Nosferatu et l'Expressionnisme Allemand (1) PDF
Document Details
Uploaded by Deleted User
Université de Lille
Tags
Related
Summary
Ce document analyse des œuvres filmiques, notamment le cinéma muet, avec une focalisation sur l'expressionnisme allemand. Il aborde les différents aspects de cette période cinématographique, incluant notamment l'utilisation de la musique, les intertitres et l'évolution du cinéma vers le son. L'analyse se base sur des extraits de diverses sources académiques.
Full Transcript
BCC2.4 - ANALYSE D'ŒUVRES FILMIQUES Analyse d’œuvres filmiques (cinéma muet) M. BARBIER LICENCE 2 - ANNÉE UNIVERSITAIRE 2024-2025 [email protected] Nosferatu et Caligari ou l’ombre de l’Expressionnisme allemand...
BCC2.4 - ANALYSE D'ŒUVRES FILMIQUES Analyse d’œuvres filmiques (cinéma muet) M. BARBIER LICENCE 2 - ANNÉE UNIVERSITAIRE 2024-2025 [email protected] Nosferatu et Caligari ou l’ombre de l’Expressionnisme allemand 1 L'Ombre du vampire de E. Elias Merhige (2000) (Des) réalisateurs ont compris l’utilité de la musique sur un plateau. Le grincement des caméras ou le bruit des plateaux voisins, que l’on installait ou démontait, était dérangeant pour tout le monde et pouvait paralyser des acteurs sensibles. La musique aidait à couvrir tout ce bruit mais créait aussi une atmosphère favorable. Bientôt, pratiquement tous les studios eurent un petit orchestre composé souvent d’un violon et d’un orgue portatif pour les tournages en intérieur comme en extérieur. La Parade est passée... de Kevin Brownlow, Paris : Actes Sud, 2011. 2 Puis, soudain, le parlant est arrivé. Tout est devenu silencieux. La caméra était enfermée dans une cabine insonorisée et tout le monde se tenait sans bruit jusqu’à la fin de la prise. Dans ce silence complet, nous étions complétement perdus. Il nous a fallu du temps pour nous y habituer. La Parade est passée... de Kevin Brownlow, Paris : Actes Sud, 2011. Les spectateurs du muet étaient excellents pour la lecture labiale et se plaignaient souvent, à la caisse, que les cow-boys juraient furieusement en essayant de monter sur leurs chevaux. Louise Brooks repris in La Parade est passée... de Kevin Brownlow, Paris : Actes Sud, 2011. La lecture sur les lèvres devint obligatoire pour apprécier complètement What Price Glory ? (Au service de la Gloire, Raoul Walsh, 1926), Beau Geste (Beau Geste, Herbert Brenon, 1926), Old Ironsides (Vaincre ou mourir, James Cruze, 1926) et Sadie Thompson (Faiblesse Humaine, Raoul Walsh, 1928). 3 Le langage des acteurs (…) était trop cru pour les intertitres. Dans Sadie Thompson, Gloria Swanson avait réussi à surmonter tous les problèmes de censure. Elle offrait un portrait réaliste de la jeune femme, en intercalant des intertitres discrets entre des répliques silencieuses authentiquement anglo-saxonne mais torrides pour ceux qui lisaient sur les lèvres. Ce nouveau sport était connu sous le nom du « gros mot mystère ». La Parade est passée... de Kevin Brownlow, Paris : Actes Sud, 2011. Telepolis de Esteban Sapir (2007) Les personnages du cinéma sourd parlaient donc, et parfois même plus que ne le feraient ceux du cinéma sonore, car il s’agissait alors de rendre visible l’activité de parole. Le caractère gesticulé, pour certains spectateurs modernes des tout premiers films de fiction, entre 1910 et 1915 environ, n ’a pas d ’autre raison. Plus que de traduire en gestes codés, mimés, le contenu du discours (cela, un bonimenteur présent dans la salle, et plus tard les cartons, insérés dans la continuité, pouvaient s’en charger), il s’agit de manifester par tout le corps qu ’on parle. Un Art Sonore, le Cinéma. Histoire, Esthétique, Poétique de Michel Chion, Paris : Cahiers du Cinéma, 2010. 4 College Chums d'Edwin S. Porter et J. Searle Dawley (1907) The Chamber Mystery d'Abraham S. Schomer (1920) Le Cabinet du Docteur Caligari de Robert Wiene (1920) L’intertitre, fragment d’écriture, appelle une lecture diamétralement opposée à celle de l’image. Chaque spectateur est amené à proférer mentalement ce qu’il lit. C’est ce que confirment les cinéastes soviétiques Alexandre Dovjenko et Vsevolod Poudovkine : 5 « Chaque spectateur lisait les sous-titres à sa manière, en mettant dans cette lecture ses intonations personnelles. Chacun (je voudrais le penser), lisant le sous-titre à sa manière, participait en somme à la réalisation du film. » « Dans le muet, la parole était réduite aux intertitres et c’est le spectateur qui lui conférait l’'intonation juste. Le muet révélait avec une clarté surprenante et inconnue du théâtre, la vie intérieure du personnage, montrant le lieu même de la parole au moment où elle naissait. » Le Cinéma Muet de Michel Marie, Paris : Cahiers du Cinéma, 2005. (…) parfois il s’essaie à évoquer le son de la parole, l’accent pittoresque ou laborieux d’un personnage. (…) il peut contenir de l’ « oral » et du sonore. « Qui parle ? Qui est Muet ? (sur les effets d'"oralité" dans les inter-titres de certains films muets) » de Michel Chion in Positif, N°667 Septembre 2010. 