeables o Art. 1-5 § Art. 5 : si un État membre autorise l’esclavage et/ou le travail forcé, c’est l’État membre qui est responsable et qui devra en répondre ð Libertés : toujours consacrées dans le droit de l’UE o Art. 6-19 § Art. 10 : Objet de revendication fréquente, e.g. CJUE, 2018, LIGA => interdiction d’abattage rituel comme atteinte à liberté religieuse justifiée § Art. 17 : CJUE, 2019, Commission c. Hongrie o Libertés sujettes à dérogation => pour ordre public, causes d’utilité publique (e.g. expropriation) ð Égalités : articles se rapportant à des types de discrimination o Art. 20-26 ð Solidarité : droits (mais plutôt des principes) sociaux discutés à cause des divergences politiques entre les États membres : Royaume-Uni contre, France pour o Art. 27-38 § Art. 27 : qu’un principe ð Citoyenneté : UE engagée dans processus de construction citoyenneté => reprise des dispositions du TFUE portant sur les droits des citoyens, importance de consacrer les droits des citoyens, mise en lumière de leur dimension protectrice o Art. 39-46 ð Justice : énonciation des droits au seul profit des justiciables => droits classiques, régulièrement réaffirmées dans les traités de protection des droits humains, mais ici poussés à un niveau plus élevé o Art. 47-50 Valeur symbolique : montrer que l’UE est commandée dans son action par un certain nombre des valeurs auxquelles elle est particulièrement attachée et elle est prête à en tirer les conséquences. Charte est devenue justiciable devant juridictions nationales et la CJUE. ð Chapitre 7 : Dispositions générales régissant l’interprétation et l’application de la Charte : o Art 51, 52, 53, 54 B. Champ d’application de la Charte Défini par l’art. 51 CDF : s’adresse aux institutions, organes ou organismes de l’UE dans le respect du principe de subsidiarité et aux États membres lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’UE. ð Institutions, organes et organismes : aucune exclusion n’est possible ð États membres : Charte applicable uniquement au moment d’application du droit européen => respect des États membres à la CEDH et leur droit interne n’est pas suffisant o CJUE, 2013, Akerberg Fransson o CJUE, 2019, Commission c. Hongrie o Conception extensive pas critiquable par citoyens car conception extensive pour protéger les droits des citoyens C. Principes directeurs d’application et d’interprétation ð Art. 52 : portée et interprétation de la Charte o Paragraphe s’attachant aux limitations de l’exercice des droits et libertés reconnus par la Charte, texte envisagé qu’il soit dérogé un certain nombre d’articles consacrant droits et libertés, mais sous certaines conditions : § Limitations doivent être prévues par la loi § Limitation doivent respecter le contenu essentiel des droits et libertés Ne doivent pas porter atteinte au cœur même du droit fondamental consacré (notion venant du CEDH) § Limitations apportées dans le respect du principe de proportionnalité Pas de mesures mois attentatoires pour protéger le droit en cause o §3-4 : renvoi à la CEDH et aux traditions constitutionnelles ð Art. 53 : niveau de protection o Aucun article de la Charte ne doit être interprétée comme portant atteinte aux droits de l’homme et libertés fondamentales (clause de non-recul) ð Art. 54 : interdiction d’abus de droit o Aucune jurisprudence en cette matière o Difficulté : à partir de quel seuil y-a-t-il abus ? Question préjudicielle probablement nécessaire. IV. Les principes généraux et la jurisprudence du droit européen Section 1 : La jurisprudence de l’UE La jurisprudence est l’ensemble de décisions prises sous la forme d’arrêts, d’ordonnances, d’avis rendus par la CJUE. Dans la doctrine, on lit qu’il n’y a pas de jurisprudence, mais qu’il y a des arrêts qui font la jurisprudence. A. Les fonctions de la jurisprudence ð Fonction interprétative : o Dans un litige donné, juge amené à interpréter telle ou telle disposition de droit écrit dont la portée est incertaine ou le sens ambigu ou jurisprudence n’est pas claire o CJUE donne le sens sur le renvoi préjudiciel § CJCE, 1995, Bosman : définition claire § CJCE, 1974, Dassonville : notion pas claire ð Fonction supplétive : o Textes n’ont pas conçu règle d’interdiction suffisamment large : comportant zones d’ombres o Fonction exercée par la plupart des institutions o La jurisprudence a dégagé des justifications pour déroger à l’interdiction des entraves aux échanges et a consacré des exigences impératives d’intérêt général correspondant à des besoins ressentis par les États membres dans notre société actuelle (ex. protection des consommateurs, environnement, réseaux de communication, sécurité routière) ð Fonction correctrice : o Si traité comporte des anomalies o Exceptionnel s’agissant des traités B. Les caractères de la jurisprudence Jamais vraiment étudié, examiné par la doctrine. Mais la question de la valeur juridique de la jurisprudence : 2 éléments, 2 traits de caractère ð Source dérivée des textes o La CJUE peut toujours trouver appui sur un texte et qui va s’incorporer au texte que la CJUE a contribué à interpréter => cela lui confère la même valeur que le texte qu’elle a contribué à interpréter o Lorsque la jurisprudence interprète une règle d’un traité ou de la Charte, on peut considérer que cette jurisprudence fait partie du droit primaire o Lorsque la jurisprudence donne sens à une disposition du droit dérivé, on peut dire qu’elle fait partie du droit dérivé o La jurisprudence est mise sous silence si la source est supérieure ð Source évolutive o La jurisprudence donne lieu à de multiples prises de positions qui consistent à faire évoluer cette jurisprudence Section 2 : Les principes généraux de droit Une source classique du droit de l’UE, les PGD sont des principes juridiques, affirmés par la CJUE, applicables à un ensemble de situations, régis par le droit de l’UE (que lorsque le droit de l’UE ne s’applique pas parce que la situation est régie par le droit national). A. La construction des PGD Les PGD reconnus, consacrés par la CJUE dans le cadre de sa jurisprudence : sur recours direct ou renvoi préjudiciel. La CJUE peut ressentir la nécessité de consacrer les PGD en vue de l’appliquer à une affaire. Ce besoin ressenti très tôt pour combler le vide du droit écrit, pour pallier les insuffisances du droit écrit et pour donner une orientation à l’interprétation des textes. Construction complexe, rarement improvisé : « syncrétisme » (on emprunte dans plusieurs systèmes), plusieurs sources de droit : national, international ð Principes déduits des règles de l’UE o Orientations, tendances fortes des traités § Reconnaissance de libertés o Interdiction de discrimination : fondée sur nationalité, sur l’origine des marchandises, sur le