Séminaire de travail universitaire PDF

Summary

Ce document présente un séminaire universitaire portant sur le développement de l'esprit critique face à l'information. Il explore les facteurs influençant notre perception et notre jugement, notamment les stéréotypes, les biais et les préjugés dans le contexte des nouvelles technologies de l'information. Le document examine également la théorie du complot et la manipulation de l'information.

Full Transcript

[Séminaire de travail universitaire : ] [MODULE 1 :] [Introduction :] Toutes les informations ne sont pas fiables ! Ce MOOC va donc vous apprendre à développer notre esprit critique concernant les informations auxquelles nous faisons face. Invitation à **développer son esprit critique** e...

[Séminaire de travail universitaire : ] [MODULE 1 :] [Introduction :] Toutes les informations ne sont pas fiables ! Ce MOOC va donc vous apprendre à développer notre esprit critique concernant les informations auxquelles nous faisons face. Invitation à **développer son esprit critique** en tant que : \- **Citoyen** : prendre position et faire des choix. \- **Etudiant en gestion** : adopter une approche réflexive par rapport à ce qui est appris durant le cursus. \- **Scientifique** : être critique par rapport aux connaissances. [1.1) Importance de la pensée critique :] Pourquoi développer son esprit critique ? Car on doit faire des choix, et ces choix ne sont véritablement libres que si nous pouvons en maîtriser les tenants et aboutissants. Exemple : quel fournisseur d'électricité choisir ? Quel est le problème ? Nous avons besoin d'informations sur lesquelles baser notre opinion. Cependant, il y a une infobésité de l'information. Les messages sont parfois contradictoires et les sources ne sont pas toujours fiables. Ces informations cherchent à influencer notre choix. Comment réagir ? Quelques balises... -Evaluer la qualité de l'information. -Douter avec raison & prendre le temps de penser (apprendre à manipuler l'information pour éviter qu'elle ne nous manipule). -Prendre conscience de nos propres préconceptions. Comment réaliser un travail de synthèse sur une question de recherche ? 1\) Accès à de nombreuses sources : privilégiez les sources scientifiques. 2\) Les articles scientifiques n'ont pas toujours les mêmes conclusions : essayez de comprendre POURQUOI ? 3\) Posez-vous ces trois questions clés : ❑ Les auteurs basent-ils bien leurs affirmations sur des faits, des observations, des résultats d'expériences ? ❑ L\'étude a-t-elle été réalisée selon une procédure solide, avec une méthode et une stratégie scientifique adéquates ? ❑ Les analyses statistiques utilisées sont-elles réalisées sur des échantillons suffisamment représentatifs ? **Développer son esprit critique consiste également à propager des informations vérifiées (prendre le temps de penser). C'est donc une combinaison de critique et d'autocritique (en raison des croyances, des préjugés, des idéaux, de son histoire).** [1.2) Pensée critique, phénomène nouveau ? ] Développer son esprit critique : comprendre le contexte dans lequel on évolue. Aujourd'hui : contexte informatique et technologique. Qu'offre internet à l'humain ? 1\) **Universalité** : tout message peut être adressé au monde entier. 2\) **Immédiateté** : communiquer en tous lieux et à tout moment. 3\) **Anonymat et interchangeabilité** : possibilité d'anonymat autour de la création d'une identité fictive. 4\) **Intéresser plutôt qu\'informer** : faire le «buzz» plutôt qu'être constructif. 5\) **Valorisation de l'oralité** : il n'est plus nécessaire de dactylographier ses interventions qui peuvent passer par un micro. 6\) **Intimité associée à l'intention et pas à l'espace** : l'expression de l'intimité a changé. 7\) **Apprentissage avec les pairs** : possibilité d'apprentissage à travers le WEB (adaptation plus facile par les jeunes). 8\) **Identités multiples** : possibilité pour chacun d'avoir plusieurs vies simultanées. TRANSFORMATION 1 : DISPOSITIFS VIRAUX En raison de : **L'affordance** : utilisation active des technologies par la population comme interface communicationnelle. **L'immédiateté** : accès facile à l'information et aux opinions grâce aux «like». **La rapidité de la « diffusabilité »** : tout le monde peut facilement et rapidement diffuser des informations grâce aux «share». **La primauté à une sémantique réductive** : simplifie l'information et donc la réalité. **La simplification** : des contenus dans un but de diffusion. TRANSFORMATION 2 : sphère privée // sphère sociale. **Les réseaux sociaux** : Montée en puissance de leur utilisation. **Le partage** : tout devient potentiellement public. **La délocalisation** : tout devient potentiellement global. **La désindexicalité** : l'information est sortie de son contexte. Pourquoi ? Une logique marchande de la part des médias. Multiplication de l'information MAIS diminution de la profondeur analytique. Moins de face à face car on privilégie l'intermédiaire «machine». [La théorie du complot et de la manipulation : ] Théories du complot : remplissent un besoin de comprendre un monde difficile à appréhender. ➔Des réponses simples et assimilables pour un monde difficile à appréhender. Un système de scénarisation bien rôdé : \- Organiser efficacement le récit. \- S'assurer d'une cohérence interne. \- Permette une vraisemblance. \- ET SURTOUT : une morale plausible, satisfaisante et convaincante. **NOUVELLES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION+ VULGARISATION SCIENTIFIQUE = CONNAISSANCE A LA PORTÉE DE TOUS** Mais... (il y a souvent un MAIS)... **cela nous rend... CRÉDULES & MANIPULABLES** !!! Attention donc aux théories du complot !!! [MODULE 2 :] [2.1) Stéréotypes, biais et pré conscriptions : ] Vidéo 1 : scène de crime + vidéo 2 : stéréotypes et cultures \--\> Voir feuilles annexes. Vidéo 3 : Stéréotype, biais et préjugé : - Pour pouvoir comprendre ce qu'est la culture pour l'humain, il faut d'abord comprendre ce qu'est le stéréotype car le stéréotype s'inscrit dans cette dimension culturelle de l'humain. Définition d'un stéréotype : Une des manières de définir un stéréotype c'est considérer qu'il s'agit d'une croyance exagérée, une image ou une vérité déformée à propos d'une personne ou d'un groupe. Le stéréotype génère des préjugés. Les préjugés, c'est une attitude beaucoup plus commune qui nous vient de l'ethnocentrisme. \--\> On va juger l'autre à partir de soi. On va le juger souvent négativement quand on ne comprend pas l'autre, qu'il sort d'un cadre de pensée, d'un cadre de référence, de notre culture et qu'on ne comprend donc pas ses référents qui sont différents. - Préjugé = opinion sans examen, un jugement à l'avance, une attitude marquée à l'égard d'un groupe ou de chacun de ses membres, mais à priori. Les préjugés sont multiples, de tous types : - Ils sont liés à notre histoire personnelle. - Ils sont liés au fait qu'on soit un homme ou une femme. - Ils sont liés au fait qu'on soit d'une discipline ou d'une autre. - Ce qui est en amont des préjugés, ce sont les biais. Certains biais sont de nature culturelle, mais il y en a de toutes autre nature car l'humain se fait influencer par un tas d'éléments (la chaleur, le bruit, \...). \--\> Un biais c'est donc un déterminant qui va préorienter le jugement, qui va construire, créer le préjugé. Il y a des biais : - De légitimité : on va considérer que certaines personnes vont être plus légitimes que d'autres à parler d'un sujet. \--\> On va avoir un biais favorable pour écouter leur savoir. - D'autorité : "Ah si c'est telle autorité qui le dit, c'est que ça doit être vrai". - Sensoriel : on sent et vois mieux des choses \--\> Quand on enlève ses lunettes on voit moins bien et donc cela correspond à notre biais visuel qui fait partie des biais sensoriels. On aura des biais liés à l'odorat, à la vue, au son. On va également avoir des tonnes de biais invisibles. - Cognitifs : nos manières de réfléchir, nos manières de construire la pensée, nos manières de poser la réflexion. - Sociaux : lié au milieu social dans lequel on a grandi, dans le milieu social où on vit. - Culturels : liés à notre univers culturel, notre pays, à notre manière de vivre en société. - De genre : qu'on soit garçon, fille, homme ou femme. On va avoir des différences de jugements, de regards sur les choses parce qu\'il y a eu cette incorporation liée à la transmission. La société construit ses biais à travers l'ethnocentrisme. Tous ces biais vont construire en amont du regard, en amont du jugement, en amont de l'analyse de la réalité, de la tentative de percevoir ce qui se donne à voir et de le comprendre vont orienter notre jugement, notre regard. Il faut prendre en compte ces biais, même si c'est complexe, afin de poser le plus justement possible une démarche de savoir. - Le **stéréotype** est une croyance exagérée, une image ou une vérité déformée ou excessivement simplifiée, à propos d'une personne ou d'un groupe. Exemple : *\"tous les Belges font une grande consommation de bières spéciales\"*. - Le **préjugé (**ou la préconception) est une opinion sans examen, un jugement à l'avance, ou une attitude marquée, à l'égard de quelqu\'un ou de quelque chose. Un préjugé visant un groupe ou ses membres se fonde sur un stéréotype. Exemple : \"ce Belge a un comportement bizarre. Je parie qu\'il consomme trop d\'alcool\". - Le **biais** est un déterminant qui pré-oriente le jugement, et dont les préjugés font partie. Les biais constituent autant de raccourcis que nous appliquons sans même nous en rendre compte pour traiter la masse d\'informations qui nous parvient. Les biais sont de nature multiple : biais de légitimité, biais d'autorité, biais sensoriels, biais invisibles, biais cognitifs, biais sociaux, biais culturels, biais de genre\... Vidéo 4 : Stéréotypes et discriminations : En résumé, le stéréotype peut être défini comme une croyance a priori sur des groupes de personnes qui aura tendance à persister même lorsque cette croyance est mise à mal par des données objectivables. Le fait d\'avoir des stéréotypes n\'est pas en soi une mauvaise chose : **c\'est ne pas en avoir conscience et ne pas les remettre en question qui nous donne une image biaisée du réel**, pouvant aller jusqu\'à occasionner des comportements discriminants problématiques voire inacceptables. Les stéréotypes peuvent être tirée d'expériences qui peuvent être totalement subjectives : Exemple : beaucoup de filles avec lesquelles j'étais à l\'école se sont dirigées vers des études de psychologie ou de droit, donc j'en déduis que les études de psychologie et de droit sont d'avantage faites pour les filles. Le stéréotype peut résulter d'une expérience plus objective, temporellement située, qu'il amplifie pour en faire une vérité éternelle décontextualisée. Exemple : Les chiffres d'inscriptions ont montré que les auditoires sont d'avantage remplis de filles en psychologie et en droit. \--\> On en déduit donc que les études de psychologies et de droit sont plus attractives pour les filles. Le stéréotype peut parfois subsister malgré son démenti radical par l'évolution de la réalité. Inversement, le stéréotype totalement infondé pourra, en raison de son existence même, créer la réalité qui le fonde. \--\> = prophétie auto-réalisatrices. Exemple : l'instituteur qui est convaincu que les élèves portant des lunettes sont de bons élèves, va leur consacrer son attention et il en fera donc de bons élèves. Les stéréotypes peuvent entrer en action de manière inconsciente. Ils ont des fonctions multiples et vitales : - Une fonction épistémique (= on va simplifier notre environnement social et en réduire la complexité). Les stéréotypes apportent de la structure (on va venir structurer l'information : ranger les choses en nombres limités dans des cases). Les stéréotypes rendent possible l'établissement de causalités, de prédictions. Le recours à des stéréotypes est inévitable, mais il peut être problématique dans certains cas. \--\> Discriminations interdites (différence de traitement entre personnes pourtant comparables). Des discriminations surviendront lorsque le stéréotype s'établit sur ce qu'on appelle "un critère suspect" comme la race, l'origine ethnique, le handicap,\... 