6 7 L'Aurore (Sunrise) de Friedrich Wilhelm Murnau (1927) Dans Sunrise, Lorsque Janet Gaynor, encore effrayée d’avoir compris que son mari voulait la tuer, et George O ’Brien, qui veut la rassurer et la reconquérir, rentrent dans un temple où ont lieu des noces, le pasteur qui unit un jeune couple demande au marié : « Wilt thou LOVE her ». Les capitales ne veulent pas dire nécessairement que le prêtre prononce plus fort le mot « LOVE », elles suggèrent plutôt que celui-ci fait mal au héros et lui rappelle sa faute. « Qui parle ? Qui est Muet ? (sur les effets d'"oralité" dans les inter-titres de certains films muets) » de Michel Chion in Positif, N°667 Septembre 2010. L’impact sur nous des mots que nous entendons n’est pas en effet lié à l’intonation, mais au contenu. Le muet ici montre le mot tel qu’on l’entend. « Qui parle ? Qui est Muet ? (sur les effets d'"oralité" dans les inter-titres de certains films muets) » de Michel Chion in Positif, N°667 Septembre 2010. Précisément, exprimer le mot tel qu’on l’entend - n’est- ce pas aussi important que le mot tel qu’on le prononce - sera un des grands problèmes pour le cinéma parlant, tout comme évoquer concrètement la subjectivité auditive (la surdité de Beeethoven), tout simplement parce que le dialogue parlé - je dis bien parlé, par opposition au dialogue chanté de l’opéra ou déclamé du théâtre en vers -, parlé et entendu, renvoie à une objectivité et rive le texte à une identité vocale, à un sexe, à un ton particulier. Le cinéma muet, même avec les signes d’oralité : tiret, guillemets, etc. détache le texte de la voix qui le prononce. « Qui parle ? Qui est Muet ? (sur les effets d'"oralité" dans les inter-titres de certains films muets) » de Michel Chion in Positif, N°667 Septembre 2010. 8 Extrait de Chantage de Alfred Hitchcock (1929) 9 I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne Die Brücke – Stimmung Le Cri d’Edvard Munch (1893) A. Contexte Historique Jean-Michel Palmier – République de Weimar À la question consacrée : qu’est-ce donc véritablement que l’expressionnisme, ma réponse est la suivante (…) : l’expressionnisme n’est pas un genre artistique mais l’expression d’une crise mondiale. Rudolf Kurtz dans une lettre du 23 mars 1958 adressée à Lotte Eisner et reprise in Le Cinéma expressionniste. De Caligari à Tim Burton de Jacques Aumont et Bernard Benoliel (dir.), Rennes : PUR, 2009. 10 I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne A. Contexte Historique B. Définition et caractéristiques de l’Expressionnisme Dresde – Ernst Ludwig Kirchner – Emil Nolde – Otto Mueller L’Expressionnisme est un art qui donne forme à une expérience vécue au plus profond de soi-même. L’imitation ne peut jamais être de l’art. Ce que peint le peintre, c’est ce qu’il regarde en ses sens les plus intimes, l’expression de son être ; ce que l’extérieur imprime en lui, il l’exprime de l’intérieur. Il porte ses visions, ses vues intérieures et il est porté par elle (…). L'expressionnisme n'est pas un style ou un mouvement, c'est une Weltanschauung (perception du monde). Propos tenus par Herwarth Walden, le directeur de la revue « porte parole » de l’Expressionnisme : Der Sturm, en 1913. Propos repris par Laurent Mannoni et Marianne de Fleury in Le cinéma expressionniste allemand : Splendeurs d'une collection de Laurent Mannoni et Marianne de Fleury (dir.), Paris : Éditions de la Martinière, 2006. André Chamson Le Littré définit l’expressionnisme comme la sueur par expression, et qui se dit des gouttes de sueur qui se montrent sur la face de ceux qui souffrent une angoisse extrême (...). « Edvard Munch et l'expressionnisme » d’André Chamson in Obliques, Numéro 6-7, 1976. Le peintre expressionniste devient le créateur d’un art de l’inquiétude, du malaise, de la névrose, de la menace apocalyptique (…). L’expressionniste préférera systématiquement le rêve au réel, la vision à l’observation, l’émotion la plus violente, la plus primitive à l’intellect, le déchirement à l’harmonie, l’idée et l’abstraction à la construction, le sujet à l’objet, l’intuition à la perception. L’Expressionnisme et les Arts de Jean-Michel Palmier, Paris : Payot, 1979. 