Fondements et valeurs du travail social Cours PDF

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Institut National de l'Action Sociale

Pr. Mohamed Haouari

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social work social theory social change social welfare

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This document is a course on social work fundamentals and values. It discusses theoretical foundations of social work, social change, and well-being. It's likely lecture notes.

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# INAS ## **Fondements et valeurs du travail social** **Pr. Mohamed Haouari** ## Introduction ### **1. Fondements théoriques du travail social** Le travail social est l'expression vivante de la solidarité en société. Il mène une action sociale, préventive et curative qui vise à aider les person...

# INAS ## **Fondements et valeurs du travail social** **Pr. Mohamed Haouari** ## Introduction ### **1. Fondements théoriques du travail social** Le travail social est l'expression vivante de la solidarité en société. Il mène une action sociale, préventive et curative qui vise à aider les personnes à développer leurs potentiels, à résoudre leurs problèmes et à enrichir leurs pouvoirs d'agir. Il favorise l'accès aux droits sociaux et fonde son actions sur les valeurs des droits humains, de l'égalité, de la justice sociale. Son action se situe à l'articulation de nombreux champs : social, économique, politique, thérapeutique, juridique, etc., et constitue une fonction particulière dans la société, fonction d'aide, de soutien, de réparation, de développement, exercée de manière individuelle ou collective. Selon la définition du travail social approuvée par l'assemblée générale de l'Association Internationale des Travailleuses et Travailleurs Sociaux (IASSW), le 10 Juillet 2014 à Melbourne : Le travail social est une pratique professionnelle et une discipline. Il promeut le changement et le développement social, la cohésion sociale, le développement du pouvoir d'agir et la libération des personnes. Les principes de justice sociale, de droit de la personne, de responsabilité sociale collective et de respect des diversités sont au cœur du travail social. Etayé par les théories du travail social, les sciences sociales, les sciences humaines et des connaissances autochtones, le travail social encourage les personnes et les structures à relever les défis de la vie et agit pour améliorer le bienêtre de tous. ### **1.1. Le changement social** Le changement suppose le passage d'une situation initiale à une situation dont au moins une des composantes a été modifiée. Le changement de rapports inégalitaires est essentiel car une grande partie des problèmes est lié à une inégalité d'accès aux ressources (culturelles, économiques, politiques). Le mandat de changement social est basé sur la prémisse que l'intervention en travail social a lieu lorsque la situation actuelle, que ce soit au niveau de la personne, de la famille, du petit groupe, de la communauté ou de la société, est jugée avoir besoin de changement et de développement. Elle est motivée par la nécessité de remettre en question et de modifier les conditions structurelles qui contribuent à la marginalisation, à l'exclusion sociale et à l'oppression. Les initiatives de changement social reconnaissent la place de l'agence humaine dans la promotion des droits de l'homme et de la justice économique, environnementale et sociale. La profession est également attachée au maintien de la stabilité sociale, dans la mesure où cette stabilité n'est pas utilisée pour marginaliser, exclure ou opprimer un groupe particulier de personnes. Le changement social est « toute transformation observable dans le temps qui affectent d'une manière qui ne soit pas provisoire ou éphémère la structure ou le fonctionnement de l'organisation sociale d'une collectivité donnée et modifie le cours de l'histoire » (GUY ROCHER 1970). Le changement social peut s'expliquer par : - Des processus sociaux endogènes qui résultent des tensions internes à la société (comme les causes techniques ou économiques, les causes démographiques, l'apparition des valeurs nouvelles). - Des processus sociaux exogènes qui résultent de l'introduction d'une variable technique et/ou culturelle extérieure à la société considérée. Tout changement social peut se définir comme une transformation qui s'impose aux individus partant d'un état à un autre. Il est une série de transformations observables et vérifiables qui affecte les représentations, les mœurs, et touche donc à la culture générale. Depuis le début des années 1980, des travaux empiriques sont conduits sur l'évolution des valeurs des individus dans les pays occidentaux (enquêtes européennes réalisées tous les dix ans et comparaisons internationales développées