L'état des personnes physiques - PDF

Summary

Ce document traite de l'état des personnes physiques en droit civil, y compris les éléments d'identification, les distinctions entre l'identification, l'identité, et l'impact sur les droits individuels. Le document aborde également les différents aspects liés à la liberté et à la protection des personnes. Il illustre l'importance de respecter les droits civils et d'éviter toute discrimination.

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**Section 2 -- L'état des personnes physiques** L'identification des personnes passe par la notion d'état ; on parle ainsi d'état des personnes pour qualifier l'ensemble des éléments d'identification et d'identité de la personne Cet état ne doit **pas être confondu avec la personnalité juridique,...

**Section 2 -- L'état des personnes physiques** L'identification des personnes passe par la notion d'état ; on parle ainsi d'état des personnes pour qualifier l'ensemble des éléments d'identification et d'identité de la personne Cet état ne doit **pas être confondu avec la personnalité juridique, la capacité juridique, ou le patrimoine** ; il ne se limite pas non plus aux éléments contenus dans la carte d'identité ou le passeport ; ceux-ci ne sont que la formalisation des informations qu'il contient Nous dirons donc quelques mots sur la notion d'état des personnes et ses caractéristiques (§ 1), avant d'en examiner les principaux éléments (§ 2) **§ 1. La notion et les caractéristiques de l'état des personnes** L'état des personnes (avec un « é » minuscule) détermine la jouissance des droits civils Il faut distinguer **les droits civils**, entendus comme les droits subjectifs de l'individu ayant un objet et une finalité d'ordre privé, **des droits politiques**, qui ont une portée publique Si les premiers de ces droits peuvent être reconnus à toute personne vivant en France, les seconds peuvent **être aménagés, voire refusés, aux étrangers** ; ainsi les ressortissants européens vivant en France ont la possibilité de voter aux élections locales mais pas aux élections nationales ; leurs droits politiques sont ainsi restreints ; en revanche, ils jouissent pleinement, en principe, de leurs droits civils Nous verrons dans un premier temps quel est le contenu de l'état des personnes (A) puis quels sont ses caractéristiques (B) **A. L'état des personnes : un ensemble d'éléments d'identification** **L'état de la personne est « au-dessus » de ses droits subjectifs** ; il est l'ensemble des éléments permettant de l'identifier dans la société ; ces éléments commencent avec l'identité familiale et s'enrichissent d'autres données Ces données et informations vont elles-mêmes déterminer la reconnaissance et l'exercice d'un certain nombre de droits civils On a ainsi pu dire que l'état de la personne était composé de **l'ensemble des caractères biologiques et sociaux permettant d'individualiser une personne** dans la société dans laquelle elle vit Pour cette raison, il ne faut **pas confondre « identification » et « identité » de la personne** ; le problème est que les deux termes sont parfois utilisés de manière alternative, alors qu'ils n'ont pas le même sens L'état de la personne se **limite aux éléments d'identification** ; il s'agit de l'ensemble des informations « objectives » qui permettent de différencier une personne d'une autre, et de situer la personne dans le corps social ; c'est pourquoi son contenu est limité En revanche**, « l'identité » de la personne est plus large que les données figurant dans l'état** ; elle inclut aussi **des éléments qui sont purement subjectifs** ; on entend par là tous les éléments qui font que la personne se sente « elle-même », y compris dans son intimité ; les informations de l'identité sont nombreuses : vie privée, préférences personnelles, goûts, pratiques, préférences et vie sexuelles, opinions,... ces informations relèvent bien de l'identité mais pas de l'identification, et donc de l'état de la personne D'une part, elles peuvent être **fluctuantes et évoluer tout au long de la vie de la personne** ; elles ne constituent donc pas des éléments d'identification fiable D'autre part, elles n'ont **pas nécessairement à être connues, être rendues publiques**, justement parce qu'elles relèvent de l'intimité et de la conscience de la personne ; en soi, elles ne sont que les conséquences du libre exercice de ses droits de la personnalité Ces données de l'identité **doivent donc relever de la liberté de la personne**, telle qu'elle peut l'exprimer à différents niveaux ; il serait même dangereux que des informations de son identité soient insérées dans l'état des personnes Cette distinction tend également à protéger les libertés fondamentales de la personne **En effet, l'état des personnes entretient des liens étroits avec l'état civil**, qui est constitué de documents officiels, publics, permettant d'identifier la personne Or la **mention d'éléments propres à son identité peut être préjudiciable pour la personne** **Exemple : le risque de discrimination lié à la religion** Certains pays