2.2) différents types de biais : Vidéo 5 : Biais de raisonnements naturels : La manière de voir et d'interpréter les phénomènes que nous observons est très souvent influencée par ce que nous savons déjà, mais aussi par notre expérience personnelle et notre intuition. **Cette intuition, souvent très présente, biaise couramment nos raisonnements et nous conduit régulièrement à tirer de fausses conclusions**. En dépit de nos connaissances théoriques, l'intuition prend souvent les commandes de notre cognition. C'est ainsi que nous avons le sentiment qu'une planche flottera mieux qu'une boule de bois parce qu'elle \"s'appuie\" mieux sur l'eau ou qu'un camion, parce qu'il est lourd et de grande taille, met plus de temps à freiner qu'une voiture légère. Pour ces deux exemples, c'est notre expérience quotidienne antérieure qui guide nos réponses. Ce référent, appelé aussi *\"conceptions premières\"* (ou *\"spontanées\"*), ne semble jamais disparaître. **Au mieux pouvons-nous être conscients de son existence et être vigilants**, et ce quel que soit le domaine : les sciences, la religion, l'éducation\... Vidéo 6 : Biais sensoriels : Perception déformée de la réalité = biais sensoriel. Notre mémoire est sélective : le cerveau a une propension à faire des liens rapides, et nous devinons parfois plus que nous ne voyons réellement des visages, en raison de l\'importance pour l\'être humain de pouvoir identifier rapidement ses congénères et leurs intentions. **Nous avons une perception déformée de la réalité car nous l\'interprétons sans cesse**. Ce qui est nécessaire, mais\... peut nous jouer des tours ! Quelques définitions : - La capacité à percevoir des images dans des formes aléatoires est appelée **paréidolie**. - On appelle **biais de confirmation** la tendance à retenir préférentiellement ce qui nous conforte dans notre opinion. - Nous avons tendance à nous fier spontanément à notre première impression. C\'est ce qu\'on nomme **l\'effet de halo** (ou \"biais de notoriété\"). Vidéo 7 : Biais de genre : Chacun intègre un certain nombre de préjugés sociaux et culturels -- donc historiques -- vis-à-vis de ce qu\'est la féminité et la masculinité, et de ce que cela implique. Parfois, sans nous en rendre compte, nous discriminons sur la base du sexe d\'un individu, l\'associant plus volontiers à tel type de profession ou à telles affinités, par exemple. **Le genre que l\'on associe à quelqu\'un peut notamment conditionner la façon dont il/elle se meut dans l\'espace public**, car nous avons toutes et tous intégré des biais sur la façon dont un homme ou une femme est supposé se comporter en société. Être critique, ce sera d'abord remarquer ces différences et s'en étonner, afin de pouvoir les remettre en question ! [Texte biais de légitimité et d'autorité : ] Le biais d'autorité est identifiable **lorsqu'une personne fait appel à son statut social, sa position hiérarchique ou encore sa formation pour valider une affirmation** ou donner du poids à une opinion. Par exemple, des pseudo-scientifiques sont régulièrement mis en scène dans des publicités pour valider certains arguments et imposer ainsi le label \"scientifiquement prouvé\". Parfois, c'est une véritable mise en scène où des « scientifiques » expliquent avec force expériences ou graphiques l'effet de tel ou tel produit. Les propos des individus perçus comme faisant autorité sont tacitement considérés comme *légitimes*. Ce renvoi à l'autorité est cependant tout à fait justifié lorsque l'on fait appel à l'expertise d'un scientifique pour un domaine particulier. *La légitimité (à faire/dire) peut être perçue aussi bien chez soi que chez l\'autre. Il y a biais lorsque celle-ci est surévaluée.* ##### **Illustration du biais d\'autorité : l\'expérience de Milgram** Une expérience bien connue illustre parfaitement ce biais, il s'agit de [[l'expérience de Stanley Milgram]](https://www.youtube.com/watch?v=Kzd6Ew3TraA), chercheur en psychologie sociale dans les années 1960.\ \ Cette expérience cherchait à évaluer le degré d\'obéissance d\'un individu devant une autorité qu\'il juge légitime et à analyser le processus de soumission à cette autorité. Le chercheur avait pour objectif de comprendre comment des gens \"ordinaires\" avaient pu participer à des violences nazies durant la Seconde Guerre Mondiale. Pour cela, Milgram mit en place une expérience faisant appel à des volontaires invités censés tester une méthode pour améliorer l'apprentissage des jeunes. L'expérience se déroulait sous le contrôle de l'expérimentateur -- ici la figure d'autorité (en blouse blanche bien entendu !). Un acteur faisant partie de l'équipe de recherche jouait le rôle de l'élève. La méthode proposée aux volontaires consistait à envoyer une décharge électrique à l'élève lorsqu'il se trompait. À chaque erreur l'intensité de la décharge augmente de 15V. Les volontaires étaient payés pour participer à l'expérience et ils étaient invités à infliger les décharges électriques (45V, la décharge pouvant aller jusqu'à 450V) pour valider l'expérience (le postulat avancé aux volontaires étant que la punition permettait d\'obtenir de bons résultats). Au début de l'expérience, le comédien jouant le rôle de l'élève électrocuté se plaint d'abord de douleurs, puis demande d'arrêter, hurle, et finalement se révèle incapable de parler. L'expérimentateur quant à lui encourage le volontaire si celui-ci désire arrêter. Les phrases d'encouragement étaient formulées dans l'ordre suivant : *\"Veuillez poursuivre\"* puis *\"L\'expérience exige que vous poursuiviez\"* puis *\"Il est absolument essentiel que vous poursuiviez\"* et enfin *\"Vous n\'avez pas le choix, vous devez poursuivre\"*. Les conclusions de l'expérience illustrent très bien le biais d'autorité, car **plus de 60% des volontaires administraient la décharge maximale !** Et ce en dépit des suppliques de l\'élève. L'expérience de Milgram a été reproduite avec diverses variantes qui permettent de faire varier ce résultat, mais l'influence de la figure d\'autorité (ou de légitimité) reste toujours significative. La soumission à une autorité est bien réelle. **Il s'agit donc de rester vigilant et de se demander si les ordres reçus sont justifiés et, en fonction de la situation, si la personne qui possède l'autorité est bien compétente et experte dans le domaine**. 2.3) Mise à distance et déconstruction : Vidéo 8 : Nous sommes tous contextualisés. Voir notes feuilles annexes. La culture est la résultante tant de notre histoire personnelle (famille, amis, évènements, trajectoires, réussites, échecs\...) que de notre rapport au terrain ou à un objet d'étude, aux objectifs fixés par un cadre professionnel voire bien entendu de ses contraintes humaines, techniques, financières, institutionnelles, réglementaires, ou encore éthiques. Que ce soit en science humaines ou en sciences naturelles, **le contexte** (ce que Michel de Certeau appelle le \"lieu\") **interfère toujours avec la production du savoir**. Il ne s'agit pas de le supprimer -- car nous sommes tous contextualisés -- mais d'en avoir conscience et, quand cela est possible, de le contrôler, ou au moins de déconstruire les préconceptions que nous en avons. Vidéo 11 : Déconstruire ses préconceptions. \--\> Voir notes feuilles annexes. Les préconceptions induisent un regard sur le réel qui n'est pas celui des sujets observés. Elles peuvent induire une série de biais dans la recherche en sciences humaines : - La **modification des comportements** des enquêtés, - l'**encliquage** (à savoir la restriction des points de vue à celui d'un groupe particulier), - **Le monopole des sources**, c'est-à-dire le fait d'accorder une place privilégiée à certaines sources, - La **subjectivité** du chercheur. **Il est dès lors fondamental de déconstruire ses préconceptions ou à tout le moins d'avoir conscience de leur existence et de leur impact sur l'observation**. D'où la nécessité : - De déployer une **auto-analyse** de ses préconceptions sur l'objet d'étude, - De **multiplier les méthodes** pour ce faire : carnet d'enquête ou de terrain, intervision, coaching ou supervision, réunion d'équipe, revue de la littérature scientifique\... Texte : qu'on le veuille ou non, nous sommes contextualisés. - Le **stéréotype** est une croyance exagérée, une image ou une vérité déformée ou excessivement simplifiée, à propos d'une personne ou d'un groupe. Tous les humains élaborent des stéréotypes. Il s'agit d'en avoir conscience pour être capable de les remettre en question et éviter de se construire une image biaisée de la réalité. - Le **biais** est un déterminant qui pré-oriente le jugement. La manière de voir et d'interpréter les phénomènes que nous observons est très souvent influencée par ce que nous savons déjà, mais aussi par notre expérience personnelle et notre intuition. Malgré nos connaissances théoriques, l'intuition joue un rôle important dans la façon dont nous allons traiter une information. De même, la mémoire est sélective et le cerveau a une propension à faire des liens rapides. Pour faire face à la masse d'informations qui nous parvient nous sommes obligés de faire des raccourcis et nous sommes entraînés à associer rapidement des idées, et ce pas toujours de manière pertinente, ce qui a tendance à biaiser nos perceptions. - Les **préjugés** (ou préconceptions) font partie des biais. Chacun intègre un certain nombre de préjugés sociaux et culturels -- donc historiques -- qui peuvent nous conduire à discriminer l'autre (sur base de son genre, son apparence, ses croyances\...). Être critique, ce sera d'abord remarquer ces discriminations, s'en étonner et essayer de comprendre d'où elles viennent pour pouvoir les déconstruire. Les préjugés peuvent induire toute une série de biais dans la recherche de compréhension des êtres humains, notamment en sciences sociales. Ils induisent un regard sur le réel différent de celui des sujets observés. **Il est dès lors fondamental de déployer une auto-analyse de ses préconceptions sur l'objet d'étude et de prendre conscience de leur impact sur l'observation**. Pour ce faire plusieurs stratégies existent, l'idéal est de les combiner : carnet d'enquête ou de terrain pour prendre du recul et noter les émotions qui nous traversent durant le processus de recherche, intervision ou réunion d'équipe pour échanger avec des collègues, coaching ou supervision pour bénéficier du regard extérieur d'un professionnel, revue de la littérature scientifique sur le sujet traité et les difficultés méthodologiques rencontrées par d'autres chercheurs, etc. La culture est la résultante de notre histoire personnelle mais se construit également au sein de notre milieu professionnel, à travers notre rapport au terrain ou à un objet d'étude, aux objectifs qui nous sont assignés et en confrontation avec des contraintes humaines, d'ordre techniques, financières, institutionnelles, réglementaires, ou encore éthiques. **Nous appréhendons les autres cultures à partir de la nôtre et avons tendance, consciemment ou inconsciemment, à prendre notre propre culture comme le point de référence** à partir duquel nous allons émettre un jugement sur celles qui en diffèrent. C\'est ce qu\'on appelle *l\'ethnocentrisme*. Enfin, que ce soit en sciences humaines ou en sciences naturelles, **le contexte (économique, politique, social, personnel\...) interfère toujours avec la production du savoir**. Il ne s'agit pas de l\'ignorer ni de vouloir le supprimer, car nous sommes tous contextualisés, mais d'en avoir conscience. [MODULE 3 :] 3.1) L'importance des mots et du langage : Vidéo 12 : La menace Cette séquence vous aura probablement fait sourire. Jusqu'au dénouement final, peut-être avez-vous imaginé le pire pour nos deux inspecteurs ? C'est que le cadrage serré sur le visage en sueur de Van Mulder -- qui ne laissait pas apparaître la cause de son grand émoi -- visait à évoquer chez vous la peur. Le son et les images utilisés devaient susciter cette émotion : **une technique évidemment très répandue dans les fictions**, pour appuyer le discours. Mais cette technique est également utilisée pour vous influencer lorsqu'il s'agit de transmettre des informations. **Être critique, c'est aussi être capable d'identifier les trucs et astuces qui peuvent influencer notre perception d'un discours**. Vidéo 13 : infobésité : nouvelle maladie contemporaine. \--\> Voir feuilles annexes. Texte 3 : Les règles du langage. Le discours peut s'exprimer sous la forme d'un texte, écrit ou oral, principalement constitué de mots organisés en phrases. Le texte écrit peut être lu, le texte dit, entendu. Pour le comprendre, il ne suffit pas de savoir lire ou de pouvoir écouter, les traducteurs et les interprètes ne démentiront pas. Une série de règles régissent le langage, dans son expression écrite ou parlée dont les principales[[\[i\]]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@b7c274817d184e26a2177bd33af0fd5e?