notamment par R. Inglehart). Ils mettent en évidence deux tendances en apparence contradictoires : - Le passage d'un « modèle culturel industriel » à un « modèle identitaire » (G. Bajoit). Le premier donne la priorité au social et se fonde sur les principes centraux du progrès et de la raison, le second donne la priorité à l'individu et se fonde sur les principes d'indépendance et d'autoréalisation individuelle. Le constat, dans beaucoup de domaines, d'une grande stabilité des valeurs, par ex. la sphère publique reste le lieu d'expression de l'ordre, de la sécurité, de la démocratie participative. Le changement social a plusieurs caractéristiques, dont on peut citer: - Il est un phénomène collectif, qui affecte soit une collectivité ou un secteur important d'une collectivité, soit les conditions de vie ou l'univers mental de plusieurs individus. - Il doit être un changement de structure, il vise la structure, c'est-à-dire les composantes de l'organisation sociale. - Un changement de structure est identifiable dans le temps dans la mesure où l'on identifie l'accomplissement du changement. - Tout changement social doit faire preuve d'une certaine permanence, il est permanent, signifie que les transformations qu'elles engendrent ne soient pas éphémères mais durables. - Le changement social affecte le cours de l'histoire d'une société. Plusieurs facteurs expliquent le changement social, on distingue : le facteur démographique, le progrès technique, le développement économique, et les conflits sociaux. ### **1.2. Le développement social** Le développement social c'est un ensemble de processus qui appellent la contribution conjointe de l'État et de la société civile et qui visent l'amélioration des conditions de vie et des potentiels des personnes et des communautés. Une politique de développement social vise à donner une chance égale à chacun de se réaliser pleinement, dans un environnement sain et stimulant. Le développement social fait référence à la mise en place et au renforcement au sein des communautés, dans les régions et à l'échelle de la collectivité, des conditions requises pour permettre, d'une part, à chaque individu de développer ses potentiels, de pouvoir participer activement à la vie sociale et de pouvoir tirer sa part de l'enrichissement collectif et, d'autre part, à la collectivité de progresser socialement, culturellement et économiquement, dans un contexte où le développement économique s'oriente vers un développement durable, soucieux de justice sociale (Conseil canadien de la santé et du bien-être, 1998). Le développement social vise à accroître le bien-être des populations, en agissant sur l'environnement, culturel, social et politique : mobiliser l'ensemble des ressources existantes, notamment à l'échelle d'un territoire, en les coordonnant et en les mettant en réseaux. Il s'agit donc d'un processus qui s'appuie sur l'ensemble des acteurs locaux, y compris la population. Un axe fort du développement social concerne ainsi la participation de la population, conçue comme pleinement actrice de son devenir. Il s'agit là de rompre avec des pratiques où seules les politiques et les institutions seraient aptes à poser les problèmes et à énoncer les solutions. Une action ou une politique de développement social doit tendre à réunir les conditions suivantes : - la capacité à transformer un ensemble cohérent de domaines de la vie sociale, - une réalisation sur un territoire pertinent, favorisant l'implication de la population, dans sa diversité, - la mise en œuvre d'une phase de diagnostic partagé, à savoir une démarche de production collective de connaissance sociale, associant le plus grand nombre d'acteurs, - la participation des habitants à tous les moments du processus (à la définition des objectifs, stratégies ou modalités des actions), - l'existence d'un partenariat réel d'acteurs locaux, - la durabilité et l'évaluation régulière de l'action. Le « cadre développeur » doit être à même d'accompagner ce processus, et d'élaborer des stratégies de changement. - Ces professionnels doivent être en capacité : - d'analyser la réalité dans laquelle ils interviennent, - d'utiliser de façon efficiente des méthodes d'intervention dans des contextes diversifiés, en mouvement constant, - d'inscrire leur action dans des dynamiques partenariales et locales, - de mettre en relation des équipes de travail sur des projets concrets. Pour favoriser le succès de la société, il est important d'avoir des services sociaux abordables et de qualité, ce qui permet d'améliorer la situation économique de la communauté. Le fait d'investir dans de bons services sociaux peut représenter des avantages économiques à long terme pour la société. Les programmes et les services à la petite enfance, la jeunesse, l'éducation postsecondaire, la création