Introduction à l’économie de la santé - Chapitre 3 - PDF
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Le Mans Université
Florian Fouquet
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This document is an introduction to health economics, covering various aspects of the topic, including a chapter on health systems.
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Introduction à l’économie de la santé Chapitre 3 - Les systèmes de santé L3 Economie Florian Fouquet [email protected] Plan du chapitre Qu’est-ce qu’un système de santé ? Systèmes de soins et caractéristiques de l’of...
Introduction à l’économie de la santé Chapitre 3 - Les systèmes de santé L3 Economie Florian Fouquet [email protected] Plan du chapitre Qu’est-ce qu’un système de santé ? Systèmes de soins et caractéristiques de l’offre Inégalités sociales de santé et protection sociale Florian Fouquet 1- Qu’est-ce qu’un système de santé ? Florian Fouquet Système de santé - Définition Selon l’OMS, un « système de santé est l’ensemble des organisations, des institutions, des ressources et des personnes dont l’objectif principal est d’améliorer la santé ». Toujours selon l’OMS, « pour renforcer les systèmes de santé, il faut surmonter des obstacles dans plusieurs domaines : effectifs des personnels de santé, infrastructures, matériel médical et médicaments, logistique, suivi des progrès et efficacité du financement. Pour fonctionner, un système de santé a besoin de personnel, de moyens financiers, d’informations, de fournitures, de moyens de transport et de communication, ainsi que d’orientations générales. Il doit fournir des services correspondant aux besoins et financièrement juste et traiter les patients décemment ». Florian Fouquet Ambiguïté de la définition Faucon et Le Guillou (2021) proposent une analyse détaillée de cette définition. La première partie donne une définition très large des systèmes de santé, qui inclut à la fois la production de soins, la prévention, les objectifs de santé publique, voire même l’assurance maladie et les systèmes de protection sociale. La seconde partie, en revanche, renvoie au particulier au système de soins. Cela exclut de fait la contribution de certaines organisations ou institutions. Par exemple, le système éducatif contribue à la santé via des actions de prévention, sans que ce soit son « objectif principal ». La définition proposée par l’OMS tend à présenter le système de santé comme un système fermé, alors qu’il est en interaction permanente avec son environnement. Florian Fouquet Système de santé - Définition (2) Faucon et Le Guillou (2021) proposent une définition plus large et opérationnelle des systèmes de santé. Ils définissent un système de santé comme étant constitué : « de l’ensemble des agents individuels, collectifs ou institutionnels, dont l’activité est principalement déterminée par des décisions ou prescriptions médicales […] et dont la finalité peut être éducative, préventive ou curative » ; « des institutions, publiques ou privées, qui concourent à la formation de ces agents ou au financement et à la régulation de ces activités ». Un système de santé réunit donc l’offre de soins, la demande de soins, et les financeurs, ainsi que l’ensemble des interactions entre ces différentes composantes. Florian Fouquet Le système de santé en France Loi de financement de la Sécurité Sociale Parlement Tutelle Assurance maladie Etat obligatoire et complémentaire Financement Tutelle et Tutelle financement Prise en charge Etablissements de soins Soins ambulatoires des patients Fourniture Fourniture Industrie du médicament et Tutelle des dispositifs médicaux Financement D’après Hirtzlin (2018) Florian Fouquet Les modèles de systèmes de santé On peut distinguer trois modèles de système de santé (Fargeon, 2014) : le système national de santé ; le systèmes des assurances sociales ; le système libéral. Ces types de système varient notamment du point de vue de l’étendue de la couverture maladie obligatoire et du montant de la participation des patients aux coûts des soins (on parle de coûts out-of-pocket). Chaque type de système présente ses avantages et inconvénients (inégalités de santé plus fortes dans le système libéral, délais d’attente plus longs dans