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Ce document fournit des informations sur le paludisme, une maladie infectieuse. Le document décrit les différents stades du cycle évolutif du parasite, les symptômes cliniques, les méthodes de diagnostic et de traitement.

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PALUDISME Le cycle asexué érythrocytaire chez l’homme : les PALUDISME mérozoïtes se transforment en trophozoïtes qui...

PALUDISME Le cycle asexué érythrocytaire chez l’homme : les PALUDISME mérozoïtes se transforment en trophozoïtes qui grossissent et se transforment à leur tour en schizontes chargés d’hémozoïne. Les schizontes mûrs, encore appelés «corps en rosace», vont éclater en libérant des mérozoïtes qui vont à leur tour parasiter des hématies DEFINITION saines et assurer de nouveaux cycles érythrocytaires. L’éclatement des hématies qui a lieu toutes les 48 ou 72 Le paludisme est une protozoonose due à des heures est contemporain des accès fébriles palustres. protozoaires appartenant au genre Plasmodium et transmise par la piqûre de l’anophèle femelle. C’est après plusieurs cycles endoérythrocytaires que vont apparaître des gamétocytes mâles et femelles issus Le paludisme demeure encore l’un des grands fléaux de la transformation de certains trophozoïtes, des zones tropicales chaudes et humides à l’origine potentiellement ingérés par l’anophèle lors d’une d’une mortalité importante. piqûre. Les gamétocytes ingérés vont se diriger vers Synonymes : paludisme / malaria. l’estomac du moustique et conduire à la formation d’un œuf (ookinète) après fécondation du gamète femelle. BIOPATHOLOGIE Les sporozoïtes issus de l’éclatement de l’oocyste gagnent les glandes salivaires du moustique en 9 à l5 EPIDEMIOLOGIE jours. Selon l’OMS, le paludisme touche chaque année CLINIQUE environ 300 à 500 millions de personnes dans le monde Phase d’invasion : l’accès de primoinvasion survient avec pour conséquence 1 à 2 millions de décès après une incubation comprise entre 7 et 21 jours, (principalement des enfants) dont 90 % surviennent en parfois plusieurs mois. Elle est caractérisée par une Afrique. L’augmentation de la population, des voyages, fièvre plus ou moins régulière, souvent accompagnée les modifications climatiques, le développement de la de céphalées, myalgies, douleurs abdominales, nausées, résistance aux antipaludéens et aux insecticides vomissements qui évoquent plutôt au départ une expliquent que la maladie ne cesse d’augmenter. En pathologie digestive infectieuse. France, environ 7000 cas importés sont estimés chaque année. Accès palustre simple : il est composé d’une succession Le paludisme est provoqué par 5 espèces de de 3 épisodes : frissons, chaleur, sueurs répétés selon un Plasmodium dont la répartition géographique diffère : rythme régulier. Chaque épisode dure environ 1 heure. Plasmodium falciparum dans les zones tropicales, Le rythme des accès varie selon l’espèce plasmodiale en Plasmodium vivax en Asie du sud-est et en Amérique du cause : tous les 2 jours pour la fièvre tierce (Pl vivax et Pl sud, Plasmodium ovale en Afrique centrale, ovale) ou tous les 3 jours pour la fièvre quarte (Pl Plasmodium malariae en zones tropicales et malariae). Plasmodium knowlesi en Asie du sud-est. Accès pernicieux : ou neuropaludisme, représente la CYCLE EVOLUTIF forme mortelle de la maladie et impose l’instauration Les 3 éléments du cycle sont les Plasmodium, le d’un traitement d’urgence par voie intraveineuse. Il moustique vecteur et l’homme (seul réservoir du représente 6 à 10 % des accès à Plasmodium falciparum parasite). Le cycle comprend 3 étapes : le cycle sexué et concerne plus particulièrement des enfants ou chez l’anophèle, le stade humain caractérisé par son adultes non immuns. La clinique, d’installation cycle asexué hépatique et son cycle érythrocytaire. progressive ou brutale, associe de la fièvre à 39 - 40 °C, Le cycle sexué chez l’anophèle femelle : implique la une tachychardie, une dyspnée, un ictère, une présence d’eau douce car la femelle va y pondre ses hépatoslénomégalie, une insuffisance rénale œufs (environ 50 tous les 3 jours). Les larves vont se fonctionnelle fréquente et des signes neurologiques transformer en nymphes puis en insectes adultes (ou importants parmi lesquels de fortes céphalées, des imagos). La durée de vie des adultes varie entre 1 troubles de la conscience, des convulsions, une semaine (mâles) et 3 semaines (femelles) après