Guide Phonologie Maternelle 2021 PDF

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Summary

Ce document est un guide pour l'apprentissage de la lecture et de l'écriture en maternelle. Il explique les concepts de syllabes, phonèmes, graphèmes, et conscience phonologique. Le guide explore des stratégies d'apprentissage implicite et explicite, montrant comment se préparer à la lecture et à l'écriture au CP. Il détaille la progressivité de l'enseignement en fonction du niveau des élèves.

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Un guide fondé sur l’état de la recherche Pour préparer l’apprentissage de la lecture et de l’écriture à l’école maternelle L’écriture de cet ouvrage a été coordonnée par la direction générale de l’enseignement scolaire du ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse. Son élaboration a été...

Un guide fondé sur l’état de la recherche Pour préparer l’apprentissage de la lecture et de l’écriture à l’école maternelle L’écriture de cet ouvrage a été coordonnée par la direction générale de l’enseignement scolaire du ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse. Son élaboration a été assurée par un groupe d’experts. Glossaire La syllabe Unité de la langue qui se prononce en une seule émission de voix. Exemple : « cadeau » = « ca » et « deau ». Le phonème Le phonème est la plus petite unité sonore du langage oral représentée par une lettre ou par un groupe de lettres. Exemple : la lettre f correspond au phonème /f/, qui se prononce « ffff ». Il existe 36 phonèmes qui permettent de prononcer les mots de la langue française. Le graphème Le graphème est une lettre ou un groupe de lettres qui transcrit un phonème. Le principe alphabétique Le principe alphabétique est le système selon lequel les mots écrits sont composés de lettres qui marquent les unités linguistiques, les phonèmes. La conscience phonologique La conscience phonologique est la capacité à percevoir, à découper et à manipuler de façon intentionnelle les unités sonores d’un mot (syllabe, phonème). TABLEAU DES 36 PHONÈMES VOYELLES CONSONNES [i] lit, il, lyre [f] fusée, photo, neuf, feu [U] ours, genou, roue [v] vache, vous, rêve [u] tortue, rue, vêtu [s] serpent, tasse, nation, celui, ça [a] avion, ami, patte [z] zèbre, zéro, maison, rose [A] âne, pas, pâte [H] chat, tâche, schéma [B] ange, sans, vent [j] jupe, gilet, geôle [o] mot, eau, zone, saule [l] lune, lent, sol [O] os, fort, donne, sol [r] robot, rue, venir [I] lion, ton, ombre, bonté [p] pomme, soupe, père [é] école, blé, aller, chez [b] balle, bon, robe [è] aigle, lait, merci, fête [m] mouton, mot, flamme [C] lapin, brin, plein, bain [t] tambour, terre, vite [E] feu, peu, deux [d] dent, dans, aide [F] meuble, peur [n] nuage, animal, nous, tonne [D] parfum, lundi, brun [k] cadeau, cou, qui, sac, képi [e] requin, premier [g] gâteau, bague, gare, gui [G] peigne, agneau, vigne [J] quille, yeux, pied, panier [w] oiseau, oui, fouet [V] puits, huile, lui Sommaire INTRODUCTION 6 Apprendre à lire et à écrire, un enseignement du CP qui se prépare à l’école maternelle 7 La découverte du principe alphabétique 9 Apprentissage implicite, apprentissage explicite CHAPITRES I 11 Développer les habiletés phonologiques 12 De la conscience phonologique vers la conscience phonémique 15 Organisation et modalités de cet enseignement 18 La voix et l’écoute au service du développement de la conscience phonologique 19 Les sons des autres langues 20 Quelle progressivité envisager ? 29 Focus | Évaluation de CP - compétences phonologiques 30 Focus | Évaluation des habiletés phonologiques II 35 De l’oral à l’écrit - vers la découverte du principe alphabétique 36 Pourquoi est-il si important d’apprendre les lettres ? 40 Comment mettre en œuvre cet enseignement ? 48 Focus | Évaluation de la connaissance des lettres 51 Pourquoi et comment faire écrire l’élève en maternelle ? BIBLIOGRAPHIE ET OUTILS DE RÉFÉRENCE 60 Ouvrages 60 Chapitres d’ouvrages 60 Articles de diffusion 61 Outils 61 Bibliographie scientifique 6— Introduction Apprendre à lire et à écrire, un enseignement du CP qui se prépare à l’école maternelle 7— Introduction Dès l’école maternelle, l’élève doit développer des habiletés langagières et cognitives pour entrer efficacement dans l’apprentissage de la lecture et de l’écriture au moment où cet enseignement formel lui sera dispensé au cours préparatoire. Une solide conscience phonologique, la connaissance des lettres et la connaissance du principe alphabétique sont des prédicteurs de la réussite ultérieure en lecture- écriture. Ce guide accorde donc une place centrale à ces sujets ainsi qu’aux essais d’écriture. Pour se préparer à apprendre à lire et à écrire, l’élève doit prendre conscience que le langage qu’il entend est composé d’éléments (mots, syllabes, phonèmes) qui peuvent être isolés (chapitre I). Il découvre que ces éléments sont représentés à l’écrit par des lettres qui lui permettent de percevoir l’importance des marques morphologiques qui ne s’entendent pas à l’oral (chapitre II). Ce cheminement doit prendre sa juste place dans l’ensemble des apprentissages prévus par les programmes de l’école maternelle. La découverte du principe alphabétique Découvrir le principe alphabétique permet de prendre conscience que les graphèmes, à savoir les lettres ou certains groupes de lettres de l’alphabet, représentent des uni- tés sonores, appelées phonèmes. S’il ignore le principe alphabétique, l’élève ne peut pas lire les mots car il ne peut pas faire le lien entre les graphèmes et les phonèmes. Il ne peut pas passer des lettres aux sons. La compréhension du principe alphabétique doit donc nécessairement faire l’objet d’un enseignement systématique, explicite, rigoureux et régulier à la maternelle. Au cours préparatoire, l’apprentissage du décodage phonologique des mots écrits, puis l’automatisation de leur identification permettent d’accéder correctement au sens des phrases et des textes. L’apprentissage de la lecture et de l’écriture démarre bien avant son enseignement formel et trouve son origine dans les habiletés langagières et cognitives développées par les élèves qui possèdent déjà des compétences en littéracie avant d’entrer à l’école élémentaire. 8— Introduction Qu’est-ce que la littéracie ? La littéracie renvoie à l’ensemble des compétences et des comportements liés à la lecture-écriture. Sénéchal et al. distinguent les connaissances procédurales (connaître le nom et le son des lettres, écrire et décoder quelques syllabes, etc.) et les connaissances conceptuelles (ex. : comprendre les fonctions sociales de lire et d’écrire, se percevoir comme non-lecteur ou lecteur, etc.)1. Monique Sénéchal, Jo-Anne LeFevre, Brenda L. Smith-Chant, Karen V. Colton, “On Refining Theoretical Models of Emergent Literacy: The Role of Empirical Evidence”, Journal of School Psychology, 39, pp. 439-460, 2001. De nombreuses études longitudinales montrent que le développement précoce du langage est un prédicteur des performances ultérieures en lecture dans les deux composantes : identification de mots écrits et compréhension. En 1997, le National Institute of Child Health and Human Development et le US Depart- ment of Education ont regroupé un panel d’experts pour examiner l’ensemble des recherches sur l’apprentissage de la lecture et son enseignement. En 2000, les experts de ce panel connu sous le nom de National Reading Panel (NRP, 2000) ont publié un rapport, Teaching Children to Read, mentionnant une liste de cinq compétences en lecture qui doivent nécessairement faire l’objet d’un apprentissage. Ces composantes sont désormais connues sous le terme « Five Big Ideas in Reading Instruction » ou « Les cinq piliers de la lecture ». Les cinq piliers de la lecture Apprentissage systématique et explicite Identification Compréhension mots écrits écrite Conscience phonémique Principe alphabétique Compréhension orale Vocabulaire Fluence 1— Voir Jean Écalle & Annie Magnan, L’Apprentissage de la lecture et ses difficultés, Dunod (2e édition révisée), Paris, 2015. 9— Introduction L’accent mis sur ces cinq grandes compétences ne doit toutefois pas occulter d’autres compétences associées, notamment les habiletés morphologiques (forme des mots), la dénomination rapide (fluence), les acquis de l’élève. Apprentissage implicite, apprentissage explicite Au fil de ses apprentissages, l’élève mémorise et enrichit ses connaissances pho- nologiques, morphologiques et orthographiques qui ne lui sont pas enseignées explicitement. Certes, il n’est pas en capacité de verbaliser les caractéristiques structurales du langage oral et écrit acquises, mais en a déjà assimilé les premiers éléments. C’est pourquoi il est nécessaire d’exposer régulièrement les jeunes élèves à la langue orale et écrite. En entrant à l’école maternelle, l’élève possède des connaissances langagières. Toutefois ces connaissances ne suffisent pas à se préparer à l’apprentissage de la lecture. Il est donc indispensable qu’on lui apprenne les correspondances entre les graphèmes et les phonèmes. Cet enseignement doit être régulier et systématique. « L’enfant peut utiliser très tôt ces connaissances visuo-orthographiques, Élisabeth Demont & phonologiques et morphologiques acquises implicitement pour reconnaître Jean-Émile Gombert, des mots écrits et être capable de faire des inférences lors du traitement « L’Apprentissage de mots non familiers. De la sorte, dès ses premières tentatives de de la lecture : évolution lecture, le débutant peut faire des analogies entre les mots qu’il sait déjà des procédures et reconnaître et ceux qu’il tente de découvrir (Goswami, 1993). Initialement, apprentissage il n’a pas cependant conscience des analogies qu’il opère (Gombert, implicite », Enfance, 56, Bryant & Warrick, 1997). Ce n’est que tardivement qu’il deviendra capable pp. 245-257, 2004. d’une analyse consciente. Progressivement, l’activation répétée de ces connaissances acquises implicitement renforcera les relations entre des configurations orthographiques et les configurations phonologiques et morphologiques correspondantes et de ce fait augmentera leur disponibilité pour l’accès conscient. Les traitements implicites ne s’avèrent cependant pas suffisants pour permettre une lecture habile car ils ne permettent pas à eux seuls la connaissance consciente des règles à appliquer pour lire n’importe quel mot (ou pseudo-mot2) dans