d'emploi, la promotion d'une vie active saine, sont autant d'investissements dans la population qui favorisent la prospérité économique de la société. Pour réduire la pauvreté, il est impératif d'adopter une approche de développement social et investir dans la population. C'est une responsabilité partagée entre le gouvernement, les organismes communautaires, les entreprises, les universités et les municipalités et les élus. Il s'agit de prendre en considération l'ensemble des opportunités, risques et impacts sociaux sur l'ensemble de la population, en accordant une attention particulière aux plus vulnérables. Le développement social consiste à inclure les pauvres et les exclus dans le processus de développement. ### **1.3. Le bien-être de tous** Il n'existe aucune définition précise, arrêtée et consensuelle de ce qu'est le bien-être : il est souvent confondu à tort avec d'autres concepts voisins (« bonheur », « vie heureuse », « vivre bien » « béatitude »). Cela s'explique en partie par la multitude d'acteurs qui s'en emparent de façon différente. Cependant, Presque toutes les définitions s'accordent sur le fait que le bien-être est un sentiment de satisfaction à l'égard de sa vie sociale et matérielle. La satisfaction est habituellement définie comme une situation d'équilibre entre ce que l'on a et ce que l'on souhaiterait avoir. Le bien-être est donc étroitement lié aux notions de satisfaction et de besoins. Pour cerner la notion de bien-être, il est nécessaire de recourir à une définition pluridimensionnelle. Les principales dimensions qu'il convient de prendre en considération et qui devraient en principe être appréhendées simultanément sont : - les conditions de vie matérielles (revenu, consommation et richesse) ; - la santé ; - l'éducation; - les activités personnelles, dont le travail ; - la participation à la vie politique et la gouvernance ; - les liens et rapports sociaux ; - l'environnement (état présent et à venir) ; - la sécurité, tant économique que physique. Dans son acception la plus courante, le bien-être est associé à ce qui compte en définitive et fait sens dans ce qui est bien pour la personne. Selon le dictionnaire suisse des politiques publiques, le bien-être est : L'ensemble des facteurs dont une personne a besoin pour jouir d'une bonne qualité de vie. Ces facteurs l'aident à jouir d'une existence tranquille et d'un état de satisfaction. Le bien-être social englobe donc les choses qui incident de manière positive sur la qualité de vie: un emploi digne, des ressources économiques pour satisfaire les besoins, une maison, l'accès à l'éducation et à la santé, du temps pour les loisirs, etc. Bien que la notion de bien-être soit subjective (ce qui est bon pour une personne peut ne pas l'être pour une autre), le bien-être social est associé à des facteurs économiques objectifs. En 1946, L'OMS intègre la notion de bien-être dans sa définition de la santé : « la santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité ». Désormais, la santé fait appel à la perception subjective des individus et à de nouvelles méthodes de « traitement », qui ne sont pas des soins. Pour permettre le bien-être complet de l'individu, la santé devient une responsabilité collective et transversale qui exige un certain nombre de conditions : « se loger, accéder à l'éducation, se nourrir, bénéficier d'un écosystème stable, compter sur un apport durable de ressources, avoir droit à la justice sociale » (Charte d'Ottawa, adopté par l'OMS, 21 novembre 1986). Pendant longtemps, il était plus ou moins admis, que la croissance économique permettait une meilleure vie. Mais à partir des années 1960, des études démontrent les effets négatifs de la croissance (pollution, épuisement des ressources, inégalités économiques...) tant sur l'environnement que sur les populations. Une importante évolution vers une approche plus qualitative de la croissance commença dès lors mettant à mal la croyance dans une corrélation supposée entre croissance économique et bien-être social. En 1976, le conseil de l'OCDE déclare dans un rapport intitulé : Mesure du bien-être social : progrès accomplis dans l'élaboration des indicateurs sociaux que : La croissance n'est pas une fin en elle-même, mais plutôt un moyen de créer des conditions de vie meilleures ; il importe de prêter d'avantage d'attention à ses aspects qualitatifs et de définir les politiques à suivre à l'égard des grandes options économiques et sociales qu'implique l'allocation de ressources croissantes ».