OPÉRATION DE PAIEMENT PDF

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This document details payment operations under French law. It discusses various aspects of payment, including the use of instruments like checks and bank transfers. It also explores the legal framework for payments, and different types of payment methods.

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PARTIE I — LES OPÉRATIONS BANCAIRES Définition des opérations de banque. L’article L. 311-1 du Code monétaire et financier donne une définition des opérations de banque : « Les opérations de banque comprennent la réception de fonds remboursables du public, les opérations de crédit, ainsi que les ser...

PARTIE I — LES OPÉRATIONS BANCAIRES Définition des opérations de banque. L’article L. 311-1 du Code monétaire et financier donne une définition des opérations de banque : « Les opérations de banque comprennent la réception de fonds remboursables du public, les opérations de crédit, ainsi que les services bancaires de paiement. » Ainsi, le champ des opérations bancaires est particulièrement large : virements et prélèvements bancaires, retrait et dépôt d’espèces, opérations liées au chèque ou à la carte bancaire, mais également mise en place de crédits ou de produits d’épargne. Outre ces opérations, les établissements de crédit peuvent également effectuer des opérations connexes à leur activité telles que les opérations de change, le conseil et l’assistance en matière de gestion de patrimoine ou de gestion financière ou encore l’émission et la gestion de monnaie électronique (C. mon. fin., art. L. 311-3). Ces dernières activités ne seront pas développées, étant seulement connexes. Dans cette étude sont abordés : - Les instruments de paiement (Chapitre I) ; Les opérations de crédit (Chapitre II). CHAPITRE I — LES OPÉRATIONS DE PAIEMENT Notion de paiement. L’article 1342 du Code civil définit le paiement comme « Le paiement est l’exécution volontaire de la prestation due. » Partant, le paiement a pour effet de libérer le débiteur à l’égard du créancier et éteint la dette (sauf exception : la subrogation dans les droits du créancier). Les articles 1343 et suivants du Code civil encadrent spécifiquement le paiement de sommes d’argent, dont il ressort les règles génériques suivantes : - - Par principe, le paiement, en France, d’une obligation de somme d’argent s’effectue en euros (C. civ. art. 1343-3). Il s’ensuit que l’utilisation d’une monnaie étrangère dans l’opération de paiement n’est donc pas admise pour les contrats internes. Il en résulte qu’en France, seul l’euro a – de plein droit – cours légal et pouvoir libératoire, c’est-à-dire qu’il est la seule monnaie qu’un créancier soit tenu d’accepter et dont la remise libère le débiteur. En revanche et par exception, « le paiement peut avoir lieu en une autre monnaie si l’obligation ainsi libellée procède d’une opération à caractère international ou d’un jugement étranger » ; Constitue une opération de paiement une action consistant à verser, transférer ou retirer des fonds, indépendamment de toute obligation sous-jacente entre le payeur et le bénéficiaire (C. mon. fin. art. L. 133-3, I). Selon l’instrument de paiement concerné, l’opération de paiement sera initiée par le payeur (par exemple, le chèque ou le virement) ou par le bénéficiaire (par exemple, le prélèvement). Instruments de paiements : la monnaie. Pour se libérer d’une dette, le débiteur dispose de plusieurs modalités de paiement, parmi lesquelles la remise de fonds à son créancier. La monnaie dispose d’un pouvoir libératoire, en ce sens que sa remise a pour effet d’éteindre une dette. Ce pouvoir est par ailleurs assuré par les sanctions attachées au refus de ce paiement. Le refus des pièces de monnaie ou des billets de banque ayant cours légal en France est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe (C. pén., art. R. 642-3). Toutefois, le pouvoir libératoire de la monnaie n’est pas absolu. Il existe à cet égard trois sortes de restrictions : • • Premièrement, « nul n’est tenu d’accepter plus de 50 pièces lors d’un seul paiement » (Cons. UE, règl. [CE] no 2169/2005, 21 déc. 2005 mod.) ; Deuxièmement, aux termes de l’article L. 112-5 du Code monétaire et financier, « en cas de paiement en billets et pièces, il appartient au débiteur de faire l’appoint » (contrairement à la croyance commune des non-juristes). En pratique, c’est sur le débiteur que pèse la charge de se procurer le numéraire d’argent nécessaire pour solder exactement la somme dont il est redevable (il en est ainsi, même si le créancier a la qualité de commerçant). Partant – même si cela demeure délicat sur le terrain des relations commerciales – juridiquement, le créancier est en droit de refuser en paiement un billet de banque ayant cours légal (sans risquer d’être sanctionné sur le fondement de l’article R. 642-3 du Code pénal) ; Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 4 Tous droits réservés — Reproduction interdite • Troisièmement, différentes règles (destinées à lutter contre les fraudes fiscales, les recels et autres blanchiments de capitaux) limitent le pouvoir libératoire des espèces. Le paiement d’une dette supérieure à 1 000 euros ne peut être effectué en espèces lorsque le débiteur a son domicile fiscal sur le territoire de la République française ou qu’il agit pour son activité professionnelle ; ce montant est porté à 3 000 euros en cas de paiement au moyen de monnaie électronique (C. mon. fin., art. L. 112-6 et C. mon. fin., art. D. 112-3). Néanmoins, cette règle connaît plusieurs dérogations (C. mon. fin., art. L. 112-6). Ainsi, lorsque les paiements sont effectués entre personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels, les paiements peuvent être librement réalisés en espèces, au-delà du plafond de 1 000 €. Une autre dérogation bénéficie aux dépenses d’État et des autres personnes physiques, au titre desquelles ce plafond est écarté. En outre, la jurisprudence précise que l’interdiction de payer en espèces au-dessus d’un certain montant ne concerne que les règlements effectués sur le territoire français (CE, 10 mai 2012). À défaut, aucune sanction ne peut être prononcée. → Exemple → Un particulier achète une voiture auprès d’un concessionnaire automobile. Par hypothèse, le paiement demandé étant supérieur à 1 000 euros, il ne pourra pas régler cet achat par la remise d’espèces. → En revanche, l’achat d’une automobile d’occasion entre deux particuliers peut se réaliser en monnaie fiduciaire (voir définition ci-après), et ce même au-delà de 1 000 euros. Distinction entre monnaie fiduciaire et monnaie scripturale. En vertu de l’article L. 311-3 du Code monétaire et financier, « sont considérés comme moyens de paiement tous les instruments qui permettent à toute personne de transférer des fonds, quel que soit le support ou le procédé technique utilisé ». Témoignage de cette pluralité d’instruments de paiement, on oppose classiquement les deux notions suivantes : - - Monnaie fiduciaire : vise la remise d’une somme d’argent en espèces (pièces ou billets). Cette remise s’opère aux risques et périls de celui qui l’opère. Les espèces circulent