n’importe quel contexte. Néanmoins, c’est sur la base de ces apprentissages implicites que l’instruction explicite permettra l’installation des traitements alphabétiques puis orthographiques. C’est la confrontation du système avec l’écrit qui provoque cette évolution. En ce sens, celle-ci s’avère très dépendante de la fréquence et de la diversité des mots rencontrés lors des premiers mois de l’apprentissage. » 2 — C’est-à-dire une chaîne de caractères ressemblant à un mot réel mais n’ayant aucun sens. Les pseudo-mots respectent les règles phonologiques ou conventions orthographiques de la langue. I Développer les habiletés phonologiques 12 — Développer les habiletés phonologiques Dès la petite section de l’école maternelle, le travail mené vise à développer la sensibilisation des élèves aux différents sons de la langue française ; ils jouent et se familiarisent avec les sonorités de la langue orale. En moyenne et grande sections, cet apprentissage fait l’objet d’un travail régulier et systématique : par la manipulation de syllabes, de rimes et des premières correspondances lettre-son, les élèves apprennent à opérer une analyse phonologique des unités de langage proposées et prennent ainsi conscience des phonèmes. De la conscience phonologique vers la conscience phonémique Avant l’apprentissage du principe alphabétique, les élèves n’ont pas conscience que les mots oraux peuvent être décrits comme des séquences de phonèmes. Par exemple, ils ne sont pas en capacité d’indiquer qu’il y a quatre phonèmes dans le mot « papa » car ils ont des difficultés à se représenter mentalement le /p/ et le /a/ du son [pa] comme deux entités distinctes. Les connaissances phonologiques dont ils disposent leur permettent de différencier des mots mais elles sont insuffisantes pour qu’ils puissent décomposer une syllabe en unités phonémiques. Toutefois, avant la prise de conscience des phonèmes, l’élève est capable d’opérer une analyse phonologique du langage oral indépendamment du sens des mots ; par exemple il est capable de reconnaître que deux mots se ressemblent sur le plan sonore parce qu’ils riment, ou de segmenter un mot oral en syllabes. Ces capacités, qui existent à l’âge de trois ans, reposent sur une sensibilité phonologique (être sensible aux sons qui composent un mot) et sur une conscience syllabique. La conscience phonémique relève d’un apprentissage systématique. Que signifie le terme « conscience » pour le traitement des sons de parole ? Isabelle Yoffe Liberman précise l’emploie de ce terme : « La conscience lexicale, avoir conscience des mots, correspond à la capacité à isoler un mot dans un énoncé et à en comprendre le sens. L’enfant est alors capable d’effectuer des manipulations telles que compter les mots ou les dépla- cer dans une séquence de parole. La conscience syllabique, avoir conscience des syllabes, c’est être capable de compter le nombre de syllabes orales dans un mot, par exemple, dire que dans /choKola/ (chocolat) il y a trois syllabes. La conscience infra-syllabique est la capacité à segmenter une syllabe en attaque et en rime, par exemple être capable de dire que dans tronc il y a deux parties /tr/ et /on/. La conscience phonémique correspond à la capacité d’analyse 13 — Développer les habiletés phonologiques phonémique, par exemple dire que dans /Kado/ (cadeau) il y a quatre phonèmes. Le terme conscience phonologique est un terme générique qui désigne la capacité à manipuler de façon intentionnelle les unités phonologiques d’un mot (syllabe, infra-syllabe, phonème). » Isabelle Yoffe Liberman, “Segmentation of the Spoken Word and Reading Acquisition”, Bulletin of the Orton Society, 23, pp. 65-77, 1973. « Pour apprendre à lire dans une écriture alphabétique, on doit utiliser Liliane Sprenger- les correspondances graphème-phonème. Il faut donc avoir des capacités Charolles, Les Débuts correctes de discrimination phonémique (être capable de différencier bol de l’apprentissage de de vol). Il faut aussi être capable de segmenter les mots oraux en phonèmes la lecture en français, pour comprendre les relations entre ces unités et les graphèmes. » LPC-AMU-BRLI, 2017. Il ne suffit pas de maîtriser le langage oral pour accéder directement à la conscience phonémique. Le phonème étant la plus petite unité de la langue orale, il est plus com- plexe à isoler que la syllabe. En effet : — les voyelles se prononcent isolément en raison de leurs caractéristiques articula- toires puisque, d’un seul geste phonatoire, ces phonèmes s’insèrent dans le nom de la lettre (sauf le Y) : ce sont des phonèmes vocaliques. Les voyelles sont à la fois des sons autonomes et des phonèmes. On notera qu’en français, les phonèmes vocaliques correspondent aussi à des syllabes (de type voyelle) et même à des mots (à, eux, y, eau, eut, ou, un, on) ; — mais les consonnes ne sont pas des sons qu’on peut isoler ; ce sont des phonèmes encodés de manière complexe dans un son. On les appelle des phonèmes consonantiques. Il est plus difficile de se les représenter. Les consonnes ne se prononcent qu’en coarticulation avec une voyelle. Les phonèmes fricatifs 3 (/f/, /s/, /v/, /z/, etc.) sont toutefois plus faciles à isoler car leur représentation peut être facilitée en prolongeant leur son (/sssss/). La représentation des phonèmes occlusifs 4 est plus difficile car pour prononcer un phonème tel que /b/, /p/, /d/, /t/, /k/, ou /g/, il faut nécessairement lui associer un phonème vocalique. Lorsque l’on amorce avec les élèves le développement de la conscience phonémique, les voyelles et les consonnes constrictives sont à privilégier car elles sont plus faci- lement perceptibles et prolongeables. Grâce à l’apprentissage du système alphabétique, l’élève prend conscience des phonèmes. La prise de conscience des phonèmes consonantiques (au nombre de 17 parmi les 20 consonnes de l’alphabet) est facilitée par la présentation des lettres qui leur sont associées5. 3— Est appelé phonème fricatif le son produit quand l’organe mobile se rapproche de l’organe fixe sans le toucher ; l’air est gêné pour sortir et passe par un bruit de friction. 4— Est appelé phonème occlusif le son produit quand l’organe mobile et l’organe fixe sont en contact serré ; l’air bloqué s’accumule dans la cavité buccale et s’échappe d’un seul coup avec un bruit de plosion. 5— Voir la partie « Pourquoi est-il si important d’apprendre les lettres ? ». 14 — Développer les habiletés phonologiques L’ARTICULATION DES CONSONNES 6 Lieu d’articulation (sd=sourde; sn=sonore) bilabiale labiodentale dentale alvéolaire postalvéolaire palatale vélaire p (sd) t (sd) k (sd) occlusives orales b (sn) d (sn) g (sn) Mode d’articulation nasales m n f (sd) s (sd) H (sd) constrictives médianes v (sn) z (sn) j (sn) latérales l vibrantes r roulé R semi- consonnes w Si de nombreuses études mettent en évidence l’existence d’une conscience syllabique chez les enfants âgés de 4 à 5 ans, il n’en est rien de la conscience phonémique. Or, c’est cette dernière qui est si essentielle pour l’apprentissage de la lecture. Elle nécessite donc un enseignement explicite et structuré. La conscience phonémique et l’apprentissage de la lecture Les capacités précoces d’analyse phonémique permettent de pronostiquer le futur niveau de lecture des enfants, même quand il est tenu compte de leur niveau de pré-lecture (vocabulaire, conscience syllabique, concepts sur l’écrit, etc.). Tel est le principal résultat de synthèses sur les relations entre prédicteurs précoces de l’apprentissage de la lecture (à 4-5 ans) et performances ultérieures en lecture (cours préparatoire ou CE1). Des corrélations élevées ont été mises en évidence entre les capacités d’analyse phonémique précoces et le niveau ultérieur de lecture, ce qui fournit un puissant argument en faveur de l’importance de ces capacités dans l’acquisition de la lecture. La méta-analyse réalisée en 2012 par Melby-Lervåg, Lyster et Hulme, qui porte sur 235 études, confirme que la conscience phonémique est le meilleur prédicteur des différences interindividuelles au cours de l’apprentissage de la lecture (corrélation de.437). La synthèse du National Early Literacy Panel conduite en 2008 rapporte un coefficient de corrélation très proche de.42. 6— Tableau extrait des ressources pour l’école maternelle disponibles sur Éduscol - Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions - Partie II.2 - Lien oral-écrit - Activités phonologiques au service de l’entrée dans le code alphabétique, p. 18. https://cache.media.eduscol.education. fr/file/Langage/59/8/Ress_c1_Section_2_partie_2_Activites_ phonologiques_569598.pdf 7— Les coefficients de corrélation se situent entre - 1 et + 1. Plus un tel coefficient tend vers + 1, plus le lien positif est élevé. Ici, le lien entre conscience phonémique et niveau de lecture est très proche dans les deux grandes études citées. 15 — Développer les habiletés phonologiques Monica Melby-Lervåg, Solveig-Alma Halaas Lyster & Charles Hulme, “Phonological Skills and their Role in Learning to Read: a Meta-analytic Review”, Psychological Bulletin, 138(2), pp. 322-352, 20128. National Early Literacy Panel, Developing Early Literacy, National Institute for Literacy, Washington, 20089. Les résultats de ces études, par leurs impacts positifs sur l’apprentissage de la lecture et de l’écriture, montrent l’importance d’un entraînement à la conscience phonémique à l’école maternelle. Plusieurs méta-analyses ont synthétisé les conclusions que l’on peut effectivement tirer de ces études. La plus célèbre d’entre elles a été réalisée par le National Reading Panel10 et analysée par Ehri et ses collaborateurs. Cette méta-analyse porte sur cinquante-deux études examinant les effets des entraînements à la conscience phonémique sur la lecture en comparant un groupe entraîné et un groupe non entraîné, sur des élèves scolarisés de la maternelle à la sixième. Elle montre que : — les effets sont plus importants quand la conscience phonémique est entraînée avec des pré-lecteurs (scolarisés en maternelle) plutôt qu’avec des élèves déjà lecteurs ; — les entraînements doivent être explicites, intensifs, effectués en petits groupes homogènes lors de séquences de courte durée (20 minutes) proposées plusieurs fois par semaine, pendant un ou deux mois ; — les entraînements phonémiques sont plus efficaces quand ils portent sur le lien oral-écrit (lettres-sons, par exemple) comparativement aux entraînements effectués uniquement à l’oral ou avec des supports visuels comme des images ; — les entraînements multi-sensoriels intégrant simultanément des tâches orales, visuelles et kinesthésiques (haptique ou grapho-motrice) sont particulièrement efficaces en lecture-décodage pour les élèves les plus fragiles. Organisation et modalités de cet enseignement La prise de conscience des unités de la langue n’est pas spontanée. Il est nécessaire de mettre en place un enseignement spécifique, continu, structuré, progressif pour que l’élève, tout au long de l’école maternelle, puisse développer les différentes compétences dans le domaine de la phonologie : écouter, discriminer et manipuler les unités de langue. 