Régimes Matrimoniaux Secondaires PDF
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Ce document couvre les régimes matrimoniaux secondaires en Belgique. Il examine les distinctions entre les régimes primaires et secondaires et décrit les différentes catégories de régimes matrimoniaux.
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COUPLE MARIÉ LES RÉGIMES MATRIMONIAUX SECONDAIRES 1 CHAPITRE 1 PRINCIPES GÉNÉRAUX SECTION 1. NOTION ET CARACTÉRISTIQUES DES RÉGIMES SECONDAIRES A. Distinction entre le régime matrimonial primaire...
COUPLE MARIÉ LES RÉGIMES MATRIMONIAUX SECONDAIRES 1 CHAPITRE 1 PRINCIPES GÉNÉRAUX SECTION 1. NOTION ET CARACTÉRISTIQUES DES RÉGIMES SECONDAIRES A. Distinction entre le régime matrimonial primaire et le régime matrimonial secondaire Le « régime matrimonial » correspond à l’ensemble des règles qui régissent de façon spécifique les relations patrimoniales entre deux personnes unies par les liens du mariage. En droit belge, comme dans la plupart des pays occidentaux, il existe deux catégories de règles qui régissent les relations patrimoniales entre deux époux. La première catégorie est constituée par les règles impératives qui s'imposent de plein droit aux époux, sans qu'ils n'aient la possibilité de les écarter ou d'y déroger lors de la conclusion de leur mariage. Ces règles constituent le régime matrimonial « primaire », parce qu'il représente la réglementation de base des effets patrimoniaux du mariage, sans égard au choix opéré quant au régime matrimonial secondaire. C'est en raison par ailleurs du caractère impératif - voire d’ordre public - des règles du régime matrimonial primaire qu’elles se trouvent classées dans le Titre V du Livre I du Code civil relatif au mariage (cf. art. 212 à 224 anc. C. civ.) qui réglementent l’ensemble des effets impératifs - voire d’ordre public - du mariage, tant sur le plan personnel que sur le plan patrimonial. La seconde catégorie est constituée par les règles qui sont laissées à l'autonomie de la volonté des époux, c'est-à-dire à leur libre appréciation en fonction de la conception qu'ils se font de leur association conjugale, de la manière dont ils entendent organiser pendant le mariage leurs relations patrimoniales, ou des caractéristiques spécifiques de leur situation familiale, professionnelle ou financière. Ces règles constituent ce que la doctrine appelle le régime matrimonial « secondaire » des époux, parce que ces règles vont venir s’ajouter, compte tenu des options qui seront prises par les époux eux-mêmes, aux règles de base qui leur sont prescrites de façon impérative. B. Distinction entre régime secondaire légal et régime secondaire conventionnel Le régime matrimonial secondaire est : - soit conventionnel, c'est-à-dire choisi par les parties avant le mariage (ou, même pendant le mariage) sous forme d’une convention matrimoniale reçue par acte notarié (art.2.3.6 du Code 2 civil), par exemple sous forme d’un contrat de séparation de biens pure et simple ; - soit légal, lorsque les futurs époux n'ont pas adopté expressément, devant notaire, une convention matrimoniale, soit parce qu’ils ignoraient qu’ils pouvaient choisir leur régime matrimonial secondaire, soit parce qu’ils ne se sont pas préoccupés de l’organisation de leurs relations patrimoniales, soit parce que, dûment informés, ils ont estimé que le régime secondaire proposé par le législateur était le régime qui était le mieux adapté à leur situation ou à leur projet conjugal. Ce régime secondaire légal, qui s’appliquera de plein droit dès le jour du mariage, est un régime de communauté de revenus et d’acquêts. Le régime matrimonial secondaire définit les règles relatives : - à la composition (active et passive) des patrimoines ; - à la gestion des patrimoines ; - à la liquidation et au partage des patrimoines. C. Tour d’horizon des règles régissant le régime matrimonial secondaire Le Titre 3 du Livre 2 du Code civil – intitulé « Les relations patrimoniales des couples - réglemente les régimes matrimoniaux secondaires en son Sous-Titre 1. Ce Sous-Titre 1 contient un ensemble de dispositions légales dont la nature et la portée doivent être clairement distinguées. Le Chapitre 1er - intitulé « Conventions matrimoniales » (art. 2.3.1 à 2.3.11 C. civ.) – comprend notamment : - les règles organisant le choix par les époux, avant leur mariage, de leur régime matrimonial secondaire ; - les règles relatives à la modification par les époux, pendant leur mariage, de leur régime matrimonial secondaire ; - les règles relatives aux effets et à la publicité de leur régime matrimonial secondaire. Le Chapitre 2 - intitulé « Dispositions générales » (art. 2.3.12 à 2.3.15 C. civ.) - : - précise qu’à défaut de conventions particulières, les règles relatives au régime légal (cf. Chapitre 3) forment le droit commun ; - comprend les règles s’appliquant à l’ensemble des régimes matrimoniaux secondaires, telles que les règles d’attribution préférentielle - en cas de divorce ou de décès - et de recel matrimonial. Le Chapitre 3 - intitulé « Régime légal » (art. 2.3.16 à 2.3.51 C. civ.) - comprend l’ensemble des règles qui seront de plein droit applicables à tous les époux qui n’ont pas conclu de convention matrimoniale. Ces règles sont aussi applicables - totalement ou partiellement - aux époux qui ont conclu une convention matrimoniale, lorsque et dans la mesure où les dispositions prises dans cette convention ne dérogent pas aux règles du régime légal. 