Cours : Droit Commercial et des Sociétés (2019/2020) PDF

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Université Hassan II Faculté des Sciences Juridiques Économiques et Sociales, Ain Sebaâ

2020

BEL-AMIN SAMIR

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commercial law business law company law economic

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Ce document est un cours sur le droit commercial et des sociétés, destiné aux étudiants de sciences économiques et gestion du 4ème semestre de l'Université Hassan II. Le cours couvre les originalités, l'objet et les différentes sources du droit commercial marocain, ainsi que les techniques et solutions spécifiques utilisées dans ce domaine.

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UNIVERSITE HASSAN II FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ECONOMIQUES ET SOCIALES, AIN SBBA Cours : Droit Commercial et des Sociétés Sciences Economiques et Gestion. Semestre 4 2019/2020 BEL-AMIN SAMIR...

UNIVERSITE HASSAN II FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ECONOMIQUES ET SOCIALES, AIN SBBA Cours : Droit Commercial et des Sociétés Sciences Economiques et Gestion. Semestre 4 2019/2020 BEL-AMIN SAMIR Enseignant chercheur à la FSJES Ain Sbaa 1 Avant-propos Cette ébauche de droit commercial constitue uniquement une contribution en la matière. Elle demeure insuffisante pour l’assimilation de l’intégralité du cours. Les étudiants sont donc invités à approfondir leurs connaissances par la consultation des ouvrages spécialisés en la discipline. De surplus, ce document n’englobe pas le cours entier, plusieurs points n’y figurent pas. La présence et la prise de note étant obligatoires, elles demeurent la condition la plus importante pour toute réussite universitaire. Bonne chance. 2 Introduction Le droit commercial est une branche de droit privé, qui a un double objet en tant qu’il s’intéresse à la fois aux personnes et à l’activité de celles-ci. Le code de commerce s’ouvre, ainsi, en déclarant qu’il régit « les actes de commerce et les commerçants », et définit les commerçants en affirmant que cette qualité s’acquiert par l’exercice habituel ou professionnel d’activités appelées actes de commerce. Droit d’exception par rapport au droit civil qui est le droit commun des rapports privés, le droit commercial, appelé également droit des affaires, présente des spécificités qui lui sont propres (Première partie). Avec le développement du commerce, la personne du commerçant qui était le pivot de l’activité commerciale a commencé à perdre du terrain au profit de l’entreprise et de ses éléments. De sorte que l’entreprise va se détacher de plus en plus de la personne du commerçant et prendre son autonomie. C’est ainsi que l’entreprise en tant qu’entité indépendante du commerçant va acquérir une valeur économique lui permettant de faire l’objet de transactions. Cette entité distincte est appelée fonds de commerce (Deuxième partie). 3 Première partie : Originalités et objet du droit commercial Le droit commercial présente certaines spécificités par rapport au droit civil (chapitre1). Ces particularités tirent leur fondement de l’objet même du droit commercial (chapitre 2). Chapitre 1 : Originalités du droit commercial Les originalités du droit commercial sont très nombreuses. Elles peuvent être analysées en termes de ses sources (section 1), ses techniques (section 2) et ses solutions (section 3). Section 1 : Les sources du droit commercial L’article 2 du code de commerce dispose : « Il est statué en matière commerciale conformément aux lois, coutumes et usages du commerce, ou au droit civil dans la mesure où il ne contredit pas les principes fondamentaux du droit commercial ». Il en découle que les sources du droit commercial sont au nombre de trois : la législation commerciale (sous-section1), les usages commerciaux (sous-section 2) et le droit civil (sous-section 3)1. Sous-section 1 : la législation commerciale Il faut distinguer à cet égard, la législation d'origine interne, c'est-à-dire les textes de lois (§1) et la législation d'origine internationale c'est-à-dire les conventions et traités internationaux (§2). §1 : Les sources du droit interne Cette législation comporte un texte général (A) et des textes spéciaux (B). 1 La jurisprudence et la doctrine demeurent par ailleurs des sources indirectes du droit commercial. 4 A- Le texte général Il s’agit du code du commerce qui résulte de la loi N° 15-95 promulguée par le dahir du 1 août 1996. Il contient 736 articles répartis en cinq livres. Le livre 1 traite du statut juridique du commerçant, de la capacité commerciale et des obligations du commerçant. Le livre 2 : le fonds de commerce. Le livre 3 : les effets de commerce : la lettre de change, le billet à ordre, le chèque. Le livre 4 : les contrats commerciaux en particulier, l'agence commerciale, le leasing, les contrats bancaires. Livre 5 : les difficultés de l'entreprise. Ce livre traite des procédures de prévention interne et externe, la procédure de sauvegarde et des procédures de traitement à savoir, le redressement judiciaire et la liquidation judiciaire. B- Les textes spéciaux : Il s’agit entre autres des textes suivants : - Le code de commerce maritime : qui résulte du dahir du 31 mars 1919. Ce code comprend 391 articles divisés en trois livres. Le livre I porte sur le régime de la navigation maritime. Le livre 2 traite des navires. Le livre 3 porte sur les transports maritimes, les risques de mer et les assurances maritimes. - le décret du 10 juillet 1962 sur la navigation aérienne : ce texte contient 251 articles et traite en particulier du transport aérien et de la responsabilité du transporteur. - La loi n° 17-95 relative aux sociétés anonymes promulguée par le dahir du 30 août 1996. - la loi n° 05-96 relative aux sociétés commerciales autres que la société anonyme à savoir, la société en nom collectif, la société en commandite simple, la société en commandite par actions, la société en participation, la société à responsabilité limitée. Cette loi a été promulguée par le dahir du 13 février 1997. 5 - la loi N° 17-97 relative à la propriété industrielle, promulguée par le dahir du 15 février 2002. Ce texte protège en particulier les brevets d'invention, les dessins et modèles, les marques. -la loi bancaire n°103.12 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés de 2015. - la loi n° 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence, promulguée par le dahir de 2014. Il ne faut pas oublier parmi les textes spéciaux, les lois fiscales qui ont des incidences sur les opérations commerciales. Ces incidences figurent au premier plan des préoccupations des commerçants. Le système fiscal marocain repose sur trois textes qui réglementent successivement l'impôt sur le revenu (I.R) payé par la personne physique, ensuite l'impôt sur les sociétés (I.S) payé par les personnes morales, la taxe sur la valeur ajoutée (T.V.A), (pas de distinction entre personnes physiques et personnes morales). §2 : Les sources du droit international Il s'agit des conventions bilatérales ou multilatérales ratifiées par le Maroc. Il en est ainsi entre autres, de la convention de Varsovie de 1929 relatif au transport aérien, de la convention de Vienne de 1980 sur la vente internationale de marchandises et de la convention de Washington de 1958 relatif à la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales internationales. Sous-section 2 : Les usages commerciaux Les usages commerciaux sont constitués par l’ensemble des comportements des agents économiques dans leurs relations commerciales et qui ont acquis, par leur pratique constante et leur généralisation dans le temps et dans l'espace, force de loi. Les usages ont une place importante parmi les sources du droit commercial. D’ailleurs dans bien des cas, les usages ont été repris dans des textes de loi. 6 A côté des usages locaux, la pratique commerciale internationale a unifié en les codifiant, les usages applicables à certaines branches du droit commercial. Cette codification a abouti à la création du Lex Mercatoria : loi des marchands. Et c'est ainsi, qu'on a vu apparaître des contrats type, des modèles de contrats ou des règlements établis sur la base des usages dominants dans une matière déterminée. Sous-section 3 : Le droit civil Les règles du droit civil sont inclues dans le D.O.C. Ce dernier constitue une source du droit commercial à deux niveaux. Le premier demeure dans le fait que le droit commun applicable en matière commerciale, chaque fois que la législation commerciale ne réglemente pas expressément un point particulier. Lorsqu'on se trouve en présence d'une lacune du droit commercial, il faut avoir recours aux règles du droit civil. Le second réside dans le fait que le D.O.C contient des dispositions du droit commercial tel que, les règles applicables aux contrats de société, les règles concernant la preuve de la solidarité. Section 2 : Les techniques du droit commercial Les techniques utilisées par le droit commercial présentent une certaine spécificité justifiée par le besoin de rapidité et de sécurité exigé par le monde des affaires. Ainsi le droit commercial préconise la liberté de la preuve (sous-section 1), un délai de prescription écourté (sous-section2) ainsi que le recours au crédit (sous- section3). Sous-section 1 : la liberté de la preuve La liberté des preuves est nécessaire pour faciliter les transactions commerciales. En matière civile, le législateur marocain exige une preuve littérale, c’est-à-dire écrite dès que le montant de la transaction dépasse 10000 DH. Or, en 7 matière commerciale, l’article 334 du code de commerce dispose que « la preuve est libre », sauf si la loi ou la convention l’exige. Cette différence s’explique par le fait que le droit civil est plus attaché à la conservation du patrimoine ce qui explique pourquoi c'est un droit formaliste. En revanche, les opérations commerciales sont motivées par la recherche du profit. Ce profit se réalise à travers la spéculation, c'est-à-dire la répétition d'opérations d'achat et de vente qui se succèdent à un rythme rapide. Sous-section 2 : Délai de prescription écourté Des délais trop longs, laisseraient les commerçants dans l’incertitude et porteraient atteinte à leurs intérêts. C’est pour cette raison que le législateur a raccourci la durée de la prescription commerciale. L’article 387 du DOC fixe le délai de prescription à quinze ans en matière civile ; l’article 388 du même code détermine ce délai à cinq ans en matière commerciale. De son côté le code de commerce à son article 5 vient accorder une plus large autonomie aux parties en édictant : « les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçant se prescrivent par cinq ans, sauf dispositions spéciales contraires ». Sous-section3 : le recours au crédit Le crédit est à la base de la vie des affaires. Les commerçants achètent souvent à crédit et revendent à crédit. Pour favoriser le crédit, le droit commercial impose le respect des échéances et renforce les garanties du créancier ; alors que le droit civil a plutôt tendance à limiter les prérogatives du créancier. Dès lors, le manquement d'un commerçant à ses obligations est sanctionné sévèrement. D'abord, dans le milieu professionnel le commerçant qui ne tient pas sa parole est mal vu, il fait souvent l'objet d'un boycott de la part des autres commerçants. 