8— https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22250824 9— http://lincs.ed.gov/publications/pdf/NELPReport09.pdf 10 — Voir p. 8. 16 — Développer les habiletés phonologiques « Pour pouvoir lire et écrire, les enfants devront réaliser deux grandes Programme acquisitions : identifier les unités sonores que l’on emploie lorsqu’on d’enseignement parle français (conscience phonologique) et comprendre que l’écriture de l’école maternelle, du français est un code au moyen duquel on transcrit des sons (principe Bulletin officiel spécial alphabétique). » n° 2 du 26 mars 2015. « La connaissance et la manipulation des unités sonores de la langue Circulaire de rentrée française font l’objet d’un enseignement progressif. Dès la petite section, 2019, Les Priorités la construction d’une conscience phonologique est régulièrement pour l’école primaire, travaillée. Elle se structure jusqu’à la grande section par des activités note de service appropriées. » n° 2019-087, Bulletin officiel du 29 mai 2019. Les activités de manipulation des unités de la langue proposées par le professeur doivent être diversifiées pour développer chez les élèves des opérations intellectuelles qui leur permettent d’acquérir et de mobiliser des procédures (fusion, suppression, substitution, localisation). « L’enseignant veille alors à expliquer aux enfants ce qu’ils sont en train Programme de l’école d’apprendre, à leur faire comprendre le sens des efforts demandés maternelle, Bulletin et à leur faire percevoir les progrès réalisés. » officiel spécial n° 2 du 26 mars 2015. Le professeur invite les élèves à envisager la langue comme un matériau pour qu’ils puissent se détacher de la fonction communicative du langage. Le sens ne doit pas parasiter l’objectif poursuivi. « Pour pouvoir s’intéresser aux syllabes et aux phonèmes, il faut que Programme de l’école les enfants se détachent du sens des mots. » maternelle, Bulletin officiel spécial n° 2 du 26 mars 2015. L’organisation des apprentissages Les modalités d’organisation sont variées et s’adaptent en fonction des besoins repérés chez les élèves et de leur avancée dans l’apprentissage. Les activités dirigées peuvent être menées en grand groupe ou en petit groupe : — du grand groupe vers le petit groupe : le professeur garde avec lui les élèves qui en ont le plus besoin ; — du petit groupe vers le grand groupe : à partir d’un nouvel apprentissage intro- duit en petit groupe, proposer des entraînements collectifs qui tiennent compte également de groupe de besoin. Le petit groupe est à privilégier pour débuter un nouvel apprentissage ou pour les élèves les plus fragiles. 17 — Développer les habiletés phonologiques L’inscription des activités phonologiques à l’emploi du temps, sous la forme de séances courtes et fréquentes concourt à maintenir un rythme régulier d’apprentissage. Des temps informels (par exemple, lors de l’appel des élèves pour partir en ateliers de façon échelonnée « j’appelle les élèves dont le prénom commence par /s/ ») et des situations incidentes émanant de propositions des élèves (par exemple, « vendredi on entend comme dans Valentin »), peuvent être mobilisés. Dans ce contexte, l’explicita- tion et la mise en lien avec les apprentissages par le professeur sont indispensables. Les modalités d’apprentissage Le travail sur la conscience phonologique repose en tout premier lieu sur l’attention particulière que le professeur porte à une bonne articulation. Afin de favoriser l’im- plication des élèves dans les tâches proposées, la modalité « apprendre en jouant » doit être envisagée conjointement avec les autres modalités d’apprentissage. « Dans toutes ces activités, le plaisir de jouer avec les mots doit demeurer Recommandations un vecteur de motivation. » pédagogiques, L’École maternelle, école du langage, note de service n° 2019-084, Bulletin officiel du 29 mai 2019. APPRENDRE EN RÉFLÉCHISSANT ET EN RÉSOLVANT DES PROBLÈMES Par des situations variées, le professeur amène l’élève à effectuer des opérations mentales sur les unités de la langue qui ne sont pas accessibles d’emblée. Les diverses manipulations sur les unités de la langue (suppression, substitution, etc.) sont des situations mobilisant cette modalité d’apprentissage. APPRENDRE EN S’EXERÇANT Pour développer les habiletés phonologiques, les élèves ont besoin d’entraînement. Les activités ritualisées favorisent l’appropriation. Des activités en autonomie prolongeant les situations dirigées peuvent être proposées aux élèves dans un espace dédié au sein de la classe (par exemple, classer les mots en fonction du nombre de syllabes sur le tableau, classer des mots en fonction de la règle « j’entends/je n’entends pas » avec des fiches autocorrectives). APPRENDRE EN SE REMÉMORANT ET EN MÉMORISANT Il est important de revenir régulièrement sur les différentes activités, en lien avec les procédures utilisées, afin que celles-ci soient mémorisées et puissent être dispo- nibles et réinvesties rapidement. Se remémorer est l’occasion de faire le lien entre les diverses activités et de faire apparaître ce sur quoi les élèves peuvent s’appuyer pour commencer un nouvel apprentissage. 18 — Développer les habiletés phonologiques La voix et l’écoute au service du développement de la conscience phonologique Les jeux vocaux, les comptines, les chants, les jeux rythmiques, les jeux d’écoute soutiennent le développement de la conscience phonologique tout au long de l’école maternelle. LES JEUX D’ÉCOUTE Les jeux d’écoute permettent de travailler notamment la concentration et la mémoire auditive, aptitudes précieuses pour consolider sa conscience phonologique. LES COMPTINES ET LES FORMULETTES Les comptines sont des supports d’activité très riches pour jouer avec les sonorités de la langue et développer les habiletés phonologiques. « […] un autre intérêt des comptines et des formulettes apparentées Extrait des ressources réside dans le fait qu’elles favorisent une approche ludique qui attire pour l’école maternelle l’attention sur les unités distinctives de la langue et prépare, de manière disponibles sur implicite puis explicite, le travail de structuration et les premiers Éduscol - Mobiliser traitements réflexifs. » le langage dans toutes ses dimensions 11. Les ressemblances sonores (rimes, assonances, allitérations) doivent être travaillées, tout comme l’articulation. La dimension rythmique des comptines permet également d’envisager la segmentation en syllabes. LES JEUX VOCAUX Les jeux vocaux permettent de faire le lien entre les sons qu’ils entendent et ceux qu’ils produisent. « Par les usages qu’ils font de leur voix, les enfants construisent les bases Extrait du Programme de leur future voix d’adulte, parlée et chantée. L’école maternelle propose d’enseignement de des situations qui leur permettent progressivement d’en découvrir la l’école maternelle, richesse, les incitent à dépasser les usages courants en les engageant arrêté du 18 février 2015, dans une exploration ludique (chuchotements, cris, respirations, bruits, Bulletin officiel spécial imitations d’animaux ou d’éléments sonores de la vie quotidienne, jeux n° 2 du 26 mars 201512. de hauteur...). » 11 — Partie II.3 - Lien oral-écrit - Ressources pour la classe : démarches pour apprendre des comptines, formulettes et jeux de doigts. https://cache.media.eduscol.education.fr/file/Langage/18/9/Ress_c1_ langage_oralecrit_demarche_apprendre_529189.pdf 12 — 3.1.2 Univers sonores. https://www.education.gouv.fr/pid25535/ bulletin_officiel.html?cid_bo=86940 19 — Développer les habiletés phonologiques Il est par exemple plus aisé d’identifier un phonème dans un mot lorsque l’on s’est amusé à le reproduire en imitant un bruit (par exemple, en imitant le bruit de l’abeille [z] ou le bruit du vent [v], [f], du serpent [s], etc.). Par la production, on affine l’écoute et réciproquement. On se rappellera que les 36 phonèmes de la langue française ne représentent qu’une infime partie des sons du monde. Les sons des autres langues Faire le lien entre l’éveil linguistique et la phonologie présente plusieurs intérêts. Lorsque les élèves sont en contact avec une langue étrangère, ils sont amenés, par la comparaison des sonorités, à envisager la langue comme objet, condition nécessaire aux activités phonologiques. « […] en induisant une prise de recul, les LVE permettent une première Recommandations perception du fonctionnement du français, langue de scolarisation, pédagogiques, Les avec ses spécificités. » Langues vivantes étrangères à l’école maternelle, note de service n° 2019-086, Bulletin officiel du 29 mai 2019. L’écoute et la prononciation de mots dans une langue vivante favorisent la mise en regard des sonorités de cette langue avec celles du français. Grâce à l’éveil linguistique, le panel des sons à disposition s’enrichit et les allers-retours qui peuvent être menés entre une langue vivante et la langue française affinent la perception des sons de notre langue. Par ailleurs, le professeur, en incitant l’élève à porter une attention particulière aux sonorités d’une langue qui n’est pas habituelle, développe chez lui une écoute attentive, par laquelle il apprend à distinguer les différents phonèmes de la langue. « Ainsi, s’exercer à répéter, à mettre en bouche, à articuler un mot ou Recommandations un son d’une LVE en sentant du bout des doigts ses cordes vocales vibrer pédagogiques, sur le cou, en sentant avec la main l’air expulsé de la bouche, la dureté Les Langues vivantes d’un son dans la gorge ou le roulis d’un /r /, à prononcer des mots ou étrangères à l’école expressions avec un air joyeux, étonné ou en feignant un air fâché