Synthèse Complet - Partie TCC PDF

Summary

Ce document décrit les bases de la psychologie clinique et plus précisément la thérapie cognitivo-comportementale (TCC). Il explique les différentes approches et méthodes utilisées en TCC ainsi que des exemples pratiques. Le document met également en avant l'importance de la relation thérapeute-patient et la pratique basée sur des données probantes.

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Libois Romane PSYCHO CLINIQUE (TCC) : introduction (1) 1. DEFINITION GENERALE « (...) On entend par exercice de la psychologie clinique, l'accomplissement habituel d'actes ayant pour objet ou présentés comme ayant pour objet, à l'égard d'un être humain et dans un...

Libois Romane PSYCHO CLINIQUE (TCC) : introduction (1) 1. DEFINITION GENERALE « (...) On entend par exercice de la psychologie clinique, l'accomplissement habituel d'actes ayant pour objet ou présentés comme ayant pour objet, à l'égard d'un être humain et dans un cadre de référence scientifiquement étayé de psychologie clinique, la prévention, l'examen, le dépistage ou l'établissement du psychodiagnostic de souffrances psychiques ou psychosomatiques, réelles ou supposées, et la prise en charge ou le soutien de cette personne. » (Art. 68/1 §3 de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l’exercice des professions des soins de santé) -> La Loi elle-même indique que la pratique doit se baser sur la Science. Les TCC évoluent avec le temps grâce aux nouvelles connaissances scientifiques, cette perpétuelle évolution a donné 3 vagues différentes (/!\ différentes ne veut pas dire que la précédente n’est plus utilisée, mais de nouveaux modèles se développent et permettent d'évoluer) : -1e vague = thérapie comportementale (agit sur le comportement) -2e vague = thérapies cognitives (agit sur les pensées) -3e vague = thérapies cognitivo-comportementales (travaille sur l’acceptation, vise un changement) La thérapie cognitivo-comportementale est une intervention psychologique orientée vers le problème, basée sur des principes scientifiques et dont l’efficacité a été démontrée empiriquement pour un grand nombre de troubles psychologiques (anxiété, dépression schizophrénie,…) -> la démarche expérimentale est très importante ici. Elle existe sous différents formats : individuel, de groupe, familial, de couple. -> Son objectif est de réduire les symptômes et d’améliorer la qualité de vie en remplaçant les chaînes de réponses émotionnelles, comportementales et cognitives inadaptées par des réponses plus adaptées. 2. EVIDENCE BASED PRACTICE (EBP) principes généraux La pratique est fondée sur des données probantes. Pour un soignant, pratiquer l’EBP, c’est combiner 3 éléments : -les valeurs, caractéristiques et attentes du client : les caractéristiques propres au patient individuel, sa propre conscience/connaissance de ses difficultés -sa propre expertise clinique : on ne peut exercer que par rapport à ce que l’on connait ou ce que l’on pense pouvoir appliquer -> caractéristiques propres au thérapeute, sa formation, son histoire de vie, avec quelle problématiques il/elle est plus familier ou moins à l’aise Libois Romane -les meilleures données de recherche disponibles : on se base sur des résultats de recherche, sur la littérature fondée sur des données probantes pour nous guider dans nos décisions cliniques -> L’EBP (Evidence-Based Practice) part du patient et est orientée vers une décision clinique. exemples pratiques Vous travaillez au sein d’une institution qui prend en charge des adultes souffrant d’un trouble dépressif. Il vous est demandé de créer un groupe thérapeutique centré sur la gestion de la colère avec les personnes hospitalisées. Que répondez-vous ? d’abord vérifier ce qui a déjà été fait auparavant et si c’est applicable à ce cas particulier de la clinique, suis-je moi-même à l’aise avec la gestion de la colère et ai-je des connaissances suffisantes dessus ? est-ce commencer par un groupe est vraiment la meilleure des idées sachant que les caractéristiques de ces patients sont qu’ils ont du mal à sortir de leur lit par exemple ? Une jeune femme se rend à votre consultation avec une demande de prise en charge d’un trouble alimentaire. Lors du bilan, vous réalisez qu’elle souhaite, avant tout, se centrer sur l’établissement d’un plan alimentaire. Que faites- vous ? réorientation vers un médecin ou un diététicien, si pas de volonté de travailler sur le plan psychologique c’est peut-être que quelque chose se cache derrière cette demande ? (/!\ on se limite à la demande du patient, on ne peut pas l’obliger à prendre une toute autre direction que celle qu’il envisage) L’un de vos patients s’est installé à l’étranger. Il souhaite poursuivre les consultations psychologiques avec vous, via Whatsapp. Que décidez-vous ? est-ce que ce genre de thérapie peut se faire par écrit, et surtout en différé ? est-ce que ça pourrait biaiser, mettre à mal le processus thérapeutique (qu’est-ce qu’en dit la littérature scientifique ?) ? ai- je bien compris la demande et les attentes de ce patient ? c’est quand même de l’ordre du privé, est-ce que j’accepte et si oui comment je protège les données échangées ? 3. EMPIRISME COLLABORATIF Selon le principe d’empirisme collaboratif, le thérapeute et le client travaillent ensemble pour explorer et comprendre les pensées et les comportements du client. Cela implique :  une compréhension commune entre le client et le psychologue des difficultés dans l’ici et maintenant : quels sont les problèmes actuels du client ? ses demandes actuelles ? on s'intéresse également à l’histoire de l’individu (mais le point de départ reste les difficultés d’ici et maintenant)  une définition commune des objectifs de traitement et (/!\ si les fondements de l’alliance thérapeutique sont ok) des techniques thérapeutiques à mettre en œuvre. 4. UN APPUI SUR LA RECHERCHE Une application de la méthode et des résultats de recherche en psychologie expérimentale (de nouveau, on se base sur la littérature, sur ce qui a déjà été fait avant tout) au sein de votre pratique clinique, notamment dans l’étude : -de la nature des troubles psychologiques (tableau clinique actuel) -des causes des troubles psychologiques (« étiologie », facteurs qui expliquent les difficultés, qui nous rendent plus vulnérables) -du traitement des troubles psychologiques /!