(p.7) De nos jours, les préoccupations pour le bien-être et la qualité de vie se confondent avec les préoccupations environnementales, à travers la notion de développement durable. Le bien-être et la qualité de vie deviennent alors des problématiques globales, qui engagent le présent et le futur des sociétés. L'utilisation du terme « bien-être de tous » comprend l'humanité tout entière y compris les générations futures. En étendant le bien-être à tous, l'espace de référence – ainsi que le stock et le type des biens pour l'atteindre – devient universel et inclut des interactions au-delà de la proximité. Le concept de bien-être de tous conduit à l'idée qu'il s'agit d'une construction raisonnée, assujettie à des contraintes, à des concertations et à des concessions mutuelles. Il renferme des aspects d'équité, d'empathie et s'inscrit dans la durée. L'État est tenu de promouvoir le bien-être social parmi tous ses citoyens. Pour ce faire, des mesures et des politiques sont nécessaires pour corriger les inégalités propres du marché. La répartition des revenus et le développement des services sociaux libres et gratuits pour toutes les personnes sont des conditions nécessaires pour atteindre le bien-être social. ### **1.4. La cohésion sociale** La cohésion sociale, concept né en même temps que celui de solidarité, serait en panne. Elle est l'ensemble des processus, individuels et collectifs qui contribuent à assurer à chacun l'égalité des chances et des conditions, l'équité et l'accès aux droits fondamentaux et au bien-être économique, social et culturel, et qui visent à construire ensemble une société solidaire et coresponsable pour le bien-être de tous. La cohésion sociale favorise l'intégration des individus, leur attachement au groupe et leur participation à la vie sociale. Les membres partagent un même ensemble de valeurs et des règles de vie qui sont acceptées par chacun. L'existence de conflits sociaux ne signifie pas nécessairement l'absence de cohésion sociale. Le concept de cohésion sociale procède d'une vision large de la société, il cherche à impliquer l'ensemble des parties prenantes et ne veut pas se réduire à une lutte contre l'exclusion. Si l'inclusion sociale se concentre sur des politiques et des actions spécialisées, la cohésion sociale recherche une responsabilité civique et sociétale plus large. Elle traduit la recherche d'une nouvelle manière d'appréhender les questions de solidarité à toutes les échelles, locales, nationales, internationales. La cohésion sociale peut donc s'analyser comme un « processus dynamique qui reprend l'ensemble des moyens mis en œuvre pour assurer à tous l'accès aux droits fondamentaux » et le bien-être collectif. La finalité de la cohésion sociale est donc bien d'assurer le bien-être pour tous en réduisant les disparités et en évitant la marginalisation. Bien sûr, chaque personne a droit au bien être individuel, mais la cohésion sociale comporte aussi une dimension collective, une société réellement cohésive vit un équilibre les individus et une diminution des inégalités sana pour autant nier les besoins spécifiques de chacun. En résume une société solidaire et coresponsable où il fait bon vivre ensemble, chacun partageant un même ensemble de valeurs et de règles de vie, ainsi se forme un maillage social où il n'y a pas de perdants, mais que des gagnants ! c'est ça, la cohésion sociale ! ### **1.5. Le développement du pouvoir d'agir** Le développement du pouvoir d'agir réfère à la capacité concrète des personnes (individuellement ou collectivement) d'exercer un plus grand contrôle sur ce qui est important pour elles, leurs proches ou la collectivité à laquelle elles s'identifient. Concrètement, c'est la possibilité d'avoir plus de contrôle sur ce qui est important pour soi, ses proches, ou la collectivité à laquelle on s'identifie. C'est un pouvoir de contrôle que l'on exerce ou qu'on développe individuellement ou collectivement. Le développement du pouvoir d'agir est un processus qui débouche sur un résultat. C'est un processus de gain de contrôle sur ce qui est important pour soi, ses proches ou la collectivité à laquelle on s'identifie. Donc c'est la possibilité de pouvoir réguler les éléments de sa vie. C'est cela que veut dire le mot « contrôle « : avoir un impact sur ce qui nous arrive, faire en sorte de ne pas tomber dans l'impuissance, une façon aussi de reprendre sa vie en mains. Mais on ne l'entend pas en terme de responsabilité. Il ne faut pas confondre développement du pouvoir d'agir et développement du devoir d'agir. Le devoir d'agir, c'est quelqu'un qui vous dit que vous devez faire des choses et ce n'est généralement pas ce qui est important pour nous mais c'est qui est important pour lui. Il s'agit d'une prescription. Comme on prescrit des médicaments, on vous prescrit de vous réinsérer, de vous diplômer, de vous former etc... Le développement du pouvoir d'agir ce n'est ne pas simplement s'agiter ou être actif mais être acteur sur ce qui est important pour soi. Si ce n'est pas important pour soi ce n'est pas du développement du pouvoir d'agir. Pour soi, tout seul, pour soi et ses proches ou