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn1) sont : 1. La **syntaxe** (la construction formelle des propositions, la grammaire *stricto sensu*), 2. La **sémantique** (le sens associé aux « sèmes » et aux mots, et donc la signification de ce qui est énoncé) 3. La **pragmatique** (le sens de l'énoncé dans un contexte culturel particulier). [Exemple] : Le 16 juin 1963, en pleine guerre froide, le président américain J.F. Kennedy se rend à Berlin-Ouest où il prononce un discours politique particulièrement incisif qui restera célèbre : « Tous les hommes libres, où qu'ils vivent, sont des citoyens de Berlin, et c'est pourquoi, en tant qu'homme libre, je suis fier de dire : *Ich bin ein Berliner* ! »[\[ii\]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@b7c274817d184e26a2177bd33af0fd5e?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn2). Ces quatre mots, en allemand dans le texte, ponctuent admirablement le discours de Kennedy... et feront l'objet d'une controverse[\[iii\]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@b7c274817d184e26a2177bd33af0fd5e?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn3) linguistique : certains puristes reprochent au président US de n'avoir pas utilisé l'expression syntaxiquement plus correcte « Ich bin Berliner » (« Je suis Berlinois »), sémantiquement fausse, puisque Kennedy n'est pas Berlinois, mais pragmatiquement vraie, au regard du contexte particulier dans lequel le discours est prononcé : Kennedy se sent solidaire des Berlinois, comme s'il était Berlinois lui-même. Texte 4 : Le sens des mots. On le voit, le sens d'un message est d'abord celui des mots utilisés : il est **dénoté** lorsqu'il correspond à sa définition objective, littérale, telle que proposée dans un dictionnaire usuel. Mais un sens second, de prime abord caché au profane, se révèle comme *effet de sens* derrière le sens premier : c'est ce qu'on appelle la **connotation**, dans les registres esthétique ou idéologique. Si la science privilégie le langage dénotatif (comme pour le mode d'emploi d'un appareil électroménager ou un livre de recettes de pâtisseries), l'art est un langage à forte tendance connotative (comme également le prêche d'un religieux ou un message publicitaire). Un signe ou un message ne se dénote ou ne se connote pas *en soi*. Il s'inscrit dans un ensemble discursif, dans un contexte particulier par rapport auquel il sera dénoté ou connoté. Des contextes différents d'énonciation d'un message ont ainsi une influence sur celui-ci, pouvant donner à son expression différentes significations, alors même que le contenu du message reste identique. Toute communication verbale dépend de six facteurs : 1. Le **contexte** dans lequel se déroulera l'échange, 2. Le **destinateur** qui envoie le message au destinataire, 3. Le **destinataire** qui doit recevoir le message, 4. Un contact ou **canal** par lequel le message transitera concrètement (le web, le téléphone, la radio...), 5. Le **code**, commun aux interlocuteurs, au moins en partie, 6. Le **message** lui-même, écrit ou dit. Il est important, et souvent nécessaire, d'identifier les éléments constitutifs de la communication verbale, pour être à même de décrypter et de comprendre le sens d'un texte, un message. Texte 5 : Le slogan et jargon : de la simplification à la complexification excessive. Un message peut être résumé, synthétisé, condensé, dans une optique d'efficacité : rapidité de son énonciation, facilité de sa mémorisation, immédiateté de sa compréhension. Le **slogan** se veut persuasif, qu'il soit politique ou publicitaire. Le danger du slogan réside en son extrême simplification, alors que la réalité est multiple et nuancée, qu'elle ne peut être réduite à une expression *\"clef sur porte\"*. À l'autre extrême, un discours peut être compliqué à l'excès par son auteur au point qu'il devient incompréhensible pour un profane. On appelle cela du **jargon**, utilisé entre initiés d'une communauté (scientifique, juridique, administratif, etc.) qui parfois en abusent intentionnellement (c'est le cas de certains argots)... ou parce qu'ils sont incapables de s'exprimer plus clairement. En 1948, Georges Orwell écrit son célèbre roman dystopique *\"1984\"* où l'on parle le novlangue, sorte de synthèse du slogan et du jargon, la langue créée par le pouvoir bureaucratique étant réduite à sa plus simple fonction, résumée par l'un des personnages du roman : *« Vous ne saisissez pas la beauté qu'il y a dans la destruction des mots. Savez-vous que le novlangue est la seule langue dont le vocabulaire diminue chaque année ? (...) Ne voyez-vous pas que le véritable but du novlangue est de restreindre les limites de la pensée ? A la fin, nous rendrons littéralement impossible le crime par la pensée car il n'y aura plus de mots pour l'exprimer. Tous les concepts nécessaires seront exprimés chacun exactement par un seul mot dont le sens sera rigoureusement délimité. Toutes les significations subsidiaires seront supprimées et oubliées. »* *Texte 6 : L'impact du non-verbal* À côté du langage verbal, oral ou écrit, l'être humain recourt à toute une gamme de signes naturels ou générés avec le corps ou une partie du corps : des couleurs, des odeurs, des sons, des gestes ou des postures, volontaires ou non, conscients ou non, qui appuient le discours ou l'orientent dans une direction différente voire opposée. Ce langage implicite est aussi important que la communication verbale volontaire, structurée, articulée, voire bien plus subtil et efficace. Dans son ouvrage *\"Les Clés de la Bande Dessinée. L'art séquentiel\"*, l'auteur de bandes dessinées Will Eisner développe : *« Le corps humain, la stylisation de ses formes et la codification de sa gestuelle, l'expressivité de ses postures sont accumulés et stockés dans nos mémoires, constituant un vocabulaire non verbal de gestes. (...) On connaît peu de chose sur la façon dont le cerveau stocke ces myriades d'informations qui deviennent compréhensibles une fois agencées avec la bonne combinaison. Mais il est tout à fait établi que lorsqu'une image habilement dépeinte est présentée, elle peut déclencher un souvenir qui évoque la reconnaissance et les effets collatéraux d'une émotion. »*[[\[i\]]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@30d000a7bdf64b798814ea58b892aa6b?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn1) Nous le verrons plus loin, il existe également des moments et des espaces où le langage verbal s'efface au profit d'un semblant de vide où s'engouffre de la signification, portée par les silences entre les notes de musiques, par le non-dit dans un dialogue, par le hors-champ des photographies ou du cinéma, par l'espace entre deux cases de bande dessinée, etc. Et cet implicite raconte quelque chose, lui aussi. Texte 7 : La composition et le cadrage. Nous sommes entourés d'**images** physiques, c'est-à-dire de représentations visuelles du réel. Ces images prennent la forme de photographies, de peintures, de sculptures, de dessins, de pictogrammes, de graffitis, d'émoticônes, etc.. Nous le verrons plus loin, dans la capsule de Philippe Marion sur les trucages et les effets spéciaux, l'image a notamment une fonction de témoignage et d'authentification et engage donc la **responsabilité** morale de son auteur, de son éditeur, de son diffuseur... et de son récepteur. Une image, un dessin, une photo, n'est jamais qu'une **représentation** du réel, et non la réalité elle-même. Songeons à la série de peintures de René Magritte, opportunément intitulée La trahison des images, représentant une pipe et le texte, en apparence contradictoire, « Ceci n'est pas une pipe ». Cette représentation, il y a donc lieu de la regarder avec des yeux critiques et de ne pas la considérer aveuglément comme vraie et digne de confiance. L'auteur d'une image effectue une série de choix -- c'est normal, c'est son rôle -- qui orientent le contenu et la forme de celle-ci, la **compose**. Un photographe, par exemple, décide de poser son appareil de prise de vues à tel ou tel endroit, de l'orienter dans telle direction, muni de tel objectif, doté de telle focale, etc. Cette décision initiale est en elle-même lourde de conséquence puisque ce que l'auteur nous montre exclut tout ce qu'il n'a pas choisi de montrer et n'est donc pas tout ce qu'il est possible de voir de la chose photographiée. Cette sélection du sujet se précise lorsque ce même photographe définit son **cadre** et l'échelle de son plan, du très gros plan au plan de grand ensemble, en plongée ou en contre-plongée. Cadrer, c'est également choisir de montrer une partie de ce qu'il est possible de donner à voir. Celui qui cadre, le photographe, le peintre, le dessinateur, sélectionne ce qu'il souhaite montrer, à l'exclusion de ce qu'il ne veut pas montrer, car un même sujet, cadré différemment ne fournit pas les mêmes informations. Prenons l'exemple d'une affiche électorale. Celle-ci nous présente un ou une candidat·e, tout sourire et dans ses plus beaux atours. On ne va pas contester l'intégrité du message que le ou la candidat·e a voulu nous transmettre, généralement résumé dans un slogan du genre : « *Je suis sympa, votez pour moi !* » Or cette image est composée, fabriquée en vue de cet objectif de séduction, de persuasion, et *in fine* de l'élection du/de la candidat e. Le cadre méticuleusement choisi en vue d'une communication précise est déterminant : ce qui ne se trouve pas dans ce cadre pourrait nuancer la sélection du communicateur voire la contredire. 3.2) Les images : Le montage : Nous venons de le voir, le choix d'un sujet et d'un cadre, mais aussi de la composition de l'image, son organisation physique, l'angle choisi, la disposition des objets ou des personnes représentées, etc., influencent le sens ou les sens qui peuvent se dégager de cette image.\ \ Lorsqu'il s'agit d'un film, les images se succèdent dans une temporalité, formant des séquences qui peuvent elles-mêmes être liées lors d'une opération que l'on nomme montage. En montant un film, l'auteur sélectionne et assemble des séquences d'images en mouvement, leur sujet, leur composition, leur durée, pour donner à voir -- et à entendre, lorsqu'il y a du son, cf. infra -- son propos. Mais la succession de deux images signifie davantage que la somme de ce qu'elles signifient indépendamment l'une de l'autre. Selon le cinéaste russe Sergueï Eisenstein (1898-1948), \"la juxtaposition de deux fragments de film ressemble plus à leur produit qu'à leur somme. Elle ressemble au produit, et non à la somme, en ce que le résultat de la juxtaposition diffère toujours qualitativement \[...\] de chacune des composantes prises à part.\"[\[i\]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@5ee18aa37c354c1492bed482110b4382?