\ Une évaluation constante est nécessaire, tout au long de la thérapie. vignettes cliniques Quels sont les éléments cliniques importants à investiguer lors de votre premier entretien de type TCC ? Comment veillerez-vous au développement de l’alliance thérapeutique ? Sarah Vous avez une consultation en tant qu’indépendant dans un centre pluridisciplinaire. Sur votre site Internet, vous dites être spécialisé dans les troubles anxieux et dépressifs. Vous recevez l’appel d’une femme qui dit avoir eu votre numéro par son médecin généraliste. Elle présente des symptômes somatiques (inflammation de la peau et difficultés respiratoires) qui ne sont pas expliqués par des facteurs biologiques (et c’est pourquoi son médecin l’a Libois Romane réorientée vers vous). Se focaliser sur ce qu’elle ressent (côté psychologique), lui parler des autres spécialistes présents en sein du centre pluridisciplinaire qui peuvent compléter, s’informer dans la littérature quant aux symptômes qu’elle a (y a-t-il des causes auxquelles on n’aurait pas pensé ?), d’abord travailler sur l’aspect psychologique ou d’abord sur l’aspect somatique ? Tom Vous êtes employé dans une unité d’hospitalisation spécialisée dans les troubles anxieux et associés. Dans ce cadre, vous rencontrez un homme pour un premier entretien psychologique. Il s’agit de sa première hospitalisation, sur base volontaire. Vous constatez un épuisement général, tant physique (sommeil, activité, concentration) que psychique (ralentissement psychologique). Vérifier s’il y a une explication physiologique (examens supplémentaires comme une prise de sang), rassurer le patient sur sa prise en charge, sur l’accompagnement qu’il va recevoir et surtout lui expliquer le cadre. Laïla Vous êtes psychologue au sein d’un service d’urgence. L’un de vos collègues vous appelle. Il évoque la situation de Laïla, emmenée aux urgences par son compagnon qui dit ne plus la reconnaitre depuis quelques jours. Ses symptômes sont indiqués sur la fiche d’admission : euphorie (= très enjouée) et logorrhée (= qui n’arrête pas de parler). Investiguer s’il y a des antécédents, chercher à récolter l’avis d’autres proches que le compagnon, à quel degré la patiente est-elle conscient de ses troubles ? Libois Romane PSYCHO CLINIQUE (TCC) : le processus thérapeutique (2) Le processus thérapeutique en TCC ne peut avoir lieu qu’en présence de 2 éléments préalables : -la concrétisation des problèmes psychologiques -l’alliance thérapeutique Les premiers entretiens visent à : -faire l’inventaire du/des problème(s) -concrétiser le(s) problème(s) psychologique(s) -rechercher des informations supplémentaires directes et indirectes (anamnèse/histoire de vie) -développer l’alliance thérapeutique -> Ils servent à récolter l’information nécessaire à la réalisation de la conceptualisation de cas. 1. CONCRETISATION DES PROBLEMES PSYCHOLOGIQUES La concrétisation des problèmes psychologiques est le focus des premiers entretiens. C’est un processus non- linéaire qui consiste à décrire des problèmes en termes concrets, observables et mesurables. Les questions de Brinkman, canevas à garder en tête (1978) : -Quel est le problème ? Quelles sont ses composantes (émotionnelles, cognitives et comportementales) ? -Depuis quand la situation problématique est-elle présente dans la vie du client ? Quelles sont les causes du problème selon le client ? -Quelles sont les circonstances qui provoquent l’apparition ou la disparition du problème ? Quelle est la gravité du problème ? -Quelles sont les ressources du patient ? Sur quoi peut-on s’appuyer ? Qu’est-ce qui fonctionne chez lui ? Ce qui est le plus dur, c’est d’aller dans le détail du problème amené par le patient. On peut prendre ce modèle comme référence : exemple : Libois Romane 2. L’ALLIANCE THERAPEUTIQUE « L’alliance représente les éléments interactifs et collaboratifs de la relation (c’est-à-dire les capacités du thérapeute et du client à s’engager dans les tâches de la thérapie et à se mettre d'accord sur les objectifs de la thérapie), dans le contexte d’un lien affectif ou d’un attachement positif (confiance, affection, respect, soin). » L’alliance thérapeutique (Bordin, 1979) est : -un accord sur les objectifs thérapeutiques (// modélisations holistiques et fonctionnelles, voir infra) -un accord sur les moyens pour atteindre ces objectifs thérapeutiques (// techniques d’entretien et interventions empiriquement validées) -un lien thérapeutique (// attitudes rogériennes pour maintenir la qualité de l’alliance) Elle est une variable à considérer à chaque étape du processus thérapeutique : la prise de contact préliminaire -> la première rencontre -> le suivi thérapeutique, avec ses (dés)accords -> la clôture. La relation d’aide (avec le psychologue, mais pareil pour une relation avec un médecin, un kiné,…) est influencée par le cadre de référence du psychologue qu’il s’agit de conscientiser. Le psychologue se doit de connaitre les aspects déontologiques et législatifs (ex : dans quel cas extrême le secret professionnel peut-il être rompu ?). Il est garant de son cadre implicite et explicite (ce n’est pas le patient qui choisit ce cadre et il devra le respecter, ex : « je ne suis joignable que par e-mail » -> si le patient ne respecte pas le cadre, il faut l’évoquer en thérapie et chercher à savoir pourquoi). Le paradigme influence les attitudes thérapeutiques, les cibles, les outils et l’identité du psychologue. L’évaluation de la qualité de la relation thérapeutique diffère entre le psychologue et le client (le psychologue pourrait penser que tout se passe merveilleusement bien et fonctionne, alors que le patient pourrait ne pas être du tout à l’aise, continuer à venir uniquement parce qu’il n’ose pas dire qu’il ne veut pas continuer, que ça ne fonctionne pas). La perception du client est un meilleur prédicteur des résultats thérapeutiques que celle du psychologue (ex : j’ai donné une tâche à faire à mon client mais il ne l’a pas faite -> je vais me demander pourquoi, en reparler avec lui, s’il ne l’a pas faite c’est qu’il y a une raison, que ce n’était peut-être pas la bonne méthode) (/!