Psychologie Cognitive - Introduction PDF

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Université Clermont Auvergne

2024

Laetitia Silvert

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psychologie cognitive comportements processus mentaux cognition

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Ce document est une introduction à la psychologie cognitive, présentant des définitions et des concepts clés. Le cours, dispensé par Laetitia Silvert, explore les activités mentales et les comportements, en mettant l'accent sur l'étude scientifique des processus mentaux et des comportements dans divers contextes.

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N1 - UE Psychologie Cognitive 1 2024-2025 Psychologie cognitive : une introduction… Laetitia Silvert [email protected] 1 ...

N1 - UE Psychologie Cognitive 1 2024-2025 Psychologie cognitive : une introduction… Laetitia Silvert [email protected] 1 Bibliographie  LEMAIRE, P. (2015). Psychologie cognitive. De Boeck.  REED, S.K. (2017). Cognition : Théories et applications (4ème Edition). De Boeck Supérieur.  STERNBERG, R.J. (2007). Manuel de psychologie cognitive. Du laboratoire à la vie quotidienne. De Boeck.  HABIB, M., LAVERGNE, L. & CAPAROS, S. (2018). Psychologie cognitive. Armand Colin.  EYSENCK, M.W. & KEANE, T. (2015). Cognitive psychology. A student’s handbook (7th Edition). Psychology Press. Ce cours d’introduction à la psychologie cognitive reprend des éléments « classiques » de définition et d’historique que vous pourrez retrouver, de façon plus ou moins approfondie, dans différents manuels de psychologie cognitive. Les ouvrages ci- dessus sont les principales sources ayant servi à la construction de ce cours, mais il existe bien d’autres manuels de psychologie cognitive, en langue française ou anglaise. La lecture de ces ouvrages n’est pas obligatoire : vous pourrez vous y référer pour clarifier des points du cours qui ne vous paraitraient pas suffisamment explicites ou pour approfondir les notions qui susciteraient plus particulièrement votre intérêt. 2 1. Psychologie, psychologie cognitive : définitions Qu’est-ce que la psychologie ? « Discipline qui vise la connaissance des activités mentales et des comportements en fonction des conditions de l'environnement. » (Larousse) « Science qui a pour but de comprendre la structure et le fonctionnement de l’activité mentale et des comportements associés. » (Société Française de Ѱ) Etude scientifique des comportements et des processus mentaux dans différents contextes 1. Psychologie, psychologie cognitive : définitions Qu’est-ce que la psychologie ? Selon la définition du Larousse, la psychologie est une « discipline qui vise la connaissance des activités mentales et des comportements en fonction des conditions de l'environnement ». La Société Française de Psychologie (SFP) quant à elle la définit comme une « science qui a pour but de comprendre la structure et le fonctionnement de l’activité mentale et des comportements associés ». De façon générale, la psychologie peut donc être décrite comme l’étude scientifique des comportements et des processus mentaux dans différents contextes. 3 1. Psychologie, psychologie cognitive : définitions Qu’est-ce que la psychologie ? Comportements (au sens strict) : Actions manifestes, directement observables, qui se distinguent des processus mentaux « internes ». ex : sourire, pleurer, courir, frapper, dessiner, parler… Processus mentaux : 0pérations de l’esprit, activités internes, non directement observables. ex : penser, planifier, raisonner, se souvenir, comprendre… Contexte (au sens large) : Caractéristiques de l’environnement (physiques, sociales, culturelles…), + état physique et mental de l’individu. Au sens strict, les comportements se définissent comme des actions manifestes, directement observables (par exemple, sourire, pleurer, courir, frapper, dessiner, parler…). En ceci, ils se différencient des processus mentaux, c’est-à-dire des opérations de l’esprit, des activités internes (tels que penser, planifier, raisonner, se souvenir, comprendre…), qui ne sont quant à eux pas directement observables (mais nous verrons plus loin que nous pouvons néanmoins accéder à ces processus internes et les mesurer). Les comportements et les processus mentaux peuvent être influencés par les facteurs, nombreux et variés, qui définissent le contexte dans lequel ils surviennent. Dans ce cadre, le contexte (au sens large) renvoie à toutes les caractéristiques de l’environnement (les caractéristiques physiques - telles que par exemple, la température ambiante, la luminosité - mais aussi sociales ou culturelles), mais également à l’état physique et mental de l’individu (par exemple, son héritage génétique, l’état de son système physiologique - fatigue, satiété…-, ses connaissances antérieures et expériences passées, ses caractéristiques personnelles - comme son niveau d'intelligence, ses traits de personnalité ou la présence d'une maladie mentale… -, etc.). 4 1. Psychologie, psychologie cognitive : définitions Ψ cognitive Ψ sociale Ψ du développement Ψ clinique Ψ du travail Ψobiologie etc… Ces premières considérations rendent assez évident le fait que la psychologie est un sujet extrêmement complexe, dont il est difficile d’exprimer la profondeur et l'étendue... Heureusement, un certain nombre de branches ou domaines distincts ont émergé pour traiter de sous-sujets spécifiques dans l'étude de l'esprit, du cerveau et du comportement. La psychologie cognitive, la psychologie sociale, la psychologie du développement, la psychologie clinique, la psychologie du travail et la psychobiologie en sont quelques exemples, mais le nombre de sous-domaines de la psychologie est en constante évolution. Tous ces domaines partagent cependant, rappelons-le, un objectif commun, à savoir étudier et expliquer la pensée et le comportement humains. Il convient également de souligner qu’ils ne sont pas « cloisonnés » : les découvertes réalisées dans un domaine nourrissent la réflexion et peuvent permettre de compléter les modèles explicatifs développés dans un autre domaine. 5 1. Psychologie, psychologie cognitive : définitions Qu’est-ce que la psychologie ? Etude scientifique : la psychologie est une science. Nous sommes tous des « scientifiques du quotidien »… Comprendre et prédire nos comportements et ceux des autres… …ou pas !!! -> nombreux biais cognitifs… -> phénomènes complexes, multi-déterminés… La psychologie est une science, donc… Certes, mais en un sens, ne sommes-nous pas tous des « scientifiques du quotidien » (Nisbett & Ross, 1980) qui menons des projets de recherche pour répondre aux questions que nous nous posons sur le monde ? Nous essayons quotidiennement de déterminer pourquoi les choses se produisent, si et quand elles sont susceptibles de se reproduire, comment les reproduire ou les modifier, etc… Pour ce faire, nous pouvons même recueillir des données (c'est-à-dire recueillir des informations par le biais de l’observation ou d'une mesure formelle). L’accumulation de ces connaissances nous aide constamment à prévoir notre propre comportement et celui des autres. Par exemple, si vous obtenez de mauvais résultats à un examen, vous essayez de comprendre ce qui a causé votre incapacité à vous souvenir ou à comprendre la matière et ce qui pourrait vous aider à faire mieux la prochaine fois (ou en tout cas, c’est ce que vous devriez faire…;). Si un couple de vos amis se sépare, alors qu’ils semblaient vivre une relation idéale, vous essayez de comprendre ce qui a bien pu se passer, ce qui peut expliquer cet événement inattendu. Quand vous réfléchissez à la montée des actes