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn1) Le cinéaste soviétique adapte au cinéma un procédé qu'il a déjà expérimenté à la scène : le \"montage des attractions\" : il s'agit d'associer deux images en apparence indépendantes afin de générer un sens nouveau et de provoquer, de suggérer, d'induire une émotion précise et intense chez le spectateur. Un exemple célèbre est la juxtaposition des images de grèves réprimées par les troupes tsaristes et des images d'animaux exécutés dans un abattoir, dans son film La Grève (Eisenstein, 1925).\ \ Dans la même perspective, le spectateur se révèle capable d'attribuer lui-même des significations nouvelles aux images ainsi associées. Il peut par exemple prêter une intention particulière à un personnage ou un sens caché aux éléments d'un décor. C'est ce qu'on appelle l'effet Koulechov. Vidéo 15 : Les manipulations de l'image. En composant une image, qu'elle soit fixe ou en mouvement, l'auteur y élabore un ensemble de significations à destination de son lecteur ou de son spectateur, à l'aide d'une panoplie d'outils concrets ou même symboliques : personnages, cadre (*cf. supra*), lumière, couleurs, géométries, costumes, décors, etc. Cette image peut également faire l'objet de **manipulations** dans sa substance-même, de trucages, particulièrement depuis l'émergence et le développement du numérique[\[i\]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@46c0f259edc64c6381365e3563f1a508?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn1) et des programmes de traitement des images. Ces technologies sont de plus en plus accessibles au grand public qui est devenu à la fois producteur et consommateur d'images. Les manipulations peuvent être d'ordre esthétique ou narratif, politique ou idéologique. [Exemple] : Le 15 décembre 2018, le journal télévisé de France 3 utilise en arrière-plan une photographie prise par un photojournaliste lors d'une manifestation des « Gilets jaunes » à Paris. Dans le coin supérieur droit de l'image, un manifestant arbore une pancarte sur laquelle est simplement inscrit le nom du président français : « Macron ». Or, sur l'original de la photo -- et sur le panneau du manifestant -- se trouvait également le mot « dégage ». Le sens est très différent : un soutien (ou un appel) au président à la place d'une injonction radicale (ou d'un conseil amical) au même président : « Macron dégage ». Il semblerait qu'une petite main ait *gommé* l'impératif peu courtois, transformant par là-même le sens de l'énoncé initial. Une fois la supercherie dénoncée sur les réseaux sociaux, la direction de la communication de France Télévision a présenté ses excuses, prétextant d'une « erreur humaine ».[\[ii\]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@46c0f259edc64c6381365e3563f1a508?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn2) Oui, l'erreur est humaine, mais celle-ci ne favorise pas la confiance que l'on doit pouvoir placer dans les grands médias publics. [3.3) Le son ] Texte 8 : L'image et le son. Qu'ils soient naturels ou synthétiques, les **sons** véhiculent aussi de la signification, seuls ou en accompagnement de l'image, par **contraste** ou par **redondance**. Ces sons sont des voix (monologues, dialogues), des bruits et des ambiances, des musiques, entrecoupés de silences, tout aussi signifiants. Le cinéma des origines est muet, ses projections accompagnées par un pianiste. *\"Les raisons de cette présence, qui devient vite un élément du spectacle, sont multiples et complémentaires ; couvrir le bruit du projecteur, rassurer les spectateurs dans le noir, créer un continuum dans le but d'unifier la succession discontinue des films, occuper l'oreille et la rendre ainsi moins attentive aux sollicitations sonores de la salle : autant d'hypothèses parmi lesquelles il n'est pas nécessaire de choisir. (...) Le musicien serait donc chargé d'occuper l'oreille pour libérer l'œil, sans aucune préoccupation du contenu des images.\"*[\[i\]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@748cea8185d1496c995842adaf0105f1?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn1) Le cinéma sonore nait en 1927 avec le film *\"The Jazz Singer\"* (Crosland, 1927), film principalement muet mais contenant une scène de monologue et quelques scènes chantées ; il se développe et se commercialise dans la foulée, au détriment du cinéma muet, non sans réticences et résistances chez certains critiques.[\[ii\]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@748cea8185d1496c995842adaf0105f1?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn2) [[\[i\]]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@748cea8185d1496c995842adaf0105f1?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_ednref1) MOUËLLIC Gilles, *La musique de film*, Cahiers du cinéma, Les petits Cahiers, Scénén-Cndp, 2003, p. 5. [[\[ii\]]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@748cea8185d1496c995842adaf0105f1?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_ednref2) « Dans de nombreux articles d'époque faisant écho à la révolution du parlant, les auteurs invoquent tous, au bout du compte, la *singularité*, la *spécificité* du média. Dans les polémiques suscitées par l'arrivée du parlant, le mutisme même du cinéma apparaît pour d'aucuns, comme son dernier carré identitaire. Ainsi Lucien Wahl écrit-il, en 1928, que le « cinéma est toujours pur quand il se tait » alors que, de son côté, Pierre Desclaux avance, la même année, que « ce mutisme est sa caractéristique propre celle qui lui confère ses qualités spéciales. » » (André GAUDREAULT et Philippe MARION, *La fin du cinéma ?*, Armand Colin, 2013, p.49-50.) Texte 9 : L'audiovisuel. Un message **audiovisuel** est, par définition, porté par de l'image et/ou par du son. Les **médias** audiovisuels sont particulièrement inscrits dans notre vie quotidienne : cinéma (sonore ou muet), documentaires et fictions, émissions télévisées ou radiophoniques (en direct ou en différé), programmes de flux ou de stock, séquences youtube, mais aussi installations vidéo, films de vacances ou de fancy-fair, communications par visiophonie, images de surveillances, etc. Ils ont développé des codes propres, des grammaires spécifiques, relativement peu prescriptives, faisant plutôt office de grilles de lecture et d'analyse de leurs langages. Les outils d'analyse narrative d'usage en littérature et en dramaturgie théâtrale ont très tôt été utilisés pour étudier, commenter, accompagner et améliorer le langage cinématographique et son écriture. Un film n'est ni un roman, car il est destiné à être vu et entendu plutôt que lu, ni un spectacle vivant (comme une pièce de théâtre) car l'enregistrement des images et des sons, ainsi que leur manipulation par le montage ou par les trucages représentent à la fois des contraintes techniques et des opportunités pour raconter des histoires. [3.4) Le storytelling : ] Texte 10 : L'histoire et le récit. De tout temps et en tout lieu, l'être humain, nous l'avons vu (cf. capsule *Théories du complot et manipulation*, *l'Effet Othello*, du [premier module de ce cours](https://courses.edx.org/courses/course-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024/jump_to_id/ced859dd68834951aa479086c488b4ec)), a besoin d'histoires et de récits pour sublimer le réel perçu comme chaotique et le reconstruire de manière cohérente et accessible. Il faut distinguer l'histoire et le récit. **L'histoire**, ce sont les événements se succédant de manière chronologique, le matériau brut, indépendamment de la manière de l'organiser et du médium utilisé pour le transmettre. Tandis que le **récit** en est la mise en forme, sa narration, la manière dont l'histoire va être construite par l'auteur, interprétée, agencée de manière singulière, pour être transmise et divulguée à son public. Une même histoire peut ainsi revêtir différentes formes (roman, pièce de théâtre, livret d'opéra, bande dessinée, film de cinéma, installation vidéo...) et se décliner sur différents supports (ondes sonores, livres, écrans, affiches, performances « live », etc.). Le philosophe et sémiologue Roland Barthes l'exprime admirablement : *\"Innombrables sont les récits du monde. C'est d'abord la variété prodigieuse de genres, eux-mêmes distribués entre des substances différentes, comme si toute matière était bonne à l'homme pour lui confier ses récits : le récit peut être supporté par le langage articulé, oral ou écrit, par l'image, fixe ou mobile, par le geste et par le mélange ordonné de toutes ces substances ; il est présent dans le drame, la comédie, la pantomime, le tableau peint (...), le vitrail, le cinéma, les comics, le fait divers, la conversation. De plus, sous ces formes presque infinies, le récit est présent dans tous les temps, dans tous les lieux, dans toutes les sociétés ; le récit commence avec l'histoire même de l'humanité ; il n'y a pas, il n'y a jamais eu nulle part aucun peuple sans récit ; toutes les classes, tous les groupes humains ont leurs récits, et bien souvent ces récits sont goûtés en commun par les hommes de culture différente, voire opposée : le récit se moque de la bonne et de la mauvaise littérature : international, transhistorique, transculturel, le récit est là, comme la vie.\"*[\[i\]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@cbb8f44a4d66448a88a69d22cb8103f9?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn1) Le récit est donc partout et de tout temps, ce qui fait de lui un puissant outil de manipulation qu'il convient de comprendre, de maîtriser... et de décoder. Vidéo 17 : La mise en récit : Comme le développe Marc Lits [\[i\]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@d55778d315334fceba932590983f1dc6?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn1) dans la capsule ci-dessous, le récit est parfois présenté comme un outil de manipulation du public, et cette idée s'est répandue depuis que la notion de ***\"storytelling\"*** a rencontré un certain succès et est devenue synonyme de formatage des esprits. Or, le récit est d'abord un outil essentiel d'explication du monde, parce qu'il permet d'organiser des événements épars en leur donnant sens. Mais comme le récit recourt à la fois à des données factuelles (le **cognitif**) et émotionnelles (les **affects**), la tendance pourrait être de privilégier l'émotionnel, car l'image et **l'immédiateté** favorisent cela, et donc de ne pas préserver cet équilibre dans la transmission d'informations. La **responsabilité** éthique et déontologique des **producteurs** de récits (les journalistes particulièrement) est donc grande, mais chaque **consommateur** de récits doit aussi être attentif aux sources qu'il choisit et à la distance nécessaire à garder, ainsi qu'à la nécessité de suivre plusieurs sources différentes pour recouper toute information. Texte 11 : La dramaturgie. Du grec *\"drama*\", signifiant l'action, la **dramaturgie** est l'art de construire des histoires pour les raconter avec le minimum de moyens et le maximum d'effets. La dramaturgie est un art de **l'efficacité** et de la performance. Une œuvre dramatique -- dramatique signifiant : *\"dans le respect de la dramaturgie » et n'étant pas synonyme de tragédie, c'est-à-dire « quand l'histoire finit mal\"* -- développe ainsi toute une série d'outils performants pour aiguiller, influencer le lecteur ou le spectateur dans sa réception du récit. Comme le souligne Sébastien Fevry [en conclusion de sa capsule vidéo](https://courses.edx.org/courses/course-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024/jump_to_id/5ee18aa37c354c1492bed482110b4382) concernant l'*effet Koulechov* (*cf. supra*) : *\"On peut aussi se dire, surtout pour l'art du film, qu'être manipulé fait aussi partie du jeu. C'est-à-dire qu'on doit accepter quelque part d'être manipulé par le réalisateur.