Sociologie et Philosophie - Chapitre 1

Summary

Ce chapitre explore l'origine de la modernité politique et les différentes philosophies et doctrines qui ont pensé la souveraineté et sa migration. Il examine la genèse de l'État et rompt avec l'idée d'une volonté collective pour l'adoption de règles, préférant une approche fonctionnaliste. L'étude aborde des hypothèses anthropologiques pour comprendre des similitudes entre différentes sociétés et l'apparition du politique dans toutes les sociétés, tout en s'examinant les critiques à une vision évolutionniste.

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**[Chapitre 1 :] Aux origines de la modernité politique** Ce chapitre va s\'intéresser aux doctrines et philosophies politiques qui pensent la **souveraineté**, les **lieux** de cette souveraineté et la migration de cette souveraineté du corps du **Roi vers un corps collectif** qu\'il faut explique...

**[Chapitre 1 :] Aux origines de la modernité politique** Ce chapitre va s\'intéresser aux doctrines et philosophies politiques qui pensent la **souveraineté**, les **lieux** de cette souveraineté et la migration de cette souveraineté du corps du **Roi vers un corps collectif** qu\'il faut expliquer et **légitimer**. **[I. Théoriser la fonction politique et l\'État]** On va étudier la **genèse de l\'État**. Il faut pour cela **rompre avec l\'« illusion juridique de l\'État** » selon laquelle la fondation d\'un État partirait d\'une *volonté collective autour de l\'adoption de règles de* droits qui feraient apparaitre l\'État. On essayera de penser l\'État à partir de ses fonctions (**approche fonctionnaliste**), qui nous permet de comprendre pourquoi il apparait.  **[A. Les hypothèses de l\'anthropologie politique]** L\'**anthropologie politique** permet de dépasser les expériences et les doctrines particulières en essayant de **montrer ce qu\'il peut y avoir de commun à des sociétés très différentes** sur la question du système politique et sur la question de l\'État. L\'anthropologie **s\'intéresse aux Hommes et aux société humaines**, à ce qu\'ils ont inventé pour gérer un groupe. On peut trouver des propriétés communes à tout fonctionnement politique, ce qui serait propre à l'ensemble des fonctionnements **humains** - Le but est de se **détacher de la forme occidentale** particulière de l\'État bureaucratique wébérien. On va étudier l\'État comme un système politique qui s\'est différencié des autres secteurs de la vie sociale et qui a pour vocation de s\'occuper du groupe. C\'est la politique dans son sens ultime. Un secteur de la société s\'occupe de l\'ensemble de la société. - On constate que **toutes les sociétés produisent du politique. Mais cela ne veut pas dire que toutes les sociétés connaissent l\'État mais en tout cas un système politique**. Débat sur ***l'origine de l'Etat*** : vision négative du néolithique - Révolution néolithique aurait été un drame =\> passage à l'agriculture sédentaire à l'élevage : perçu comme le début de l'agriculture industrielle / intensive - David GREBER ? considère qu'il faut arrêter la rupture entre paléo et néolithique et montre qu'avant le néo, les sociétés avaient expérimenté des formes très différentes et n'étaient pas que nomades et unitaires - Avant le paléolithique =\> formes de sociétés très différentes, les sociétés anciennes : très hiérarchises, des plus unitaires socialement, où les femmes avaient le pv, des sociétés varient en f/ du temps entendu comme les saisons **1. L\'État comme institution nécessaire (George Balandier, *Anthropologie politique*)** S\'il y a des **[systèmes politiques dans toutes les sociétés,]** c\'est qu'il y a nécessité à ce que le pouvoir apparaisse, [**nécessité structurelle qui répond à une demande du groupe** : ] - Il faut un système politique pour ***faire respecter les règles du groupe***. - Le politique a pour fonction de ***faire tenir le groupe, contre lui-même et sa tendance a l'anthropie, au désordre***. Autrement, il y a plutôt une tendance à ne pas respecter les règles, au désordre, quitte à conduire à la violence. - Il y a donc des ***fonctions conservatrices*** du pouvoir, qui est là pour conserver la ***cohésion*** du groupe en ***[interne]*** et de le protéger des menaces ***[extérieures]***. Il faut penser un système politique qui est à la fois ***tourner vers le dedans et vers le dehors***. - Dans les sociétés ***occidentales***, c\'est un pouvoir ***unitaire*** qui occupe ces ***deux fonctions***. Au contraire, il y a une dans certaines sociétés ***traditionnelles***, une ***séparation*** du système politique pour gérer ces ***deux fonctions*** : un chef *politique* et un chef de *guerre* (société Camerounaise). Le ***chef politique*** s\'occupe de la cohésion ***interne*** du groupe et de la communication avec les grands ancêtres. Le ***chef de guerre*** s\'occupe de la défense en cas d\'attaques venant de ***l\'extérieur***. - Dans certaines tribus ***amérindiennes***, on a une distinction entre un ***chef titulaire*** et un ***chef fort***. Le ***chef titulaire*** a pour fonction de maintenir le groupe par sa seule **force oratoire** et ses dons **pacificateurs** en jouant l\'arbitre des conflits ***internes*** ≠ ***chef fort*** va lui maintenir la cohésion du groupe par le biais de la **coercition**. On a donc ***deux centres politiques différents qui ont le même objectif*** : maintenir la cohésion du monde. Débat sur les **[critères]** permettant d'identifier l'activité politique différenciée Etat -\> plusieurs critères : **[L\'État est un concept très occidental qui ne s\'applique pas bien aux sociétés traditionnelles]** - où le système politique n\'a pas la même forme que nos États occidentaux. - Il ne faut pas chercher à calquer **notre modèle d\'État bureaucratique** mais au contraire chercher des **caractéristiques que l\'on pourrait assimiler** à un État : - Séparation ***gvts / gvés*** - Emploi ***légitime*** de la coercition - Maintien de l'ordre sur un ***territoire*** donné - Possibilité et légitimité pour un ***groupe*** de diriger la collectivité (ex : Armée, personnes âgés) par la coercition **[Dans la perspective marxiste, l\'État est un instrument aux mains d\'un groupe social dominant]** - qui l\'utilise pour ***imposer sa volonté***. Dans de nombreuses sociétés, on retrouve des clivages entre ***classes dominante et dominée***. - On retrouve d\'un côté des *princes, la noblesse, l\'aristocratie et des guerriers*, *les capitalistes* qui tirent surplus de profit de la production des B, d\'un côté et de l\'autre les *paysans, les ouvriers* qui produisent des biens pour la collectivité sans avoir le pouvoir. - Dans cette perspective, le pouvoir est le reflet d\'une ***violence de classe***. - Soit on arrive a ***maitriser en interne*** ces intérêts antagonistes, soit le groupe se dote d'une ***structure qui arbitre ces conflits,*** qui soit suffisamment ***puissante pour contenir ses contradictions sociales*** [l'Etat], l'institution politique qui doit réguler les conflits de classe, éco. - Engels, qui est un penseur marxiste, considère-lui que ***l\'État émerge quand les contradictions sociales et les conflits sociaux s\'amplifient dans une société***. - Dans la perspective marxiste, ***l\'État est contrôlé par la classe dominante*** pour empêcher une révolte des classes populaires. L\'État n\'est ***pas neutre*** car il est aux mains du groupe dominant. - Cela ne veut pas dire que l\'État est ***~~monolithique~~*** : il peut être traversé par des rivalités, par des antagonismes sociaux et peut être ***clivé en interne***. Il peut y avoir plusieurs classes sociales dominantes au sein de l\'État avec des intérêts divergents. Sans dimension eco ou social.. **[Dans les sociétés traditionnelles, l\'État apparait en organisant le lien territorial]** - On baisse d'une échelle \> 1 tribu sur 1 territoire connu, limité, les idvd partagent 1 même parenté en plus d'un même territoire - Comme la ***population augmente***, les membres du groupe ne se connaissent plus et ***ne se reconnaissent plus.*** Quand le groupe s\'étend, il quitte le lieu de départ qui était celui des fondateurs. Le système de ***parenté ne fait plus sens***. - L\'enjeu est de doter le groupe d\'une consistance et une légitimité pour décider pour le groupe. Le but de ***l\'État organise une sorte d\'unité territoriale***, qui unit les individus du groupe entre eux. - Pas de dimension politique \> on retrouve les fonctions conservatoires du gp sans considération économique (Marx), ou sociologique mais seulement sur le ***critère démographique*** **2. Naissance de la « division »** **« [théorie du conflit », l\'apparition de l\'État sert à perpétuer une domination ou une conquête militaire]**. L\'État **nait de la violence**, pour asseoir sa domination militaire par la **coercition**. Il nait dans les armes et il se poursuit dans les armes. C\'est l\'implicite de la définition de **l\'État** de Weber basée sur le **monopole de la violence physique légitime**. L\'État détient ce monopôle parce qu\'il s\'est construit dans la violence. L\'État peut aussi naitre d\'un phénomène de **[violence interne]** avec des groupes armés **à l\'intérieur du groupe** ou par le biais d\'une domination **économique** interne = une domination en interne Cette violence s'incarne par le biais d'un **appareil administratif, bureautique coercitif** qui permette de perpétuer cette domination sans concurrents **Pierre Clastres, [*La société contre l\'État* ]** Clastres est **anthropologue** et reproche à ses collègues de **chercher à tout prix l\'État dans les sociétés traditionnelles** comme s\'il était une nécessité et une constante, avec une vision ***évolutionniste*** qui voudrait que la forme **occidentale** de l\'État soit la forme ultime d\'organisation politique. Certains anthropologues ont beaucoup pensé les sociétés traditionnelles sous l\'empire du manque de **sociétés « sans État ».** Ou bien dès qu'ils trouvent un trait d'organisation qui se rapproche ***ethnocentrisme*** \> « embryon d'Etat », qui devra se développer dans le sens de la forme d'Etat occidental biais ***évolutionniste*** *c pas une méthodologie \> NE PAS ARRIVER AVEC L'ATTENTE DE « PAS D'ETAT »* Or **l'Etat occidental n'est pas un modèle-type**, c'est une forme d'Etat parmi d'autres, pas un standard - **[Sociétés « sans Etat »]** ? Or, certaines sociétés ont une **organisation extrêmement différente des nôtres** , réputées comme des sociétés « sans État », des sociétés déficientes. - Le **pouvoir n\'est pas séparé de la société**, où le pouvoir n\'est pas synonyme de coercition et de commandement. Des sociétés qui luttent contre la division entre gvts et gvnés, qui se veulent égalitaires - et **sans séparation entre les dominants et les dominés** Ces sociétés ne sont pas dans le manque de quelques choses mais qui luttent en permanence **contre la division entre ceux qui commandent et ceux qui obéissent** entre un groupe dominant et dominé. Elles ne sont pas « sans État » **mais contre l\'État**, qui crée de l'inégaité,d\'où le titre du livre de Clastres. A l\'époque de la parution de *La société contre l\'État* (1974), paraissent également ***[L\'archipel du goulag]*** qui va avoir une influence majeure en dénonçant le totalitarisme soviétique et l\'État soviétique qui l\'a mis en place. Les **années 1970** sont dès caractérisées par une **méfiance envers l\'État dans des perspectives antiautoritaires** qui s\'inquiètent de la dérive possible de l\'État. Clastres est lui-même dans une perspective antiautoritaire et anarchiste ce qui l\'amène à s\'intéresser à des sociétés qui n\'ont pas d\'État. Clastres est allé travailler en **Amazonie** pour restituer la **philosophie organisationnelle** de ses sociétés traditionnelles qui nous permet de nourrir notre réflexion sur notre propre organisation Les **[indiens Guayaki]**, qui s\'appellent entre eux **Aché** (signification : « les vrais hommes »), les guayaki = surnom que leur donnent leur ennemis les **guarani** . Les guayaki sont en **voie de disparition** au moment où Clastres arrive. Les anthropologues historiques comme Levistrauss ont étudié des sociétés avec beaucoup de mythes et de rituels. Les Guayaki n\'ont que **trois mythes fondateurs** et **n\'ont pas de forte vie religieuse**. Ils vivent essentiellement de la **chasse**, vivent nus, dorment près du feu, ne prennent pas de drogue. - M.Abensour : ***raison politique sauvage*** - ***Contrôle politique de l'économie*** - ***Conscience d'une disparition*** **[Cette société est]** **[plutôt égalitaire]**, **[sauf division sexuelle]** : il n\'y a ***pas de séparation des pouvoirs*** et la société fonctionne par le ***contrôle social*** qui prend la forme d\'un ***respect absolu de la tradition***. Mais il n'y a pas de pv coercitif pour réaliser ce contrôle social. Il faut respecter la tradition héritée des ancêtres. C\'est la légitimé traditionnelle. Il y a une ***division des tâches selon le sexe*** : les *hommes sont chasseurs* et sont les seuls à pouvoir porter les armes et les *femmes sont cueilleuses*. Les hommes homosexuels sont moqués et se retrouvent sans tâche. En plus, meurtre de femmes et d'enfants dans un rituel de décès. **[Contrôle social du politique : chef sans pouvoir] :** déconnexion **La société est égalitaire et il y a un chef,** mais il est impuissant car il n\'a **pas de pouvoir**. C\'est un chef **faiseur de paix**, l\'instance qui modère le groupe. Il **distribue des biens** pour apaiser les conflits. Il est bon orateur, ce qui lui permet de **calmer les conflits par la parole**. Ce chef assume donc un pouvoir **[civil.]** - En cas de **[guerre]**, **son pouvoir** devient **absolu** et il a une autorité totale sur le groupe pour le protéger. En revanche, une fois que la paix est revenue, son pouvoir diminue et il perd tout pouvoir coercitif. Le chef a une fonction oratoire. Il **parle** tous les jours mais dans **l\'indifférence générale** puisqu\'il ne dit rien. Son discours n\'est **pas un discours de pouvoir** car il ne peut ni commander ni utiliser la force, c'est une parole vidée de pv coercitif. Il ne peut exprimer que le point de vue de la société et toujours dans l\'unité. S\'il décidait à avoir du pouvoir, de **dire des paroles de commandement, il serait immédiatement marginalisé**. Ce chef est donc en **permanence sous le contrôle de la société (contrôle social du politique)**. Pour le **maintenir** dans une position **d\'infériorité**, il est tenu en dehors des **~~échanges économiques~~**, en particulier dans l\'échange des femmes. Le pouvoir est donc sous contrôle et faible.  Il y a une conscience trouble chez ce type de tribus qu\'il ne faut pas de différences dans la société et que le pouvoir, si on le laissait s\'installer, deviendrait mécaniquement coercitif en ce qu\'il prononcerait des paroles de commandement. **On a donc pas des sociétés sans État mais dans des sociétés qui refuse un État coercitif**. Clastres reste assez vague sur la façon dont pourrait apparaitre la division. Une hypothèse serait un chef de guerre qui ne renonce pas à son pouvoir en temps de paix. Dans la perspective de Clastres, **c\'est la division même qui est porteuse du mal**. Une fois qu\'elle a eu lieu, on ne peut plus s\'en séparer. Autrement dit, **une fois que l\'État apparait, on ne peut plus s\'en débarrasser. ** Si le chef est sans pouvoir, **[où est le pouvoir ? Il est dans le corps social]** : la société est en permanence préoccupée par son unité. C\'est un **contrôle social** pour empêcher l\'apparition de l\'État. On est donc bien loin d\'une société « sans État » mais bien contre l\'État. Controverse entre [ **Clastres** ]et [ **Pierre Birnbaum**] [**- Apparition de l\'État** :] dans la perspective de Clastres, l\'apparition de l\'État est **à la fois un accident et une réponse à l\'accroissement démographique**. Birnbaum considère lui qu\'il n\'y a aucun flou dans la naissance de l\'État, qui ne nait pas par accident mais par **décision volontaire** de la collectivité pour avoir une instance **protectrice**. **- [Modèle de société « contre l\'État] » [et contrôle social avec places assignées]** : à l\'opposé de **Clastres qui est séduit** par ce modèle de société sans division et égalitaire, Birnbaum considère qu\'il n\'est pas attirant. Le **contrôle social diffus** fait que chaque individu **surveille** les autres individus. Ce genre de société peuvent être extrêmement **liberticides et enferment les individus dans des rôles sociaux définis** : les chasseurs et les cueilleurs. Les hommes homosexuels sont exclus de ces fonctions. Cependant, **l\'État peut aussi avoir un rôle émancipateur** en donnant des droits aux citoyens sans les différencier selon leurs particularités. **- [Tradition et évolution]** : Clastres dépeint une société **figée au niveau de son fonctionnement législatif** du fait qu\'elle obéit à des coutumes **traditionnelles** qu\'elle ne peut pas changer, société pas volontariste. Ce n\'est donc pas une société autonome. Elle n\'est **pas maitresse de son destin** et ne peut ni changer ses lois ni son futur. Le temps n\'est pas linéaire mais permanent. Birnbaum oppose à cette société des **sociétés modernes et autonomes**, donc capable de décider collectivement de l\'avenir, **d\'innover** et de s\'adapter. **Clastres répond qu\'on peut être libre dans un système de normes intangibles**. Ce n\'est pas parce les normes sont fixes que l\'on est opprimé. C\'est par exemple le cas de la *religion*, qui est fondée sur des lois divines qu\'on ne peut pas discuter. **- [Oppression de l\'État VS Etat assure des régulations complexes]** : L\'État n\'est pas qu\'un **État oppresseur**. La vision de Clastres peut être un peu réductrice : l\'État peut aussi s\'occuper d\'un certain nombre de régulations complexes comme les ***régulations monétaires, financières, les transferts sociaux, la sécurisation des route***s, de la mer et **assure un équilibre social\...** Il est possible que l\'État apparaisse pour assurer ses fonctions techniques et bureaucratiques de ce que la société décide. L\'État est alors voulu par la société elle-même comme son bras administratif.  **[Désétatiser aujourd\'hui ?]** - James C. SCOTT , Zomia = peuples d'Asie = retour à la vie « sauvage » pour **échapper à la tutelle** de l'Etat chinois depuis 1000 ans, échapper au pv de l'Etat = échapper à : impot, esclavage, acculturation, sa prédation et à la conscription et donc à la mort - Ces peuples sont redevenus nomades MAIS processus de **retribalisation**, originellement pas issu de tribus \> **faux primitivisme** - Les ***libertariens*** américains réfléchissent à un retrait de l\'État, car **plus l\'État est puissant plus il écrase l\'autonomie de la société civile** et sa capacité à s\'autoorganiser. Ils ont une méfiance à l\'égard de l\'État qui utilise la société civile à son avantage. Or c\'est le contraire qui doit se produire : **l\'État doit être au service de la société civile**. On a donc une critique libérale et libertarienne de l\'État qui viserait un démantèlement de l\'État. - Peut-on désétatiser le fonctionnement de l\'État ? **En France, on est habitué à avoir un État fort**, qui décide pour sa société civile, pour différentes raisons : il est très bureaucratisé et c\'est lui qui a construit la Nation. Il y a pratiquement une **fusion entre l\'État et la Nation**, la société civile. Un État fort est plutôt sourd aux demandes de la société civile. Il est aussi très interventionniste, notamment dans le domaine économique.  - Comment penser une désétatisation qui ne soit ni libérale ni anarchiste ? Daniel Innerarity, dans son livre *La démocratie sans l\'État* par du constat que **l\'État ne peut plus et ne devrait plus résoudre tous les désordres sociétaux**. Nos sociétés détestent le désordre social, or nous sommes des sociétés plurielles qui entraine du désordre du fait de demandes contradictoires au sein de la société. Selon lui, le **désordre est inhérent à la démocratie** et **l\'État devrait fabriquer une démocratie conflictuelle** dans laquelle les problèmes sont **résolus par la société civile** dans un cadre démocratique. On abandonne l\'idée d\'un État ordonnateur de tout, d\'un État planificateur. **L\'État a vocation à mettre en relation des groupes sociaux et des entreprises qui vont coopérer plutôt que d\'essayer de résoudre** les problèmes lui-même. [Commentaire de Clastres] \- **Eduardo Viveiros de Castro** s'intéresse aux tribus, revendicatrices, qui incarnent un « **extérieur** » à l'Etat, qlq chose que **l'Etat n'arrive pas à intégrer**, à dominer. Ce maintien de l'extériorité à l'Etat propose un **autre mode de fonctionnement** Il disjoint la **nécessité politique et la nécessité étatique**. La nécessité po peut demeurer sans Etat (dans la police...) - *« la puissance sauvage n'est pas la pensé des sauvages mais la puissance sauvage de toute pensée »* = force de penser hors de l'Etat Penser les revendications des collectifs indigènes au Brésil : droit d'ê laissés tranquilles : Les groupes ne **luttent pas contre leur exclusion mais bien en faveur**, réclament un droit à l'indifférence à être laissé tranquille et ne pas être enrôlé sous la domination « **rexistence** » résistance + droit à l'existence **[B. La sortie du théologico-politique]** [**La question de la séparation entre le religieux et le politique est centrale depuis longtemps en Occident**.] Les rapports entre l\'église chrétienne et l\'État français sont **pacifiés** depuis plus d\'un siècle mais ça n\'a pas toujours été le cas. Dans d\'autres pays, il existe une **confusion** entre le politique et le religieux, car **la loi est une loi religieuse** et tout le pays est organisé selon la religion. Ce qui relève de l\'organisation sociétale relève du religieux et ce qui **relève de la vie privée aussi et l\'espace privé peut être contrôlé en permanence par le religieux.** Ce type de régime sont des **[théocraties]**.  Les religions ont une vision intégralité selon laquelle **la loi religieuse a prétention à s\'occuper des mœurs**, des **rapports** de genre, des habits et des corps d\'une façon générale, en plus du droit commercial, civil et pénale. La religion a vocation à s\'occuper de **l\'intégralité de la société**. Cela n\'aboutit **[pas forcément à une théocratie]**.  **[Ce qui est central historiquement c\'est la place à accorder aux églises dans la société]**. Dans l\'histoire occidentale, le **Pape** est une figure importante et il est très **interventionniste en politique**. L\'église avait des **tribunaux** et une grande **influence** sur les États. L\'histoire a été **celle de la soumission de la religion au bénéfice de la société**. Les sociétés modernes, qui se dirigent par elles-mêmes rejettent le pouvoir du religieux en politique. **1. Les voies de la différenciation politique** **[A partir du 13ème en Occident, l\'ordre politique et l\'ordre religieux entre en concurrence]**. Il y a toujours eu une présence des deux ordres, qui étaient différents. Cela tient à l\'origine du **christianisme qui est une religion d\'orient et écrase les religions européennes**. En [occident], le religieux est vu comme un ***ordre extérieur*** qui arrive. A l\'inverse, dans les sociétés [orientales], le religieux étant ***immanent de la société***, et la fusion est immédiate et il n\'y a pas de distinction entre le politique et le religieux. **[Paul Veyne ex voto]** : ??????????????? **[L\'enjeu va être pour le politique et le religieux d\'être plus sacré que l\'autre]**. Dès lors, il y a des tentatives permanentes des **rois et des empereurs pour se présenter comme des personnages sacrés**. Le pouvoir **papal** est extrêmement interventionniste en matière politique : l\'un des papes importants est le Pape Innocent III (1160-1216) qui a théorisé une **supériorité du Pape** en matière temporelle et donc politique. L\'Église va commencer à **s\'autonomiser** avec la doctrine de la « **monarchie pontificale** » : désormais le Pape est **élu par les Cardinaux ce qui bloque toute intervention du pouvoir civile** dans le processus. Le mécanisme électoral est donc un mécanisme ancien et connu depuis très longtemps.  [**L\'interventionnisme de l\'Église commence à être contesté au 13ème après l\'échec des croisades**.] A cette époque, on commence à voir se développer en Europe de **centres politiques** qui seront les futurs États. Le pou**voir se concentre dans les mains des rois, qui vont tenter d\'affaiblir l\'Église pour étendre leur pouvoir**. - C\'est ce que fera Philippe Le Bel (1268-1314) : il décide d\'imposer (***impôt***) aussi bien les *laïques* que les membres du *clergé*, ils dépendent du pv politique donc - il a fait ***comparaitre*** l\'abbé Bernard Saisset alors que les Abbés ne pouvaient pas comparaitre devant les cours royales **sans être au préalable déchu de leurs statuts de religieux**. - Le Pape Boniface VIII réagit en 1301 à en disant que le *roi a un supérieur et est soumis au chef de la hiérarchie ecclésiastique et n\'a aucun pouvoir sur le clergé*. - On a donc une situation de conflit assez forte. - ***L\'attentat d\'Anagni de 1303*** est une tentative de ***Philippe Le Bel de kidnapper le Pape*** mais qui échoue. **[C\'est le moment où les juristes royaux vont penser à la manière de légitimer le roi]** en transférant le **divin du Pape vers le roi**. Il règne désormais sur ses sujets comme le Pape sur les chrétiens. - Pour faire fonctionner tout cet appareil papal, **l\'Église se bureaucratise** et devient une institution qui va s\'occuper de ses propres fins, ce qui fait qu\'elle **s\'occupe moins du politique**. - **Thomas d\'Aquin** va théoriser l\'idée d\'une **dualité entre les domaines spirituel et temporel**. ***l\'Homme*** en tant que créature vivante animée par Dieu relève du ***domaine spirituel***, en revanche l\'Homme en tant qu\'***être social*** relève du ***domaine temporel*** - **différenciation fonctionnelle** entre l'ordre religieux et politique. L\'Église a désormais vocation à s\'occuper du salut des âmes dans l'au-delà, tandis que le pouvoir politique doit s\'occuper du bien commun sur terre. [**Le pouvoir politique en Occident se construit en imitant les formes de l\'appareil ecclésiastique**,] puisque que c\'était le **premier pouvoir** organisé et institutionnalisé. Le pv po commence à se doter de juristes, d'ambassadeurs, jusqu'au fonctionnement de la royauté Dans *Les deux corps du Roi*, **Ernst Kantorowicz** (1895-1963) théorise l\'idée que **[le roi va se penser comme la tête d'un corps politique] *à l'image de Jésus*** qui est la tête du corps mystique de l'ensemble des chrétiens. Si le ***corps physique*** du roi peut mourir, son ***corps politique ne meurt pas*** mais lui survit de ***roi en roi***. C\'est l\'invention de la ***perpétuation du corps politique, la royauté ne meurt jamais***. Cela entraine le fait qu\'il n\'y a jamais de **~~vacance~~** du pouvoir, ce qu\'on appelle l\'inter-reigne durant laquelle il y avait une vacance du pouvoir, ce qui pouvait être dangereux. [ **Les rois se sont placés historiquement sous l\'autorité de Dieu**] depuis l\'invention de la **cérémonie du Sacre**, durant laquelle le roi est aspergé d\'huile, qui marque **l\'onction de Dieu au messie**. Les rois vont s\'appuyer sur cette **légitimité divine**, c\'est le fameux pouvoir **de guérison des « rois thaumaturges** » (toucher des écrouelles). Le roi a toujours la prétention à être souverain politique et envoyé de Dieu, il se présente comme protecteur de l'Eglise. - *Sacre de Pépin le Bref* (751) [ **L'ordre religieux craquèle et est contesté à partir du 16^ème^ siècle** ] Parmi les éléments qui vont affaiblir l\'Église**, on retrouve la réforme protestante** va poser l\'idée que **l\'Église est seulement l\'assemblée des fidèles** et ne devrait **pas être une institution**. L\'Église est métaphorique, c\'est l\'ensemble des fidèles. **2. Le rôle du catholicisme** ***Marcel Gauchet*, La religion dans la démocratie.** - Pour penser la **différenciation** entre le politique et le religieux, certains auteurs se sont demandé si quelque chose **dans la religion** elle-même contenait les prémices de la différenciation. Selon Marcel Gauchet, le ***[catholicisme a été la religion de la sortie de la religion]***. Il considère que les religions sont des phénomènes historiques avec un début, un développement et une fin.  - **[Les religions sont une vaste entreprise de dépossession de l\'Homme]** : à chaque fois que l\'humanité a connu un **progrès technique**, au lieu de se l\'attribuer, la religion la met sur le compte d\'une puissance surnaturelle. Les humains sont donc **dépossédés de leur capacité créatrice. ** - **[Le religieux n\'est pas flottant mais il est organisé en Clergé]**. Celui-ci va **parler au nom du divin** et rappeler son importance. Ils vont être les ponts entre l\'Humanité dépossédée et la divinité qui est à **l\'origine de toutes les inventions** des humains. Il prétende parler au nom d\'un principe antérieur et supérieur qu\'est le divin.  - **[Cependant, plus on invente un autre monde, plus il s\'éloigne du monde terrestre]** et l\'on commence à appartenir à un **autre ordre**. A force de cet autre monde, plus il parait plus lointain du monde terrestre. On va alors se **replier sur le monde des hommes**, qui nous parait plus proche, ce qui va nous mener à penser **l\'autonomie du monde terrestre**. C\'est ce mécanisme qui va **entrainer la séparation** du pouvoir religieux et du pouvoir politique. - **[Le judaïsme invente le monothéisme]**, avec un Dieu puissant et ordonnateur, **plus puissant que les autre**s dieux et il sauve les Hommes.  - **[Le christianisme va inventer un Dieu fait homme]** en la personne de Jésus. C\'est **l\'incarnation du divin**, à laquelle il faut ajouter Marie qui porte le divin.  **Cette incarnation produit trois effets** : \- [L\'**ouverture de l\'humanité à elle-même**] : si Dieu s\'est incarné en un homme, ça veut dire que **l\'Homme est important**. Il n\'est pas une créature faible et dévalorisée. Jésus a été dans le monde, il a été humain. \- Elle permet d\'avoir un **Dieu avec lequel on a un rapport direct.** On peut directement interagir avec lui, on peut directement lui adresser nos prières. C\'est **[l\'invention d\'un dieu personnel]** : on a plus besoin de passer par le truchement de l\'Église.  \- **[Jésus incarne l\'intercesseur ultime]**, sans rival de Dieu avec les Hommes car il est le fils de Dieu. **Le roi est de moins en moins perçu comme le représentant de Dieu sur terre** mais comme appartenant à la société. **3. La fin du religieux** - Ce n\'est pas la disparition de la religion mais selon Gauchet **la fin du rôle de structuration de l\'espace social que le principe de dépendance à un au-delà a rempli dans l\'ensemble des sociétés**. C\'est le passage de **[l\'hétéronomie à l\'autonomie des sociétés]**. Des sociétés gouvernées par un autre, une instance divine, des grands ancêtres ou par la tradition, à une société qui est capable de s\'auto-organiser. C\'est le mouvement qui caractérise la **[modernité]** politique et la fin du théologie politique. **[Les croyances religieuses restent mais les sociétés sont animées par des idées politiques]** qui sont la matière qui tissent notre société politiquement. **a. Les effets de la sécularisation ** - Les sociétés s\'autonomisant commencent à penser leur **appartenance terrestre**. Une grande partie de nos activités à partir du 18ème siècle vont consister à **s\'approprier** le monde terrestre notamment à travers l\'art, le cinéma, la peinture\...  **[Désormais, l\'\'avenir des sociétés n\'est pas écrit mais à inventer collectivement]**. Les sociétés ne sont plus prisonnières de la tradition mais qui se projettent par :  \- Le programme politique dans le [court terme] \- Le projet politique sur le [moyen terme] \- La prophétie politique [**Il va y avoir une concurrence politique et partisane entre des politiques et des idées partisanes**.] Ce débat-là est permanent. Dans les régimes démocratiques, les élections permettent de choisir les idées que l'on pense les meilleurs pour diriger. [**Cela pose des difficultés** :] \- Cela **crée de l\'incertitude**, ce qui peut faire peur. Il peut y avoir la **tentation de revenir au religieux**, qui est rassurant et structurant. Au contraire, il peut y avoir la tentation inverse du ***messianisme*** (type IIIème Reich). \- La **religion va se convertir au « marché des idées »** : des partis vont porter des idées politiques qui sont en réalité des idées religieuses. \- **L\'inflation législative** : on fait des lois en permanence, ce qui pose un problème : on a l\'impression que les lois sont ***impermanentes,*** avec des lois qui ne durent pas et qui sont faibles. **b. Laïcité à la française** - Ce qu\'on appelle la laïcité à la [française **est une forme spécifique de sécularisation**]. La laïcité est ancienne et ne s\'invente pas avec la loi de 1905. Il ne faut pas confondre la [tolérance] et la [laïcité], la première ayant pour objectif de [faire coexister les religions]. A l\'inverse, la **sécularisation cherche à bâtir une société laïque, fondée sur la liberté religieuse, pour que chacun puisse y apparteni**r sans être bloqué par ses particularismes, de tout ce qui peut être aliénant. L\'idée n\'est donc pas d\'inventer un ***~~espace pluriconfessionnel~~*** mais d\'inventer un ***[espace non-confessionnel]***. - **[La laïcité n\'interdit pas la religion]** parce qu\'elle ne se mêle pas du religieux. Elle rappelle que c\'est *laïkos*, le **peuple** en grec, le profane qui **gère la citée**, et pas le clergé.  - [L\'**article 1er de la loi de 1905**] énonce : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le *libre exercice* des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l\'intérêt de l\'ordre public. » Chacun peut donc *choisir de croire ou de ne pas croire* : la République garantit la liberté de conscience. - La **[liberté de conscience]** est première et elle est **garantie par l\'État** **mais il ne l\'organise** **pas** au sens où il n\'y a pas de subventions, tant qu\'il **respecte le droit commun**. C\'est la question de **l\'ordre public** : quand l\'État interdit par exemple le voile intégral, il ne le fait pas pour des questions religieuses mais parce que cela contrevient au droit commun ou à l\'ordre public. Dans ce cas-ci : l\'impossibilité d\'identifier le visage. - **[L\'idée de la laïcité se concentre essentiellement sur le principe d\'une séparation]**. La puissance publique s\'abstient de la croyance ou de l\'incroyance. Cela veut aussi dire qu\'il n\'y a **pas de religion officielle** ou civile, cette dernière étant très présente aux *[États-Unis]* comme une forme de sacralisation des institutions, qui est une forme de croyance qui, si elle était imposée, contreviendrait à la liberté de conscience.  - Si on s\'intéresse aux religions, c\'est la même séparation mais inversée[. **Les communautés, confessionnelles ou non, ne font pas la loi**]. Ce que la laïcité refuse, c\'est la domination d\'un principe confessionnel soit sur l'État soit sur la société civile. La séparation vise à **lutter contre une emprise cléricale sur la fabrication de la loi mais jamais contre une religion comme principe spirituel. ** - [**La loi n\'est fabriquée que par des citoyens**,] des individus libres qui acceptent d\'être laïque. On peut être **croyant et laïque**, ce n\'est pas antinomique. L\'incroyant est également libre et respecté, ce qui n\'est pas le cas dans les sociétés fondées sur la tolérance. La loi est discutée en raison, on va exposer des arguments, des savoirs et des critiques qui sont accessibles à tous, et **pas sur la foi** ou des éléments surnaturels.  - **[La laïcité n\'est pas une doctrine]**, puisqu\'elle ne professe aucune doctrine mais pose simplement que pour faire la loi, il faut être un sujet civil et pas un représentant d\'une religion. C\'est pourquoi l\'État français ne reconnait aucune communauté religieuse mais seulement des individus. - L\'invention d\'une **[politique sans transcendance]**, celle de la modernité, a été un **défi pour les républicain**s en particulier sous la IIIème République, parce **qu\'il a fallu laïciser la société** en arrachant à l\'église des choses sur lesquelles elle avait un monopole depuis longtemps pour les réinventer. Il a fallu laïciser l\'hôpital, le cimetière et bien sûr l\'école. Si on remonte avant 1905, la Révolution **invente le baptême civil pour affaiblir le baptême religieux**, idem pour le mariage civil en 1792 qui permet de se marier avec quelqu\'un d\'une autre religion. On laïcise les **institutions mais aussi l\'espace public** : les tribunaux et les hôpitaux ne doivent pas comporter de signes religieux. Laïciser sous cet aspect cherche à **refaire du commun**, ce qui nous ramène à l\'étymologie ***laïkos***, en rendant au peuple. - [**Une série de lois laïques sont votées avant 1905, dont les lois Ferry** **sur l\'école de 1882**]. L\'école apprend aux enfants des formes de libertés et aussi que l\'on peut avoir aucune religion, d\'où le **refus des signes religieux** à l\'école. L\'école remet tous les enfants à **égalité**, en les dépaysant, ce qui permet à tous les enfants de **s\'élever par l\'apprentissage** peut importe leurs appartenances.  - **L[a laïcité a permis de produire un certain nombre de libertés]** : le droit à la contraception, à l\'avortement, le principe d\'indépendance de la recherche scientifique, là où un système **théocratique a tendance à être autoritaire** et conservateur. - [**La disparition du religieux comme principe structurant a été effrayante pour les contemporains**.] Elle fabrique une société qui ne sait plus dans quelle direction elle va, cela met **à bas tout l\'édifice moral qui régissait** le système jusque-là et ça fabrique un système politique **fragile**, car il n\'est plus sacralisé par une force divine supérieure.  - **[Sous la IIIème République, la concurrence est forte]** entre les adversaires d\'un régime sans Dieu et sans moral et ceux qui veulent l\'installer. On essaye **alors d\'inventer une morale républicaine sans Dieu**. Le défi des républicains est de **transformer des individus en citoyens soucieux de la chose politique** et de la société civile. Si l\'individu n\'est désormais plus relié au groupe par une institution religieuse, comment va-t-il s\'y relier ? Les républicains inventent un **citoyen maitre de lui-même**, capable de se contrôler et rationnel. Il ne fonde plus son comportement sur des obligations religieuses mais sur la **raison**. Le citoyen peut alors avoir avec les autres des rapports **de respect mutuel** et de compassion. Il faut que ce citoyen soit au service de sa patrie, qu\'il **soit prêt à mourir pour le groupe**.  - **[L\'objectif des républicains est de montrer que la paix civique ne passe pas nécessairement par une morale]** extérieure mais qu\'elle peut être cherchée en soi. Il s\'agit des bâtir des citoyens **éclairés capables de voter sans être sous influence** religieuse. C\'est **l\'école** qui a cette mission en rappelant que les individus sont interdépendants et insérés dans des groupes sociaux dont il dépend et envers lesquels il a des **devoirs**. - Face à cela, **[les catholiques vont développer un contre discours]** selon lequel si l\'Homme vie en société, ce n\'est pas à cause d\'une quelconque interdépendance **mais parce que Dieu l\'a décidé. La société est voulue par Dieu** et la Nation n\'est **pas pensée comme une adhésion volontaire** mais comme un regroupement de familles ayant les mêmes mœurs et tradition. Pour le clergé, toutes les actions individuelles doivent être **orientées dans la perspective du salut et sanctionnées lors du jugement dernier**. Elles ne peuvent trouver leur fondement dans la société mais dans la perspective d\'une vie future. Il faut **qu\'il continue à craindre Dieu** et que le curé reste son guide de conscience. Le clergé va **alors dénoncer l\'école sans Dieu**, qui ne fabriquerait aucune morale et construirait des individus isolés et qui serait même une école du crime, car les actions se déroulent hors du regard de Dieu.  - Le pouvoir politique débarrassé de ses fondements religieux doit donc **[recréer tout un système moral, civil et politique]** à partir de bases complètement neuves. Il faut inventer les normes de son autonomie. Dans ce processus, il fait face notamment à deux défis : \- *[**Le religieux demeure comme pratique**.]* Il reste une pratique pour des millions de personnes et c\'est un fait qui est présent et discuté. Le religieux est devenu **une opinion qui intervient dans l\'espace public**, soit pour donner son *avis* sur des sujets éthiques (et bioéthiques) soit pour *condamner* des pratiques, des parutions de presse\... \- Certains auteurs considèrent qu\'il y a ***[un retour du sentiment religieux]*** en Occident qui ne profite pas spécialement aux églises mais **prend la forme d\'un besoin de communion sociale** dans une société industrialisée, inhumaine et qui aurait un besoin de sécurisation. Régis Debray pense qu\'il existe toujours une religiosité qui est une structure invariante de la société car ce qui ne change pas c\'est l\'incomplétude de l\'Homme **et l\'impossibilité de prévoir l\'avenir** ce qui donne naissance à une besoin de transcendance.  **[Conclusion]** Ce regard historique et sur l\'état actuel des institutions montre qu\'en **Occident et en France le politique est absolument séparé du religieux**. Le politique est sécularisé, il n\'y a pas a pas de religion d\'État, l\'église et l\'État sont séparés, la pratique religieuse est prohibée dans l\'espace publique comme dans l\'espace scolaire. La religion peut irriguer les croyances individuelles mais elle ne peut pas organiser les institutions. C\'est visible aux États-Unis, où le pays est peuplé de religieux mais où la société n\'est pas organisée sur cette base.  Le coup de force européen de la modernité a été de **passer de l\'hétéronomie à l\'autonomie** et donc à **sortir du théologico-politique**. C\'est par exemple les [théories du Contrat social], les principes républicains du citoyen éclairé. Ce qui s\'est passé en Europe a montré que la société peut cesser de régner.  **Le retour du politique s\'explique selon Marcel Gauchet comme une réaction à la modernisation**, à l\'idée de la sortie du religieux qui peut faire peur. Le **fondamentalisme serait alors une riposte** à la modernité occidentale dans des sociétés qui se sont mis sur la voie d\'une sortie du religieux. Ces pays voudraient se **moderniser mais tout en gardant selon ce qui forme le socle de leur culture** : le religieux. Or, il est compliqué de se moderniser en restant religieux et cela crée des **tyrannies théocratique**s qui sont des nouvelles formes de tyrannies qui n\'ont pas grand-chose à voir avec les anciennes théocraties. **4. La religion aux États-Unis** - **[Il y a toujours un rapport très compliqu]é** d\'admiration ou de répulsion **entre la France les États-Unis**, parce qu\'il s\'agit de deux Nations qui entendent porter un message universel et qui rentre donc en conflit. On s\'intéresse beaucoup à la place du religieux aux États-Unis. Dans le monde, **44 pays ont une religion d\'État,** ce qui pourrait être intéressant à étudier comme modèles alternatifs aux modèle français et américain. D\'autres régimes sont « **concordataires** », ce qui permet un financement des religions par l\'État.  - **[Les États-Unis ont la particularité d\'avoir l\'image d\'une Nation très religieuse]** depuis la France. Si on regarde dans le détail, les choses sont plus compliquées. On retrouve un principe de séparation de l\'église et l\'État qui est le même qu\'en France. En revanche, aux États-Unis il y n\'y a **pas de séparation de la religion et de l\'État**. Cette image de religiosité provient des signaux qu\'envoient les États-Unis eux-mêmes.  - **[En France, c\'est Tocqueville qui participe entre autres à donner cette image]** dans son livre *De la démocratie en Amérique* (1835). Il insiste sur le pouvoir du religieux aux États-Unis il le fait pour des raisons stratégiques. Son objectif est en effet de **démontrer qu\'il est possible de concilier démocratie et religion**. En France, on a le sentiment que si l\'on quitte la monarchie, il faudrait aussi abandonner le christianisme, ce qui pose problème parce que les deux étaient très liés et que la France est de culture catholique. Tocqueville cherche donc à montrer qu\'il est **possible de passer d\'une monarchie à un modèle républicain tout en conservant une culture catholique**. Du temps de George W. Bush, qui se présentait comme un *reborn christian*, il y avait des signaux religieux qui laissaient penser que les États-Unis étaient pétris de religion.  - **[En vérité, la religion est absente des grands textes constitutionnels américains]**, comme en France, mais les relations entre l\'église et l\'État sont beaucoup **moins conflictuels qu\'en France**. Il n\'en reste pas moins qu\'il peut y avoir périodiquement des offensives religieuses avec une prétention intégraliste de la religion. **a. Les offensives religieuses** - Le **[1er réveil religieux est évangélique]** et se produit dans les années **1740**. C\'est un moment important, du mouvement évangélique qui est le fait de pasteurs **protestants** qui vont passer dans les villes et tenter de **convaincre les gens de se convertir**. Leur message est que tout le monde **peut être sauvé** et se présenter devant Dieu sans péchés. Il n\'y a **pas de mécanisme de prédestinatio**n. L\'adhésion au protestantisme et les bonnes actions permettent d\'être sauvé. Ce réveil a un grand succès aux États-Unis et le protestantisme se diffuse très largement. Il va y avoir **une démocratisation du protestantisme**. Comme tout le monde peut être sauvé, tout le monde adhère. Cette démocratisation va de pair **avec la démocratisation politique. Cette évangélisation est sociétale** : il ne cherche pas à s\'occuper des institutions. Quand les grands textes démocratiques américains arrivent, il n\'y a pas de présence du religieux. - Le **[2ème réveil religieux se produit au 19ème siècle et est appelé la « guerre des deux bibles]** ». On est dans un moment de concurrence entre le protestantisme et le catholicisme du fait de **l\'immigration d\'irlandais catholiques vers la côte est des États-Unis**. Cette immigration crée une **inquiétude pour les protestants** de voir arriver des catholiques en masses. Cela les inquiète pour plusieurs raisons : **les américains ont fui les persécutions religieuses des catholiques** et ils ont la perception que la religion catholique est une religion interventionniste **qui va se mêler du politique,** ce qui pourrait défaire la séparation. Elle est perçue comme **intégriste** et elle est **étatiste en ce qu\'elle reconnait l\'autorité du Pape** comme chef du clergé. La religion catholique reste aujourd\'hui minoritaire aux États-Unis avec environ 65-70 millions de croyants et il n\'y a eu que deux présidents américains catholiques : Kennedy et Biden. - Le [**3ème réveil** **religieux**] a lieu au tournant 19ème et du 20ème siècles. Il a pour mission de **lutter contre la décadence** morale de l\'époque et notamment par la **prohibition**. Ce réveil prend plusieurs formes et a plusieurs origines. Il y a une **inquiétude des croyants de la montée du matérialisme** et un triomphe de l\'argent qui serait devenu le nouveau Dieu, avec un abandon de la religion. - Au **[début du 20ème siècle]**, dans le même mouvement, on voit le **[développement du créationnisme]**. Il y a un conflit important entre le **créationnisme et l\'évolutionnisme sur la question de l\'origine et du développement des espèces.