terroristes dans le monde, vous essayer « d'enquêter » sur les causes de ce problème en examinant les terroristes eux-mêmes, la situation autour d'eux et les réactions des autres à leur égard. Vous avez probablement essayé de comprendre pourquoi pendant la crise sanitaire de la Covid 19, certaines personnes étaient « anti-vaccin » ou « pro-pass sanitaire »… Le problème, cependant, avec la manière dont nous collectons et interprétons les données dans notre vie quotidienne, c’est que nous ne sommes souvent pas très minutieux et victimes d’une très longue liste de biais cognitifs non-conscients (engendrant des erreurs de perception, d’évaluation, d’interprétation logique). Par exemple, quand une explication d'un événement semble « juste », nous adoptons souvent cette explication comme étant la vérité, alors même que d'autres explications sont possibles et potentiellement plus précises… Par ailleurs, les phénomènes psychologiques sont extrêmement complexes, et il est difficile de faire des prévisions à leur sujet en raison des différences individuelles et parce qu'ils sont déterminés à différents niveaux d'explication (individuel, social, culturel…). De plus, il faut bien aussi reconnaitre que nous ne sommes souvent pas conscients des causes réelles de nos propres comportements… 6 1. Psychologie, psychologie cognitive : définitions Qu’est-ce que la psychologie ? Etude scientifique : la psychologie est une science. Preuves rassemblées selon les principes de la méthode scientifique : -> produire, collecter, analyser, interpréter des données selon des règles et des procédures bien définies. Transformer les croyances en savoirs. Code de déontologie des psychologues (2021) « Le chercheur a le devoir d’informer le public des connaissances acquises en restant prudent dans ses conclusions » (Article 53) Acquisition des « Le psychologue tient sa compétence […] de connaissances savoirs théoriques et méthodologiques […] et de l’actualisation régulière de ses connaissances […] » (Principe 4) Utilisation des savoirs C’est pourquoi les psychologues doivent impérativement utiliser la méthode scientifique pour recueillir des informations sur les comportements (au sens large) qu’ils étudient, les analyser et les interpréter. Seule l'utilisation rigoureuse de règles et de procédures bien définies permet au scientifique de collecter des données empiriques de manière objective, ce qui contribue à l'accumulation des connaissances scientifiques et donc à la transformation des croyances (i.e., des hypothèses ou théories non démontrées) en savoirs (i.e., en vérités objectives, démontrées par des faits). Ainsi, la psychologie peut être divisée en deux grands domaines : - la recherche, qui vise à accroître notre base de connaissances - et la pratique, par laquelle ces connaissances sont utilisées pour résoudre des problèmes dans le monde réel. Les chercheurs et chercheuses en psychologie utilisent des méthodes scientifiques pour créer de nouvelles connaissances sur les causes du comportement (et leur réflexion peut être nourrie par les questions ou observations des psychologues praticien.ne.s), tandis que les psychologues praticien.ne.s (tels que les psychologues cliniques, scolaires, en entreprise…) sont tenu.e.s d’utiliser les recherches existantes pour améliorer la vie quotidienne des autres. Dans le Code de déontologie des psychologues (juin 2021), il est ainsi explicitement mentionné que « Le chercheur a le devoir d’informer le public des connaissances acquises en restant prudent dans ses conclusions » (Article 53) et que « Le psychologue tient sa compétence […] de connaissances théoriques et méthodologiques […] et de l’actualisation régulière de ses connaissances […] » (Principe 4). La science de la psychologie est donc aussi importante pour les chercheur.se.s que pour les praticien.ne.s. 7 1. Psychologie, psychologie cognitive : définitions Qu’est-ce que la psychologie cognitive ? Un champ de la psychologie centré sur la cognition. Cognition : « pensée », processus par lequel un organisme acquiert une connaissance « Etude des processus par lesquels l’input sensoriel est transformé, réduit, élaboré, stocké, récupéré et utilisé. » (Neisser, 1967) « Etude de la manière dont les individus perçoivent, apprennent, se souviennent et pensent l’information. » (Sternberg, 2003) = Comment on acquiert des connaissances sur le monde et comment on stocke et utilise ces connaissances. Qu’est-ce que la psychologie cognitive ? Parmi les différents sous domaines de la psychologie, on trouve notamment la psychologie cognitive. Comme son nom le suggère, il s’agit d’un champ de la psychologie centré sur la cognition. La cognition renvoie à la « pensée », ou plus précisément aux processus d’acquisition des connaissances. La psychologie cognitive peut ainsi être définie comme l’« étude des processus par lesquels l’input sensoriel [i.e., l’entrée sensorielle, l’information transmise à l’organisme par ses sens] est transformé, réduit, élaboré, stocké, récupéré et utilisé » (Neisser, 1967) ou encore l’« étude de la manière dont les individus perçoivent, apprennent, se souviennent et pensent l’information » (Sternberg, 2003). Dit simplement, la psychologie cognitive étudie donc comment on acquiert des connaissances sur le monde et comment on stocke et utilise ces connaissances. 8 1. Psychologie, psychologie cognitive : définitions Qu’est-ce que la psychologie cognitive ? Bases biologiques Prise de Attention de la Raisonnement cognition décision Des connaissances qui concernent Perception Conscience Intelligence Motivation quasiment toutes (artificielle) nos activités ! Mémoire Apprentissage Imagerie mentale Emotions … Ainsi, les processus mentaux étudiés dans le champ de la psychologie cognitive sont nombreux et variés : l’attention, l’apprentissage et la mémoire, le raisonnement, la motivation, les émotions… En conséquences, les connaissances issues de ce champ concernent pratiquement toutes nos activités. Par exemple, elles permettent de comprendre comment on peut apprendre à conduire puis ajuster sa conduite en fonction des conditions de circulation, comment on peut mémoriser un cours en vue d’un examen, comment un joueur de basketball peut tenir compte des déplacements de plusieurs de ses coéquipiers simultanément, pourquoi les témoignages oculaires sont si souvent peu fiables (et ce qu’on peut faire pour les améliorer), pourquoi même les investisseurs les plus aguerris prennent parfois de mauvaises décisions, etc. 9 2. Naissance de la psychologie scientifique Les hommes ont toujours été intrigués par le fonctionnement de leur esprit... Le papyrus Ebers (1550 av. JC) : description de désordres mentaux (dépression, démences…) Mais la psychologie scientifique est très récente… D’où vient-elle ? Quand a-t-elle commencé ? Quels en sont les pionniers ? 2. Naissance de la psychologie scientifique Il est fort probable que les hommes aient de tout temps été intrigués par le fonctionnement de leur esprit. A titre d’exemple, dans le papyrus Ebers (du nom de l’égyptologue Allemand à qui l’on doit sa première traduction), l’un des plus anciens traités de médecine connus (1550 avant J.