genre § Art. 40 §2 al. 2 TFUE ð Principes issus du droit international => inspiration pour la CJUE o Universel/général § Principe de réciprocité : CJCE, 1964, Commission c. Luxembourg et Belgique § Principe de bonne foi : CJCE, 1997, Opel § Principe de territorialité o Régional, en l’occurrence, européenne § CEDH : source d’inspiration dans la consécration des PGD CJCE, 1974, Nold CJCE, 1975, Rutili Citation jurisprudentielle de la CtEDH à partir de 1996 => référence expresse dans l’art. 6 §3 TUE : CEDH n’est pas une source du droit de l’UE, mais une inspiration ð Principes déduits du droit des États membres o Principes présumés communs à l’ensemble des États membres car issus du droit romain o 1950s : la CJUE a fait référence à ce type de principe, notamment au principe de continuité des structures juridiques => reconnu par tous o Trouver le plus petit dénominateur commun => principe de la révocabilité des actes pris par des institutions qui se révèlent illégaux o Inspiration des droits nationaux quand il y a un droit national qui se révèle performant et adapté à la logique commune, ex. principe de confiance légitime B. Le contenu des PGD Distinction en fonction d’objet des PGD : ð Régulation de l’action administrative et normative o Principes dégagés par la CJUE en vue d’encadrer la régulation de l’UE et des États membres => elle impose des PGD qui vont conduire normalement à améliorer la qualité de l’administration, de la législation nationale ou européenne o Principe de bonne administration : éviter maltraitance, l’administration doit prendre le soin de répondre aux administrés, qu’elle doit prendre en considération leurs griefs, qu’elle soit accessible => la CJUE y veille d’autant plus aujourd’hui parce que la Charte y fait référence mais ne s’applique pas qu’à l’administration de l’UE o Principe de sécurité juridique o Principe de proportionnalité : l’administration ne doit pas imposer contrainte – disproportionnée par rapport à l’objectif qu’elle veut atteindre => ne pas aller au-delà du nécessaire pour arriver à un résultat donné => valables pour obligations et sanctions infligées ð Protection des droits fondamentaux o Consécration relativement tardive : CJCE, 1969, Stauder o CJCE, 1970, Internationale Handelgesellschaft : règlement restrictif en matière de droits fondamentaux qui menaçait d’appliquer la constitution. CJUE : règlement devait être apprécié par rapport aux droits fondamentaux o Abondance de jurisprudence o Charte : utilisation moindre des PGD o Art. 57 §2 Charte : référence à la jurisprudence de la CJUE qui s’était attachée à reconnaitre tel ou tel droit reconnu sous la forme de PGD o Dignité humaine : droit fondamental § CJCE, 1998, Lisa Grant : la discrimination ne peut pas être combattue en vertu du droit de l’UE § Traité d’Amsterdam 1997 : intégration d’une base juridique qui habilite le Conseil à arrêter une directive permettant d’interdire toute forme de discrimination (art. 19 TFUE) => Directive 2000/78, donc plus besoin de recourir au principe de dignité o Droits procéduraux : droit au respect du contradictoire, droit au procès équitable dans un délai raisonnable… § CJUE, 2013, Gascogne : principe de délai raisonnable s’impose aussi bien à la CJUE C. Les effets des PGD Lorsque les États membres mettent en œuvre le droit de l’UE, les États membres devraient être eux aussi tenus au respect des mêmes principes que les institutions => dès lors que l’État membre devient exécutant, il doit respecter les mêmes principes que les auteurs des réglementations européennes => repris à l’art. 51 de la Charte : action qui s’insère dans le champ d’application du traité. ð Nombreuses contraintes pour les États membres o CJUE, 2009, Audiolux : les PGD font partie du droit primaire – les traités constitutifs et la Charte. Donc sont soumis aux PGD : les actes des institutions, accords internationaux de l’UE avec les tiers, actes étatiques dès lors qu’ils entrent dans le champ d’application du droit de l’UE. V. L’effet direct La hiérarchie entre sources doit être assurée par la CJUE. Il y a des caractères spécifiques à l’UE en tant que système de droit intégré => l’UE repose sur une logique d’intégration de son droit dans le droit d’États membres Dès les années 1960s, une nouvelle ordre juridique est née avec l’arrêt Van Gend en Loos. Reconnaissance de deux caractères fondamentaux : invocables par les justiciables devant leurs juridictions nationales : l’effet direct et la primauté. L’effet direct a des multiples définitions en jurisprudence et en doctrine, mais il n’est pas prévu dans les traités. La définition de Robert Lecourt dit : « le droit pour toute personne de demander à son juge de lui appliquer des traités, règlements, directives ou décisions communautaires ; c’est un droit pour le justiciable et une obligation pour le juge de faire usage de ces textes. » Quel que soit la source du droit de l’UE (primaire ou dérivé), le caractère d’effet direct est reconnu suivant une logique commune. La CJUE a pris une position pour reconnaitre ou non tel ou tel effet des règles du droit de l’UE. A. Les fondements de l’effet direct En droit international public, pour déterminer s’il y a effet direct, il faut se référer à l’intention des parties à la Convention (Tribunaux de Danzig). Mais en droit de l’UE, les travaux préparatoires ne sont pas divulgués, donc il est impossible de connaitre le volonté des parties. ð CJCE, 1963, Van Gend en Loos, 26/62 = reconnaissance de l’effet direct du droit de l’UE Le traité constitue plus qu’un accord qui créerait des obligations contractuelles réciproques entre les cocontractants. Les traités sont destinés à « engendrer des droits qui entrent dans le patrimoine juridique des particuliers » = création de droits au profit des justiciables. B. Les critères généraux de l’effet direct Le droit a quand même pour vocation à créer des droits vises à rapprocher les peuples, à établir un espace de liberté, de sécurité et de justice. Mais il faut vérifier si la loi crée des droits expressément à votre profit ou qu’elle crée indirectement des obligations à l’encontre de votre adversaire => critères de la justiciabilité (Pierre Pescatore) : ð Clarté et précision o « Assurer la sécurité en Europe » : trop vague o Obligation de ne pas faire (art. 12 CEE), de ne plus faire (art. 95 CEE) : clair et précis o Obligation de faire : comment faire ? Ça dépend de la méthode précisée ou non de l’auteur ; ça dépend des verbes, des temps de conjugaison, etc. ð Inconditionnalité : la disposition doit être inconditionnelle, sa réalisation ne doit pas être assortie d’une réserve o La disposition ne nécessite pas pour être effective des mesures d’application prises par les institutions ou les États