\"* Cette manipulation nécessaire -- volontaire et maîtrisée dans le chef de l'auteur, inconsciente mais tacitement acceptée par le public -- a pour nom « **willing suspension of disbelief** » Texte 12 : Un pacte entre l'auteur et le public. La *\"willing suspension of disbelief\"*[\[i\]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@f9dba3e353a24cf38a17816aae45fe24?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn1) est une opération mentale effectuée spontanément par le lecteur, l'auditeur, le spectateur, l'*usager* d'une œuvre de fiction qui consiste à mettre son scepticisme naturel entre parenthèses lors de la réception du récit, accepter comme vraisemblable la proposition de l'auteur, même la plus farfelue, et y adhérer volontairement pour profiter pleinement des émotions engendrées. Il s'agit d'un **accord tacite** passé entre l'auteur du récit et son public, sans lequel aucune histoire ne pourrait être racontée. Cette *suspension volontaire de l'incrédulité* est rendue possible grâce au partage de codes spécifiques entre l'émetteur du message fictionnel et son destinataire. Le premier (historiquement et chronologiquement) de ces codes est probablement la formule magique introductive *\"il était une fois... \"*, manière de sésame permettant d'accéder au discours du conte ou de la fable. Il s'agit d'une manipulation volontaire de l'émetteur du discours, acceptée tout aussi volontairement par le récepteur. Texte 13 : Accrocher le spectateur et favoriser l'adhésion. L'auteur dramatique dispose d'une panoplie d'outils pour **favoriser l'adhésion** du spectateur à son propos fictionnel. Par exemple l'utilisation de **stéréotypes** pour faciliter la reconnaissance ou de l'**ironie dramatique** qui donne au spectateur une longueur d'avance sur le protagoniste, en lui fournissant une information dont ce dernier ne dispose pas. À nouveau, l'exploration de ces outils pourrait faire l'objet d'un cours à lui tout seul[[\[i\]]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@f539371a9e2d4ec28540a9d7bd9d5b72?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn1). Attardons-nous juste un instant sur deux instruments fabuleux : le *\"hook\"* et le *\"cliffhanger\"* : - Le **\"hook\"** (crochet, accroche, en français) est un dispositif de suspense permettant de tenir en haleine le lecteur ou le spectateur d'un récit feuilletonnant, d'un épisode à un autre en plaçant le protagoniste dans une situation de conflit non résolu et en reportant à plus tard sa résolution. Le lecteur ou le spectateur s'en retrouve comme forcé d'attendre -- ou de se précipiter -- sur la suite du récit pour en connaître le dénouement. - Le **\"cliffhanger\"** (le fait de s'accrocher à une falaise) est une manière de *\"hook\"* décuplé puisqu'il s'agit de placer le protagoniste dans une situation périlleuse, c'est-à-dire non seulement conflictuelle mais qui plus est menace son intégrité physique voire sa vie. [3.5) L'internet :] Texte 14 : Nous avons vu que la bonne réception d'une fiction dépendait notamment du pacte qui liait l'auteur et le spectateur pour que ce dernier laisse au vestiaire son esprit critique le temps du récit (*cf.* la *\"willing suspension of disbelief\"*, au chapitre 3.4). Un peu de la même manière, un dispositif scénique (une scène et un rideau) ou un costume (le chapeau, la cape et la baguette du magicien) nous mettent en condition pour adhérer au contenu fictionnel qui nous sera donné à voir ou à entendre. Il est également indispensable de comprendre une **énonciation dans son contexte de production**, à défaut de quoi le sens risque de se perdre voire de se pervertir[\[i\]](https://courses.edx.org/xblock/block-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024+type@vertical+block@ef02b8502a9d407388cf00181e93e7cb?exam_access=&jumpToId&preview=0&recheck_access=1&show_bookmark=0&show_title=0&view=student_view#_edn1). Surtout lorsque le récepteur a la possibilité d'interpréter et de surinterpréter les messages, comme lors d'une association d'images *\"neutres\"*, abordée dans l'*Effet Koulechov* (*cf.* chapitre 3.2). Texte 14 : Un discours multiforme et omniprésent : Ce module était consacré au discours et à la nécessité de son *\"décodage\"*. Le discours, nous l'avons vu, est multiforme et omniprésent. Une proposition discursive, constituée de langage verbal et non verbal, conscient ou inconscient, transite par l'image et le son, éventuellement combinés dans un message audiovisuel et est diffusée par une multitude de canaux. La dématérialisation des supports, la démocratisation des accès à l'information, la dissémination et la mobilité des échanges de contenus rendent l'émission et la réception des discours, leur *\"traçabilité\"*, plus incertaines et moins fiables. Les technologies de l'information et de la communication sont de plus en plus accessibles au grand public, ce qui génère une confusion dans les rôles d'émetteur et de récepteur et augmente la nécessité d'une lisibilité des discours quels que soient la forme qu'ils revêtent et le canal qu'ils empruntent. Loin de toute exhaustivité, une série de pistes de réflexions ont été explorées, certains phénomènes ou dispositifs relevés, quelques outils proposés, sans dogmatisme. Nos facultés à prendre un minimum de recul critique lors de la réception d'un message (lecture d'un article de journal, vision d'une capsule vidéo sur Internet, participation à une conversation sur des réseaux sociaux, écoute d'une émission en radio ou en podcast, etc.) et l'effort que nous produisons pour les solliciter et pour les mettre en œuvre sont les premiers garants de notre liberté de penser par nous-même. Vidéo 21 : Les raisonnements en sciences expérimentale. La science établit des connaissances objectives sur une base rationnelle. La connaissance scientifique n'est pas le fait d'opinions : **elle porte sur des objets et des faits observables**. La science établit des relations entre ces faits ou ces objets, typiquement des relations de cause à effet, des relations fonctionnelles, des relations ensemblistes ou encore des relations structurelles, ce qui nécessite de tenir des raisonnements. Ces raisonnements, de trois types, doivent répondre à certaines exigences pour constituer de manière valide une connaissance. Ils reposent sur l'existence de **régularités dans les observations** que l'on peut opérer sur les objets d'étude. **Tous ces raisonnements sont objectif**s, dès lors qu'ils sont l'œuvre de la raison. ##### **Type de raisonnement \#1 : La déduction** Un premier type de raisonnement est la déduction. **Ce raisonnement part de relations connues, hypothétiques ou élaborées** : en sciences expérimentales, par exemple, je formule une hypothèse et pour la valider je vais concevoir une expérience qui permettra par déduction de la valider... jusqu'à preuve du contraire. Je peux schématiser ce type de raisonnement comme suit : *\"Je sais que dans ce sac rempli de billes, toutes les billes sont bleues. Donc si je prends une bille, je déduis qu'elle doit être bleue.\"* ##### **Type de raisonnement \#2 : L\'induction** Le deuxième type de raisonnement est l'induction. Il repose sur le fait que **la réalité comporte des régularités, des constantes, des relations qui se reproduisent**, et nous amène à proposer une hypothèse. En sciences expérimentales, ces hypothèses posées sont éprouvées expérimentalement sur un mode hypothético-déductif. Je peux schématiser l'induction comme suit : *\"Je prélève une bille d'un sac dont je ne sais rien d'autre qu'il contient des billes. Oh ! Elle est bleue.\"* Je réitère la démarche et l'observation, la nouvelle bille prélevée est à nouveau bleue. Par induction, je propose l'hypothèse qu'en fait dans ce sac toutes les billes sont bleues. ##### **Type de raisonnement \#3 : L\'abduction** Il existe un troisième type de raisonnement que l'on mettra typiquement en œuvre **quand il n'est pas possible de réaliser une expérience sur un objet d'étude**. La base du raisonnement tient à nouveau à la régularité des phénomènes observés. Ce raisonnement -- l'abduction -- peut être schématisé comme suit : *\"Je sais que dans ce sac les billes sont bleues, la bille que j'ai en main est bleue, je propose donc qu'elle vienne de ce sac.\"* Les relations qui sont alors décrites au terme des démarches inductive, déductive, ou abductive, doivent également répondre à certaines exigences au-delà de leur adéquation au raisonnement : - La première est une exigence de **cohérence** : la démarche scientifique doit amener à des conclusions qui soient cohérentes avec ce qui est connu par ailleurs. - Cette exigence de cohérence impose aussi la **prudence** : la science n'est pas un savoir assis, immuable. Les connaissances évoluent au gré des observations qui ne sont jamais finies. **La science continue à s'enrichir en raison de l'incomplétude des connaissances et des observations**. Vidéo 22 : Les raisonnements en sciences humaines. En raison de leur objet, les sciences humaines et sociales sont nécessairement ancrées et situées, liées à des valeurs que le discours scientifique ne va pas supprimer mais tenir autant que possible à distance pour **tendre vers une forme d'objectivité et de neutralité**. Chaque discipline va livrer un type de discours, fournir une vision de la réalité sociale étudiée. Chacune va le faire à sa manière, au départ des méthodes propres à son champ disciplinaire et de qualités communément partagées, comme la rigueur scientifique et l'honnêteté intellectuelle. ###### **L\'objet de l\'anthropologie** L'objet de l'anthropologie sociale et culturelle consiste dans la description d'un groupe particulier, une communauté ou une nation (un peuple). La démarche repose sur des **interactions multiples entre un chercheur et des interlocuteurs** issus d'un groupe donné, via une démarche de type *\"observation participante\"*. L'anthropologue prend conscience de sa propre subjectivité, de ses catégories de pensée, afin de pouvoir, en meilleure connaissance de cause, approcher d'autres manières de dire et de ressentir le monde, afin de se saisir de catégories différentes des siennes. Sur la base d'une expérience acquise, **le chercheur mène un travail de traduction**, entre les catégories mobilisées par des personnes d'une culture donnée et celles compréhensibles par ses lecteurs. Il consigne dans des *\"cahiers de terrain\"* les données qu'il observe, en fait une **description précise, sans jugement de valeur** et, sur cette base, il rédige un rapport, mieux connu sous le nom de *\"monographie\"*. En ce sens, **le discours anthropologique est surtout descriptif**. ###### **L\'objet du droit** Le juriste, lui, étudie **l\'ensemble des règles qui régissent la conduite de l\'homme en société et les rapports sociaux** : il identifie les règles juridiques en vigueur, il consulte les conventions internationales, les lois nationales\... pour décrire le droit applicable, expliquer les choix posés par le législateur ou expliquer les décisions prises par les juges. Il évalue ces choix au départ des principes assurant la cohérence de l'ordre juridique. Il pointe les marges d'appréciation que laisse le droit, il souligne les tensions, voire les contradictions qui opèrent entre les différentes sources du droit et **il se prononce, au départ d'arguments juridiques**, en faveur de l'une ou l'autre solution. En ce sens, **le discours juridique est à la fois descriptif et prescriptif**. En droit, comme en anthropologie, c\'est la rencontre de qualités similaires (le temps long de l'analyse, la rigueur, la précision, la comparaison ou la confrontation des sources, l'absence de jugement de valeur, \...) qui attestent du caractère scientifique de la démarche. **Dans toute situation, l'anthropologue et le juriste gagnent à compléter leurs approches de l'apport d'autres disciplines**, qui mettent l'accent sur d'autres dimensions, qui leur permettent de voir d'autres choses que ce que leurs lunettes offrent comme vision et qui leur permettent d'aiguiser leur regard critique sur la réalité étudiée. Autrement dit, **une démarche critique et interdisciplinaire permet de mieux saisir une problématique et de là, mieux appréhender le réel dans toute sa complexité**. Vidéo 23 : ### *En résumé* Les **sciences formelles** sont des sciences fiables, transparentes\... mais qui, comme les autres sciences, ne débouchent pas nécessairement sur des conclusions incontestables. 