-C.), on trouve déjà la description de désordres mentaux (dépression, démences…) dans un chapitre intitulé “Livre des cœurs”. Pourtant la psychologie scientifique est une discipline relativement jeune, âgée seulement d’un peu plus de 100 ans, et la psychologie cognitive est encore plus récente ! Dans les pages qui suivent, nous allons brièvement expliquer d’où vient la psychologie scientifique et nous en présenterons les principaux pionniers. Ensuite, nous décrirons comment elle a donné naissance à la psychologie cognitive. En effet, il ne faut jamais négliger l’histoire d’une discipline. La connaissance de cette histoire permet de comprendre l’évolution des idées, d’éviter de reproduire les erreurs du passé et de constater que les questions fondamentales restent en grande partie les mêmes : c’est souvent la manière de les aborder qui change… Commençons tout d’abord par souligner que la psychologie est généralement considérée comme ayant émergé de deux autres disciplines : la philosophie et la physiologie. 10 2. Naissance de la psychologie scientifique Ψ = branche de la philosophie traitant des rapports existant entre corps et esprit Savoir concernant l’« âme » issu de réflexions et de raisonnement. Coexistence de 2 écoles de pensée depuis l’Antiquité : PLATON (427-348 av. JC) : Dualisme ARISTOTE (384-322 av. JC) : Monisme Âme immortelle séparée du cops mortel L’âme et le corps ne font qu’un Idées innées, non issues des expériences La connaissance passe par l’observation de la nature René DESCARTES (1596-1650) John LOCKE (1632-1704) Nos sens biaisés ne permettent pas d’accéder à la vérité Les idées se construisent à partir des sens -> Rationalisme -> Empirisme Observation Analyse logique L’école d’Athènes, Raphaël (1508-1512) Expérience En effet, à l’origine (depuis l’Antiquité et jusqu’au milieu du 19ème siècle environ), la psychologie correspondait en quelque sorte à une branche de la philosophie traitant des rapports existant entre le corps et l’esprit. Le savoir concernant l’« âme » était alors exclusivement issu de la réflexion et du raisonnement. Platon (427-348 av. JC) et son élève Aristote (384-322 av. JC) sont deux philosophes grecs qui ont profondément affecté la pensée moderne en psychologie. Pour Platon, l’« âme » immortelle est séparée du corps mortel (dualisme). Selon lui, nos sens nous trompent et le philosophe, pour accéder à la connaissance, doit se détacher du monde des sensations, neutraliser son corps et diriger son « âme » vers le « monde des Idées ». Pour Aristote au contraire, l’« âme » et le corps ne font qu’un (monisme) et l’accès à la connaissance passe par l’observation de la nature. Ces conceptions antinomiques ressurgissent au 17ème siècle sous la forme de deux courants philosophiques distincts. Selon le rationalisme (incarné par le philosophe français René Descartes, 1596-1650), nos sens biaisés ne permettent pas d’accéder à la vérité et l’accès à la connaissance passe par l’analyse logique, la contemplation raisonnée. Selon l’empirisme (dont l’un des principaux représentants est le philosophe anglais John Locke, 1632-1704), l’esprit est au départ une page blanche. Les différentes idées qui existent chez une personne ou une autre sont expliquées par leurs différentes expériences de vie. L’acquisition des connaissances passe ainsi par l’expérience et l’observation. Au centre, un détail de la fresque « L’école d’Athènes » de Raphaël (1508-1512) : Platon pointe le ciel, Aristote la terre – l’origine terrestre de nos pensée. 11 2. Naissance de la psychologie scientifique Deux facteurs déterminants : 1- Progrès techniques : chronographe, stroboscope, boîte à rythme… 2- Découvertes en physiologie et en médecine : Hermann Von HELMHOLTZ (1821-1894) Paul BROCA (1824-1880) Mesure la vitesse de propagation Lésion dans une région cérébrale du signal nerveux spécifique -> pathologie spécifique : « aphasie de Broca » La pensée est liée à la matière, c’est un produit de la physiologie -> et elle est mesurable objectivement et étudiable empiriquement… A la fin du 19ème siècle, deux facteurs déterminants convergent pour favoriser l’émergence de la psychologie scientifique : d’une part, des progrès techniques (tels que l’invention du chronographe, du stroboscope ou de la boîte à rythme) qui rendent possibles des expérimentations nouvelles et des mesures plus précises des comportements humains ; d’autre part, des découvertes (également favorisées par les progrès techniques) dans le domaine de la physiologie et de la médecine. En particulier, dès 1850, Hermann Ludwig Ferdinand von Helmholtz (1821-1894), un physiologiste et physicien prussien, parvint à mesurer indirectement la vitesse d‘un influx nerveux. Pour ce faire, il a comparé les délais de déclenchement de secousses musculaires provoquées par la stimulation successive de deux points, distants de quelques centimètres, du nerf commandant le muscle en question. Il s’agissait du nerf sciatique d'une grenouille, et il annonça 25 mètres par seconde. A la même époque, en 1861, Pierre Paul Broca (1824-1880), un neurologue français, décrivit le cas d’un patient nommé Leborgne, qui ne présentait aucun déficit moteur et comprenait parfaitement ce qu’on lui disait, mais était incapable de parler (plus précisément il pouvait prononcer des syllabes ou des mots isolés mais pas formuler de phrases, que ce soit oralement ou par écrit). L’autopsie du cerveau de ce patient (comme celle de huit autres personnes présentant un déficit similaire) révéla qu’il souffrait d’une lésion au niveau du lobe frontal postérieur gauche, une région aujourd’hui connue sous le nom d’ « aire de Broca ». Broca apporta ainsi du même coup la preuve de la localisation cérébrale discrète d’une faculté bien définie (puisqu’une dimension spécifique du langage pouvait être détériorée par la lésion d’une région précise du cerveau) et celle d’une asymétrie fonctionnelle entre les deux hémisphères cérébraux (le déficit se produit pour une lésion de l’hémisphère gauche, pas de l’hémisphère droit). Dès lors, il semble établi que la pensée est liée à la matière, qu’elle est un produit de la physiologie. Elle devient de fait objectivement mesurable et susceptible d’être étudiée de façon empirique dans le cadre d’une psychologie scientifique. 12 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Naissance de la Ѱ scientifique : Wilhelm WUNDT (1832-1920) : le père de la Ѱ scientifique 1879 : Premier laboratoire de Ѱ expérimentale (Université de Leipzig, Allemagne) Théodule RIBOT (1839-1916) : le père de la Ѱ scientifique française Pour -> séparation de la Ѱ et de la philosophie -> application des méthodes de la physiologie à l’étude de l’esprit 1885 : chargé du premier cours de Ѱ expérimentale à la Sorbonne 1889 : création à son intention d’une chaire de Ѱ expérimentale et comparée au Collège de France + Recherches sur la mémoire, sur les institutions psychiatriques. 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Selon la plupart des historiens de la psychologie, c'est la création du tout premier laboratoire de psychologie expérimentale qui a officiellement marqué les débuts de la psychologie scientifique : c’est en créant, en 1879 à Leipzig, un laboratoire universitaire consacré à l'étude de la psychologie expérimentale que Wihlem Wundt (1832-1920) a officiellement fait passer la psychologie du statut de sous-discipline de la philosophie et de la physiologie à celui de discipline scientifique indépendante, avec ses propres questions et méthodes. Wundt a également formé un certain nombre d'étudiants qui sont devenus eux- mêmes des psychologues influents. Notamment : - Edward B. Titchener (1867-1927), connu pour être le fondateur de l’école de pensée structuraliste (voir ci-après) ; - James McKeen Cattell (1860-1944), le premier professeur de psychologie aux États-Unis ; - Granville Stanley Hall (1846-1924), le premier américain à avoir validé un doctorat en psychologie, le premier président de l’American Psychological Association (APA) et le fondateur du premier laboratoire de psychologie expérimentale aux États-Unis, en 1883, à l'université John Hopkins. Théodule Ribot (1839-1916, philosophe de formation) est quant à lui généralement considéré comme le fondateur de la psychologie scientifique française. A travers d’influents ouvrages dans lesquels il a présenté les résultats de la psychologie expérimentale anglaise et allemande de l’époque (La psychologie anglaise contemporaine, 1870 ; La psychologie allemande contemporaine, 1879), il critique la philosophie française de son temps et argumente en faveur de la séparation de la psychologie et de la philosophie et de l’application des méthodes de la physiologie à l’étude de l’esprit. Il fut chargé du premier cours de psychologie expérimentale à la Sorbonne en 1885 et la première chaire de psychologie expérimentale et comparée fut crée pour lui au Collège de France en 1889. Théodule Ribot est également célèbre pour ses études sur la mémoire et ses recherches sur les institutions psychiatriques. 