membres C. Les particularités propres aux différentes sources a. L’effet direct des traités constitutifs La CJUE a dû statuer sur les articles des traités pour savoir s’ils disposent d’effet direct. Ex. une disposition sans effet direct : art. 3 TUE (objectifs assignés) Si l’obligation assortie d’une marge d’appréciation laissée aux institutions ou aux États membres, la disposition est dite conditionnelle, donc privée d’effet direct (ex. art. 107 TFUE). Il est indifférent que la disposition prévoie une dérogation à la règle parce qu’il y a souvent des dérogations dans les règles de droit, ex. interdiction des entraves aux échanges, interdictions des entraves à la libre circulation des personnes : ces libertés ne sont pas absolues et des dérogations sont autorisées si elles sont légitimes et proportionnelles (ex. intérêt général, sécurité ou ordre public, santé public, etc.) La jurisprudence développée à partir des années 70s : ð CJCE, 1974, Reyners : Ce n’est pas parce que la règle du traité qui consacre le droit d’établissement est suivie par d’autres règles qui permettent d’y déroger que la règle principale est privée de son effet direct. L’effet direct vertical : le droit peut être invoqué par un individu contre l’État membre. ð CJCE, 1976, Defrenne : l’art. 119 CEE (art. 157 TFUE : interdiction de différence de rémunération selon le sexe du salarié) peut être invoqué par une salariée à l’encontre de son employeur privé (= effet direct). ð CJCE, 2001, Ferdini : La disposition de l’art. 45 TFUE (la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union, interdiction de toute discrimination à la base de nationalité) s’impose aussi aux personnes privées. b. L’effet direct des dispositions de la Charte des droits fondamentaux Art. 51-54 : dispositions se rapportant à la méthode (champ d’application, niveau de protection, abus de droit) : à priori, elles ne peuvent pas en elles-mêmes créer des droits. Les dispositions de la Charte ont toute vocation à créer des droits, soit au profit des citoyens de l’Union et d’États tiers (ex. le droit à la vie, à la propriété, etc.) Limite : caractère non-inconditionnel des articles de la Charte => les principes ne sont pas inconditionnels car ils doivent être mis en œuvre soit par les institutions, soit par les États membres, donc ils sont privés d’invocabilité direct en tant que telle devant les juridictions nationales, ex : ð Art. 38 : l’assuration d’un haut niveau de protection des consommateurs => seulement un principe, il appartient aux États membres d’adopter des règles nationales de transposition de directives pour protéger les consommateurs. ð Art. 37 : l’assuration d’un haut niveau de protection de l’environnement dans l’UE => l’article ne crée pas lui-même des droits. Effet direct horizontal des dispositions de la Charte créant des droits ? ð CJUE, 2014, AMS (Association de médiation sociale) : l’art. 27 de la Charte (protection des travailleurs et à leur informations et consultation au sein de l’entreprise) n’a pas d’effet direct car l’article est non-inconditionnel, donc il ne peut pas être invoquée directement contre un autre entreprise ni contre un État membre car le marge d’appréciation est laissée aux États membres. ð CJUE, 2018, Bauer : l’art. 31 (tout travailleur a le droit à une période annuelle de congés payés) est une disposition claire, précise et inconditionnelle, donc elle dispose d’effet direct horizontal. c. L’effet direct des actes des institutions Le TFUE ne prévoit rien d’exprès concernant les actes des institutions, sauf pour les règlements (art. 288, al. 2). i. Les règlements Définition : actes de portée générale obligatoire en tous leurs éléments d’applicabilité directe => aptitude à créer des droits au profit de celui qui l’invoque. ð CJCE, 1971, Politi : le règlement est apte à conférer aux particuliers des droits que les juridictions nationales ont l’obligation de sauvegarder. Le règlement suffit lui-même, il n’a pas besoin de transposition. ð CJCE, 1972, Leonesio : Les règlements sont directement applicables dans le droit interne des États membres, donc les individus peuvent s’en prévaloir directement devant le juge national. Les règlements jouent contre les États membres mais aussi contre les entreprises ð Ex. Un règlement adopté en matière de droit de la concurrence : interdiction de restrictions (fournisseurs imposent des restrictions aux distributeurs) => les distributeurs peuvent invoquer ce règlement contre les fournisseurs o CJUE, 2009, Bud : disposition invoquée dans le règlement doit être suffisamment claire, précise et inconditionnelle ii. Les directives Art. 288, al. 3 TFUE : les États membres sont libres en ce qui concerne le choix des moyens et des procédures pour mettre en œuvre les objectifs fixés par les directives. En début des années 70s, les directives ont été invoquées par les individus contre les États membres : ð CJCE, 1970, Grad ð CJCE, 1974, Van Duyn : La directive invoquée serait privée de son effet ultime si les justiciables étaient dans l’impossibilité de s’en prévaloir en justice devant une juridiction nationale. Les juges étaient soucieux de s’attacher à l’objectif des textes => ce n’est pas parce que le texte n’a pas prévu un tel effet pour d’autres catégories d’actes que ces actes sont privés d’effet direct En cas d’absence de transposition : ð La directive peut-elle produire des droits au profit de celui qui l’invoque en justice ? ð CJCE, 1979, Ratti : la directive dispose d’effet direct une fois que le délai de transposition est expiré. Avant l’expiration du délai de transposition, pas d’effet direct. En cas de transposition incorrecte : ð Discordance entre le texte national de transposition et le texte de directive ð Le justiciable peut-il se prévaloir de la directive ? ð CJCE, 1970, VNO et ENKA : il est possible pour un justiciable de se prévaloir de directive dès lors que la directive n’a pas été transposé correctement par l’État membre (VNO). Mais, le bénéfice de la directive ne pourra pas être obtenu que si la disposition invoquée est claire, précise et inconditionnelle (ENKA) ð CJCE, 1990, Becker : Si la disposition invoquée est claire, précise et inconditionnelle, c’est possible de l’invoquer contre toutes les autorités publiques. ð CJCE, 1986, Marshall : directive invocable que à l’encontre d’une autorité publique ð CJCE, 1994, Faccini Dori : pas d’effet direct horizontal des directives. Mais solution médiane : théorie de l’interprétation conforme ð CJUE, 2014, Papasabas : confirmation de Faccini Dori VI. La primauté La jurisprudence constante de la CJUE pose une exigence de primauté. Dans la hiérarchie des normes, la Constitution est en haut des engagements internationaux sont en dessous => besoin de