3 Le Chapitre 4 - intitulé « Conventions qui peuvent modifier le régime légal » (art. 2.3.52 à 2.3.60 C. civ.) - comprend un certain nombre de règles applicables ou susceptibles d’être appliquées aux époux qui, bien qu’adoptant le régime légal, décident cependant d’y apporter, dans leur convention matrimoniale, l’une ou l’autre dérogation. Le Chapitre 5 - intitulé « Séparation de biens » (art. 2.3.61 à 2.3.81 C. civ.) - contient les règles applicables ou susceptibles d’être appliquées aux époux qui font le choix d’adopter un régime secondaire « séparatiste » (pur et simple ou modalisé, notamment par une clause de participation aux acquêts). On trouve aussi dans ce chapitre les règles organisant, pour les époux mariés sous un autre régime que le régime de la séparation de biens, une possibilité de demander au tribunal de substituer à leur régime matrimonial secondaire le régime de la séparation de biens (art. 2.3.78 à 2.3.80 C. civ.). Il est question, dans pareil cas, du régime de « séparation de biens judiciaire ». Et enfin, ce chapitre prévoit la possibilité, dans certaines hypothèses particulières et à certaines conditions, d’une correction judiciaire en équité dans le cadre d’un régime de séparation de biens (conventionnelle ou judiciaire) (art. 2.3.81 C. civ.). Compte tenu de ce que les dispositions du régime matrimonial secondaire sont en principe laissées à l’autonomie de la volonté des époux, il est important de repréciser que les dispositions légales contenues dans le Sous-titre 1er du Titre 3 du Livre 2 du Code civil n’empêchent pas les époux d’adopter, pour l’organisation de leurs relations patrimoniales, d’autres règles qui leur paraîtraient plus adéquates. Les époux restent dès lors libres, soit d’adopter des dérogations au régime légal autres que celles définies par le législateur dans le Chapitre 4 du Sous-titre 1er du Titre 3 du Livre 2 du Code civil, soit de choisir un autre régime matrimonial secondaire que le régime de la séparation de biens défini dans le Chapitre 5 des mêmes sous-titre, titre et livre du Code civil, sous réserve des limites exposées ci- dessous. D. Évolution des règles relatives aux régimes matrimoniaux Le droit belge des régimes matrimoniaux secondaires, et notamment le régime légal choisi par le législateur a évolué au fil du temps. Le Code Napoléon En concordance avec les principes de l’incapacité de la femme mariée et de la puissance maritale exprimés dans le Livre I du Code civil, le Livre III du Code Napoléon avait confié au mari le pouvoir de direction du ménage, et dès lors le pouvoir de gestion des intérêts patrimoniaux du ménage. Au surplus, le Code Napoléon avait opéré une distinction radicale entre les immeubles et les meubles en raison de l’importance conférée, à l’époque, au patrimoine immobilier, perçu comme la principale source de richesses d’une famille et qui était dès lors appelé à se transmettre aux héritiers par le sang, sans qu’il n’ait à être partagé avec le conjoint. Le régime légal était dès lors celui de la communauté des meubles et acquêts. 4 La communauté comprenait tous les biens meubles et les seuls immeubles qui étaient des acquêts, c’est-à-dire les immeubles acquis à titre onéreux pendant le mariage. Les immeubles possédés par les époux avant leur mariage ou recueillis à titre gratuit pendant le mariage (par donation ou par succession) dépendaient du patrimoine propre de l’époux en question. Dans ce régime, le mari gérait de manière exclusive les biens communs et ses biens propres, et il administrait au surplus les biens propres de son épouse, en percevant lui-même, au profit de la communauté, les revenus du patrimoine propre de sa femme. A côté du régime légal, le Code Napoléon prévoyait un assez large éventail de régimes secondaires conventionnels. Les lois du 20 juillet 1932, 30 avril 1958, 22 juin 1959 et 14 juillet 1976 Si des lois vont modifier les règles du régime primaire pour instaurer des dérogations au pouvoir exclusif de direction du mari (Loi du 20 juillet 1932) puis supprimer l’incapacité de la femme mariée et la puissance maritale (Loi du 30 avril 1958)1, il faudra attendre la loi du 14 juillet 1976 pour qu’intervienne une réforme globale des régimes matrimoniaux secondaires. D'une part, la loi substitue à l'ancien régime légal de la communauté des meubles et acquêts un nouveau régime légal de communauté dans lequel le patrimoine commun ne comprend plus que les revenus et les acquêts. D’autre part, cette loi va supprimer toute prééminence quelconque du mari dans la gestion du patrimoine commun et des patrimoines propres des époux. Le législateur maintient par ailleurs expressément dans le Code civil la possibilité pour les époux d'adopter un régime conventionnel de communauté ou un régime conventionnel de séparation de biens. Il supprime, par contre, d’autres régimes conventionnels du Code Napoléon considérés comme désuets. La loi du 22 juillet 2018 La loi du 22 juillet 2018 a apporté au droit des régimes matrimoniaux des modifications de différents ordres. 1 Par manque de temps et compte tenu de l'ampleur de la réforme, le législateur belge, en 1958, n’était pas encore parvenu à opérer la réforme des régimes matrimoniaux secondaires et il laissa dès lors telles quelles toutes les règles qui régissaient les régimes de communauté, y compris celles qui organisaient la concentration des pouvoirs de gestion entre les mains du mari. La seule modification que le législateur fut en mesure d'opérer rapidement dans le droit des régimes matrimoniaux secondaires fut relative au régime de la séparation de biens pure et simple. Le pouvoir du mari d’intervenir dans la gestion des biens propres de son épouse fut supprimé par la loi du 22 juin 1959, et la femme mariée ne put dès lors, à l'époque, mettre réellement à profit la pleine capacité juridique qui venait de lui être octroyée qu'en excluant les régimes secondaires de communauté et en choisissant le régime de la séparation de biens. C'est cette situation transitoire particulière qui a expliqué, en Belgique, le développement, dans la pratique, du régime conventionnel de la séparation de biens avec société d'acquêts. Même lorsque les époux qui adoptaient ce régime choisissaient, dans les dispositions de leur contrat de mariage, de soumettre le fonctionnement de la société d'acquêts proprement dite aux règles applicables à la communauté réduite aux acquêts, l'épouse conservait néanmoins, à la différence des régimes de communauté, le pouvoir de gérer elle-même son patrimoine propre. 