européens, tels que la Grèce, imposaient il y a encore quelques années **la mention de la religion dans les actes de l'état civil** Or la connaissance d'une telle information pouvait être de nature à induire des discriminations, d'autant plus dans un pays où l'église et l'Etat ne sont pas séparés Cette obligation a finalement été jugée contraire à la liberté de religion, et a été abolie ; cette décision a été confirmée par la Cour européenne des droits de l'homme dans une décision du 12 décembre 2002, *Sofianopoulos c./ Grèce* Extrait : «... *le but d'une carte d'identité ne consiste ni à conforter le sentiment religieux de son porteur ni à refléter la religion d'une société donnée à un moment donné*. » De même, la plupart des régimes totalitaires commencent par exiger de connaître ce genre d'informations (politiques, religieuses,...) pour pouvoir exercer leur répression sur la population **La même justification vaut pour le statut professionnel de la personne** ; sa profession pouvant évoluer au cours de sa vie, elle ne saurait être rangée dans son état Pour autant, **la personne bénéficiera quand même d'un statut professionnel, comprenant un certain nombre d'informations** (fonctionnaire, salarié du privé, niveau de qualification, différents emplois exercés,...), statut qui lui permettra en fonction de son contenu de prétendre à certains droits ou d'assumer certaines obligations Mais ce statut n'intéresse que l'application du droit du travail ou de la fonction publique ; les informations de l'état des personnes ont une vocation plus générale, qui transcende toutes les branches du droit L'état de la personne, en France, n'est donc **constitué que des informations qui permettent objectivement de l'identifier**, sans égard pour son identité subjective ; par ailleurs, ces informations sont supposées avoir une certaine permanence Nous verrons malgré tout qu'il existe des passerelles entre ces deux dimensions ; ainsi, l'état de la personne peut-il être **amené à évoluer en fonction de sa volonté**, sur certains points Outre le domicile, qui peut changer tout au long de la vie de la personne, le changement de nom ou de sexe peut être effectué au sein de l'état sans remettre en cause ses caractères **B. Le régime juridique de l'état des personnes** L'état des personnes présente des **caractéristiques proches de celles des droits de la personnalité** ; cela est logique puisqu'il implique des éléments propres à la personne humaine ; de plus, il présente une fonction d'ordre public liée à l'identification de la personne dans la société Il importe donc qu'il présente une certaine stabilité, tant pour la personne elle-même que pour l'ordre public ; à cette fin, l'état de la personne revêt plusieurs caractéristiques essentielles \- **Un caractère impératif** On peut déjà noter que **les règles de son attribution et de son enrichissement sont impératives** ; on entend par là qu'elles sont fixées par la loi de manière obligatoire et ne sauraient être modifiées par la personne elle-même La plupart du temps, l'enrichissement de l'état passe par **la constatation d'un fait juridique** ; on entend par là un fait quelconque auquel sont attachés des effets juridiques ; la naissance constitue le premier fait conférant à la personne un état Mais l'état peut aussi être enrichi par **la reconnaissance d'actes juridiques** ; on entend par là les opérations effectuées volontairement par les personnes, dans les formes prévues par la loi, pour bénéficier des effets de droits ; le mariage constitue ainsi un acte juridique, car il ne suffit pas de constater la vie commune des conjoints pour en déduire l'union civile C'est là qu'apparait l'intérêt de l'état civil, service public qui est chargé de constater ces enrichissements de l'état de la personne - **L'unicité de l'état de la personne** Toute personne **a un état, et elle n'en a qu'un seul** ; en soi, l'état n'est que la projection de la personne, le doublon juridique de son existence physique L'état n'est donc **pas divisible ni dédoublable** ; on ne peut bénéficier de deux états en même temps - **L'indisponibilité de l'état de la personne** La personne ne saurait y renoncer de façon définitive ; en soi, l'état de la personne doit encore être distingué du patrimoine, puisqu'il ne saurait être vendu, loué,... Cela ne veut pas dire que ses informations n'ont pas de valeur ; comme nous le verrons, **certaines informations contenues dans l'état peuvent acquérir une valeur économique substantielle**, et la personne peut en vivre ; Mais on se situera alors dans la dimension strictement patrimoniale, et c'est souvent par le truchement d'un autre droit subjectif ou d'un contrat qu'elle va conférer cette valeur et en tirer des bénéfices Et il arrive même que cette valorisation d'une information de l'état entraîne une autonomie **Exemple : l'usage commercial du nom de famille** Rien n'empêche une personne de faire usage de son nom de famille dans une marque, et même de vendre celle-ci ; **elle en perdra alors le monopole commercial... mais pas l'usage civil** C'est en cela que l'état