8 Ensuite, la loi considère que lorsque deux commerçants s'engagent pour la même obligation, ils sont solidaires de l'exécution de cette obligation. Par l'effet de cette solidarité, le créancier est assuré de récupérer la totalité de sa créance par l'un ou l'autre des codébiteurs. L’article 165 du DOC prévoit que la solidarité est présumée en matière commerciale. C’est ce qui a été confirmé par le code de commerce à l’article 335. Or en matière civile la solidarité ne se présume pas. Section 3 : Les solutions du droit commercial Le droit commercial s’écarte des pratiques du droit civil pour régler les différends commerciaux. C’est ainsi que les affaires commerciales se voient juger devant des juridictions spécialisées à savoir les juridictions commerciales comme elles peuvent être jugées par voie arbitrale. Deuxième chapitre : objet du Droit commercial Le droit commercial est la branche du droit privé, qui réglemente les rapports juridiques qui naissent à l'occasion de l'exercice du commerce. Il s’intéresse ainsi aux actes de commerce (section 1) et aux commerçants (section 2). Section 1 : Les actes de commerce Le législateur marocain n’a donné aucune définition de l’acte de commerce. Toutefois, les actes qui sont réputés actes de commerce, sont énumérés aux articles 6 à 10 du code de commerce. L'analyse de ces dispositions, permet de classer les actes de commerce en trois catégories : les actes de commerce par nature (Sous-section1), les actes de commerce par la forme (sous-section 2) et les actes de commerce par accessoire (sous-section3). À ces trois catégories, il faut ajouter les actes mixtes, qui ont un caractère commercial pour une partie, et un caractère civil pour l'autre partie. 9 Sous-section 1 : Les actes de commerce par nature Ils sont des actes dont la répétition transforme la personne qui les accomplit en commerçant. L’article 6 du code de commerce énumère ces actes dits de commerce par nature. L’article 7 complète la liste en ajoutant les actes de commerce maritime et aérien, tels les affrètements, les assurances et les achats et reventes de navires et aéronefs. On distingue ainsi, les activités de distribution (§1), les activités de production (§2), et les activités de service (§3). §1 : Les activités de distribution Elles sont les activités d’achat pour revendre dans un but spéculatif de biens meubles corporels ou incorporels (les créances, valeurs mobilières, droit de propriété littéraire ou artistique, brevets d’invention, marques et autres droits de propriété industrielle) et également des immeubles en l’état ou après leur transformation. L’opération d’achat en vue de la revente se décompose donc en deux éléments : l'achat avec l'intention de revendre (A), et la revente qui est le but de l'achat (B). A- l'achat avec l'intention de revendre L'achat consiste à acquérir à titre onéreux, la propriété d'une chose. Pour que cet achat constitue un acte de commerce, il faut qu'il soit fait avec l'intention de revendre c'est-à-dire, que l'acheteur doit être animé au départ de l'intention de spéculation. Il en résulte, que les achats en vue de la consommation ne sont pas des actes de commerce, même si l'acheteur est amené par la suite, à revendre ce qu'il a acheté. Ce qui importe, c'est l'intention qui a présidé à l'achat. 10 B- le but de l'achat : la revente La revente a, au même titre que l'achat, un caractère commercial. L'achat doit être effectué en vue de la revente. Il n'est pas nécessaire que la revente ait eu lieu, seule compte l'intention de revendre. Il n'est pas nécessaire non plus, que l'achat précède la revente. C'est le cas, lorsqu'un commerçant prend la commande d'un client avant d'acheter lui-même la chose commandée. La revente peut se faire soit en nature, c'est-à-dire dans l'état où le vendeur a acquis la chose, soit après que la chose achetée ait été travaillée, mise en œuvre ou transformée. C'est le cas de l'achat de céréales, et la revente de la farine après mouture. Par ailleurs, la chose achetée doit être revendue à titre principal, et non comme l'accessoire à une opération civile. Il en est ainsi, des internats qui achètent de la nourriture pour les internes ; le fait de servir des repas n'est qu'un élément accessoire, à l'opération principale qui est l'éducation et la formation des élèves, qui est une opération civile. De même, le sculpteur qui achète du bois, du marbre ou du plâtre, et qui le revend sous forme de statue, ne fait pas un acte de commerce dans la mesure où, la revente porte sur une œuvre artistique et non pas sur la matière première qui n'est que le support matériel de l'œuvre. Cependant, la revente n'est commerciale que si elle a porté sur une chose achetée. Sont ainsi exclus du domaine du droit commercial : - En premier lieu : la vente par les agriculteurs du produit de leur exploitation agricole ou forestière, même s'ils font subir à leurs produits, des transformations tel que, la transformation du lait en fromage ou en beurre, la coupe des arbres pour le bois ou le charbon. 11 Mais encore faut-il que les produits transformés, proviennent en totalité ou en grande partie de l'exploitation agricole. Si les produits vendus ou transformés, ont été achetés pour être revendus, on se trouve en présence d'une opération commerciale. - En second lieu : la vente des produits de certaines industries extractives, tel que la pêche, la pisciculture (élevage de poissons), ou l'ostréiculture (élevage des crustacés). - En troisième lieu : la vente des productions intellectuelles (tableaux, livres, sculptures...). §2 : Les activités de production sont les activités industrielles ou artisanales, la recherche de l’exploitation des mines et carrières (gisement de charbon, pétrole, minerais, carrière..) ; l’imprimerie et l’édition ; l’organisation des spectacles publics ; le bâtiment et les travaux publics : ex : les entreprises de construction immobilière, construction de ponts etc. Certaines activités de production échappent à la commercialité. Ainsi, les activités agricoles ne sont pas considérées comme étant commerciales, car l’agriculteur tire sa production du sol et non de son industrie. Il ne fait pas d’achat pour la revente. Toutefois, s’il achète des animaux pour les revendre après les avoir engraissés (élevage industriel) ou transforme des produits agricoles qu’ils livrent aux consommateurs (huile, farine, beurre etc.), son activité est désormais considérée commerciale. §3 : Les activités de service Ils sont des activités où le commerçant offre à ses clients l’usage temporaire de certaines choses, ou l’exécution à leur profit de certains travaux. Ces activités de service peuvent être des activités de transport ; des activités de location de meubles ; des spectacles publics ; des activités financières ; ou des activités d’intermédiaires. Les activités dites libérales échappent au droit commercial. Selon les définitions qu’en donnent les organisations professionnelles, elles consistent en des services personnels de caractère principalement intellectuel rémunérés par des honoraires. Ce 12 sont celles qu’exercent par exemple les médecins, les chirurgiens, les dentistes, les vétérinaires, les avocats, les notaires, les huissiers, experts comptables, les architectes… Sous-section 2 : Les actes de commerce par la forme Il s’agit d’actes qui n’ont aucune influence sur le statut de la personne qui les accomplit. Ils sont toujours de nature commerciale en raison de leur forme quelle que soit la qualité de la personne qui les accomplit. Ces actes relèvent du droit commercial. Il y a deux types d’actes de commerce par la forme à savoir la lettre de change, et le billet à ordre lorsqu'il résulte d’une transaction commercial (article 9 du code de Commerce) (§1); les actes accomplis par les sociétés commerciales dans le cadre de leur objet social (article 2 de la loi n° 5-96 sur la SNC, SCS, SCA, SARL et SP/article 1 de la 17-95 sur la SA) (§2). §1 : La lettre de change et le billet à ordre A- La lettre de change La lettre de change est considérée comme un acte de commerce quelle que soit la personne qui l’utilise commerçant ou non commerçant, et quelle que soit la nature de l’opération qu’elle matérialise. Toute personne qui signe une lettre de change, à quelque titre que ce soit (tireur, tiré, avaliseur), s’engage selon les règles du droit commercial. Autrement dit, tout engagement qui découle d’une lettre de change est un acte de commerce. B- Le billet à ordre Le billet à ordre est réputé acte de commerce, même lorsqu’il est signé par un non commerçant, à condition qu’il résulte d’une transaction commerciale. 13 §2 : Les actes accomplis par certaines formes de sociétés La loi considère comme commerciales à raison de leur forme et quel que soit leur objet : En premier lieu les sociétés de personnes(A) à l’exclusion de la société en participation à savoir, les sociétés en nom collectif et les sociétés en commandite simple. En second lieu, les sociétés de capitaux (B) à savoir, les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions. En troisième lieu, les SARL (C). La société commerciale par la forme contribue de manière substantielle à l’élargissement du domaine d’application du droit commercial dans la mesure où, les activités civiles lorsqu’elles sont exploitées dans le cadre des sociétés commerciales par la forme, sont régies par le droit commercial. A- Les sociétés de personnes : Elles se caractérisent par la prépondérance de l’intuitu personae. Autrement dit, le facteur personnel ou la considération de la personne des associés constitue un facteur déterminant dans la constitution de la société. On les appelle également sociétés par intérêt parce que l’apport de chaque associé est représenté par une part d’intérêts qui n’est pas librement cessible, les associés ont une responsabilité indéfinie et solidaire dans le passif social. B- Les sociétés de capitaux : Dans cette catégorie de sociétés, l’accent est mis davantage sur l’apport de capitaux que sur les relations personnelles entre les associés. En d’autres termes, les considérations patrimoniales sont plus importantes que les relations personnelles. Les risques encourus par chaque associé ne peuvent pas dépasser le montant de sa mise, les associés ne mettent pas en jeu leur fortune personnelle. En contrepartie de son apport, l’associé reçoit des actions librement négociables c’est pourquoi ces sociétés sont également appelées sociétés par actions. Les sociétés de capitaux sont au nombre de deux : la SA et la société en commandite par actions. 