par tradition, c’est-à-dire de la main à la main ; Monnaie scripturale : correspond à des créances sur des professionnels de la banque. Il s’agit plus précisément de soldes disponibles des comptes en banque, susceptibles de circuler de compte à compte, par un jeu d’écritures (chèques, cartes bancaires…). Ainsi, une fois portée en compte, la monnaie entre dans le « solde disponible » et partant, mise par le banquier à la disposition du titulaire du compte. Les écritures, simples opérations matérielles, s’opèrent sous la responsabilité du banquier du titulaire du compte et aux conditions prévues par la convention de compte. Juridiquement, la tradition (pour la monnaie fiduciaire) comme l’écriture (pour la monnaie scripturale) vaut paiement. → Conséquences pratiques → L’inscription de la somme au compte du créancier vaut paiement. Juridiquement, cette inscription a pour effet de considérer le créancier comme payé au moment de l’inscription de la somme à son compte (Civ. 1, 23 juin 1993). Indication de paiement. Le banquier n’est fondé à passer des écritures qu’en vertu, soit d’une convention avec son client, soit d’un ordre de paiement régulier (C. mon. fin. art. L. 133-6). Il existe une grande variété d’ordre de paiement : les ordres de virement, les mandats postaux, les autorisations de prélèvement, les ordres de paiement par carte, les ordres de paiement par chèque et/ou par lettre de change… Les prochains développements suivront le plan suivi par le Code monétaire et financier, lequel vise – s’agissant de la monnaie scripturale – d’une part « le chèque bancaire et postal » et, d’autre part, « les règles applicables aux autres instruments de paiement ». Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 5 Tous droits réservés — Reproduction interdite SECTION 1 — LE CHÈQUE Définition. Le chèque trouve son origine en France, dans une loi du 14 juin 1865. Aujourd’hui, le chèque est encadré par le Code monétaire et financier, aux articles L. 131-1 à L. 131-87 et R. 131-1 à R. 131-51. Le chèque se définit comme un titre par lequel une personne (dénommée tireur) donne l’ordre à une banque (dite tiré), de payer à vue une somme d’argent au profit d’une troisième personne (le porteur). Alors qu’il existe un droit de payer en espèces (voir supra), il en va différemment à l’égard du chèque. En effet, un tel droit ne découle d’aucun texte, si bien que la jurisprudence estime de longue date qu’un débiteur ne peut contraindre son créancier à accepter un règlement par chèque (Req. 3 mars 1930). Toutefois, en ce cas, le professionnel doit informer sa clientèle d’une telle restriction par voie d’affichage dans ses locaux, ses correspondances… → Conséquences pratiques → Dès lors, il ne saurait être opposé à des commerçants (de plus en plus nombreux en pratique, craignant l’impayé) de refuser les paiements opérés à l’aide de cet instrument. Néanmoins, ce principe connaît une exception, dans le cas où le créancier est adhérent à un centre de gestion agréé. Cette exception figure à l’article 1649 quater E bis du Code général des impôts. En application de cet article, « les adhérents des centres de gestion agréés sont soumis à l’obligation d’accepter les règlements soit par carte bancaire, soit par chèques ». → Conséquences pratiques Les adhérents à un centre de gestion agréé sont tenus d’accepter au moins deux moyens de paiement : - Le paiement en espèces (obligatoirement) ; et - Soit, le règlement par carte bancaire soit, par chèque. Autrement dit, le professionnel est en droit de refuser un paiement par chèque – s’il souhaite éviter le risque d’impayé – sous réserve d’accepter le paiement en espèces (obligatoire) et dès lors qu’il accepte la carte bancaire. Très classiquement, le chèque sera présenté à travers les trois événements ponctuant sa vie : sa création (I), sa transmission (II) et son paiement (III). I. Émission du chèque Annonce de plan. Les chèques peuvent en principe être rédigés sur papier libre. Toutefois, en pratique, la mise en place de circuits automatisés de traitement des chèques conduit les banquiers à interdire à leurs clients de créer des chèques sans recourir aux formules standardisées et préimprimées. L’usage s’est en effet établi de rédiger les chèques sur des formules numérotées détachées d’un carnet à souches. La loi n’impose pas le recours à un imprimé normalisé à peine de nullité ; néanmoins, la norme Afnor K 11-111 doit être employée par les banques, à peine d’amende, pour tout chèque émis et payable en France en euros (arrêté du 5 nov. 1998). Les carnets de chèques, lorsque le banquier accepte d’en délivrer, doivent être fournis gratuitement aux titulaires de comptes par les banques (C. mon. fin. art. L. 131-71, al. 2). Pour être régulier, le chèque doit répondre à un certain nombre de conditions de forme et de contenu (A) ainsi que des conditions de fond (B). Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 6 Tous droits réservés — Reproduction interdite A. Forme et contenu du chèque Mentions obligatoires. Le chèque doit être établi par écrit et comporter un certain nombre d’indications fixées par l’article L. 131-2 du Code monétaire et financier, ce sont : - - - - - La dénomination de chèque, insérée dans le texte même du titre et exprimée dans la langue employée pour la rédaction de ce titre. Concrètement, le mot « chèque » doit être mentionné sur le titre et exprimé dans la langue employée pour la rédaction de ce titre, soit en français par hypothèse (C. mon. fin. art. L 131-2, 1). ; Le mandat pur et simple de payer une somme déterminée. La somme est habituellement portée en lettres et en chiffres ; mais rien n’interdit de la porter seulement en lettres ou seulement en chiffres, aucune disposition n’imposant une forme déterminée (Rép. Rodet, AN 24 nov. 1986, p. 4380). C’est en effet, pour éviter les erreurs et falsifications, que la somme est toujours portée deux fois (en chiffres et en lettres). En cas de différence entre le montant chiffré et écrit, c’est l’inscription en lettres qui prévaut. Si l’inscription est portée plusieurs fois en lettres ou en chiffres, c’est la moindre somme qui est retenue (C. mon. fin., art. L. 131-10) ; Le nom de celui qui doit payer (le tiré) ; L’indication du lieu où le paiement doit s’effectuer. À défaut d’indication spéciale, le lieu indiqué à côté du nom du tiré est réputé être le lieu du paiement ; si plusieurs lieux sont indiqués à côté du nom du tiré, le chèque est payable au premier lieu indiqué ; à défaut de ces indications ou de toute autre indication, le chèque est payable au lieu où le tiré a son établissement principal (C. mon. fin. art. L 1313, al. 2 et 3) ; L’indication de la date et du lieu où le chèque est créé. Pour valoir comme chèque, il doit comporter le jour, le mois et l’année où il est rédigé (Com., 24 juin 1997). Les parties peuvent toutefois convenir de ne pas dater le chèque et de laisser à l’une d’elles le soin d’y procéder (on songe au chèque de garantie, remis à l’occasion d’une location saisonnière). Dès lors qu’il est convenu qu’il reviendra à l’une des parties de dater le chèque, le silence au moment de la signature du chèque est valable (Com., 22 sept. 2015, no 14-17.901) ; La signature de celui qui émet le chèque (le tireur). Cette signature doit être manuscrite, à moins d’un accord, fût-il tacite, conclu entre la banque et le titulaire du compte (Com., 24 oct. 2000). Le titre dans lequel l’une des énonciations ci-dessus (à l’exception du lieu du paiement, cette mention pouvant être suppléée, voir infra) fait défaut ne vaut pas comme chèque : il peut seulement valoir à un autre titre, par exemple comme reçu, ou comme reconnaissance de dette, ou bien comme commencement de preuve. Tel est le cas en l’absence de signature du tireur (Com. 12 juill. 