omnubilation pouvant aller jusqu’au coma profond. l’accouplement. Les femelles fécondées ne peuvent L’œdème pulmonaire est une complication assez pondre qu’après un repas sanguin. Elles piquent surtout fréquente et grave puisqu’elle est responsable de 80 % la nuit et inoculent les sporozoïtes avec la salive. des décès. Le cycle asexué hépatique chez l’homme : les Fièvre bilieuse hémoglobinurique : elle correspond à centaines de parasites injectés chez l’homme par le une réaction immunologique anaphylactique moustique ou sporozoïtes atteignent les cellules déclenchée par la prise de quinine chez un sujet ayant hépatiques où ils commencent à se multiplier. Après le eu des antécédents d’accès à Plasmodium falciparum stade de schizontes, ils quittent le foie à l’état de traités par la quinine ou d’autres médicaments mérozoïtes pour gagner les hématies. antipaludéens : méfloquine, halofantrine. Elle comprend © 2015 Biomnis – PRÉCIS DE BIOPATHOLOGIE ANALYSES MÉDICALES SPÉCIALISÉES 1/4 PALUDISME une fièvre d’apparition brutale à 40 °C, une asthénie, gravité, notamment les atteintes cérébrales, qui sont des lombalgies puis un ictère, des vomissements, une exceptionnelles dans le cas de P. knowlesi alors que le chute tensionnelle et une oligurie avec des urines neuropaludisme est fréquent avec P. falciparum. En «rouge porto» en relation avec une hémoglobinurie revanche, l’insuffisance respiratoire aiguë, qui est aussi importante. Elle nécessite l’institution d’un traitement un critère clinique de gravité de P. falciparum, mais ne d’urgence en unités de soins spécialisés avec épuration survient que dans 4,5 % des cas avec cette espèce, est extra-rénale et exsanguino-transfusion. observée dans 65 % des cas d’infection à P. knowlesi. Paludisme et grossesse : les défenses immunitaires étant diminuées lors de la grossesse, la fréquence et la INDICATIONS DE LA RECHERCHE gravité des accès palustres augmente et concerne aussi bien les femmes autochtones que les touristes. La En cas de fièvre survenant chez un patient au retour gravité du paludisme dépend aussi de l’espèce d’un séjour en zone d’endémie ou au moindre doute, il plasmodiale en cause. faut réaliser un frottis et une goutte épaisse, et faire une recherche d’antigène de Plasmodium, y compris chez Paludisme de l’enfant : le paludisme congénital les voyageurs qui ont suivi leur chimioprophylaxie « maladie » est rare mais gravissime. antipalustre. L’examen doit être renouvelé après 24 à 48 Chez l’enfant, le paludisme représente une cause heures s’il est négatif initialement et si la fièvre persiste, importante de mortalité. En zone d’endémie, l’enfant en laboratoire de ville ou à l’hôpital, en particulier si est protégé jusqu’à 3 mois environ par les anticorps l’hospitalisation est prolongée (orthopédie, maternels. En revanche, les crises de paludisme sont réanimation,…). fréquentes jusqu’à l’adolescence : les symptômes sont identiques à ceux de l’adulte avec des troubles digestifs RECOMMANDATIONS PREANALYTIQUES fréquents simulant une gastro-entérite, des convulsions voire des troubles ORL. L’accès pernicieux et le PRELEVEMENT – CONSERVATION - TRANSPORT paludisme viscéral évolutif sont fréquents avec Se reporter au référentiel des examens de biologie Plasmodium falciparum. médicale Biomnis en ligne pour les conditions de Paludisme des aéroports : le paludisme d’aéroport est prélèvement et conservation-transport. dû à un moustique du genre Anophèle, infecté par un Plasmodium et qui voyage par l’intermédiaire d’un RENSEIGNEMENTS INDISPENSABLES avion d’une zone d’endémie vers une zone indemne de Symptômes cliniques : fièvre, frissons, sueurs, paludisme. Il est rare (depuis 1969, 30 cas déclarés dont céphalées, troubles digestifs, régularité des accès 2 au cours de l’été 2008), mais grave en raison du retard fébriles synchrones ou asynchrones ?... diagnostique fréquent chez des individus non Notion de voyage, de séjour dans une zone endémique prémunis. Il s’agit d’une maladie à déclaration datant de moins de 5 ans ? Connaître le lieu précis obligatoire en France. Le règlement sanitaire (pays) et la date du séjour ? international impose aux états de vérifier que les avions Notion de transfusion(s) récente(s) ? en provenance de zone d’endémie palustre ou arbovirale soient systématiquement désinsectisés Proximité d’un aéroport international ? Des mesures de lutte antivectorielle doivent être mises Chimioprophylaxie ? en œuvre dans un rayon d’au moins 400 