Chapitre 9. Administration de la santé : la France PDF
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2020
Jacques Raimondeau, Philippe Marin
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This document describes the administration of health in France, covering its organisation, evolution, and key players. It is a part of a larger publication titled "Références Santé Social".
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Chapitre 9. Administration de la santé : la France Jacques Raimondeau, Philippe...
Chapitre 9. Administration de la santé : la France Jacques Raimondeau, Philippe Marin Dans Références Santé Social 2020, pages 257 à 283 Éditions Presses de l’EHESP ISBN 9782810907380 DOI 10.3917/ehesp.raimo.2020.01.0257 © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) Article disponible en ligne à l’adresse https://www.cairn.info/manuel-de-sante-publique--9782810907380-page-257.htm Découvrir le sommaire de ce numéro, suivre la revue par email, s’abonner... Flashez ce QR Code pour accéder à la page de ce numéro sur Cairn.info. Distribution électronique Cairn.info pour Presses de l’EHESP. 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Chapitre 9 Administration de la santé : la France Jacques Raimondeau, Philippe Marin Objectifs pédagogiques du chapitre Connaître : – Les principes d’organisation de l’administration sanitaire française – Les facteurs d’évolution de cette administration – Le rôle et l’organisation des directions d’administration centrale, des agences sanitaires nationales et des ARS – La place de l’administration de la cohésion sociale © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) 9.1. Le cadre général En France, l’administration de la santé est essentiellement une adminis- tration d’État. Certes, d’autres acteurs administratifs interviennent de façon plus ou moins directe dans le domaine, comme les collectivités territoriales, communes (hygiène publique), conseils départementaux (aide sociale à l’enfance ou ASE, personnes âgées ou handicapées, protection maternelle et infantile ou PMI), conseils régionaux (développement économique, for- mation, dans certains cas, actions facultatives dans le champ de la prévention). Au sein de l’État, c’est le ministère de la santé qui, naturellement, assure l’essentiel des fonctions administratives, mais d’autres ministères interviennent aussi, notamment ceux de l’éducation nationale (santé sco- laire et universitaire), du travail (médecine du travail, fixation des condi- tions de travail, protection des travailleurs), de la justice (détenus, protection judiciaire de la jeunesse ou PJJ), de l’environnement, de l’agri- culture et de l’alimentation (services vétérinaires, fixation de normes sani- taires), de la défense (service de santé des armées). On n’oubliera pas le rôle général joué par le ministère de l’intérieur (préfets), le ministère du budget et, en matière de ressources humaines, le ministère de la fonction publique. L’administration sanitaire, au sens strict, est donc une administration d’État, organisée autour du ministère de la santé. 257 Partie 1. Les fondamentaux Cette entité s’est individualisée au sein de l’administration, assez récem- ment par comparaison à d’autres départements ministériels, comme les Finances, l’Intérieur, la Défense ou la Diplomatie. C’est aussi une administration qui a connu des nombreuses refontes confi- nant à une certaine instabilité. En effet, la loi du 15 février 1902 relative à la protection de la santé publique place le centre de gravité de l’administration sanitaire au niveau communal, avec des bureaux municipaux d’hygiène. Il faut attendre les années 1920 pour qu’aboutisse le projet de créer un ministère de la santé, à la suite des lacunes des administrations communales, de l’épi- démie de grippe espagnole de 1918 et des conséquences de la Première Guerre mondiale, notamment sur le plan démographique. Ce premier ministère de l’hygiène, de l’assistance et de la prévoyance sociale naît du rapprochement de services du ministère de l’intérieur (Direction de l’assistance et de l’hy- giène publique) et du ministère du travail (Direction de la prévoyance sociale). En fait, l’émergence de l’administration sanitaire de l’État sera progressive. À la fin des années 1940, une organisation se stabilise, sur une base départementale, avec une séparation entre une administration sanitaire (Direction départementale d’hygiène) et une administration sociale (Direction de la population). © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) À la fin des années 1950, une réflexion se fait, pour tenir compte de l’évolution des enjeux en matière sanitaire et sociale (recul des maladies infectieuses, développement économique), qui