concilier ces conceptions antinomiques. A. Les exigences de la Cour de Justice Question de savoir si, en cas de conflit entre une norme nationale et une norme de droit de l’UE, laquelle devait l’emporter ? Les particuliers invités à invoquer des traités dans des litiges contre les États, administrations, etc… Litige entre droit national applicable et le droit de l’UE. ð CJCE, 1964, Costa c. ENEL : consécration du principe de primauté du droit communautaire sur les droits nationaux. Justification : la nature de la CEE, du système sur lequel elle repose, l’efficacité des règles du traité => comment peut-on voir judiciairement opposé au traité adopté par tous les États membres une loi unilatéralement adopté par l’un de leurs ? Les États ont limité bien que dans des domaines restreints, leurs droits souverains et crée un corps de droit applicable à leurs ressortissants et à eux-mêmes, compte tenu de l’esprit du traité (logique finaliste). Les États ne peuvent faire prévaloir contre un ordre juridique accepté par eux, sur une base de réciprocité, une mesure unilatérale ultérieure => la force du droit communautaire ne serait en effet varier d’un État à l’autre. a. La diversité des sources visées La jurisprudence de la primauté s’applique à toutes les sources de droit des États membres, y compris la Constitution. i. La diversité des sources européennes Sources communautaires => dispositions du traité La primauté n’est pas réservée aux dispositions des traités constitutifs mais fait référence aux sources communautaires => à partir du moment où les sources créent des obligations : TUE, TFUE La Charte Actes obligatoires des institutions : règlements, décisions, directives PGDs Accords internationaux liant l’UE aux États tiers Exigence « existentielle » (Pierre Pescatore) => droit de l’UE n’aurait pas de raison d’être s’il ne privait pas les droits nationaux ð CJUE, 2019, Popławski : introduction d’une nuance dans l’exigence de la primauté o Il faut tenir compte de certaines caractéristiques essentielles du droit de l’UE, et plus particulièrement de la reconnaissance d’un effet direct à une partie seulement des dispositions o L’exigence de primauté ne vaut que pour les dispositions d’effet direct o Il découle de la primauté reconnue et conditionnée par l’effet direct de la disposition dans le litige dont la juridiction est saisie => les dispositions dénuées d’effet direct ne peuvent pas bénéficier du statut de la primauté du droit de l’UE o Les dispositions invoquées dans les litiges entre particuliers : le droit de l’UE ne pourra pas primer sur les règles nationales o Conditionnée par la reconnaissance préalable d’un effet direct en cause o Choix radical corrigé par le principe de l’interprétation conforme : le droit national applicable au litige doit être interprété conformément à la règle de l’UE de référence même si elle ne bénéficie pas de la primauté => contorsion du raisonnement de la CJUE ii. La diversité des sources nationales La CJUE faisait particulièrement référence aux lois adoptées par les États membres après l’engagement souscrit dans le cadre du traité constitutif. Lex posterior derobat : le texte le plus récent de valeur équivalente ou plus au texte ancien l’emporte. La primauté soulèverait des problèmes au sujet des lois postérieures mais les règlements au sujet des règles nationales d’une valeur supérieur aux lois, et tout particulièrement aux règles constitutionnelles. A partir des années 1970s, la CJUE a pris une position sur le droit communautaire et règles de nature constitutionnelle : ð CJCE, 1970, Internationale Handelgesellschaft : règles de nature constitutionnelle ne peuvent faire échec à l’application des règles de droit communautaire => affirmation fortement critiquée par souverainistes Aujourd’hui, les cas de confrontation sont multiples et portent tout particulièrement sur les droits fondamentaux : ð Primauté sur règles constitutionnelles : o Interdiction de toute limitation de l’office du juge national § CJCE, 1978, Simmenthal : la CJUE habilite le juge à faire tout ce qui est nécessaire => ne plus respecter les exigences constitutionnelles § CJUE, 2021, Roumaine : le juge national amené a1 ne pas appliquer une règle constitutionnelle qui l’empêche d’exercer ses pleins pouvoirs § CJUE, 2010, Melki : pas de priorité pour les questions prioritaires de constitutionnalité, la question préjudicielle prévaut o Prérogatives des juridictions nationales ð Primauté du droit de l’UE sur des règles qui visent à écarter les références aux droits fondamentaux nationaux o Internationale Handelgesellschaft : le droit communautaire qui protège les droits fondamentaux ne peut pas être écarté o CJUE, 2013, Melloni : la primauté du droit de l’UE ne peut pas être remise en cause par l’invocation d’une règle de nature constitutionnelle opposée par un État membre parce que ce serait remettre en cause la logique même du mandat d’arrêt européen => règles constitutionnelles mise au 2ème plan ð Primauté de l’UE peut être atténuée par certaines règles constitutionnelles d’ordre matériel (ne se rapportent pas purement et simplement aux droits fondamentaux) o CJUE, 2010, Sayn-Wittgenstein : dans quelle mesure une entrave à une liberté peut-elle être justifiée ? Si motif d’ordre public. Exigence de respect de l’identité nationale d’un État membre (art. 4 TUE) o CJUE, 2022, Boriss : une entrave du droit d’établissement mais entrave susceptible d’être justifiée pour tenir compte d’une exigence parce ça se rapporte à l’identité des États membres tel que consacré à l’art. 4 TUE => exigence constitutionnelle de nature à justifier l’entrave § Respect du principe de proportionnalité b. La diversité des autorités concernées Diversité totale => la primauté doit être appliquée par toutes les autorités des États membres : politiques, administratives + entreprises dans les litiges contre les entreprises ou contre les particuliers ð Simmenthal : la CJUE habilite des juridictions nationales à faire respecter le principe de primauté quoi qu’il arrive, sans avoir à attendre l’élimination de la loi par son auteur => le juge national doit être en mesure d’appliquer la règle du droit de l’UE et de laisser inappliquée toute règle nationale qu’il considèrerait comme contraire au droit de l’UE, c’est dans son office o CJUE, 2010, Elchinov o CJUE, 2013, Krizan B. Les réactions des juridictions nationales Art. 55 de la Constitution française : hiérarchie des textes français et des textes internationaux => article par toujours appliqué d’une manière rigoureuse et effective. VII. Le renvoi préjudiciel Le renvoi préjudiciel met en place un système de coopération juridictionnelle. C’est un rapport juge-juge : le juge national saisit la CJUE pour être