Cours 10: Le mouvement romantique (Français 5G) PDF
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This document provides an overview of the Romantic movement, highlighting its key characteristics. It explores the themes, authors, and historical context of this literary period in French.
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Français 5G Mme Kohl Cours 10 Le mouvement romantique Le courant classique, vous le savez, a duré trois siècles. De France, il s’est répandu dans toute l’Europe. Mais, à la fin du 18e, des idées nouvelles apparaiss...
Français 5G Mme Kohl Cours 10 Le mouvement romantique Le courant classique, vous le savez, a duré trois siècles. De France, il s’est répandu dans toute l’Europe. Mais, à la fin du 18e, des idées nouvelles apparaissent qui mettent à mal les principes de ce mouvement : il s’agit du Romantisme, qui triomphera durant la première moitié du 19e siècle. S’il fallait définir en un mot ce nouveau courant, le terme « rebelle » serait tout à fait approprié. Les romantiques, en effet, partent en guerre contre les vieilles perruques classiques et la société dans laquelle ils vivent. Traits majeurs du Romantisme Le romantique est un individu désenchanté qui se sent mal dans son époque. Pour lui, le monde est mauvais et la société corrompue. Cette société bourgeoise, avide d’argent et de réussite sociale, prône des valeurs morales qu’elle est parfois loin de respecter… Les romantiques la jugent donc hypocrite et indigne. Ils ne peuvent y trouver leur place. Ce profond malaise qui les habite, fait de révolte, d’ennui et de désillusion, est désigné par l’expression « mal du siècle ». On a souvent comparé ce mal de vivre à un état dépressif où dominent le découragement et le dégout de la vie. Cette situation, et c’est une deuxième caractéristique du mouvement, témoigne d’une sensibilité exacerbée. Pour ces artistes, la richesse d’un être, c’est sa sensibilité. Dans leurs œuvres, ils se plaisent donc à manifester leurs sentiments, à s’épancher, à exprimer leur mélancolie. C’est ce que Musset résume en écrivant : « Frappe-toi le cœur, c’est là qu’est le génie ! » (Alfred DE MUSSET, Premières poésies). Cette sensibilité s’exprime dans des thèmes comme la fuite du temps, le crépuscule, la tempête, les ruines. L’artiste romantique entretient un rapport de communion profonde avec la nature. Il y voit souvent le miroir de ses sentiments et de son existence. Par exemple, le soleil qui se couche est vu comme l’image du déclin de la vie. Il y trouve aussi un refuge face aux déceptions de toutes sortes. C’est un lieu de repos, de recueillement où l’on oublie la société et les ennuis : « Quand tout change pour toi, la nature est la même », écrit Lamartine. Les pays(ages) exotiques, en particulier l’Orient, éveillent la curiosité et l’imagination des Romantiques, qu’il s’agisse des régions du Levant (le Moyen-Orient) ou de celles du couchant (le Maghreb). Ils fournissent le décor de nombreux romans, tableaux ou récits de voyage. Par ailleurs, avec les romantiques, ce n’est plus l’Antiquité, mais le Moyen Âge qui a la cote ! Désormais, ce qui nourrit les artistes, ce sont les langues, les coutumes, l’histoire et les légendes locales, en bref, le folklore et le passé national. De nombreux romans historiques se déroulant à cette Cours 10 1 Français 5G Mme Kohl époque voient le jour, comme, en France, Notre-Dame de Paris (1842) où Victor Hugo fait revivre le Paris du 15e siècle. Cette œuvre de Hugo illustre un autre trait majeur du courant romantique : le gout pour les personnages d’exception, en ce compris les personnages monstrueux, à mille lieues de l’Homme universel des classiques. Quasimodo, le carillonneur de Notre-Dame, est l’un des personnages clés du roman. Né bossu, borgne et boiteux, il devient sourd à cause des cloches. Au début du récit, il apparait comme une brute mais peu à peu, il se révèle doté d’une grande sensibilité et d’une humanité exceptionnelle. Dans le même ordre d’idées, les Romantiques affectionnent le mystère, l’étrange voire le surnaturel. Ils font appel aux rêves qui nourrissent leur l’imagination. Ils