aboutit en 1964 à la création d’une administration conjointe du sanitaire et du social, avec les directions départementales de l’action (ultérieurement des affaires) sanitaire et sociale, les DDASS. Dans les années 1970, avec les premières inquiétudes à propos des dépenses de santé, s’exprime le choix du niveau régional pour l’organisation de l’offre de soins, avec la création des DRASS, directions régionales des affaires sanitaires et sociales, qui absorbent les directions régionales de la Sécurité sociale. L’importance des DRASS croît jusqu’au milieu des années 1990, tandis que les DDASS, dans le cadre des opérations de décentralisation des années 1980, perdent une partie de leurs missions historiques au profit des conseils généraux (aujourd’hui, conseils départementaux), notamment l’ASE. Les années 1990 marquent le début du processus d’« agencification » de l’administration sanitaire, d’abord au niveau national puis, dès 1996, au niveau régional, avec la création des agences régionales de l’hospitalisation (ARH). La création des ARH correspondait à une étape de réorganisation partielle de l’administration sanitaire, limitée au champ des établissements de santé et qui ne pouvait suffire à faire face aux enjeux auxquels était confronté le système de santé – lesquels impliquaient une administration plus globale. Cette administration apparaîtra en 2010 avec les agences régionales de santé (ARS), issues de la loi HPST de 2009, tandis que les agences nationales prenaient une place croissante au fil des années. Ainsi l’administration sani- taire française est-elle évolutive à la fois quant à ses champs de compétence 258 Administration de la santé : la France Partie 1. Chapitre 9. (relations entre l’État, les collectivités territoriales et la Sécurité sociale), son organisation géographique (équilibre entre les niveaux départemental et régio- nal) et ses modes d’organisation (services administratifs « classiques » ou « agences »). Aujourd’hui, l’administration sanitaire française présente deux caractéris- tiques d’ensemble qui font sa spécificité : – Organisation à deux niveaux : national et régional, alors que le schéma ordinaire de l’administration française comprend un troisième niveau, départe- mental. Il existe aussi un niveau particulier, interrégional, la Zone, pour les questions de défense et de sécurité sanitaire. Le niveau national comprend les directions d’administration centrale et des agences sanitaires ; l’échelon régio- nal est représenté par les ARS. – Organisation principalement à base d’établissements publics : agences nationales et régionales de santé. Aujourd’hui, seules les directions d’adminis- tration centrale (DAC) sont des services administratifs classiques. Le cadre général d’action de l’administration sanitaire est fixé par la Stratégie nationale de santé (SNS) et la politique de santé (➠ Chapitre 16). La Stratégie nationale de santé française pour 2018‑2022 fait référence à deux cadres supranationaux : la stratégie européenne en matière de santé et la stratégie de l’OMS pour la région européenne (« Santé 2020 »). © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) 9.2. Les directions d’administration centrale (DAC) et le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) Les principales fonctions des DAC sont les suivantes : – la production normative, législative et réglementaire ; – la planification sanitaire (➠ Chapitre 11), soit en assurant directement une fonction de planification nationale (plans nationaux, tels que le Programme national nutrition santé, le plan Cancer, etc.) ou en fournissant les éléments de cadrage aux planificateurs régionaux, les ARS ; – l’allocation de ressources, soit directement pour certaines activités ou certains opérateurs nationaux, soit en répartissant globalement les crédits entre régions, à destination des ARS ; – le pilotage de la mise en œuvre des politiques publiques et le pilotage ou l’animation des opérateurs (dont les agences sanitaires) ; – la régulation, l’évaluation, le contrôle, soit directement (rôle de l ’Inspection générale des affaires sociales ou IGAS, notamment), soit en planifiant les acti- vités mises en œuvre en région ; – la gestion directe de certaines activités, le cas échéant. L’administration centrale assure l’interface interministérielle (par exemple, pour la Stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens) et avec le Parlement, notamment pour la préparation de la loi de finances (dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances [LOLF]) et de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS). La structure générale d’une DAC est caractérisée par un découpage en sous-directions, elles-mêmes composées 259 Partie 1. Les fondamentaux de bureaux, qui constituent les briques élémentaires, relativement stables, de l’administration centrale. Le ministère de la santé comprend les DAC suivantes. 