14 C- la société à responsabilité limitée : C’est une société à caractère mixte qui tient à la fois aux sociétés de personnes et aux sociétés de capitaux. Comme les sociétés de personnes, elle est constituée d’associés qui se connaissent et qui entretiennent des relations personnelles, ces associés détiennent des parts qui ne sont pas librement cessibles. Comme les sociétés de capitaux, les associés ne sont responsables des dettes de la société qu’à concurrence de leurs apports. Ceci étant, on ne peut constituer de société au Maroc que dans le cadre de l’un des six types de sociétés précédemment énumérées. A défaut de volonté déclarée des parties sur la forme de la société, ou si l’on se trouve en présence d’une forme de société qui ne correspond à aucune de celles prévues par la loi, on doit considérer qu’il s’agit d’une société en nom collectif puisque c’est la forme de société la plus favorable aux créanciers sociaux. Sous-section 3 : Les actes de commerce par accessoire En plus des actes de commerce par nature et des actes de commerce par la forme, il existe une troisième catégorie d’actes intitulée « actes de commerce par accessoires». L’article 10 du code de commerce dispose que « sont également réputés actes de commerce, les faits et actes accomplis par le commerçant à l’occasion de son commerce, sauf preuve contraire ». Les actes de commerce par accessoire sont donc des actes de nature civile et qui deviennent commerciaux parce qu’ils sont accomplis par un commerçant dans le cadre de l’exercice de sa profession commerciale. Cependant, Il n’est pas toujours évident de faire le lien entre l’activité commerciale et l’activité contractuelle. Pour éviter toute difficulté, le code a posé une présomption simple selon laquelle tous les actes effectués par un commerçant sont commerciaux par accessoire sauf preuve contraire qui peut être apporté par tout moyen. 15 Ce sera à celui qui entend démontrer le caractère civil d’un prêt, par exemple, d’établir qu’il n’a pas été souscrit pour les besoins de son commerce. Section 2 : Le commerçant Le commerçant peut être une personne physique ou une personne morale. Les commerçants personnes physiques sont identifiées par leurs activités (sous-section 1). Les commerçants personnes morales, précisément les sociétés commerciales, sont identifiées par leur forme (sous-section 2). Sous-section 1 : Les commerçants personnes physiques Pour les commerçants personnes physiques, l’acquisition de la qualité du commerçant est subordonnée à l’exercice habituel ou professionnel des actes de commerce par nature, en l’occurrence les activités énumérées aux articles 6 et 7 du code de commerce, ou pouvant être assimilées à celles-ci. Par ailleurs, la jurisprudence ajoute que cette activité doit être exercée à titre personnel c'est-à-dire au nom et pour le compte de l’intéressé (§1). Toutefois, l’exercice de la profession commerciale suppose que soient remplies d’autres conditions2 (§2). §1 : L’exercice habituel ou professionnel d’actes de commerce L’habitude nécessite la réunion de deux éléments : L’élément matériel : L’habitude signifie que les actes de commerce par nature doivent être accomplis de manière répétée. Un acte de commerce isolé ne peut pas conférer à son auteur la qualité de commerçant. L’élément intentionnel : quand on achète pour revendre de manière accidentelle et involontaire, l’habitude est absente. 2 Ces conditions qui s’appliquent également aux commerçant personnes morales. 16 La profession signifie que les actes de commerce sont accomplis dans le cadre d’une entreprise organisée. La profession suppose donc une organisation et une compétence à même de procurer à celui qui l’exerce des moyens pour subvenir aux besoins de l’existence. Le professionnel se distingue ainsi de l’amateur, qui n’est pas qualifié techniquement, ou du bénévole, qui agit sans percevoir une contrepartie. Le caractère professionnel implique l’exercice habituel d’actes afin d’en tirer profit et l’intention de se consacrer à une activité, de se considérer comme un professionnel. Le commerce suppose une indépendance totale dans l’exercice de la profession. Il suppose aussi un certain risque : le commerçant peut faire des bénéfices mais il peut aussi subir des pertes ; d’où la règle : celui qui exerce des activités commerciales, même s’il en fait sa profession habituelle, n’est pas un commerçant tant qu’il le fait pour le compte d’autrui. Toutefois, certaines personnes, bien qu’elles agissent pour le compte d’autrui, sont considérées des commerçants alors qu’elles ne remplissent pas la condition d’indépendance corrélative au risque. Il en est ainsi du commissionnaire qui est un intermédiaire qui agit en son nom mais pour le compte d’un tiers appelé « commettant ». §2 : Les conditions de l’exercice du commerce Ces conditions sont de deux ordres, ne pas tomber sous les restrictions légales (A), et observer certaines obligations (B). A- ne pas tomber sous les restrictions L’accès aux professions commerciales est en principe libre, toute personne a le droit de faire le commerce. C’est une liberté publique reconnue par la constitution. 17 Toutefois, la loi a apporté des restrictions au libre exercice du commerce, ces restrictions sont de deux sortes. Les premières ont été édictées pour assurer la bonne marche ou le bon fonctionnement de l’activité commerciale, elles sont dictées par des considérations qui sont liées à l’intérêt général (I). Les secondes ont pour but de protéger les commerçants eux-mêmes contre les risques et les dangers qui sont inhérents à l’exercice du commerce (II). I- Restrictions dans l’intérêt du commerce Ces restrictions se présentent sous la forme d’interdictions (a), de déchéances (b) et d’incompatibilités (c). Ces différentes restrictions relèvent de l’ordre public économique, mais il faut garder présent à l’esprit que celui qui exerce le commerce en dépit d’une interdiction, d’une déchéance ou d’une incompatibilité sera réputé commerçant et sera régi par le droit commercial. a- Les interdictions Ces mesures ont pour but d’interdire ou de soumettre à autorisation l’accès à la profession commerciale. Ces interdictions qui constituent des atteintes à la libre création des entreprises et au libre choix de la profession, se rattachent soit à la nature de l’activité (1), soit à la personne du commerçant (2). 1- Interdictions se rattachant à la nature de l’activité Certaines professions ou activités sont purement et simplement interdites. Cette interdiction s’explique par deux séries de considérations : 1.1- L’État s’est réservé le monopole de certaines activités C’est le cas pour l’importation, la fabrication et la distribution de tabac. Ce monopole est exercé par la régie des tabacs. 1.2- Certaines activités sont considérées comme contraires à la moralité publique 18 C’est le cas pour les maisons de jeu, le commerce de stupéfiants, les maisons de prêt sur gages. D’autres activités ne peuvent être exercées qu’après l’obtention d’une autorisation administrative. C’est le cas pour les banques, les assurances, les transports, les pharmacies, les agences de voyages, les débits de boissons… 2- Interdictions se rattachant à la personne du commerçant Ces interdictions sont soit d’origine conventionnelle (2.1), soit d’origine judiciaire (2.2). 2.1- Interdictions conventionnelles Ces interdictions résultent de trois sortes de clauses, la clause de non rétablissement, la clause d’exclusivité et la clause de non-concurrence. * La clause de non rétablissement : est celle qui interdit à un vendeur de fonds de commerce de se rétablir (s’installer) à proximité du fonds vendu, pour ne pas faire concurrence à l’acquéreur. * La clause d’exclusivité : est celle qui impose à un commerçant de ne vendre que certains produits ou de ne se fournir qu’auprès d’un seul fournisseur, c’est le cas des pompistes de marque (stations d’essence TOTAL, SHELL…). * la clause de non-concurrence : est celle qui interdit à un salarié après la rupture du contrat de travail, de s’installer à son propre compte pour exercer la même activité que celle de son employeur, ou de rentrer au service d’une entreprise concurrente. 1.2- interdictions judiciaires L’interdiction d’exercer l’activité commerciale peut être prononcée par jugement dans deux cas : 19 En premier lieu, à titre de peine accessoire à une condamnation pénale. Ainsi, en cas d’infraction à la réglementation des prix, le tribunal peut interdire au commerçant pour une durée maximum d’un an, l’exercice du commerce. En second lieu, à titre de mesure de sûreté contre les condamnés pour crime ou délit, lorsque l’infraction commise a une relation directe avec l’exercice de la profession. Cette interdiction ne peut dépasser 10 ans. b- Les déchéances La loi a déchu du droit à l’exercice du commerce, certaines personnes jugées indignes d’exercer certaines activités commerciales. Il existe deux sortes de déchéances, des déchéances générales (1) et des déchéances particulières (2). 1- les déchéances générales Les commerçants et les dirigeants de sociétés commerciales ayant fait l’objet d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, peuvent être frappés de déchéance commerciale dans les cas suivants : En premier lieu : lorsqu’ils ont poursuivi abusivement une exploitation déficitaire devant conduire inéluctablement à la cessation de paiement. En second lieu : lorsqu’ils ont omis de tenir une comptabilité régulière, ou ont fait disparaître tout ou partie des documents comptables. En troisième lieu : lorsqu’ils ont détourné ou dissimulé tout ou partie de l’actif, ou frauduleusement augmenté le passif. Cette déchéance est prononcée par le tribunal de commerce, lorsqu’un des trois faits précédents a été relevé à l’encontre d’un commerçant, ou d’un dirigeant de société commerciale qui fait l’objet d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. 20 La déchéance engendre ou produit deux effets : l’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale et toute société commerciale. La durée de cette déchéance ne peut être inférieure à cinq ans. l’incapacité d’exercer une fonction publique élective pendant cinq ans. Les décisions prononçant la déchéance sont inscrites au registre du commerce, publiées dans un journal d’annonces légales et au bulletin officiel, et affichées dans un panneau du tribunal. Les intéressés peuvent être dispensés ou relevés de la déchéance par le jugement de clôture de procédures pour extinction de passif (extinction de toutes les dettes). Ils peuvent également demander au tribunal d’être relevés partiellement ou totalement de la déchéance, s’ils ont apporté une contribution suffisante au paiement de l’insuffisance de l’actif. Le relèvement total de la déchéance emporte la réhabilitation. 2- Les déchéances particulières La loi prévoit que les personnes condamnées pour crime ou délit contre les biens, ne peuvent exercer certaines activités notamment celles de banquier, d’assureur, d’agent d’affaires, d’agent de voyages, d’experts-comptables, de dirigeant de société de bourse. Ces déchéances s’expliquent par le fait que certaines professions, compte tenu de la confiance qu’elles doivent inspirer, ne peuvent être exercées que par des personnes honorables ou dont la moralité ne soit pas douteuse. c- Les incompatibilités Certaines professions ou activités sont incompatibles avec l’exercice de commerce. Autrement dit, certaines personnes ne peuvent pas exercer le commerce en raison de leur profession. 21 On considère que certaines professions ont une dignité, ou supposent un désintéressement qui s’accommode mal de l’esprit de spéculation qui anime le commerce. Il en est ainsi des professions libérales dites nobles telles que : les professions de médecin, chirurgien-dentiste, vétérinaire, avocat, notaire, huissier de justice, adouls, les experts-comptables, les géomètres. Les professions libérales se distinguent des professions commerciales par trois caractéristiques principales : 1- les membres de ces professions se rapprochent des producteurs intellectuels, dans la mesure où ils exercent une activité intellectuelle. 