1\. Théorie formelle et notions de preuve : 2\. Pourquoi une théorie formelle ne peut-elle pas offrir une connaissance absolue ? - Le choix des axiomes n\'est ni évident ni absolu or il est essentiel : \"Il est impossible de trouver un ensemble d\'axiomes vrais qui suffisent pour prouver chaque vérité mathématique\" - Les règles mécaniques sont appliquées empiriquement par des chercheurs : \"Les preuves sont donc vérifiées de façon empirique\" 3\. En mathématiques dites \"réelles\" encore appelées informelles \* \"Il existe toujours un facteur implicite d\'interprétation ou d\'imprécision, encore plus présent \" *\* qui s\'appuient sur une méthodologie moins fiable, sur base de graphiques, d\'images, d\'informations informatiques, \...* [5.2) La démarche scientifique : ] [Vidéo 23 : le raisonnement scientifique.] En quoi consiste une démarche scientifique ? Il convient de : 1. Choisir un **sujet** de recherche, 2. définir une **problématique**, 3. Cibler une **question** de recherche, 4. Formuler des **hypothèses**, 5. Pour ensuite collecter et analyser des **données** afin de vérifier ou réfuter les hypothèses émises, 6. Et finalement communiquer des **résultats** qui devront être validés par les pairs. Comment choisir le sujet de recherche et définir la problématique ? **Le chercheur doit prioritairement s'assurer que la question qu'il se pose a du sens**. Pour le savoir, il importe de faire l'état de l'art la concernant pour poser le cadre de la recherche et affiner son objet d'étude. Le chercheur va alors pouvoir **cibler une question de recherche et émettre des hypothèses explicatives** ou des conjectures qui soient falsifiables, c\'est-à-dire qui puissent être éprouvées, testées, expérimentalement ou non. Cette phase d'investigation faite d'essais, d'erreurs, de tâtonnements, comporte des phases de désordre et de contradiction qui peuvent devenir source d'une meilleure compréhension de la problématique posée. Elle est caractérisée par le fait de soumettre les idées du chercheur à des tests répétés, que ce soient des expériences, des démonstrations, des observations\... Et c'est ce qui contribue à la rigueur et à l'objectivité de ce qui est entrepris au quotidien et qui est indispensable à tout chercheur qui veille à faire preuve d'exactitude et d'honnêteté intellectuelle. Après cette phase de tests, **le chercheur confrontera les résultats obtenus, les observations faites, aux prévisions qu'il avait envisagées** ; à la lumière de la littérature, d'autres lois ou théories, il tentera d'interpréter ses résultats et de là, rejettera, confortera ou validera les hypothèses et/ou conjectures posées. Selon le cas de figure, de nouvelles hypothèses émergeront ou non et de nouvelles investigations seront entreprises. L'étape suivante consiste à **communiquer auprès de pairs**, proches dans un premiers temps, puis auprès d'une communauté scientifique constituée d'experts du sujet traité que ce soit lors de colloques ou lors de la soumission d'un article dans des revues scientifiques avec referee. Il s'agit d'une étape cruciale : toute investigation, toute élaboration de réponses et toute recherche d'explications ou de justifications débouchent sur la construction de nouvelles connaissances qui doivent être soumises à la révision de la communauté scientifique. C'est elle qui va passer au crible les conjectures émises et analyser la pertinence et la validité des énoncés et des preuves qui sont proposés. **Ce n'est que lorsqu'elle est validée par les pairs qu'une démarche peut être qualifiée de scientifique**. Texte 15 : évolution de la démarche scientifique en sciences humaine. À la suite de J-C Passeron et J-P Olivier de Sardan, partons du principe que l'anthropologie, la sociologie et l'histoire constituent les premières disciplines des sciences humaines. Elles échapperaient en effet aux contraintes du \"raisonnement naturel\", tout comme la géographie sociale et la science politique, et dans une moindre mesure également la psychologie et les sciences de la communication. Dans cette brève synthèse, nous nous concentrerons sur l'anthropologie et la sociologie pour faire écho à [[la synthèse présentée par R. Rezsohazy et B. Feltz sur l'évolution de la démarche en biologie]](https://courses.edx.org/courses/course-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024/jump_to_id/84219747307641d88fb8cd0f8ba5a0eb). J-C Passeron (1991) avance 3 postulats sur les sciences sociales : 1. Elles appartiennent toutes au même \"régime de scientificité\", 2. Elles se distinguent des sciences de la nature ou sciences physiques, 3. Elles s'inscrivent dans une \"visée scientifique\", c'est-à-dire qu'elles visent à produire une \"connaissance véridique du monde\", \"empiriquement fondée\" et soumise à des \"conditions de vigilance\". J-P Olivier de Sardan (2008) nous met en garde contre l'enfermement des disciplines dans une démarche trop fermée : tout comme on associe les historiens à l'analyse d'archives, les anthropologues vont principalement développer une méthodologie de terrain inductive et les sociologues pratiquer l'enquête par questionnaires sur base d'hypothèses. Il s'agit en fait d'une division plus traditionnelle qu'actuelle, les anthropologues pouvant très bien travailler également avec des archives, ou les sociologues avec un carnet de terrain, par exemple. Les sciences humaines ont été traversées et influencées par le marxisme, le populisme, le structuralisme, et l'analyse systémique (Olivier de Sardan 2008 : 15). Mais comment ces disciplines ont-elles vu le jour ? Heilbron (2006) distingue trois étapes préliminaires à l'éclosion de la sociologie en France : 1. L'élaboration des premières théories sociales en dehors d'une pensée religieuse, avec notamment Montesquieu et Rousseau, 2. Début XIXe, l'expression \"science sociale\" apparaît pour la première fois : elle renvoie à l'idée d'une \"nouvelle science empirique\" instiguée par Condorcet et Cabanis, 3. La diffusion plus large des théories sociales après Napoléon. A. Comte jette les bases de la discipline et d'une démarche scientifique propre aux sciences sociales. Ces évolutions se produisent en parallèle à l'évolution de la chimie et de la biologie, ainsi que de la Révolution Française et de la révolution industrielle. À la fin du XVIIIe siècle, \"*L'industrialisation et l'urbanisation \[...\] bouleversent tant les techniques que les mœurs.\"* (Lallement 2006 : 58). C'est l'émergence du prolétariat et de nouveaux défis de société qui engendrent le développement de \"radiographies sociales\" et de la \"statistique morale\" pour analyser ces changements sociaux. En 1830, la société de statistique londonienne voit le jour. A. Compte incarne le *positivisme*, qui influencera grandement les sciences humaines : *\"Le recours aux faits, à l\'expérimentation, à l\'épreuve de la réalité est ce qui permet de sortir des discours spéculatifs. C\'est le premier principe du positivisme. Alors que l\'esprit métaphysique recourt à des concepts éternels et universels, qu\'elle ne soumet pas à la réalité, l\'esprit positif lui confronte les hypothèses au monde réel.\"* (Cambien, 2007 : 11). A. Comte entend *\"élever la politique au rang de science\"* (Lallement, 2006 : 53) en induisant des changements fondamentaux dans la démarche en sciences humaines. Pour l'enquêteur de terrain, cela implique de limiter son implication dans le monde qu'il étudie, en s'isolant de ses sujets, *\"en les observant de l'extérieur, en les interrogeant par le biais d'intermédiaires. Nous conservons les pieds sur terre en nous accrochant à un ensemble de procédures de collecte de données qui assurent notre éloignement\"* (Burawoy, 2003 : 425) avec pour finalité de produire des lois (Lallement, 2006 : 53). Par la suite, cette prétention à l'objectivité et à l'impartialité en science humaine avec une portée universaliste sera fortement nuancée, voire formellement contestée (Burawoy 2003, Olivier de Sardan 2008). La moitié du XIXe siècle voit l'essor du libéralisme et de l'individualisme. L'auteur B. Constant écrira d'ailleurs que le rôle de l'État consiste avant tout à garantir les droits individuels. Il s'agit également d'une période d'accélération en matière de découvertes scientifiques, comme en témoigne l'[[unité précédente]](https://courses.edx.org/courses/course-v1:LouvainX+Louv22x+3T2024/jump_to_id/84219747307641d88fb8cd0f8ba5a0eb). Tous ces changements sont propices à de multiples réflexions sur l'organisation et le changement social qui accompagnent la lente institutionnalisation de la sociologie comme discipline à part entière dès la fin du XIXe. M. Lallement épingle d'autres facteurs favorables à l'émergence de la sociologie : - La montée en puissance de l'Allemagne et des USA, - La création de partis socio-démocrates, - L'affaiblissement du libéralisme, - Le renforcement des États-nations, - La démultiplication des bureaucraties. Toujours selon M. Lallement, la sociologie française s'est développée en imitant les sciences de la nature. Le positivisme domine ainsi en France, tandis qu'il s'agit plutôt de l'idéalisme en Allemagne et du pragmatisme chez les anglo-saxons. J. De Munck situe la naissance de l'anthropologie au XIXe siècle, dans un contexte colonial et impérialiste (De Munck 2005). Là où la sociologie s'interroge sur sa propre société, l'anthropologie, à l'origine, s'attache à comprendre les sociétés non-occidentales. Il s'agit d'une vision quelque peu exotique des choses : à l'heure de la globalisation, l'anthropologie sociale a pour objet les sociétés humaines, leurs productions culturelles, leurs croyances, leurs institutions... Il y a, au milieu du XIXe siècle, un véritable engouement pour la sociologie organiciste, qui compare le fonctionnement de la société à celui d'un organe (Lallement 2006 : 108), en s'inspirant notamment des *théories évolutionnistes* de Darwin. En anthropologie, cela se traduit par une *\"certaine gradation des civilisations\"* (Deliège, 2006 : 19). La société victorienne était alors considérée comme la plus avancée de toutes (en tout cas par ses propres penseurs) alors que certaines sociétés non-occidentales, dont l'organisation était perçue comme moins complexe, étaient qualifiées de \"primitives\". Ces dernières seraient, pour L. H. Morgan (1818-1881) par exemple, *\"des témoins de l'humanité naissante\"*, comme si elles avaient été bloquées à un certain stade tandis que les autres civilisations avaient poursuivi leur évolution (Deliège, 2006 : 20). C'est ainsi que le concept de *survivance* voit le jour : il s'agit de reliquats de pratiques antérieures que les anthropologues de l'époque croient déceler dans certaines des coutumes qu'ils observent, et qui tiendraient lieu de preuve au sein d'une forme d'archéologie du social. Exactement comme la théorie du chaînon manquant, mais appliquée à la culture. Il y a malgré tout une reconnaissance de l'unité de l'espèce humaine à travers ces théories, ainsi qu'un principe de progrès universel, qui donne une certaine légitimité au colonialisme mais qui s'oppose à l'esclavage (Deliège, 2006 : 22-23). Des contre-courants vont s'ériger contre cette vision du monde au sein de la discipline dès le début du XXe siècle. Durkheim (1858-1917), fondateur de l'école française de sociologie au début du XXe siècle, fera partie de ceux qui *\"remettent en cause l'idée de lois naturelles inéluctables\"* (Lallement 2006 : 111). Au même moment, Max Weber (1864-1920), auteur du célèbre *\"L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme\"*, initie en Allemagne son propre courant de pensée (Lallement, 2006 : 