13 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Différentes approches… Le structuralisme = Première école de pensée majeure en Ѱ La compréhension de l’esprit passe par la connaissance des éléments qui le constituent. -> étudier la structure sous-jacente de l’esprit en analysant ses éléments. Wilhelm WUNDT (1832-1920) : l’introspection comme méthode de recherche privilégiée = Auto-rapporter tous les éléments présents dans la conscience pdt la réalisation d’une tâche -> Entrainement ++ pour rendre la méthode aussi structurée et précise que possible Edward TITCHENER (1867-1927) : l’expérience mentale résulte de l’addition de 3 composantes : - les sensations (composantes élémentaires de la perception) - les images (composantes élémentaires des idées) - les affects (composantes élémentaires des émotions) Une fois la psychologie établie comme une science distincte, différentes approches et perspectives ont vu le jour concernant la façon d'analyser l'esprit et d'expliquer le comportement humain. Plusieurs courants ou écoles de pensée se sont ainsi développés, à travers le 20ème siècle et à travers le monde, jusqu’à l’avènement de la psychologie cognitive dans les années 50. Le structuralisme est généralement considéré comme la première école de pensée majeure en psychologie. Selon cette approche, la compréhension de l’esprit passe par la connaissance des éléments qui le constituent. Il s’agissait donc d’étudier la structure sous- jacente de l’esprit en analysant ses éléments, ou en d’autres termes, de décomposer les processus mentaux en leurs composantes les plus élémentaires. La méthode de recherche privilégiée dans cette approche est l’introspection, développée par Wundt. L'introspection correspond à ce que vous faites lorsque vous vous « tournez vers l’intérieur » et tentez d’analyser vos propres pensées et sentiments, mais pour pouvoir l’utiliser de façon expérimentale, Wundt s'est attaché à rendre ce processus aussi structuré et précis que possible. Les observateurs devaient rapporter tous les éléments présents dans leur champ de conscience pendant la réalisation de tâches précises. Ils étaient pour ce faire longuement entrainés et le processus lui-même était rigide et hautement contrôlé. C’est Titchener, un élève américain de Wundt, qui établit formellement et nomma le structuralisme. Très brièvement, sur la base de ses analyses introspectives, il identifia trois types de composantes ou structures mentales élémentaires : les sensations (composantes élémentaires de la perception), les images (composantes élémentaires des idées) et les affects (composantes élémentaires des émotions). Le structuralisme est important car il s'agit de la première grande école de pensée en psychologie et qu’il a marqué la volonté de faire de la psychologie une science plus expérimentale. Cependant, à la fois la méthode (l’introspection) et les objets d’études (les composantes de l’esprit) du structuralisme ont rapidement été critiqués et ce courant n’a pas survécu longtemps à la mort de Titchener… 14 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Le fonctionnalisme La compréhension de l’esprit passe par la connaissance des opérations mentales. Ces opérations servent un objectif d’adaptation à l’environnement. -> Etudier leurs fonctions, ce à quoi elles servent plutôt que ce dont elles sont constituées. Le pragmatisme + que peut-on tirer pratiquement de cette connaissance ? -> La connaissance est validée par son utilité. William JAMES (1842-1910) : le père de la psychologie américaine 1890 : The Principles of Psychology Le découpage de l’activité mentale en structures ayant été rapidement jugé trop simpliste, trop statique, le fonctionnalisme s'est formé en réaction au structuralisme. Selon cette autre école de pensée, la compréhension de l’esprit passe par la connaissance des opérations, plus que des structures, mentales. De plus, les opérations mentales serviraient d’abord un objectif d’adaptation à l’environnement (i.e., elles permettent aux organismes de naviguer efficacement dans leur environnement). L’objet de la psychologie scientifique devrait donc être l’étude des fonctions des opérations mentales (ce à quoi elles servent plutôt que ce dont elles sont constituées). Le fonctionnalisme a été fortement influencé par la théorie de l'évolution de Charles Darwin et par les travaux de William James (1842-1910), qui a notamment guidé le fonctionnalisme vers le pragmatisme, une approche qui met davantage l’accent sur les applications pratiques des connaissances. William James était un psychologue et un philosophe américain qui a eu une influence majeure sur le développement de la psychologie aux États-Unis. Il est souvent considéré comme le père de la psychologie américaine. Son livre, « The Principles of Psychology » (1890), est l'un des textes classiques les plus influents de l'histoire de la psychologie. Le fonctionnalisme a eu une influence certaine dans le développement du courant behavioriste (voir plus loin) et de la psychologie appliquée, notamment dans le champ de l’éducation. NB : En 1875, quatre ans avant que Wundt n'établisse son laboratoire en Allemagne et huit ans avant que Hall n'établisse le sien aux Etats-Unis, Williams James a créé un laboratoire de psychologie à l'université de Harvard. Cependant, on n’attribue généralement pas à James la création du premier laboratoire (au monde ou américain) parce qu’on y menait exclusivement des activités d’enseignement, pas des recherches originales… 15 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive L’associationnisme La vie mentale est fondée sur des associations. Comment les faits ou les idées sont-ils associés pour aboutir à une forme d’apprentissage ? Hermann HEBBINGHAUS (1850-1909) : Etude de la mémoire humaine Apprentissage de listes de syllabes sans signification -> introspection expérimentale systématique (ex : compter ses erreurs, enregistrer ses temps de réponse) Eward Lee THORNDIKE (1874-1949) : la loi de l’effet (1905) La satisfaction est la clé de la formation des associations : On apprend à répondre d’un certaine façon dans une situation donnée si on est régulièrement récompensé pour avoir répondu ainsi. -> précurseur du behaviorisme Selon un autre courant, l’associationnisme, la vie mentale est fondée sur des associations. Il s’agit alors de d’étudier comment les faits ou les idées sont associés les uns aux autres pour aboutir à une forme d’apprentissage. En d’autres termes, la pensée se présente comme une succession d’idées, évoquées par certaines sensations, qui s’enchaînent en suivant certaines lois (i.e., pas de façon aléatoire, pas au hasard). Ces associations peuvent résulter de paramètres tels que la contiguïté (la tendance à se manifester à peu près au même moment), la similitude (le