2- il se crée entre les membres de cette profession et leurs clients des rapports personnels qui reposent sur la confiance, et qui sont d’une nature autre que ceux qui existent entre un commerçant et un consommateur. C’est pourquoi la loi a mis à la charge de ces professionnels une obligation de secret, dont la violation est sanctionnée pénalement. 3- les membres des professions libérales ne perçoivent pas en rémunération de leurs services un prix, mais des honoraires qui expriment la reconnaissance et le remerciement du client. La même incompatibilité s’applique à la fonction publique. Il est interdit à tout fonctionnaire d’exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelle que nature que ce soit. Cette disposition a pour but d’assurer l’indépendance des fonctionnaires. La sanction de ces incompatibilités est d’ordre disciplinaire, il s’agit soit de la radiation de la profession libérale, ou de la révocation de l’administration. Mais aux yeux du droit commercial, celui qui exerce l’activité commerciale est soumis à la législation commerciale, quelle que soit sa profession. 22 b- Restrictions dans l’intérêt des commerçants : l’incapacité Ces restrictions se présentent sous la forme d’incapacités. Il s’agit de protéger contre les risques et les dangers liés à l’exercice de la profession commerciale, les individus qui n’ont pas le discernement suffisant pour avoir conscience de ces dangers, soit en raison de leur jeune âge, c’est le cas des mineurs (1), soit en raison de l’altération de leurs facultés mentales, c’est le cas des incapables majeurs (2). 1- Le mineur La capacité pour exercer le commerce est déterminée par la loi nationale de chaque individu. C’est le statut personnel qui fixe notamment l’âge de la majorité. Toutefois, et par dérogation à cette règle, le code de commerce contient deux dispositions générales qui s’appliquent aux étrangers quel que soit leur statut personnel. l’étranger qui a atteint l’âge de 18 ans révolus est considéré comme majeur pour exercer le commerce au Maroc, même si la loi nationale fixe l’âge de la majorité à plus de 18 ans. l’étranger qui est majeur en vertu de sa loi nationale mais qui n’a pas encore 18 ans, ne peut exercer le commerce au Maroc qu’avec l’autorisation du président du tribunal. Par ailleurs, la femme mariée peut exercer le commerce sans autorisation de son mari, toute convention contraire est réputée nulle. Ceci étant, tous les nationaux marocains quelles que soient leurs confessions sont soumis du point de vue de leur statut personnel aux dispositions du code de la famille, à l’exception des marocains de religion israélite et qui sont soumis au droit hébraïque. 23 En droit musulman, est considéré comme mineur celui qui n’a pas atteint l’âge légal de la majorité, cet âge étant fixé à 18 années grégoriennes révolues. En fait, il faut distinguer dans la condition juridique du mineur quatre périodes : jusqu’à 12 ans révolus Le mineur est considéré comme complètement dépourvu de discernement, il est frappé d’une incapacité totale, et tous les actes accomplis par le mineur sont nuls de plein droit. à partir de la 13ème année et jusqu’à 15 ans révolus Le mineur peut accomplir des actes à titre onéreux, mais la validité de ces actes est subordonnée à l’agrément de son tuteur. Pour accorder ou refuser cet agrément, le tuteur va apprécier si l’opération accomplie par le mineur lui est profitable ou non. à partir de la 16ème année Lorsque le mineur a atteint 15 ans révolus et qu’il présente des signes de maturité, il peut faire l’objet d’une émancipation partielle de la part de son tuteur. Ce dernier après autorisation du juge, peut remettre au mineur une partie de ses biens, généralement une somme d’argent, pour lui permettre de faire le commerce et ce à titre d’expérience. Le mineur aura la pleine capacité pour agir dans la limite de l’autorisation qu’il a reçue de son tuteur. Si cette expérience ne se révèle pas concluante, le tuteur avec l’autorisation du tribunal, peut retirer au mineur l’autorisation donnée et dans ce cas, le mineur va retrouver la condition juridique de la deuxième période. 24 lorsque le mineur atteint l’âge de 17 ans révolus Et lorsque sa maturité d’esprit est constatée par le tuteur, le mineur peut être totalement émancipé c’est-à-dire libéré de la tutelle. Cette libération est constatée par un acte adoulaire et doit être autorisée par le juge. Moyennant cette procédure de l’émancipation ou de libération de tutelle, le mineur passe de la minorité à la pleine capacité sans restrictions 2- les incapables majeurs Selon les règles du droit musulman, les incapables majeurs sont essentiellement le dément et le prodigue. Le dément est celui qui a perdu la raison, peu importe que sa démence soit continue ou intermittente c’est-à-dire entrecoupée de périodes de lucidité. Le prodigue est celui qui dilapide son patrimoine par des dépenses sans utilité, ou par des dépenses considérées futiles par des personnes raisonnables. Le juge doit prononcer l’interdiction du dément et du prodigue à partir du jour où il est établi qu’ils se sont trouvés dans cet État. Cette interdiction est prononcée sur requête de tout intéressé ou également du parquet. La sanction de cette interdiction est la nullité des actes conclus par le dément ou le prodigue. Par ailleurs, le code pénal prévoit comme peine accessoire l’interdiction légale. Cette sanction ne s’attache qu’aux peines criminelles et s’applique de plein droit, et prive le condamné de l’exercice de ses droits patrimoniaux pendant la durée de l’exécution de la peine principale. Un tuteur sera désigné pour gérer les biens du condamné, cependant, ce dernier peut désigner un mandataire pour le représenter dans l’exercice de ses droits, mais ce mandataire sera sous le contrôle du tuteur et sera responsable devant lui. 25 B- Les obligations particulières du commerçant Les commerçants sont soumis à trois obligations particulières, l’ouverture d’un compte bancaire (I), la publicité au registre de commerce par l’immatriculation au registre du commerce (II) et la comptabilité commerciale par la tenue des livres de commerce (III). I- L’ouverture d’un compte bancaire Le code de commerce oblige les commerçants à avoir un compte en banque. Ainsi, l’article 18 de ce code dispose que : « tout commerçant, pour les besoins de son commerce, a l’obligation d’ouvrir un compte dans un établissement bancaire ou dans un centre de chèques postaux ». A cet effet, les commerçants, doivent en vertu de l’article 306 du code de commerce, opérer par chèque barré ou virement, tous les paiements dont le montant est supérieur à 10000dhs, dans le souci de réduire les paiements en espèce et aboutir à une diminution de la fraude fiscale3. 3 En effet, l’article, 306 du code de commerce dispose que : « Or l’article 193 du code général des impôts dispose que : «Entre commerçants et pour faits de commerce, tout paiement d'une valeur supérieure à dix mille dirhams doit avoir lieu par chèque barré ou par virement. Toute inobservation des dispositions de l'alinéa précédent est passible d'une amende dont le montant ne peut être inférieur à six pour cent de la valeur payée. Le créancier et le débiteur sont solidairement responsables du paiement de cette amende ». En revanche, le code général des impôts dispose à l’article 193 que : « Indépendamment des autres sanctions fiscales, tout règlement d’une transaction dont le montant est égal ou supérieur à vingt mille (20.000) dirhams, effectuée autrement que par chèque barré non endossable, effet de commerce, moyen magnétique de paiement, virement bancaire, procédé électronique ou par compensation avec une créance à l’égard d’une même personne, à condition que cette compensation1013 soit effectuée sur la base de documents dûment datés et signés par les parties concernées et portant acceptation du principe de la compensation, donne lieu à l’application à l’encontre de l’entreprise venderesse ou prestataire de services, vérifiée, d’une amende de 6% du montant de la transaction effectuée : - soit entre une société soumise à l’impôt sur les sociétés et des personnes assujetties à l’impôt sur le revenu, à l’impôt sur les sociétés ou à la taxe sur la valeur ajoutée et agissant pour les besoins de leur activité professionnelle ; - soit avec des particuliers n’agissant pas pour les besoins d’une activité professionnelle. Toutefois, les dispositions de l’alinéa ci-dessus ne sont pas applicables aux transactions concernant les animaux vivants et les produits agricoles non transformés à l’exception des transactions effectuées entre commerçant 26 II - la publicité au registre de commerce Le registre du commerce constitue en quelque sorte l’état civil du commerçant. C’est un bureau de renseignements à l’usage du public, il a pour rôle de recevoir et de donner des informations sur les commerçants. C’est un facteur de sécurité pour le commerçant et également pour le développement du crédit. Le registre de commerce est régi d’abord par les articles 27 à 78 du code de commerce, ensuite par le décret du 18 janvier 1997. La structure du registre du commerce repose sur des registres locaux et sur un registre central. La tenue du registre local est confiée au secrétaire greffier du tribunal de commerce, ou à défaut du tribunal de première instance sous la surveillance du président du tribunal. Il existe en principe un registre local auprès de chaque tribunal. Le registre local comprend deux parties, un registre chronologique et un registre analytique. Sur le premier sont enregistrées les demandes d’immatriculation ou d’inscription au fur et à mesure de leur dépôt au greffe du tribunal. Le demandeur reçoit un récépissé qui constate notamment la date, l’heure et le numéro du dépôt. Sur le registre analytique, sont portées inscrites, les informations données par les demandeurs à l’immatriculation ou à l’inscription. Le registre analytique est constitué par deux recueils, l’un réservé aux commerçants personnes physiques, auxquels on donne un numéro d’immatriculation paire, le second est réservé aux commerçants personnes morales, auxquels on donne un numéro d’immatriculation impaire. 27 Le président du tribunal côte et paraphe à la fin de chaque mois les registres chronologique et analytique. Cette formalité a pour but de s’assurer de la régularité de la tenue du registre du commerce Concernant le registre central, il est tenu à casablanca par l’office marocain de la propriété industrielle et commerciale (O.M.P.I.C). Le registre central rempli quatre missions : 1- Il centralise pour l’ensemble du pays les renseignements qui sont portés sur les registres locaux. A cet effet, les secrétaires greffiers des tribunaux transmettent au registre central tous les mois, un extrait de toutes les déclarations recueillies pendant le mois écoulé. Ces mentions sont transcrites dans deux recueils distincts, l’un concernant les commerçants personnes physiques, l’autre les personnes morales et comprenant chacun autant de volume qu’il y a de tribunaux. 