** Le créationnisme s\'appuie sur le texte de la *[Genèse]* dont il fait une lecture littérale. Dans ce texte, Dieu a créé le monde, les étoiles, les animaux et les espèces. L\'histoire du monde est donnée par le texte biblique lui-même.  - **[La théorie scientifique s\'oppose à l\'idée du créationnisme]** et propose la théorie de l\'évolution. Darwin est un naturaliste et il a notamment écrit *L\'origine des espèces* (1859). Il part du constat d\'une extrême variété des espèces humaines. Jusque-là, la théorie créationniste l\'expliquait en disant que cette complexité ne pouvait qu\'être la création de Dieu. Darwin dit au contraire que **cela est dû à l\'adaptation des espèces à leur environnement**. Quand une espèce est bien adaptée, ces bonnes qualités héréditaires seront transmises aux générations suivantes. C\'est parce que l\'Homme a hérité des bonnes qualités des singes qu\'il a pu survivre. Ce qui a le plus marqué dans la théorie de l\'évolution, c\'est que **l\'Homme descendrait du singe, une idée qui va à rebours de la théorie créationniste**. Il explique que l\'évolution de l\'Homme comme espèce a pris une tournure un peu différente au sens où l\'espèce humaine est quasiment la seule à prendre soin des plus faibles. Dans les sociétés animales, les plus faibles sont abandonnés. **L\'évolution n\'amène plus l\'élimination chez l\'Homme et elle permet le développement d\'« instincts sociaux » qui évitent la sélection naturelle**.  - **[Il existe plusieurs formes de créationnismes, qui se sont adaptés aux évolutions scientifiques]**. D\'une part une vision **littérale de la Genèse** et d\'autre part une **vision qui admet certaines avancées scientifiques**, comme le fait que la terre à des milliards d\'années, que l\'univers a commencé par le big bang. Cependant, ces créationnistes voient dans ces phénomènes la présence d\'un ***intelligent design*** selon l\'idée qui dit que la complexité de la nature provient forcément d'une intelligence supérieure qui a tout organisé et tout créé. C\'est la position du Vatican aujourd\'hui. - **[Un évènement intéressant dans le cas américain est le procès de l\'enseignant John Scopes]**. Cet enseignant a **enseigné la théorie évolutionniste, ce qui était interdit** dans l\'État du Tennessee. Il perd son procès et est condamné à une amende de 100\$, ce qui est une somme importante pour l\'époque. Cependant, ses avocats ont réussi à faire admettre à l\'accusation que les six jours évoqués dans la Genèse étaient métaphoriques.  - **[Les créationnistes vont faire pression pour que le créationnisme soit enseigné]** dans les écoles publiques. Ils tentent alors que les **deux théories soient présentées en parallèle** dans les programmes. Leur but est de donner l\'idée que la science serait une croyance comme une autre, alternative à la croyance religieuse. Plus largement, ces mouvements sont systématiquement hostiles à la sécularisation, à la science et à la rationalité. - Le **[4ème réveil religieux]** a lieu au cours des années **** durant lesquelles on constate un **[retour du religieux]** dans la société américaine. Il faut comprendre les doctrines et les idées comme réagissant les unes aux autres dans un **mouvement de balancier**. En 1973, **l\'avortement** est légalisé par l\'arrêt *Roe v. Wade*, qui garantit la possibilité aux femmes d\'avorter à leur convenance. Cette décision est perçue dans les milieux religieux comme le triomphe d\'une position *ultra-progressiste et meurtrière*. Selon le catholicisme, toute grossesse doit être menée à terme. Cela entraine en balancier le **retour du religieux,** avec notamment un acteur : Jerry Fawell qui fonde la Moral Majority et Pat Roberston qui créé la [Christian Coalition]. Ces acteurs religions qui se constituent en **lobby** mette la pression pour changer la jurisprudence. Robertson essaye même d\'obtenir l\'investiture du parti Républicain mais il échoue.  - **[Ce retour du religieux a aussi des raisons politiques]**. Le **parti Républicain** commence à injecter du religieux dans son **discours**, justement à partir des années 1960, pour **conquérir l\'électorat** blanc du sud qui se sent menacé par l\'émergence de noirs américains du sud comme citoyens avec les Civil Rights. George W. Bush fait campagne pour son père dans les états du sud pour marteler un discours religieux dans le but de récupérer cet électorat et en même temps pour **bloquer la route aux acteurs religieux qui veulent entrer en politique**. La droite républicaine cherche donc à bloquer l\'émergence de la droite religieuse. Le parti démocrate intègre lui aussi le religieux à son discours. La présence de la **culture religieuse imprègne aussi le discours des démocrates**. Bill Clinton, englué dans l\'affaire Lewinsky, a échappé à une procédure d\'impeachment à quelques voix près. Dans un discours après son impeachment, il s\'est dit touché par la grâce et par un pardon immérité. **b. La laïcité américaine** - **L[es textes fondateurs et la Constitution des États-Unis sont tous des textes laïques]** [ ] et ne font aucune référence à Dieu. La **déclaration d\'indépendance de 1776 se réfère à un créateur :** « *ils sont doués par leur Créateur de certains droits inaliénables ; parmi ces droits se trouvent la vie, la liberté et la recherche du bonheur* ». Cette référence au créateur se retrouve aussi dans le **Contrat social** : tous les êtres humains ont le même créateur = c'est un Père commun, qui peut être parfois Dieu ou la Nature. C\'est ce qui **permet la fraternité** entre les êtres humains, qui sont tous frères et sœurs puisqu\'ils ont le même père **DONC tous égaux**. Dans la **Constitution de 1787, plus de ref à Dieu**, la religion n\'est évoquée que pour dire que l\'on ne regardera pas la religion des citoyens art 6 « aucune profession de foi religieuse ne sera exigée comme condition d'aptitude aux fonctions... » = une séparation - **[1er amendement de 1791]** : « Le Congrès n\'adoptera *aucune loi relative à l\'établissement d\'une religion, ou à l\'interdiction* de son libre exercice ; ou pour limiter la liberté d\'expression, de la presse ou le droit des citoyens de se réunir pacifiquement ou d\'adresser au Gouvernement des pétitions pour obtenir réparations des torts subis. » - **[Il n\'y a donc pas de religion officielle, de religion d'Etat et on ne se mêle pas des religions]**. Il n\'y a **ni interdiction ni imposition** d\'une religion. Le reste de l\'article concerne les différentes libertés publiques. On met dans le même article la **liberté et la religion**, qui font **système =** Le religieux renvoi donc à la société civile. C\'est la **société civile qui organise la religion** et pas l\'État ou les institutions. **[/ ]**!/ des rites nous font penser que le religieux n'est pas totalement séparé de l'Etat... - La **[tradition du serment sur la Bible]** n\'est **pas une obligation** juridique mais une **coutume** qui s\'est installé avec le temps. La coutume est de jurer sur une bible fermée, donc pas sur une page donnée \> nuance à la connotation religieuse. C\'est donc la **bible prise dans sa généralité qui est considérée**. Les présidents ont une **marge de manœuvre** importante. La bible de Washington et des présidents suivants était une **bible maçonnique et non pas chrétiennes**. Théodore Roosevelt ne prête serment sur aucun texte. John Kennedy, premier président catholique des États-Unis a juré sur une bible catholique. Obama a prêté serment sur la bible d\'Abraham Lincoln et sur une bible ayant appartenu à Martin Luther King. Cet acte de **prestation de serment n\'est donc au fond** **pas religieux mais politique**. Obama s\'inscrit dans le progressisme de Lincoln et la lutte des droits de Luther King. - Les **[symboles américains]** : les **sceaux** américains contiennent des slogans **latins** qui sont empruntées au poète antique **Virgil** qui est important parce qu\'il est antérieur à l\'apparition des monothéismes. Il a incarné la **sagesse et la raison humaine** pendant tout le moyen-âge. Virgil est véritablement devenu le poète national aux États-Unis. Les Etats-Unis ont formé une **nation unique** à partir de l'union des **13 colonies** - On retrouve la mention de Dieu dans [**plusieurs** **slogans**]. A chaque fois, c\'est lié à un contexte politique troublé (guerre) =\> politisation du religieux. Sur les **billets** de banques : ***In God we trust***, qui ***vient d\'un chant militaire de 1812*** dans la guerre contre les anglais, qui deviendra ***plus tard l\'hymne national***. Ce slogan a été proposé pour figurer sur la monnaie au moment de la guerre de sécession. Cela a été proposé par des *prédicateurs protestants* favorables à l\'abolition de l\'esclavage et qui pensait que ce confit fraternel était lié à une colère de Dieu. Pour apaiser cette colère ils ont pensé qu\'il fallait *rappeler que Dieu a une importance* et le faire sur quelque chose qui est très répandue. Ils vont convaincre le secrétaire au Trésor et à partir de 1864 sur les pièces puis en 1957 sur les billets de banque.  - Texte/ chanson **[« God Bless America]** », 1918, Irving Berlin, juif russe arrive a NY : gloire des USA , texte qui s'adapte au ctxt politique (crise po, guerre), l'origine religieuse de cette chanson VS juste un usage politique désormais - **[Hymne américain « The star-spangled banner]**" de 1931, ex "God is our trust" =\> - Le Dieu est représenté sur du **profane** aux US comme sur les billets, on ne parle pas du même Dieu, celui qui transcende ...., la charge religieuse du Dieu sur billet de banque \-\-\-\--, c'est un Dieu politique - Le **[serment au drapeau]** existe depuis 1892 mais la mission ***« under God*** » apparait en 1954, contemporain aux **billets** de banques, dans un contexte de guerre froide. Le but est de rappeler la présence des États-Unis **contre le matérialisme soviétique qui interdit les religions** - Les États-Unis ont organisé [la **sécularisation de la société**] par l\'idée d\'un **mur de séparation, pcp fondateur de la démocratie USA,** entre l\'église et l\'État. Séparation au niveau **fédéral** + par les Etats **fédérés**. Cela a été attribué au fondateur de l\'État du Rode Island, reprise par Thomas Jefferson en 1802. Des **législations** sont **implémentées** dans une majorité d\'États à partir du début du 19ème siècle. L\'expression est reprise et prolongée par Juge Hugo Black dans [l\'arrêt Everson v. Board of Education] (1947). - **[La jurisprudence américaine garantit systématiquement le pluralisme religieux]**, traiter les religions de manière égale, et le fonctionnement harmonieux des religions dans la société. Cela s\'explique du fait que les États-Unis ont été fondés par des ***personnes qui étaient persécutées pour leur religion***. - 1962 : [arrêt Engel vs Vitale,] prière à l'école \> les religieux ne sont pas d'accord, pas le bon lieu - 1952, the « [Miracle decision] », droit à la liberté d'expression dans les œuvres d'art \> le film « **Miracle** » pose pb car il est considéré comme sacrilège VS 1^er^ amendement, droit artistique au blasphème - Exemple mur de séparation \> [taxation sur les trajets scolaires de bus] \> rembourser les parents dont enfants sont en école privée ET publique : pied d'égalité, on rembourse bien les parents et pas une institution religieuse **c. La religion civile** - **[Aux États-Unis s\'est développé une sorte de religion civile]**. Cela recouvre l\'idée d\'une **morale laïque**, « **patriotisme civique** » une éthique dont seraient porteuses les institutions américaines. **L\'amour des institutions passe donc par celui des valeurs et de la morale** auxquelles elles sont associées. Cela permet de faire tenir le groupe sur une éthique commune. Dans le serment au drapeau, ce qui compte c\'est le serment et pas le drapeau. Dans le serment sur la bible, ce qui compte c\'est la figure du président. - La notion de religion civile a été développée dans le *Contrat social* de Rousseau. La religion peut être une **affaire privée** mais il est intéressant d\'avoir une **religion civile fondée sur la « sainteté du contrat social et des lois ».