éclairé sur des questions. Le renvoi préjudiciel a été mis en place de manière restreint par la CECA, puis de manière plus étendue par les Traités de Rome 1957 : ð Appréciation de la validité des actes de l’institution lorsque ceux-ci sont remis en cause mais aussi sur l’interprétation des traités et des actes des institutions ð Interprétation des sources du droit communautaire Le renvoi préjudiciel permet à la CJUE de résoudre des problèmes de première ampleur, c’est une réussite majeure. Les libertés de circulation, droits fondamentaux, politiques communes ont tous été éclairées par la CJUE grâce au renvoi préjudiciel. Le renvoi préjudiciel est prévu expressément par les traités constitutifs : art. 19 §3 TUE et art. 267 TFUE ð Procédure non contentieuse, donc pas de « recours préjudiciel » ð Consiste à obtenir une interprétation ou appréciation En vertu d’art. 267 TFUE : La CJUE est compétente pour statuer sur les demandes de renvoi préjudiciel A. L’objet du renvoi préjudiciel Art. 267 TFUE : Interprétation du droit primaire (traités) = pas de possibilité d’invalider le droit primaire Validité et interprétation du droit dérivé (actes des institutions, organes ou organisations de l’UE) Les deux objets ont des finalités différentes. a. Interprétation du droit de l’UE Interprétation au sens large des dispositions suivantes dans art. 267 §1(a) TFUE : Protocoles et déclarations annexés aux traités Actes d’adhésion à l’UE conduisent à modifier les traités constitutifs La Charte (en vertu d’art. 6 TUE) – CJUE, 2013, Fransson, C-617/10 Art. 24 TUE et art. 275 TFUE: exclusion de toute compétence de la CJUE pour statuer sur l’interprétation de la PESC, MAIS art. 40 TUE qui rapporte sur le chevauchement de la PESC sur les politiques classiques est susceptible d’interprétation. Interprétation du droit dérivé disposé par l’art. 267 §1(b) TFUE : Actes obligatoires ou non La jurisprudence révèle qu’il y a des autres sources : la jurisprudence donne lieu à des demandes d’interprétation car elle est une accumulation, une agrégation d’arrêts rendus par la CJUE => la CJUE peut interpréter ses propres arrêts et les PGD sont susceptibles de demandes d’interprétation. Les accords internationaux conclus par l’UE sont considérés comme sources du droit de l’UE par agrégation : CJCE, 1974, Haegeman : CJUE saisie par Allemagne et Pays-Bas pour interpréter l’accord entre le CEE et la Grèce. Mais les accords liant plusieurs États membres ne relèvent pas du champ d’application de l’interprétation de la CJUE L’interprétation du droit national ne relève pas de la compétence de la CJUE. b. Appréciation de validité des actes des institutions, organes et organismes de l’UE Validation : appréciation de la conformité d’un acte qui est pris en vertu d’une norme supérieure, interprétation consistait seulement à donner du sens à une disposition Principe : toute sorte d’acte, qu’il soit d’effet direct ou non Exception : exclusion de validité des actes PESC (art. 275 §1 TFUE) Exception à l’exception : décision qui prévoit des mesures restrictives à l’encontre des personnes physiques ou morales dans le cadre de la PESC (art. 275 §2 TFUE) Exemples : CJUE, 2017, Rosenef CJCE, 1986, Wunsche : CJUE ne peut pas être interrogée sur la validité d’un arrêt de la CJUE Les accords internationaux conclus par l’UE avec les tiers : au fond, forme d’acte d’une institution mais peut-on aller jusqu’à remettre en cause la validité de ces accords internationaux ? CJUE, 2018, Western Sahara occidental : accord de pêche entre l’Espagne et le Maroc, le Royaume Uni interroge la CJUE sur la validité de cet accord. o Conclusion : CJUE compétente pour l’appréciation de validité des accords internationaux, mais dans ce cas une interprétation du validité d’accord n’est pas nécessaire La volonté souveraine des États membres ne peut pas être remise en cause dans l’appréciation de validité, ex. CJUE, 2012, Pringle B. Les conditions de la saisine a. Les conditions relatives à l’organe de saisine et au litige Art. 267 fait référence aux « juridictions nationales » lorsque ces juridictions sont saisies d’une affaire pendante, elles peuvent renvoyer devant la CJUE. 2 conditions : ð Juridiction nationale : l’organe saisi d’un litige doit être qualifié comme juridiction o Critères uniformes : CJCE, 1966, Vaassen-Goebbels § Origine légale de l’organe § Caractère obligatoire de sa juridiction § Permanence § Principe du contradictoire (pas un critère absolu) § Application des règles de droit § Critère ajouté dans CJCE, 1993, Corbiau : indépendance de l’organe Pas de « juge et partie » § + fonction juridictionnelle, pas administrative : CJCE, 1997, Job Center Indices pour fonction administrative : CJUE, 2021, City Rail ð Litige : affaire pendante dont juridiction doit avoir affaire à régler o CJCE, 1980/1981, Foglia v Novello o CJCE, 1995, Leclerc v TF1 et M6 b. Le caractère facultatif ou obligatoire du renvoi Art. 267 §2 – faculté : quand une réponse est nécessaire et pertinente pour trancher le litige, c’est peu importe que la juridiction est supérieure ou constitutionnelle ð Ce pouvoir ne peut pas être remis en cause, la juridiction nationale ne peut pas être censurée seulement parce qu’elle a utilisé le renvoi préjudiciel Art. 267 §3 – obligation : objet des multiples discussions car les juridictions dont décisions ne sont pas susceptibles de recours ont une véritable obligation de renvoi ð CJCE, 1982, CILFIT : 3 critères qui disposent une exemption d’obligation o Théorie d’acte clair : aucun doute possible sur la provision du droit de l’UE o Théorie d’acte éclairée : jurisprudence déjà rendue sur le même sujet o La question n’est pas pertinente o Affirmée dans CJUE, 2021, Consorzio Italiano C. La procédure du renvoi préjudiciel La procédure n’est pas énoncée à l’art. 267 TFUE, donc on doit se référer à des textes plus précis : art. 23 Statuts de la CJUE ð Art. 23 : dans les cas visés à l’art. 267 TFUE, la décision de la juridiction nationale qui suspend la procédure et saisit la CJUE est notifiée à celle-ci à la diligence de cette juridiction nationale. Cette décision est ensuite notifiée par le greffier de la CJUE aux parties en cause, aux États membres et à la Commission, ainsi qu’à l’institution, organe ou organisme auteur d’acte de droit concerné par la question préjudicielle Le renvoi préjudiciel est décidé par la juridiction nationale, qui va notifier sa demande à la CJUE – la demande est déterminée souverainement et pas par les parties au litige (= pas un droit aux justiciables). La demande doit être suffisamment détaillée pour contenir, au-delà même des questions qui sont libellées expressément, une description des faits qui ont donné lieu à un litige, description des prétentions, des