2- Il délivre les certificats négatifs relatifs au nom des commerçants, et aux dénominations commerciales des sociétés commerciales. Un commerçant (personne physique ou morale), ne peut se faire immatriculer au registre du commerce que sur présentation de ce certificat négatif. 3- Il délivre des certificats ou des copies, relatifs aux mentions transcrites sur le registre. 4- Il publie au début de chaque année un recueil faisant l’inventaire de tous les noms et de toutes les dénominations qui lui ont été transmis durant l’année écoulée. III - la comptabilité commerciale La comptabilité commerciale est réglementée sur le plan technique par la loi n° 09- 88 relative aux obligations comptables des commerçants, promulguée par le dahir du 25 décembre 1992, et elle est réglementée sur le plan juridique par les articles 18 à 26 du code de Commerce. 28 Tout commerçant doit tenir une comptabilité dans les formes prescrites par la loi 09-88, et selon les indications figurant aux tableaux qui y sont annexés. Cette comptabilité consiste d’une part dans la tenue de deux livres appelés livres de commerce, et d’autre part dans l’établissement des états de synthèse annuels. Les livres de commerce sont au nombre de deux, le livre journal et le livre d’inventaire. Le livre journal est un registre tenu chronologiquement sur lequel sont portés, sous forme d’écritures, les mouvements affectant les actifs et les passifs de l’entreprise opération par opération, et jour par jour. Les principales opérations qui sont portées sur ce livre sont en particulier les achats, les ventes, les paiements, et les encaissements. C’est la mémoire de l’entreprise. La loi permet toutefois de récapituler et de centraliser les opérations effectuées par le commerçant une fois par mois, à condition que le détail de cette opération soit porté sur des registres subséquents qu’on appelle des journaux auxiliaires. Le livre d’inventaire est un registre sur lequel doivent être transcrits le bilan et le compte de produits et charges de chaque exercice. Tout exercice a une durée normale de 12 mois. A la fin de chaque exercice, il doit être procédé à l’inventaire des éléments actifs et passifs de l’entreprise. Les états de synthèse annuels présentent la situation et les résultats de l’entreprise à la fin de l’exercice. Ils comprennent le bilan, le compte de produits et charges, l’état des soldes de gestion, le tableau de financement, et l’état des informations complémentaires. Le bilan décrit séparément les éléments actifs et passifs qui forment le patrimoine de l’entreprise, c’est-à-dire ce que l’entreprise a, et ce qu’elle doit. Le compte de produits et charges récapitule les recettes et les dépenses de l’exercice. 29 Le tableau de financement met en évidence, fait ressortir, l’évolution financière de l’entreprise en décrivant les ressources dont elle a disposé et les emplois qu’elle en a effectué. Sous-section2 : Les commerçants personnes morales : les sociétés commerciales Les sociétés qu’elles soient civiles ou commerciales obéissent à des règles qui leur sont communes, ces règles sont contenues dans les articles 982 et suivants du D.O.C. L’article 982 définit la société comme un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes mettent en commun leurs biens ou leur travail ou tous les deux à la fois, en vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter. Il en résulte que pour qu’il y ait société, il faut la réunion de trois éléments : en premier lieu, deux ou plusieurs personnes qui constituent les associés, en second lieu la mise en commun de biens ou de travail sous forme d’apports faits par les associés à la société, en troisième lieu, la réalisation et le partage de bénéfices. Toutefois, la doctrine et la jurisprudence ont ajouté un quatrième élément qui n’est pas formulé dans le texte et qui est l’affectio societatis, c’est-à-dire la volonté commune de contribuer sur un pied d’égalité au succès de l’entreprise. Ces quatre éléments sont particuliers à la société (ce qui la distingue d’autres contrats), mais il faut garder présent à l’esprit que la société est un contrat, et qu’à ce titre elle est soumise à des conditions de fonds et de forme pour la validité de sa formation. Ceci étant, lorsque les éléments spécifiques (§1) et les conditions de formation (§2) sont réunis, Il y a création d’un être moral nouveau, distinct de la personne des associés. §1 : Les conditions spécifiques Pour exister la société suppose donc la réunion de quatre caractères : 30 A- Pluralité des associés Le contrat de société est un contrat synallagmatique qui doit nécessairement réunir deux parties au moins. Il s’en suit qu’une société doit réunir au minimum deux associés à la fois lors de sa constitution et tout au long de la vie sociale. Cette exigence est la conséquence du principe de l’unité ou de l’indivisibilité du patrimoine qui signifie qu’une personne ne peut avoir qu’un seul patrimoine or, la constitution d’une société unipersonnelle implique la création d’un patrimoine d’affectation distinct du patrimoine général. C’est pourquoi lorsqu’un associé au cours de la vie sociale réunit entre ses mains la totalité des parts ou des actions d’une société, celle-ci se trouve automatiquement dissoute. A cette règle générale, la loi a apporté une exception et une atténuation : D’une part, il est permis de constituer une SARL d’associé unique. D’autre part, lorsque le nombre des actionnaires d’une SA est réduit à moins de cinq, jusqu’à atteindre un actionnaire, la dissolution ne peut être demandée en justice par tout intéressé que si cette situation s’est prolongée depuis plus d’un an. Le tribunal saisi de la demande en dissolution peut accorder à la société un délai maximum de six mois pour régulariser sa situation. Par ailleurs, dans certaines formes de société, la loi exige un nombre minimum d’associés supérieur à deux c’est le cas pour les SA dans lesquelles il faut un minimum de cinq actionnaires et pour les sociétés en commandite par actions, dans lesquelles il faut au moins quatre associés, un commandité et trois commanditaires. Si la loi a fixé un nombre minimum d’associés, il n’y a pas en principe de nombre maximum. Ainsi, les SA peuvent comporter une multitude d’actionnaires qui peuvent se compter par milliers voire même par millions. Exemple : l’introduction en bourse d’I.A.M a été souscrite par 120 000 actionnaires marocains. Toutefois, la SARL ne peut pas comporter plus de 50 associés. Au-delà de ce chiffre, la société doit être transformée en S.A. 31 B- Mise en commun d’apports : Chaque associé doit faire un apport à la société, cet apport peut revêtir trois formes : I- un apport en numéraire : c’est-à-dire en argent II- un apport en nature : c’est-à-dire des biens autres que l’argent, il peut s’agir de biens mobiliers ou immobiliers, de biens corporels ou incorporels. III- un apport en industrie : c’est-à-dire un apport de service tel que la force du travail, les connaissances techniques, l’expérience professionnelle. L’ensemble des apports en numéraire et en nature forme le capital social. Les apports en industrie ne peuvent pas figurer à l’actif social parce qu’il s’agit de biens insaisissables. C- Participation aux risques de la société : Comme les associés sont appelés à partager les bénéfices, ils sont exposés à subir des pertes. La part de chaque associé dans les bénéfices et dans les pertes, doit être proportionnelle à son apport, à sa part dans la société. D- L’élément intentionnel ou l’affectio societatis : Il faut que les associés aient la volonté commune de collaborer activement à la réalisation de l’objet social. Autrement dit, les associés doivent être animés d’un esprit sociétaire. Dans le cadre de cette collaboration, les associés sont placés sur un même pied d’égalité. Ce quatrième élément a pour conséquence de permettre à chaque associé d’avoir un droit de regard sur la marche de la société, et peut à tout moment en contrôler la gestion. L’affectio societatis permet de distinguer la société d’autres contrats, dans lesquels l’une des parties fait bénéficier l’autre d’une partie des résultats de son 32 entreprise, tout en restant maître de son affaire. C’est le cas de certains contrats de prêt, de travail ou de location avec participation aux bénéfices. §2 : Les conditions de validité du contrat de société Pour qu’il y ait contrat de société, il faut la réunion de conditions de fonds, conditions (A) et de forme (B) ainsi que des conditions de publicité (C). A- les conditions de fonds Ces conditions sont celles du droit commun à savoir qu’il faut le consentement, la capacité, l’objet et la cause. Le consentement et la cause n’appellent pas d’obligations particulières par rapport aux règles de droit commun en revanche, le contrat de société présente des particularités s’agissant de la capacité (I) et de l’objet (II). I- La capacité Les conditions de la capacité diffèrent selon la nature de la société, et selon l’étendue de l’engagement pris par les associés à l’égard des tiers. A cet égard, on distingue deux catégories de société, d’une part les sociétés de personnes dans lesquelles les associés doivent être des commerçants et doivent répondre indéfiniment et solidairement du passif social. Pour cette catégorie de société, les associés doivent avoir la capacité commerciale, il en résulte qu’un mineur ne peut pas être associé dans une société de personnes. D’autres part les sociétés de capitaux, dans lesquelles les associés n’ont pas la qualité de commerçants et ne sont responsables du passif social qu’à concurrence de leurs apports. Dans ces conditions, un mineur peut être actionnaire dans une société anonyme. II - L’objet Toute société doit avoir un objet licite c’est-à-dire qui ne soit contraire ni à la loi ni à l’ordre public ni aux bonnes mœurs. En outre, une société qui a pour objet des 33 choses prohibées par la loi musulmane est nulle de plein droit, cette nullité ne concerne que les sociétés entre musulmans. B- les conditions de forme Les sociétés civiles peuvent être constituées sans qu’il soit nécessaire d’établir un acte écrit, en revanche, la constitution d’une société commerciale doit être constatée par la rédaction d’un acte écrit qui prend le nom de « statut ». Ces statuts mentionnent notamment la forme de la société, sa dénomination, son objet, son siège social, sa durée qui ne doit pas dépasser 99 ans, le montant du capital, la répartition de ce capital entre les associés, ainsi que les règles de fonctionnement de la société. La rédaction des statuts peut se faire soit par un acte notarié soit par un acte sous seing privé. L’exigence de l’écrit est une dérogation au principe de la liberté de la preuve en droit commercial, cette dérogation s’explique par deux motifs : En premier lieu : les clauses du contrat de sociétés sont complexes dans la mesure où elles sont appelées à régir une situation qui doit durer longtemps. En second lieu : la constitution d’une société commerciale donne lieu à publicité, or cette publicité ne peut pas se concevoir sans qu’il y ait un support écrit. C- Conditions de publicité Ces conditions ne concernent que les sociétés commerciales à l’exclusion des sociétés civiles. La publicité consiste dans l’accomplissement de trois formalités : I- le dépôt au greffe du tribunal d’un exemplaire des statuts Ce dépôt permet