pour soi et la collectivité ou le groupe, la communauté à laquelle on s'identifie. Une des sources de souffrance fondamentale de la condition humaine, c'est le sentiment d'impuissance. On a l'impression que, quoi qu'on fasse, ça n'ira pas dans le sens de ce qui est important pour moi. Et cela entraîne une difficulté à se projeter, faute de pouvoir s'appuyer sur des succès. Il faut pouvoir agir pour s'épanouir, l'action donc est un élément très important de l'affranchissement. Le développement du pouvoir d'agir est imprégné par l'idée du changement social tant au niveau individuel que collectif. Cette démarche repose sur la disponibilité et l'accessibilité des ressources du milieu, ainsi que la volonté et la capacité des personnes à prendre en main leur destinée. Le DPA est un processus qui s'appuie sur l'implication active et dynamique des personnes dans leur contexte environnemental, en prenant en compte les réalités individuelles. Le but, au niveau personnel et collectif, c'est de restaurer le mouvement : c'est-à-dire de permettre aux personnes d'avancer dans la direction de ce qui est intéressant pour elles. De manière à ce qu'elles puissent avancer par elles-mêmes, et retrouver « la dignité de l'homme capable » (expression de Ricoeur). Il ne s'agit pas d'un changement prescrit, ni par les bailleurs de fond ni par les organismes de militants. Il s'agit d'un changement construit et émergent qui se développe au quotidien. Et, dans ce rôle de changement quotidien, les travailleurs sociaux jouent un rôle extraordinaire, puisqu'ils sont placés stratégiquement pour débloquer des situations, pour restaurer le mouvement collectif ou individuel, car ils sont placés à l'exacte intersection entre le structurel et le personnel. ### **1.6. Les théories, sciences humaines et sociales** Le travail social relève d'une construction à la fois interdisciplinaire et transdisciplinaire. La discipline travail social se nourrit d'une vaste gamme de théories scientifiques et de recherches. «Science » est ici à comprendre en son sens le plus basique, celui de connaissance. La discipline travail social fait appel à ses propres fondations théoriques en constant développement, ainsi qu'à des théories issues d'autres sciences humaines et sociales. La méthodologie du travail social s'appuie sur un ensemble de connaissances basées sur des faits empiriques et issues de recherches et de l'évaluation d'expériences pratiques, comprenant également des connaissances locales et spécifiques dans un contexte précis. Les théories et la recherche en travail social se caractérisent par le fait qu'elles sont appliquées et à visée émancipatoire. Une part de la théorie et de la recherche en travail social est élaborée avec les personnes concernées dans un processus interactif et d'échange, et par conséquent alimentée par des situations pratiques spécifiques. La profession s'appuie sur des théories du développement et du comportement humain ainsi que sur des systèmes sociaux pour analyser des situations complexes et pour faciliter l'avènement de changements individuels, organisationnels, sociaux et culturels. Le travail social est nourri non seulement par des pratiques et des théories des pays occidentaux, mais aussi par des connaissances traditionnelles et autochtones. L'héritage du colonialisme valorise exclusivement les connaissances et théories occidentales au détriment des connaissances autochtones qui ont été dévaluées, méprisées et assujetties aux savoirs occidentaux. La discipline et la pratique du travail social tentent ainsi de rectifier l'hégémonie et le colonialisme scientifiques de l'Occident en se mettant à l'écoute et en apprenant des peuples autochtones autour du monde. En ce sens, les connaissances du travail social se fondent sur les savoirs et se développent en coconstruction avec les peuples autochtones. Elles permettront ainsi des pratiques plus adaptées aux plans local et international. La légitimité et le mandat du travail social reposent sur son intervention au point de rencontre entre l'individu et son environnement. En accord avec le paradigme du développement social, les travailleuses et les travailleurs sociaux font appel à une diversité de compétences techniques et stratégiques en mobilisant divers principes et activités à différents niveaux des systèmes. Le but de leur pratique peut être le maintien ou la transformation des systèmes. La pratique du travail social englobe une large gamme d'activités incluant diverses formes de soins et de conseil, de travail de groupe et communautaire. Elle comporte l'analyse et la formulation de politiques publiques ainsi que des interventions politiques. Les pratiques du travail social s'articulent ainsi dans une intervention cohérente, reliant les niveaux micro et macro, individuel et politique. L'approche holistique