9.2.1. Le Secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales (SGMAS) Cette structure, relativement récente1, couvre plusieurs départements minis- tériels : les solidarités, la santé, le travail, l’emploi, la formation professionnelle, la famille, l’enfance, les droits des femmes, la ville, la vie associative. Elle assure une fonction de coordination générale des composantes, natio- nales et régionales, de l’administration sanitaire, notamment le pilotage des ARS et de la mise en œuvre de la SNS. Le SGMAS comprend quatre directions (ressources humaines ; finances, achats et services ; systèmes d’information ; affaires juridiques), ainsi que quatre délégations et services (affaires européennes et internationales ; infor- mation et communication ; stratégie des systèmes d’information en santé ; Haut fonctionnaire de défense et de sécurité). © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) 9.2.2. L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) L’IGAS est, avec l’Inspection générale de l’administration (IGA) et l’Ins- pection générale des finances (IGF), l’une des trois inspections générales interministérielles. Son champ de compétence comprend la santé, l’insertion sociale, la protection sociale, les appels à la générosité publique, le travail, l’emploi et la formation professionnelle. Les principales activités de l’IGAS sont la réalisation d’inspections, d’audits et d’évaluations, soit sur demande ministérielle, soit en auto-saisine. L’IGAS assure aussi une fonction de référence et d’animation pour les inspections menées dans les services déconcentrés et agences de son champ de compétence. 9.2.3. La Direction générale de la santé (DGS) La DGS joue un rôle central dans l’élaboration et la mise en œuvre de la politique de santé. Son action s’organise selon quatre grandes directions : – préserver et améliorer l’état de santé de la population ; – protéger la population des menaces sanitaires : veille et sécurité sanitaire ; gestion des alertes et des situations sanitaires exceptionnelles2 ; 1. Décret n° 2013‑727 du 12 août 2013 portant création, organisation et attributions d’un secréta- riat général chargé des affaires sociales. 2. Cette mission explique le rôle central joué par le Directeur général de la santé dans l’organisa- tion de la réponse et la communication gouvernementale lors de l’épidémie d’infections à c oronavirus Covid-19 en 2020. 260 Administration de la santé : la France Partie 1. Chapitre 9. – garantir la qualité, la sécurité et l’égalité dans l’accès au système de santé : réduction des inégalités sociales et territoriales de santé ; droits des malades et des usagers ; démocratie sanitaire ; respect des règles de déontologie et préven- tion des conflits d’intérêts ; – mobiliser et coordonner les partenaires, en assurant notamment la tutelle des agences sanitaires et en contribuant au pilotage des ARS. Elle est impliquée dans l’élaboration des textes ou l’examen des questions de santé au sein des instances européennes et internationales. Son organisation repose sur quatre sous-directions dévolues respectivement à la santé des populations et à la prévention des maladies chroniques ; aux produits de santé et à la qualité des pratiques et des soins ; à la prévention des risques liés à l’environnement et à l’alimentation ; à la veille et à la sécurité sanitaire (VSS). Cette dernière sous-direction comprend le centre opérationnel de régulation et de réponse aux urgences sanitaires et sociales, le CORRUSS, qui centralise pour toute la France le recueil des alertes et assure la coordination des réponses. De ce fait, la DGS constitue le Point focal national pour la mise en œuvre des alertes internationales, en application notamment du Règlement sanitaire international (➠ Chapitre 10) : cela signifie qu’elle constitue le point d’entrée et de sortie des informations d’alerte sanitaire de niveau inter- © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) national. Elle est en relation étroite avec l’Agence nationale de santé publique (ANSP, Santé publique France). 