est indisponible ; il doit toujours garantir une identification certaine, minimale, de la personne dans la vie civile ; nous y reviendrons en examinant les différents éléments de l'état des personnes Voir **l'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 6 mai 2003**, quant au caractère relatif de l'indisponibilité du nom s'agissant des usages commerciaux Cet arrêt est intervenu comme un revirement de jurisprudence par rapport à l'arrêt rendu par la même juridiction le **12 mars 1985, n° 84-17.163** Dans les faits, un commerçant avait donné son nom à une société commerciale, dont les statuts avaient par la suite été modifiés ; la Cour de cassation a alors estimé que cette décision avait fait de son nom de famille un « signe distinctif détaché de la personne », ce qui signifiait qu'il était bien possible pour elle de disposer de son nom, mais seulement dans la vie commerciale L'arrêt de 2003 n'a pas remis en cause cette solution mais lui a apporté un important tempérament : une telle décision doit être explicitement stipulé dans le contrat de la société, et on ne saurait déduire de l'absence d'opposition de la personne qu'elle a consenti à en faire un objet de propriété \- **L'immutabilité de l'état des personnes** Pour faire suite à la remarque précédente, on a souvent **pu affirmer que l'état de la personne était immuable, au sens que son contenu ne pouvait être modifié** ; Cela est à relativiser, car il a toujours existé des informations dans l'état de la personne qui nécessitait une mise à jour régulière ; tel est le cas des changements de domicile que celle-ci pouvait effectuer Les informations pouvant faire l'objet d'une rectification se sont depuis multipliées En fait, **l'état est immuable au sens que la personne ne peut pas, à sa guise, le rectifier, le modifier ou le construire** ; cela est à relier à la règle d'impérativité que nous avons vu précédemment La vocation initiale de l'état était de constater la nature des choses, et l'on considérait pour cela que la personne ne pouvait le modifier ; si d**es dérogations à l'immutabilité sont de plus en plus tolérées**, c'est bien sous réserve de respecter les formes imposées par la loi, et les conditions de fond que celle-ci exige pour opérer des modifications Là encore, nous en verrons des exemples plus précis en étudiant les différents éléments de l'état de la personne \- **L'imprescriptibilité de l'état des personnes** Cela signifie que **l'état est en principe attaché de manière perpétuelle à son titulaire** ; la personne qui, pendant un certain délai, renonce volontairement ou non à l'utiliser n'en perd pas pour autant le bénéfice Ainsi, l'époux qui n'exerce pas les droits que lui confère le mariage, l'enfant qui ne revendique pas les droits auxquels il peut prétendre en raison de sa filiation, ou la personne qui use d'un nom différent de celui qui lui a été donné à la naissance,... ne sont pas censés avoir renoncé à ces différents éléments Et la règle inverse existe aussi ; ainsi, **on ne saurait acquérir un état différent du sien par l'usage prolongé** pendant un certain temps, bien qu'il existe un tempérament important : la possession d'état **La possession d'état** On parle de possession lorsqu'une personne exerce des droits qu'elle croit de bonne foi être les siens, alors que ce n'est pas le cas Trois conditions étaient classiquement exigées pour constater une possession d'état : - Le fait d'avoir fait **usage d'un nom** - Le fait d'avoir été traité par d'autres personnes, de la famille par exemple, comme étant **le légitime titulaire de cet état** - La notoriété, c'est le fait **d'avoir usé de cet état de façon notoire**, publique, en effectuant des actes de la vie quotidienne et surtout des actes juridiques sous ce nom En matière de filiation, ces conditions classiques ont **été précisées dans l'article 3111 du Code civil** qui établit une liste de faits pouvant permettre de constater une possession d'état « *1° Que cette personne a été traitée par celui ou ceux dont on la dit issue comme leur enfant et qu\'elle-même les a traités comme son ou ses parents;* *2° Que ceux-ci ont, en cette qualité, pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation;* *3° Que cette personne est reconnue comme leur enfant, dans la société et par la famille;* *4° Qu\'elle est considérée comme telle par l\'autorité publique;* *5° Qu\'elle porte le nom de celui ou ceux dont on la dit issue.