permet maternelle, note de d’entraîner les élèves à maintenir une bonne capacité à discriminer service n° 2019-086, à l’oral, à reconnaître, produire et reproduire des sons ou des mots, Bulletin officiel à associer intonation et sens, tout en jouant avec le matériau linguistique du 29 mai 2019. en toute confiance. » 20 — Développer les habiletés phonologiques Quelle progressivité envisager ? La prise de conscience des unités sonores repose sur des compétences qui se développent durant les trois années de l’école maternelle. Les attendus de fin de cycle mentionnés dans le programme visent la syllabe et le phonème. « — repérer les régularités dans la langue à l’oral en français. Manipuler Programme des syllabes ; d’enseignement de — discriminer des sons (syllabes, sons-voyelles, quelques sons-consonnes l’école maternelle, hors des consonnes occlusives). » arrêté du 18 février 2015 – Bulletin officiel spécial n° 2 du 26 mars 2015. Ces compétences sont développées tout au long de l’école maternelle, il s’agit pour les élèves de prendre conscience des mots, des syllabes et des phonèmes. LES MOTS Isoler les mots dans la chaîne parlée n’est pas chose aisée puisqu’à l’oral les espaces entre les mots n’apparaissent pas. Le mot, dans sa dimension orale, constitue une suite de phonèmes qui, combinés entre eux, forment des syllabes qui permettent d’accéder au sens du mot, contrairement aux syllabes et aux phonèmes lorsqu’ils sont envisagés isolément. Le mot est repéré dans le flux de la parole parce qu’il relie immédiatement le signifiant au signifié. Ainsi, les mots « poule » et « boule » se distinguent non pas par une analyse consciente des phonèmes /p/ et /b/ qui changent, mais par le sens. Plus l’élève possède un stock de mots disponibles important, plus il lui est facile de repérer un mot dans une phrase, puisqu’il est identifié comme une unité de sens. Le mot, dans sa dimension graphique est appréhendable par les espaces ou signes qui le séparent des autres mots. Le lien oral-écrit constitue donc un appui précieux pour accéder à l’unité mot. Cette notion est approfondie tout au long de l’apprentis- sage de la lecture et de l’écriture. EXEMPLES D’ACTIVITÉS L’élève, de la petite section à la grande section, est capable d’isoler un mot dans la chaîne parlée (à l’oral, puis progressivement à partir d’un support écrit). À partir des comptines, il peut : — vivre corporellement des comptines en faisant correspondre les gestes aux mots énoncés : « saute, saute, saute » ; « frotte, frotte, frotte », etc. ; — souligner les répétitions de mots ; 21 — Développer les habiletés phonologiques — compléter par le bon mot une phrase dite par le professeur (« une poule sur un…, qui picotait du pain… ») ; — substituer un mot par un bruit, une onomatopée, un geste. Au-delà du plaisir d’écouter une comptine, de la dire, de la mimer, de jouer avec ses doigts, ses mains, l’élève découvre les premiers rapports entre lettre et son. Le professeur guide l’observation en balayant du doigt le texte et en lui associant le contenu vocal. Les mots sont progressivement pointés au fur et à mesure de leur récitation. À partir d’un mot, puis d’une phrase énoncée en l’absence de support, il peut : — repérer un mot dans une suite de mots ; — changer le mot d’une phrase pour en modifier le sens (« le petit chaperon rouge, le petit chaperon bleu, le grand chaperon rouge », etc.) ; — compter, marquer les mots d’une phrase énoncée oralement. À partir d’un support écrit, il peut : — suivre du doigt les mots d’une formulette ou d’une comptine simple ; — pointer les mots d’un titre, d’une phrase lue par l’adulte ; placer un symbole sous chacun ; — retirer les mots d’une phrase au fur et à mesure de leur énonciation en ôtant le symbole choisi pour les représenter (« je mange une pomme ; je mange une… ; je mange ; je… ») ; — pratiquer la dictée à l’adulte au sein de chaque niveau de classe. Si la dictée à l’adulte permet à l’élève d’identifier l’intérêt, les finalités et les perma- nences de l’écrit, elle est aussi, de manière générale, un moyen privilégié pour rendre visible les « espaces » entre les mots. Pour être profitable aux élèves, cette activité doit être menée avec rigueur et uniquement en petit groupe. Elle nécessite la mobilisation de gestes professionnels précis. Le professeur saisit les différentes occasions qui se présentent dans cette acti- vité pour « mettre en scène » lors de l’écriture sous la dictée les termes « mot », « lettre », « ligne », etc. Par exemple, il dit à l’élève, « je vais écrire la phrase que tu viens de dire ; je vais écrire le premier mot ». Il aide à distinguer le déterminant du nom, pour ne pas laisser penser que « le ballon », par exemple, constitue un seul mot (leballon). Le professeur attire aussi l’attention de l’élève sur certaines règles de ponctuation : « j’ai terminé ma phrase alors je mets un point » mais aussi sur la gestion de l’espace-page. Il est très important, pour permettre la prise de conscience de la permanence de l’écrit, que le professeur écrive les propositions des élèves en respectant le plus possible leurs formulations. Néanmoins, reformuler est nécessaire pour que les élèves prennent progressivement conscience que l’on n’écrit pas comme on parle. Il convient d’alterner deux moments dans l’activité : celui où les élèves se mettent d’accord sur ce qui doit être dit et celui où le professeur écrit pour que soit visible l’évolution du discours. Le professeur encourage, tout en accompagnant la 22 — Développer les habiletés phonologiques structuration de l’écrit, par exemple, la suppression des répétitions : « le petit garçon il court », pour parvenir à la phrase « le petit garçon court ». Il évite aussi de « normer » trop rapidement les formulations vers un écrit élaboré ; par exemple, on peut conserver une proposition de type « on va à la piscine » plutôt que d’imposer « nous allons à la piscine ». Le professeur explicite les choix opérés. La phrase peut alors être redite par l’élève ou le professeur lui-même avant de passer à l’écriture. Écrire en cursive devant l’élève est essentiel. Le professeur veille à ce que celui-ci soit placé de façon à voir le texte écrit au fur et à mesure de sa transcription. Lorsque l’énoncé est dicté, le professeur met en évidence chaque mot à écrire : il demande à l’élève de ralentir le débit de sa parole pour l’adapter à son rythme d’écriture afin que l’élève puisse voir en simultané l’écriture du mot qu’il prononce. Enfin, une fois l’énoncé écrit, le professeur relit en pointant chaque mot, pour relancer l’activité langagière. Si des modifications sont apportées, il convient de procéder en modifiant un mot à la fois dans un premier temps, afin que l’élève perçoive le mot qui change par rapport à la phrase de départ. Le professeur permet aux élèves de se distancier de la proposition qui vient d’être écrite en posant des questions : « Que comprenons-nous ? Est-ce bien ce que nous voulions dire ? » À cette fin, il est nécessaire qu’au préalable, un destinataire ait été identifié (les parents, les élèves d’une autre classe). Le texte élaboré peut-être repris plus tard afin que les élèves identifient la permanence de l’écrit qui pourra évoluer au fil du temps en le complétant ou en le modifiant. Pendant l’activité, le professeur répond à toutes les remarques émises sur l’écrit, en amenant autant que possible les élèves à y répondre par eux-mêmes. LA SYLLABE La syllabe se prononce en une seule émission de voix, c’est l’unité de la langue la plus facilement perceptible. Les différentes manipulations (segmentation, suppression, fusion, localisation, etc.) de syllabes sont plus faciles à réaliser qu’avec les phonèmes. Lorsque l’élève comprend les procédures effectuées avec l’unité syllabe, il peut alors les remobiliser lors du travail sur les phonèmes. EXEMPLES D’ACTIVITÉS À PARTIR DES SYLLABES ORALES Certains exemples de jeux sont extraits des ressources pour l’école maternelle disponibles sur Éduscol - Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions 13. L’élève, de la petite section à la grande section, est capable de : 13 — Partie II.2 - Lien oral-écrit - Activités phonologiques au service de l’entrée dans le code alphabétique. https://cache.media.eduscol. education.fr/file/Langage/59/8/Ress_c1_Section_2_partie_2_ Activites_phonologiques_569598.pdf 23 — Développer les habiletés phonologiques SEGMENTER LES SYLLABES D’UN MOT — frapper les syllabes de mots familiers en sautant, en utilisant un instrument, etc. ; — scander les syllabes de mots familiers en marquant une pause entre chaque syllabe ; — fusionner les syllabes pour retrouver le prénom, un mot familier, le pseudo mot, scandé en syllabes ; — dire des comptines en scandant les syllabes ; — frapper les syllabes d’une comptine rythmée au fur et à mesure de son énonciation. Exemple d’activité « Loto » : chaque élève dispose d’une planche de loto composée de cases dans lesquelles un nombre de syllabes est imposé ; l’élève pioche une image, scande les syllabes du mot correspondant à l’image, les dénombre pour gagner l’image et la poser sur sa planche. DÉNOMBRER LES SYLLABES — dénombrer les syllabes de mots familiers, en associant une gestuelle connue ou en les représentant par un symbole ; — comparer des mots selon le nombre de syllabes, les classer ; — retrouver un mot selon le nombre de syllabes qui le compose. Exemple d’activité « Devine à qui / à quoi je pense » : parmi les propositions suivantes : « chat, mou- ton, écureuil », trouver que le maître du jeu pense au mot « mouton » à partir du codage des deux syllabes. Il est possible de symboliser visuellement les syllabes (par exemple : cercles, bouchons, jetons), mais aussi de manière auditive en frappant le nombre de syllabes avec ses mains ou avec un instrument. DISCRIMINER UNE SYLLABE — repérer une syllabe dans une suite de syllabes énoncée, émettre un signal, défini en amont, lorsqu’elle est entendue ; — classer des mots selon la règle « j’entends/je n’entends pas la syllabe énoncée » (par exemple, « ra » dans « valise, caramel, caméra, tapis »). La tâche est plus aisée lorsque la syllabe se situe au début ou à la fin du mot ; — localiser une syllabe dans un mot, la marquer avec un code déterminé préala- blement (par exemple, chercher « pi » dans « papillon », coder la syllabe « pi ») ; — trouver la syllabe commune dans une liste de mots ; — classer des mots comportant une syllabe commune, selon sa position dans le mot (début/milieu/fin). Exemples d’activités « La chasse à la syllabe » : proposer oralement une syllabe (par exemple, « to »), puis la faire retrouver dans une suite de syllabes, dans des mots, dans une phrase ou un texte court lu par le professeur. Les élèves émettent un signal, 24 — Développer les habiletés phonologiques défini en amont, et lèvent la main dès qu’ils l’entendent. Variante : rechercher une syllabe donnée, entendue dans les prénoms de la classe, dans les mots familiers de la classe. « Loto des syllabes » : dire une syllabe (par exemple, « ta »), mettre un jeton dans la case où se trouve l’image du mot contenant la syllabe énoncée. Segmenter les images en fonction du nombre de syllabes (par exemple, placer le jeton sur l’image du mot « tapis », sous la première segmentation). « Domino des syllabes » : à partir d’un jeu de domino-images lier l’image d’un mot qui se termine de la même manière à une autre image comprenant la même syllabe en attaque (par exemple, « micro – crocodile »). « Trouver l’intrus » : énoncer des mots (avec ou sans support iconographique) contenant une même syllabe en position initiale ou finale ainsi qu’un intrus (par exemple, « bateau, banane, tapis, ballon »). MANIPULER INTENTIONNELLEMENT LES SYLLABES — inverser les syllabes de mots bi-syllabiques ; — supprimer une syllabe : demander aux élèves de dire des mots en retirant une syllabe identifiée en amont, « dis le mot lapin, j’enlève la, que reste-t-il ? » ; — doubler la première ou la dernière syllabe d’un mot ; — ajouter une syllabe préalablement définie à un mot (début ou fin) ; — faire définir une règle de transformation de mots et réaliser une suite de mots à partir de cette règle (par exemple, « mototo, chapeaupeau, pantalonlon », etc.). LE PHONÈME Bien avant de repérer des phonèmes, il faut favoriser la découverte de ressemblances sonores qui ne sont pas évidentes pour les jeunes élèves. La comptine permet cette prise de conscience. L’organisation rythmique des rimes, la surcharge d’assonances ou d’allitérations, aident au traitement formel du langage. Ces activités servent à faire entendre à l’élève que, dans le flux de parole, il y a des unités plus petites que celles qui sont liées au découpage rythmique ou à la nécessité respiratoire. Par exemple, quand une comptine aborde les jours de la semaine, l’élève peut repérer, par la ré- pétition, la segmentation de la syllabe /di/. Les jeux autour des rimes permettent d’être attentif à une sonorité plus petite que la syllabe. Très tôt les jeunes élèves sont sensibles à ce qui « sonne » pareil. Le travail des comptines permet de les initier à la perception de ce qui rime. Ainsi, les élèves apprennent à repérer les mots qui se ressemblent ou qui riment, les associent à d’autres mots (par exemple, « parmi les mots proposés, trouve le mot qui finit comme… ») et produisent de nouvelles rimes. 25 — Développer les habiletés phonologiques Un grand nombre de comptines et de formulettes nourrissent ces jeux sur les sono- rités. Certaines figurent dans les ressources pour l’école maternelle disponibles sur Éduscol - Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions 14. EXEMPLES DE COMPTINES OU FORMULETTES UTILISABLES Pour entendre et repérer des rimes Une poule sur un mur L’araignée Mon chapeau Une poule sur un mur J’avais pensé Quand je mets mon chapeau gris, Qui picote du pain dur Qu’une araignée C’est pour aller sous la pluie Picoti picota Avait tissé Quand je mets mon chapeau vert Lève la queue et puis Sa toile serrée C’est que je suis en colère S’en va. Et j’avais cru Quand je mets mon chapeau bleu Au soir venu C’est que ça va beaucoup mieux Turlututu Quand je mets mon chapeau blanc L’avait vendue C’est que je suis très content L’a pas vendue Turlututu Le vent passa Tout emporta. Pour entendre et repérer des sons Tara Un éléphant Sss... Sss... Sss... Le petit rat Qui mangeait du flan Siffle le serpent, S’en va au Canada Assis sur un banc Danse et se balance, Avec Sacha dit à l’agent : Au son des cymbales, Le petit chat. « Peignez-moi en blanc ! » Sur un air de valse Que jouent les cigales. Pour dissocier et discriminer des sons proches (consonnes fricatives : f/v, s/z, ch/j, s/ch, etc.) s/f/v/ch s/z ch/j Soufflez monsieur le vent, Six cerises Dans la ville de Gien Faites valser les nuages Rouges et bien mûres Je connais un chien Et les cheveux des enfants S’ennuient sur le cerisier Qui conduit un char sages. Six cerises Tiré par un jars. Soufflez monsieur le vent, Voudraient s’en aller Connais-tu le jars Sur les feuilles perchées Mais voici un oiseau ! Qui tire le char Et le chapeau du fermier. Oh jardinier Conduit par le chien ? Venez les sauver. 14 — Partie II.3 - Lien oral-écrit - Comptines, formulettes et jeux de doigts https://cache.media.eduscol.education.fr/file/Langage/59/8/ Ress_c1_Section_2_partie_2_Activites_phonologiques_569598.pdf 26 — Développer les habiletés phonologiques Des activités spécifiques permettent d’amener les élèves à percevoir une unité infra-syllabique, ce qui facilite l’accès à une unité encore plus petite : le phonème. EXEMPLES D’ACTIVITÉS Certains exemples de jeux ci-après sont extraits des ressources pour l’école mater- nelle disponibles sur Éduscol - Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions 15. L’élève, de la petite section à la grande section, est capable de : ENTENDRE DES PHONÈMES — dire des comptines comprenant des phonèmes proches ; — dire des comptines en insistant sur les assonances et allitérations ; — distinguer deux mots qui se différencient à l’oral par un seul phonème (par exemple : pain/bain ; poule/boule ; four/tour, etc.) ; — bruiter les lettres de son prénom ; — prendre en charge progressivement la phonémisation du prénom après qu’elle ait été initiée et répétée par le professeur ; — prolonger les phonèmes (hors consonnes occlusives) d’un mot en les étirant comme un élastique ; — fusionner les phonèmes. Exemple d’activité « Qui suis-je ? » : reconnaître un mot à partir du bruitage de ses phonèmes (par exemple, retrouver le mot « ami » à partir de la phonémisation exagérée « aaaa, mmmm, iiiii »). DISCRIMINER UN PHONÈME — repérer un phonème dans une suite de phonèmes, mobiliser un signal défini en amont lorsqu’il est entendu (par exemple, chercher /v/, parmi /s/, /v/, /r/) ; — repérer le mot qui commence (ou se termine) par un phonème donné ou par le même phonème que le mot cible, pratiquer des « chasses à l’intrus » ; — classer des mots selon la règle « j’entends/je n’entends pas » (par exemple : /v/ dans « ville, carnaval, fil ») ; Le repérage du phonème est facilité lorsqu’il se situe au début ou à la fin du mot. On peut complexifier la tâche en proposant des mots contenant des phonèmes proches /f/ et /v/ ; /s/ et /z/ ; — localiser un phonème dans un mot, le mettre en évidence avec un code déter- miné à l’avance (par exemple : chercher /s/ dans « sapin », coder le phonème dans la syllabe du mot symbolisé) ; — trouver le phonème commun à une liste de mots ; 15 — Partie II.2 - Lien oral-écrit - Activités phonologiques au service de l’entrée dans le code alphabétique. https://cache.media.eduscol. education.fr/file/Langage/59/8/Ress_c1_Section_2_partie_2_ Activites_phonologiques_569598.pdf 27 — Développer les habiletés phonologiques Exemples d’activités « La chasse aux lettres » : à partir du phonème bruité par le professeur, retrou- ver, par exemple dans son prénom, la lettre correspondante. « La chasse au phonème » : proposer un phonème (par exemple /f/), puis énoncer une suite de mots, faire lever la main dès que le phonème est entendu. Variante qui complexifie la tâche : rechercher un phonème présent dans les prénoms de la classe, dans les mots familiers. « Loto des phonèmes » : dire un phonème, placer un jeton sur le dessin contenant le phonème énoncé (par exemple : /s/ dans « tasse »). « Trouver l’intrus » : proposer oralement des mots (avec ou sans support icono- graphique) comprenant un même phonème placé en position initiale ou finale, ainsi qu’un intrus (par exemple : « soleil, serpent, valise, sac »). MANIPULER DES PHONÈMES — localiser un phonème dans un mot, le coder ; — ajouter un phonème à la fin d’un mot extrait du vocabulaire travaillé en classe (par exemple, ajouter /f/ à la fin des mots « ballon, loup, vélo ») ; — supprimer un phonème à la fin d’un mot : « dans plouf, je retire /f/, que reste-t-il ? » ; — substituer un phonème dans des pseudo-mots ou des mots familiers (par exemple : « patatra, pititri, pototro, pututru »), remplacer les phonèmes d’at- taque : « pour moto je dis roto, pour souris je dis rouris, peux-tu faire pareil avec ballon, soleil ? » ; — expliciter la règle de transformation d’un mot, après écoute d’une liste de mots transformés, demander aux élèves de poursuivre avec d’autres mots (par exemple : « roto, rapeau, rantalon, rallon ») ; — trouver la règle de de transformation des mots et poursuivre la suite commencée. Le développement de la conscience phonologique pose la question de la progressi- vité pour mettre en œuvre un apprentissage efficace et adapté à l’âge des élèves. Plusieurs aspects sont à prendre en compte : — l’évolution des capacités des élèves en phonologie est en lien avec leur développement ; — la syllabe est l’unité la plus saillante du langage et est facilement perceptible ; — le phonème est l’unité qui sera essentielle pour apprendre à lire ; — le phonème consonantique est l’unité la plus complexe à isoler ; — la syllabe et le phonème sont plus facilement identifiables en début ou en fin de mot ; — à l’intérieur même du travail sur les différentes unités de la langue, une pro- gressivité s’opère. En effet, les opérations proposées peuvent avoir un niveau de complexité très différent. 28 — Développer les habiletés phonologiques Quelques points d’attention pour mener efficacement les activités phonologiques Le professeur utilise un lexique précis et adapté aux élèves : mot, lettre, syllabe, rime (le terme « son » est utilisé pour parler des phonèmes). Lorsqu’il recourt à des images, il s’assure au préalable que les élèves connaissent le lexique utilisé. De manière générale, il est conseillé de mobiliser des mots familiers, afin de faciliter leur mise en mémoire par les élèves. La segmentation des mots en syllabes se réalise à partir des syllabes orales. Lors des tâches portant sur les mots isolés, le nom est travaillé sans déterminant. Le professeur aide les élèves à discriminer les phonèmes en les prolongeant et en exagérant l’articulation. Pour en faciliter la prise de conscience, il est préférable de privilégier les mots monosyllabiques. Il est important d’harmoniser la symbolisation des mots, des syllabes et des phonèmes, en équipe pédagogique, de la maternelle jusqu’au cours préparatoire. 