2011, no 10-15.833), le document ne vaut pas chèque. → Exemple → Un chèque dit « de casino » est un chèque rédigé sur un papier quelconque, généralement par les maisons de jeu. Si les mentions obligatoires y figurent, il est régulier en la forme (CA Aix, 14 nov. 1958). En revanche, si des mentions obligatoires y font défaut, il ne vaudra pas comme chèque. Il pourra valoir titre de créance du porteur contre le signataire (Civ. 1re, 31 janv. 1984, no 82-15.904). Le banquier tiré n’a qu’une obligation de moyens en matière de vérification. Concrètement, il n’est tenu qu’à une vérification au moins sommaire de la signature apposée sur les chèques (C. mon. fin., art. L. 131-38 ; Com. 16 mars 2010, no 09-12.970). Ainsi, le banquier encaisseur doit s’assurer de la régularité apparente du chèque. Il doit notamment : • • Contrôler la correspondance entre le nom du bénéficiaire et celui du titulaire du compte et la concordance de la signature de l’endossataire avec les spécimens de signature qu’il a recueillis auprès du titulaire du compte (Com. 17 mai 2017, no 15-24.277, décision dans laquelle est engagée la responsabilité de la banque présentatrice qui accepte d’encaisser sur le compte de son client des chèques barrés libellés au profit d’un tiers et ne vérifie pas leur endos) ; S’assurer que le chèque ne présente pas d’anomalies (par exemple : un chèque tiré sur une banque imaginaire). Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 7 Tous droits réservés — Reproduction interdite Mentions interdites. Le chèque étant payable à vue, sont notamment rigoureusement interdites la stipulation d’une échéance (C. mon. fin., art. L. 131-31) et la stipulation d’un intérêt (C. mon. fin., art. L. 131-8). Mentions facultatives : le bénéficiaire. La mention du bénéficiaire du chèque n’est pas obligatoire. Il s’ensuit que le chèque sans indication du bénéficiaire vaut comme chèque au porteur (C. mon. fin. art. L. 131-6, dern. al.). Le bénéficiaire correspond à la personne qui « porte » (est en possession) du chèque. En outre, le chèque peut être stipulé payable : - - - À une personne dénommée, avec ou sans clause expresse « à ordre ». L’indication d’un bénéficiaire peut résulter de la simple mention du numéro de compte à créditer (au recto comme au verso du chèque : Com. 13 févr. 1996, no 93-18.593) ; À une personne dénommée, avec la clause « non à ordre » ou une clause équivalente. On en déduit que la clause « à ordre » est toujours sous-entendue (le bénéficiaire peut ainsi se substituer une autre personne à qui le chèque devra être payé). Lorsqu’elle est sous-entendue, la clause peut être contredite par l’insertion d’une clause « non à ordre » qui interdit l’endossement du chèque et fait de celui-ci un chèque dit nominatif transmissible seulement dans la forme et avec les effets d’une cession ordinaire (C. mon. fin. art. L. 131-16) ; Au porteur (c’est-à-dire à toute personne en possession du chèque). Il en va ainsi du chèque « en blanc », c’est-à-dire sans indication de bénéficiaire, lequel est stipulé payable au porteur. Mentions facultatives : le chèque barré. Le barrement d’un chèque est réglementé par les articles L. 131-44 à L. 131-46 du Code monétaire et financier. Lorsqu’il est général (« barrement général »), il s’effectue au moyen de deux barres parallèles apposées au recto. La plupart des chèques sont aujourd’hui barrés via un procédé mécanique. Le chèque barré ne peut être payé, par le tiré, qu’au profit des personnes suivantes : « à un banquier, un établissement de monnaie électronique, un établissement de paiement, un chef de centre de chèques postaux ou un client du tiré ». L’intérêt du barrement est de permettre d’identifier avec précision la personne à qui le chèque est destiné et de faciliter les recherches en cas de perte, de vol et de falsification. Le barrement peut également être spécial. Il consiste à ajouter le nom d’un banquier particulier entre les deux barres. Cette mention a pour effet de garantir le paiement à la personne nommément désignée. Mention facultative : la certification. Le tireur ou le porteur d’un chèque peut, nonobstant toutes dispositions contraires, demander au banquier tiré de certifier que la provision correspondante existe chez lui à la disposition du tireur. Si cette provision existe, le banquier ne peut refuser la certification, qui est pour lui une obligation. La certification se réalise par l’apposition de certaines mentions : date, montant pour lequel le chèque a été établi, nom et signature du tiré. Ces indications, à l’exception de la signature qui doit être manuscrite, sont apposées par un procédé mécanique de marquage ou d’impression indélébile offrant toute garantie de sécurité (C. mon. fin., art. R. 131-2). Cette certification constitue pour le porteur du chèque une garantie complète. Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 8 Tous droits réservés — Reproduction interdite Schéma explicatif de l’émission du chèque. Le « tireur » va donner ordre à la banque (« tiré ») de payer le bénéficiaire. B. Conditions de fond à la création du chèque Annonce de plan. Les conditions de fond concernent les parties à l’émission du chèque (1) ainsi que la provision (2). 1) Conditions relatives aux parties Conditions de création. Premièrement, les conditions de fond relatives au tireur sont déterminées par les règles du droit commun : un consentement, la capacité, un but licite au sens de l’article 1163 du Code civil. Néanmoins, les éventuelles causes de nullité, en lien avec ces exigences, sont rarement opposables au porteur du chèque. Ce constat découle des deux règles suivantes : - - En vertu, d’une part, du principe d’indépendance des signatures (C. mon. fin. art. L. 131-11). En application de cet article : « Si le chèque porte des signatures de personnes incapables de s’obliger par chèques, des signatures fausses ou des signatures de personnes imaginaires, ou des signatures qui, pour toute autre raison, ne sauraient obliger les personnes qui ont signé le chèque, ou au nom desquelles il a été signé, les obligations des autres signataires n’en sont pas moins valables. » ; et D’autre part, de celui de l’inopposabilité des exceptions au porteur de bonne foi (C. mon. fin. art. L. 13125). Conformément à cet article : « Les personnes actionnées en vertu du chèque ne peuvent pas opposer au porteur les exceptions fondées sur leurs rapports personnels avec le tireur ou avec les porteurs antérieurs, à moins que le porteur, en acquérant le chèque, n’ait agi sciemment au détriment du débiteur. » Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 