9.2.4. La Direction générale de l’offre de soins (DGOS) L’action de la DGOS est orientée vers le versant organisation de soins de la SNS (notamment la mise en œuvre des virages préventif, ambulatoire et numérique ; ➠ Chapitre 16) et s’organise selon quatre grands axes : – promouvoir une approche globale et décloisonnée de l’offre de soins, intégrant toutes ses composantes hospitalière et ambulatoire ; – définir la réponse la plus adaptée aux besoins de prise en charge des patients et des usagers, tout particulièrement en vue de la mise en place des parcours de santé et dans une logique de gradation des soins ; – renforcer la performance, la qualité et la sécurité de l’offre de soins dans le respect de l’ONDAM ; – développer l’information sur les droits en matière de santé et prendre en compte la place des usagers. Son organisation repose sur quatre sous-directions, consacrées respecti- vement à la régulation de l’offre de soins, au pilotage de la performance des acteurs, aux ressources humaines du système de santé et, enfin, à la stratégie et aux ressources. 261 Partie 1. Les fondamentaux 9.2.5. La Direction de la sécurité sociale (DSS) L’action de la DSS s’organise autour de missions générales d’élaboration et de mise en œuvre de la politique relative à la Sécurité sociale : assurance maladie, accidents du travail et maladies professionnelles, retraite, famille, dépendance, à la fois en matière de financement et de gouvernance. Il s’agit en pratique d’assurer l’adéquation des prestations de sécurité sociale avec les besoins de la population, tout en veillant à l’équilibre financier des régimes. Elle prépare les lois de financement de la Sécurité sociale (LFSS). La DSS a la particularité d’être rattachée au ministère des affaires sociales et de la santé et au ministère de l’économie et des finances. La DSS assure la tutelle de l’ensemble des organismes de sécurité sociale : caisses du régime général, Mutualité sociale agricole (MSA) et caisses des régimes spéciaux. Elle participe également à la surveillance des organismes de protection complémentaire et de la mutualité. 9.2.6. La Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) L’action de la DGCS est orientée vers les politiques publiques de solida- © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) rité, de développement social et de promotion de l’égalité. Cette direction est compétente en matière de : – politique familiale ; protection de l’enfance et des personnes vulnérables ; – hébergement et accès au logement des personnes sans abri ou mal logées ; – autonomie des personnes handicapées et des personnes âgées ; – égalité entre les femmes et les hommes et promotion des droits des femmes ; – prévention et lutte contre les exclusions et la pauvreté, inclusion sociale et insertion des personnes en situation de précarité ; – économie sociale et solidaire ; promotion des innovations dans le domaine ; – définition du cadre d’intervention des professionnels du secteur social et médico-social et des organismes prestataires de services ; – financement des établissements et services sociaux et médico-sociaux. La DGCS assure le suivi de l’ONDAM médico-social (➠ Chapitre 7). Elle s’organise autour d’un service des politiques sociales et médico- sociales (inclusion sociale, insertion, lutte contre la pauvreté, enfance, famille, personnes âgées, personnes handicapées), d’un service des politiques d’appui (budget, performance, affaires juridiques, professions sociales, animation ter- ritoriale) et du service des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes (SDFE). La DGCS participe au pilotage de trois réseaux territoriaux : ARS (secteur médico-social), directions chargées de la cohésion et de l’insertion sociale, services des droits des femmes. 262 Administration de la santé : la France Partie 1. Chapitre 9. 9.2.7. La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) Comme son nom le suggère, cette DAC a pour missions de : – produire des statistiques ; – réaliser des synthèses et études (par exemple, les comptes nationaux de la santé, les comptes de la protection sociale, l’état de santé de la population en France, la santé des femmes…) ; – contribuer à l’évaluation des politiques publiques ; – informer les professionnels et le public ; – soutenir la recherche. 9.2.8. Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) Le HCSP n’est pas une DAC, mais, par commodité et en raison de son positionnement institutionnel, rattaché à la DGS, nous l’évoquons à cette place. Il a été créé par la loi relative à la politique de santé publique du 9 août 2004 et succède alors au Conseil supérieur d’hygiène publique de France (datant de 1848) et au Haut Comité de la santé publique (1991). © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) C’est une instance d’expertise qui peut être consultée par le gouvernement, par les présidents de commissions parlementaires et par le président de l’Of- fice parlementaire d’évaluation des politiques de santé sur toute question relative à la prévention, à la sécurité sanitaire ou à la performance du système de santé. Il a pour missions de : – contribuer à l’élaboration, au suivi et à l’évaluation de la SNS (➠ Chapitre 11) ; – fournir aux