11 I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne A. Contexte Historique B. Définition et caractéristiques de l’Expressionnisme * L’Expressionnisme pictural Ernst Ludwig Kirchner – Jakob Steinhardt Scène de rue (à Berlin) d’Ernst Ludwig Kirchner (1913) La Ville de Jakob Steinhardt (1913) I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne A. Contexte Historique B. Définition et caractéristiques de l’Expressionnisme * L’Expressionnisme pictural * Théâtre et scène expressionniste August Strindberg – Ich-Drama – Ernst Toller – Die Wandlung – Max Reinhardt 12 Deutsches Theater – Kammerspiele Le chemin de Damas d’August Strindberg mis en scène par Per Lindberg (1926) 13 I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne A. Contexte Historique B. Définition et caractéristiques de l’Expressionnisme C. Naissance du cinéma allemand L'histoire du cinéma allemand se confond avec celle du siècle. Le cinéma est devenu l'histoire même de l'Allemagne, il en a été́ partie prenante et l'a modelée, opinion et vision. Les ruptures y sont plus visibles qu'ailleurs. (…). On ne voit pas les massacres des spartakistes dans des actualités, mais dans Madame Du Barry, de Lubitsch (1919), l'incendie du Testament du Dr Mabuse (Lang 1933) est en avance sur celui du Reichstag. Entre ces deux dates, il a changé́ de manière durable l'horizon des possibles (…). Le Cinéma Allemand de Bernard Eisenschitz, Paris : Armand Colin, 2004. Erich Ludendorff – Bild und Filmamt (BUFA) – UFA (Universum Film-Aktien Gesellschaft) – Konzern – Erich Pommer – Kammerspiel - Siegfried Kracauer Rudolf Kurtz - Lotte Eisner 14 Je suis persuadé que par une analyse de films allemands, on peut parvenir aux dispositions psychologiques profondes qui prédominaient en Allemagne de 1918 à 1933 - des dispositions qui ont alors influencé le cours des événements et avec lesquelles il faudra compter dans l’ère post-hitlérienne. De Caligari à Hitler, une histoire psychologique du cinéma allemand de Siegfried Kracauer, Lausanne : L’Âge d’Homme, 1973. Ces films (expressionnistes) traduisent les principales composantes de la mentalité allemande de l’époque sur laquelle Hitler s’appuiera pour installer le fascisme dans la décennie suivante. Ces films sont ceux d’un peuple humilié par la défaite, déçu par la démocratie parlementaire et la faillite des croyances historiques, désorienté par les difficultés économiques comme par les troubles extrémistes et dans l’attente d’un « sauveur » susceptible de remettre de l’ordre afin de faire refleurir la « Grande Allemagne ». Vus sous cet angle, les docteurs Caligari et Mabuse acquièrent une troublante présence, non pour assimiler ces figures emblématiques à celle du Führer, mais pour fixer la dynamique de films traduisant aspiration à l’autorité, démission du groupe face au chef, soif de pouvoir, fascination des masses, volonté de fondre dans l’ensemble, arrivisme sans morale. « Histoire du Cinéma » de René Prédal in Ciném’Action, N°73, 4e Trimestre 1994. 15 Le Vampire de Jean Painlevé (1945) Nosferatu ou l’ombre de l’Expressionnisme allemand I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme A. Un Cinéma Germanique 16 (…) une image naît forcément dans un contexte historique et psychologique précis. L’Écran démoniaque déborde d’explications psychologiques. Les Allemands, d’un romantisme noir, vivent retranchés dans un monde d’illusion. L’expressionnisme, par exemple, est la rencontre entre leur besoin d’échapper au quotidien, l’angoisse engendrée par la crise économique, et ce désir, typiquement germanique, de donner aux choses une valeur d’abstraction, un symbolisme métaphysique. « Kurtz et Eisner : deux regards sur l’expressionnisme » de Laurent Mannoni in Le Cinéma expressionniste. De Caligari à Tim Burton de Jacques Aumont et Bernard Benoliel (dir.), Rennes : PUR, 2009. La prédisposition au style expressionniste semble être plus qu’évidente pour le peuple allemand, obsédé́ depuis toujours par les effluves du mysticisme et de la magie. Ce style explosif, nerveux et angoissé – où, dans les arts plastiques, des surfaces entassées se révoltent, des contours irréguliers se brisent, des volumes se gonflent exagérément, des angles s’entrecoupent, des lignes se contorsionnent et tourbillonnent (…) – ce style a dû plaire à ce peuple des sombres Märchen, des légendes féroces, à ce romantisme expirant qui, encore dans les contes de Hoffmann et les romans de Jean Paul, faisait tournoyer des bourgeois respectables mais démoniaques dans des corridors mal éclairés ou sur des escaliers louches où guettaient la folie et la terreur. L'Écran démoniaque : Influence de Max Reinhardt et de l'expressionnisme (Panorama du film allemand) de Lotte H. Eisner, Paris : André Bonne éditeur, 1952. L’image de cinéma doit devenir une œuvre graphique. Les films doivent être des peintures éveillées à la vie, il faut que les images deviennent des gravures. Hermann Warm repris in Le cinéma expressionniste allemand : Splendeurs d'une collection de Laurent Mannoni et Marianne de Fleury (dir.), Paris : Éditions de la Martinière, 2006. 