\ donc à obtenir du feedback par le client et/ou par d’autres collègues/professionnels). La flexibilité du psychologue face aux besoins du client est un prédicteur de l’efficacité thérapeutique (cette flexibilité permet de renforcer l’alliance). -> Il faut se former au savoir-faire (ex : si je demande à mon patient d’aller crier dehors devant tout le monde, il faut que moi aussi je sois à l’aise avec ça) et au savoir-être (je suis capable de recevoir le désaccord ou la non-satisfaction du patient). « Le potentiel de guérison de la présence thérapeutique est énorme, mais dans une société sur-occupée et guidée par la technologie, il est très difficile de la développer et de la maintenir. C'est pourquoi il est nécessaire de s'entraîner à être présent, à surmonter les obstacles à l'intimité et à la connexion relationnelle, et à maintenir un niveau élevé de soins porté à soi et à la relation pour cultiver cette qualité thérapeutique essentielle. » 3. EMPIRISME COLLABORATIF « Le thérapeute et le client travaillent ensemble à intégrer l’expérience du client et les théories et recherches appropriées dans le déroulement du processus de génération et de test des hypothèses. » (Kuyken, 2008, p.27) Cela se développe et se maintient à l’aide d’une alliance thérapeutique positive. C’est à mentionner dès la première séance, aussi comme structure de la thérapie. On utilise un cadre collaboratif lors de chaque séance : -vérifier régulièrement la compréhension du client (ex : on a envie d’interpréter tout haut ce que raconte le patient, mais il risque d’être déboussolé et de simplement acquiescer alors que ce n’est pas du tout ce qu’il a voulu exprimer) Libois Romane -« négocier » les changements vis-à-vis de l’agenda prévu pour la séance (ex : difficile de demander à un patient dépressif de se lever tôt le matin) -construire ensemble les tâches à réaliser à domicile L’empirisme collaboratif, c’est aussi parvenir à trouver ensemble un équilibre optimal entre l’alliance thérapeutique (qui inclut un lien affectif) et la gestion du cadre thérapeutique. La structure classique d’une séance en thérapie cognitivo-comportementale inclut : -ré-établir l’alliance (ex : un patient dit « vous me demandez toujours « comment ça va » quand j’arrive mais je ne sais jamais quoi vous répondre car ça ne va pas » -> revoir ça) -revoir ensemble les auto-évaluations/exercices prescrit lors de la dernière séance (pour que le patient puisse se dire « j’y suis arrivé, je suis fier de moi ») -décider ensemble des points à mettre à l’agenda du jour -travailler sur le(s) point(s) de l’agenda (séance en tant que telle) -demander ce que le client retient de la séance du jour (permet de vérifier s’il a bien compris la même chose que nous, si on a tiré la même chose de la séance) -préparer ensemble les auto-évaluations/exercices à réaliser pour la prochaine séance -prendre un nouveau rendez-vous (ça dépend du cadre du psychologue, certains laissent le patient reprendre rdv en ligne chez lui par exemple) 4. LE CYCLE EMPIRIQUE DE LA PRISE EN CHARGE EN TCC conceptualisation de cas La conceptualisation de cas est un processus par lequel le thérapeute et le client travaillent de manière collaborative dans un premier temps, décrire et ensuite expliquer les problèmes présentés par le client dans la thérapie en utilisant la théorie cognitivo- comportementale. Sa première fonction est de guider la thérapie afin de soulager la détresse du client et construire sa résilience. Cette conceptualisation est individualisée. La conceptualisation de cas combine 2 niveaux d’analyse, dans une visée processuelle : -la modélisation holistique, à un niveau macroscopique/général -la modélisation fonctionnelle, à un niveau microscopique/spécifique modélisation holistique -les problèmes psychologiques (et les problèmes non psychologiques si ceux-ci sont pertinents pour expliquer le fonctionnement psychologique global) -les variables qui affectent ces problèmes psychologiques, soit de manière immédiate (« facteurs proximaux »), soit de manière indirecte via la médiation par d’autres variables ou processus psychologiques (« facteurs distaux ») -les conséquences psychologiques (ou non) des problèmes psychologiques -les ressources modélisation fonctionnelle -la représentation d’un problème psychologique spécifique qui inclut les différents mécanismes qui en expliquent l’apparition et le maintien en dépit de ses conséquences négatives (souvent le patient vient avec plusieurs problèmes, ici on va zoomer sur chaque problème pour déterminer quoi traiter dans quel ordre) Libois Romane retour sur la vignette de Tom : il existe plusieurs troubles anxieux différents, on va déterminer celui de Tom, il est perfectionniste, et dans le perfectionnisme il y a la notion d’intolérance à l’échec -> quelles-sont les pensées issues de ça ? et sur celle de Laïla : même aux urgences, l’entretien sera influencé par la cadre de base du psychologue (ici TCC), on divise les 2 aspects du perfectionnisme (intolérance à l’échec et hauts standards), on identifie ses antécédents (harcèlement scolaire, trouble bipolaire, modèles parentaux), on recherche les processus derrière l’euphorie et la logorrhée évaluation (des progrès) L’évaluation vise un recueil d’informations qui aideront à la prise en charge. Elle est présente à chaque étape du processus thérapeutique (ex : si, à un moment, on se rend compte que les problèmes se trouvent surtout au niveau systémique, on pourra réorienter vers un autre professionnel). C’est une aide à la conceptualisation de cas, en facilitant lors de l’anamnèse la recherche d’informations supplémentaires directes et indirectes (// concrétisation des problèmes psychologiques). On évalue les progrès du client face aux objectifs thérapeutiques fixés et l’efficacité thérapeutique (/!\ ligne de base nécessaire). L’évaluation permet de placer le client en tant qu’expert de sa problématique (c’est lui qui peut évaluer si la thérapie fait évoluer les choses ou pas). Elle peut contrer les biais du psychologue (ex : biais de confirmation, réalisme naïf, illusion d’efficacité). Elle est multimodale (ex : le psychologue peut demander une prise de sang avant d’intervenir), en raison des différentes modalités du problème psychologique. On utilise différents outils : entretien, évaluation quantitative à l’aide de tests et d’échelles, hétéro- et auto-observations. Il ne faut pas confondre évaluation et traitement, la conscientisation prend beaucoup plus de temps et n’est pas forcément tout de suite correcte. les auto-observations comme exemple d’évaluation Les auto-observations sont généralement proposées dès la fin du premier entretien, pour éviter les biais de mémoire (ex : le client qui raconte vendredi ce qui s’est passé lundi, a eu 4 jours où pleins de réévaluations de l’évènement ont eu lieu). C’est une manière d’engager le client dans sa prise en charge. Elle peut être adaptée en fonction de ce que l’on veut observer. -> Les auto-observations permettent de mieux détecter ce qui déclenche l’émotion, d’avoir une certaine finesse. Ça peut être une aide à la concrétisation des problèmes psychologiques (ex : grâce aux grilles complétées, on peut montrer au patient qu’il y a une évolution et qu’il peut être fier de lui), une étape nécessaire avant de débuter la conceptualisation de cas. Libois Romane vignette clinique Hannah souffre d’un trouble d’anxiété sociale. -Identifiez ce qu’Hannah vit, en termes de : pensées, émotions, sensations corporelles et comportements Elle est anxieuse depuis quelques années. Elle a peur, se sent seule (dit qu’elle n’a pas vraiment d’amis) depuis qu’elle est partie de chez ses parents (c’est la 1e fois qu’elle déménage). Elle évite les évènements