5 1) Certaines règles, exclusivement applicables en régime de communauté, ont été étendues à tous les régimes matrimoniaux secondaires (voir les articles 1389/1 à 1389/3 de l’ancien Code civil2). 2) Le législateur a entendu clarifier différentes imprécisions relatives au statut propre ou commun de certains biens en régime de communauté (cf. infra). 3) Le législateur a introduit, aux articles 1469/1 à 1469/13 de l’ancien Code civil3, le régime matrimonial de la participation aux acquêts. 4) Le législateur contraint désormais les époux qui adoptent un régime de séparation de biens à décider s’ils acceptent ou non d’assortir leur régime matrimonial d’une clause par laquelle ils adopteraient le régime complémentaire de la participation aux acquêts, ou à tout le moins d’une clause de « correction judiciaire en équité » pour l’hypothèse où il s’avérerait que leur régime aurait entraîné une iniquité manifeste entre leurs situations patrimoniales respectives. Cette loi est entrée en vigueur le 1er septembre 2018. Sur le plan du droit transitoire, les règles de la loi de 2018 s’appliquent aux époux qui contractent mariage à compter de cette date et à ceux, déjà mariés, qui procèdent, après le 1er septembre 2018, à une modification de leur régime matrimonial entraînant une dissolution de celui-ci (c’est-à-dire notamment aux époux qui adopteraient le régime de la séparation de biens pure et simple alors qu’ils étaient jusque-là mariés sous le régime légal). Elles s’appliquent aussi immédiatement, pour les effets futurs du régime, aux époux mariés avant le 1er septembre 2018 dont le régime matrimonial n’était pas dissous à cette date, sans préjudice toutefois des règles conventionnelles insérées par les époux dans leur convention matrimoniale. La loi du 19 janvier 2022 & la recodification du Livre 2.3 du Code civil Dans le cadre de la recodification du Code civil4, une proposition de loi n° 1272/001 du 20 mai 20205 a suggéré l’insertion d’un Livre 2 intitulé « Les personnes, la famille et les relations patrimoniales des couples », au sein duquel figurerait un Titre 3 « Les relations patrimoniales des couples ». Selon les auteurs de la proposition de loi, il s’agit en cette matière d’une recodification à droit constant, c'est-à-dire qu’elle ne modifierait pas sur le fond les dispositions légales mais viserait à réordonner, moderniser et uniformiser les textes parfois dispersés, désuets ou encore équivoques de l’ancien Code civil. Cependant, certaines nouveautés ont néanmoins été introduites. De surcroit, par le biais de cette réforme, le législateur en a profité pour insérer, dans le Livre 2 Titre 3 du Code civil, un Sous-titre 2 concernant le Registre central des conventions matrimoniales, jusque-là réglementé dans une loi distincte6. La loi du 19 janvier 2022 est entrée en vigueur le 1er juillet 2022. 2 Ces articles sont désormais devenus les articles 2.3.13 à 2.3.15 du Code civil. 3 Ces articles sont désormais devenus les articles 2.3.65 à 2.3.77 du Code civil. 4 Cette refonte a débuté avec l’adoption de la loi du 13 avril 2019 portant création d’un Code civil et y insérant le Livre 8 intitulé « La preuve ». 5 Cette proposition concerne non seulement les régimes matrimoniaux mais également les successions, donations et testaments. 6 La loi du 13 janvier 1977 portant approbation de la Convention relative à l’établissement d’un système d’inscription des testaments, faite à Bâle le 16 mai 1972 et portant introduction d’un registre central des contrats de mariage. 6 Aucune disposition transitoire spécifique n’a été prise de manière telle qu’il y a lieu d’appliquer la règle générale contenue à l’article 1.2 C. civ. Cette disposition est libellée comme suit : Article 1.2 du Code civil. Application de la loi dans le temps La loi ne dispose que pour l’avenir. Elle n’a pas d’effet rétroactif à moins que cela soit indispensable à la réalisation d’un objectif d’intérêt général. Sauf disposition contraire, la loi nouvelle est applicable non seulement aux situations nées après son entrée en vigueur, mais aussi aux effets futurs de situations nées sous l’empire de la loi ancienne qui se produisent ou perdurent sous la loi nouvelle, pour autant qu’il ne soit pas ainsi porté atteinte à des droits déjà irrévocablement fixés. Par dérogation à l’alinéa 2, la loi ancienne reste applicable aux contrats conclus sous l’empire de cette loi, sauf si la loi nouvelle est d’ordre public ou impérative ou si elle prescrit son application aux contrats en cours. Selon Hélène CASMAN7, cela implique concrètement que : « Les dispositions nouvelles, le vocabulaire nouveau et les nouveaux numéros ne s’appliqueront qu’aux conventions matrimoniales, aux actes et aux faits juridiques qui sont conclues, qui sont accomplis ou qui ont lieu après leur entrée en vigueur. Pour les époux mariés sous le régime légal avant l’entrée en vigueur de la loi, les règles nouvelles s’appliqueront aux actes et faits juridiques qui ont lieu après leur entrée en vigueur, mais aussi aux effets futurs d’actes ou de faits juridiques antérieurs. Ceci cependant sans que les règles nouvelles puissent porter atteinte à des droits déjà irrévocablement fixés ou à des situations définitivement accomplies avant leur entrée en vigueur. Pour les époux mariés sous un régime conventionnel avant l’entrée en vigueur de la loi, les règles nouvelles qui dérogeraient aux clauses du régime adopté, ne s’appliqueront pas, aucune de ces règles nouvelles n’étant impérative. Dans les procédures en cours au moment de l’entrée en vigueur de la loi, on continuera à utiliser les articles de l’ancien Code civil ». 