29 — Développer les habiletés phonologiques Focus | Évaluation de CP - compétences phonologiques Les évaluations nationales de CP et de CE1 permettent aux professeurs de disposer de repères fiables, fondés sur la recherche, afin de mieux accompagner les élèves vers la maîtrise des savoirs fondamentaux. Les évaluations du début de CP permettent de vérifier plusieurs compétences essentielles : — la reconnaissance des lettres dans leur différentes graphies (majuscules, minuscules cursives, scriptes) ; — l’association d’une lettre au son qu’elle produit et la manipulation des phonèmes dans un mot sont évaluées. Pour les professeurs, le contenu de ces évaluations est un point d’appui pour mettre en place, dès le début de l’année, des interventions spécifiques pour chacun des élèves que ce soit par l’adaptation des activités proposées et par la constitution de groupes de compétences qui répondront à des besoins identifiés. Dans le cadre des conseils de cycles, l’analyse conjointe des résultats des élèves aux évaluations nationales par les professeurs de maternelle et d’élémentaire per- met d’identifier les domaines d’actions pédagogiques prioritaires. Ces évaluations doivent engager des regards croisés sur les compétences (réussites et difficultés des élèves), sur l’analyse des pratiques et des démarches pédagogiques afin d’assurer la réussite de chacun des élèves en lecture et en écriture. 30 — Développer les habiletés phonologiques Focus | Évaluation des habiletés phonologiques Évaluer régulièrement les habiletés phonologiques des élèves en portant une atten- tion particulière à leurs progrès permet au professeur de réguler son enseignement et de proposer les activités les mieux adaptées aux besoins individuels qu’il identifie. Attendus de fin de cycle 1 et observables 16 Objectif(s) visé(s) Commencer à réfléchir sur la langue et acquérir une conscience phonologique. Ce qui est attendu des enfants en fin d’école maternelle — Repérer les régularités dans la langue à l’oral en français. Manipuler des syllabes ; — Discriminer des sons (syllabes, sons voyelles ; quelques sons consonnes hors des consonnes occlusives). L’enseignant — synchroniser le débit de la comptine ou jeu de doigts observe que récité avec la gestuelle associée ; l’enfant com- — réciter comptines et vire-langues en prêtant attention aux mence à réussir assonances, aux allitérations et à l’articulation en jeu ; ou réussit — scander et dénombrer les syllabes phoniques d’un mot régulièrement en respectant les variations régionales. ex : « e » final à... prononcé dans le sud de la France ; — reconnaître et discriminer une syllabe dans une liste de mots, dans un texte ; — trouver les mots pour produire de nouvelles rimes et assonances ; — pratiquer des opérations sur les syllabes de mots de points : enlever, ajouter, inverser, localiser, substituer (avec augmentation progressive de la longueur des mots à transformer) ; — produire des pseudo-mots par combinaison de syllabes ; — isoler et discriminer un phonème dont l’articulation peut être maintenue (voyelles, /s/, /f/, /z/, etc.) ; 16 — Extrait des ressources pour l’école maternelle disponibles sur Éduscol - L’évaluation à l’école maternelle (p. 8) - Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions - L’oral : commencer à réfléchir sur la langue et acquérir une conscience phonologique. https://eduscol.education.fr/ cid97131/suivi-et-evaluation-a-l-ecole-maternelle.html 31 — Développer les habiletés phonologiques — localiser et coder la place d’un phonème dans le mot (première, deuxième... syllabe / début, milieu ou fin de mot) ; — distinguer des sons proches (f/v, s/ch, s/z, ch/f, etc.). Contexte, Avec les supports suivants : circonstances, — comptines ; dispositifs, — jeux de doigts ; activités... — vire-langue ; — jeux de langage : mots tordus, etc. ; — listes de mots ; — boîtes à mots ; — images ; — texte. Pour les appren- Réfléchir sur les unités sonores de la langue en se détachant tissages du sens des mots. suivants... Prévenir les difficultés en augmentant les interventions ciblées pour les élèves les plus fragiles Des études françaises réalisées durant la dernière décennie montrent que des inter- ventions ciblées, c’est-à-dire des interventions qui se focalisent sur les domaines langagiers prédicteurs de la réussite en lecture (étude 1) ont un effet significatif, non seulement à court terme, (par exemple en grande section, étude 2) comparati- vement à un groupe contrôle sans interventions ciblées, mais aussi à moyen terme, en lecture en cours préparatoire, notamment (étude 3). Une prévention des difficultés devrait s’accompagner de pratiques pédagogiques différenciées selon le profil des élèves. Des interventions ciblées en ateliers sont à développer en fonction du niveau des élèves dans différents domaines évalués (pho- nologie, lettres, notamment). Il s’agit d’adapter les exercices proposés aux élèves et le temps qui leur est consacré, afin que l’enseignement cible précisément leurs besoins et qu’ils réussissent selon leur rythme. Les trois études françaises suivantes portent sur les entraînements phonologiques dès l’école maternelle. Leurs résultats plaident en faveur d’entraînements ciblés pour prévenir les difficultés d’apprentissage de la lecture. Dans ces études, les élèves du groupe expérimental qui ont bénéficié de l’entraînement présentent des progrès sen- sibles sur les habiletés ciblées, contrairement aux élèves du groupe témoin. 32 — Développer les habiletés phonologiques ÉTUDE 1 Le programme PARLER (Parler, Apprendre, Réfléchir, Lire Ensemble pour Réussir) est un programme général de prévention des difficultés scolaires qui vise spécifiquement le développement du langage et de la lecture. Ce programme comporte des entraînements phonologiques mis en place auprès d’élèves de grande section scolarisés dans des zones socialement défavorisées. Les entraînements à la conscience phonologique visaient la prise de conscience des différentes unités phonologiques (rimes, syllabes et phonèmes) à partir d’exercices de détection, de segmentation, de fusion et de suppression. Michel Zorman, Pascal Bressoux, Maryse Bianco, Christine Lequette, Guillemette Pouget, Martine Pourche, « PARLER : un dispositif pour prévenir les difficultés scolaires », Revue française de pédagogie, 193, 57-76, 2015. ÉTUDE 2 Une recherche conduite auprès de 3 596 élèves de grande section a repris des outils identiques à ceux du programme PARLER. Les résultats confirment que les enfants des classes qui ont bénéficié d’entraîne- ments ciblés dont la recherche a montré l’efficacité (fondés sur des preuves) progressent significativement plus dans les domaines entraî- nés comparativement aux classes témoins (sans interventions ciblées). Dans cette étude le but de l’entraînement à la conscience phono- logique était de stimuler l’écoute de mots, l’analyse segmentale, la mémoire verbale. Différentes unités linguistiques (rimes, syllabes et phonèmes) étaient impliquées dans deux niveaux de compétences phonologiques : le traitement implicite visant une sensibilité phono- logique et le traitement explicite visant des connaissances métapho- nologiques. Au total, 36 exercices ont été effectués. Les exercices visant la sensibilité phonologique portaient sur la discrimination des unités telles que la syllabe et la rime (par exemple, trouver des mots qui partagent les mêmes unités, décomposer le mot en syllabes ou fusionner les syllabes pour former un mot). Les exercices visant les connaissances métaphonologiques étaient axés sur la conscience phonémique et l’appariement lettre-son (par exemple, suppression et fusion de phonèmes, segmentation des syllabes en phonèmes et correspondance avec les unités orthographiques). Jean Écalle, Hélène Labat, Marion Le Cam, Thierry Rocher, Laurent Cros, Annie Magnan, “Evidence-based Practices to Stimulate Emer- gent Literacy Skills in Kindergarten in France: a Large Scale Study”, Teaching and Teacher Education, 50, 102-113, 2015. 33 — Développer les habiletés phonologiques ÉTUDE 3 Cette étude portait sur 637 enfants suivis pendant trois ans, de la moyenne section de maternelle au cours préparatoire. Elle visait à étudier les effets d’un entraînement phonologique et d’entraînements à la compréhension en école maternelle. Les entraînements phono- logiques en moyenne et grande sections de maternelle ont eu lieu pendant 12 semaines consécutives par an à raison de deux séances de 20 minutes par semaine. Ils ont été effectués en petits groupes de 4 à 7 enfants de niveaux phonologiques proches. En moyenne section, l’entraînement phonologique était centré sur des tâches de sensibilité phonologique, répétition de pseudo-mots et discrimination phonémique, sur des tâches de conscience syllabique (segmentation de deux ou trois mots syllabes, identification ou correspondance des syllabes initiales et finales, localisation d’une syllabe dans un mot, combinaison de syllabes pour former des mots, suppression de la syllabe initiale ou finale d’un mot) et des tâches de sensibilisation à la rime. En grande section, les entraînements ont été axés sur la conscience phonémique et la correspondance lettre-son. Après avoir passé en revue les syllabes et les rimes, des activités de sensibili- sation phonémique ont été combinées à des activités d’appariement lettre-son consistant à associer graphèmes et phonèmes, décom- poser les syllabes en phonèmes, identifier et associer les phonèmes initiaux, puis fusionner les phonèmes. Les résultats montrent un effet de l’entraînement en moyenne et grande sections sur les capacités phonologiques de lecture-écriture au cours préparatoire. De plus, les enfants qui ont le plus bénéficié de l’entraînement sont ceux qui avaient les scores les plus faibles en habiletés phonologiques en moyenne section. Cette étude montre que l’on peut entraîner précocement les habiletés phonologiques, dès la moyenne section. Une des caractéristiques de cette étude est que l’entraînement ciblé sur le phonème a porté en moyenne section de maternelle sur une tâche de discrimination pho- némique et en grande section de maternelle sur une tâche de segmen- tation phonémique et sur l’association lettres-sons. Maryse Bianco, Pascal Bressoux, Anne-Lise Doyen, Éric Lambert, Laurent Lima, Catherine Pellenq, Michel Zorman, “Early Training of Oral Comprehension and Phonological Skills at Preschool: the Results of a 3 Years Longitudinal study”, Scientific Studies of Reading, 14(3), 211-246, 2010. 