parties au litige, du cadre juridique national dans lequel s’insère le litige et la juridiction doit expliquer en quoi le droit de l’UE lui parait applicable pour résoudre le litige. La juridiction nationale envoie la demande, généralement contenue dans ce qu’on appelle une ordonnance, qui est réceptionnée par le greffier de CJUE, qui lui attribue un numéro permettant l’identification de l’affaire. Le greffier soumet cette demande au service de la recherche de la CJUE, qui identifie les problèmes qui pourraient surgir (e.g. compétence de la CJUE, la recevabilité de la demande, etc.). S’il n’y a pas de problème particulier, la demande va partir dans les services de traduction pour être traduite dans les 23 autres langues. Une fois traduite, la demande est notifiée par le greffier à toutes les personnes désignés par l’art. 23 TUE : les parties au principal, le gouvernement de chacun des États membres, la Commission et les institutions à l’origine du texte qui fait l’objet de la question (si texte législatif, demande envoyée au Parlement et au Conseil). Chacun des destinataires dispose d’un délai de 2 mois pour formuler des observations sur un renvoi préjudiciel – cela permet aux parties au principal de s’exprimer pour indiquer l’interprétation qui doit être retenue à leurs yeux. C’est ainsi le prolongement du litige, qui se focalise sur l’interprétation ou l’appréciation de validité. Les observations sont envoyées à la CJUE, qui fait l’objet de traduction. Toute la procédure se fait dans la langue originelle du renvoi préjudiciel, mais le français est la langue de travail. Les observations faites à la CJUE sont étudiées par le Juge Rapporteur, qui fait un rapport préalable (rapport interne à la CJUE), puis le Juge Rapporteur présente l’affaire aux juges lors de réunions générales hebdomadaires. Les juges décident du nombre de juges nécessaires pour l’affaire. Durant cette réunion, l’Avocat Général dit s’il va présenter des conclusions en cas des questions nouvelles (art. 20 §5 Statut de la CJUE). Art. 76 Statut de la CJUE : L’audience n’est pas de droit, ce sont les parties au principal qui, si elles l’estiment nécessaires, font une demande d’audience (doit être convaincante, la simple demande d’audience n’est pas suffisante) pour présenter leurs observations devant la CJUE. Les parties ont 3 semaines après avoir reçu les observations des uns et des autres => la procédure écrite n’est pas contradictoire. Après l’audience, si l’Avocat Général a prévu de rendre des conclusions, on lui demande quand il a prévu de le faire. Le Juge Rapporteur soumet un projet d’arrêt aux autres membres de la formation. Une fois rédigé, l’arrêt est prononcé en audience publique. Cette procédure dure en moyenne entre 15 et 18 mois, donc il y a 2 procédures plus courtes : la procédure préjudicielle d’urgence (PPU), que pour des cas qui se rapportent à l’escape de liberté, de sécurité et de justice (Art. 23 Statut de la CJUE) et la procédure accélérée. D. L’étendue de la compétence de la CJUE La CJUE amenée à s’exprimer sur d’autres points que ceux visés à l’art. 267. Elle s’est déclarée incompétente pour : ð Interpréter le droit national o CJCE, 1999, Phil Collins ð Déterminer les règles procédurales applicables devant le juge national ð Vérifier le titre de compétence de la juridiction nationale o CJCE, 1996, SFEI ð Apprécier la validité du droit national au regard du droit de l’UE => mais CJUE peut dire si la loi nationale est compatible ou non avec les dispositions européennes ð Statuer sur l’interprétation du droit international si cette interprétation n’est pas liée à une question de compatibilité de droit de l’UE avec le droit international => si liée à la question de compatibilité, la CJUE n’interprète pas le sens du droit international La CJUE peut prononcer des ordonnances d’incompétence. E. Effets des arrêts préjudiciels L’arrêt doit être pris en considération. Deux questions qui se posent : ð Quelle est l’autorité des arrêts préjudiciels rendus par la CJUE ? ð Quels sont les effets dans le temps des arrêts préjudiciels ? a. L’autorité des arrêts préjudiciels Quant à la juridiction à l’origine de la demande ; quant aux autorités nationales et les institutions européennes ? i. Autorité à l’égard de la juridiction de l’origine de la demande La juridiction est toujours tenue de respecter les termes de l’arrêt préjudiciel rendu, il est obligatoire tout point à l’égard de la juridiction qui est à l’origine de cet arrêt car c’est elle qui a demandé à la CJUE. La CJUE dit « autorité de la chose jugée des arrêts préjudiciels » pour les arrêts de validité et pourrait même être dit des arrêts d’interprétation. Si l’arrêt n’est pas respecté, la décision prise encourt grief d’illégalité ou d’invalidité. La Cour de cassation a eu l’occasion de casser des arrêts de juridiction inferieure qui n’avaient pas respecté un arrêt préjudiciel. ii. Autorité à l’égard des juridictions autres que celle à l’origine du renvoi Les juridictions ne connaissent pas toujours les arrêts de la CJUE et pourraient dire que le contexte est différent. Arrêts d’interprétation : les autres juridictions doivent tenir compte de la jurisprudence découlant des arrêts préjudiciels et peuvent ainsi s’abstenir de faire un nouveau renvoi préjudiciel lorsque l’arrêt rendu pour une autre juridiction leur parait susceptible d’être pleinement utilisée pour la solution à délivrer. Arrêt de validité : ð Invalidité : toutes les juridictions doivent prendre l’acte de la déclaration prononcée par la CJUE ; elles ne peuvent pas ignorer cette décision d’invalidité, alors même que l’acte n’a pas encore été supprimé ð Validité : la CJUE dit que l’examen de la demande n’a révélé aucun élément de nature à invalider l’acte => examen circonstancié (examen de la validation sur tel ou tel plan, sur tel ou tel moyen donc possible qu’acte soit remis en cause plus tard par un autre moyen) o Les autres juridictions ne sont pas privées de redemander l’examen sur la validité du même acte o Mais en pratique, c’est très rare iii. Autorité à l’égard des autorités nationales et européennes Si invalidité : les institutions vont abroger l’acte et le remplacer. Les autorités nationales doivent prendre en considération les arrêts de la CJUE pour en tirer des conséquences s’agissant du droit national applicable, pareil pour les personnes privées. b. Les effets dans le temps des arrêts préjudiciels Principe : l’effet rétroactif des arrêts préjudiciels rendus par la CJUE : depuis que la règle interprétée dans l’arrêt est en vigueur, donc elle peut produire des conséquences radicales. Exception : Les arrêts d’interprétation de validité limités dans le temps. Ce n’est pas aux législateurs nationaux de