du travail social est universelle, alors que ses priorités peuvent varier d'un pays à l'autre en fonction des conditions historiques, culturelles, politiques ou socioéconomiques. ## **2. Valeurs et principes en travail social** Les valeurs sont des croyances, des principes ou des idéaux qui sont considérés comme importants ou dignes d'être poursuivis par un individu, un groupe ou une société. Elles peuvent être morales, éthiques, spirituelles, politiques, culturelles ou sociales, et elles peuvent être influencées par des facteurs tels que la religion, la famille, l'éducation et l'environnement. Les valeurs peuvent être exprimées à travers des actions, des comportements ou des décisions, et elles peuvent varier considérablement d'une personne à l'autre ou d'une culture à l'autre. Par exemple, certaines valeurs communes dans de nombreuses sociétés sont l'honnêteté, la responsabilité, la tolérance et la compassion, mais il peut y avoir des différences dans la façon dont ces valeurs sont mises en pratique selon les contextes culturels et individuels. Les valeurs sont souvent considérées comme une base importante pour la construction de l'identité personnelle et sociale et pour la prise de décision. En tant que discipline le travail social s'appuie sur un ensemble de valeurs et de principes qui guident la pratique professionnelle. Celle-ci implique que les interventions, les actions, les inactions, le choix des méthodes, des approches et des techniques, les comportements et les attitudes des intervenant-e-s soient guidés, voire orientés par des valeurs et des principes auxquels ils/elles se réfèrent pour mettre en place et développer des interventions sociales et des actions éducatives. Les valeurs professionnelles guident et orientent la pratique, tout comme les valeurs personnelles guident et orientent la vie des individus. Le fait que le travail social s'identifie fortement à ses fondements axiologiques explique, en quelque sorte, la prépondérance de ses valeurs dans la pratique au point où il est fréquemment décrit comme « une activité chargée de valeurs ». (Op.cit., p.25). De plus, les nombreuses références à l'importance de la place des valeurs dans la formation professionnelle en travail social sont fondées sur leur prévalence dans la pratique. Ces valeurs font l'objet de codes de déontologie, tant à l'échelon national qu'international. De même, les valeurs sont à la base de l'éthique professionnelle. Celle-ci s'entend comme un ensemble de valeurs partagées par un groupe professionnel. C'est l'apparition d'un «nous» collectif qui permet de diminuer les arbitraires personnels et subjectifs. Elle est évolutive et en rapport avec les mutations de la société. L'éthique du travail social « qui, aux valeurs inspirant depuis toujours ses actions, a progressivement intégré de nouveaux principes éthiques contemporains et enrichi sa liberté de choix ». (Ibid.) L'éthique professionnelle est un questionnement permanent sur le sens et les finalités du travail mais aussi permet une construction pragmatique des actes qui en découlent. Elle est donc à la fois produite et sans cesse réinterrogée par la pratique, et productrice de sens et de responsabilités dans les pratiques. Parmi ces valeurs, certaines sont produites par la profession et délimitent ce que le professionnel doit respecter ou s'interdire de faire pour accomplir son travail convenablement, c'est-à-dire en harmonie avec les missions qui sont les siennes. Elles peuvent être formalisées par un code de déontologie par exemple, comme c'est le cas dans certaines professions. Lors de sa formation et au début de son parcours, le professionnel s'approprie ces valeurs qui viennent le plus souvent compléter et conforter ce que l'on appelle l'éthique personnelle. Une contradiction entre les valeurs professionnelles et l'éthique personnelle est généralement un obstacle rédhibitoire à l'entrée dans une profession. Le plus souvent, l'éthique professionnelle est intériorisée et constitue avec les valeurs subjectives la conscience professionnelle. Quelle que soit la profession, la représentation du travail bien fait est au cœur de cette conscience professionnelle. L'éthique des travailleurs sociaux est constituée de valeurs essentielles qui forment le socle de leur identité, et dans le respect desquelles ils entendent effectuer la plupart de leurs activités. Permettre à l'usager de reconquérir son autonomie, lui venir en aide et assurer sa protection ; sont des objectifs communs aux différentes catégories de travailleurs sociaux. Ceux-ci sont bien sûr confrontés dans leur pratique à des publics ayant des difficultés ou des handicaps spécifiques. Pour atteindre ces objectifs, il importe que l'accompagnement assuré par le travailleur social se fasse en respectant la dignité, les intérêts et le rythme