qui impliquent d’interagir avec d’autres personnes (au travail aussi, et elle se le reproche, dit que c’est de sa faute). Elle devient de plus en plus seule car elle ne sort pas de chez elle et ça la bloque pour se faire des amis (comme un cercle vicieux). Les rares fois où elle sort avec des amis, elle a juste envie de rentrer mais elle craint aussi de perdre ces personnes. Elle se caractérise comme timide. Dès l’université, elle pensait qu’on attendait d’elle qu’elle fasse quelque chose. Quand elle doit travailler (photographe) avec un groupe de personnes, elle a des bouffées de chaleur et elle transpire, elle a l’impression que tout le monde la regarde et pense qu’elle est débile, qu’ils vont tous la fixer et penser qu’elle ne sait pas faire son job, qu’elle est idiote, bizarre. Dans ces moments elle essaye de se concentrer sur autre chose. Elle se sent bête, elle pense qu’elle ne devrait même pas essayer et rentrer chez elle, et que les autres sont normaux par rapport à elle qui est une cinglée et ne sait pas faire des choses basiques, normales et n’a rien à faire là. Elle a du mal à respirer, elle tremble. Elle porte du noir et beaucoup de couches pour se dissimuler dans la masse, fait tout pour ne pas se faire remarquer, elle fuit les regards. Elle est persuadée que les autres remarquent son état. -Identifiez les éléments qui caractérisent les thérapies cognitives et comportementales La psychologue conceptualise son trouble, elle redécrit ce que Hannah en dit. Elle la questionne sur ce qu’elle ressent et pense exactement dans les moments où elle est anxieuse et sur les facteurs déclencheurs. Elle lui demande aussi ce qu’elle met en place dans ces moments pour « survivre » son anxiété. -> Elle interroge sur la perception de Hannah. Libois Romane PSYCHO CLINIQUE (TCC) : les modèles théoriques et interventions (3) Dans ce chapitre, on parle des techniques et méthodes thérapeutiques, une des étapes du cycle empirique de la prise en charge TCC (voir chapitre précédent). 1. LES THERAPIES COMPORTEMENTALES Les modèles théoriques se basent sur les théories de l’apprentissage. Le principe sur lequel on s’appuie est que tout comportement (problématique ou non) est appris et peut donc, en théorie, être également modifié (« désappris »). On va appliquer l’apprentissage (le conditionnement classique et opérant) à la compréhension des troubles psychologiques : Les troubles psychologiques résultent d’apprentissages dits « dysfonctionnels » que l’on peut observer dans l’ici et maintenant (mais qui ont été appris auparavant car ils ont fonctionné à ce moment-là, ex : un enfant apprend à se comporter d’une certaine façon pour « survivre » dans son environnement familial -> mais dans ses relations extra-familiales, ça pose problème qu’il agisse de la même manière qu’avec ses parents…). -> Les interventions psychologiques doivent modifier ces apprentissages ou aider à faire de nouveaux apprentissages. le conditionnement classique et l’apprentissage des significations L’organisme (ex : le chien, dans la thérapie c’est l’être humain) apprend une association entre 2 événements (ex : nourriture et son de la cloche -> on le remarque car il salive à la présentation de chacun de ces 2 stimuli). Cet apprentissage nécessite plusieurs répétitions de cette association (ex : morsures à répétition par un chien), SAUF si le stimulus inconditionnel est intense (dans ce cas, une seule expérience suffit, ex : accident grave de voiture -> PTSD). Le SI est associé tellement de fois au SC qu’ils finissent par générer la même réponse (le SC a acquis la signification émotionnelle du SI). exemple : Catherine se rend à votre consultation car elle est prise d’un sentiment de panique lorsqu’elle se trouve sur une terrasse de café -> qu’est-ce qui pourrait être un exemple d’apprentissage (stimulus inconditionnel) qui pourrait expliquer le sentiment de panique (générer la même réponse) de Catherine ? Il existe différentes voies d’acquisition de l’apprentissage (Mineka & Zinbarg, 2006) : par expérience directe, par observation, par information. (expérience directe) Catherine a été agressée dans un parking souterrain par un homme qui avait une forte odeur de cigarette. Depuis lors, elle est prise d’un sentiment de panique lorsque se trouve sur une terrasse de café (associé à l’odeur de cigarette -> importance d’aller dans la nuance, de vérifier si on a bien compris ce qui dérange exactement le patient). Libois Romane (observation) Catherine adore regarder des séries policières. Dans la plupart des séries qu’elle regarde, les agresseurs sont des fumeurs. Depuis lors, elle est prise d’un sentiment de panique lorsque se trouve sur une terrasse de café. -> Donc, une vigilance particulière à accorder à ses propres réponses conditionnées en tant que psychologue ! (information) Catherine souffre d’anxiété sociale. Parmi d’autres éléments, vous découvrez que, petite, on lui a souvent répété que « parler aux inconnus, c’est dangereux ». C’est un processus de généralisation : la RC va émerger en réponse à des stimuli similaires (d’un point de vue perceptuel, catégoriel ou symbolique/sémantique) au SC original (ex : SC = chien = animaux à fourrure = vétérinaire = mot « animal). MAIS des modérateurs sont présents, ils vont influencer la probabilité de développer une phobie : -les facteurs individuels (ex : le tempérament et l’histoire personnelle avec les stimuli) -les facteurs contextuels (ex : l’intensité et l’incontrôlabilité des stimuli, la préparation à faire face aux stimuli) -les processus post-évènement (ex : une expérience aversive additionnelle, les attentes négatives/anticipation (apprentissage préalable), les processus d’évitement des stimuli craints) le conditionnement opérant Le comportement (la réponse) est fonction de ses conséquences (est produit en vue d’obtenir quelque chose). Il est le socle de l’analyse fonctionnelle (= modèle interactif qui relie le comportement problématique aux cognitions et aux émotions du patient dans une situation donnée). Le stimulus discriminatif (Sd) peut être interne (ex : dès que Jacques perçoit son cœur battre trop rapidement, il s’allonge, mais il le fait donc tout le temps ou s’empêche de sortir de chez lui pour ne pas faire battre son cœur, ce qui est pathologique) ou externe (ex : dès que Catherine voit des enfants souffrir à la télévision, elle change de chaîne). Le stimulus discriminatif (Sd) peut être inconditionnel (ex : dès que Jacques touche quelque chose de trop chaud, il retire sa main -> réflexe, pas besoin d’un apprentissage pour ça) ou conditionnel (ex : dès que Cécile voit son compagnon serrer la mâchoire lors d’une conversation, elle y met fin et quitte la pièce -> apprentissage que ça va mal terminer) -> ce qui veut dire que dans ce stimulus discriminatif, on peut avoir un conditionnement classique, ou pas. Le comportement opérant (R) est un comportement volontaire (/!