7H. CASMAN, « Les régimes matrimoniaux intégrés dans le Livre 2 du nouveau Code civil : quoi de neuf ? » in Chroniques notariales, vol. 74, Bruxelles, Larcier, avril 2022, p. 44. 7 SECTION 2. LE CHOIX D’UN RÉGIME MATRIMONIAL CONVENTIONNEL A. La liberté de choix et les limites de cette liberté Le principe est celui de la liberté contractuelle, comme le rappelle l'article 2.3.1 du Code civil. Si les règles légales relatives aux régimes matrimoniaux secondaires sont, en principe, supplétives - puisque les époux choisissent librement le contenu de leur régime matrimonial secondaire - il en existe cependant un certain nombre qui, conformément à la volonté explicite ou implicite du législateur, doivent être considérées comme impératives. Le principe de la liberté contractuelle connaît donc des limites, soit communes à l’ensemble des régimes matrimoniaux secondaires, soit particulières à certains régimes. Les limites générales à l’ensemble des régimes matrimoniaux secondaires Les restrictions de fond L’article 2.3.1 du Code civil détermine les limites de fond qui restreignent la liberté des époux dans la définition du contenu des règles de leur régime matrimonial secondaire. Ces limites de fond sont les suivantes : - le respect de l'ordre public8 (comme les règles portant sur l’autorité parentale ou la tutelle) ; - le respect des dispositions impératives, notamment celles du régime primaire, contenues dans les articles 212 à 224 de l’ancien Code civil et celles sur la réserve héréditaire ; - le respect du principe de cohérence du régime matrimonial entre les règles contenues dans leur convention matrimoniale et le régime matrimonial pour lequel les (futurs) époux ont opté. Les restrictions formelles Les époux doivent conclure leur convention matrimoniale - avant ou pendant le mariage - par acte notarié conformément à l’article 2.3.6 du Code civil. Cette exigence de forme est prescrite à peine de nullité. L’autonomie de la volonté des époux, d’un point de vue formel, est par ailleurs limitée par l’article 2.3.3 du Code civil. En vertu de cette disposition, les époux ne peuvent adopter, dans leur convention matrimoniale ou lors de la modification de leur régime matrimonial, un régime secondaire par simple référence à une législation abrogée (par exemple, « le régime légal du Code Napoléon »). Cependant, cette disposition n'empêche pas les époux d'adopter un régime matrimonial secondaire abrogé, mais ils doivent alors veiller à énoncer expressément dans leur contrat les règles qui régiront le fonctionnement et la liquidation du régime choisi. Cette hypothèse est toutefois très théorique. Pour le surplus, la problématique du choix de la loi applicable à un régime matrimonial, 8 Seule la notion d’ordre public est contenue à l’article 2.3.1 du Code civil car, d’après l’exposé des motifs de la proposition n° 1272, les bonnes mœurs sont englobées dans le concept plus général d’ordre public. Voy. également l’article 1.3, al. 3 du Code civil. 8 lorsqu’intervient un élément d’extranéité, et celle du choix d’un régime matrimonial de droit étranger, seront étudiées au cours de droit international privé. Les limites particulières à certains régimes matrimoniaux secondaires Le législateur belge, en organisant et réglementant lui-même - fût-ce de manière limitée - deux régimes secondaires susceptibles d'être adoptés par les époux, c'est-à-dire le régime de la communauté et le régime de la séparation de biens, a énoncé, pour chacun de ces régimes, certaines règles qu'il a lui- même qualifiées d'impératives ou qui doivent être considérées comme impératives. Les époux qui choisissent, par convention matrimoniale, un régime conventionnel de communauté ou le régime de la séparation de biens, ne peuvent dès lors, pas déroger à ces règles impératives. Tel est le cas de certaines règles applicables au régime légal et, plus particulièrement, les règles relatives à la gestion du patrimoine commun et des patrimoines propres des époux (voir l’article 2.3.52 du Code civil). Tel est le cas également de certaines règles particulières applicables aux modifications susceptibles d’être apportées au régime légal (art. 2.3.57 et 2.3.58 du Code civil). Pour les régimes de séparation de biens, un exemple de disposition impérative peut être trouvé dans l’article 2.3.62, alinéa 1er du Code civil, qui a trait aux modes de preuve de la propriété d'un bien vis-à- vis des tiers. B. L'exercice du choix : la convention matrimoniale Notion La convention matrimoniale est un contrat accessoire au mariage passé devant notaire, avant le mariage, par lequel les futurs époux adoptent, pour la durée de leur mariage, les règles de leur régime matrimonial secondaire9, ou le contrat conclu par les époux, pendant le mariage, par lequel ces époux décident de modifier leur régime matrimonial secondaire applicable jusqu’alors10. Les époux peuvent aussi, dans cette convention matrimoniale, conclure certains pactes successoraux relatifs à leurs successions respectives, soit pour augmenter leurs droits (par le biais d’une institution contractuelle), soit pour les restreindre (par le biais d’un pacte « Valkeniers »). Ces pactes seront examinés lors du cours de patrimonial de la famille, dispensé aux étudiants du Master en droit. Enfin, même si la convention matrimoniale est traditionnellement appréhendée comme un contrat patrimonial, on ne peut plus exclure aujourd’hui, compte tenu de la plus grande autonomie laissée aux individus dans le domaine de leurs relations personnelles, que les époux abordent, dans leur convention matrimoniale, certaines questions relatives à leurs relations personnelles ou à leurs relations avec leurs enfants, dans le respect des règles du régime primaire et des règles d’ordre public. 