de la personne prise en charge, ainsi que la confidentialité des informations la concernant. ### **2.1. L'origine des valeurs** L'origine des valeurs est un sujet de débat philosophique depuis des siècles. Les valeurs peuvent être définies comme des principes ou des croyances qui guident le comportement et les actions des individus. Elles sont souvent considérées comme des normes morales, des idéaux éthiques ou des principes culturels qui sont transmis d'une génération à l'autre. Certaines théories suggèrent que les valeurs sont innées, c'est-à-dire qu'elles sont héritées génétiquement ou programmées dans le cerveau humain. D'autres théories affirment que les valeurs sont apprises et acquises à partir de l'expérience, de l'éducation et de l'environnement culturel. En fin de compte, la question de l'origine des valeurs est complexe et ne peut être résolue de manière définitive. Les valeurs peuvent être influencées par une variété de facteurs, notamment la religion, la famille, l'éducation, la culture, les médias et l'environnement social. Chaque individu a sa propre combinaison unique de valeurs qui sont façonnées par ces facteurs et leur expérience de vie. Les valeurs véhiculées par le travail social sont issues de diverses sources (valeurs personnelles, sociales et professionnelles, normes de l'agence, etc.). Ces valeurs se partagent selon B. Bouquet, entre les valeurs humanistes, les valeurs fondées sur le droit et les valeurs démocratiques. Elles s'étayent les unes aux autres et forment système. Elle considère que les valeurs ne peuvent pas être isolées les unes des autres, mais qu'elles forment plutôt un système. Selon elle, chaque valeur est en relation avec d'autres valeurs et leur sens dépend de ces relations. | Valeurs humanistes | Envers la personne-usager | | ------------------------ | ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- | | | Respect, écoute, autonomie, liberté, libre arbitre, dignité, disponibilité, implication... | | | Qualités professionnelles | | | Loyauté, tolérance, compétence, engagement, disponibilité, franchise, honnêteté, intégrité, exemplarité... | | Valeurs fondées sur les droits | Discrétion, confidentialité, secret, respect des droits individuels et collectifs, des droits des usagers, protection des personnes et des biens, responsabilité... | | Valeurs démocratiques | Egalité, justice sociale, laïcité, citoyenneté, cohésion sociale, utilité sociale et intérêt général. | **Brigitte Bouquet, Ethique et travail social, p. 44** ### **2.1.1 Les valeurs humanistes** Le travail social est un domaine qui s'inscrit dans une perspective humaniste, c'est-à-dire qu'il se fonde sur des valeurs et des principes qui mettent l'accent sur le respect, la dignité, la liberté et l'autonomie des personnes. Voici quelques-unes des valeurs humanistes qui sont centrales dans le travail social. Le travailleur social est un praticien à l'approche humaniste, qui tout en s'inscrivant dans des principes de réalité, il croit en la capacité des personnes à modifier leurs comportements. Il place l'usager au centre de son action et doit garantir le respect de la parole de ce dernier. Dans toutes les situations il doit s'employer à défendre l'intérêt et les droits des usagers. Faire référence à cet humanisme signifie ici donner à cette expression la plénitude dans les pratiques et y voir le souci de construire l'humain dans toute sa dimension. La finalité du travail social étant l'émergence d'un sujet libre, capable d'effectuer le plus lucidement possible ses propres choix, de décider en toute indépendance de ses propres valeurs, son éthique, est mise au service de la valeur de l'homme, de sa spécificité, de son unicité. L'intérêt pour autrui dans sa globalité, la foi en l'homme et en ses potentialités fondent l'action sociale. Les valeurs humanistes sont les valeurs-mères du travail social. (Op.ci., p.38). En effet, le travailleur social est investi de certaines valeurs professionnelles qui guident sa pratique. Ces valeurs sont basées sur les principes fondamentaux du travail social, qui cherchent à promouvoir le bien-être individuel et collectif, la justice sociale, la dignité et la valeur de la personne, ainsi que la responsabilité et l'autonomie. Il convient de mentionner également les valeurs institutionnelles (par secteur ou institution) à l'origine de réglementations particulières, comme celles attachées au service public (statut des fonctionnaires). Ces valeurs sont au cœur de la pratique du travailleur social et guident ses actions dans l'accompagnement des personnes et des communautés. Les valeurs professionnelles mettent le travailleur social devant l'obligation de compétence c'est-à-dire, qu'il doit maîtriser sa pratique professionnelle et tendre constamment à l'améliorer et à développer ses connaissances. Son