* » L'article 311-2 du Code civil ajoute que la possession doit avoir été « continue, paisible, publique et non équivoque » **Exemple :** **Cour de cassation, 1^ère^ Chambre civile, 19 mars 2008, n° 07-11.573** Une possession d'état n\'est pas paisible et sans équivoque alors que la mère a entretenu, pendant la période légale de conception de l\'enfant, des relations intimes avec un tiers, qui a revendiqué sa paternité pendant la grossesse puis a assigné l\'époux de la mère en contestation de paternité légitime moins de six mois après la naissance de l\'enfant La constatation de cet état présumé peut donner lieu à une action d'état ; il en est de même lorsqu'il s'agit de contester un élément de l'état, ou d'en demander la modification Tel est le cas en matière de divorce, **lorsque l'un des conjoints demande la rectification** de l'état, par exemple pour reprendre son nom antérieur Les décisions prises sur la base de ces actions ont normalement **autorité absolue de chose jugée**, lorsqu'elles sont constitutives d'état, c'est-à-dire ceux qui établissent une nouvelle situation pour le titulaire Il en est de même lorsque ces actions sont déclaratives d'état, par exemple de décès ou de rectification d'une mention à l'état civil Elles emporteront souvent une mention spécifique dans les documents de l'état civil, ce qui assure leur opposabilité à tous **État des personnes et état civil** L'état civil correspond à la dimension formelle de l'état des personnes On entend par là **l'ensemble des registres et documents permettant de consigner les éléments d'identification des personnes**, ainsi que les principaux évènements qui surviennent au cours de leur vie Il existe ainsi **trois principaux actes d'état civil**, qui concernent la naissance, le mariage et le décès ; il faut ajouter à cela **les modifications que ces mêmes évènements et actes peuvent subir** (divorce, filiation,...) Ces documents sont tenus et conservés par les mairies, qui disposent toutes d'un service d'état civil à cette fin Il existe aussi **un service à compétence nationale dit « service central de l'état civil »**, rattaché au Ministère des Affaires étrangères, et qui est chargé de consigner les actes et évènements relatifs aux français vivant à l'étranger La fonction d'identification des personnes poursuit ainsi des finalités d'ordre public ; toute personne doit pouvoir être **raisonnablement identifiée et située territorialement**, avant tout par l'Etat et les services publics, et notamment pour la soumettre à un certain nombre d'obligations L'état civil permet aussi de connaître les liens de parenté entre les personnes, puisque les liens de filiation, de fraternité,... y figureront également **Les officiers d'état civil** L'établissement des actes de l'état civil est effectué par **les officiers d'état civil** ; ce sont les maires qui en sont chargés, en tant **qu'institutions déconcentrées de l'Etat** ; souvent, ces fonctions sont déléguées à des adjoints, voire à des agents communaux pour les actes les plus courants et les plus simples, tels que les actes de naissance Normalement, **l'officier n'a pas à se mêler de l'authenticité des informations** qu'il constate ; celles-ci sont présumées être vraies, et il n'est pas de sa responsabilité d'inscrire des actes qui sont faux Sa responsabilité ne peut être recherchée que s'il commet lui-même une erreur ou participe sciemment à la fraude des déclarants Les déclarations **se font normalement en la présence des personnes concernées, sauf exception** ; pour les mariages, les deux époux doivent être présents ; il arrive qu'une autre personne soit chargée d'effectuer la déclaration, la personne concernée ne pouvant effectuer celle-ci ; c'est le cas pour les naissances, la déclaration revenant au père de l'enfant **Les mentions des actes d'état civil** Les mentions de l'acte d'état civil sont essentielles, car elles **formalisent les éléments d'identification de la personne, et de constatation des évènements** survenus au cours de sa vie Certaines **mentions sont dites « initiales »**, ce sont celles qui figurent dès l'origine sur l'acte, et qui se limitent à constater un fait ou un acte à la date à laquelle il est établi Celles de l'acte de naissance et de l'acte de décès ont déjà été mentionnées plus tôt ; celles de l'acte de mariage sont plus nombreuses (noms et prénoms des époux, de leurs parents, de leurs témoins, le consentement, le prononcé de l'union, le recours à un contrat de mariage) D'autres **mentions sont dites « en marge »** ; elles se rajoutent aux mentions initiales et ont vocation à « doubler » les informations qui peuvent être contenues dans d'autres actes Par exemple, l'acte de naissance se verra ajouter en marge des mentions relatives au mariage de la personne, à un PACS, à son divorce, à ses changements de nom ou de prénom, à une mise sous tutelle ou curatelle,... ainsi que le décès **Les rectifications des actes d'état civil** La rectification passe normalement par **une procédure judiciaire, devant le tribunal judiciaire** ; elle est prévue à l'article 99 du Code civil Elle permet de faire rectifier tout type d'erreur portée sur les mentions initiales ou en marge d'un acte d'état civil, telle qu'une erreur sur le prénom d'un enfant, sur le statut matrimonial de l'un des parents,... Si la rectification est ordonnée par le président du Tribunal judiciaire, elle devra figurer dans une mention en marge de l'acte concerné **Une rectification administrative**, directement ordonnée par le Procureur de la République, est prévue pour les modifications purement matérielles, c'est-à-dire les plus simples, notamment celles qui concernent les fautes d'orthographe

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