17 I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme A. Un Cinéma Germanique B. Le Cabinet du Docteur Caligari : un film manifeste ? Essai de typologie du cinéma expressionniste Hans Janowitz – Carl Mayer – Hermann Warm – Walter Röhrig – Walter Reimann Le Cabinet du Docteur Caligari de Robert Wiene (1920) 18 Univers discordant, opposition des ombres et lumières, lignes, violentes taches blanches et noires ; toutes les règles de la perspective sont abolies. (…). Du cinéma expressionniste (…), on pourrait dire, à première vue, que celui-ci a trouvé en Caligari son symbole, avec ses décors tordus, ses fausses perceptives, ses ombres dépravées, le jeu outrancier de ses acteurs (…). Le cinéma expressionniste allemand : Splendeurs d'une collection de Laurent Mannoni et Marianne de Fleury (dir.), Paris Éditions de la Martinière, 2006. Le film expressionniste est l'aboutissement d'un effort homogène de composition qui s'attache de façon uniforme à toutes les composantes de l'œuvre filmique sans exception et les remodèle en fonction de sa logique propre. Expressionnisme et Cinéma de Rudolph Kurtz, Grenoble : Presses universitaires de Grenoble, 1987. Monde de Caligari avant et après la révélation finale Ici les décors ne stylisent plus. Ils créent un univers discordant qui accuse le déséquilibre mental du héros : les rues contrefaites, les maisons de travers, les ombres et les lumières, qui s'opposent en de violentes taches blanches et noires peintes à même le décor, participent de la ligne brisée. (…). On voit quels sont les buts de l'expressionnisme : traduire symboliquement, par les lignes, les formes ou les volumes, la mentalité des personnages, leur état d'âme, leur intentionnalité aussi, de telle façon que le décor apparaisse comme la traduction plastique de leur drame. Esthétique et psychologie du cinéma de Jean Mitry, « Tome 1 », Paris : Éditions Universitaires, 1963. 19 Dessin d’Hermann Warm pour Caligari (1920) Le Cabinet du Docteur Caligari de Robert Wiene (1920) (…) lorsque nous sommes animés d’une forte impulsion intérieure que nous ne pouvons extérioriser autrement que sur le papier, les griffonnages prennent une toute autre figure que la ligne arrondie. Le crayon court avec violence et au lieu de courbes belles et organiques, c’est une ligne rigide, anguleuse, toujours interrompue, fortement expressive, qui apparaîtra. Abstraction et Einfühlung, Contribution à la psychologie du style de Wilhelm Worringer, Paris : Klincksieck, 2003. Dessin d’Hermann Warm pour Caligari (1920 ) Le Cabinet du Docteur Caligari de Robert Wiene (1920) 20 C’est dans la vision d’un cachot où les traits noirs des angles et des arêtes se contractent vers le haut que l’extrême abstraction et la totale déformation du décor de Caligari atteignent leur apogée. L’effet d’oppression est accru par le prolongement de ces traits vers le sol, dirigeant leurs flèches dans la direction de l’en- droit où se trouve accroupi le prisonnier chargé de chaînes. Dans cet enfer, le losange décalé d’une fenêtre hors d’atteinte semble une dérision. Les décorateurs de Caligari ont réussi à rendre l’idée de la geôle dans l’absolu, dans son expression la plus expressive. L'Écran démoniaque : Influence de Max Reinhardt et de l'expressionnisme (Panorama du film allemand) de Lotte H. Eisner, Paris : André Bonne éditeur, 1952. Conrad Veidt - Werner Krauss Le Cabinet du Docteur Caligari de Robert Wiene (1920) L'Homme expressionniste semble porter son cœur sur sa poitrine. Kasimir Edschmid repris in Le cinéma expressionniste allemand : Splendeurs d'une collection de Laurent Mannoni et Marianne de Fleury (dir.), Paris : Éditions de la Martinière, 2006. 21 Le Cabinet du Docteur Caligari de Robert Wiene (1920) Des plafonds bas et des corridors étroits forcent le corps à se courber brusquement. L'Écran démoniaque : Influence de Max Reinhardt et de l'expressionnisme (Panorama du film allemand) de Lotte H. Eisner, Paris : André Bonne éditeur, 1952. Conrad Veidt - Werner Krauss - Laurent Mannoni Caligari est le premier pas vers une faute plus grave (que le théâtre photographié) qui consiste à photographier platement des décors excentriques, au lieu d’obtenir les surprises par l’appareil de prise de vue. Jean Cocteau repris in Le cinéma expressionniste allemand : Splendeurs d'une collection de Laurent Mannoni et Marianne de Fleury (dir.), Paris : Éditions de la Martinière, 2006. 