fait d’avoir des propriétés similaires) ou le contraste (chaud/froid, jour/nuit). C’est l’étude de ces lois, dites d’association, qui doit être l’objet de la psychologie comme discipline scientifique. Hermann Hebbinghaus (1850-1909, psychologue allemand, collaborateur de Wundt ) est l’une des figures majeures de ce courant. Il est particulièrement connu pour ses travaux expérimentaux sur la mémoire humaine. Il était lui-même le sujet de ses propres expériences, reposant essentiellement sur l‘apprentissage de listes de syllabes sans signification et sur l’introspection expérimentale systématique (i.e., il apprenait puis restituait - dans différentes conditions - des listes de syllabes, comptait ses erreurs, enregistrait ses temps de réponse…). Autre grande figure de ce courant, Eward Lee Thorndike (1874-1949, psychologue et professeur d'université américain) est considéré comme le précurseur du behaviorisme, et est notamment connu pour ses recherches sur l'intelligence animale et en psychologie de l'éducation (dont il est souvent présenté comme le fondateur). En particulier, il a formulé ce que l’on appelle la « loi de l’effet ». Selon cette loi, la clé de la formation des associations est la satisfaction : on apprend à répondre d’un certaine façon dans une situation donnée si on est régulièrement récompensé pour avoir répondu ainsi. Les comportements engendrant de la satisfaction deviendront plus probables tandis que ceux suivis d’insatisfaction ou d’inconfort seront progressivement moins susceptibles de se reproduire. 16 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive La mesure des temps de réaction (TR) Franciscus DONDERS (1818-1889) : Premier à utiliser les TR pour en inférer les processus mentaux sous-jacents « Chronométrie mentale » : méthode de soustraction 1) concevoir deux tâches identiques, à l'exception d'une opération mentale (supposée n’être impliquée que dans l'une des tâches). 2) mesurer le temps d’exécution de chaque tâche séparément 3) soustraire les résultats -> Estimation du temps nécessaire à l'exécution de l'opération mentale en question La psychologie scientifique de l’époque délaisse progressivement la méthode trop subjective de d’introspection au profit de mesures plus objectives, telles que la mesure de temps de réaction (TR), qui reste encore aujourd’hui une mesure très utilisée en psychologie expérimentale. Franciscus Donders (1818-1889, ophtalmologiste néerlandais) est un pionnier de la « chronométrie mentale », une approche qui vise à mesurer la durée des opérations mentales sur la base du temps nécessaire pour effectuer des tâches simples. Dans ce cadre, Donders a développé (à partir de 1868) un paradigme expérimental de base : la méthode de la soustraction. En bref, il s'agit de concevoir deux tâches identiques en tous points, à l'exception d'une opération mentale supposée n’être impliquée que dans l'une des tâches. On mesure ensuite séparément le temps nécessaire à la réalisation de chaque tâche et, en soustrayant les résultats, on obtient une estimation du temps nécessaire à l'exécution de l'opération mentale en question. Cette méthode permet ainsi d'isoler une opération mentale. 17 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive La mesure des temps de réaction (TR) A TR = Tps de Détection Si A 237-201 = 36 ms A B TR = Tps de Détection Tps de Reconnaissance Si A 284-237 = 47 ms A B TR = Tps de Détection Tps de Reconnaissance Tps de Sélection Si A Si B 0 ms 201 ms 237 ms 284 ms Mais… Difficile de trouver des tâches qui ne diffèrent que par un processus… Suppose que les étapes se déroulent en série… L’ajout d’une étape de ttt peut avoir un impact sur les autres étapes… Un exemple (inspiré des travaux de Donders, voir l’ouvrage de Patrick Lemaire mentionné dans la bibliographie pour plus de précisions) : TACHE 1 : on demande au sujet d’appuyer sur un unique bouton suite à la présentation d’un unique stimulus A : le TR1 mesuré correspond au temps de détection de ce stimulus (i.e., le temps nécessaire pour que 1- le stimulus accède aux récepteurs sensoriels, 2- le système sensoriel traite ce stimulus 3- les opérations mentales permettant de décider de la présence du stimulus et la programmation de l’acte moteur soient réalisées et 4- l’acte moteur soit exécuté). TACHE 2 : on présente deux stimuli, A et B, et on demande au sujet d’appuyer sur un (unique) bouton suite à la présentation de A exclusivement : le TR2 représente le temps de détection du stimulus + le temps de reconnaissance* (le temps nécessaire pour reconnaitre qu’il s’agit du stimulus A). TACHE 3 : on présente deux stimuli, A et B, et on demande au sujet d’appuyer sur un bouton donné pour A et sur un autre bouton pour B : le TR correspond au temps de détection + au temps de reconnaissance + au temps de sélection de la réponse appropriée (appuyer sur l’un ou l’autre des boutons). Suivant cette logique, si on veut connaitre, par exemple, la durée de l’opération mentale permettant la reconnaissance, il suffit de soustraire TR1 (détection) à TR2 (détection + reconnaissance). Pour être tout à fait juste, il faut tout de même ici choisir entre « répondre » et « ne pas répondre » (i.e., réaliser un processus de sélection de la réponse…). Notons que la méthode de soustraction, intuitivement très intéressante, présente tout de même un certain nombre de limites. Notamment, elle suppose que les processus de traitement se déroulent toujours en série (les uns après les autres). Par ailleurs, il peut s’avérer très difficile de construire des tâches qui ne diffèrent que par le seul processus que l’on souhaite mesurer. Enfin, on ne peut pas être sûr que l’ajout d’une étape de traitement supplémentaire dans une tâche n’influence pas les autres étapes de traitement. D’autres méthodes ont par la suite été mises au point pour remédier à ces problèmes (e.g., la méthode additive de Sternberg, 1965). 18 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Le behaviorisme (ou comportementalisme, 1913->) John Broadus WATSON (1878-1958) : établit les bases du behaviorisme (1913) Pour être scientifique, une méthode de recherche doit se limiter à l’étude d’éléments objectivement mesurables. -> Etude des comportements observables, pas des phénomènes mentaux. -> Rejet de l’introspection, subjective et non mesurable, « aussi peu utile à la Ѱ qu'elle l'est à la chimie ou la physique » Toutes les hypothèses sur les stratégies de la pensée ne sont que de la spéculation -> ϕ, pas Ѱ John Broadus Watson (1878-1958 ; psychologue américain) est généralement reconnu comme le père du behaviorisme (ou comportementalisme), dont il établit formellement les bases en 1913. Selon cette approche, pour pouvoir être qualifiée de scientifique, la psychologie doit se limiter à l’étude d’éléments objectivement mesurables. De fait, seuls les comportements observables doivent être étudiés, pas les phénomène mentaux (jugés comme opaques et non accessibles à la conscience). Les behavioristes rejettent donc évidemment la méthode d’introspection, jugée trop subjective et ne permettant pas d’observer des phénomènes valides et fiables (notamment parce qu’elle serait basée sur une reconstruction après coup, contrainte par le système linguistique et l’environnement social). Selon Watson, l’introspection serait ainsi « aussi peu utile à la psychologie qu’elle l’est à la chimie ou à la physique ». En somme, pour les behavioristes les plus radicaux, formuler des hypothèses sur le fonctionnement mental relève de la pure spéculation et cette activité revient aux philosophes, certainement pas aux psychologues scientifiques... 