pouvoirs publics une expertise technique en matière de conception et d’évaluation de la politique de santé, et des actions qui en découlent, ainsi que des éléments de réflexion prospective et des conseils sur les questions de santé publique ; – contribuer à l’élaboration d’une politique de santé de l’enfant globale et concertée. Son organisation repose actuellement sur quatre commissions spécialisées (maladies infectieuses et maladies émergentes ; maladies chroniques ; risques liés à l’environnement ; système de santé et sécurité des patients) et deux groupes de travail permanents (politique de santé de l’enfant globale et concertée ; SNS et indicateurs). Il édite la revue Actualités et dossiers en santé publique (ADSP). 263 Partie 1. Les fondamentaux 9.3. Les agences sanitaires nationales 9.3.1. Présentation générale Le développement des agences dans le champ sanitaire est un phénomène en cours depuis le début des années 1990 (création du Réseau national de santé publique en 1992 et de l’Agence française du sang en 1994). Au début limité à la veille et la sécurité sanitaires ainsi qu’à l’évaluation de la qualité des soins, le processus s’est étendu à l’ensemble du champ de l’administration sanitaire, avec une vingtaine d’opérateurs organisés selon des périmètres variables. Tableau n° 1. Panorama des agences sanitaires nationales Secteur administré Opérateurs Observation, veille et sécurité sanitaires Agence nationale de santé publique (ANSP) ; attribu- tions de l’ex-Institut de veille sanitaire [InVS] et de l’ex-Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires [EPRUS]) Agence nationale de sécurité du médicament et des © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) produits de santé (ANSM, ex-AFSSaPS) Agence nationale de la sécurité sanitaire de l’alimenta- tion, de l’environnement et du travail (ANSES) Plateforme des données de santé Prévention et thématiques de santé ANSP (attributions de l’ex-Institut national de préven- tion et d’éducation pour la santé [INPES]) Agence de la biomédecine (ABM) Institut national du cancer (InCa) Établissement français du sang (EFS) Institut national de transfusion sanguine (INTS) Institut national de recherche et de sécurité (INRS) Autorité de sûreté nucléaire (ASN) Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) Gestion hospitalière, organisation et Haute Autorité de santé (HAS) performance du système de soins Centre national de gestion (CNG) Agence nationale d’appui à la performance (ANAP) Agence du numérique en santé (ANS), auparavant Agence des systèmes d’information partages de santé (ASIP) Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) Recherche Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) Formation Agence nationale du développement professionnel continu (ANDPC) Indemnisation Office national d’indemnisation des accidents médi- caux (ONIAM), qui met à disposition et gère les moyens humains des commissions de conciliation et d’indem- nisation des accidents médicaux (CCI) 264 Administration de la santé : la France Partie 1. Chapitre 9. Les statuts de ces agences sont variables, essentiellement de trois types : grou- pements d’intérêt public, établissements publics et autorités indépendantes. Le développement de ces opérateurs correspond à une transformation majeure de l’administration sanitaire ; elle trouve son origine dans plusieurs phénomènes. Une première cause est la survenue de crises dans le système de santé, au premier rang desquelles on trouve l’affaire dite du « sang contaminé » provoquée, dans les années 1980 par le retard fautif des pouvoirs publics à mettre en œuvre des actions préventives de la contamination par le VIH et qui eut des répercussions considérables sur les plans politique, judiciaire, administratif et plus largement sociétal (➠ Chapitre 1). De façon plus générale, il apparaît que la création d’opérateurs publics a été le mode de réponse choisi pour faire face à toute une série d’enjeux d’évolution du système de santé et de son administration. Ainsi, la création d’agences renvoie à la volonté de développer une expertise (en épidémiologie, avec l’ex-InVS, ou en informatique de gestion, avec l’ATIH, par exemple) ou une fonction spécialisée (la gestion des praticiens hospitaliers ou des directeurs d’hôpitaux, avec le CNG). Une agence peut être aussi le lieu d’un transfert de responsabilité admi- © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) nistrative et juridique plus ou moins complet : le cas de l’ANSM est particu- lièrement net à ce sujet3. On peut aussi chercher à améliorer le fonctionnement de la relation entre expert et décideur ; cela vaut tout particulièrement dans le secteur de la sécu- rité sanitaire, où la séparation de