22 II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme A. Un Cinéma Germanique B. Le Cabinet du Docteur Caligari : un film manifeste ? Essai de typologie du cinéma expressionniste * Le Caligarisme Genuine de Robert Wiene (1920) Fedor Mikhaïlovitch Dostoïevski – Andrei Andreiev 23 Raskolnikov de Robert Wiene (1922) Henrik Galeen – Conrad Veidt – Emil Jannings – Werner Krauss Le Cabinet des Figures de Cire de Paul Leni (1924) 24 De l’aube à Minuit de Karl-Heinz Martin (1920) Voici qu’un grand et jeune metteur en scène (…) s’empare du sujet (la pièce originale de Georg Kaiser) et crée avec cela, entouré des meilleurs peintres de sa ville, le premier film expressionniste cubiste : c’est-à-dire, tous les paysages, tous les objets démesurément agrandis ou rapetissés, selon l’idée de la scène : le tout vu avec les yeux du caissier halluciné, des guichets de banque chancelants, des rues de travers, des hommes qui crient tous comme des fous : tout l’âme du héros répétée et transposée dans les choses, dans les formes, dans l’atmosphère intérieure du film. Ivan Goll repris in Le cinéma expressionniste allemand : Splendeurs d'une collection de Laurent Mannoni et Marianne de Fleury (dir.), Paris : Éditions de la Martinière, 2006. De l’aube à Minuit de Karl-Heinz Martin (1920) 25 De l’aube à Minuit de Karl-Heinz Martin (1920) 26 Le Coeur Révélateur (The Tell-Tale Heart) de Leon Shamroy et Charles Klein (1928) 27 I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme A. Un Cinéma Germanique B. Le Cabinet du Docteur Caligari : un film manifeste ? Essai de typologie du cinéma expressionniste * Le Caligarisme * L’Écran démoniaque (de Lotte Eisner) On pourrait dire que cette deuxième forme d’expressionnisme offre une synthèse entre ce courant d’avant-garde et les peintures romantiques de Friedrich et Füssli, la littérature fantastique de Goethe, (…), Hoffmann, le clair-obscur de Max Reinhardt, la psychologie allemande, volontiers morbide, son attirance vers les fondements même de l’être. Lotte Eisner, plutôt que de parler d’expressionnisme pour définir cette nouvelle esthétique, a préféré parler (…) d’« Écran démoniaque ». « Les films doivent être des dessins doués de vie » de Laurent Mannoni et Marianne de Fleury in Le cinéma expressionniste allemand. Splendeur d’une collection, Paris : Édition de la Martinière, 2006. Le Cauchemar de Johann Heinrich Füssli (1781) 28 Le Voyageur contemplant une mer de nuages Dessin de Walter Röhrig pour Faust de Murnau (1926) de Caspar David Friedrich (1818) II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme A. Un Cinéma Germanique B. Le Cabinet du Docteur Caligari : un film manifeste ? Essai de typologie du cinéma expressionniste * Le Caligarisme * L’Écran démoniaque (de Lotte Eisner) ->L’Expressionnisme Légendaire et Démoniaque Karl Freund 29 Le Golem de Paul Wegener (1920) Faust, une légende allemande de Friedrich Wilhelm Murnau (1926) 30 II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme A. Un Cinéma Germanique B. Le Cabinet du Docteur Caligari : un film manifeste ? Essai de typologie du cinéma expressionniste * Le Caligarisme * L’Écran démoniaque (de Lotte Eisner) -> L’Expressionnisme Légendaire et Démoniaque -> L’Expressionnisme Illusionniste Le Montreur d'Ombres d’Arthur Robison (1923) 31 Satire psychanalytique du cinéma, Schatten (Le montreur d’ombres) illustrait, à travers un montreur d’ombres chinoises, le voyeurisme d’une société mondaine dont les frustrations se déchaînaient dans des Spiegelbilder (récit du double) et le « double » se démultipliait à travers le sein et Schein (être/paraître). Histoire du cinéma allemand de Roland Schneider, Paris : Cerf, 1990. Lotte Reiniger – Paul Wegener Les Aventures du Prince Ahmed de Lotte Reiniger (1926) Papageno de Lotte Reiniger (1935) 32 Jacques et le haricot magique de Lotte Reiniger (1965) 33 34 L'Art des silhouettes de Lotte Reiniger de John Isaack (1970) Nuit sur le Mont-Chauve d’Alexandre Alexeieff et Claire Parker 35 Sur Trois Thèmes d'Alexandre Alexeieff et Claire Parker (1980) Le dispositif de l’écran d’épingles II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme A. Un Cinéma Germanique B. Le Cabinet du Docteur Caligari : un film manifeste ? Essai de typologie du cinéma expressionniste * Le Caligarisme * L’Écran démoniaque (de Lotte