\ ça ne veut pas forcément dire qu’il est conscient, mais qu’il est réalisé en vue d’un objectif) ayant une incidence sur l’environnement du sujet. Le comportement opérant (R) est « ouvert » (= visible par autrui, ex : un comportement impulsif) ou « couvert » (= interne, ex : une pensée intrusive). exemples : -Le fils de Marie crie systématiquement au magasin pour obtenir des bonbons -> c’est un apprentissage, mais ce n’est pas pour autant que l’enfant est conscient qu’il y a une association (il ne se dit pas « je vais pleurer comme ça j’aurai des bonbons »). -Une fois rentré, Jules ressasse tous les détails de sa soirée pour s’assurer qu’il n’ait pas fait quelque chose qui pourrait le mettre dans l’embarras -> il peut avoir appris ça de ses parents qui font la même chose par exemple. Les conséquences (Sr) du comportement sont intentionnelles ou non. Libois Romane Le comportement (C) est maintenu ou augmenté par des renforçateurs. renforcement = la conséquence est positive donc la fréquence du comportement est augmentée punition = la conséquence est négative donc la fréquence du comportement est diminuée positif = apparition négatif = disparition ou non-apparition  un C d’approche (ex : pleurer) permet d’obtenir (faire apparaitre) un ou des renforçateurs positifs (ex : obtenir des bonbons) (+S+) = renforcement positif  un C d’échappement (ex : prendre un médicament) permet de diminuer ou faire disparaitre une situation aversive (ex : pour ne plus me sentir anxieuse) (-S-) = renforcement négatif où la situation aversive (la crise d’angoisse) est déjà là  un C d’évitement (ex : me taire) permet d’éviter l’apparition d’une situation aversive (°S-) (ex : pour éviter une dispute) = renforcement négatif où la situation aversive (la dispute) n’est pas encore là Certains comportements peuvent sembler identiques sur un plan topographique (ont la même forme), mais sont différents en termes de conséquences recherchées (ont des fonctions différentes). A l’inverse, certains comportements peuvent sembler différents sur la forme (ex : pleurer VS demander un câlin), mais sont identiques en termes de fonction/conséquences recherchées (ex : pour obtenir de l’affection). exemples (typiquement une question d’examen, mais en plus facile car ici plusieurs solutions sont possibles) : Paul souffre d’une dépendance à l’alcool, apparue lors du décès de sa femme. Lors d’un verre organisé avec ses collègues, Paul a bu le verre de trop et a commis des actes dont il a honte. Depuis, Paul n’est plus revenu au travail car il ne supporterait pas le regard de ses collègues. -> 2 comportements différents : dépendance et ne pas aller au travail MAIS dans le même but : éviter/diminuer les émotions négatives (tristesse du décès (échappement) et honte due au regard des collègues (évitement)) -> 2 comportements identiques : dépendance à l’alcool et surconsommation d’alcool (verre de trop) MAIS dans des buts différents : diminuer les émotions négatives (tristesse du décès (échappement)) VS augmenter les émotions positives (dans les moments passés avec ses collègues (approche)) Sylvie est étudiante en Master II. Elle vous consulte car elle ne parvient pas à finaliser son mémoire. Parmi les comportements qui la handicapent le plus, elle cite : (1) des sur-vérifications de chaque mot utilisé, afin de s’assurer que le mot choisi reflète son idée à la perfection, et (2) le besoin que son compagnon relise chacun de ses paragraphes avant d’en débuter un nouveau. -> 2 comportements différents : sur-vérification VS réassurance MAIS dans le même but : diminuer la probabilité de faire une erreur qui amènerait de l’angoisse (évitement) Libois Romane Olivier est un patient hospitalisé depuis 3 mois au sein d’une unité psychiatrique. L’alliance thérapeutique est difficile à mettre en place. Tout ce qui est proposé durant l’hospitalisation est refusé ou mis en échec. Le diagnostic est difficile à établir : l’équipe de soins n’a accès qu’au fait qu’il va très, très mal. -> refus de tout soin dans le but d’éviter le diagnostic car de l’anxiété y est liée (évitement) /!\ Il est indispensable de présenter notre schéma hypothétique au patient, car notre analyse fonctionnelle n’est pas forcément la bonne (et sera très différente d’un thérapeute à l’autre), il y a pleins de possibilités. Tout comme les S, il existe différentes voies d’acquisition d’apprentissage du C : par expérience directe (exemples précédents), par observation (ex : avoir les mêmes TOCs de lavage que son parent), par information (ex : « rouler au-dessus de la vitesse autorisée peut entrainer une amande »). SORC : conditionnement classique + conditionnement opérant S = stimuli O = organism modèle de Mowrer (1960) : conditionnement classique + conditionnement opérant R = response C = consequences Ce modèle a été développé pour rendre compte du développement d’une phobie en 2 étapes : (1) peur (O) acquise par le conditionnement répondant/classique à partir du stimulus inconditionnel (S) (2) évitement ou échappement (R) renforcé par la non-apparition/diminution de la peur conditionnée (renforcement négatif par la conséquence (C)) -> ce qui correspond au conditionnement opérant Libois Romane l’analyse fonctionnelle SORC grille d’analyse fonctionnelle SORC : modèle comportemental de Ferster (1973), basé sur le conditionnement opérant : exemple de la dépression La plupart des C des personnes dépressives ont une fonction d’échappement (-S-) ou d’évitement (°S-) des situations, pensées ou émotions aversives : conséquence court terme. Ce qui entraine un rétrécissement du répertoire comportemental. Ce rétrécissement du répertoire comportemental entraine une diminution de l’engagement dans des activités plaisantes qui sont source de renforcements positifs (-S+) : conséquence long terme. En TCC, on considère que la conséquence court terme explique pourquoi le comportement est maintenu, et la conséquence long terme explique pourquoi la personne vient en thérapie. modèle de Lewinshon (1974) La diminution des renforcements positifs (-S+) a comme conséquence d’augmenter l’auto-focalisation (ruminations négatives) et le retrait des contacts sociaux. Court-terme Court-terme Libois Romane les interventions comportementales rappel : Tout comportement (problématique ou non) est appris et peut donc, en principe, être également modifié. L’objectif est de modifier le comportement inadapté et générateur de souffrance et de le remplacer par l’apprentissage de comportements plus adéquats. Cela nécessite la mise en place d’une évaluation comportementale approfondie (les schémas qu’on a faits plus haut) pour identifier les causes environnementales (S) des problèmes du client. Dès les années 20, Mary Cover Jones développe un traitement pour la phobie des lapins du petit Peter. Dans les années 50, Joseph Wolpe développe cette technique thérapeutique : la désensibilisation systématique. Cette technique est indiquée pour le traitement des troubles anxieux (phobie, trouble panique, trouble d’anxiété sociale, TAG), du TOC et du PTSD. Elle est incorporée également dans d’autres troubles (ex : troubles liés aux substances, troubles des conduites alimentaires,…).  