l’expertise et de la décision administrative est apparue comme un gage d’efficacité. La création d’agences correspond aussi à une influence anglo-saxonne et de l’Union européenne (➠ Chapitre 10). Enfin, il ne faut pas omettre de signaler que le transfert des missions de services administratifs traditionnels à des établissements publics ou à des groupements d’intérêt public (GIP) permet de faire évoluer le fonctionnement, notamment en matière de ressources humaines et de financement. Le paysage des agences a déjà connu des recompositions : produits san- guins, produits de santé, greffes et biomédecine, environnement. Il a encore évolué récemment avec la création, dans le cadre de la loi de modernisation de notre système de santé (LMSS), de l’Agence nationale de santé publique (ANSP). Ce nouvel établissement public (qui utilise pour sa communication le label Santé publique France) est issu du regroupement de l’InVS, de l’INPES et de l’EPRUS, dont il reprend les différentes missions, activités et ressources. On soulignera aussi que les instances dirigeantes de ces structures se sont fréquemment enrichies au cours des années 2010 de conseils ou de commis- sions consacrées d’une part à l’éthique et à la déontologie, d’autre part 3. Ainsi, dans l’affaire dite du Médiator®, pour ce qui est des administrations publiques, la seule ANSM fut renvoyée devant le tribunal de grande instance de Paris pour y être jugée. 265 Partie 1. Les fondamentaux au dialogue avec les usagers et la société, dans une perspective de démocratie sanitaire. On peut raisonnablement penser que le dispositif actuel évoluera encore dans l’avenir sous l’influence de plusieurs enjeux, notamment : – La coordination entre agences. Le champ de compétence des agences est en effet défini de façon variable. Il en résulte des zones de redondance ou, du moins, de pluralité d’intervention. Ainsi, la prévention des cancers intéresse l’InCa et l’ANSP ; l’ANSES et l’ANSM se rejoignent sur le médicament vété- rinaire ; l’ANSP a une fonction d’observation qui s’étend à tout le système de santé… Cette situation s’explique par l’émergence progressive du dispositif, sans plan d’ensemble préexistant et parfois en réaction à des crises du système de santé4. Aussi la coordination entre opérateurs doit-elle être renforcée. Il existe un Comité d’animation du système d’agences (CASA), animé par la DGS, qui exerce une action en ce sens. Le CASA regroupe actuellement autour du DGS l’ABM, l’ANSM, l’ANSES, l’ASN, l’EFS, la HAS, l’InCA, l’INSERM, l’IRSN et l’ANSP. Par ailleurs, on remarque le développement de la conclusion de conventions de partenariat entre agences pour cadrer l’articu- lation de leurs interventions dans des domaines partagés ou complémentaires. – Le partage des rôles entre DAC et agences. En règle générale (avec l’ex- ception notable des autorités indépendantes [HAS et ASN] et de l’ANSM), la © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) décision reste à la DAC, mais souvent l’expertise, l’information et les moyens humains sont à l’agence, ce qui peut rendre les modalités historiques de pilotage et de tutelle administrative délicates à appliquer. – Les relations avec les acteurs du secteur dont l’agence est chargée. Les agences peuvent être amenées à développer des contacts étroits avec les entités dont elles assurent l’administration, voire le contrôle. Par exemple, il est pos- sible de constater des mobilités de personnes entre des entreprises et leur tutelle administrative ; la maîtrise des flux d’informations peut être également problé- matique. Cette situation est susceptible de provoquer des conflits d’intérêts. 9.3.2. L’Agence nationale de santé publique (ANSP), Santé publique France Créée par la loi n° 2016‑41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé et l’ordonnance n° 2016‑462 du 14 avril 2016, l’ANSP est un établissement public administratif qui regroupe trois agences qui existaient antérieurement : l’InVS, l’INPES et l’EPRUS. L’organisation de l’ANSP comprend, outre la direction générale, dix direc- tions scientifiques et transversales : alerte et crise, communication et dialogue avec la société, prévention et promotion de la santé, aide et diffusion aux publics, maladies infectieuses, maladies non transmissibles et traumatismes, régions, santé-environnement, santé-travail, mission scientifique et internationale. 4. La transformation de l’AFSSaPS en ANSM en 2012, à la suite de l’affaire du Mediator®, en est un exemple. 