Eisner) * L’Expressionnisme Abstrait Walter Ruttmann – Hans Richter – Viking Eggeling – Max Bulting 36 Reste un effet étonnant pour l’époque (dans De l’aube à Minuit de Karl-Heinz Martin) : la course des Six-jours, filmée comme le fera plus tard l’« avant-garde ». Anamorphosés, rendus semblables à des facettes miroitantes grâce à la magie des éclairages et grâce à l’emploi (…) de la lentille déformante, des coureurs cyclistes s’élancent, se déforment, pour n’être que le symbole même de la vitesse, dans le tourbillon quasi abstrait de la course. L'Écran démoniaque : Influence de Max Reinhardt et de l'expressionnisme (Panorama du film allemand) de Lotte H. Eisner, Paris : André Bonne éditeur, 1952. Pour Walter Ruttman avec le cinéma, il était sans intérêt de continuer à peindre, la peinture doit s’animer. Repris in Vingt ans de cinéma allemand 1913 – 1933 de Jean-Loup Passek (dir.), Paris : Centre Georges Pompidou, 1976. Les Nibelungen de Fritz Lang (1924). La séquence du rêve a été réalisée par Walter Ruttmann Lichtspeil Opus 1 de Walter Ruttmann (1921) 37 II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme A. Un Cinéma Germanique B. Le Cabinet du Docteur Caligari : un film manifeste ? Essai de typologie du cinéma expressionniste C. Quelques thèmes récurrents du cinéma expressionniste * La Nature Les Nibelungen de Fritz Lang (1924) 38 Blanche-Neige et les Sept Nains de David Hands (1937) II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme A. Un Cinéma Germanique B. Le Cabinet du Docteur Caligari : un film manifeste ? Essai de typologie du cinéma expressionniste C. Quelques thèmes récurrents du cinéma expressionniste * La Nature * La Rue De l’aube à Minuit de Karl-Heinz Martin (1920) Le Cabinet du Docteur Caligari de Robert Wiene (1920) 39 La rue est le lieu de toutes les tentations, de toutes les embûches, de tous les drames. La nuit surtout, avec ses coins déserts où l’on plonge comme dans un abîme, son trafic fulgurant, ses réverbères allumés, ses enseignes lumineuses, ses phares d’autos, son asphalte brillant de pluie, les fenêtres éclairées de ses mystérieuses maisons, le sourire de ses filles aux visages peints, elle représente la solution voluptueuse et fallacieuse pour les pauvres hères, l’envers de leur terne foyer et de leur vie monotone, l’aventure, l’évasion peut- être. « Les rues m’apparaissent comme des files de maisons contrefaites, avec leurs habitants fous... » (Ludwig Tieck). Le cinéma expressionniste allemand. Splendeur d’une collection de Laurent Mannoni et Marianne de Fleury, Paris : Édition de la Martinière, 2006. II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme A. Un Cinéma Germanique B. Le Cabinet du Docteur Caligari : un film manifeste ? Essai de typologie du cinéma expressionniste C. Quelques thèmes récurrents du cinéma expressionniste * La Nature * La Rue * Les Escaliers Le Cabinet du Docteur Caligari de Robert Wiene (1920) 40 Le cinéma expressionniste allemand. Splendeur d’une collection de Laurent Mannoni et Marianne de Fleury, Paris : Édition de la Martinière, 2006. 41 42 I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme III. Nosferatu, le Vampire de Friedrich Wilhelm Murnau Présentation Friedrich Wilhelm Plumpe – Albin Grau - Henrik Galeen 43 44 45 Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau (1922) 46 I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme III. Nosferatu, le Vampire de Friedrich Wilhelm Murnau Présentation A. Frontière(s) du fantastique - Le fantastique expressionniste Roger Caillois Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau (1922) Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau (1922) 47 Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau (1922) 48 Murnau crée l’atmosphère d’épouvante par les mouvements des acteurs vers la caméra : la forme hideuse du vampire avance, avec une lenteur exaspérante, de la profondeur extrême d’un plan vers un autre où il devient soudain gigantesque. Murnau a saisi toute la puissance visuelle qui émane du montage, et il dirige avec une virtuosité véritablement géniale cette gamme de plans, dosant l’avance du vampire en montrant pendant quelques secondes l’effet que sa vue produit sur le jeune homme terrifié. Au lieu de nous présenter graduellement tout le trajet il rompt l’approche par une porte fermée brusquement afin d’arrêter la terrible apparition; et la vue de cette porte derrière laquelle nous savons que le péril nous guette nous tient en haleine. L'Écran démoniaque : Influence de Max Reinhardt et de l'expressionnisme (Panorama du film allemand) de Lotte H. Eisner, Paris : André Bonne éditeur, 1952. 