189). L'anthropologie sociale contemporaine, qui souhaite alors *\"se débarrasser du biologique\"* (Deliège, 2006 : 75), sera fortement influencée par les travaux de Durkheim. Ce dernier, qui observe la croissance du mouvement ouvrier, se passionnera surtout pour les questions de l'intégration sociale de l'individu. C'est aux États-Unis que la sociologie connaît un véritable essor dès les années 1920, à la faveur notamment d'une fuite massive de chercheurs d'Europe suite à la première guerre mondiale. Tout au long du XXe siècle, les sociologues américains ont l'opportunité de collaborer à la mise au point des politiques sociales, de techniques d'évaluation et d'intervention. L'évolution des divers courants sociologiques américains est là aussi intrinsèquement liée à l'évolution même de la société. En voici quelques exemples (Lallement, 2005 : 14-31) : - À la fin du XIXe siècle, des collectivités locales autonomes font places à une organisation sociale basée sur l'industrie et la classe sociale ; c'est la naissance de l'école de Chicago. - Dans l'après Deuxième Guerre, on assiste à une croissance de la classe moyenne dans un climat de Guerre Froide qui voit se côtoyer le déterminisme, les théories de la mobilité sociale, l'anti-communisme et un engouement pour les données chiffrées. - L'affaiblissement des États-Unis dans les années 1970 donne en quelque sorte naissance au courant interactionniste (en réaction à une sur-professionnalisation de la sociologie accusée d'oublier son objet au profit de résultats monnayables) et à une critique de la discrimination de genre dans les années 1980. Progressivement, on assistera à une unification de la sociologie et de l'anthropologie que J-P Olivier de Sardan attribue à l'école de Manchester. Celle-ci est en effet la première, dans les années 1950-1960, à réaliser des ethnologies appliquées à la ville et des enquêtes de longue durée en immersion dans des usines, par exemple (Olivier de Sardan 2008 : 37-38). La fin de la société industrielle, elle, coïncide avec l'apparition de la microsociologie, de la socio-anthropologie des imaginaires, de l'ethnométhodologie, des théories postmodernes, de l'étude de la déviance (H. Becker) ou encore de l'analyse du quotidien (E. Goffman, notamment) (Lallement 2005 : 176-221). Texte 16 : La recherche : un état d'esprit avant tout. Que ce soit en sciences expérimentales, en sciences humaines ou en sciences formelles, **toute recherche commence par une phase exploratoire**. Soit nous nous sentons interpellés par une observation surprenante, soit au contraire une problématique nous taraude depuis longtemps, soit par curiosité tout simplement. Ensuite **nous nous lançons à la découverte** d'idées, de données, nous explorons la littérature, nous observons, nous posons nos hypothèses\... avant de commencer à **tester nos idées.** En effet, la recherche c'est d'abord un état d'esprit : questionner les évidences, ne pas accepter le discours général ou la première impression, douter, réfléchir longuement, rêver\... Puis seulement après, la recherche consiste en une démarche, celle de la recherche de preuves de manière la plus rigoureuse possible. Attention, il y a là un piège, celui de LA méthode scientifique : il n'y a pas UNE méthode mais de nombreux possibles, des itérations entre l'empirique et les modèles, des remises en question\... Puis **c'est un \"va et vient\" entre le recueil et l'interprétation de données qui débute** : les résultats obtenus corroborent ou réfutent nos hypothèses. De là, il convient d'en poser de nouvelles (ou non), de les tester, en repassant par la case départ, puis en re-testant\... jusqu'à l'obtention de données nouvelles. Ces données vont alors être soumises à la révision par les pairs : des traces de notre démarche de nos résultats vont être **présentées et analysées par la communauté scientifique** lors de discussions informelles entre collègues, lors de colloques et/ou lors de la soumission de nos travaux à des revues scientifiques avec validation par des experts de notre problématique. De là, de nouvelles questions seront soulevées de nouvelles hypothèses formulées et /ou une nouvelle théorie verra le jour. De quoi recommencer à investiguer, réfléchir, rêver\... Le **bénéfice des connaissances nouvelles construites** pourra alors être estimé, très rapidement s'il s'agit d'une recherche appliquée ou d'action, un peu moins vite en cas de recherche fondamentale. Toutes contribueront tôt ou tard au développement d'une nouvelle technologie, à la résolution de problèmes sociétaux, de problèmes de santé, du quotidien, mais/et aussi à l'orientation des politiques ou parfois, plus modestement, juste pour satisfaire notre curiosité. Texte 17 : Adopter une posture critique : l'attitude essentielle du chercheur. Faire dialoguer des experts et les amener à collaborer, nécessitent de leur part, de laisser tomber des dogmes, de se remettre constamment en question, d\'**accepter la critique**. Et dès lors, même si le chemin s\'avère plus complexe ensemble, il permet d\'apprendre de l\'autre, de voir l\'autre penser, de **s\'ouvrir à d\'autres raisonnements** et de s\'enrichir. Travailler en équipe nécessite également de faire des concessions, d\'arriver à des compromis, de gérer des tensions, ce qui est **indispensable lorsqu\'il s\'agit d\'arriver à un consensus**. Ces démarches requièrent donc d\'adopter une **posture critique**, une des qualités essentielles à tout chercheur. Conclusion : Texte 18 : Distinguer une information scientifique d'une information pseudo-scientifique : Ce module nous a permis de comprendre que **la production d'une nouvelle connaissance scientifique nécessite de la part du chercheur de faire preuve de rigueur, d'honnêteté, de persévérance et de créativité**. La question de recherche associée à cette production doit impérativement faire sens, recourir aux critères de la preuve, à la conception d\'expériences et/ou observations et/ou démonstrations significatives, à l\'établissement des différentes possibilités, à la vérification des hypothèses, à l\'élaboration de théories, et ce pour tirer des conclusions plausibles et fiables, qui doivent être validées par les pairs. **Les pseudo-scientifiques tentent de nous faire croire et/ou de nous persuader -- voire de nous tromper -- en tenant des raisonnements de type déductif, inductif ou abductif, tels de \"vrais\" scientifiques**. Toutefois, la présence de certaines caractéristiques devrait nous guider pour ne pas nous laisser piéger : - Les pseudo-scientifiques font très souvent référence à des comptes rendus journalistiques, à des rumeurs ou des traditions anciennes, citent d\'autres ouvrages pseudo-scientifiques, mais, ne font pas, ou très rarement, référence à la littérature scientifique. - Leurs propos sont parfois incohérents voire contradictoires et contiennent ci et là, des erreurs scientifiques. - Bien souvent, ils présentent des faits *\"sortis de nulle part\"* qui constituent leurs argumentation et conclusion principales. - Ils font rarement, voire jamais, d\'investigations indépendantes pour vérifier leurs sources et ne testent pas non plus de possibilités alternatives. Ils débutent souvent sur une hypothèse qui fait habituellement appel à l\'émotionnel et/ou à des histoires invraisemblables, et ne cherchent ensuite que des éléments ou articles qui la confirment. Ils terminent très souvent par des conclusions hâtives voire absurdes. - Ils ne mettent pas l\'accent sur l\'expérience scientifique, méthodiquement contrôlée et reproductible. Souvent, tout repose sur des témoignages oculaires invérifiables, des histoires ou récits exagérés, des rumeurs ou des anecdotes douteuses. - Ils recourent systématiquement à des démarches *\"trop\"* inductives : d'un cas particulier, ils ont tendance à tirer des généralités de façon subjective et erronée. [MODULE 6 : ] [6.1) Analyser des démarches dans une méthode qualitative. ] Vidéo 22 : Définition et limites de la démarche qualitative Il existe deux grandes catégories de recherche : les recherches *qualitatives* et les recherches *quantitatives*. Ici, c'est la démarche qualitative qui est présentée. En sciences sociales, **la démarche qualitative permet la compréhension d'une réalité sociale en profondeur**. Elle permet l'étude intensive sur quelques cas à une étude extensive sur une large population statistiquement représentative. Il s'agit d'étudier un phénomène au plus près des acteurs de terrain en interaction avec eux pour donner une représentation réaliste et la plus complète possible de la réalité. La démarche qualitative demande du temps et demande au chercheur qu'il négocie sa place sur le terrain qu'il désire étudier. **La force d'une démarche qualitative est d'être capable de rendre compte de la complexité d'une situation** et d'envisager les éléments qui entrent en jeu dans un phénomène social. Il ne s'agit pas ici de réduire ces éléments à des variables, mais de rendre le plus justement possible l'enchevêtrement complexe qui compose une situation donnée. Il existe deux grandes manières d'envisager la recherche qualitative : de manière *hypothético-déductive* ou de manière *inductive* : - Une démarche **hypothético-déductive** implique de développer une question de recherche, puis une hypothèse précise et d'aller sur le terrain pour la vérifier. L'hypothèse doit alors être validée ou réfutée et dans ce dernier cas, idéalement reconstruite. - Une démarche **inductive** implique aussi le plus souvent une question de recherche, mais par contre, **pas d'hypothèse**. Aucune explication n'est produite en amont de peur de biaiser le regard du chercheur. Les clés de compréhension proviennent du terrain lui-même et des acteurs interrogés. C'est à partir du matériel collecté de l'analyse qu'une thèse est alors proposée. De manière synthétique, une démarche hypothético-déductive part de la théorie et des travaux préalables, pour élaborer une hypothèse puis la confronte au terrain, alors qu'une démarche inductive part du terrain pour élaborer une analyse et une théorie. Ceci est une vue très synthétique et les choses sont plus nuancées puisque la démarche hypothético-déductive nécessite aussi de revenir sur l'hypothèse après le terrain et que la méthode inductive, le plus souvent implique un processus plus itératif, c'est à dire fait d'allers et de retours entre théorie et terrain. Il existe une variété de méthodes envisageables pour la collecte de données dans une recherche qualitative, notamment les *entretiens* et *l'observation participante* : - Les **entretiens** sont des interactions, des rencontres provoquées par le chercheur pour collecter des données qui peuvent être directifs, non directifs ou semi-directifs. Dans ce dernier cas, le chercheur pose une série de questions, mais reste ouvert aux digressions et aux propositions émergeant des personnes interrogées. Les entretiens peuvent être plus ou moins longs et peuvent se répéter suivant les besoins de la recherche. - **L'observation participante** implique elle que le chercheur s'insère sur son terrain, se fasse une place à partir de laquelle il observe le fonctionnement de ce terrain, les interactions entre les personnes avant de s'entretenir avec les uns et les autres. C'est une méthode qui demande du temps, une forte implication, une attention et une éthique toutes particulières pour donner une juste place à la subjectivité du chercheur et de s'assurer de la validité des données collectées. D'autres méthodologies complètent les entretiens et les observations, comme les **recensions**, les **questionnaires**, les **récits de vie** qui sont des entretiens longs destinés à collecter des histoires de vie. Les **focus groups** qui sont des entretiens collectifs focalisés sur une problématique. Il est aussi possible de demander aux enquêtés de réaliser des scènes de théâtre, des cartes, des dessins, des photos, autour desquels se créent un dialogue. Vidéo 23 : La triangulation des sources. En résumé, la triangulation est une technique géométrique qui permet de déterminer la position d\'un point en mesurant les angles entre ce point et d\'autres points de référence dont la position est connue. Ce point peut être considéré comme étant le troisième sommet d\'un triangle dont on connaît deux angles et la longueur d\'un côté. Par analogie, **la triangulation fait également référence à l\'usage croisé de techniques de recueil de données dans les études qualitatives**. - La triangulation est le principe de base de toute enquête, qu'elle soit policière ou scientifique. Il s\'agit de **recouper les informations**. - Toute information émanant d'une seule personne, d'une seule mesure, d'une seule source est à **vérifier**. Par la **triangulation simple** le chercheur *croise les informateurs*, afin de ne pas être prisonnier d'une seule source. La **triangulation complexe** entend faire varier les informateurs en fonction de leur rapport au problème traité. Elle a pour objectif de *croiser des points de vue dont la divergence semble significative*. Il ne s'agit donc plus de recouper ou de vérifier des informations pour arriver à une \"version véridique\", mais bien de rechercher des discours contrastés, de faire de l'hétérogénéité des propos un objet de recherche, de s'appuyer sur les variations plutôt que de vouloir les gommer, en un mot de bâtir une stratégie de recherche sur la quête de différences significatives. [6.2) Analyser des données dans une démarche quantitative : ] Vidéo 24 : Qu'est-ce qu'un échantillon ? Vous avez certainement déjà lu un article de ce type dans la presse : *\"Le MR devient le premier parti en Wallonie.