à toute personne intéressée de prendre connaissance des statuts ou de se faire délivrer une copie. II- La publication d’un extrait dans un journal d’annonces légales et au bulletin officiel. Toute modification apportée à un statut, doit être soumise aux mêmes formalités de dépôt et de publication. III- l’immatriculation au registre du commerce 34 DEUXIEME PARTIE : LE FONDS DE COMMERCE Le législateur marocain a réservé au fonds de commerce le livre II aux articles de 79 au 158. Le titre premier porte sur les éléments du fonds de commerce (chapitre1), alors que le deuxième titre concerne les contrats portant sur le fonds de commerce (chapitre 2). Premier Chapitre : les éléments du fonds de commerce L’article 79 du fonds de commerce dispose que « Le fonds de commerce est un bien meuble incorporel constitué par l'ensemble de biens mobiliers affectés à l'exercice d'une ou de plusieurs activités commerciales ». Or, l’article 80 du même code dispose que « Le fonds de commerce comprend obligatoirement la clientèle et l'achalandage. Il comprend aussi, tous autres biens nécessaires à l'exploitation du fonds tels que le nom commercial, l'enseigne, le droit au bail, le mobilier commercial, les marchandises, le matériel et l'outillage, les brevets d'invention, les licences, les marques de fabrique, de commerce et de service, les dessins et modèles industriels et, généralement, tous droits de propriété industrielle, littéraire ou artistique qui y sont attachés » Il découle de ces deux articles que le fonds de commerce est constitué de deux catégories d’éléments, des éléments incorporels (section 1) et des éléments corporels (section 2). Section 1 : les éléments incorporels Ces éléments sont constitués par la clientèle et l’achalandage (sous-section 1), le nom commercial (sous-section 2), l’enseigne (sous-section 3), le droit au bail (sous- section 4), les droits de propriété intellectuelle (sous-section 5), les autorisations administratives, (sous-section 6) et certaines créances et dettes (sous-section 7). Sous-section 1 : la clientèle et l’achalandage 35 La clientèle est composée de toutes les personnes qui ont pris l'habitude de se servir en bien ou en service chez le même commerçant et qu’à ce titre, lui témoigne une certaine confiance. Il en résulte que la clientèle se caractérise par la fidélité et la stabilité. On assimile à la clientèle, l’achalandage (clients de passage) et ce dernier peut être défini comme l’aptitude d'un fonds de commerce à attirer des clients, c'est une sorte de clientèle potentielle qui dépend généralement de la situation géographique du fonds. La clientèle et l'achalandage constituent l'élément essentiel sans lequel ne peut y avoir de fonds de commerce. En d’autres termes un fonds de commerce n’existe juridiquement que s’il a une clientèle réelle et certaine. Sous-section 2 : le nom commercial C’est l’appellation sous laquelle un commerçant exploite son commerce. Pour les personnes physiques, on parle de « raison de commerce », qui est généralement le propre nom du commerçant. Pour les sociétés, c'est la dénomination sociale qui est librement choisie. Lorsque le nom commercial est inscrit au registre du commerce et publié dans un journal d'annonces légales, il bénéficie d'une protection légale particulière : il confère à son titulaire le droit exclusif d'utilisation. le nom entre dans la composition du fonds de commerce et peut être cédé avec lui. sur le plan civil, le nom commercial est protégé par l'action en concurrence déloyale. Le titulaire du nom peut obtenir à la fois des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi et la suppression de l’inscription qui aurait été faite par celui qui utilise illégalement un nom déjà existant. 36 sur le plan pénal, toute usurpation ou tout usage frauduleux d’un nom commercial est puni d'un emprisonnement de trois mois à un an et d'une amende de 100.000 à 1.000 000 dhs ou de l’une de ces deux sanctions. Sous-section 3 : l’enseigne C’est un signe extérieur qui permet de distinguer ou d’individualiser l’entreprise commerciale. L’enseigne peut se présenter sous la forme d’un emblème tel que par exemple : la silhouette d’un animal, une figure géométrique, une dénomination de fantaisie et parfois même le nom commercial. La protection de l’enseigne est beaucoup moins stricte que celle du nom commercial. Il n’y a concurrence déloyale que dans le cas où il y a utilisation d’une enseigne identique ou semblable par un autre commerçant fabriquant des produits semblables, pour détourner la clientèle. Sous-section 4 : le droit au bail (propriété commerciale) Le droit au bail n’est considéré comme élément du fonds de commerce que si le commerçant est « locataire » des lieux du local dans lequel il exploite son commerce. Autrement dit, le droit au bail doit nécessairement résulter des rapports entre un propriétaire et un locataire commerçant. Et il a pour objet la jouissance d’un local à usage commercial. Lorsqu’un commerçant est propriétaire d’un local dans lequel il exerce son activité, le fonds de commerce ne comprend pas de droit de bail. Le droit au bail est un élément extrêmement important du fonds de commerce pour trois raisons essentielles : dans la plupart des commerces et en particulier dans le commerce de détail, la clientèle est attachée à l'emplacement du fonds, et la valeur du fonds dépend du droit au bail. le droit au bail permet au locataire commerçant d'occuper les lieux loués (droit de jouissance) sans crainte d'être expulsé par le propriétaire. En effet, le 37 commerçant a droit à l'expiration de son bail d'en demander le renouvellement chaque fois qu'il le désire, le propriétaire ne peut ni mettre fin au bail ni refuser le renouvellement. le droit au bail permet en cas de vente du fonds de commerce la continuation de l’activité commerciale dans le même local par l’acquéreur contre la volonté du propriétaire. Toute clause contraire est nulle et de nul effet. La loi a voulu assurer une certaine stabilité aux entreprises commerciales. C’est pourquoi il existe une réglementation particulière des baux commerciaux contenue dans le dahir du18 juillet 2016 qui a abrogé celui du 24 mai 1955. Cette réglementation confère au locataire commerçant la propriété commerciale, qui constitue un véritable démembrement de la propriété au profit du locataire et au détriment du bailleur. Ce qui fait que sur un même local commercial loué, vont se superposer deux propriétés différentes, c’est-à-dire la propriété des murs qui appartient au bailleur et la propriété du fonds de commerce qui appartient au commerçant locataire. Le fondement de la propriété commerciale réside dans la plus-value qu’acquiert le local loué du fait de l’exploitation de ce local par le commerçant. La propriété commerciale s’acquiert au bout d’une jouissance consécutive de deux ans si le locataire a un bail écrit, et de quatre ans s’il n’a qu’un bail verbal. Toutefois, le droit au bail n’est pas un droit absolu : le bailleur peut toujours récupérer son local en versant au locataire une indemnité d’éviction. Cette indemnité est égale au préjudice subi par le commerçant par suite au défaut de renouvellement de son bail. Dans la pratique, elle correspond à la valeur du fonds de commerce majorée des frais de déménagement et réinstallation dans un autre local. 38 le bailleur peut refuser le renouvellement du bail s’il justifie d’un motif grave et légitime à l’encontre du locataire tel que le non-paiement des loyers, la modification du local loué sans autorisation, le changement de destination des locaux. si le local est déclaré insalubre par l’autorité administrative et doit en conséquence être démoli, le bailleur peut le reprendre sans avoir à payer d’indemnité, mais ce locataire aura la priorité pour louer le local s’il est reconstruit ou remis en état. lorsque le bailleur décide de sa propre initiative de démolir l’immeuble et de le reconstruire, il doit verser au locataire commerçant, une indemnité égale à trois ans de loyer. En outre, le locataire a un droit de priorité pour la location des nouveaux locaux. le bailleur peut reprendre son local pour l’habiter lui-même ou le faire habiter par sa famille à condition : Qu’il ne dispose pas d’une habitation personnelle. Dans ce cas, le bailleur doit payer au locataire une indemnité égale à trois ans de loyer. Sous-section 5 : les droits de propriété intellectuelle La propriété intellectuelle comprend d’une part la propriété industrielle (§1) et d’autre part la propriété littéraire et artistique (§2). § 1 : la propriété industrielle Elle a pour objet la protection des brevets d’invention, des marques, des dessins et modèles. Il s’agit de droits de propriété qui peuvent porter soit sur les créations nouvelles (A) soit sur les signes distinctifs (B). Ces droits sont régis par la loi n° 17-97 promulguée par le dahir du 15 février 2000 et qui n’est entrée en vigueur que le 18 décembre 2004. A- les créations nouvelles Elles sont de deux sortes : les créations de fonds (I) et les créations de forme (II). I- les créations de fonds : 39 Elles sont protégées par le « brevet d’invention ». Le brevet d’invention est un certificat qui est délivré par l’OMPIC (l’Office marocain de la propriété industrielle et commerciale) au titulaire d’une nouvelle invention susceptible de recevoir une application industrielle. Ce brevet confère à son titulaire, le monopole d’exploitation commerciale de son invention pendant 20 ans, à l’expiration de laquelle, le brevet tombe dans le domaine public. II- les créations de forme Elles confèrent à un objet, un aspect extérieur nouveau et ornemental, qui sont protégées par la réglementation sur les dessins et les modèles. Le dessin est un assemblage de lignes ou de couleurs sur une surface plane. Le modèle est une combinaison des formes, déterminant le relief d’un objet. Les dessins et modèles, lorsqu’ils sont opposés à l’OMPIC, sont protégés pendant une durée de cinq ans renouvelable deux fois, soit au maximum 15 ans. B- les signes distinctifs Elles portent sur les marques qui permettent à la clientèle d’identifier et d’individualiser les produits fabriqués par un industriel (marques de fabrique), les produits diffusés par un commerçant (marques de commerce) et les prestations de services fournies par un hôtelier, un transporteur (marques de services). Lorsque la marque est déposée à l’OMPIC, elle bénéficie d’une durée de protection indéfiniment renouvelable contre les imitations et les usurpations pendant une durée de 10 ans. §2 : La propriété littéraire et artistique Ces droits sont régis par la loi n° 2-00 promulguée par le dahir du 10 mars 2000, ils confèrent à leurs titulaires, le droit d’auteur c’est-à-dire le droit exclusif 40 d’exploitation des œuvres littéraires et artistiques, pendant toute la vie de l’auteur et au profit de ses héritiers pendant une durée de 50 ans après le décès. Sous-section 6 : les autorisations administratives L’exercice de certaines activités est subordonné à l’obtention d’autorisations administratives qu’on appelle licences d’exploitation. Le problème qui se pose est de savoir si la vente du fonds de commerce emporte transfert au profit de l’acquéreur de l’autorisation d’exploitation. Tout dépend du but recherché par les pouvoirs publics lorsqu’ils accordent une autorisation d’exploitation. Lorsque celle-ci est accordée en tenant compte des besoins des consommateurs, sans tenir compte de la personnalité du bénéficiaire, elle constitue un élément du fonds et peut être transférée avec lui, c’est le cas lorsqu’il s’agit d’un fonds de commerce d’un moulin, en même temps qu’il cède ses équipements, le propriétaire transfère à l’acquéreur l’autorisation qu’il a reçu du ministère de l’agriculture. Lorsque ce sont des considérations personnelles qui ont motivé l’autorisation, celles-ci en raison de leur caractère strictement personnel, ne pourront pas être transférées automatiquement avec le fonds. Il faut que l’acquéreur soit agréé par les pouvoirs publics. C’est le cas en matière d’agrément de transport, et également pour les licences de débits de boissons et agents de voyages Sous-section 7 : certaines créances et dettes Les créances et les dettes du fonds de commerce sont des droits personnels qui sont attachés à la personne même du commerçant. En conséquence, elles ne sont pas comprises dans la vente du fonds de commerce. Autrement dit, l’acquéreur ne succède pas aux droits et aux obligations du vendeur. 