9 Avant la recodification, il était question de « contrat de mariage ». 10 Avant la recodification, il était question d’« acte modificatif du régime matrimonial ». 9 Les conditions de validité de la convention matrimoniale Les règles de droit commun La convention matrimoniale est, comme tout contrat, soumise aux règles générales définissant les conditions de validité des contrats (art. 5.27 et suivants du Code civil). Les conditions spécifiques de validité 1) Les conditions de fond 1) L'article 2.3.4 du Code civil soumet le mineur habilité à contracter mariage à un régime d'assistance - dérogation au droit commun de la représentation - pour la conclusion de sa convention matrimoniale. Il doit en effet être assisté, en principe, par ses père et mère ou, à tout le moins, par un d’entre eux. Pour rappel, le mariage d’un mineur implique nécessairement une dispense d’âge qui doit être donnée pour motifs graves par le tribunal de la famille (art. 145 anc. C. civ.). Dans le cadre de cette procédure, le tribunal, s’il estime qu’il existe des « motifs graves » justifiant la célébration du mariage, veillera à constater le consentement des père et mère du mineur à ce mariage. Si les père et mère refusent leur consentement, le tribunal peut autoriser lui-même le mariage s’il juge le refus abusif (art. 148 anc. C. civ.) (voir supra). On concevrait mal, dans une telle situation, que les père et mère du mineur acceptent de l’assister pour la conclusion de son contrat de mariage. Dès lors l’article 2.3.4., alinéa 2 du Code civil prévoit que le tribunal, à défaut d’assistance, peut aussi donner son autorisation à la conclusion d’une convention matrimoniale. Les règles sont identiques pour la modification d’un régime matrimonial durant la minorité. 2) Pour les majeurs qui font l’objet d’un régime de protection, leur éventuelle incapacité dépendra de la décision qui aura été prise par le juge de paix (voy. supra). Si une personne protégée a été expressément déclarée incapable de conclure une convention matrimoniale, l’article 2.3.5 du Code civil prévoit que le juge peut néanmoins, sur la base du projet rédigé par le notaire, l’autoriser à conclure une convention matrimoniale ou, dans des cas particuliers, autoriser l’administrateur à le représenter ou à l’assister pour ce faire. 2) Les conditions de forme La convention matrimoniale est un contrat solennel qui doit, à peine de nullité, être reçu par un notaire (art. 2.3.6 C. civ.). 10 La publicité de la convention matrimoniale Une formalité générale de publicité Le Sous-titre 2 du Titre 3 du Livre 2 du Code civil (articles 2.3.82 à 2.3.88) intègre, dans le Code civil, les règles relatives au Registre central des conventions matrimoniales11. Selon l’article 2.3.9, al. 1 du Code civil juncto l’article 4 de l’Arrêté royal du 23 juin 2022, le notaire a pour obligation d’y enregistrer toutes les conventions matrimoniales qu’il reçoit dans les 15 jours de la passation de l’acte. A défaut d’inscription, les clauses dérogatoires au régime légal ne pourront être opposées aux tiers qui ont contracté avec les époux dans l’ignorance de leurs conventions matrimoniales (art. 2.3.11 C. civ.). Les formalités particulières de publicité La convention matrimoniale doit être transcrite au Bureau compétent de l’Administration générale de la documentation patrimoniale, en vertu de l'article 3.30 du Code civil, lorsqu’elle opère un transfert d'un droit réel immobilier (par exemple une clause d'apport de l'immeuble d'un des époux au patrimoine commun). Le défaut de transcription rend l'acte inopposable aux tiers de bonne foi qui auraient contracté dans l'ignorance de l'acte non transcrit. La convention matrimoniale doit également, à la diligence du notaire qui la reçoit, faire l'objet d'une inscription au registre central des testaments lorsqu'elle contient un pacte successoral autorisé (article 4.261, §2 C. civ.). Ces dispositions auront en effet une incidence sur la liquidation de la succession du conjoint prémourant 12. L’entrée en vigueur des dispositions de la convention matrimoniale Conformément à l’article 2.3.10 du Code civil, le régime matrimonial secondaire - soit légal, soit conventionnel - prend effet entre époux, nonobstant toute convention contraire, à la célébration du mariage. Il ne produira dès lors jamais d'effets si le mariage n'est pas célébré entre les époux. Il en résulte que : les époux, s'ils veulent conclure une convention matrimoniale, doivent nécessairement le faire avant la célébration du mariage, à défaut de quoi ils se trouveront mariés sous le régime légal en toutes ses dispositions (art. 2.3.12, al. 2 C. civ.); 11 Les dispositions étaient, jusqu’alors insérées dans la loi du 13 janvier 1977 portant approbation de la Convention relative à l’établissement d’un système d’inscription des testaments, faite à Bâle le 16 mai 1972 et portant introduction d’un registre central des contrats de mariage, modifiée à plusieurs reprises. 12 Le défaut d'inscription n'entraînera aucune conséquence ni sur la validité ni sur l'opposabilité de la clause de la convention matrimoniale. L'absence d'accomplissement de la formalité ne pourrait qu'engager la responsabilité du notaire si, lors du décès, la succession avait été liquidée - ce qui sera très rare dans la pratique - dans l'ignorance des clauses de la convention matrimoniale avantageant le conjoint survivant. 