19 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Le behaviorisme (ou comportementalisme, 1913->) John Broadus WATSON (1878-1958) : établit les bases du behaviorisme (1913) Les cpts des individus (I) sont envisagés comme des réponses (R) à des stimuli extérieurs (S) S -> (I) -> R On ne peut pas accéder aux états mentaux des individus : (I) = « Boîte noire » -> analyser les caractéristiques des entrées (inputs / S) et des sorties (outputs / R) Modèle S -> R Donne une place centrale à l’apprentissage et au conditionnement. Nombreuses études sur les animaux (+ simple, meilleur contrôle… mais généralisation à l’humain ?) Plus concrètement, dans cette approche, les comportements des individus (I) sont envisagés comme des réponses (R) à des stimuli extérieurs (S), ce que l’on peut résumer par le schéma S → (I) → R. Le « I » est ici mis entre parenthèses car, selon les behavioristes, on ne doit pas s’intéresser aux états mentaux des individus, qui sont situés dans une « boîte noire » à laquelle on ne peut avoir accès. Il s’agit donc au final d’étudier les relations entre les stimuli de l’environnement (S) et les comportements réponses (R) qu’ils génèrent, selon un modèle « stimulus-réponse » (S → R) : comment sont acquis les comportements suite à l’exposition à des stimuli ? L’approche behavioriste donne ainsi une place centrale à l’apprentissage, approché uniquement sous l’angle des comportements observables, et au conditionnement. Cette approche se démarque aussi des autres approches de la psychologie par le fait que bon nombre de recherches behavioristes a été réalisé avec des animaux (tels que les rats ou les pigeons) plutôt qu’avec des sujets humains. Travailler avec des organismes plus simples permet en effet un meilleur contrôle des relations entre environnement et comportement… mais pose inévitablement la question de la généralisation des résultats obtenus à l’être humain ! 20 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Le behaviorisme (ou comportementalisme, 1913->) Ivan PAVLOV (1849-1936) : le conditionnement classique (1897) Watson et Rayner (1920) Expérience (très controversée !!!) du petit Albert Ce sont les travaux du physiologiste (et Prix Nobel) russe Ivan Pavlov (1849-1936) sur le conditionnement classique qui ont ouvert la voie au behaviorisme. Pour rappel : 1. Avant le conditionnent, quand on présente sa nourriture au chien, il salive. La nourriture est un stimulus inconditionnel provoquant la réponse inconditionnelle de salivation. 2. Avant le conditionnement, quand on présente un son neutre (clochette, sifflet) au chien, il ne salive pas. Le son neutre est un stimulus neutre qui ne provoque pas de réponse conditionnelle. 3. Pendant le conditionnement, on présente de façon répétée la nourriture accompagnée du son neutre au chien, qui salive. La salivation est ici la réponse conditionnelle à la nourriture. 4. Après le conditionnement, la présentation isolée du son provoque la salivation. La salivation est devenue une réponse conditionnelle à la présentation du stimulus neutre. Dans ce cadre, il est souvent fait référence à ce que l’on appelle « l’expérience du petit Albert » au cours de laquelle Watson, aidé de son assistante Rosalie Rayner, aurait conditionné un bébé âgé de 9 mois à craindre les souris blanches (en les associant à un bruit violent), puis, par généralisation, tous les animaux… Il convient de souligner que cette expérience, considérée comme certains comme faisant partie du « folklore des sciences sociales », est extrêmement controversée, les preuves concrètes et les dossiers scientifiques faisant défaut (Ben Harris, 1979, American Psychologist). 21 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Le behaviorisme (ou comportementalisme, 1913->) Burrhus SKINNER (1904-1990) : le conditionnement opérant (1936) Pourrait expliquer tous les comportements humains, pas uniquement l’apprentissage (de l’acquisition du langage aux comportement sociaux…) Modèle S -> R -> C C = Conséquence de R pour l’individu Individu actif qui anticipe les conséquences de son cpt suite au stimulus -> peut modifier son cpt en fonction des conséquences Boîte de Skinner Le behaviorisme a surtout prospéré aux Etats-Unis (jusqu’aux années 70), il a eu moins d’influence sur la Ψ européenne… - : a retardé l’étude scientifique des activités mentales + : a contribué à faire de la Ѱ une discipline scientifique « respectable » Burrhus Skinner (1904-1990, psychologue américain) est la deuxième grande figure emblématique du behaviorisme. Pour lui, tous les comportement humains (de l’acquisition du langage aux comportements sociaux les plus élaborés), et pas uniquement l’apprentissage, pourraient s’expliquer par le conditionnement opérant (ou instrumental). En bref, l’idée est récompense ou d’une punition). Ainsi, quand un résultat désirable suit une action, le comportement devient plus susceptible de se reproduire à l'avenir, tandis que les réponses suivies de résultats négatifs, en revanche, deviennent moins susceptibles de se reproduire. Le modèle est donc ici un modèle S → R → C (avec C = conséquence de la réponse comportementale R pour l’individu), dans lequel l’individu est considéré comme actif, capable d’anticiper les conséquences de son comportement et de le modifier en fonction de ces conséquences. Skinner est également connu pour être l’inventeur d’un dispositif expérimental ingénieux, connu sous le nom de « boîte de Skinner », permettant une étude précise des mécanismes du conditionnement opérant (il s’agit d’une cage équipée d’un levier sur lequel l’animal peut appuyer pour recevoir par exemple de l’eau ou de la nourriture, faire cesser un choc électrique, etc.). Le behaviorisme a essentiellement prospéré aux Etats-Unis. À partir des années 1970, le béhaviorisme radical défendu par Skinner perd progressivement de son influence au profit du cognitivisme. L’étude de l’activité mentale a certainement été retardée par le refus des behavioristes d’analyser les processus non observables directement. Cependant, ce courant a fortement contribué à faire de la psychologie une discipline scientifique « respectable », notamment en élevant les standards de la recherche en psychologie au niveau de ceux des autres sciences expérimentales (précision des mesures, notion de contrôle expérimental…). 22 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Le Gestaltisme (ou Ψ de la forme) A partir des années 20, courant de pensée Allemand La conscience doit être un sujet essentiel en Ψ ! Max WERTHEIMER Wolfgang KÖHLER Kurt KOFFKA (1880-1943) (1887-1967) (1886-1941) -> approche holistique (globale) des phénomènes mentaux -> recherche des principes qui gouvernent la vie mentale -> surtout phénomènes perceptifs En parallèle du Behaviorisme, le Gestaltisme, ou psychologie de la forme, se développe en Europe à partir des années 1920. Les principaux représentants de ce courant sont trois psychologues allemands : Max Wertheimer (1880-1943), Wolfgang Köhler (1887- 1967) et Kurt Koffka (1886-1941). Selon eux, la conscience se devrait d’être un sujet essentiel en psychologie et ils prônent une approche holistique des phénomènes mentaux et des comportements (i.e., l’idée que les choses doivent être considérées comme un tout ; qu’il n’est pas possible d’en comprendre les parties, les constituants, sans les considérer en relation avec le tout). Ce mouvement est donc en partie une réaction à l’encontre de l’approche behavioriste, mais aussi de l’approche structuraliste. Le Gestaltisme visait donc à découvrir les principes qui gouvernent la vie mentale, avec un intérêt particulier pour les phénomènes perceptifs. Cette école a ainsi joué un rôle majeur dans le développement de l'étude des sensations et des perceptions humaines. 