49 Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau (1922) Murnau sait aussi faire valoir la puissance d’un mouvement transversal en l’étendant sur toute la surface de l’écran : c’est le sombre bateau fantôme voguant à pleines voiles sur une mer houleuse en arrivant au port, lourds de menaces; ou encore la silhouette énorme du vampire, filmée en contre-plongée qui traverse lentement le voilier pour atteindre sa proie. Ici l’angle de la caméra lui confère, outre ses proportions gigantesques, une sorte d’obliquité qui le projette hors de l’écran et en fait comme une menace tangible, à trois dimensions. L'Écran démoniaque : Influence de Max Reinhardt et de l'expressionnisme (Panorama du film allemand) de Lotte H. Eisner, Paris : André Bonne éditeur, 1952. I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme III. Nosferatu, le Vampire de Friedrich Wilhelm Murnau Présentation A. Frontière(s) du fantastique - Le fantastique expressionniste - La frontière 50 Le vampire absorbe le sang au détriment de toute autre alimentation. Il est l’être qui a aboli la frontière primordiale qui sépare la vie du néant ; il a aboli une autre frontière, celle qui fait la limite entre l’humain et l’animal ; par conséquent, il est par excellence celui qui n’a pas de forme puisque tout frontière donne une forme. Vie des fantômes. Le fantastique au cinéma de Jean-Louis Leutrat, Paris : Cahiers du Cinéma, 1995. Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau (1922) Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau (1922) 51 Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau (1922) 52 Le premier acte du film se conclut en beauté par l’enchaînement géométrique des arcatures et des voûtes sous lesquelles le comte accueille Hutter avant que ce dernier ne disparaisse, comme englouti par une bouche d’ombre (à la fin du film, inversement, Nosferatu est littéralement effacé par la lumière). Vie des fantômes. Le fantastique au cinéma de Jean-Louis Leutrat, Paris : Cahiers du Cinéma, 1995. A force d’être démultipliée ou mobile, la frontière devient singulièrement floue, contrairement à ce que pourrait laisser croire le fameux carton. Nosferatu brouille toute limite fixe par la répétition des lieux frontaliers. Il arrive un moment où la frontière représente le lieu par excellence (…). D’une certaine manière, le premier acte de Nosferatu en transformant tout espace en frontière dit que partout se trouve la lisière de l’autre monde. Vie des fantômes. Le fantastique au cinéma de Jean-Louis Leutrat, Paris : Cahiers du Cinéma, 1995. Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau (1922) I. Naissance de l’Expressionnisme en Allemagne II. Esthétique du Cinéma Expressionnisme III. Nosferatu, le Vampire de Friedrich Wilhelm Murnau Présentation A. Frontière(s) du fantastique B. La Nature 53 Dracula met […] en relief, comme le récit gothique, la notion de pérégrination et la relation privilégiée des personnages avec les spectacles sublimes offerts par la nature. La Transylvanie offre un cadre spectaculaire pour les aventures de Harker et dramatise le passage du monde familier au monde inconnu. « De l'écrit à l'écran : Dracula, Avatars et Mutations d'une figure Gothique » de Gilles Menegaldo in Sociétés & Représentations, N°20, Vol. 2, 2005. « Il n'y a qu'un pas à faire et on transportera la caméra en plein air. Non plus à la façon de Fritz Lang chez qui ce plein air est savamment composé, mais en cherchant à déceler l'âme d'un paysage tel qu'il se présente à notre vue. Et c'est ainsi que Murnau en 1922, réalise Nosferatu le vampire. Cette fois il s'agit d'une révolution dans l'art expressionniste. Celui-ci jusqu'alors s'était cantonné volontairement dans l'artificiel, seul apte pensait-il, à refléter les sentiments qu'il désirait manifester. Murnau n'hésite pas quant à lui à abandonner le studio, et pourtant il aboutira aux mêmes effets. (…) L'Expressionnisme a su rompre avec le point de vue formel dans lequel l'on prétendait l'enfermer. » Paul Leutrat repris in Murnau de Charles Jameux, Paris : Éditions Universitaires, 1965. Pour déployer cette « symphonie de l'horreur », Murnau joue sur la lumière, les cadrages, le mouvement dans le plan (l'entrée de la proue du navire dans le champ atteint, en douceur, à la représentation de la plus terrible poussée du Destin), et il n'a pas recours aux stéréotypes du fantastique fondés sur les artifices d'un onirisme de pacotille. Pas de fonds peints, pas de reconstruction picturale ou graphique de lieux figurant l'hallucination, la folie, la peur ; il capte, au contraire, l'intrigue au cœur d'un espace quotidien qui, souterrainement, est hanté. Ce monstre n'erre pas dans l'imagerie médiocrement dépaysante du bazar des rêves reconstitués : il se meut parmi de véritables pierres, dans une ville aux maisons habitables ou délabrées par les intempéries, par la pluie, le vent, non par les décorateurs-ensembliers payés par le producteur. Cette confrontation constante de la nature et du vampire issu de craintes ancestrales provoque, dans la profondeur de l'écran, la vibration du surnaturel. Le Cinéma allemand (1918-1933) de Freddy Buache, Rennes : FOMA, 1984. 