11 les époux ne peuvent pas modaliser ou retarder l'entrée en vigueur des dispositions de leur régime matrimonial secondaire qui prendront nécessairement effet dès le jour de la célébration du mariage. Par ailleurs, toute modification de régime matrimonial avant la célébration du mariage requiert la présence et le consentement simultané de toutes les personnes parties à la convention matrimoniale conclue initialement (art. 2.3.7 C. civ.). La modification pendant le mariage du régime matrimonial secondaire À tout moment, pendant leur mariage, les époux peuvent, d’un commun accord, se présenter devant un notaire afin que celui-ci reçoive une convention matrimoniale par laquelle ils modifieraient leur régime matrimonial existant ou adopteraient un autre régime matrimonial (art. 2.3.8 C. civ.). Les époux seront éventuellement tenus de faire procéder préalablement à un inventaire de leurs biens, selon que la modification entraînera ou non la liquidation du régime matrimonial préexistant. Les mêmes conditions de forme et de publicité que pour la convention initiale sont applicables à la convention modificative (voy. notamment l’art. 2.3.9 C. civ.). On n’approfondira pas davantage cette matière dans le cadre de ce cours. Elle sera reprise dans le cadre du cours de droit notarial du couple dispensé dans le programme du master de spécialisation en notariat. SECTION 3. LA DISSOLUTION DU RÉGIME MATRIMONIAL A. Les causes et dates de dissolution du régime Le régime matrimonial des époux prend fin pour différentes causes, la date de dissolution du régime telle que légalement définie variant en fonction de celles-ci. Le décès d’un des époux Le décès d’un des époux met fin au mariage des époux (art. 227 anc. C. civ.). La dissolution du régime matrimonial s’opère à la date du décès, que ce soit entre les époux (c’est-à- dire plus exactement le conjoint survivant et les héritiers du conjoint prédécédé) ou vis-à-vis des tiers. La date de dissolution du régime est donc unique. Le divorce Le divorce opérant dissolution du mariage, il implique la dissolution et la liquidation-partage du régime matrimonial. La dissolution du régime de communauté intervient à deux dates différentes, selon que sont prises en considération les relations entre les époux eux-mêmes ou les relations des tiers avec les 12 époux. Les règles permettant de déterminer ces deux dates sont exprimées aux articles 1278 et 1304 du Code judiciaire. Les relations entre époux 1°) Lorsque le divorce a été prononcé pour désunion irrémédiable, la dissolution du régime légal rétroagit, dans les relations entre les époux, à la date à laquelle l’action a été intentée13, et lorsqu’il y a plus d’une action14, à la date à laquelle la première action a été intentée, qu’elle ait abouti ou non15 (art. 1278, al. 2 C. jud.). Il résulte de ce système que, dans un régime de communauté, les biens acquis par les époux ou les dettes contractées par les époux ou les actes de gestion accomplis par les époux postérieurement au jour de la première demande en divorce n’auront plus à la dissolution du régime, dans les relations entre les époux, été soumis aux règles de composition ou de gestion de leur régime de communauté, mais aux règles de droit commun et, notamment, les règles de gestion d’une indivision fortuite (art.3.69 et suivants Code civil). On parle d’ailleurs d’« indivision post-communautaire ». Toutefois, l'article 1278, al. 4 du Code judiciaire permet au tribunal de décider, s'il l'estime équitable en raison de circonstances exceptionnelles propres à la cause, qu'il ne sera pas tenu compte, dans la liquidation de la communauté, de l'existence de certains avoirs constitués ou de certaines dettes contractées depuis le moment où les époux se sont séparés. Il existe dès lors une possibilité d’exclure, depuis le jour de la séparation de fait des époux, l’application normale des règles relatives à la composition active ou passive de la communauté, en soustrayant du patrimoine commun certains biens acquis ou certaines dettes contractées avant l’introduction de la première demande en divorce qui avaient le statut de biens communs ou de dettes communes. 2°) Lorsque le divorce est prononcé sur la base du consentement mutuel des époux, la dissolution du régime légal s'opère rétroactivement à la date du dépôt de la requête en divorce (art. 1304, al. 2 C. jud.). En pratique, la convention préalable au divorce par consentement mutuel conclue et signée par les époux aura cependant clôturé entre les époux, de façon transactionnelle, tous leurs comptes généralement quelconques, en prenant en considération la situation patrimoniale telle qu’elle existait au jour des négociations ayant conduit à l’accord constaté dans la convention préalable. Dans leurs relations patrimoniales entre eux, les époux prévoient dès lors généralement, dans une clause de leur convention qui les liera irrévocablement dès la dissolution du mariage, que tous les biens acquis ou toutes les dettes contractées par chacun d’entre eux après le jour de la signature de la convention préalable ou encore à la séparation de fait leur seront propres. 13 C’est-à-dire soit la date de la citation par exploit d’huissier, soit la date du dépôt de la requête au greffe du tribunal de la famille. 14 Par exemple une demande principale introduite par requête et une demande reconventionnelle introduite par voie de conclusions. 15 Donc même si cette demande n'a pas abouti, c'est-à-dire même si elle n'a jamais été poursuivie ou même si elle avait été déclarée non fondée. 