un système national, etc.), le choix d’un système plutôt qu’un autre dans un pays dépend de choix politiques et institutionnels (Paris et al., 2010). Florian Fouquet Les modèles de systèmes de santé Système national Système des assurances sociales Système libéral Obligatoire et attachée à l’activité pro, Facultative et individuelle, filet de Couverture maladie Obligatoire existence d’une couverture sécurité pour certaines catégories complémentaire facultative de population Participation individuelle et Financement Impôts Impôts et cotisations sociales impôts Offre de services privée, Organisation de la Coexistence d’un secteur public et Monopole public complétée par le secteur à but distribution de soins d’une offre privée non lucratif Densité de l’offre de soins Faible Elevée Elevée Circulation dans le Pas de liberté de choix du patient Liberté limitée de choix du patient Liberté de choix du patient système Salariat dans le secteur public, à l’acte Mode de rémunération Salariat et capitation A l’acte pour l’ambulatoire Mécanismes d’ajustement Planification Planification et marché Marché Maîtrise de la dépense de santé, mais Bonne qualité de la réponse, mais Pas de maitrise de la dépense et problèmes de qualité de la réponse Effets peu de maitrise de la dépense de problèmes d’équité, inégalités (listes d’attente, notamment pour les santé sociales de santé soins spécialisés) D’après Fargeon (2014) Florian Fouquet 2- Systèmes de soins et caractéristiques de l’offre Florian Fouquet Systèmes de soins On entend par système de soins la partie du système de santé qui vise à produire et fournir lesdits soins. Comme on l’a évoqué dans le chapitre 2, l’offre de soins a des caractéristiques particulièrement dans la mesure où elle induit la demande de soins : les personnels soignants disposent de la connaissance médicale permettant à la fois le diagnostic (déterminant la demande) et la prescription (déterminant l’offre). Les soins peuvent être hiérarchisés en quatre niveaux : les soins informels, primaires, secondaires et tertiaires. Classé dans cet ordre, le recours à chaque niveau de soins est en théorie de moins en moins fréquent. Florian Fouquet La hiérarchie des soins Soins informels : dispensés au domicile par la famille ou les proches (hygiène, pansement, etc.) Soins primaires : premier contact Soins avec les professionnels de santé , tertiaires en libre accès (médecine générale, pharmacie, urgences, etc.) Soins secondaires Soins secondaires : médecine spécialisée, en général dispensée Soins primaires à l’hôpital (chirurgie, etc.) Soins tertiaires : interventions Soins informels complexes, en général limitées aux CHU (greffes, etc.) Florian Fouquet Les caractéristiques de l’offre Economiquement, le système de production de soins a la forme d’un ensemble de monopoles ou d’oligopoles. La première raison est géographique : on a un ensemble de petits marchés, lié au fait que les soins étaient historiquement délivrés par des institutions religieuses et des paroisses locales. D’autres raisons sont économiques (Fargeon, 2014) : pour protéger la relation patient-médecin, des barrières à l’entrée sont mises en place via la certification et l’inscription autorisant l’accès à la profession ; les connaissances nécessaires à l’exercice de la médecine limitent le nombre de professionnels de santé ; les coûts fixes importants et les rendements croissants créent une situation de monopole naturel pour l’activité hospitalière. Florian Fouquet Les conséquences des monopoles Du fait de la situation de monopole / oligopole, le maintien d’une qualité minimale de l’offre de soins est susceptible d’engendrer une hausse des prix des soins. Plus largement, la gamme de soins médicaux offerte est limitée. Le médecin occupe la plupart du temps un rôle central dans la production, par rapport (voire au détriment) des professions paramédicales ou médico-sociales. En réalité, le prix pratiqué pour les soins médicaux est très souvent régulé et n’est que rarement un prix de marché. Côté offre, une consultation chez le généraliste coûte le même prix quels que soient la gravité de la maladie et le temps passé avec le patient, par exemple ; côté demande, le prix ne reflète pas les préférences car il est rarement