intervention met à contribution ses compétences professionnelles mais aussi ses ressources personnelles, ses traits de caractères, ses valeurs dans la relation interpersonnelle. Il doit accepter de ne pas se soustraire à la critique des usagers et favoriser et faciliter l'écoute et l'échange dans le cadre des relations quotidiennes. Les travailleurs sociaux sont guidés par un ensemble de valeurs humanistes qui sont fondamentales pour leur pratique professionnelle. Voici quelques-unes de ces valeurs : - Respect de la dignité humaine : Les travailleurs sociaux considèrent que toutes les personnes ont une valeur intrinsèque et une dignité qui méritent d'être respectées. Ils travaillent à promouvoir le respect des droits de l'homme et à protéger les personnes vulnérables contre l'exploitation et l'abus. - Intégrité : Les travailleurs sociaux sont honnêtes et éthiques dans leur travail. Ils reconnaissent l'importance de l'honnêteté, de la transparence et de la responsabilité dans leurs relations avec les clients et les collègues. - Justice sociale : Les travailleurs sociaux cherchent à promouvoir l'égalité des chances et la justice sociale pour tous. Ils travaillent pour éliminer les obstacles à l'accès aux services et aux ressources, et pour sensibiliser le public aux inégalités sociales et aux injustices. - Autonomie : Les travailleurs sociaux respectent le droit des personnes à prendre leurs propres décisions et à être autonomes. Ils travaillent avec les clients pour leur donner les moyens de prendre des décisions éclairées et de résoudre leurs problèmes. - Bien-être : Les travailleurs sociaux se soucient du bien-être des personnes qu'ils aident. Ils cherchent à améliorer la qualité de vie des individus, des familles et des communautés en travaillant à résoudre les problèmes sociaux qui les affectent. - Empathie : Les travailleurs sociaux font preuve d'empathie envers les personnes qu'ils aident. Ils cherchent à comprendre les sentiments et les besoins de leurs clients, et à établir des relations positives et de confiance. ### **2.1.2 Les valeurs de droits** Les valeurs du travail social sont également fondées sur le droit, droits de l'homme, droits des personnes accompagnées, mais aussi respect d'un cadre réglementaire qui implique secret professionnel, confidentialité, discrétion...etc. Les droits de l'homme sont inséparables de la théorie, des valeurs, de l'éthique et de la pratique du travail social (p.43). Celui-ci est basé sur le respect de la valeur et de la dignité, inhérentes à chaque personne et des droits qui en découlent. Les travailleurs sociaux doivent faire respecter et défendre l'intégrité et le bien-être physique, psychologique, émotionnel et spirituel de chaque personne. Les valeurs fondées sur les droits incluent : - La dignité et la valeur de chaque individu: Les travailleurs sociaux reconnaissent la dignité et la valeur inhérentes à chaque personne, indépendamment de son âge, de sa race, de sa culture, de son sexe, de sa religion ou de son orientation sexuelle. - Le respect de la diversité: Les travailleurs sociaux reconnaissent, respectent et célèbrent la diversité des personnes et des cultures. - L'autodétermination: Les travailleurs sociaux reconnaissent et encouragent la capacité des personnes à prendre des décisions et à agir en fonction de leurs propres intérêts et de leurs propres valeurs. - La promotion de la justice sociale: Les travailleurs sociaux travaillent pour éliminer les inégalités sociales, économiques et politiques et pour créer un accès équitable aux ressources et aux opportunités pour tous. - La confidentialité: Les travailleurs sociaux respectent la confidentialité des informations partagées par les personnes qu'ils servent et ne divulguent ces informations qu'avec le consentement de la personne ou en cas de danger imminent pour la sécurité de la personne ou d'autrui. - La responsabilité professionnelle: Les travailleurs sociaux adhèrent aux normes professionnelles et éthiques établies et travaillent de manière compétente et responsable pour promouvoir le bien-être des personnes qu'ils servent. En rapport avec le cadre réglementaire, B. Bouquet rappelle que le droit « s'est construit dans des conditions socialement et historiquement situées, et évolue par et avec les valeurs de la société » (p.41). Il n'est pas indépendant de la morale puisqu'il est l'instrument même de la justice, de l'égalité et de l'équité. Le droit s'inscrit dans « l'Etat de droit » comme notion de « conduite universelle ». Il est important que les travailleurs sociaux soient transparents en ce qui concerne les informations qu'ils collectent et comment ils les utilisent. Les clients doivent être informés de leurs droits à la confidentialité et à la vie privée, ainsi que de la

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