266 Administration de la santé : la France Partie 1. Chapitre 9. L’ANSP est gouvernée par un conseil d’administration, un conseil scientifique, un comité d’éthique et de déontologie et un comité d’orientation et de dialogue. Cette dernière instance a pour mission d’étudier les attentes de la société en matière de questions de santé publique. En région, l’agence dispose d’un réseau d’antennes, les cellules d’inter- vention en région (CIRE). Le dispositif compte 15 CIRE, 12 métropolitaines et trois ultramarines (Antilles, Guyane, océan Indien). Les CIRE fournissent aux ARS un appui méthodologique. Elles animent la veille sanitaire en région. Le champ de compétence de l’ANSP s’étend à l’ensemble des problèmes de santé : – l’observation épidémiologique et la surveillance de l’état de santé des populations ; – la veille sur les risques sanitaires ; – la promotion de la santé et la réduction des risques pour la santé ; – le développement de la prévention et de l’éducation pour la santé ; – la préparation et la réponse aux menaces, alertes et crises sanitaires ; – le lancement de l’alerte sanitaire. En découle un ensemble d’activités qui peuvent être regroupées en trois domaines principaux : © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) Observation, surveillance, veille et alerte Ce secteur recouvre : – la surveillance et l’observation permanentes de l’état de santé de la popu- lation, en s’appuyant sur un réseau de partenaires publics et privés (Réseau national de santé publique) ; – la veille et la vigilance sanitaires, qui, à partir d’une mise à jour régulière des connaissances sur les risques sanitaires a pour but de détecter des facteurs de risque susceptibles d’altérer la santé de la population et d’organiser la sur- veillance des populations les plus fragiles ou particulièrement exposées ; – l’alerte sanitaire, conséquence de l’activité de veille, qui consiste à infor- mer et conseiller les autorités publiques et tout particulièrement le ministre chargé de la santé en cas de menace pour la santé de la population. Promotion de la santé, prévention, éducation pour la santé Ce secteur recouvre : – la mise en œuvre de programmes de santé publique ; – l’expertise et le conseil en matière de prévention et de promotion de la santé ; – le pilotage du développement de l’éducation pour la santé et l’élaboration des programmes de formation à l’éducation à la santé. Préparation et réponse aux urgences sanitaires Cette activité de réponse à des situations urgentes a été déployée par exemple lors de l’accident nucléaire de Fukushima, au Japon, du séisme 267 Partie 1. Les fondamentaux en Haïti, du plan Grand froid en France métropolitaine, d’une épidémie de dengue en Guyane, en appui lors de conflits en Libye ou en Côte d’Ivoire, et à l’occasion de l’épidémie d’infections à coronavirus Covid-19. Ce champ mobilise en fait les trois pôles d’activités de l’ANSP car l’ob- servation de la santé, la veille, l’alerte, ainsi que la prévention et la promotion de la santé peuvent contribuer à la gestion des situations urgentes ou excep- tionnelles ayant des conséquences sanitaires collectives. L’ANSP développe plus spécifiquement deux activités dans ce domaine : – La gestion de la réserve sanitaire, qui est constituée de professionnels de santé en activité, retraités ou étudiants, mais aussi plus largement de personnes œuvrant dans le champ sanitaire (ingénieurs, cadres administratifs des hôpitaux ou du ministère de la santé, psychologues, vétérinaires…). La réserve est sus- ceptible d’intervenir en France ou à l’étranger, soit sous forme d’interventions ponctuelles, soit dans le cadre de missions de renfort, plus prolongées. L’ANSP assure des activités de recrutement, de formation, de préparation et de gestion opérationnelle. – Une activité d’établissement pharmaceutique, notamment respon- sable de la gestion d’un stock stratégique national de produits de santé mobi- lisable en cas de situation exceptionnelle, par exemple la survenue d’une © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) © Presses de l?EHESP | Téléchargé le 11/06/2023 sur www.cairn.info par Laurent Magnien (IP: 89.159.176.218) pandémie grippale (➠ Chapitre 15). L’ANSP peut aussi gérer des stocks limités de certains produits sensibles afin d’assurer la permanence des appro- visionnements hospitaliers (par exemple, médicament utilisé rarement mais en urgence et fabriqué uniquement à l’étranger). L’ANSP a donc la capacité d’acheter, stocker, distribuer, mais aussi d’importer ou de fabriquer des médi- caments. 9.3.3. L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) Créée par la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire des médicaments et des produits de santé, l’ANSM s’est substituée le premier mai 2012 à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSaPS). Établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère des affaires sociales et de la santé, il a repris les missions, droits et obligations