limiter, mais seulement à la CJUE. ð CJCE, 1976, Defrenne ð CJCE, 1980, ONIC VIII. Le recours en manquement Les TUE et TFUE attribuent des compétences précises à la CJUE : ð Le contrôle des actions des institutions et organes de l’UE ð Le contrôle des États membres dans l’application du droit de l’UE Chapitre 1 : Les recours contre les États membres La CJUE a compétence pour attribuer des violations du droit de l’UE imputables aux États membres. ð CJUE, 2023, Commission c. Royaume-Uni : le Royaume-Uni n’est plus État membre depuis 2021. Donc la CJUE a imposé une amende forfaitaire car l’affaire a été introduite devant la CJUE avant le Brexit. Art. 258-260 TFUE : constatation du manquement étatique => importance pour les États membres qui font l’objet de telles poursuites et pour tous ceux qui sont vigilants et qui veillent à la bonne application du droit de l’UE. Les États membres ne peuvent pas échapper aux poursuites dès lors qu’elles sont engagées. Le pouvoir de la CJUE est limité ; elle a le pouvoir de constater ou non un manquement à des obligations visées. Le non-indication à la Commission des références se rapportant aux mesures de transposition des directives peut entrainer la CJUE à infliger en vertu d’art. 260 §3 TFUE une amende ou astreinte à l’État membre qui a omis de procéder à cette information. La CJUE n’a pas le pouvoir d’annulation des actes (c’est le pouvoir des juridictions nationales), elle se limite à dire si c’est un manquement ou non. La CJUE n’a pas pouvoir d’ordonner une réparation d’un préjudice. Mais l’arrêt peut être porté à la connaissance de toutes les juridictions nationales en vue de lui faire produire des effets, mais les juges ne sont pas très enclines ; ils disent que ce n’est pas l’autorité de la chose jugée car il n’a pas les mêmes parties. A. La notion de manquement Cette notion n’est pas définie par les articles des traités. a. Les sources et les types d’obligations visées i. Les sources des obligations La CJUE seule a la compétence, le Tribunal ne l’a pas. La quasi-totalité des sources est susceptible de donner lieu à des constatations de manquement : ð Les articles TUE et TFUE d’effet direct ou non : susceptibles d’être visés dans une affaire de manquement o Il faut que l’article ait un caractère obligatoire mais il y en a peu dans la pratique d’articles dénués de cette qualité o 2 exceptions : § Art. 275 TFUE sur la PESC => au regard de l’art. 40 TUE (PESC ne s’immisce pas dans les politiques classiques de l’UE) § Art. 126 §10 TFUE : déficits publics excessifs => politique économique de l’UE, pas de recours possible pour manquement o Charte dans le limite d’art. 51 §1 : mise en œuvre dans les États membres o CJUE, 2019, Commission c. Pologne : référence à l’art. 47 de la Charte avec l’art. 19 §1 TUE o Accords internationaux § CJCE, 1996, Commission c. Allemagne : non-respect par un État membre d’un accord international liant l’UE aux États tiers ii. Les types d’obligations visées ð Obligation d’adapter une législation aux règles du droit de l’UE : faire en sorte que la législation applicable soit conforme à toutes les sources citées au-dessus donc l’État a l’obligation d’abroger un texte contraire au droit de l’UE et de ne pas adopter de nouveaux textes contraires au droit de l’UE o En 2019, la Pologne a modifié sa législation sur les juges, donc une procédure en constatation de manquement a été engagée o Les États membres doivent procéder à une veille constante ð Obligation relative au comportement o Les États membres ne doivent pas développer des pratiques non-conformes au droit de l’UE => il faut une pratique uniformément suivie o CJCE, 1985, Commission c. France : l’administration française acceptait que des produits d’origine français, notamment dans l’administration de la poste et des télécommunication. La Commission a gagné parce que la pratique suivie par l’administration française était non-conforme ð Obligation relative à une abstention : o L’État membre qui n’agit pas et laisse faire o CJCE, 1997, Commission c. France o CJUE, 2018, Commission c. France : les États membres doivent assumer les violations commises par ses juridictions b. La faiblesse des excuses invoquées Les États membres ont multiplié les arguments tendant à montrer qu’ils avaient de bonnes raisons de ne pas respecter le droit de l’UE. ð Excuses de nature politique o États membres dont le Parlement a fait l’objet d’une dissolution => excuse systématiquement rejetée par la CJUE, ex. Commission c. Italie ð Excuses de nature technique o Compte tenu de la complexité d’une matière, ex. droit de l’environnement o Écarté par la CJUE ð Excuse de nature juridique o Caractère complexe de l’aménagement des pouvoirs au sein d’un État membre : juridiquement ce n’est pas l’État mais la collectivité qui est compétente o Pas acceptée par la CJUE car c’est l’État membre qui assume responsabilité de toutes ses collectivités ð Excuses de nature pratique o CJUE, 2019, Commission c. Irlande Parfois, les excuses peuvent être un peu plus valables : ð Urgence à agir à cause d’un risque particulier : la CJUE ne l’accepte pas car ils y existent des procédures dans le droit de l’UE qui permettent de prendre en considération l’urgence ð Réciprocité : si un autre État membre le fait aussi o Invoqué par la France en 1979 : « la guerre des moutons » dans Commission c. France => la CJUE a dit qu’il n’y a pas de réciprocité qui vaille ð Force majeure o 3 critères mais pas satisfaisants § Élément extérieur à l’État membre, ex. tsunami, épidémie, etc. § Élément imprévisible § Élément irrésistible o La Commission n’a pas engagé la responsabilité des États membres pour les violations d’obligations en vertu du droit de l’UE durant la pandémie de COVID B. Les phases successives de la procédure en manquement Art. 258 et 259 TFUE : 2 types de saisines de la CJUE, mais dans aucun cas la CJUE peut être saisie sans une phase administrative préalable. Phases différentes selon les types de requérants visés : ð Commission : art. 258 TFUE => quasi tous les recours en manquement sont fait en saisissant la Commission ð État membre : art. 259 TFUE => seulement une dizaine de fois a. La saisine au titre de l’art. 259 Chacun des États membres peut saisir la CJUE en vue de faire constater un manquement de la part d’un autre État membre. Cela peut être perçu comme agressif, donc les États membres ont fait très peu de recours. 