mètres autour du périmètre des aéroports en zone d’endémie palustre METHODES DE DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE ou arbovirale. Paludisme à P. knowlesi DIAGNOSTIC DIRECT Il est présent en Asie du Sud-Est. Le nombre de cas est Recherche directe du parasite dans le sang sur frottis probablement très sous-estimé car le diagnostic et goutte épaisse : la technique classique consiste à différentiel entre P. knowlesi et P. malariae est difficile, révéler les hématozoaires sur un frottis sanguin ou une mais aussi avec P. falciparum, car le frottis et les tests goutte épaisse colorés au May-Grünwald-Giemsa. Le antigéniques ne sont pas fiables et P. knowlesi peut frottis permet de faire un diagnostic d’espèce par donner des parasitémies très élevées (avec P. malariae, distinction des différents stades intra-éythrocytaires des ce n’est pas le cas). Les complications pouvant être Plasmodium et d’estimer le niveau de parasitémie. La associées à P. knowlesi sont : un ictère, une insuffisance goutte épaisse concentre les parasites et offre donc une rénale aiguë, une hypotension, une acidose, une meilleure sensibilité (seuil de détection de l’ordre de 10 hypoglycémie, un syndrome de détresse respiratoire à 20 parasites/mm3 pour la goutte épaisse versus 150 à aigu. La mortalité est fonction du nombre des 200 parasites/mm3 pour le frottis). En revanche, le complications (100 % lorsque les six sont présentes). diagnostic d’espèce est plus difficile. Ces 2 techniques Certaine spécificités peuvent être distinguées dans la sont complémentaires et il est recommandé de les associer. © 2015 Biomnis – PRÉCIS DE BIOPATHOLOGIE ANALYSES MÉDICALES SPÉCIALISÉES 2/4 PALUDISME Autres techniques : potentiellement contaminants ou encore en - Mise en évidence directe du parasite par la technique épidémiologie. ® QBC malaria test fondée sur la microcentrifugation du DIAGNOSTIC NON SPECIFIQUE sang en tube capillaire avec coloration à l’acridine orange, visant à augmenter la sensibilité du diagnostic. L’hémogramme révèle une anémie de type hémolytique souvent retardée, une hyperleucocytose – Biologie moléculaire : hybridation, PCR (nested-PCR plus marquée au début et une thrombopénie précoce ou real-time PCR), techniques très sensibles et très et importante lors des accès à P. falciparum surtout, spécifiques, sont utiles en cas de faibles parasitémies, mais aussi à P. vivax et P. ovale. A noter une mais ne sont pas adaptées au diagnostic d’urgence. hypocholestérolémie, une hypertriglycéridémie et une – Recherche d’antigènes spécifiques : des techniques élévation des LDH en phase aiguë. rapides (5 minutes) par immunochromatographie permettent la détection d’antigènes de Plasmodium. Deux exemples : TRAITEMENT Le test Now® Malaria de Binax TRAITEMENT CURATIF Il permet la mise en évidence de la proteine HRP-2 ou - En cas de diagnostic de paludisme à P. ovale, malariae Histidine Rich Protein sécrétée par les hématozoaires et ou vivax, le traitement est la chloroquine. localisée à la surface des hématies parasitées. Sa - En cas de paludisme à P. falciparum, tout vomissement sensibilité est élevée pour P. falciparum (96 % par nécessite le recours initial à la quinine IV. Il convient de rapport à la PCR), moindre avec P. vivax (87 %), rechercher des signes de gravité cliniques et insuffisante avec P. malariae et P. ovale (67 %). biologiques. S’ils sont retrouvés, le patient est L’antigénémie HRP-2 peut persister 15 à 30 jours (même hospitalisé immédiatement et traité par quinine en IV. si les frottis sont négatifs ou avec présence seulement Sinon, le patient peut être traité en ambulatoire si et de gamétocytes) après l’accès palustre. Sa détection seulement si les 10 critères suivants sont réunis : patient permet donc aussi un diagnostic a posteriori. adulte, diagnostic fiable, absence de facteur de risque En pratique, sa mise en œuvre est rapide, facile et aucun de mauvaise observance, absence de facteur de risque matériel spécifique n’est nécessaire. Il n’y a pas de faux associé (isolement, âge > 60 ans, pathologie sous- positifs (le facteur rhumatoïde n’interfère pas) ; si le jacente, splénectomie, grossesse…), proximité d’un frottis est lu négatif avec un test rapide positif, il peut hôpital, disponibilité immédiate de l’antipaludique s’agir d’une pauciparasitémie, qui nécessite une prescrit, suivi possible à J3 et J7, plaquettes > 50 relecture du frottis et de la goutte épaisse, d’où l’intérêt 000/mm3, Hb > 10 g/dl, créatininémie < 150 µmol/l, d’associer les deux examens. Les faux négatifs HRP-2 parasitémie < 2 %. Si tous ces critères sont vérifiés, le sont rares avec P. falciparum (un peu moins avec les traitement ambulatoire est possible : depuis 2012, il autres espèces, cf ci-dessus). repose en première ligne sur l’atovaquone + proguanil (Malarone®) ou artéméther + luméfantrine (Riamet®) ou Le test OptiMAL-IT® dihydroartémisinine-pipéraquine (Eurartésim®) ; en Il teste à la fois pfHRP-2 et pLDH. La pLDH est une deuxième ligne, quinine orale ou méfloquine (Lariam®). enzyme sécrétée par toutes les plasmodies humaines au Un suivi par frottis mince et goutte épaisse doit être cours de leur développement intra-érythrocytaire. Elle effectué à J3 (la parasitémie doit être inférieure à 25 % disparaît du sang en même temps que les parasites, se de la valeur initiale), J7 (la parasitémie doit être négativant sous traitement, contrairement à HRP-2. La négative) et J28 (recommandée car il existe des sensibilité de la pLDH est de 92,6 % pour la détection de porteurs asymptomatiques, y compris des européens). Plasmodium falciparum. Le contrôle quotidien de la parasitémie n’a pas d’intérêt. DIAGNOSTIC INDIRECT Les critères OMS d’échec thérapeutique précoce sont une fièvre et une parasitémie persistante à J3. Les techniques sérologiques disponibles sont nombreuses. Parmi elles : l’immunofluorescence Au plan thérapeutique, il faut souligner que la grande indirecte, l’électrosynérèse ou encore l’ELISA. Les avancée de la dernière décennie a été la mise à anticorps apparaissent 15 jours après le début de la disposition des dérivés de l’artémisine dans le monde contamination, atteignent un pic en 4 à 8 semaines et entier : combinaisons thérapeutiques à base vont diminuer lentement. La disparition des anticorps d’artémisine (ACT) pour le traitement des accès simples après traitement n’a lieu qu’au bout d’1 an environ. et artésunate IV (disponible en France depuis mai 2011) C’est pourquoi la sérologie n’a aucun intérêt dans le pour les accès graves. diagnostic d’un paludisme aigu. En revanche, elle présente une utilité comme méthode de diagnostic PROPHYLAXIE rétrospectif, dans le diagnostic de paludisme viscéral Elle comprend une chimioprophylaxie et des mesures évolutif, dans le dépistage des donneurs de sang simples de protection comme l’utilisation d’insecticides © 2015 Biomnis – PRÉCIS DE BIOPATHOLOGIE ANALYSES MÉDICALES SPÉCIALISÉES 3/4 PALUDISME domestiques, de répulsifs de contact, de moustiquaires la nuit, le port de vêtements longs et imprégnés de répulsifs. La chimioprophylaxie doit être adaptée aux zones de résistance. La plupart des pays étant désormais en zone 3 du fait de l’extension des résistances, les trois médicaments les plus utilisés sont les cyclines, la méfloquine et l’atovaquone-proguanil. Un candidat vaccin utilisant la protéine de surface du mérozoïte MSP3 (identifiée comme étant la cible du mécanisme de défense majeur contre l’infection au stade érythrocytaire) a été testé (essais de doses) en 2007 au Burkina Faso chez 45 enfants de 12 à 24 mois. Les résultats ont montré que l’incidence des formes cliniques était bien inférieure dans les deux groupes d’enfants vaccinés (1,2 cas et 1,9 cas pour 100 jours) par rapport au groupe témoin (5,3 cas pour 100 jours). D’autres candidats vaccins sont prometteurs, notamment le vaccin RTS,S/AS01 ayant permis une diminution du nombre d’accès de 50 % en analyse « en intention de traiter », chez des enfants en Afrique (2011). Ces résultats encourageants doivent être confirmés dans de plus grandes cohortes. POUR EN SAVOIR PLUS Bourrée P., Aspects actuels du paludisme, RFL, septembre-octobre 2006; N° 385:25-38. Gentilini M., Le Paludisme, Médecine tropicale. Flammarion, 1993:91-122. http://www.infectiologie.com/site/medias/_documents/co nsensus/2007-paludisme-court.pdf Sirima S.B. et al., Protection against malaria by MSP3 candidate vaccine. N Engl J Med 2011; 365:1062-1064. Bouchaud O., Pull, L., Siriez J.-Y., Le paludisme simple en 2012 : grands classiques et nouveautés, La lettre de l’infectiologue, 2012 :XXVII(n°6) :227-233. Caumes E. Paludisme : de bonnes nouvelles !... En attendant encore mieux ?, La lettre de l’infectiologue, 2012 :XXVII(n°6) :227-233. Société française de microbiologie, Paludisme, In : REMIC : Société Française de Microbiologie Ed ;2015 :803- 809. © 2015 Biomnis – PRÉCIS DE BIOPATHOLOGIE ANALYSES MÉDICALES SPÉCIALISÉES 4/4