13 Les relations à l’égard des tiers Dans les relations des époux à l'égard des tiers, les effets patrimoniaux du divorce pour cause de désunion irrémédiable ou du divorce par consentement mutuel et, dès lors, la dissolution du régime légal ne s'opère qu’à partir de la mention associée à l’acte de mariage dans la B.A.E.C. ou de l’établissement de l’acte de divorce (art. 1278, al. 1 et 1304, al. 1 C. jud.)16. Il en résulte que les tiers peuvent continuer à se prévaloir des règles régissant le régime matrimonial des époux jusqu’à cette date. Dès lors, dans un régime matrimonial de communauté, le s dettes contractées par les époux jusqu’à ce jour pourront continuer à être, aux yeux des créanciers, des dettes communes, si elles rentrent dans cette catégorie conformément aux dispositions régissant la composition passive de la communauté. De la même façon, les revenus perçus par les époux, les économies constituées par les époux ou les biens acquis à titre onéreux par les époux - sauf s’ils sont qualifiés de propres en vertu des articles 2.3.18 et 2.3.19 du Code civil - pourront continuer à être considérés par les créanciers comme des biens communs et servir de gage à l’exécution de leurs créances qui peuvent être poursuivies sur le patrimoine commun. La transformation du régime matrimonial impliquant la dissolution du régime précédent Dans certaines situations, le régime matrimonial ayant existé entre les époux est dissous sans pour autant que le mariage ne le soit. La séparation de corps La séparation de corps n’opère pas dissolution du mariage ; il s’agit seulement d’un mode de relâchement du lien conjugal mais qui entraîne la séparation de biens (article 311 anc. C. civ.). En conséquence, si le régime matrimonial des parties était le régime légal ou un autre régime de communauté, il sera dissous. La date de dissolution du régime légal est déterminée de la même manière qu’en cas de divorce (cf. art. 1278 et 1304 C. jud., cf. supra). La séparation de biens judiciaire La séparation de biens judiciaire peut être prononcée par jugement à la demande d’un des époux lorsqu’il apparaît que, par le désordre des affaires de son conjoint, sa mauvaise gestion ou la dissipation de ses revenus, le maintien du régime existant met en péril les intérêts de l’époux demandeur (art. 2.3.78 et s. C. civ.). Elle implique également une liquidation-partage si elle substitue un régime de séparation de biens au régime préexistant (art. 2.3.79, §2 C. civ.). 16 Il n’y a établissement d’un acte de divorce que si l’acte de mariage n’est pas disponible dans la B.A.E.C. (art. 1275, §2, al. 3 et 1303, al. 3 C. jud.). S’il est disponible, le jugement ou l’arrêt de divorce fait l’objet d’une mention dans la B.A.E.C., associée à l’acte de mariage des personnes divorcées (art. 1275, §2, al. 2 et 1303, al. 2 C. jud.) (voy. supra). 14 La dissolution du régime précédent s’opère rétroactivement à la date de la demande tant dans les relations entre époux eux-mêmes qu’à l’égard des tiers (art. 2.3.79, §1er C. civ.). Certains changements de régime matrimonial Certains changements de régime matrimonial opérés durant le mariage impliquent une dissolution du régime précédent si les changements opérés impliquent l’adoption d’un autre régime matrimonial ayant des caractéristiques essentielles différentes du précédent (voy. l’art. 2.3.41, 4°C. civ. pour la modification d’un régime légal). On sera ainsi en présence d’un régime de communauté si le patrimoine commun comprend, de plein droit, les revenus professionnels des époux et, par voie de conséquence, les biens acquis ou les économies réalisées au moyen desdits revenus professionnels. Si, suite à la modification à opérer, ces biens n’en font plus partie, il faut considérer que le régime est dissous. Il en est ainsi d’époux mariés sans avoir conclu une convention matrimoniale, dès lors mariés sous le régime légal de la communauté de biens, qui souhaitent par la suite conclure une convention matrimoniale de séparation de biens. La dissolution et la liquidation du régime préexistant est inévitable. Les articles 2.3.10, alinéa 2 et 2.3.11, alinéa 2 du Code civil retiennent une double date pour la prise d’effet du changement de régime matrimonial. Entre époux, les modifications conventionnelles ont effet à dater de l’acte modificatif. Vis-à-vis des tiers, elles n’ont effet que du jour de l’inscription de l’acte modificatif dans le registre central des conventions matrimoniales, sauf si, dans leurs conventions conclues avec des tiers, les époux ont informé ceux-ci de la modification intervenue. B. La procédure de liquidation-partage judiciaire La dissolution d’un régime matrimonial mène en principe à une liquidation-partage, soumise à la réglementation de la procédure de partage en général, réglementée aux articles 1205 et suivants du Code judiciaire. La priorité est accordée, en vertu de l’article 1205 du Code judiciaire, au partage amiable, qui ne requiert aucune forme particulière (si ce n’est le recours à un acte notarié en présence d’un ou plusieurs immeubles). A défaut d’accord quant au partage, le partage ne sera plus amiable mais judiciaire, tel que le consacre l’article 1207 du Code judiciaire. La procédure de partage judiciaire a été largement balisée et remaniée par la loi du 13 août 2011 afin d’en améliorer l’efficacité en donnant au notaire-liquidateur un rôle plus actif tout en laissant une meilleure place aux accords entre parties (voy. les art. 1207 et suiv. C. jud). A la demande d’une des parties, le tribunal de la famille, lorsqu’il prononce le divorce ou ultérieurement, peut désigner un notaire chargé de liquider et partager le régime matrimonial des parties. 