1ère fois : procédure mis en œuvre à la fin des années 70s => CJCE, 1979, Royaume-Uni c. France La procédure nécessite, lorsque l’État membre estime qu’un autre a commis un manquement, une saisine de la Commission, après avoir mis en demeure l’État membre, qui est chargée d’émettre un avis motivé sur le prétendu de manquement relevé. Si la Commission n’émet pas d’avis motivé dans la période de 3 mois parce que l’affaire ne l’intéresse pas ou qu’elle estime que c’est un conflit interétatique => l’État membre qui avait agi peut saisir directement la CJUE. Si la Commission émet un avis motivé et qu’il est notifié à l’État membre défaillant => l’État membre peut s’exécuter et tout rentre dans l’ordre ou il peut ne pas s’exécuter, alors l’État membre qui a initialement constaté le manquement peut saisir directement la CJUE. ð CJUE, 2012, Hongrie c. Slovaquie : o La Slovaquie a-t-elle manqué à ses obligations en empêchant un ressortissant hongrois d’entrer sur le territoire slovaque ? o Non, le Chef d’État a un statut particulier, donc dans cette situation la libre circulation des personnes ne peut pas être revendiqué b. La saisine au titre de l’art. 258 Cette procédure repose pleinement sur la vigilance de la Commission. La Commission examine des situations dans l’ensemble des États membres, veille à ce que les États membres respectent le plus possible le droit de l’UE. Elle peut agir spontanément à la suite d’une enquête ou de plaintes envoyées par des citoyens, entreprises voire des États membres ou des États tiers. La Commission est en mesure d’ouvrir un dialogue avec l’État membre visé => si elle n’est pas convaincue par les réponses apportées par l’ État membre mise en cause, elle émet une lettre de mise en demeure : l’ État membre doit présenter ses observations dans un délai raisonnable (procédure formelle). La Commission, après avoir reçu les observations de l’ État membre mise en cause, elle pourra soit prendre acte de ce que l’ État membre aura observé et mettre fin à la procédure si convaincue, soit émettre un avis motivé. Ensuite, l’ État membre est sommé de se conformer à l’avis motivé dans un délai prescrit par la Commission => le délai doit être raisonnable : ð CJCE, 1984, Commission c. Irlande : un délai de 5 jours est déraisonnable ð CJCE, 1988, Commission c. Belgique : la CJUE déclare manquement irrecevable si le délai est trop court, par ex. 15 jours L’avis doit contenir un exposé cohérent des raisons qui ont amené la Commission a engager une procédure contre l’ État membre. L’effet de l’avis motivé : conclusion de la procédure précontentieuse, de nature à définir l’objet du possible litige porté devant la CJUE durant la phase contentieuse. La Commission est ensuite à même de saisir la CJUE => elle n’est pas tenue de le faire car elle dispose d’un pouvoir discrétionnaire de saisine, alors même qu’il y aurait eu une plainte déposée par un particulier ou un État. Le pouvoir discrétionnaire est réaffirmé par la CJUE lors de recours dirigés contre la Commission lorsqu’elle ne saisit pas la CJUE. Ex. les plaignants ont introduit un recours en carence contre la Commission, mais dans la jurisprudence constante, la CJUE rejette ce type de recours en carence au motif qu’il ne peut y avoir une carence qu’en cas d’obligation, mais ici, il n’y a aucune obligation qui pèse sur la Commission. La Commission saisit la CJUE pour faire constater un manquement : raisons politiques, juridiques, etc. => procédure classique ð Recours notifié par le greffier à l’ État membre en cause ð Langue de procédure est celle de l’ État membre mis en cause ð Une défense peut être envoyé par l’ État membre mis en cause à la CJUE dans un délai de 2 mois ð La défense est notifiée au demandeur pour lui permettre de répliquer ð Si réplique, il y a une duplique => pour respecter le principe du contradictoire ð Une audience est organisée si le manquement mérite d’être discutée ð Si l’affaire soulève des questions nouvelles, les conclusions d’avocat général sont possibles => clôture de la procédure orale et affaire mise en délibéré ð Au terme du délibéré, la CJUE statue en formation sur constatation de manquement : o Rejet du recours de la Commission o Accueillir le recours de la Commission : soit totalement soit partiellement Une procédure accessoire est possible d’être mise en œuvre par la Commission en plus de procédure classique => la procédure accessoire s’inscrit dans le cadre du référé : art. 278 et art. 279 TFUE C. Les effets des arrêts et ordonnances en manquement La CJUE rend un arrêt de constatation de manquement ou qu’elle prend, par l’intermédiaire de son juge des référés, une ordonnance => conséquences (art. 260 §1 TFUE). L’État membre qui a manqué à ses obligations telles que rappelés par la CJUE est tenu de prendre les mesures que comporte ‘exécution de l’arrêt de la CJUE => pas de délai fixé mais délai raisonnable. L’État membre doit immédiatement s’organiser, entreprendre ce qui est nécessaire pour se conformer aux obligations. ð Toutes les autorités (législatives, exécutives, juridictionnelles) doivent se conformer à la constatation de manquement Multiples cas (environ 10% des arrêts) de non-exécution : ð Avant : la Commission formait un nouveau recours en constatation de manquement pour non-respect de ses propres arrêts ð Maastricht 1992 : art 260 §3 TFUE => en cas de non-respect, l’État membre encourt une sanction financière, une amende forfaitaire ou une astreinte par jour ou semaine de retard : o CJCE, 2000, Commission c. Grèce : la CJUE a condamné la Grèce au motif qu’elle n’avait rien fait pour mettre fin à décharge à ciel ouvert => 20.000 EUR/jour de retard o CJCE, 2005, Commission c. France : inexécution par la France d’un arrêt de 1991 => astreinte de 316.500 EUR/jour de retard + amende forfaitaire : cumul des sanctions alors que traité donne une alternative § La CJUE avait une interprétation finaliste : l’amende et l’astreinte ont deux finalités différentes : Amende : tenir compte d’un manquement qui a produit des conséquences Astreinte : faire en sorte que le manquement cesse Il est possible qu’il y ait une procédure accessoire à la procédure principale quand il y a une urgence : la Commission engage la procédure en référé contre un État membre, ex. Commission c. Pologne : ð Juillet 2017 : référé par voie du VP de la CJUE : arrêt coupe forêt mais la Pologne a continué son comportement ð La Commission a demandé de tenir compte de l’inexécution de l’ordonnance de référé de 2017 ð La Grande Chambre de la CJUE a statué en référé du 20 novembre 2017 : l’ordonnance était prise en juillet mais pas respectée, donc la Pologne dispose d’un délai de 15 jours pour cesser les coupes, sinon elle sera condamnée à une astreinte de 100.000 EUR par jour de retard ð La Pologne a arrêté dans les 15 jours du délai ð LA CJUE utilise le mécanisme d’art. 260 §2 (l’astreinte) dans le cadre d’une procédure de référé Les États membres doivent jouer le jeu de la discipline, sinon ils se mettent au banc de l’UE.

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