supporté par les individus du fait des mécanismes d’assurance. Florian Fouquet 3- Inégalités sociales de santé et protection sociale Florian Fouquet Offre, demande et besoin de soins Jusqu’ici, on a exposé de manière assez traditionnelle (en tout cas pour l’économie) la production de soins comme la rencontre d’une offre et d’une demande. En réalité, certains soins répondent à un besoin (parfois vital) dont découle la demande de soins, que cette demande soit formulée explicitement ou non. Urgence médicale et/ou sanitaire suite à un accident Maladie ou infection pouvant mener à une dégradation (partielle ou totale) de la santé à plus ou moins court terme Ralentissement / enrayement d’une épidémie etc. Florian Fouquet Offre, demande et besoin de soins Besoin B 1 3 X Demande Offre A C 2 D’après Milcent (2024) Florian Fouquet Offre, demande et besoin de soins Zone A : les usagers ont des demandes qui ne correspondent à aucun besoin, mais pour lesquelles il n’existe aucune offre. A priori, ces demandes ne sont pas justifiées, mais l’absence d’offre implique de toute manière qu’elles ne font l’objet d’aucune dépense de santé. Zone B : le besoin de santé existe, mais l’état actuel de la science et de la médecine ne permet pas de le prendre en charge. Dans l’idéal, les avancées des connaissances et des technologies doit permettre de réduire progressivement cette zone. Zone C : l’offre de soins existe, mais ne correspond à aucun besoin ni aucune demande. C’est notamment le cas des traitements pour des maladies désormais éradiquées ou n’existant que dans certaines zones géographiques. Florian Fouquet Offre, demande et besoin de soins Zone 1 : il y a une demande de soins pour un besoin réel, mais cette demande ne rencontre pas l’offre, soit pour des raisons de prix (contrainte budgétaire des individus) soit pour des raisons de disponibilité (rareté de l’offre menant à une file d’attente ou des délais). Zone 2 : une offre et une demande de soins se rencontrent, mais sans que cela s’appuie sur un besoin réel. Cela implique que des ressources qui permettraient de répondre à un besoin ne sont pas allouées correctement. Zone 3 : il existe un besoin de soins et l’offre pour y répondre, mais le besoin n’est jamais formulé en demande, souvent par manque d’information. C’est là que doivent intervenir l’éducation à la santé et la prévention. Florian Fouquet Offre, demande et besoin de soins Zone X : c’est ici que l’offre répond à une demande découlant d’un besoin réel de soins. L’objectif du système de santé et du régulateur est d’étendre cette zone, puisqu’il s’agit de la situation où l’allocation des ressources de santé est adéquate. Les dépenses publiques de santé vont viser à agrandir cette zone X. Prise en charge de la prévention et de l’éducation à la santé pour réduire la zone 3 Mise en place d’une assurance santé publique et/ou régulation des tarifs afin d’aider au financement des soins pour réduire la zone 1 Eventuellement, financement de la recherche médicale pour réduire la zone B En aucun cas, les dépenses publiques ne doivent contribuer à financer la zone 2 ! Florian Fouquet Inégalités sociales de santé Le rôle du secteur et des financements publics pour réduire la « zone 1 » est d’autant plus important qu’il existe des inégalités de santé au sein d’une société. On appelle gradient social de santé le « phénomène par lequel ceux qui sont au sommet de la pyramide sociale jouissent d’une meilleure santé que ceux qui sont directement en-dessous d’eux, qui eux-mêmes sont en meilleure santé que ceux qui sont juste en-dessous et ainsi de suite jusqu’aux plus bas échelons » (Rapport Black, 1980). En effet, un certain nombre de déterminants socio-économiques influencent l’état de santé des individus et leur recours aux soins. Florian Fouquet Inégalités sociales de santé Parmi les déterminants socio-économiques de la santé et du recours au soin, on trouve entre autres : le revenu ; la catégorie socioprofessionnelle ; le niveau d’éducation ; le niveau d’éducation des parents (en particulier de la mère) ; la structure familiale ; la localisation géographique ; etc. L’influence de la majorité de ces déterminants varie selon le sexe et l’âge : l’effet du revenu et de la PCS est par exemple