41 Toutefois, certaines dérogations ont été apportées à ce principe et qui permettent de transférer à l’acquéreur certaines créances et dettes du vendeur. Il en est ainsi dans l’intérêt du « personnel de l’entreprise », les contrats de travail conclus par le vendeur, sont automatiquement pris en charge par l’acquéreur, ce qui fait que les salariés conservent tous les avantages acquis dans l’entreprise et notamment de l’ancienneté. Il en est de même de l’obligation de paiement des impôts qui n’ont pas été payés par le vendeur. C’est pourquoi dans la pratique, l’acquéreur ne verse le prix de vente au vendeur que sur production d’un quitus fiscal. Section 2 : les éléments corporels Sont constitués d'une part par le matériel et l'outillage (§1) et d'autre part par les marchandises (§2). §1 : Le matériel et l’outillage Ce sont des objets mobiliers que le commerçant utilise pour exploiter son entreprise. Le commerçant peut se procurer son matériel de trois manières. En premier lieu, il peut acheter le matériel au comptant. En second lieu, il peut l’acheter à crédit, ce crédit peut être consenti soit par le fournisseur soit par un organisme de crédit qui finance l’acquisition. En général, le commerçant donne ce matériel en nantissement soit au profit du vendeur, soit au profit de la banque. Ce nantissement s’appelle nantissement de l’outillage et du matériel d’équipement, et il est réglementé par les articles 355 et suivants du code de Commerce. 42 En troisième lieu, il peut se procurer le matériel nécessaire en recourant au leasing ou crédit-bail, il s’agit de la location de biens d’équipement avec possibilité de rachat par le locataire en fin de bail. §2 : Les marchandises Les marchandises sont constituées par les matières premières destinées à être transformées et par les produits finis destinés à être vendus. C'est l'élément le moins stable du fonds de commerce dans la mesure où le stock de marchandises est appelé à varier tous les jours en fonction des achats et des ventes, c'est pourquoi il est très difficile au commerçant de mobiliser ses marchandises pour prendre du crédit. Toutefois, on peut mobiliser par la technique du warrant à condition de déposer au préalable les marchandises dans un magasin général. Il est possible au commerçant de donner en gage ses marchandises pour obtenir un crédit. Ceci étant, le fonds de commerce n'est pas constitué nécessairement de tous les éléments incorporels et corporels qui viennent d'être analysés. Tout dépend de l'activité de l’entreprise. Ainsi, certains fonds de commerce ne comprennent pas de marchandises, c'est le cas des agences d’affaires, des entreprises de transport. Dans d'autres cas, le droit au bail n’existe pas, lorsque le commerçant est propriétaire du local dans lequel il exerce son activité. Par ailleurs, la plupart des entreprises commerciales n’exploitent pas des droits de propriété intellectuelle. Mais il faut considérer que la clientèle est un élément indispensable d'un fonds de commerce, il n'y a pas de fonds de commerce sans clientèle mais cette clientèle n'est pas à elle seule suffisante, il faut qu'elle soit attirée par d'autres éléments, ces éléments doivent constituer le support de la clientèle. 43 Il suffit simplement de la réunion de certains éléments (parmi les huit), pour constituer un fonds de commerce à condition que la clientèle existe, il n’y a pas de fonds de commerce sans clientèle, mais cette clientèle n’est pas à elle seule suffisante, il faut qu’elle soit rattachée à d’autres éléments. Il s’ensuit que le fonds de commerce est une entité juridique constituée d’un ensemble d’éléments à contenu variable Deuxième chapitre : Les opérations juridiques portant sur le fonds de commerce Le fonds de commerce constitue une entité distincte des différents éléments qui le composent, et à ce titre, il a une valeur économique et peut donc faire l’objet d’opérations juridiques telles la vente (section 1), le nantissement (section 2) et l’exploitation du fonds de commerce (section 3). Section 1 : la vente du fonds de commerce La vente du fonds de commerce comme toute vente, est soumise en principe aux règles du droit commun. Toutefois, la loi a apporté un certain nombre de dérogations au droit commun soit dans l’intérêt des créanciers du vendeur pour préserver leur gage sur le fonds de commerce, soit dans l’intérêt du vendeur pour le protéger contre l’insolvabilité de l’acquéreur. Quoiqu’il en soit, la vente du fonds de commerce nécessite la réunion de certaines conditions (sous-section 1), et produit des effets (sous-section 2). Sous-section 1 : les conditions de la vente du fonds de commerce On distingue des conditions de forme (§1), des conditions de fond (§2), mais il faut ajouter les conditions de publicité (§3). §1 : Conditions de forme 44 Toute vente de fonds de commerce doit être constatée par un acte écrit qui peut être notarié ou sous seing privé, cet acte doit comporter les mentions obligatoires suivantes : le nom du vendeur, la date et la nature de son acte d’acquisition (quand et comment il a acheté), le prix d’acquisition qui doit spécifier distinctement le prix des éléments incorporels, le prix du matériel et le prix des marchandises. la liste des inscriptions des privilèges et des nantissements qui sont pris sur le fonds de commerce. s’il y a lieu, le bail (ne pas en tenir compte s’il est propriétaire), sa date, sa durée, le montant du loyer actuel, le nom et l’adresse du bailleur. l’origine de la propriété du fonds de commerce. Ce dispositif a été institué au profit de l’acquéreur pour lui permettre d’agir en toute connaissance de cause. A défaut de l’une de ces mentions, l’acquéreur est en droit de demander l’annulation de la vente s’il justifie d’un préjudice résultant de l’absence de cette mention. En cas d’inexactitude dans les mentions, l’acquéreur a le choix entre l’annulation de la vente et la réduction du prix de vente, si cette inexactitude lui a porté préjudice. Dans les deux cas, l’action doit être intentée par l’acquéreur (annulation ou réduction du prix) dans un délai maximum d’un an à partir de la date de l’acte de vente (du contrat). §2 : Conditions de fonds Ces conditions obéissent aux règles du droit commun de la vente sous réserve des précisions suivantes concernant l’objet (A) et le prix (B). A- L’objet 45 La loi exige que soient énumérés dans l’acte de vente, les différents éléments qui composent le fonds vendu, à savoir les éléments incorporels (voir plus haut), le matériel et les marchandises (éléments corporels). B - Le prix Le prix doit être réel et sérieux. Un prix dérisoire dissimule généralement soit une atteinte aux droits des créanciers soit une fraude fiscale pour éviter de payer les droits de mutation. Pour contrecarrer la simulation, la loi a prévu les mesures suivantes : En premier lieu, elle permet aux créanciers qui ont fait opposition, de faire une surenchère de 1/6 et aux créanciers inscrits (nantis), de faire une surenchère de 1/10. En second lieu, le code de l’enregistrement sanctionne toute dissimulation de prix par une forte amende. Il déclare par ailleurs : « est nulle et de nul effet toute convention ayant pour but de dissimuler une partie du prix de vente ». Dans tous les cas, le prix doit être déposé auprès d’une instance dûment habilitée à conserver les dépôts, il s’agit notamment des banques, des notaires et de la caisse du tribunal. §3 : Les conditions de publicité Le fonds de commerce constitue souvent le seul bien du commerçant et il est à craindre que la vente de ce fonds fasse courir aux créanciers le risque de ne pas être payés. Pour protéger les créanciers du vendeur, la loi exige que la vente du fonds de commerce fasse l’objet d’une publicité suivant des modalités précises (A) pour permettre à ses créanciers d’être au courant de la vente et de faire valoir leurs droits (C). A défaut de la publicité le législateur prévoit des sanctions (B). A- modalités de la publicité 46 L’acte de vente doit être déposé dans les 15 jours de sa date au secrétariat du tribunal dans le ressort duquel le fonds est situé. Un extrait de l’acte de vente doit être inscrit au registre du commerce et publié au bulletin officiel et dans un journal d’annonces légales. Cette double publication doit être renouvelée entre le 8e et le 15e jour après la première insertion. B- Sanctions du défaut de publicité Il faut distinguer deux cas selon que la publicité est inexistante ou qu’elle est simplement incomplète ou irrégulière : Dans le premier cas, la vente est inopposable aux tiers, il en résulte que les créanciers du vendeur peuvent, si le prix de vente a été payé par l’acquéreur, réclamer à ce dernier le montant de leurs créances à concurrence du prix de vente. Autrement dit, l’acquéreur risque de payer une deuxième fois le prix de vente. Dans le deuxième cas, le tribunal apprécie si l’irrégularité de la publicité a causé un préjudice aux créanciers du vendeur. Dans l’affirmative, le tribunal peut obliger l’acquéreur, s’il a déjà payé le prix de vente, de désintéresser les créanciers en payant une seconde fois le prix de vente. C- But de la publicité La publicité est faite dans l’intérêt des créanciers du vendeur, on distingue à cet égard deux catégories de créanciers : En premier lieu, les créanciers nantis c’est-à-dire ceux qui bénéficient d’un nantissement inscrit sur le fonds de commerce, ces derniers n’ont rien à craindre parce que du fait de l’inscription de leur gage, la vente ne peut pas se faire sans eux. En second lieu, les créanciers chirographaires c’est-à-dire qui n’ont pas de garantie particulière, ils sont inconnus de l’acquéreur, ce qui fait que le 47 commerçant peut vendre son fonds, toucher le prix sans qu’ils puissent prétendre au paiement de leurs dettes. C’est principalement pour ses créanciers chirographaires que la publicité a été organisée, elle leur permet d’une part de faire opposition ( I ) sur le prix de vente, d’autre part, ils peuvent faire une surenchère (II). I- l’opposition Dans les 15 jours qui suivent la deuxième insertion, les créanciers chirographaires ont la possibilité de faire