** - Robert Bellah** :** Dans le discours inaugural de Kennedy, premier Président catholique, on retrouve trois **allusions qu' à Dieu**. Aucune allusion au catholicisme ni a aucune figure religieuse donnée (Jésus, Moïse\...). Cela s\'explique par l\'idée est [qu\'**en dernière instance, les institutions américaines reposent sur « Dieu »**,] ici entendu comme un **critère suprême et incontestable** pour savoir où est le **bien** et où est le mal, c'est un **critère moral**. Le peuple qui détient la *souveraineté peut se tromper de direction* et que si l\'on hésite au moment du choix politique entre le bien et le mal, il faut choisir en fonction d\'une morale divine, d'un critère externe. La politique est donc le choix entre le bien et le mal= **inspiration religieuse à l'action** VS en France la séparation bloque cela, et la religion civile n'a pas pris en France Imaginaire américain : USA est la nouvelle Terre Promise (protestants vs catho), Dieu est du côté des USA, nation consacrée par Dieu **[Conclusion]** [**La mention de Dieu est souvent un bricolage lié à des situation de crises et de guerres**.] - Il peut néanmoins y avoir **une morale religieuse qui irrigue les institutions** et les actions. - Les américains sont convaincus qu\'ils forment une nation protégée et ont une **destinée manifeste**, que Dieu leur a confiée une mission sur terre. La destinée manifeste = on doit rendre la liberté universelle mais pas promotion de la religion, cherche à universaliser qlq chose de politique. - Cela a présidé **la politique extérieure** des États-Unis, en allant apporter la *liberté aux autres peuples*, mais pas le protestantisme. - La **sécularisation américaine est non-conflictuelle**, contrairement à la situation ***française***. Ce qui caractérise le modèle américain, c\'est une **laïcité « philo-cléricale »** (Denis Lacorne)= le système est effectivement laïc au sens sécularisé (pas de financement public des cultes) mais pas d'hostilité à la présence des religieux = ce qui est donné à une religion est donné à une autre, aux croyants comme aux incroyants. **5. Tolérance et fanatisme** - **[L\'ordre européen vient de très loin]** et il est issu des *traités de Westphalie* (1648) qui met fin à la guerre de 30 ans et prévoit qu\'il puisse y avoir **une religion officielle**. La religion officielle doit être la religion du **Prince**, c\'est lui qui décide de la religion de son royaume : *« tel est le prince, telle est la religion »* - [**A partir du 16ème siècle, le protestantisme nait** **et croit au cœur des nations européennes**], ce qui crée un schisme à l'intérieur du christianisme ! 1^ère^ fois que la religion catho voit une religion concurrente Des **traités se font pour être tolérant** vàv du protestantisme même si surveillance ++ avec les dragonnades - Il devient parfois majoritaire mais reste minoritaire en France, avec un mouvement **d\'intolérance forte à l\'égard du protestantisme**. Plus la monarchie devient absolue, plus elle est catholique. Du fait de la diminution du nombre de protestants en France, la monarchie considère qu\'elle peut confiner voire interdire le protestantisme. En **, l\'Edit de Nantes est révoqué et les protestants ne peuvent donc plus pratiquer** leur culte. Certains vont *s\'enfuir* : entre 100 et 200 000 (conversion par force, destruction de temples...) - Les penseurs protestants vont commencer à philosopher... ; - Le **[défi du protestantisme]** est double : - peser sur la **monarchie et l'Eglise cathp pour qu\'elle soient tolérantes** envers la religion protestante - penser et promouvoir la **liberté de conscience** qui existe dans le **for intérieur**. - Promouvoir la tolérance implique que la monarchie pense la différence et la coexistence des religions. Il faut faire accepter l'idée d'un monde commun et partagé qui n'est pas homogène - Cela pose le **problème de la domination de la religion catholique**, comme **religion officielle**. Il faut donc accepter l\'altérité et la tolérance. Le protestantisme va essayer de pousser la **tolérance comme idée positive**, valeur proactive, c un réel défi, contre un mouvement intolérant et persécuteur.  - La notion de **tolérance n'a rien à voir avec la sécularisation** : objectif est de faire coexister les religions, on sort pas du théologico politique - **[Il faut pour cela repenser le rapport des individus à la religion]**. - La philosophie protestante va théoriser une **liberté religieuse personnelle**. D\'une part, c\'est *[choisir librement sa religion]* et d\'autre part avoir un *[espace intime, de la conscience]*, dans lequel personne ne peut rentrer, pas même l\'église : c\'est **le for intérieur**. Il va falloir garantir cet espace, ce qui sera l\'objet entre autres des droits de l\'Homme. - Cette philosophie fonctionne parce que le protestantisme a pensé **un rapport personnel à la religion**, notamment en faisant traduire la bible, ce qui permet aux croyants de la **lire chez eux et par eux-mêmes**. Cela crée un rapport personnel au texte et au religieux. Le protestantisme rappelle aussi qu\'il y a plusieurs niveaux de lecture de la Bible : il y a **des prescriptions directes et d\'autres passages qui sont des paraboles et qu\'il ne faut pas prendre littéralement**. On peut alors faire une lecture *philosophique et plus seulement religieuse* des texte religieux. - **[La présence d\'une culture catholique alliée à la royauté est très intolérante vis-à-vis de la religion protestante]**, qui va en **réaction développer une philosophie de la tolérance**, qui se double d\'une réflexion politique. - [Le massacre de la saint Barthélémy] a rompu la confiance avec le souverain, qui a organisé ce massacre, il n'a pas respecté le « [droit minimal des gens] ». Comment alors lui faire confiance ? - L\'idée **d\'un contrat social, « de confiance** », d\'un contrat moral qui pourrait être passé **entre le peuple et son roi**. Ce n\'est pas la même chose que le contrat social chez Rousseau qui est un contrat horizontal entre les individus. Ce **contrat est vertical**, qui garantit que le **souverain** n\'a pas le droit de tuer ses sujets, qu'il **s'engage à préserver leur bien-être**. Il faut essayer d\'inventer une société de tolérance, qu\'il va falloir justifier et l\'argumenter philosophiquement. **a. Locke et la tolérance** - Locke va produire plusieurs **[travaux sur la tolérance]** : *Essai sur la tolérance* (1667), *Lettre sur la tolérance* (1689), *Essai sur l\'entendement humain* (1690) - Pour Locke, [**l\'individu possède un certain nombre de biens temporels auxquels les individus sont attachés** (]la [vie] et la [liberté]) et **l\'État doit se limiter à garantir** ses biens temporels, c\'est sa fonction. L\'État doit s\'occuper de ce qui est temporel, et **pas au salut de l\'âme**. Tout ce qui relève de la spiritualité, de la métaphysique, relève d\'une **décision intérieure** et pas d\'une décision d\'autrui, qu\'il soit un individu, une église ou un État. Locke écrit : « *Aucun homme ne peut donner à un autre homme le pouvoir (\...) sur une chose sur laquelle il n\'a pas de pouvoir lui-même. »* - **[Impossible de déléguer à un magistrat]** (souverain) le soin de s'occuper de ce qui relève du spirituel. C\'est une liberté individuelle de choisir sa religion et sa croyance. Si on choisit sa religion sincèrement, après un dialogue interne, alors on sera sauvé. Imposer une religion à l\'autre, cela pourrait être un péché. L'Etat ne peut imposer sa croyance - **[Le véritable problème est qu\'il existe différentes religions]**. Dans ce cas, laquelle serait la « **vraie** » ? Cette vérité est à chercher en soit, ce n\'est pas un élément objectif mais **subjectif**. Locke a des arguments logiques pour ***justifier la non-imposition d\'une religion*** : - Ce qui *naissent sous l\'autorité d\'un magistrat qui est dans la vraie* religion (catholique) seront *sauvés*. Cela veut dire que si leur souverain leur impose cette religion, ils ont de la chance et ils seront sauvés. Au contraire, ce qui naissent sous l\'autorité d\'un magistrat qui est dans une *fausse* religion qu\'il va imposer ne *seront pas sauvés*, et donc damnés. ***Pourquoi est-ce que Dieu ferait naître des gens sous l\'emprise de mauvais magistrats ?*** Il fabriquerait des gens qui seraient condamnés à ne pas être sauvés car sous une fausse religion. Il y a donc quelque chose d\'absurde dans cela. Locke en conclut qu\'il n\'y a ***pas de bonne ou de fausse religion et il faut accepter le pluralisme*** religieux. - Admettons que le magistrat m\'oblige à avoir une religion, ***comment peut-on savoir si c\'est la bonne*** ou pas puisqu\'on ne connait que celle-là ? - Si on accepte que le magistrat nous impose sa religion et que c\'est la bonne, alors logiquement ***tous les autres magistrats sont dans une fausse religion***. Or, ceux-ci imposent aussi leur religion à leurs sujets. Il en conclut donc qu\'aucun magistrat ne devrait avoir ce pouvoir.  - **[Le magistrat doit se concentrer sur sa mission principale : s\'occuper du bien commun de la société]**, pas de la conscience individuelle. - Dans la conscience, il y a la religion mais aussi la politique***. La sanctuarisation de la conscience est centrale :*** c\'est dans cette conscience que se forme la discussion sur la bonne religion et aussi là où se forment les idées politiques. Si cette conscience est écrasée, alors on est dans un régime autoritaire. ***L\'État ne doit pas interférer*** dans les consciences individuelles. *Cf burkini \> autorité publique = mairie grenoble peut pas satisfaire une demande religieuse, et privilégier une religion sur une autre* **b. Bayle et la tolérance** - Bayle est un **[philosophe français]** et il a publié plusieurs ouvrages dont *[De la Tolérance, commentaire philosophique]* en 1686, juste après la révocation de ***l\'Edit de Nantes*** qui est vécu comme quelque chose de très violent à l\'égard du protestantisme.  - [**Il** **plaide pour la liberté de conscience et pour la tolérance religieuse**]. Il pose la tolérance comme un ***principe positif et moral***, quelque chose vers lequel il faut aller. La tolérance est le ***contraire de la contrainte religieuse*** or la doctrine catholique prônait cette contrainte. Saint Augustin écrivait que la contrainte *permet de faire éclater la vérité dans l\'esprit* de quelqu\'un qui souffre d\'un ignorant qui va accéder à la vérité. - **[Le point de départ du livre de Bayle est un verset de la Bible]** : « Et le maître dit au serviteur : va par les chemins et par les haies, et, contraints-les d\'entrer, afin que ma maison soit remplie » (Luc 14-23). La doctrine chrétienne interprétait le « contraints-les » comme ***l\'obligation de convertir les non-croyants***. ***L\'adoption d\'une religion*** se fait sur le critère de la ***morale***. Bayle s\'intéresse à cette notion d\'imposition et il pose l\'idée que *l\'individu va évaluer les systèmes religieux auxquels il est confronté et va se demander s\'ils sont justes et moraux* ou non. S\'il estime qu\'une religion prône ou a *commis le mal* dans l\'histoire, il *peut refuser en conscience de l\'adopter*. Il n\'y a **[donc pas de religion bonne ou imposée mais une religion choisie en conscience.]** - Admettons qu\'un individu ne choisisse pas la bonne religion, alors s\'il persiste dans cette voie, il est dans le péché et cela est inexcusable. **[Bayle propose au contraire que si l\'hérétique persiste dans l\'erreur, c\'est un signe de vertu]** car il est dans la **sincérité** de la religion qu\'il a embrassé. S\'il est sincère, alors cela mérite de la considération. Ce qui compte pour qu\'une **croyance soit tolérée, ce n\'est pas son *telos*** (ce en quoi elle croit) mais la **manière dont elle est cru, ce qui renvoi au choix déontologique**. Ce n\'est donc pas le contenu de la religion qui compte. - **Il y a donc [pour les protestants un droit de la conscience et à l\'erreur individuelle]** à partir du moment où les choix sont faits **en conscience.** Si on **respecte** cette liberté de conscience, cela permet **d\'apaiser la société**. Au contraire, si on ne la respecte pas, cela donne les guerres de religions. La **lumière intérieure**, qui est *donnée à chacun par Dieu* permet de distinguer le vrai du faux, qui est un dialogue intérieur. - **Le [rapport à la religion est un rapport intérieur,]** c\'est ce que Bayle appelle les **[« actes de l\'esprit] ».** Ce qui compte, c\'est que **l\'esprit soit tourné vers Dieu, sans intervention extérieure**. La **contrainte ne produit qu\'une adhésion extérieure**, qui ne dit rien de l\'adhésion intérieure. Cette contrainte est donc une intolérance qui va à l\'encontre de l\'esprit de Jésus. - **[Bayle s\'attaque aux religions qui ont selon lui empoissonné l\'esprit des hommes]**. Il en conclut que les religions ne sont pas l\'œuvre de Dieu mais celui du **Diable**, qui étymologiquement renvoi à la **division**. Peut-on alors être sûr de sa religion et assez pour l\'imposer aux autres. Pour se sortir de cette question, il **faut dissocier la foi de la religion**. La foi renvoi à un sentiment **intérieur**. La « bonne foi » dans la croyance religieuse renvoi à la sincérité dans la croyance et c\'est ce qui compte réellement. La **religion renvoi à l\'église**, aux pratiques, aux rituels\... Plus on **insiste sur cette foi personnelle**, plus cela entraine un **dépérissement de l\'institution ecclésiale. ** **c. Voltaire et l\'affaire Calas** - **[Le *Traité sur la* Tolérance]** sort en 1763 à l\'occasion d\'une affaire judiciaire liée au religieux. Il est important à plusieurs égards : c\'est la **première fois qu\'un « intellectuel » prend position dans une affaire judiciaire.** C\'est un texte qui empreinte à pleins de registres différents : récits, textes sacrés, de proverbes, des dialogues\... Ce qu\'on appelle philosophie ne renvoie pas à une forme figée d\'écriture. Ce texte cherche à **lutter contre le fanatisme religieux**. Ce n\'est **pas seulement la tolérance** entre la religion catholique et protestante mais plus largement le fanatisme religieux qui intéresse Voltaire. - [**Jean Calas est condamné à mort pour avoir tué son fils**.] Les Calas est une famille implantée à Toulouse depuis de nombreuses générations. Un jour, le fils de la famille Marc-Antoine est retrouvé pendu dans sa chambre. *La rumeur se répand alors que son père l\'a tué parce qu\'il voulait se convertir au catholicisme.* *Voltaire pointe la foule, qui met en accusation le père avec une tendance lyncheuse. L\'intolérance religieuse* est d\'abord portée pour Voltaire par la population, ici la population toulousaine est traversée par cette rumeur. « Ce peuple regarde comme des monstres ses frères qui ne sont pas de la même religion ». C\'est *l\'ignorance qui entraine l\'intolérance, parce qu\'on ne reconnait pas une minorité alors on la rejette*. **[+]** sera aussi le terreau des théories du complot, contre les juifs, les femmes sorcière, bref des croyances irrationnelles qui ont menées à des violences. - **La [première forme d\'intolérance, c\'est l\'ignorance et le fanatisme]**, et la base de la violence. La religion qui est responsable de l\'intolérance, c\'est le **catholicisme**. Même si l\'on admet que le catholicisme est la vraie religion, alors **Dieu donnera des lumières intérieures** aux individus qui leur permettra d\'embraser la religion, et non **pas par l\'imposition extérieur**.  - **[Voltaire revient sur le verset « contraints-les d\'entrer] »**. Il dit que ce n\'est pas une parabole et qu\'il faut au contraire en avoir une **lecture plus littérale**. La fête du mariage n\'est donc pas une représentation du royaume de Dieu. Il dit aussi que la présence d\'invités contraints ne rendrait pas le diner agréable. C\'est une manière de dire que **forcer les gens n\'entraine que du ressentiment et de la peur, sans réelle croyance**. On peut **faire adhérer** des gens par **d\'autres mécanismes que la violence** : on peut [prier] pour eux, les enjoindre à se convertir, mais on ne peut pas les contraindre. « Je demande à présent si c\'est la tolérance ou l\'intolérance qui est de droit divin ? Si vous voulez ressembler à Jésus-Christ, soyez martyrs et non pas bourreaux ». Il ne faut **donc pas persécuter pour imposer la religion**. - [**Voltaire prône la fraternité, du fait que nous avons tous le même créateur**.] Pour appuyer son propos, il va faire une prière qui appelle à la tolérance. Nous faisons tous partie d\'une **communauté de destin commune**. Les différences entre les individus sont très faibles, avant tout géographique, et il faut donc aller vers la tolérance. - **[Ce que prône la religion protestante, c\'est l\'idée d\'avoir un espace personnel de conscience]** qui échappe à l\'église et à l\'État. Il faut le **garantir, sinon il sera écrasé par les institutions**. C\'est le mouvement des *droits de l\'Homme* qui va consacrer cette garantie.  - **[Une limite de ces appels à la tolérance, c\'est qu\'ils ne pensent pas la sécularisation du religieux]** mais à son **organisation**. Elle **ne pense pas non plus l\'incroyance** qui ne sont pas inclus dans cette tolérance. L\'athée ne fait donc pas partie des considérations de cette philosophie de la tolérance. Locke : \"ceux qui nient l\'existence d\'une puissance divine ne doivent être tolérés en aucune façon\" **II. Métamorphoses de la souveraineté** **Machiavel n'était pas machiavélique** - **[La souveraineté politique, c\'est la capacité à être source de droit]**. Être souverain, c\'est faire les lois sans partage avec une autre instance. Le souverain *fait la loi sans l\'intervention du Pape ou d\'un autre souverain*. C\'est valable aussi dans le temps : on fait la loi *sans être contraint par des lois antérieures. * - **[La souveraineté est une invention chrétienn]e**. C\'est le *Pape* qui est souverain sur le monde chrétien, c\'est à dire sur les sujets de l\'Église peu importe les pays où ils vivent. Cette souveraineté chrétienne va être *contesté au profit d\'une souveraineté politique*. La question va être de savoir **qui** détient la souveraineté politique : le roi, le roi et un parlement ou le peuple. *Plus la société s\'autonomise, plus il y a un transfert de la souveraineté vers le peuple. Mais ce processus est lent* et il faut le justifier philosophiquement. **[A. Machiavel, la vérité en politique]** **Machiavel écrit *Le Prince* en 1513** mais il est publié *après sa mort*. Il n\'a donc pas pu en faire la promotion. Il a aussi écrit le *Discours sur la première décade de Tite-Live*, L\'*Art de la guerre* et l\'*Histoire de Florence*. Le seul livre qui a été publié de son vivant est l\'Histoire de Florence.  **[*Le Prince* est un mode d\'emploi politique : « la fin justifie les moyens ».]** Pour être plus précis, Machiavel dit qu\'il n\'y a *pas de moral de l\'action* au sens où il n\'y a *pas de morale chrétienne surplombante*. En revanche, il y a une *morale dans l\'action*, une morale qui doit pousser à tout faire *pour réussir l\'action, y compris si cette action est contraire à la morale chrétienne*. Dire que le roi, qui est l\'incarnation de la justice divine, c\'est subversif.  - Livre pr bien gvner **1. Machiavel, homme d'action et observateur politique** - Au moment où écrit Machiavel**, [Florence est une République autonome depuis plus de 300 ans.]** La cité n\'a pas fait allégeance à un seigneur mais *elle s\'autogouverne*. Elle est composée d\'une *communauté politique avec des citoyens* qui sont intéressés par la chose publique, avec des Assemblées. Le peuple est habitué à s\'occuper des affaires politiques. Il règne un « *humanisme civique* » et un *vivere civile* qui renvoi à l\'idée que l\'on vie civilement, de manière pacifiée.  - **[Officiellement, il n\'y a pas de seigneur]** mais en pratique le *pouvoir économique est contrôlé par de riches familles commerçantes dont la famille des Médicis*. *Laurent de Médicis a les pouvoirs d\'un prince mais il n\'en a pas le titre*. C\'est tout de même une République car il y a des conseils, dont le plus important est le podestà. - **[Le règne des Médicis prend fin par une émeute populaire en 1494]**. Un « grand conseil public » composé de 3000 membres est mis en place, parce qu\'il est considéré comme plus démocratique. Ce conseil est instauré suite à l\'action assez forte d\'un moine très particulier qui s\'appelle Jérome Saronavole. C\'est un moine très fanatique et influent à Florence. Il prêchait soit la fin des temps, soit pour l\'éviter, le retour au christianisme. Il a écrit un *Traité sur la façon de régit et gouverner la cité de Florence*. On a donc affaire à un clérical qui donne sa vision sur le gouvernement politique de la citée, avec un relatif attachement à la forme républicaine de Florence, d\'où l\'instauration de ce conseil.  - **[Ce « grand conseil » est composé d\'un exécutif avec une rotation des charges]**, qui changent tous les deux mois. Piero Saderini est nommé au poste de Gonfalonier, chef de l\'exécutif nommé à vie, en 1502. Il continue d\'être dans l\'exaltation de la religion. L\'Église considère qu\'il est au bord de l\'hérésie et l\'interdit de prêche. Cela ne l\'empêche pas d\'agir et il va dresser un « bucher des vanités », un feu dans lequel on fait bruler ce qui renvoi à la vanité du monde : du maquillage, des beaux vêtements, des instruments de musiques\... Tout ce qui renvoi à la vanité de l\'existence terrestre et qui n\'est pas spirituel. Il demande à ce que les enfants dénoncent leurs parents qui ne seraient pas assez chrétiens. Il sera finalement pendu en 1498.  - **[Cette disparition est importante car c'est le moment où Machiavel entre en jeu]**. Il vient d\'une famille plutôt noble, fils du trésorier municipal de Rome. Il nait à Florence en 1469. Il va plutôt lire les auteurs latins plutôt que les auteurs grecques. Dans cette période, on fait traditionnellement ses « humanités » avec à la fois des auteurs grecques et romains. On considère que l\'originalité de sa pensée vient de celle de sa formation. - **[On entend parler pour la première fois de Machiavel en 1498]**, quand il est *nommé secrétaire général de la Seconde chancellerie de la République*, l\'équivalent d\'un haut fonctionnaire. Il remplace un partisan de Savonarole. Ce n\'est pas une fonction très importante : elle correspondre avec les villes sujettes de Florence et recueillir la parole des citoyens dans des assemblées informelles. A cette époque, cette activité est très délégitimée parce qu\'on considère qu\'il n\'est pas intéressant de recueillir les doléances du peuple. Via les assemblées des citoyens, Machiavel va comprendre ce qu\'on appelle l\'« **esprit public** », ce qu\'on appelle aujourd\'hui l\'opinion public. - **En 1507, [il est nommé secrétaire du Conseil des Dix]**, ce qui correspond à un poste d\'ambassadeur : il est chargé des relations diplomatiques et internationales. Pour cela, il va rencontrer des personnes importantes et va quitter l\'Italie, ce qui lui permet d\'avoir une hauteur de vue avec ce qui s\'y passe. Ces année-là sont une période d\'apprentissage politique pour Machiavel, qui est sur le terrain. En 1513, il écrit : « Si on me lisait on verrait que pendant mon apprentissage dans le métier de l'État je n'ai ni dormi ni joué ». Il est réflexif et se retourne sur son propre apprentissage de l\'État.  - **[Machiavel a développé une expertise sur les affaires de l\'État]**, que ce soit interne ou externe avec les autres États. Il a été au cœur de moments compliqués, de négociations délicates, d\'alliances militaires. Il n\'est pas complètement décisionnaire et doit en permanence demander à ses supérieurs qu\'elles sont leurs décisions, qui vont se fonder sur les rapports envoyés par Machiavel. Il va mettre un soin particulier à décrire la situation de la manière la plus précise et objective possible, pour que la décision prise soit la meilleure. Il est donc un **observateur et un penseur de situation**. Par rapport à d\'autres philosophes, Machiavel est en prise avec le réel, avec des situations matérielles concrètes.  - **En [1512, les Médicis reprennent Florence et abolissent la République]**. Laurent II de Médicis met fin à la forme républicaine du régime pour mettre en place un régime fondé sur l\'absolutisme. Le gonfalonier s'enfuit et Machiavel est arrêté parce qu\'il est considéré comme un fidèle du régime. Il est emprisonné et torturé mais finit par être libéré. Il se met en retrait de l\'État et commence à rédiger *Le Prince*. - **[*Le Prince* est dédicacé à Laurent II de Médicis]**. Machiavel aimerait revenir en grâce auprès des Médicis et veut mettre à profit son expertise à Florence sous le contrôle des Médicis. Cependant, on peut aussi penser que c\'est une dédicace hypocrite.  - D**ans *Le Prince*, [Machiavel parle essentiellement des monarchies obtenues par conquêtes]**, c\'est-à-dire auxquelles le prince n\'appartient pas. Il le fait parce qu\'il s\'adresse à des princes qui sont extérieurs à leur communauté : il n\'en connait pas la langue, le territoire, le peuple et ses uses et coutumes. La gestion de ce territoire par le prince va être purement technique. Ce que Machiavel développe dans Le Prince, c\'est les techniques de gouvernement de ses communautés. - Un exemple, c\'est ***le siège de Pise par des troupes françaises aidées par Florence en 1500***. A l\'époque, il n\'y a pas de soldats de métier mais des mercenaires. Ce sont des mercenaires suisses qui sont envoyés par Florence. Ils se retirent sans combattre et Florence refuse de les payer. Ils protestent et Machiavel prend conscience que F*lorence est faible politiquement et militairement* pour imposer son point de vue et que c\'est un problème de *se reposer sur des mercenaires. Dans l\'idéal, il serait mieux d\'avoir une véritable armée* de soldats contrôlée par Florence. Il va alors monter une petite milice permanente en 1505. **2. Le « pacte de lecture » du Prince** **Comment lire *Le Prince* ?** Cela nous permet de comprendre comme Machiavel pense et résonne. Plusieurs éléments vont nous intéresser : - **[Machiavel n\'entend pas faire une théorie complète et définitive sur le pouvoir]**. Il ne s\'agit pas de répondre à des questions éternelles mais à des questions de son époque. « Machiavel est un technicien borné \[\...\] Il ne voit pas plus loin que les limites de son temps ». Ces techniques portent sur les **moyens permettant de garder le contrôle d\'un territoire, contre les forces intérieures et extérieures.** Il tire ces techniques de l\'histoire et de l\'observation. *Le Prince* analyse une suite de cas historique. - **[Machiavel raconte des situations réelles]**. Quand on analyse le livre, on se rend compte que la majeure partie des cas qu\'il étudie portent sur les 20 dernières années avant sa publication, donc sur des choses qu\'il a lui-même vécu. *Le Prince* raconte son temps, c\'est donc une chronique - **[Machiavel met en scène des personnages historiques]** (1450 personnages) ce qui lui permet d\'éviter la censure. On n'est d'ailleurs pas sûr que ces personnages aient réellement dit ce que Machiavel leur prête. Cela permet d\'alterner les points de vue et de se mettre à leur place ( à la fois le peuple et le prince) A certains moments, le prince est mis à la place du peuple et vice versas de manière à montrer la distance entre ces personnages. *Le Prince* est aussi une dramaturgie, et il faut rappeler que Machiavel est dramaturge. Il y a énormément de dialogues dans ce texte, portés par les *personnages* mais aussi des dialogues entre Machiavel et son *lecteur*. Ce type d\'écriture est très utilisé en prédication. On joue sur le dialogue entre le prêtre et ses ouailles. Avec ce texte, Machiavel se met dans la peau d\'un prédicateur laïque, politique. Après Savonarole qui était un prédicateur croyant, Machiavel est un **prédicateur laïque**. - **[Machiavel écrit en Italien et pas en latin]**. Quand on est lettré à l\'époque, on écrit en latin et pas en langue « vulgaire », en langue du peuple. C\'est aussi ce qui permettra une large diffusion du Prince. Il n\'emploi aucun néologisme, il utilise les mots existants mais c\'est la manière d\'agencer la langue qui va changer. Machiavel parle une langue politique, la langue de la République de Florence telle qu\'elle existe depuis un moment mais aussi celle qui devient importante à partir 1494 quand les Médicis sont chassés du pouvoir. C\'est la langue de la chose publique, la *res publica.* En latin, les mots sont vieux et ne sont pas adaptés à la situation nouvelle de Florence. Il faut une langue qui décrive de manière compréhensible pour tout le monde.  - **Il y a débat concernant les personnes à qui s\'adresse Le Prince**. Certains considèrent qu\'il s\'adresse aux princes, parce que la nature du texte est un mode d\'emploi du pouvoir. Au contraire, certains considèrent qu\'il s\'appelle au peuple. Machiavel a été torturé par les Médicis, ce qui remet en cause une potentielle volonté de sa part de vouloir revenir en grâce au pouvoir. Dans l\'autre sens, les Médicis ont-ils besoin des conseils de Machiavel ? Machiavel était très attaché à la forme républicaine de Florence et ce texte serait en fait une dénonciation du pouvoir absolu du Prince pour alerter le peuple de Florence qui est attaché à la liberté. Machiavel **défend le républicanisme,** c\'est à dire la **communauté civique** et donc des formes de **libertés collectives**. On un peu oublié ce courant, qui a été supplanté et marginalisé par le libéralisme politique qui prône les libertés individuelles (**Thierry Ménissier**, Machiavel, Ombres et lumières du politique) **3. Circonstance et morale** Machiavel va **[rencontrer plusieurs hommes]** importants de son temps, dont les actions vont l\'inspirer.  \- **César Borgia**, le Duc de Romagne. Il conquière des territoires et *menace Florence*. Le Conseil des Dix envoi alors Machiavel pour sonder les intentions de Borgia et conclure une potentielle alliance. Machiavel est séduit par le *charisme et la puissance* militaire de Borgia. Il le voit comme le *prochain souverain d\'Italie.* \- Le **Pape Jules II**, est un *Pape guerrier* que Machiavel admire. Il a réussi à capturer Borgia et a démembré son royaume mais il finira aussi par commettre des erreurs. \- **Maximilien 1er**, l\'Empereur du *saint empire germanique* que Machiavel trouve *très faible*, influençable et peu intéressant.  - Ils admirent Borgia et Jules II car ils sont capables de s'adapter à la situation, toutes les fois ou ils l'ont fait ça a été concluant : c'est l'essence d'un Prince **[Dans le Prince Machiavel détaille deux coups politiques : ]** \- Borgia conquiert une province en envoyant son lieutenant Rémy d'Orque pour administrer la province d'une poignée de fer. Rémy d'Orque est très mal vu par le peuple et Borgia le fera assassiner, pour se mettre du côté du peuple : il vous ait odieux, je le tue. C'est un coup de maître qui montre que ***le prince à un droit de vie et de mort sur ses sujets et lieutenants. *** *« seul plaisir du prince qui montre ainsi à tous qu'il peut faire et défaire les hommes à son gré »* \- Jules II qui devait battre Jean Paul Baglioni. Quand il est arrivé devant les portes du château où se trouvait Baglioni, Jules II est entré avant même que son armée soit arrivée et ***Baglioni va se livrer à lui sans combattre*** alors que son armée était plus puissance, parce qu\'il est impressionné que ce soit le Pape. Ce qui est étonnant car Baglioni n'a aucune morale et avait faits des choses épouvantables mais il s'incline devant le Pape. C\'est donc un coup complètement raté de la part de Baglioni. **[Ce qui détermine la défaite, c\'est la compréhension intime de la situation]**. Borgia l\'emporte parce qu\'il se [moque de la morale commune]. Il ne se dit pas qu\'il doit protéger ses lieutenants en tant que chef. [Borgia bafouille l'idée d'une fidélité] et sacrifie son lieutenant. Baglioni quant à lui [se souvient qu'il a une morale chrétienne] et qu\'on ne peut pas se battre contre le pape. Il aurait dû abandonner cette morale car c'est ce qu'il a toujours fait tout au long de sa vie en étant odieux. ***Borgia s'affranchit de la morale et gagne tandis que Baglioni échoue en restant dans la morale. *** **[L\'observation est intéressante mais elle a ses limites]**. Machiavel a « cherché des princes admirés mais il ne les a pas trouvés et a dû inventer un prince de papier. » (Patrick Boucheron). Il a croisé des personnes importantes mais **toutes ont fini par échouer comme Borgia**.  \- c plutôt un **idéal type** du Prince **4. La *virtù*** Machiavel accorde une importance à ***[deux notions]* qui fonctionnent ensemble : *[la fortune et la virtù]****[.]* - La **fortune**, c\'est la **chance** ou la providence. Elle pèse sur les évènements, on a de la chance ou on n'en a pas, c'est donc un élément **impondérable** qui fabrique de **l'incertitude** dans le meilleur des plans. Elle joue un vrai role : va **changer la nature des évènements**. Elle crée une situation **favorable** ou **défavorable**. Elle a donc un **pouvoir créatif** autonome parce qu\'on ne la contrôle pas. Dans l\'idéal, il faudrait pouvoir **attirer la fortune de son côté**. - Or, Machiavel dit que la fortune est **attirée par le *vir*, la bravoure masculine (viril)**, qui est la racine de ***virtù***. Machiavel a une vision **érotique** de la fortune, car la fortune est femme (soumision de la fortune à l'homme)  DONC le succès politique peut se provoquer , par le courage - **Le prince qui est dans la virtù, dans la bravoure, va attirer la fortune**. Cela veut dire que la chance peut se provoquer par exemple par le biais **du risque et de l\'effort**. C\

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