la thérapie par exposition : approche systématique et répétée des stimuli phobogènes (Sd, ex : araignée, bus, voiture, sensations physiologiques, stimuli qui génèrent du craving tels que l’alcool), SANS la présence d’un stimulus inconditionnel aversif ou appétitif (SI), de telle sorte que ces stimuli perdent la capacité à produire une réponse conditionnée (RC) -> le but est de remettre le SC à sa neutralité -> l’habituation : au fur et à mesure qu’on présente répétitivement le stimulus phobogène, la réaction émotionnelle diminue et donc l’envie de prendre la fuite diminue aussi (Barlow, 2001) -> l’extinction : après un conditionnement classique, la présentation répétée du SC sans le SI mène à la diminution progressive jusqu’à l’élimination de la RC (Pavlov, 1927) -> l’apprentissage inhibitoire : l’association SC-évènement aversif n’est pas effacée par l’extinction, mais une nouvelle association inhibitoire est apprise (Bouton et al., 2006) -exposition in vivo : se confronter directement à l’objet, la situation ou l’activité anxiogène (ex : aller dans la foule avec un patient qui en a peur) -exposition en imagination : s’imaginer l’objet, la situation ou l’activité anxiogène (cas du trauma) -exposition par réalité virtuelle : se confronter à l’objet, la situation ou l’activité anxiogène via un équipement de réalité virtuelle -exposition intéroceptive : provoquer délibérément les sensations physiologiques redoutées (ex : aller courir avec le patient pour qu’il sente son cœur battre) La durée et l’intensité du stimulus auquel le client est confronté peuvent varier : -exposition graduée (la plus utilisée) : la confrontation au stimulus anxiogène se fait de manière graduée sur base d’une hiérarchie d’exposition MAIS il a été démontré qu’il n’était pas nécessaire de mener les exercices d’exposition selon une hiérarchie d’intensité progressive. Il faut plutôt favoriser la variabilité dans l’intensité, et amener le plus rapidement possible des expositions intenses. -immersion (flooding) : exposition qui commence très haut dans la hiérarchie d’exposition -désensibilisation : combiner l’exposition à des exercices de relaxation (remarque : ces exercices peuvent être utiles pour diminuer l’activation physiologique, mais /!\ à ce qu’ils ne soient pas utilisés par le patient avec une fonction d’évitement) Libois Romane points communs nécessaires dans le déroulement de toute exposition : -l’analyse fonctionnelle pour identifier les stimuli discriminatifs (Sd) qui serviront de base à l’exposition -la psychoéducation (qu’est-ce qu’une exposition ? dans quel intérêt ?...) -l’exposition se fait (1) en séance et en dehors des séances (important pour la généralisation) et (2) nécessite toujours une préparation avant et un débriefing après 2. LES THERAPIES COGNITIVES Les modèles théoriques se basent sur le traitement de l’information. Ici, les troubles psychologiques proviennent de pensées dysfonctionnelles (mésinterprétations de l’information) et de croyances irrationnelles (que l’on va avoir tendance à vouloir valider dans notre environnement, ex : une personne perfectionniste ne va retenir que les erreurs qu’elle a faites). exemple : 2 personnes face à moi rient ensemble -> je peux interpréter très différemment en fonction de mes croyances, « elles ont des points communs et s’entendent bien » VS « elles sont en train de se moquer de moi » -> Le but de l’intervention sera donc de modifier ces pensées et croyances dysfonctionnelles qui sont à l’origine des troubles psychologiques. Libois Romane Albert Ellis et la thérapie rationnelle-émotive « Nous souffrons plus de la représentation que nous avons de la réalité que de la réalité elle-même » (ex : je suis dans la rue et j’ai une pensée « j’ai envie de frapper quelqu’un » -> soit je vais interpréter « houla je suis fatiguée c’est quoi cette pensée » et laisser couler (ne génère pas de détresse), soit je vais interpréter « wow si je le pense je risque d’agir » et fusionner pensée-action (génère de la détresse)) MAIS c’est un modèle philosophique plutôt que scientifique (pas une thérapie evidenced-based). Le modèle ABC est utilisé pour exprimer le lien entre les pensées et les émotions. exemple : -évènement activateur (A) : Monique est passée à côté de moi sans me saluer -croyances (B pour belief) : elle me déteste, j’ai fait quelque chose de mal -conséquences (C) : je me sens être une personne horrible Aaron Beck et la thérapie cognitive Elle était initialement utilisée dans le cadre de la dépression, mais elle a ensuite été généralisée à d’autres troubles. Il reprend le modèle de Ellis et y rajoute tout ce qui a trait au traitement de l’information. Cette thérapie a un impact majeur sur l’évolution des thérapies cognitives et comportementales. Les évènements cognitifs sont des pensées automatiques, des images mentales (ex : je roule en voiture et j’ai soudain une image mentale de moi qui tire le frein à main), des monologues intérieurs. Ils sont le produit du traitement de l’information par les schémas et les processus cognitifs. Ils sont accessibles à la conscience (« je ne m’en sortirai pas », « je suis un incapable », « je ne vais pas tenir le coup », image de soi ridiculisé par autrui). Ils sont organisés sous forme de triades concernant la perception de soi-même, des autres et de l’avenir : -la triade dépressive : avec une vision pessimiste (« je suis un incapable », « les autres ne m’aiment pas, ne me considèrent pas, je ne vaux rien pour eux », « je ne m’en sortirai jamais ») -la triade anxieuse : soi comme à risque d’être submergé (« je suis incapable de contrôler mes émotions », « une petite goutte de plus et c’est fini », hypervigilance), autrui comme menaçant (« je suis certain qu’ils vont me faire des remarques sur mes tremblements, m’humilier », personne sur ses gardes), l’avenir comme imprévisible (« on ne sait jamais comment les choses vont se passer », « je ne peux plus compter sur personne ») (à compléter le plus rapidement possible au moment où ça se passe, sinon il peut y avoir des biais de mémoire) Libois Romane Les schémas cognitifs sont des structures cognitives