9 Tous droits réservés — Reproduction interdite Deux exceptions de nullité demeurent toutefois opposables au porteur de bonne foi et feront donc obstacle à son paiement : - L’exception fondée sur l’incapacité du tireur : l’incapacité s’apprécie au jour de la création du chèque ; L’exception tenant à l’absence de consentement du tireur : la nullité de l’engagement du tireur qui repose sur la fausse signature d’un chèque égaré, volé ou détourné, est opposable au porteur de bonne foi. → Exemples Est incapable d’émettre des chèques le tireur dessaisi du droit de disposer de ses biens en raison de sa mise en liquidation judiciaire (Com. 3 nov. 2010, no 09-15.546). Tant qu’un majeur n’est pas l’objet d’une mesure de protection limitant sa capacité, aucune opposition au paiement d’un chèque émis par lui ne peut être faite (Com. 21 nov. 1972). Un chèque peut être annulé pour insanité mentale du tireur (CA, Dijon, 31 mars 1998). À NOTER – Lien avec le droit commercial Le chèque n’est pas un acte de commerce par la forme (à la différence, par exemple de la lettre de change). Partant, si la créance payée est commerciale, l’émission du chèque est un acte de commerce, qui suppose la capacité commerciale. S’agissant du tiré, il doit répondre aux conditions de l’article L. 131-4 du Code monétaire et financier : « Le chèque ne peut être tiré que sur un établissement de crédit, un prestataire de services d’investissement autre qu’une société de gestion de portefeuille, le Trésor public, la Caisse des dépôts et consignations, la Banque de France, [1re condition tenant à la personne du tiré] ayant au moment de la création du titre, des fonds à la disposition du tireur [2e condition tenant à la provision du tireur] et conformément à une convention expresse ou tacite d’après laquelle le tireur a le droit de disposer de ces fonds par chèque [condition tenant au fondement de l’obligation]. » Les prochains développements seront consacrés à cette deuxième condition. 2) Conditions relatives à la provision Notion de provision. Le Code monétaire et financier ne définit pas cette notion. Celle-ci est classiquement présentée comme la créance possédée par le tireur sur le tiré, disponible et suffisante pour couvrir l’ordre de payer du tireur. Ainsi, la provision doit être faite par le tireur (ou par celui pour le compte de qui le chèque sera tiré). Le chèque étant un instrument de paiement qui exclut toute idée de crédit, les règles qui gouvernent la provision à son égard, et qui résultent de l’article L. 131-4, alinéa 1 du Code monétaire et financier, sont sévères. La créance du tireur contre le tiré – la provision – est incorporée dans le chèque et transmise avec lui. Il en résulte que la mise en circulation du chèque le rend irrévocable. → Conséquences pratiques → Aucun événement postérieur tel que le décès, le redressement ou la liquidation judiciaires du tireur ne peut entraver le paiement du chèque. → Toutefois, en dépit de l’obligation de provision qui pèse sur le tireur, ce dernier a, en vertu de l’article L. 13135 du Code monétaire et financier, la possibilité de recourir à l’opposition en cas de perte, de vol ou d’utilisation frauduleuse du chèque, de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire du porteur. Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 10 Tous droits réservés — Reproduction interdite Conditions tenant à la provision : - La provision du chèque doit exister dès le moment où le chèque est tiré. La preuve de l’existence de la provision pèse sur le tireur seul (C. mon. fin., art. L. 131-4, al. 3) (1re condition) ; La provision doit être liquide et exigible, c’est-à-dire qu’elle doit consister en une somme d’argent dont le montant est fixé et dont le paiement n’est soumis à aucun terme ni condition (2e condition) ; La provision doit être disponible, c’est-à-dire qu’il doit avoir été convenu entre le tiré et le tireur que celui-ci pourrait disposer par chèque des fonds inscrits à son compte (3e condition). La preuve de l’existence de cette convention résulte implicitement et suffisamment du fait que le banquier a remis au tireur, son client, un carnet de formules de chèques portant le nom de ce dernier. La provision doit être suffisante (au moins égale au montant du chèque), et résulte en général d’un dépôt de fonds effectué par le tireur chez son banquier. - Point pratique : Le banquier tiré doit payer les chèques qui lui sont présentés, jusqu’à épuisement de la provision, dans l’ordre chronologique de leur présentation. Le banquier ne doit pas établir un ordre quelconque (hiérarchie) entre les chèques, lettres de change ou billets. Sanction du défaut de provision. Le refus de paiement pour insuffisance de provision entraîne l’application au titulaire du compte d’une sanction spécifique : l’interdiction d’émettre des chèques. En cas d’émission d’un chèque sans provision, le banquier doit envoyer une lettre d’injonction et déclarer l’incident de paiement auprès de la Banque de France (C. mon. fin., art. L. 131-73 et L. 131-84). Le titulaire du compte doit remettre au banquier les chéquiers en sa possession et se voit interdire l’émission de nouveaux chèques. Toutefois, le titulaire du compte recouvre la possibilité d’émettre des chèques lorsqu’il justifie avoir, à la suite de cette injonction adressée après un incident de paiement, réglé le montant du chèque impayé ou constitué une provision suffisante et disponible destinée à son règlement par les soins du tiré (C. mon. fin., art. L. 131-73, al. 2). À défaut de régularisation, le tireur se voit interdire d’émettre des chèques pendant une durée de 5 ans à compter de l’injonction de ne plus émettre de chèques (C. mon. fin., art. L. 131-78). II. La circulation du chèque Effets. L’émission d’un chèque suppose que celui-ci, une fois créé, soit mis en circulation, c’est-à-dire que le tireur s’en dessaisisse pour le remettre par hypothèse au bénéficiaire. L’émission du chèque est datée du jour où le tireur s’en dessaisit, par exemple lors de son expédition (en ce sens Com. 3 déc. 1991, no 90-13.356). La mise en circulation du chèque produit deux effets principaux : - - D’une part, le tireur devient garant du paiement du chèque (C. com. fin. art. L. 131-13, al. 1). D’ailleurs toute clause par laquelle le tireur s’exonère de cette garantie est réputée non écrite (C. com. fin. art. L. 131-13, al. 2) ; D’autre part, la propriété de la provision est transférée au bénéficiaire. Au jour de l’émission du chèque, son bénéficiaire acquiert un droit sur la provision (laquelle quitte le patrimoine du tireur pour entrer dans le sien). En conséquence, à cette date, le paiement du chèque entre dans ses mains et ne peut plus être remis en cause, ni par le décès ou l’incapacité ultérieurs du tireur, ni par l’ouverture d’une procédure collective l’encontre du tireur (Com. 18 déc. 1990, no 89-12.532). Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 11 Tous droits réservés — Reproduction interdite Schéma explicatif — émission et circulation du chèque. Différents modes de transmission. Les règles de circulation du chèque sont calquées sur celles de la lettre de change (voir infra). Toutefois, en pratique, elles ne présentent qu’un intérêt limité, la plupart des chèques n’étant transmissibles qu’entre banquiers et organismes assimilés. Le mode de transmission du chèque dépend de la forme qui lui a été donnée : • • • S’il s’agit d’un chèque nominatif, à personne dénommée, qui contient la clause « non à ordre », il ne peut se transmettre que dans les formes et avec les effets d’une cession de créance ordinaire, conformément aux articles 1689 et suivants du Code civil ; S’il s’agit d’un chèque nominatif, avec la mention « à ordre », il est transmissible par la voie de l’endossement, comme les lettres de change et les billets à ordre. Les formules de chèques proposées au client sont des chèques à ordre, mais endossables seulement entre certains organismes visés par la loi. Le plus souvent, l’endossement est fait au profit d’un tiers (bien qu’il puisse être fait au profit du tireur). L’endossement a pour effet de transmettre à l’endossataire tous les droits qui résultent du chèque. Il lui transmet notamment la propriété de la provision (C. mon. fin., art. L. 131-20) ; S’il s’agit d’un chèque au porteur (cas le plus fréquent en pratique), il se transmet de la main à la main, par simple tradition ; autrement dit, la remise du titre suffit à lui donner tous les droits d’un détenteur régulier. Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 12 Tous droits réservés — Reproduction interdite III. Le paiement du chèque Annonce de plan. Le paiement du chèque est encadré en ce qui concerne ses règles de présentation (A), l’opposition au paiement (B) ou encore l’impayé (C). A. La présentation du chèque au paiement Remise du chèque. Les interrogations liées à la détermination du moment de la remise ne se rencontrent guère lorsqu’elle est faite directement. Dans ce cas, la preuve de la remise incombera classiquement au débiteur. La question est plus délicate lorsque le chèque a été envoyé à son bénéficiaire par courrier postal. La Cour de cassation retient que la remise du chèque correspond à la date de sa réception (Soc. 9 nov. 1976, no 75-12.701). Toutefois, cette solution connaît une exception en matière de dettes fiscales. Dans cette hypothèse, c’est la date de l’expédition qui fait foi (CE, 25 nov. 1968, no 71227). Payable à vue. Le chèque est, de par sa nature même, payable à vue, c’est-à-dire à première présentation, sans préavis (C. mon. fin., art. L. 131-31). Toute mention contraire est réputée non écrite. Le chèque peut donc être présenté au paiement aussitôt après son émission. Modes de paiement. Le chèque peut être payé en numéraire ou encore par remise d’un autre chèque. Délai de présentation. Selon l’article L. 131-32 du Code monétaire et financier, un chèque émis et payable en France métropolitaine doit être présenté au paiement dans le délai de huit jours (si le chèque est émis en dehors de la France métropolitaine, mais payable en métropole, le délai est de vingt jours pour une émission en Europe et soixante-dix jours hors Europe). La date d’émission n’est pas comprise dans ce délai. Ce délai de huit jours présente une grande importance pour les chèques certifiés, dont la provision est bloquée pendant ce délai. À NOTER Le délai de présentation ne doit pas être confondu avec le délai de prescription de l’action du porteur du chèque. Ainsi, il faut différencier : - Le délai de présentation : 8 jours, s’il est émis et payable en France métropolitaine ; - Le délai de prescription : un an (C. mon. fin. art. L. 131-59). En application de l’article R. 131-3 du Code monétaire et financier, les délais légaux concernant la présentation des chèques ne comprennent pas le jour qui leur sert de point de départ. L’article R. 131-4 complète cette solution en précisant que la présentation ne peut être faite qu’un jour ouvrable. Enfin, lorsque le dernier jour du délai fixé pour la présentation est un jour férié légal, ce délai est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable qui en suit l’expiration. Cependant, les tirés ne peuvent refuser le paiement si leurs établissements sont ouverts ces jours-là. Lorsque la présentation du chèque dans les délais précités a été empêchée « par un obstacle insurmontable » (par exemple, par un cas de force majeure), le délai doit être prolongé (C. mon. fin. art. L. 131-55). Pour bénéficier de cette prolongation, le porteur est tenu de donner sans retard, c’est-à-dire dès qu’il en a connaissance, avis du cas de force majeure à son endosseur et en faire mention sur le chèque ou sur une allonge avec date et signature. L’endosseur doit, à son tour, dans les délais fixés pour l’exercice de ses recours, en donner avis à son propre endosseur. Les chaînes des endossements sont, ainsi, remontées jusqu’au tireur. La présentation du chèque en dehors de ces délais n’en altère pas la validité, mais entraîne les conséquences suivantes : - Elle fait disparaître le blocage de la provision résultant de la certification du chèque par le tiré ; Elle entraîne la perte des recours cambiaires contre les signataires du chèque. Toutefois, ces effets doivent être relativisés, dès lors que le tireur reste tenu de l’obligation légale de laisser la provision voulue jusqu’à l’expiration du délai de prescription. Partant, le tiré sera donc tenu de payer le porteur Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 13 Tous droits réservés — Reproduction interdite du chèque, même après l’expiration du délai de présentation, du moment que l’action du porteur n’est pas prescrite. En outre, le porteur n’est nullement fautif lorsqu’il ne respecte pas le délai de présentation. Il lui est cependant conseillé de présenter le chèque rapidement au paiement, afin que les fonds disponibles ne s’amenuisent pas. En effet, le tiré paiera jusqu’à épuisement de ces derniers par les présentations successives de chèques, qui seront honorés par ordre chronologique. Mode de paiement. Le paiement doit être fait en monnaie ayant cours légal. En pratique, le paiement s’effectue par un jeu d’écritures. Le plus souvent, il s’agit pour le tiré de porter le montant du chèque au crédit du compte du porteur. La remise d’un chèque ne vaut pas paiement et la dette subsiste tant que le chèque n’a pas été payé par le tiré (Civ. 2, 12 nov. 2020, no 19-11.149 ; Cass. 3e civ., 1er juill. 