34 — Développer les habiletés phonologiques En résumé La conscience phonémique, la lecture et l’écriture sont étroitement liées : le développement de la conscience phonémique favorise l’entrée dans l’apprentissage de la lecture-écriture. L’entraînement à la conscience phonologique, qui se centre sur les unités de traitement des sons de parole (syllabe, rime, phonème) et leur manipulation, se distingue de l’entraînement à la conscience phonémique qui se centre sur la relation graphème-phonème. La conscience phonémique s’acquiert progressivement. Les entraînements de manipulation phonémique et de mise en lien des graphèmes avec les phonèmes sont les plus pertinents pour entrer dans l’apprentissage de la lecture et l’écriture. Les entraînements phonémiques sont plus efficaces quand ils portent sur le lien oral-écrit (lettres-sons, par exemple), comparativement aux entraînements effectués uniquement à l’oral ou avec des supports visuels comme des images. La manipulation de phonèmes sans support écrit est un exercice très difficile : les lecteurs ont tendance à mobiliser leurs connaissances de l’écrit pour réaliser des exercices de conscience phonémique. II De l’oral à l’écrit - vers la découverte du principe alphabétique 36 — De l’oral à l’écrit – vers la découverte du principe alphabétique Cette seconde partie insiste sur l’apprentissage des lettres dans leurs différentes composantes (nom, forme et son). Le travail autour de la lettre (rapports nom/son de la lettre et sa graphie) constitue un enjeu essentiel à l’école maternelle. La recherche souligne en effet l’importance de la connaissance des lettres et son caractère prédictif pour la réussite des apprentissages en lecture et en écriture à l’école élémentaire. Pourquoi est-il si important d’apprendre les lettres ? La connaissance des lettres est un prédicteur précoce de la réussite en lecture-écri- ture. Des études de type corrélationnel mettent en évidence le lien existant entre les deux. D’autres travaux de type causal montrent qu’une stimulation de la connaissance des lettres (nom et/ou son) chez les jeunes élèves avant l’enseignement formel du code contribue à faciliter l’accès au principe alphabétique et à sa compréhension. Il s’agit ici de présenter des travaux illustrant l’importance de l’apprentissage précoce des lettres et de leur utilisation dans leurs différentes dimensions pour aider le jeune élève à accéder au principe alphabétique, base de l’apprentissage de la lecture-écri- ture. Dans cet apprentissage, doivent être distinguées la connaissance du nom des lettres, celle de leur valeur phonémique et enfin celle relative à leur forme graphique. Dans ce dernier cas, la connaissance de la forme s’appuie sur deux modalités qui tiennent compte de la composante visuelle (reconnaître que telle forme graphique est une lettre ou pas) et de la composante motrice (l’élève peut la reproduire, ce qui relève de la production écrite). « L’une des conditions pour apprendre à lire et à écrire est d’avoir Programme découvert le principe alphabétique selon lequel l’écrit code en grande d’enseignement de partie, non pas directement le sens, mais l’oral (la sonorité) de ce qu’on dit. l’école maternelle, Durant les trois années de l’école maternelle, les enfants vont découvrir Bulletin officiel spécial ce principe (c’est-à-dire comprendre la relation entre lettres et sons) et n° 2 du 26 mars 2015. commencer à le mettre en œuvre ». 37 — De l’oral à l’écrit – vers la découverte du principe alphabétique LA CONNAISSANCE DU NOM DES LETTRES Avant l’enseignement formel du principe alphabétique et de la lecture, la connaissance du nom des lettres contribue d’une part, à l’accès au code phonographique et facilite d’autre part, l’accès aux représentations phonémiques. En effet, la connaissance du nom des lettres permet de constituer les premiers liens entre l’oral et l’écrit. Un cer- tain nombre de travaux scientifiques montre que les jeunes élèves dès 4-5 ans sont capables lors d’activités de décodage de séquences de lettres ou d’essai d’écriture de faire le lien entre les lettres qu’ils connaissent et peuvent déjà nommer ce qu’elles peuvent représenter. En d’autres termes, les premières connexions oral-écrit sont effectuées grâce au nom des lettres qui facilite la prise de conscience de la nature phonographique du système d’écriture et de la fonction des lettres dans ce système (par exemple, en connaissant le nom des lettres V, L et O, le jeune élève peut « écrire » vélo). La verbalisation du professeur clarifie les représentations phonémiques de l’élève en rendant explicites les correspondances graphèmes-phonèmes nécessaires à l’écriture de la syllabe [vé]. « Dans une étude réalisée auprès d’enfants de moyenne section, deux Catherine Biot- groupes sont constitués, l’un connaisseur des lettres (C) et un autre Chevrier, Jean Écalle, non connaisseur (nC). Après un renforcement sur 5 semaines du Annie Magnan, groupe C sur 4 lettres cibles L, P, S, T pour les nommer et les écrire en « Pourquoi la lettres d’imprimerie, deux tâches sont proposées, l’une de production connaissance du nom orthographique et une autre portant sur les habiletés phonologiques. des lettres est-elle Le groupe C obtient des performances supérieures au groupe nC dans si importante dans une tâche de production orthographique où il s’agissait de produire l’apprentissage un pseudo-mot (écrire téva) et dans une tâche d’extraction syllabique de la langue écrite », dans un mot. Les auteurs concluent que les activités stimulant Revue française la connaissance du nom des lettres ont permis aux jeunes enfants de pédagogie, 162, du groupe C d’établir les premiers liens entre l’oral et l’écrit, ces activités pp. 15-27, 2008. ayant stimulé en même temps leurs habiletés phonologiques. » La connaissance du nom des lettres facilite également l’accès au son de la lettre. Elle ne permet pas de connaître les relations graphèmes-phonèmes dans leur tota- lité mais elle constitue un premier pas vers l’accès à la représentation phonémique portée par la lettre (par exemple, la connaissance du nom de la lettre P facilite l’accès au phonème /p/). On observe que pour les voyelles l’accès au phonème est facilité puisque le nom de la lettre est identique au phonème et qu’il peut être produit de façon isolée (A = /a/) alors que pour les phonèmes consonantiques, le phonème est en position initiale (P = /pé/) ou en position finale (L = /èl/). Enfin, il a été observé que la connaissance du nom des lettres du prénom est supérieure à celle des lettres qui n’y figurent pas. En outre, c’est la première lettre du prénom qui est la mieux connue. Dès lors, on comprend l’intérêt d’enseigner conjointement le nom de la lettre et le son qu’elle produit : c’est assez simple pour les voyelles (sauf Y) ; concernant les consonnes, on s’attachera de manière très explicite à enseigner le nom de la lettre et le son qu’elle produit, en marquant nettement la différence entre « nommer une lettre » et la faire « sonner ». En effet, pour prononcer les consonnes, il est nécessaire de les combiner avec une voyelle placée avant (F, L, M, N, R, S, X) ou après (B, C, D, G, J, K, P, Q, T, V). 38 — De l’oral à l’écrit – vers la découverte du principe alphabétique LA CONNAISSANCE DU SON DES LETTRES L’objectif de la maternelle n’est pas d’enseigner systématiquement le principe alphabétique, mais l’élève est capable d’accéder à la connaissance du son des voyelles, en raison de leurs caractéristiques articulatoires puisque, d’un seul geste phonatoire, le phonème vocalique s’insère dans le nom de la lettre (sauf le Y). Cette connaissance peut s’acquérir par apprentissage implicite (l’élève repère par lui- même certaines régularités entre le nom de la lettre et le son qu’elle transcrit) ou par apprentissage explicite : le professeur souligne systématiquement le lien entre le nom de la lettre et le son qu’elle produit, en particulier à l’aide d’images (par exemple, A comme dans « avion »). LA CONNAISSANCE DE LA FORME GRAPHIQUE DES LETTRES La capacité à connaître et reconnaître la forme graphique des lettres repose sur des composantes visuelles et motrices. COMPOSANTE VISUELLE La connaissance des lettres de l’alphabet suppose que l’élève distingue : — les lettres des signes visuels conventionnels, utilisés dans son environnement écrit proche ; — les lettres des chiffres ; — les lettres utilisées en français de celles utilisées dans une autre langue selon un alphabet différent (par exemple : arabe, cyrillique), pour les élèves d’un milieu biculturel. COMPOSANTE MOTRICE Connaître une lettre, c’est aussi savoir la tracer. Les recherches montrent qu’une activité de traçage de lettres (surlignage, copie, etc.) permet à l’élève de mieux les mémoriser, contrairement au fait de les taper sur un clavier. Par ailleurs, d’autres études, nombreuses, montrent qu’une exploration haptique des lettres et/ou une exploration motrice accompagnée d’exercices phonologiques contribue à un meilleur apprentissage des lettres et a un effet sur la procédure de décodage (lire ou écrire des syllabes). Par le toucher, l’élève s’exerce à décrire et nommer les lettres en recourant à la mémoire kinesthésique. EXEMPLE D’ACTIVITÉ Dans une boîte sont dissimulées des lettres en relief. L’élève introduit ses mains dans des trous et doit à l’aveugle essayer de reconnaître la lettre qu’il tient en main. Il s’exprime sur ses caractéristiques et la sort de la boîte pour vérifier son hypothèse. Le nombre de lettres varie en fonction de l’habileté de l’élève. Quand la connaissance des lettres s’affine, il est possible de proposer l’exercice en mêlant des lettres qui se ressemblent (E, B, F, par exemple). 