stables faites de croyances et de théories (concernant soi-même, les autres et l’avenir), à travers lesquelles la perception et la conceptualisation s’organisent. Ils sont dérivés des expériences passées. Ils peuvent être activés par l’activation d’un élément qui les constitue (les schémas forment un grand réseau généralisé dans le cerveau -> toucher à quelque chose active souvent beaucoup d’autres choses). Ils ne sont PAS directement accessibles à la conscience, mais peuvent être inférés à partir des événements cognitifs. Le schéma peut être : -inconditionnel : croyances de base traduisant la vision du monde de la personne -> il s’exprime sous forme d’énoncé absolu (« je ne suis pas digne d’être aimé », « ma valeur personnelle dépend de ce que les autres pensent de moi ») -conditionnel : croyances découlant des croyances de base -> il s’exprime de manière conditionnelle (« si… alors ») ou sous forme de règles (« si je ne réponds pas à ses désirs, il va m’abandonner », « il faut que je sois toujours parfait pour être digne d’être aimé ») anxiété sociale : le stimulus et toujours une situation sociale anxiété généralisée : le stimulus peut être n’importe quel type de situation trouble panique : le stimulus est une sensation corporelle Les processus cognitifs sont des règles de transformation de l’information (pour la faire correspondre à mes schémas) avec lesquelles les événements cognitifs sont construits. Les schémas « biaisent » l’information traitée (par assimilation = interpréter l’information pour confirmer ses schémas, car c’est beaucoup plus facile pour le cerveau de confirmer les schémas déjà en place que de devoir les modifier). Ils entrainent des distorsions cognitives : -abstraction sélective : centration, fixation sur un détail en faisant abstraction des autres éléments (+) pertinents (ex : « j’ai fait 2 erreurs vraiment bêtes », même si elle a eu 18/20 et que c’est génial elle ne voit que les 2 points en moins) -inférence arbitraire : tirer des conclusions sans preuve (ex : « il ne me répond pas, c’est qu’il est avec une autre fille ») Libois Romane -lecture dans la pensée : supposer que l’on peut connaître les motifs, les intentions et les pensées dans l’esprit des autres (et donc collecter les preuves qui viennent confirmer = biais de confirmation, ex : « elle m’a dit que non mais elle est juste hypocrite, la vérité est bien ce que je pensais) -pensée dichotomique : penser en tout ou rien (blanc/noir) ; la relativisation est inexistante (ex : « « si je n’ai pas 20/20 à cet examen, c’est que je suis nul ») -maximisation/minimisation : attribuer plus d’importance aux événements négatifs et moins aux positifs (ex : « je suis quelqu’un qui a la poisse ») -personnalisation : surestimer les relations entre les événements défavorables et soi (ex : « c’est toujours moi qu’on juge, qu’on regarde bizarrement ») -raisonnement émotionnel : utiliser l’émotion comme preuve d’une situation objective (ex : « si je me sens en colère, il y a des raisons, c’est que cette personne me voulait du mal ») -surgénéralisation : généraliser une expérience à toutes les situations (ex : je viens de rater mon permis, bah oui je ne réussis jamais rien ») Les croyances fondamentales sont « les façons personnelles et répétitives de comprendre et d’interpréter les événements, qui se cristallisent au fur et à mesure des expériences » (Brillon, 2013). syndrome de Stress Post-Traumatique : la victime rencontre des difficultés à intégrer adéquatement l’événement traumatique L’être humain possède une « tendance intrinsèque au traitement de l’information tant que son intégration ne s’est pas complétée » : -assimilation : modifier le sens de l’événement traumatique pour qu’il puisse s’intégrer aux conceptions préexistantes -accommodation : modifier les conceptions préexistantes pour qu’elles puissent accepter la nouvelle expérience traumatique de celle-ci Libois Romane les nouveaux développements de la psychopathologie cognitive La psychopathologie cognitive est l’étude des troubles psychologiques sous l’angle des dysfonctionnements cognitifs qui contribuent, avec d’autres facteurs, au développement, au maintien et à la récurrence des états psychopathologiques -> elle s’intéresse aux processus psychologiques qui expliquent pourquoi la pathologie se maintient. Il y a différents types de dysfonctionnements cognitifs : -les croyances et évaluations dysfonctionnelles (voir A. Ellis et A. Beck) -les biais cognitifs : un traitement préférentiel de certains types d’informations, à différentes étapes du traitement de l’information (attention, interprétation et/ou mémoire, ex : une personne qui est phobique des araignée va, en rentrant dans une pièce, analyser les coins du plafond) -les déficits cognitifs : une incapacité à réaliser certaines fonctions cognitives de base (ex : un déficit des fonctions exécutives et/ou mnésiques) La thérapie cognitive apprend au client de nouvelles façons de penser (modifier, remplacer les pensées, comme on modifie les comportements dans la thérapie comportementale), plus adaptées et qui se fondent sur l'hypothèse que les pensées interviennent entre les événements et nos réactions émotionnelles (évènement -> traitement de l’information -> émotion/comportement). Libois Romane thérapie rationnelle émotive (Albert Ellis) Elle consiste à remettre en question avec vigueur les attitudes et les croyances illogiques et autodestructrices du client (il ne s’agit pas de lui dire « vos croyances sont biaisées, sont fausses, il faut les changer » mais « ne pensez- vous pas que vous pourriez interpréter cela autrement pour diminuer l’impact ? » -> instaurer le doute). Le client identifie ses croyances dysfonctionnelles (par auto-observations ou découvertes guidées) : A : Quel est l’évènement activateur ? B : Quelles sont mes pensées, croyances dans cette situation ? C : Quelles sont les conséquences de ces pensées ? Le thérapeute amène le client à : -contester les croyances dysfonctionnelles -les remplacer par des croyances plus adaptées, rationnelles afin d’expérimenter des émotions/effets nouveaux et désirés thérapie cognitive (Aaron Beck) Elle consiste à utiliser différentes techniques pour mettre à jour les pensées, croyances et distorsions et les remplacer ou les assouplir (ex : une expérience comportementale qui vise à tester la croyance « mes collègues vont me critiquer si mon mail n’est pas parfait » est d’envoyer l’email sans le relire (ou, en tout cas, en diminuant le nombre de relectures dans un premiers temps)). L’objectif est de prendre conscience : -des pensées automatiques négatives (les événements cognitifs) et les reconsidérer de manière plus réaliste -des distorsions cognitives (les processus cognitifs) et les