\"* Cet article cite différents pourcentages correspondant aux intentions de vote pour différents partis belges. Le paragraphe technique à la fin de l\'article nous indique que les données présentées proviennent d\'un \"échantillon représentatif des Belges de 18 ans et plus\", qui contient 2.388 personnes. Qu\'est-ce que cela signifie ? Ce qui nous intéresse ici n'est pas l'opinion des 2.388 Belges interrogés, mais bien ce que pense l'ensemble des Belges, c'est-à-dire l'ensemble des individus d'intérêt pour notre analyse en statistique : c'est ce qu'on appelle la \"population\". Dans la plupart des cas il n'est pas possible d'avoir accès à l'ensemble de la population en raison de contraintes de temps, de budgets et d'accès. En pratique, **ce problème est résolu par l'utilisation d'un \"échantillon\", c'est-à-dire un groupe d'individus extrait de la population** à laquelle on s\'intéresse dans l'analyse. Le processus qui consiste à extraire l'échantillon est appelé échantillonnage. À partir de cet échantillon, nous allons pouvoir déterminer les caractéristiques de la population : il s'agit de *l'inférence statistique*. Mais, pour ceci, il faut que l'échantillon soit représentatif, c'est-à-dire qu'il ait autant que possible les mêmes caractéristiques que la population. Pour que l'échantillon soit le plus représentatif possible de la population, **l'approche la plus directe est de sélectionner un échantillon aléatoire**, c'est-à-dire un échantillon dont la sélection dépend du hasard. L'échantillonnage aléatoire pose cependant un problème : comme il dépend du hasard, si nous échantillonnons plusieurs fois 10 individus dans une population de 100 individus, nous obtiendrons à chaque fois des résultats légèrement différents. **Nous ne pouvons donc [jamais être totalement sûrs, à 100%,] que l\'échantillon représente parfaitement la population**. Le caractère aléatoire de l'échantillon implique donc une part d'erreur et donc une incertitude sur les résultats. Cependant, il est **possible de quantifier cette incertitude en calculant la \"marge d'erreur\"** : celle-ci indique si le résultat obtenu pour un échantillon donne une information précise ou floue à propos de la population. Par exemple, la moyenne ou la proportion dans l'échantillon est-elle proche ou non de la vraie valeur (inconnue) dans la population ? On veut une marge d'erreur le plus petit possible, ce qui correspond à l'information la plus précise possible. Par exemple, si une enquête donne comme résultat que 50% des personnes interrogées veulent voter pour le parti A avec une marge d'erreur de 3%, la \"vraie\" proportion de personnes qui veulent voter pour le parti A dans la population a une forte probabilité d'être comprise entre 47% et 53%. **L'intervalle ainsi obtenu autour du résultat du sondage est appelé \"intervalle de confiance\"** et sa largeur correspond ici au double de la marge d'erreur. Un intervalle de confiance est souvent calculé avec un seuil de confiance de 95%. Ceci veut dire que si l'on sélectionne 100 échantillons à partir de notre population, 95 d'entre eux contiendront la vraie valeur de la population. Nous avons donc vu comment quantifier l'incertitude sur les sondages à travers la marge d'erreur. Mais est-il possible d'influencer cette marge d'erreur pour la réduire ? Oui : **lorsque la taille de l'échantillon augmente alors la marge d'erreur diminue**. Le calcul de la marge d'erreur montre bien que l'incertitude est très grande pour des petits échantillons et plus faible pour de grands échantillons. Vidéo 25 : Qu'est-ce qu'un bon sondage ? **Un sondage est le tirage d'un échantillon dans une population, à partir duquel on souhaite inférer la description de la population en question**. Mais comment savoir si le sondage a bien été fait d'un point de vue statistique ? S'il vaut mieux vaut un petit échantillon représentatif qu'un grand échantillon peu représentatif, d'autres caractéristiques ont un impact sur la qualité d'un sondage : - Un sondage repose d'abord sur des **objectifs de recherche**. À partir de ces objectifs, on commence par identifier une population d'intérêt pour ensuite définir les modalités de la collecte des données. - Le sondage peut s'effectuer sur base d'un **échantillon stratifié**. Pour ce faire, la population est divisée en sous-groupes homogènes appelés strates (par exemple, par région, par genre, par âge\...). Des échantillons sont sélectionnés séparément dans chaque strate. Ceci permet d'avoir des résultats plus précis et de réduire la taille de l'échantillon total. - Pour mettre en œuvre un échantillonnage aléatoire (de n\'importe quel type), il faut disposer d'une **base de sondage**, c'est-à-dire une liste de tous les individus qui font partie de la population. - En pratique, ces conditions peuvent être difficiles à remplir et donc les instituts de sondage utilisent souvent une approche non aléatoire : **la méthode des \"quotas\"**. Pour ce faire, un nombre cible de répondants est défini à partir des caractéristiques connues et pertinentes de la population. - Un autre aspect à définir est **la méthode de collecte des données**. Les sondages sont généralement effectués en face à face, par téléphone, par internet ou sur papier. Chacune de ces méthodes présente des avantages et inconvénients propres et a un impact sur la représentativité des données. **Un bon sondage repose donc sur un échantillonnage, une méthode et un moment de collecte des données qui sont adaptés aux objectifs et au public cible**. Un bon sondage repose aussi sur : - Un **échantillon représentatif de la population d'intérêt**, - d'une **taille suffisante** pour pouvoir tirer des conclusions valides. **Un bon sondage doit également reposer sur un questionnaire pertinent et neutre**. Des questions biaisées peuvent compromettre la qualité des résultats. Mais un bon sondage a des limites : il n'est possible de tirer des conclusions qui s'appliquent à la population que sur ce qui a été mesuré. Enfin, la dernière étape du sondage, qui a aussi un impact sur la qualité des résultats finaux, est l'analyse et l'interprétation des données. L'échantillonnage et le sondage sont des outils précieux pour décrire le monde qui nous entoure lorsqu'ils sont mis en œuvre correctement. **Il importe de garder du recul par rapport aux chiffres afin de faire une différence entre une démarche scientifique qui apporte des informations fiables et des statistiques de mauvaise qualité ou mal interprétées**. Vidéo 26 : Quel-est le lien entre un prix Nobel et du chocolat ? Lorsque sur un graphique, une corrélation (une relation de proportionnalité par exemple) apparaît entre les valeurs situées sur l'abscisse (que l'on appelle également paramètre ou variable explicative) et les valeurs situées sur l'ordonnée (encore appelé variable dépendante ou conséquence), on a souvent tendance à dire qu'il existe une relation de cause à effet entre le paramètre et la variable dépendante. **Pourtant là où il y a corrélation, il n'y a pas nécessairement causalité !** Lorsqu'il y a corrélation, un facteur que l'on appelle *\"facteur confondant\"* (ou *\"facteur de confusion\"*) peut éventuellement expliquer le lien de cause à effet, mais pas d'une manière systématique. Ce facteur confondant est une variable qui permet de comprendre le lien entre la variable dépendante et la variable explicative, et qui peut parfois produire des fausses associations, des biais. Dans la vidéo ci-dessus, le lien confondant entre la consommation de chocolat -- variable explicative supposée -- et le nombre de prix Nobel -- variable dépendante -- est le niveau de vie des habitants d'un pays. [Texte 19 : Méfiez-vous d'une sur-interprétation des données : ] Nous voici arrivés au terme de ce module consacré à l\'analyse des données. Nous avons essayé d\'épingler les **axes de vigilance d\'un penseur critique quand il s\'agit de comprendre et d\'interpréter des données**. Le premier axe de vigilance consiste à identifier si les données proposées proviennent d\'une démarche de recherche qualitative ou quantitative. Car, en fonction des approches, les critères de qualité pour l'interprétation des données varient. ##### **La démarche qualitative** La démarche qualitative est une étude intensive au plus près des personnes concernées par le sujet de la recherche. **Elle vise à analyser en profondeur et en compréhension un petit nombre de cas**. De manière schématique, existe deux façons d'envisager la recherche qualitative : - La première, qualifiée de **démarche hypothético-déductive**, comporte une question de recherche, l'émission d'une ou de plusieurs hypothèses et le test de celles-ci sur le terrain avec éventuellement ensuite une reformulation des hypothèses. - L'autre est qualifiée de **démarche inductive** et se caractérise également par une question de recherche, mais sans cadre explicatif initial. C'est à partir des données récoltées qu'une hypothèse (ou plusieurs) sera progressivement élaborée et reformulée si nécessaire pour nourrir une analyse voire un cadre théorique. La qualité d'une démarche qualitative est liée à l'adéquation au terrain, à l'explicitation de la démarche du chercheur et aux conditions initiales. Comme les données sont récoltées auprès d\'un petit nombre de sujet, il est important de les valider par triangulation. ##### **La triangulation des données** **La triangulation consiste à confronter des données, des informations**. On distingue deux types de triangulation : la simple et la complexe. - La **triangulation simple** : on compare, on confronte des données, des sources, car on ne fait jamais confiance à une seule source d'informations. - La **triangulation complexe** (essentiellement au niveau des sciences humaines) : on ne cherche pas une vérité en soi, mais plutôt à faire varier les points de vue pour se représenter au mieux le phénomène étudié, celui-ci étant presque toujours plus complexe qu'on ne l'imagine. ##### **La démarche quantitative** La démarche quantitative a pour objectif, à partir d\'une question de recherche ou d\'une affirmation, de décrire un ou plusieurs phénomène(s) (démarche exploratoire) ou de tester (valider ou invalider) une hypothèse (démarche hypothético-déductive). Contrairement à la démarche q

Use Quizgecko on...
Browser
Browser