2009, no 07-19.446). Partant, la remise d’un chèque ne valant paiement que sous condition de son encaissement, il appartient au tireur, qui se prétend libéré, de justifier de cet encaissement. Paiement partiel. Lorsque la provision est inférieure au montant du chèque, le paiement de celui-ci s’effectue jusqu’à concurrence de cette provision. Le porteur ne peut refuser le paiement partiel qui lui est offert, et peut l’exiger si le tiré ne le lui offre pas (C. mon. fin., art. L. 131-37). En cas de paiement partiel, le tiré peut exiger que mention de ce paiement partiel soit faite sur le chèque et qu’une quittance lui en soit donnée. Toutefois, par exception, selon l’article L. 131-82 du Code monétaire et financier, le tiré doit payer, « nonobstant l’absence, l’insuffisance ou l’indisponibilité de provision », tout chèque établi sur une formule délivrée par lui d’un montant égal ou inférieur à 15 euros, le titulaire du compte et le tiré étant en ce cas réputés légalement avoir conclu lors de la délivrance de la formule une convention portant ouverture de crédit irrévocable. On notera que cette obligation pesant sur le tiré n’est pas soumise à la prescription de l’article L. 131-59 du code (prescription de l’action cambiaire, voir infra). Elle prend ainsi fin un mois après la date d’émission du chèque. Par exception à l’exception, le tiré n’est pas tenu de payer le chèque d’un montant égal ou inférieur à 15 euros (C. mon. fin. art. L. 131-82, al. 1 et 2) : • • Si le chèque est présenté un mois après sa date d’émission, sans pour autant qu’il soit prescrit (1re exception) ; Lorsque le refus de payer est justifié par une autre cause que le défaut de provision, par exemple, l’indisponibilité de la provision (2e exception). Il en est ainsi par l’effet de la certification du chèque, laquelle entraîne, jusqu’à l’expiration du délai de présentation, blocage et donc indisponibilité de la provision au profit du porteur. Ces règles sont d’ordre public (C. mon. fin. art. L. 131-82, al. 3). Actions et prescription. Les actions en recours du porteur contre les endosseurs, le tireur et les autres obligés se prescrivent par six mois à partir de l’expiration du délai de présentation. Les actions en recours des divers obligés au paiement d’un chèque les uns contre les autres se prescrivent par six mois, mais à partir du jour où l’obligé a remboursé le chèque ou du jour où il a été lui-même actionné. L’action du porteur contre le tiré se prescrit par un an à partir de l’expiration du délai de présentation. Toutefois, il subsiste une action contre le tireur qui n’a pas fait provision ou les autres obligés qui se seraient enrichis injustement (C. mon. fin., art. L. 131-59). B. Opposition au paiement Notion. L’opposition au paiement se définit comme une mesure conservatoire immobilisant la provision entre les mains du banquier tiré. Il s’agit, plus concrètement, de l’ordre donné au tiré par le tireur (voire par le porteur), de ne pas payer un chèque présenté à l’encaissement. Ainsi, l’opposition au paiement constitue une dérogation à l’irrévocabilité de l’ordre de payer. C’est pourquoi l’opposition doit demeurer exceptionnelle et se trouve strictement encadrée. Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 14 Tous droits réservés — Reproduction interdite Pour être valable, l’opposition est soumise aux exigences suivantes : - - - Motifs de l’opposition : en application de l’article L. 131-35 du Code monétaire et financier, il n’est admis d’opposition au paiement par chèque qu’en cas « de perte, de vol ou d’utilisation frauduleuse du chèque, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires du porteur ». La notion d’« utilisation frauduleuse » du chèque est caractérisée tant en cas de falsification ou de contrefaçon de celui-ci, qu’en cas de violation de la loi pénale pour son obtention ou son utilisation. La liste est limitative et, par conséquent, aucun autre motif ne saurait justifier une opposition. Partant, le tireur qui fait opposition pour un motif illicite est ainsi assimilé à celui qui n’a pas fourni de provision. Il encourt à ce titre les sanctions de l’article L. 163-2, relatif au délit de blocage illicite de la provision, c’est-à-dire un emprisonnement de cinq ans et une amende de 375 000 euros ; Exigence d’un écrit : l’opposition doit être confirmée immédiatement par écrit. Il en résulte que, si le tireur ne fait pas opposition par écrit ou s’il ne la confirme pas de la sorte immédiatement, celle-ci est caduque ; Information par le banquier : le banquier tiré doit informer le tireur des sanctions encourues en cas d’opposition fondée sur une cause autre que celles listées limitativement (cf infra). Lorsque l’opposition est valablement sollicitée, le banquier tiré doit s’abstenir de payer le chèque. À défaut, il verra sa responsabilité civile engagée si le paiement réalisé a été préjudiciable au tireur. La Cour de cassation a même eu l’occasion de préciser que le banquier ayant fautivement payé un chèque faisant l’objet d’une opposition ne peut pas exercer l’action de in rem verso contre le tireur de ce même chèque (Civ. 1re, 19 mars 2015, no 14-10.075). Responsabilité de la banque. S’il incombe à l’émetteur d’un chèque d’établir que celui-ci a été falsifié, il revient à la banque tirée, dont la responsabilité est recherchée pour avoir manqué à son obligation de vigilance et qui ne peut pas représenter l’original de ce chèque, de prouver qu’il n’était pas affecté d’une anomalie apparente (Com., 9 nov. 2022, no 20-20.031, juris. sous art. art. L. 131-38 CMF, en l’espèce, un nom a été substitué par grattage à celui du bénéficiaire initial sur le chèque litigieux et la photocopie du chèque produite par la banque est en noir et blanc et de mauvaise qualité ; cette photocopie ne permettant pas de constater l’absence d’anomalie matérielle, la Cour de cassation retient la responsabilité de la banque tirée). C. Impayé Formalités consécutives au non-paiement du chèque : obligation d’établir un protêt. Le porteur doit faire établir un protêt (sauf hypothèse d’une « clause de retour sans frais »1), pour constater officiellement le nonpaiement du chèque et pour se réserver le droit d’exercer ultérieurement les recours. Le protêt doit être dressé par un notaire ou un huissier, selon les dispositions des articles L. 131-61, L. 131-62 et L. 131-64 du Code monétaire et financier. Le protêt doit être dressé même si le compte est frappé d’opposition et si le chèque est sans provision. Nul acte de la part du porteur du chèque ne peut suppléer l’acte de protêt, sauf l’acte dressé en cas de perte ou de vol du chèque (C. mon. fin. art. L 131-63 et L 131-40). Information préalable du tireur. L’article L. 131-73, alinéa 1er, impose aux établissements de crédit souhaitant refuser le paiement d’un chèque sans provision d’en informer préalablement le tireur. L’article énonce ainsi : « Le banquier tiré peut, après avoir informé par tout moyen approprié mis à disposition par lui le titulaire du compte des conséquences du défaut de provision, refuser le paiement d’un chèque pour défaut de provision suffisante. Il doit enjoindre au titulaire du compte de restituer à tous les banquiers dont il est le client les formules en sa possession et en celle de ses mandataires et de ne plus émettre des chèques autres que ceux qui permettent exclusivement le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés. » Cette obligation a pour objectif de laisser une ultime chance au tireur susceptible de voir son chèque rejeté et d’en supporter les conséquences. En définitive, deux possibilités s’offrent à lui : soit, il constitue ou complète la provision soit, s’il reste passif, il sera interdit bancaire. 1 La clause de « retour sans frais » dispense le porteur, pour exercer ses recours, de faire établir un protêt. Il est important d’observer que cette clause ne dispense pas le porteur de la présentation du chèque dans le délai prescrit. Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 15 Tous droits réservés — Reproduction interdite En effet, ce n’est ainsi que s’il refuse le paiement pour insuffisance de la provision, et uniquement pour cette raison, que le tiré doit obligatoirement mettre en œuvre l’interdiction bancaire. Cette interdiction, laquelle est déclenchée par une lettre d’injonction, produit les effets suivants : - - - Le tireur devra restituer les formules (chéquiers) en sa possession (et celles de ses mandataires) à tous les banquiers dont il est client ; De nouvelles formules ne pourront pas lui être délivrées tant qu’il n’aura pas régularisé cet incident (c’est-à-dire tant qu’il n’aura pas procédé au paiement). Le tireur perd ainsi le droit d’émettre des chèques, tous comptes confondus ; Des frais d’incidents de paiement sont le plus souvent demandés par le tiré en cas de chèque sans provision (pour le cas d’un chèque rejeté dont le paiement était inférieur ou égal à 50 euros, ces frais ne peuvent dépasser un montant de 30 euros ; ce seuil est de 50 euros pour les chèques d’un montant supérieur, voir D. 131-25 C. mon. fin.) ; Déclaration au fichier central des chèques : ce fichier recense toute personne frappée d’une interdiction bancaire. Toutefois, les règles de l’interdit bancaire connaissent quelques nuances en application du droit des procédures collectives (L. 131-73, dans le cas d’un chèque émis avant le jugement d’ouverture de la procédure, le tribunal peut prononcer la suspension des effets de l’interdiction bancaire) ou encore en application du droit du surendettement (l’article L. 733-17 c. consommation prévoit que les dettes effacées en application d’une procédure de rétablissement personnel valent régularisation des incidents de paiements). Recours du porteur. Le porteur peut réclamer à celui contre lequel il exerce son recours le montant du chèque non payé, les intérêts à partir du jour de la présentation dus au taux légal pour les chèques émis et payables en France, les frais de protêt, ceux des avis donnés, ainsi que les autres frais (C. mon. fin. art. L. 131-52). À NOTER Le taux d’intérêt légal est un taux d’intérêt fixé par la loi et ayant vocation à s’appliquer dans un certain nombre de cas, et notamment en cas de retard dans l’exécution d’un paiement. Jusqu’à 2015, ce taux légal était unique. L’ordonnance n o 2014-947 du 20 août 2014 a fait évoluer les règles de calcul du taux d’intérêt légal (entrée en vigueur le 1 er janvier 2015) : désormais, le taux d’intérêt légal se décompose en deux taux, le premier applicable aux créances des particuliers (« créancier n’agissant pas pour des besoins professionnels ») et un second applicable dans les autres cas. Ce premier taux est nettement plus élevé. Les taux de l’intérêt légal applicables au 1er semestre 2023 ont été fixés par un arrêté publié au Journal officiel du 29 décembre 2022. Taux d’intérêt légal Année 2023 Lorsque le créancier est un particulier Lorsque le créancier est professionnel er 4,47 % 2,06 % e 3,15 % 0,77 % er 3,13 % 0,76 % 1 semestre 2 semestre 2022 1 semestre Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 16 Tous droits réservés — Reproduction interdite Notion de créancier n’agissant pas pour des besoins professionnels. Lorsqu’un créancier réclame à son débiteur défaillant un taux d’intérêt légal, le taux est plus élevé lorsque le créancier est une personne physique n’agissant pas pour des besoins professionnels (par comparaison aux autres cas ; C. mon. fin., art. L. 313-2). La Cour de cassation définit pour la première fois ce qu’il faut entendre par « créancier n’agissant pas pour des besoins professionnels » au sens de l’article L. 313-2 CMF (Com., 9 mars 2022, no 20-11.845). Pour la cour, il convient de rechercher si la créance garantie est née dans l’exercice de sa profession par le créancier ou se trouve en rapport direct avec l’une de ses activités professionnelles, même si celle-ci n’est pas principale. En l’espèce, la Cour de cassation applique le taux le plus élevé (créancier n’agissant pas pour des besoins professionnels), en cas de nonpaiement du prix de cession de parts d’une société commerciale même si le cédant est le gérant de la société. Il nous semble que cette solution vaut pour tous dirigeants ou associés de sociétés civiles ou commerciales, sauf s’ils sont associés en nom (les associés en nom ont en effet la qualité de commerçant en vertu de la loi et sont réputés exercer une activité commerciale). Prescription des actions. Les actions cambiaires – qui ont pour objet de procurer au porteur le paiement du chèque – sont soumises à une prescription spéciale, dite aussi cambiaire, dans les termes suivants (C. mon. fin. art. L. 131-59, al. 1 et 2) : - L’action du porteur contre les endosseurs, le tireur et les avalistes se prescrit par six mois à partir de l’expiration du délai de présentation ; L’action d’un signataire (qui a payé) contre les autres se prescrit par six mois à partir du jour où le signataire a remboursé le chèque ou du jour où il a été lui-même actionné. Échappe à la prescription cambiaire ci-dessus, l’action du porteur (C. mon. fin. art. L 131-59, al. 3) : - - Contre le tireur qui n’a pas fait provision. En effet, ce recours demeure fondé sur le droit du chèque et doit, dans le silence de la loi, être soumis au délai de prescription de droit commun à compter de l’expiration du délai de présentation, l’action en paiement du porteur contre le tiré se prescrit par un an (C. mon. fin. art. L 131-59, al. 2) ; Contre les signataires qui se seraient enrichis injustement. Il en est ainsi, par exemple, lorsqu’un endosseur a transmis un chèque qu’il savait postdaté. À NOTER Le porteur peut aussi agir contre le tireur débiteur de la créance que le chèque avait pour objet de payer, peu important qu’il ait laissé se perdre les recours cambiaires, cette perte n’ayant d’effet qu’envers le bénéficiaire du chèque (Com. 12 juill. 1993). En effet, en acquérant la propriété de la provision, le porteur est devenu cessionnaire de cette créance dans les termes du droit commun ; en conséquence, cette action est soumise à la prescription de droit commun de ladite créance. SECTION 2 — AUTRES INSTRUMENTS DE PAIEMENT Annonce de plan. La carte bancaire et le virement ne sont plus spécifiquement encadrés par le Code monétaire et financier. En effet, les règles qui leur sont consacrées ont été absorbées par le droit régissant plus largement « l’opération de paiement », ainsi définie : « une opération de paiement est une action consistant à verser, transférer ou retirer des fonds, indépendamment de toute obligation sous-jacente entre le payeur et le bénéficiaire, initiée par le payeur [cas du virement], ou pour son compte, ou par le bénéficiaire [cas du prélèvement]. » (C. mon. fin. art. L. 133-3). Ces règles sont issues d’un régime commun des services de paiement tel qu’énoncé par les ordonnances du 15 juillet 2009 et du 9 août 2017. Ce régime commun concerne en particulier le consentement à l’opération, l’ordre de paiement et son irrévocabilité de principe, les délais et les refus d’exécution de l’opération de paiement, les sanctions en cas de mauvaise exécution ainsi que le sort des réclamations en cas de contestation sur le montant de l’opération ou en cas d’usurpation et d’utilisation frauduleuse. L’ensemble de ces règles, désormais codifiées aux articles L. 133-1 et suivants du Code monétaire et financier, constitue donc la nouvelle base juridique applicable « autres instruments de paiement », à savoir le virement, la carte bancaire ou encore le prélèvement. Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 17 Tous droits réservés — Reproduction interdite Exclusion des instruments de paiement de faibles montants. Le droit commun inscrit aux articles L. 133-3 et suivants, n’est toutefois pas applicable aux instruments de paiement d’un faible montant (C. mon. fin. art. L. 13328). Un instrument de paiement présentera cette caractéristique lorsque la convention de compte de dépôt ou le contrat-cadre de services de paiement relatif à cet instrument précisera qu’il permet de réaliser exclusivement des opérations de paiement ne dépassant pas unitairement 30 euros, ou qu’il a une limite de dépenses de 150 euros ou qu’il ne permet pas de stocker plus de 150 euros. Ainsi, à l’égard de ces instruments et sous réserve des seuils précités, le prestataire de services de paiement sera en droit de convenir avec le payeur d’un certain nombre de dérogations expressément prévues. Les prochains développements seront consacrés à ce droit commun des autres instruments de paiement : la réalisation de l’opération de paiement (I), la contestation de l’opération de paiement (II) ainsi que les infractions liées à ces instruments de paiement (III). Avant cela, une rapide présentation de ces instruments de paiement s’impose. Compte de paiement. Il s’agit, conformément à l’article L. 314-1, I, d’« un compte détenu au nom d’une ou de plusieurs personnes, utilisé aux fins de l’exécution d’opérations de paiement ». De telles opérations de paiement peuvent être initiées de trois manières (C. mon. fin. art. L. 133-3) : - - - Soit « par le payeur, qui donne un ordre de paiement à son prestataire de services de paiement » ; c’est le cas avec le virement par lequel le payeur donne directement à sa banque l’ordre de payer un bénéficiaire ; Soit « par le payeur, qui donne un ordre de paiement par l’intermédiaire du bénéficiaire qui, après avoir recueilli l’ordre de paiement du payeur, le transmet au prestataire de services de paiement du payeur, le cas échéant, par l’intermédiaire de son propre prestataire de services de paiement » ; telle est l’hypothèse de la carte de paiement par laquelle le payeur donne indirectement un ordre de paiement à sa propre banque par l’intermédiaire d’un bénéficiaire-commerçant (en tapant son code sur le terminal de paiement ou apposant sa carte pour paiement sans contact) ; Soit « par le bénéficiaire, qui donne un ordre de paiement au prestataire de services de paiement du payeur, fondé sur le consentement donné par le payeur au bénéficiaire et, le cas échéant, par l’intermédiaire de son propre prestataire de services de paiement » ; telle est la configuration du prélèvement, c’est-à-dire de l’opération par laquelle le bénéficiaire, préalablement autorisé par le payeur à être donneur d’ordre, donne lui-même un ordre de paiement au prestataire de paiement du payeur et ce, par l’intermédiaire de sa propre banque. Droit au compte. Le décret no 2022-347 du 11 mars 2022, entré en vigueur le 14 juin 2022, modifie la procédure de droit au compte afin de faciliter ainsi l’accès aux comptes en banque. Le droit au compte est applicable sous les conditions suivantes : - - - Droit ouvert à toute personne physique ou morale domiciliée en France, à tout Français résidant hors de France ou à toute personne physique (n’agissant pas pour des besoins professionnels) résidant sur le territoire d’un autre État membre de l’Union européenne (1re condition) ; Dépourvue d’un compte de dépôt en France (2e condition). Le décret précise que les personnes disposant d’un unique compte de dépôt dont la convention est résiliée par l’établissement de crédit teneur du compte sont considérées comme étant dépourvues d’un compte de dépôt, au sens de l’article L. 312-1 précité, à compter de la date de réception de la décision de résiliation (C. mon. fin., art. R. 312-6 nouveau) ; Se voit opposer un refus d’ouverture d’un compte de dépôt par un établissement de crédit (3e condition). Le silence gardé par l’établissement pendant 15 jours à compter de la date de réception (ou du dépôt en main propre par le demandeur, au guichet) d’une demande d’ouverture de compte sera considéré comme un refus d’ouvrir un compte (C. mon. fin., art. R. 312-6-1 nouveau). Le droit au compte permet de saisir la Banque de France afin que celle-ci désigne un autre établissement tenu de lui ouvrir gratuitement un compte de dépôt assorti de services bancaires de base (C. mon. fin., art. L. 312-1, I). L’établissement désigné devra notifier au demandeur, dans les 3 jours ouvrés à compter de la réception de la décision de désignation, une liste des pièces nécessaires à l’ouverture du compte (C. mon. fin., art. R. 312-7 nouveau). Le demandeur dispose alors d’un délai de 6 mois pour engager les démarches d’ouverture du compte (C. mon. fin., art. R. 312-7-1 nouveau). Objectif Barreau — Opérations bancaires et financières 18 Tous droits réservés — Reproduction interdite Notion de la carte de paiement. La carte de paiement est une carte émise par un établissement de crédit ou assimilé qui permet d’effectuer des paiements chez un commerçant ou à distance et des retraits d’espèces dans les automates. La carte de paiement peut être nationale ou internationale. Il existe plusieurs types de cartes de paiement. Elles peuvent être classées selon les émetteurs : - Cartes de crédit proposées par des établissements spécialisés (établissements de crédit) ; Cartes de crédit proposées par les entreprises commerciales (type « cartes des grands magasins »). Utilités de la carte de paiement. Il peut s’agir de simples cartes « de retrait », lesquelles – comme leur nom l’indique – permettent seulement à leur titulaire de retirer des espèces au guichet d’une banque ou auprès de distributeurs automatiques de billets. Il peut également s’agir de cartes « de paiement », destinées non seulement à retirer des fonds, mais aussi à effectuer des paiements. Certaines de ces cartes sont, en outre, « à débit différé », c’est-à-dire qu’elles offrent des facilités de remboursement, puisque le débit n’aura lieu qu’à un moment précis, généralement en fin de mois. Enfin, il existe aussi des cartes dites « de crédit » qui permettent à leurs titulaires, en plus des possibilités de retraits et de paiements, de bénéficier d’un découvert autorisé. Il s’agit, généralement, d’un crédit renouvelable. Notion de virement. Techniquement, le virement est l’opération par laquelle un transfert de fonds ou de toutes autres valeurs inscrites en compte est effectué par la seule inscription d’une écriture au débit d’un compte et de l’écriture corrélative au crédit d’un autre compte. Le virement repose sur un double mandat : celui conféré par un donneur d’ordre à son banquier de transférer les fonds, objets du virement et celui donné par le bénéficiaire

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