15 Un seul notaire est désigné, de préférence choisi par les parties et à défaut par le juge (art. 1210, § 1er, C. jud.). Le notaire liquidateur est impartial. Après l’ouverture officielle des opérations de liquidation et de partage par la rédaction d’un procès- verbal, et le cas échéant, l’établissement d’un inventaire, chaque partie fera valoir à l’autre ses revendications. Si les tentatives d’accord et conciliation des parties auxquelles procédera le notaire n’aboutissent pas, le notaire rédigera un état liquidatif déterminant les droits de chacune des parties et contenant le projet de partage des biens. Si une partie ou les parties ne sont pas d’accord avec l’état liquidatif et le projet de partage, elles ont le droit de le contester par des « contredits », dont le notaire dressera procès-verbal (appelé procès- verbal de « dires et contredits »). Il appartiendra alors au tribunal de la famille de trancher ces contredits soit en homologuant l’état liquidatif, soit en le renvoyant au notaire pour qu’il le rectifie. Si aucun contredit n’est formulé, ou après application de la décision judiciaire qui les aura tranchés, le notaire attribue les lots et établit le procès-verbal de clôture de la liquidation-partage. Ces opérations ne sont, en pratique, généralement pas effectuées concomitamment à la dissolution du régime (hormis en cas de changement de régime matrimonial et de divorce par consentement mutuel). Il arrive qu’il ne soit procédé à la liquidation-partage que bien après la dissolution parce que les époux ou indivisaires (héritiers du défunt) n’ont pas estimé nécessaire de le faire avant, soit en raison d’autres difficultés liées au conflit qui les opposent. En cas de procédure judiciaire et même si le législateur a tenté de l’éviter en fixant des délais et des sanctions au non-respect de ceux-ci, il est possible que la procédure, si elle doit comporter une « phase judiciaire », prenne plusieurs années. On n’approfondira pas davantage cette matière dans le cadre de ce cours. Elle sera reprise dans le cadre du cours de droit judiciaire notarial dispensé dans le programme du master de spécialisation en notariat. C. Les règles de liquidation et de partage quel que soit le régime secondaire Le législateur a fait le choix, dans la loi du 22 juillet 2018, de rendre applicable à tous les époux, quel que soit leur régime matrimonial secondaire, certaines dispositions antérieurement réservées au régime légal, considérant qu’il n’était pas justifié de les réserver à ce seul régime dès lors qu’il s’agit de dispositions qui protègent le milieu de vie et l’exercice de la profession des conjoints ou qui sanctionnent la soustraction frauduleuse de biens. Ce choix a, par ailleurs, été confirmé lors de la recodification. Attribution préférentielle Les articles 2.3.13 et 2.3.14 du Code civil distinguent deux hypothèses. 16 Dissolution du régime matrimonial par le décès d’un des époux Si le régime matrimonial se dissout par le décès, dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial (précédant nécessairement la liquidation de la succession), le conjoint survivant peut demander que lui soient attribués par préférence certains biens destinés à lui permettre de conserver son cadre de vie ou de continuer à exercer sa profession. Il peut en effet demander que lui soit attribué : - un des immeubles servant au logement de la famille (le logement principal de la famille ou un autre logement) ; - et/ou les meubles meublants qui le garnissent ; - les biens qu’il utilise pour l’exercice de sa profession ou d’exploitation de son entreprise : il peut s’agir de biens meubles ou immeubles (voir la notion de biens professionnels infra). Les biens doivent être communs ou, désormais, appartenir au patrimoine « qui est en indivision exclusivement entre les époux ». La seconde catégorie de biens vise les biens indivis d’époux mariés sous un régime de séparation de biens pure et simple. Peu importe les proportions dans lesquels les époux sont copropriétaires indivis. Il ne faut donc pas nécessairement une indivision 50-50. La seule exigence est que seuls les époux soient copropriétaires des biens (à l’exclusion de tiers). Si en raison de l’attribution préférentielle, le conjoint survivant obtient davantage que la moitié du patrimoine commun ou du patrimoine indivis, il paiera une soulte à la succession. L’attribution préférentielle constitue en effet une dérogation au partage en nature mais non au partage par moitié. Dissolution du régime matrimonial par divorce ou séparation de corps pour désunion irrémédiable, ou en raison d’une séparation de biens judiciaire Si le mariage prend fin par un divorce ou une séparation de corps pour désunion irrémédiable (et non par consentement mutuel, dès lors que dans ce cas, les époux auront décidé de commun accord du sort de leurs biens dans les conventions préalables), ou en raison d’une séparation de biens judiciaire (cfr infra), chacun des époux peut, au cours des opérations de liquidation, demander au tribunal de lui attribuer un ou les biens visés ci-dessus. Le tribunal statuera « en considération des intérêts que chacun des époux peut faire valoir et tenant compte des capacités financières » de celui qui devrait payer éventuellement une soulte à l’autre. Ces critères laissent un pouvoir d’appréciation conséquent au tribunal. Il est prévu que l’époux victime d’un fait de violence conjugale au sens large (voir les infractions pénales énoncées à l’article 2.3.14, § 2, al. 2 C. civ., identiques à ceux induisant une indignité successorale) pour lequel l’autre a été condamné comme auteur, coauteur ou complice, a, quant à lui, droit à cette attribution s’il la demande (sauf circonstances exceptionnelles). 17