54 (…) Murnau (…) a montré dans Nosferatu que des éléments empruntés à la réalité d'une ville et surtout à des paysages, à la nature vivante, pouvaient aussi bien créer cette atmosphère particulière, mystérieuse et inquiétante liée à la mort et à un destin insaisissable, à ce qui est étranger et à l'étrangeté. 100 ans de cinéma allemand de Monika Bellan, Paris : Ellipses, 2001. La nature participe au drame : par un montage sensible, l’élan des vagues laisse prévoir l’approche du vampire, l’imminence du destin qui va frapper la ville. Sur tous ces paysages, sombres collines, forêts épaisses, ciels aux nuages déchiquetés qui annoncent la tempête, plane, comme l’indique Balazs, la grande ombre surnaturelle. Le Cinéma allemand (1918-1933) de Freddy Buache, Rennes : FOMA, 1984. Dans un film de Murnau tout plan a sa fonction précise et est entièrement conçu en vue de sa participation à l’action. Si nous n’apercevons qu’un instant le détail en gros plan de voiles gonflées, ce plan est aussi nécessaire à l’action qu’une précédente image : la vue en plongée de flots rapides emportant le radeau chargé de son lugubre fardeau. L'Écran démoniaque : Influence de Max Reinhardt et de l'expressionnisme (Panorama du film allemand) de Lotte H. Eisner, Paris : André Bonne éditeur, 1952. 55 Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau (1922) 56 57 58 L’Abîme (Afgrunden) d'Urban Gad (1910) Theda Bara (1890 – 1955) 59 Mythes et Stars - La Grande Histoire d'Hollywood (Episode 2 – La Naissance d’Hollywood 1907-1920) de Jon Wilkman (2010) 60 61 Conscientes que la présence de vedettes à l’écran est un des éléments centraux qui distinguent leurs films du tout-venant, les nouvelles compagnies vont par la suite consciencieusement s'appuyer sur le star-system. Le premier exemple en est sans aucun doute Theda Bara, née Teodosia Goodman dans l’Ohio. William Fox met sa jeune vedette en scène, lui invente une vie ténébreuse de fille du Nil - son nom serait l'anagramme de Arab Death. Les photos, les articles sont publies avant même que Bara ne tourne son premier film. L'économie du cinéma américain. Histoire d'une industrie culturelle et de ses stratégies de Joël Augros et Kira Kistopanidou, Paris : Armand Colin, 2009. Salomé (1919) et The She Devil (1918) de J. Gordon Edwards 62 Cléopâtre (Cleopatra) de J. Gordon Edwards (1917) Le Péché (Sin) de Herbert Brenon (1915) 63 AGAZI E June 15 Cents In this issue "Mollie of the Begins Her Letters.$!A. Beautiful California Homes of M o-oie Fa-oorites 'Bab:g Pictures of the Stars jf,. Getting It. The Struggle. for Accuracy in Photoplays jf,. Directors The Creators at Work jf,. What Your Fa-oorite Will Do This Summer' Fiction N euJs ,."" Inter-oieuJs Les premiers publicity stills (photographies de plateau) d'acteurs et d'actrices sont distribues à partir de 1910. Le premier fan magazine, Photoplay, apparait en 1913. Pendant ces trois années, des départements de publicité sont crées au sein des studios. En 1913, Universal investit 250 000 dollars dans une campagne de promotion nationale organisée par une agence de publicité à Chicago. En 1915, c'est au tour de Paramount. L'économie du cinéma américain. Histoire d'une industrie culturelle et de ses stratégies de Joël Augros et Kira Kistopanidou, Paris : Armand Colin, 2009. 64 een and Heard at the Movies CoOyrig'ht. 1915 Where."iUions oj people gather daily m.any a."using and interesting things aTe bound to h.appen. We want OUT Teaders to contribute to this page. A prize of $5.00 will. be given for the best story each.nonth, and one dOUaT for every one printed. The stories must not be tonger th.an 100 words and must be written 01< only one side oj the paper. Be sure to put your.ame and address on YOUT contribution. Add.·ess: "Seen and Heard" Dept., Photoplay Magazine, Chicago. Because of the rapid increase in contributions to this department, the editors find it no longer possible to return unavailable manuscripts to the authors. TheTofore it wiU oblige '