39 — De l’oral à l’écrit – vers la découverte du principe alphabétique Les activités multi-sensorielles ont impliqué des élèves de grande section, qui de ce fait, n’ont pas encore été confrontés à l’enseignement systématique du code. Ces activités de stimulation multi-sensorielle semblent avoir un effet persistant sur l’ap- prentissage des lettres, leur nom, leur son ainsi que leur tracé. Ces gestes doivent être automatisés, un entraînement régulier, inscrit dans des situations variées (supports, outils pour écrire, implication du corps dans sa globalité) permet aux gestes liés à la production des lettres de devenir progressivement plus fluides. La fluidité du geste d’écriture automatisé libère des ressources cognitives pour des processus de plus haut niveau relatifs à la production orthographique, à la planification de textes. En cela, les activités d’écriture se distinguent clairement des activités de dessin et de graphisme : savoir écrire, c’est automatiser des gestes moteurs liés à la réalisation de formes graphiques conventionnelles, les lettres, quelles que soient leur forme et leur taille. Toutefois, un certain nombre de gestes graphiques de base (ronds, boucles ascendantes et descendantes, traits horizontaux et verticaux) sont essentiels pour maîtriser le tracé des lettres. Les activités de graphisme n’ont pas pour but de représenter un code conventionnel porteur de sens, au contraire des activités d’écriture de lettres qui seront ensuite associées pour former des mots. Deux études portant sur l’entraînement multisensoriel à l’apprentissage des lettres Dans cette première étude s’adressant à des enfants de 5 ans en grande section de maternelle, l’objectif était de stimuler l’apprentissage des lettres (nom, son et conscience phonémique) avec une exploration des lettres qui différait selon les groupes. Le premier groupe HVAM bénéficiait d’un entraînement haptique, visuel, auditif et métaphonologique, le second groupe VAM n’avait pas d’exploration haptique et le troisième groupe VAM-s avait un entraînement visuel basé sur une exploration des lettres du regard et où on insistait sur la séquentialité du tracé de la lettre. Les mêmes exercices phonologiques étaient proposés dans les trois groupes. Après entraînement, c’est le groupe HVAM qui obtient des performances supérieures dans une tâche de décodage de pseudo-mots. Cette épreuve est un bon indicateur de la compréhension du principe alphabétique. Les trois groupes augmentent leurs performances sur les habiletés phonologiques de façon similaire. La modalité haptique (groupe HVAM) semble contribuer de façon significative à l’utilisation des connexions entre les unités orales et les unités écrites. Florence Bara, Édouard Gentaz, Pascale Colé, Liliane Sprenger-Charolles, “The Visuo-Haptic and Haptic Exploration of Letters Increases the Kindergarten- Children’s Understanding of the Alphabetic Principle”, Cognitive Development, 19, pp. 433-449, 2004. Dans la seconde étude, à nouveau réalisée auprès d’enfants de grande section, l’objectif était de tester quelles modalités sensorielles pouvaient stimuler le plus favorablement le principe alphabétique. Cinq groupes ont été constitués : le groupe V bénéficiait d’un entraînement sur le traitement visuel des lettres, le groupe H d’un traitement haptique, le groupe G d’un traitement grapho-moteur (surlignage), et deux autres groupes avaient une double stimulation, VH et VG. Tous les groupes bénéficiaient d’exercices phonologiques. Les résultats montrent que les groupes VH et VG obtiennent des performances supérieures dans deux tâches, l’une de lecture et l’autre d’écriture de pseudo-mots. En outre, ces gains de performances 40 — De l’oral à l’écrit – vers la découverte du principe alphabétique persistent à moyen terme, soit 4 mois après. Enfin, il a été observé un effet de trans- fert sur des lettres non entraînées pendant les sessions. Ces résultats plaident en faveur d’une approche multisensorielle pour aider les enfants à apprendre les lettres pour comprendre et utiliser le principe alphabétique. Hélène Labat, Guillaume Vallet, Annie Magnan, Jean Écalle, “Facilitating effect of multisensory letter encoding on reading and spelling in 5-year-old children”, Applied Cognitive Psychology, 29(3), pp. 381-391, 2015. Comment mettre en œuvre cet enseignement ? Le professeur développe l’intérêt de l’élève pour l’écrit en l’amenant à observer de plus en plus finement les écrits qu’il rencontre. Apprendre le nom des lettres et le son qu’elles produisent La prise de conscience phonologique ainsi que la compréhension du principe alphabétique sont travaillées conjointement et en complémentarité, en tenant compte de l’âge des élèves et de leurs capacités motrices, visuelles et cognitives. La connais- sance des lettres implique que l’élève apprenne le nom, le tracé et le son de la lettre, non pas de manière successive mais dans une modalité d’aller-retour. « Quand l’enfant comprend que le mot est lui-même constitué d’unités Recommandations sonores segmentables (syllabes, rimes, attaques éventuellement), pédagogiques, L’École l’attention peut se porter sur le repérage des unités plus petites – maternelle, école les lettres – dans leur rapport avec les sons : les phonèmes. » du langage, note de service n° 2019-084, Bulletin officiel du 29 mai 2019. La reconnaissance de toutes les lettres de l’alphabet et de leur correspondance dans les diverses graphies (cursive, script et capitale d’imprimerie) est une compétence attendue des élèves à la fin de l’école maternelle. Reconnaître les caractéristiques de chaque lettre de manière isolée est primordial. La graphie en lettres capitales marque une première prise de conscience de l’unité de chaque lettre. Cependant chaque lettre doit être connue par ses trois composantes : nom, forme graphique et son, bien que l’objectif de l’école maternelle ne soit pas d’enseigner de manière formelle le principe alphabétique. 41 — De l’oral à l’écrit – vers la découverte du principe alphabétique « Le prénom est un support privilégié pour mettre en évidence Recommandations la permanence des lettres et de leur alignement de gauche à droite. pédagogiques, L’École Dans un premier temps, la graphie en lettres capitales permet maternelle, école de mieux prendre conscience de l’individualité de chaque lettre. » du langage, note de service n° 2019-084, Bulletin officiel du 29 mai 2019. EXEMPLES D’ACTIVITÉS Les activités proposées doivent être courtes, structurées, régulières, variées, adaptées aux capacités des élèves pour stabiliser les apprentissages. Proposées en groupe restreint, elles comportent : — Des activités de mémorisation « le jeu de l’ophtalmologiste » : faire jouer le rôle du patient dont l’ophtalmolo- giste teste la vue en demandant de nommer les lettres et/ou de les bruiter au fur et à mesure que l’ophtalmologiste les pointe sur l’alphabet (lettres de tailles et typographies différentes) ; « le jeu de l’oie des lettres » : se déplacer sur la piste à l’aide d’un dé. Nommer et brui- ter la lettre représentée dans la case sur laquelle arrive le pion. Rester dans cette case lorsque la réponse est correcte. Reculer d’une case dans le cas contraire ; « la commande de lettres » : commander des lettres auprès d’un autre élève en indiquant leur nom et en produisant leur son. — Des activités qui ont pour support le prénom Dès la petite section, le prénom des élèves est utilisé quotidiennement dans les activités de la classe. Le professeur amène l’élève à identifier son prénom écrit en capitales d’imprimerie en prenant des repères visuels (forme de la majuscule, longueur du mot, nombre de lettres, point sur un I, accent, graphie particulière comme le X ou le H, dernière lettre, trait d’union). Ces repères sont repris pour l’identification d’autres prénoms. Les lettres récurrentes qui composent le prénom des élèves sont tout d’abord identifiées. Les élèves sont progressivement en capacité de les reconnaître toutes. Il ne s’agit pas de viser l’exhaustivité au départ. — Des activités de catégorisation Par exemple, classement des prénoms après le repérage de l’initiale de chacun, ou classement de plusieurs prénoms qui ont une lettre commune, de prénoms qui ont deux lettres identiques, des lettres doubles ou espacées dans le mot. Ces activités contribuent à susciter chez les élèves une attention fine portée aux lettres d’un mot. 42 — De l’oral à l’écrit – vers la découverte du principe alphabétique — Des activités de phonémisation de mots Par exemple, le professeur place devant l’élève Sarah l’étiquette de son pré- nom et prononce devant elle le son de chaque lettre en les pointant au fur et à mesure. Le professeur peut y associer simultanément le nom des lettres : « S, /s/, A, /a/, R, /r/, A, /a/ et la lettre H qui ne s’entend pas ». Le professeur « étire » le son /s/ ce qui permet à l’élève de mieux appréhender le son de cette consonne. Sarah dit le son des lettres « /s/ /a/ /r/ /a/ et la lettre qui ne s’en- tend pas ». Pour l’élève de petite section, le premier mot travaillé est le prénom mais d’autres mots sont également support de phonémisation lorsque l’ortho- graphe du prénom est complexe et qu’elle met l’élève en difficulté 17. — Des activités d’écriture Faire écrire les élèves en effectuant des allers-retours constants entre l’oral et l’écrit. Par exemple, demander aux élèves de répéter le mot à écrire lentement en essayant de prolonger les phonèmes pour retrouver les lettres auxquelles ils correspondent. Le corpus de mots travaillés nécessite d’être choisi soigneu- sement pour présenter une transcription de graphèmes-phonèmes simples et renforcer le lien entre lettres et sons sans le complexifier, sans passer sous silence la rencontre avec des graphèmes complexes qui peuvent être présents dans les prénoms (il est important d’expliquer : « dans Chloé on entend /k/, dans ton prénom on écrit /k/ avec un C puis un H »). Cette activité ne peut être menée qu’en petit groupe guidée par l’enseignant. De nombreuses ressources pour la classe offrent des situations de jeu qui per- mettent de mettre en évidence les rapports lettre/son, dont la ressource d’accom- pagnement pour l’école maternelle disponible sur Éduscol, Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions18. Quelques points d’attention pour un enseignement efficace Le travail en petit groupe est privilégié pour pouvoir accorder une attention toute particulière aux productions de chaque élève et assurer un étayage adap

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