plus important pour les hommes que pour les femmes. Florian Fouquet Principe d’équité dans l’accès aux soins L’OMS énonce un principe selon lequel « la jouissance du meilleur état de santé possible est l’un des droits fondamentaux de chaque être humain ». En ce sens, la présence d’inégalités de santé liées à des caractéristiques socio-économiques pose un problème d’équité, dans la mesure où toutes les catégories de population n’ont pas accès à la santé dans les mêmes conditions. Le rôle de la puissance publique est alors d’assurer (Hirtzlin, 2018) : un accès à l’offre de soins identique pour tous, en limitant les disparités d’information et disparités géographiques ; une absence de limitation de l’accès aux soins liée à leur coût. C’est le rôle alloué à la protection sociale, en particulier aux organismes d’assurance maladie obligatoire. Florian Fouquet Assurance VS Assistance Les systèmes de protection sociale peuvent se structurer autour de deux logiques différentes. Dans le modèle bismarckien, on a une logique d’assurance : les prestations sont versées aux individus qui se sont au préalable assurés en cotisant. Ex : assurance chômage, assurance retraite, etc. Dans le modèle beveridgien, on a une logique d’assistance : les prestations sont financées par l'impôt et versées aux personnes qui en ont besoin. Ex : allocation logement, etc. En France, on a un modèle d’assurance maladie principalement bismarckien, dans lequel les individus s’assurent via les cotisations incluses dans les salaires et les pensions (CSG et CRDS notamment), tout en incluant des caractéristiques du modèle beveridgien, avec un principe d’aide sociale universelle notamment avec la Couverture Santé Solidaire (anciennement CMU puis CMU-C). Florian Fouquet Système bismarckien Le système bismarckien découle des politiques mises en oeuvre par le chancelier allemand Otto von Bismarck (1815-1898) à la fin du XIXe siècle. Il a noté instauré un système de protection sociale contre les risques maladie (1883), les accidents du travail (1884), la vieillesse et l'invalidité (1889). Ce modèle se base sur plusieurs principes : une protection fondée sur le travail et sur la capacité des individus à s'ouvrir des droits grâce à leur activité professionnelle ; une protection obligatoire ; une participation financière des travailleurs et des employeurs sous la forme de cotisations sociales ; des cotisations proportionnelles non pas aux risques mais aux salaires, on parle de "socialisation du risque ». Florian Fouquet Système beveridgien Le système beveridgien découle des travaux de l’économiste William Beveridge (1879-1963) et de son rapport sur le système d’assurance maladie en 1942 pour le gouvernement britannique. Partant du constat que le système existant manque de cohérence, il propose différents principes pour le refonder (nommés les « trois U") : l’universalité de la protection sociale qui couvre l'ensemble de la population et l’intégralité des risques ; l’uniformité des prestations fondée sur les besoins des individus plutôt que sur leurs pertes de revenus potentielles ; l’unité de gestion par un seul organisme (étatique) qui gère et finance l’accès aux soins, via une assurance nationale financée par l’impôt. Florian Fouquet Le système de Sécurité Sociale en France Comme indiqué plus tôt, le système français est un système mixte. Il ne respecte pas les « trois U » du système beveridgien : l’universalité est relativement atteinte, même si cela s’est fait de manière très progressive ; l’unité n’est pas atteinte puisqu’on a différents régimes d’assurance maladie, et il existe une offre variée de soins plutôt qu’un unique monopole public ; l’uniformité n’est pas retenue dans la conception du système, qui va plutôt vers une individualisation des prestations. Cependant, il contourne aussi certains aspects du modèle bismarckien : la couverture est étendue à des populations non cotisantes (étudiants, chômeurs, conjoints non mariés, etc.) ; il existe une aide sociale pour les personnes avec des ressources insuffisantes pour leur assurer des moyens minimums d’existence ; depuis 1975, le droit à la Sécurité sociale ne repose plus sur l’exercice d’une activité salariée mais sur des critères de résidence. Florian Fouquet