opposition sur le prix de vente, c’est-à-dire s’opposer au versement du prix au vendeur. Cette opposition peut se faire soit par l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception au secrétariat greffe du tribunal où l’acte de vente a été déposé, soit par le dépôt de l’opposition au greffe contre récépissé. L’opposition doit indiquer à peine de nullité, le montant et les causes de la créance, elle doit contenir une élection de domicile dans le ressort du tribunal. Tous les créanciers chirographaires du vendeur peuvent faire opposition sans tenir compte de la nature de leurs créances (civile ou commerciale), ou de son exigibilité. Si l’opposition est régulière, elle a pour effet de bloquer le prix de vente et d’empêcher le vendeur de percevoir valablement le prix. Tout paiement partiel ou total du prix avant que les créanciers opposants ne soient désintéressés, ne leur sera pas opposable. Cette protection des créanciers peut présenter parfois quelques inconvénients pour le vendeur : En premier lieu, un prix de vente important peut-être bloqué par une créance dérisoire, c’est pourquoi le vendeur peut demander au président du tribunal de percevoir le prix de vente en consignant dans la caisse du tribunal, le montant 48 des créances déclarées. Cette procédure s’appelle « le cantonnement de l’opposition ». En second lieu, l’opposition peut être faite à la légère c’est-à-dire qu’elle ne se fonde ni sur un titre ni sur une cause réelle, elle peut aussi être nulle en la forme faute d’avoir respecté les exigences légales. Dans ce cas, le vendeur peut demander au président du tribunal, l’autorisation de toucher le prix malgré l’opposition. Cette procédure s’appelle « main levée de l’opposition ». II- la surenchère Les créanciers opposants, s’ils estiment qu’une partie du prix a été dissimulée, peuvent demander au tribunal de faire vendre le fonds de commerce aux enchères publiques, en se portant eux- mêmes acquéreurs de ce fonds et en offrant de payer le prix des éléments incorporels augmenté du 1/6 (la surenchère du sixième). Cette possibilité de surenchère suppose la réunion de trois conditions : * il faut que le prix de vente déclaré ne suffise pas à désintéresser tous les créanciers. *la surenchère doit être faite dans les 30 jours qui suivent la 2ème insertion. * il doit s’agir d’une vente ordinaire. La surenchère n’est pas admise après la vente judiciaire d’un fonds de commerce. Sous-section 2 : les effets de la vente La vente fait naître à la charge du vendeur (§1) et de l’acquéreur (§2) des obligations précises : §1 : Obligations du vendeur Elles sont au nombre de deux : l’obligation de délivrance (A) et l’obligation de garantie de non rétablissement (B). A- Le transfert de propriété (obligation de délivrance) 49 Le vendeur doit transférer à l’acquéreur la propriété du fonds, ce transfert se réalise par le seul effet du consentement. Mais à l’égard des tiers, le transfert ne leur sera opposable que si la propriété des différents éléments du fonds a été transférée selon les règles qui leur sont propres. Ainsi, pour le matériel et les marchandises, il faut la mise en possession de l’acquéreur. Pour le droit au bail, il faut que la vente soit notifiée au bailleur. Pour les droits de propriété industrielle, il faut opérer une inscription à l’O.M.P.I.C. B- L’obligation de garantie En matière de vente de fonds de commerce, le contrat contient une clause de non rétablissement, qui s’analyse comme une obligation de non concurrence. Il s’agit d’interdire au vendeur de s’installer à proximité du fonds vendu, pour détourner à son profit la clientèle qu’il a cédée. Cette clause est toujours sous-entendue dans un contrat de vente de fonds de commerce, c’est-à-dire qu’elle joue même si elle n’a pas été expressément stipulée. Cependant, cette interdiction ne doit pas être absolue sinon, elle serait contraire au principe de la liberté du commerce et de l’industrie. Elle doit être limitée dans le temps et dans l’espace et concerner l’activité exercée par le fonds (Ne peut être appliquée que si c’est la même activité). §2 : Obligations de l’acquéreur Cette obligation réside dans le paiement du prix. Ce prix doit être payé au comptant ou à crédit. Dans ce dernier cas, la loi a prévu des dispositions pour garantir le vendeur en ce qui concerne le paiement du prix, et ce en prévoyant deux mécanismes : le privilège du vendeur (A) et l’action résolutoire (B). A- Le privilège du vendeur 50 Le vendeur qui veut garantir le paiement du prix, a la possibilité de faire inscrire un privilège au registre du commerce. Ce privilège doit être mentionné dans l’acte de vente et il confère à son titulaire deux prérogatives, un droit de préférence et un droit de suite. Le droit de préférence permet au vendeur impayé de faire vendre le fonds de commerce aux enchères publiques et se faire payer en priorité sur le produit de la vente. Le droit de suite lui permet de saisir le fonds de commerce entre les mains de toute personne lorsque le fond ne se trouve plus dans le patrimoine de l’acquéreur par exemple : par suite d’une revente. B- L’action résolutoire Le vendeur impayé peut demander la résolution de la vente. Cette résolution a pour conséquence d’anéantir le contrat de vente avec effet rétroactif. L’action résolutoire permet au vendeur de reprendre son fonds de commerce. L’action résolutoire ne peut aboutir que si elle remplit trois conditions : elle doit être expressément mentionnée dans l’inscription du privilège. le vendeur qui exerce l’action résolutoire doit notifier au créancier nanti. Le jugement qui prononce la résolution ne peut intervenir que 30 jours après cette notification. Les créanciers ainsi avertis pourront (s’ils le veulent), éviter la résolution en désintéressant le vendeur impayé. l’action résolutoire est limitée aux seuls éléments qui font partie de la vente. Section 2 : le nantissement du fonds de commerce Le nantissement a pour but de permettre au commerçant d’obtenir crédit en donnant en gage son fonds de commerce. C’est une garantie qui est donnée au prêteur pour lui assurer le remboursement de son prix. La constitution du nantissement nécessite que soient remplies des conditions (sous-section1) et engendre des conséquences (sous-section 2). 51 Sous-section 1 : Les conditions de constitution du nantissement On distingue des conditions de forme (§1), des conditions de fonds (§2) et de publicité (§3). §1 : Conditions de forme Le nantissement doit être constaté par un écrit notarié ou sous seing privé, soumis à la formalité de l’enregistrement. §2 : Conditions de fond Le nantissement peut porter sur tous les éléments du fonds à l’exclusion des marchandises. §3 : Conditions de publicité L’acte de nantissement doit être déposé au greffe du tribunal dans les 15 jours de sa date, et inscrit dans le même délai au registre du commerce. Cette inscription conserve le nantissement pendant une période de cinq ans, à l’expiration de ce délai, le nantissement est périmé sauf la possibilité qui est donnée au créancier de procéder à son renouvellement pour une seule et même période de cinq ans. Sous-section 2 : les effets du nantissement Le nantissement confère à son titulaire le droit de préférence (§1) et le droit de suite (§2). §1 : Le droit de préférence Le créancier nanti qui veut poursuivre la réalisation du nantissement doit adresser au propriétaire du fonds, une mise en demeure d’avoir à acquitter sa dette en lui indiquant que faute de paiement, il s’exposerait à la vente de son fonds. 52 Cette vente est faite aux enchères publiques, le créancier nanti a une place privilégiée pour recouvrer sa créance avant les créanciers chirographaires. §2 : Le droit de suite Ce droit permet au créancier nanti de suivre le fonds en quelles que mains qu’il se trouve pour le saisir et le faire vendre aux enchères publiques. Malgré l’existence du nantissement, le commerçant peut transférer le siège de son activité dans un autre lieu mais à condition d’obtenir l’accord du créancier nanti. Section 3 : l’exploitation du fonds de commerce Le propriétaire d’un fonds de commerce peut l’exploiter lui-même, c’est le cas le plus fréquent dans la pratique, mais il a également la possibilité de confier la gestion de son fonds à une autre personne. La gérance du fonds de commerce se présente sous deux formes : il peut s’agir d’une gérance véritable, appelée gérance salariées (sous- section1), comme il peut s’agir d’une location pure et simple du fonds de commerce, appelée gérance libre (sous-section 2). Sous-section 1 : la gérance salariée Le propriétaire du fonds peut confier à un gérant salarié l’exploitation de son fonds. Ce gérant est lié au propriétaire par un contrat de travail (c’est pourquoi on parle de gérance salariée). Il exploite le fonds au nom et pour le compte du propriétaire et sous le contrôle de ce dernier. Il n’a pas la qualité de commerçant, cette qualité reste attachée à la personne du propriétaire. C’est ce dernier qui conserve les risques de l’exploitation (soit des bénéfices soit des pertes). Le gérant perçoit un salaire qui comporte généralement une partie fixe et un intéressement sur les résultats du fonds. Sous-section 2 : la gérance libre 53 Elle consiste de la part d’un propriétaire, à donner son fonds de commerce en location. Cette technique s’appelle également la location-gérance ou gérance libre du fonds de commerce. Le gérant libre exploite le fonds en son nom, pour son propre compte et à ses risques et périls, il y a donc une séparation très nette entre la propriété et l’exploitation du fonds. Le contrat de gérance libre nécessite la réunion de certaines conditions (§1), une fois remplies, il produit des effets (§2) §1 : Conditions de la gérance libre Il s’agit de ce qui suit : le gérant a la qualité de commerçant et il est soumis à toutes les obligations qui en découlent. Le bailleur perd la qualité de commerçant et doit se faire radier du registre de commerce. un extrait du contrat de gérance doit être publié dans la quinzaine de sa date au bulletin officiel et dans un journal d’annonces légales. La même publicité est exigée à la fin de la gérance libre. le gérant libre doit indiquer sa qualité (de gérant libre) sur tous ses documents sous peine d’une amende de 2000 à 10 000 dirhams. §2 : Les effets La gérance libre produit trois séries d’effets : à l’égard des créanciers du bailleur (A), du bailleur (B) et à l’égard des créanciers du gérant libre (B). 54 A- Effets l’égard des créanciers du bailleur (propriétaire) Lorsque la gérance libre est de nature à porter préjudice aux créanciers du bailleur du fonds, ces derniers peuvent demander au tribunal dans un délai de trois mois à compter de la publication du contrat de gérance libre, de déclarer exigibles les créances antérieures ayant pour cause l’exploitation du fonds. B - Effets à l’égard du bailleur En premier lieu, le bailleur est solidairement responsable avec le gérant libre des dettes contractées par ce dernier à l’occasion de l’exploitation du fonds, et ce jusqu’à la publication du contrat de gérance, et pendant les six mois qui suivent la date de cette publication. En second lieu, le bailleur reste solidairement responsable des dettes de son locataire tant qu’il ne

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