23 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Le Gestaltisme (ou Ψ de la forme) « Le tout diffère de la somme de ses parties » Une forme est une organisation non réductible à une juxtaposition d’éléments La perception consiste en une distinction de la figure et du fond (ségrégation figure-fond) Vase de Rubin La maxime « Le tout diffère de la somme de ses parties » est un assez bon résumé de l’approche Gestaltiste. L’idée est ici qu’une forme (Gestalt) est une organisation qui ne peut se résumer à une juxtaposition d’éléments : elle possède en propre une qualité ne se trouvant dans aucun des éléments constituants. La modification d’un seul des éléments peut modifier la forme tout entière. Ensuite, la perception consiste avant tout en une ségrégation de la figure et du fond. L’affectation des bords a un effet sur la forme perçue. Dans l’illustration ci-dessus (vase de Rubin), l’observateur perçoit soit un vase, soit deux visages, selon respectivement que les deux bords curvilignes entre les zones noire et blanche sont affectés vers l'intérieur ou vers l'extérieur. Une seule interprétation s’impose à un moment donné et il peut être difficile de contrôler le basculement d’une interprétation à l’autre. 24 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Le Gestaltisme : lois d’organisation perceptives Loi de continuité : des éléments orientés dans la même direction tendent à s’organiser en une forme Loi clôture : nos mécanismes perceptifs évitent les interprétations conduisant à des tracés « incomplets » Loi de proximité : les objets proches les uns des autres apparaissent regroupés Une figure sans signification composée de points, de lignes et de surfaces donnera généralement lieu à la même interprétation perceptive de la part d’une grande majorité d’observateurs. Ainsi, selon les Gestaltistes, les mécanismes perceptifs suivent des règles à peu près identiques pour tous les individus. Ce sont ces règles qu’ils étudient et qui constituent pour eux des « lois d’organisation perceptive ». En voici les principales : - Loi de continuité : des éléments orientés dans la même direction tendent à s’organiser en une forme. Ainsi, lorsqu’une ligne est brisée, nous la percevons comme continue. - Loi de clôture : nos mécanismes perceptifs évitent les interprétations conduisant à des tracés « incomplets » (on pourrait percevoir 3 formes, mais la petite surface centrale introduirait des découpes dans le rectangle et l’ellipse). - Loi de proximité : des éléments relativement proches sont perçus comme appartenant à la même forme. A gauche, on perçoit deux colonnes de trois lignes de points plutôt que six lignes de points. 25 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Le Gestaltisme : lois d’organisation perceptives Loi de similitude : les objets similaires apparaissent regroupés Loi de destin commun : des parties en mouvement ayant la même trajectoire sont perçues comme faisant partie de la même forme - Loi de similitude (ou de similarité) : des éléments relativement semblables sont perçus comme appartenant à la même forme (sur la figure de droite, par exemple, on perçoit plus aisément des alignements horizontaux plutôt que verticaux). - Loi de destin commun : des parties en mouvement ayant la même trajectoire sont perçues comme faisant partie de la même forme. 26 3. De la psychologie scientifique à la psychologie cognitive Les principes de la Gestalt sont exploités dans le marketing, l’art, la conception de sites internet… 27 4. La psychologie cognitive L'approche cognitive a commencé à révolutionner la Ѱ à la fin des années 50 / début des années 60 Approche dominante à la fin des années 70. Plusieurs facteurs… 1- Les suites de la 2ème Guerre Mondiale (blessés + questions pratiques) 2- Réaction face au behaviorisme : le cognitivisme nait à la fois du behaviorisme et contre lui. Jean PIAGET Edward TOLMAN (1896-1980) (1886-1959) « Cartes mentales, Etude systématique du Behavioriste… planification développement cognitif inférences… » 4. La psychologie cognitive L'approche cognitive a commencé à révolutionner la psychologie vers la fin des années 50, début des années 60, pour devenir l’approche dominante à la fin des années 70. Plusieurs facteurs, internes et externes à la discipline, peuvent expliquer son émergence et son développement. 1- A l’issue de la deuxième Guerre Mondiale, de nombreux blessés de guerre souffrent de divers troubles cognitifs (problème de décision, de langage, d’attention…). Etre en mesure d’évaluer les fonctions cognitives préservées ou déficitaires des blessés devient une nécessité. De nouveaux problèmes pratiques rencontrés durant la guerre, tels que la gestion de navires et d’avions par les tours de contrôle ou des réseaux de communication stimulent également les recherches sur les processus cognitifs (attention, résolution de problème, prise de décision…). 2 - Le cognitivisme est né à la fois du behaviorisme (dont il garde l’idée que la psychologie se doit d’être une discipline objective et rigoureuse, avec des standards scientifiques élevés) et contre lui (en rejetant le postulat selon lequel les états mentaux internes n’existent pas). L’intérêt pour les processus cognitifs est notamment restauré grâce aux travaux de Jean Piaget (1896-1980) et d’Edward Tolman (1886-1959). Piaget, psychologue suisse célèbre pour ses travaux en psychologie du développement, est le premier à mener une étude systématique du développement cognitif. Tolman, qui a commencé sa vie universitaire en étudiant la physique, les mathématiques et la chimie au Massachusetts Institute of Technology (MIT), puis a décidé de s'orienter vers l'étude de la psychologie après avoir lu « Principles of Psychology » de William James, s’inscrivait dans le courant Behavioriste. Il travaillait principalement chez l’animal, mais il a proposé une théorie faisant appel à de nombreux concepts cognitifs (tels que la planification, la pensée, les inférences, les cartes mentales…). 28 4. La psychologie cognitive L'approche cognitive a commencé à révolutionner la Ѱ à la fin des années 50 / début des années 60 Approche dominante à la fin des années 70. Plusieurs facteurs… 3- Apparition de l’ordinateur (début des années 50) -> une métaphore et une terminologie nouvelle pour étudier l’esprit humain (ttt de l’information, codage, stockage….) Stimulus (Input) ? Réponse, Cpt (Output) 3- Enfin, l’apparition de l’ordinateur au début des années 50, a fourni à la psychologie scientifique un outil nouveau, mais aussi et surtout une métaphore (un modèle analogique) et une terminologie nouvelles pour étudier l’esprit humain. L’être humain est alors considéré comme un organisme dont la tâche principale est de traiter des informations. On cherche à comprendre comment il transforme l’information dans l’intervalle de temps qui sépare le stimulus (entrée, input) et la réponse (sortie, output), à « décortiquer » les étapes de cette transformation. On parle de codes, de contraintes fonctionnelles ou structurelles, de traitement sériel ou parallèle, etc. (voir plus loin) 29 4. La psychologie cognitive 3 dates/évènements clés qui ont marqué les débuts de la psychologie cognitive George MILLER (1920-2012) 1956 : "The Magical Number 7 Plus or Minus 2« = L’esprit peut effectuer un véritable traitement logique, pas simplement un enregistrement, des données. Noam CHOMSKY (1928-) 1959 : violente critique de « Verbal behavior » (Skinner, 1957) = Remise en question de l'approche comportementaliste de l'étude de l'esprit en général et du langage en particulier. Ulric NEISSER (1928-2012) 1967 : « Cognitive Psychology » Il est toujours