modifier -du schéma qui sous-tend les pensées automatiques négatives et l’assouplir  pensées automatiques négatives : -expérience comportementale pour tester les croyances, ainsi que construire et tester de nouvelles perspectives -expérience active (en situation réelle ou simulée) ou d’observation (directe/modeling, avec une enquête ou une collecte d’information auprès d’autres sources) Libois Romane  distorsions cognitives :  schéma : Souvent, on utilise la technique de la flèche descendante (« downward arrow ») : on n’a pas accès directement aux schémas quand on écoute le patient, mais on peut identifier des pensées automatiques, des événements cognitifs pour ensuite explorer plus en profondeur. Typiquement, le patient parle et le thérapeute dit « et que se passerait-il si… ? » (ex : « les gens vont penser que je suis bizarre » « et que se passerait-t-il s’ils vous trouvaient bizarre ? » « ils ne voudraient pas être amis avec moi et je serais seule » « et que se passerait-il si vous étiez seule ? » « je n’aurais personne à qui parler »,…) On annonce au patient qu’on va utiliser cette technique de flèche descendante, sinon au bout d’un moment il va se demander quoi et ne plus vouloir répondre. Le psychologue décompose les avantages et désavantages des pensées identifiées avec le patient (on insistera souvent d’abord + sur les avantages, pour montrer au patient que l’on entend son schéma, qu’on essaye de le comprendre avant d’absolument vouloir le modifier, ça sert aussi à renforcer l’alliance thérapeutique). A l’heure actuelle, les approches TCC sont généralement intégrées et visent donc à remplacer les croyances irrationnelles et les comportements inadaptés par des cognitions et des comportements plus adaptés. 3. LA TROISIEME VAGUE Les modèles théoriques se basent sur une approche empiriquement fondée. La 3e vague applique et renforce les 2 premières, en intégrant notamment plus de réflexion. La 3e vague des TCC est particulièrement sensible aux contextes et aux fonctions des phénomènes psychologiques, et pas uniquement à leur forme. Elle met l’accent sur les stratégies de changements expérientiels et contextuels : dans quels contextes particuliers ce comportement pourrait continuer à être utile et dans lesquels il est néfaste, malsain ? -> Ces traitements ont tendance à chercher des répertoires plus larges, plus flexibles et plus efficaces plutôt qu’une approche qui vise à éliminer le problème définis de manière étroite. Il y a plusieurs aspects centraux : les émotions, l’engagement, les métacognitions. Libois Romane les émotions On part du principe que les troubles psychopathologiques proviennent d’un refus ou d’une suppression de l’émotion. Les émotions (affects) sont des messages de notre corps -> si on les ignore, le corps les renvoient un peu plus intensément chaque fois (jusqu’à arriver à des extrêmes comme la crise de panique). les modèle de persistance de la détresse émotionnelle (Barlow, 2005) : exemple : je sens que je suis en colère contre une personne et que je dois évacuer cette émotion, je vais poser mes limites clairement (non-suppression) VS je suis en colère mais tant pis je vais passer outre, je la mets de côté (tentative de suppression) L’évitement émotionnel est la tendance à éviter ou à s’échapper des expériences psychologiques privées (les pensées, émotions, sensations, souvenirs) en tentant de modifier leur forme ou leur intensité, malgré les conséquences qu’un tel évitement peut avoir. L’acceptation se fait en plusieurs temps : (1) une reconnaissance du vécu, (2) une attitude d’observation (plutôt qu’une réaction automatique immédiate qui aura sûrement des conséquences négatives) et (3) une distance entre le « soi » et les pensées/sentiments automatiques. l’engagement Le principe est l’identification des valeurs existentielles et la volonté de se comporter conformément à celles-ci, y compris dans l’adversité. On guide le patient vers un ancrage dans l’expérience « ici et maintenant », le plus authentiquement possible (accepter la diversité du vécu émotionnel, y compris dans le négatif). les métacognitions Ce sont les pensées sur ses propres pensées, elles peuvent être positives (ex : « être anxieux m’aide à prévoir le pire ») ou négatives (ex : « mon TOC me rend dangereux»). On analyse le rôle du processus cognitif (la manière de penser). Libois Romane Le fait d’être conscient du schéma (ex : je sais qu’à chaque anniversaire, je retombe dans ma dépression) permet d’éviter de s’enfoncer dans celui-ci (on accepte notre vulnérabilité dans ce schéma). L’objectif commun de ces thérapies est d’aider le client à accepter tous les aspects de son expérience (les pensées, les sentiments, les souvenirs et les sensations physiques), à en être pleinement conscient en restant centré sur le moment présent. On retrouve :  la thérapie de l’acceptation et de l’engagement (ACT = Acceptance and Cognitive Therapy, développée par Hayes)  les thérapies basées sur la pleine conscience pour la réduction du stress (développée par Kabat-Zinn) et pour la prévention de la rechute dépressive (développée par Segal, Williams et Teasdale)  la thérapie comportementale dialectique pour le trouble de la personnalité borderline (développée par Linehan)  l’activation comportementale pour la dépression les thérapies basées sur la pleine conscience La pleine conscience (>< « pilote automatique ») est un état de conscience qui résulte du fait de : porter son attention – intentionnellement – au moment présent – sans juger – sur l’expérience qui se déploie moment après moment. l’activation comportementale pour la dépression C’est un processus thérapeutique centré sur des tentatives structurées d’augmenter les comportements manifestes susceptibles de mettre le client en contact avec des contingences environnementales renforçantes et d’améliorer sa situation en termes de pensées, d’humeur et de qualité de vie. En d’autres mots, cette thérapie vise à augmenter l’engagement d’un individu dans des activités adaptées, le plus souvent avec un fort impact positif (activités associées à des émotions positives) permettant son renforcement et donc la réduction de l’évitement. C’est une application des théories de renforcement dans le traitement de la dépression. C’est la composante comportementale du traitement cognitif de la dépression (Beck, 1976). Elle se développe aussi dans la 3e vague, avec une application du contextualisme fonctionnel : idée qu’aucune pensée, émotion, souvenir, comportement n'est problématique, dysfonctionnel ou pathologique en soit, tout dépend du contexte et de la fonction qu'elle/il y occupe au moment où elle/il y apparait (Hayes, 1993). + lecture obligatoire

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