difficile de dater précisément la naissance d’une discipline, mais on peut retenir trois chercheurs, dates et évènements clés comme ayant particulièrement marqué les débuts de la psychologie cognitive. En 1956, Georges Miller (1920-2012) publie un article au titre énigmatique : « Le nombre magique 7, plus ou moins 2 », dans lequel il met en évidence une limite particulière de notre fonctionnement cognitif (le fait qu’il est difficile de mémoriser une suite de plus de sept éléments) et une solution que nous avons inventée pour surmonter cette limite (regrouper les éléments en sous-ensembles pour les retenir plus facilement). Miller met ainsi l’accent sur la capacité de l’esprit à effectuer un véritable « traitement » logique qui ne se réduit pas à un simple enregistrement des données transmises. En 1959, Noam Chomsky (1928-) critique violemment le livre « Verbal Behavior » de Skinner, remettant ainsi en question l'approche comportementaliste de l'étude de l'esprit en général et du langage en particulier. En 1967, Ulric Neisser (1928-2012) publie un ouvrage intitulé « Cognitive Psychology » qui s’est avéré décisif en informant largement les étudiants et les chercheurs des développements récents de la discipline. 30 4. La psychologie cognitive Comment les individus pensent-ils ? L’esprit humain est un système de traitement de l’information (TDI). 1- Le TDI de l‘Homme ressemble à celui des ordinateurs. 2- Les info. sont traitées par différents systèmes de ttt. (ex : perception, attention, MCT…) 3- Ces systèmes transforment ou modifient l’info. de manière systématique (selon des règles précises). => Préciser les structures et les processus qui sous-tendent les performances cognitives. Selon les cognitivistes, l’objectif de la psychologie scientifique est la compréhension des processus cognitifs impliqués dans une tâche. Dit autrement, il s’agit de découvrir les règles générales que l’esprit utilise pour traiter les informations, ou encore comment les individus pensent. L’esprit humain est ici considéré comme un système de traitement de l’information. 1- Le traitement de l’information de l‘Homme ressemble à celui des ordinateurs. 2- Les informations sont traitées par différents systèmes de traitement (ex : perception, attention, mémoire à court terme…) 3- Ces systèmes transforment ou modifient l’information de manière systématique (selon des règles précises). Il s’agit donc en somme de préciser les structures et les processus qui sous-tendent les performances cognitives 31 4. La psychologie cognitive L’esprit humain est un système de traitement de l’information. TTT ascendants Bottom-up Entrée TTT sériels TTT descendants Top-down TTT parallèles De manière très générale, on distingue les traitements ascendants ou bottom-up (du bas vers le haut), qui sont directement affectés par les stimuli d’entrée, des traitements descendants ou top-down (du haut vers le bas), influencés par les attentes et les connaissances de l’individu plutôt que par le stimulus lui-même. On parle de traitements sériels (ou en série) pour désigner les traitements qui se succèdent (un traitement ne pouvant débuter que lorsque le traitement précédant est terminé), et des traitements parallèles lorsque plusieurs traitements se déroulent de façon simultanée. (L’Echiquier d’Adelson : une illustration de l’influence des processus descendants sur la perception visuelle. Nos connaissances et attentes concernant les propriétés d’un damier et les effets d’une ombre projetée nous font apparaitre les carrés A et B de couleurs différentes alors qu’ils sont en réalité exactement de la même couleur…) 32 4. La psychologie cognitive Un domaine de la psychologie centré sur la cognition. -> Des modèles qui bénéficient à d’autres domaines… qui l’alimentent en retour. Psychologie Données cognitive comportementales Sciences Neuropsychologie Neurosciences cognitives cognitive cognitives computationnelles Patients cérébro-lésés Modèles Activité cérébrale computationnels La psychologie cognitive au sens strict vise à comprendre la cognition au travers d’indices comportementaux essentiellement (tels que les temps de réaction ou les erreurs par exemple). L’influence de la psychologie cognitive est énorme car plusieurs autres approches de la cognition bénéficient des modèles développés dans ce domaine (et l’alimentent en retour) : - La neuropsychologie cognitive vise à comprendre la cognition normale par l’étude de patients cérébro-lésés. - Les neurosciences cognitives combine les données comportementales et les données concernant la structure et le fonctionnement du cerveau. - Les sciences cognitives computationnelles visent à développer des modèles computationnels (informatiques) simulant la cognition ; elles intègrent de plus en plus souvent les connaissances concernant le comportement et le cerveau humain. Ainsi, les chercheurs combinent généralement ces différentes approches. 33 4. La psychologie cognitive EEG IRMf MEG TEP Cette dynamique est favorisée par le fait que, depuis la fin du siècle dernier, le développement des techniques d’exploration cérébrale a été fantastiquement rapide. Ces techniques, et notamment celles qui permettent la mesure non invasive (i.e., « de l’extérieur ») de l’activation des centres et circuits cérébraux chez le sujet humain, sont de plus en plus facilement accessibles aux chercheur-se-s en psychologie, ce qui provoque un glissement paradigmatique progressif de la psychologie (en général) vers une approche neuro-scientifique. EEG = éléctro-encéphalographie : mesure de l’activité électrique cérébrale MEG = magnéto-encéphalographie : mesure de l’activité électrique cérébrale via les effets magnétiques qui lui sont associés IRMf = imagerie par résonance magnétique fonctionnelle : mesure indirecte de l’activité cérébrale via les modifications de débit sanguin qui lui sont associées. TEP = tomographie par émission de positrons : mesure indirecte de l’activité cérébrale via les modifications de débit sanguin qui lui sont associées. 34 4. La psychologie cognitive « Décortiquer » les fonctions cognitives. Connaître l’architecture cérébrale. Cela signifie que les modèles explicatifs des comportements et de la cognition (normaux ou pathologiques) prennent de plus en plus systématiquement en compte le fait qu’ils sont ancrés dans un substrat neuronal et qu’ils s’efforcent d’intégrer les contraintes que la matérialité physique du cerveau impose aux traitements. Cette idée étant acquise, il reste néanmoins très difficile de mettre en concordance une composante élémentaire d’une fonction cognitive donnée et un réseau ou une région cérébrale particulière. D’une part, de tous les comportements humains, les fonctions cognitives supérieures sont les plus difficiles à mesurer objectivement, à décrire et à décomposer en opérations mentales plus élémentaires (en partie en raison du fait que l’expérience que nous faisons de nos activités cognitives est souvent celle d’opérations quasi instantanées, « lisses » et sans étapes). D’autre part, l’anatomie du cerveau est fantastiquement complexe et nous ne savons pas encore tout de la structure et des interconnections de ses différentes régions. De nos jours, l’étude des fonctions cognitives fait donc généralement intervenir des protocoles expérimentaux ingénieux (permettant la décomposition des opérations mentales), de solides connaissances en neurosciences et des techniques d’imagerie cérébrale sophistiquées et variées. Ceci permet d’aboutir à des modèles explicatifs de ces fonctions de plus en plus précis et plausibles car contraints par la matérialité du cerveau. 35

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