mettent aussi en question la logique et la Raison car elles sont insuffisantes, à leurs yeux, pour accéder à la réalité profonde des êtres et des choses. C’est d’ailleurs à cette époque que nait un personnage comme Frankenstein et qu’apparaissent les ancêtres du roman d’épouvante contemporain. Les textes romantiques, qu’il s’agisse de poésie, de roman ou de théâtre, témoignent d’une recherche constante d’expressivité. Pour donner de la force à ce qu’ils écrivent, les auteurs n’hésitent pas à varier les tons et les niveaux de langue. Ils sont perpétuellement à la recherche d’effets saisissants. On comprend dès lors pourquoi ils utilisent volontiers l’hyperbole qui leur permet d’exagérer, de grossir une caractéristique, un sentiment ou une idée : « J’aime, et je veux sentir sur ma joue amaigrie / Ruisseler une source impossible à tarir » (Alfred DE MUSSET, « La nuit d’août » dans Poésies nouvelles). C’est pour la même raison qu’ils ont recours à l’oxymore comme lorsque Hugo, dans Les Misérables, raconte la mort de Gavroche, un gamin courageux qui combattait pour la liberté: « Cette petite grande âme venait de s’envoler. » Petite géographie du Romantisme C’est d’abord en Allemagne que se fait jour cette nouvelle sensibilité avec Goethe (1749-1832), une des grandes figures de la littérature européenne. Son roman Les souffrances du jeune Werther met en scène un jeune homme, Werther, qui vit un amour impossible compte tenu des règles sociales et finit par se suicider. Ce récit connait un succès considérable et déclenche, dit-on, une vague de suicides. En musique, Beethoven (1770-1827) revendique haut et fort la liberté de transgresser les règles classiques et d’innover. Il compose des œuvres d’une grande force émotionnelle. Il influencera quantité de compositeurs comme le Polonais Chopin (1810-1849), le Hongrois Lizst (1811-1886) et l’Allemand Brahms (1833-1897). Le Romantisme a aussi ses adeptes en Angleterre et le poète Byron (1788-1824) en est une figure emblématique. Son existence jugée scandaleuse (il multiplie les conquêtes féminines et masculines) défie la société et les principes moraux de son temps. Son œuvre est traversée par le thème du héros solitaire, tourmenté par un mal de vivre qui le pousse à se lancer perpétuellement dans de nouvelles Cours 10 2 Français 5G Mme Kohl aventures. En peinture, un artiste comme Turner (1775-1851) manifeste une grande sensibilité romantique. Il privilégie le paysage et les couleurs au détriment des sujets académiques et du dessin classiques. En France, c’est une femme, Germaine de Staël (1766-1817), qui fait connaitre la littérature allemande et contribue à répandre les idées nouvelles et c’est un homme, Châteaubriand (1768-1848), qui concourt à lui donner une large audience. L’artiste romantique, un être ancré dans son époque Mélancolie, exaltation, gout pour la nature et l’exotisme : le romantique est un rêveur et un idéaliste. Il n’hésite pas à faire étalage de ses sentiments personnels, à raconter ses amours torturées, à s’étendre sur sa profonde insatisfaction. En fait, l’omniprésence du moi dans les œuvres romantiques pourrait nous laisser croire qu’il ne s’intéresse qu’à lui-même et à son art… Égoïstes, les romantiques ? Égocentriques ? Égotistes, même, ou narcissiques ? Eh bien non : l’artiste romantique, et c’est un autre trait majeur de ce mouvement, est aussi un artiste social et/ou politique. Bouleversements politiques et sociaux La période romantique, en France, correspond à une période troublée, politiquement : après la Révolution, différents régimes politiques se succèdent, peinant à durer plus d’une génération. Ce monde changeant, instable, en pleine révolution industrielle qui plus est, cette société nouvelle fondée sur le seul pouvoir de l’argent ne satisfait pas les Romantiques : ils s’en offusquent et ils le font entendre. Au début du 19e siècle, en effet, la révolution industrielle bat son plein : on construit des usines dans lesquelles les matières premières, comme le coton, le minerais ou l’acier, sont transformées. On assiste à l’essor du capitalisme : les échanges commerciaux s’intensifient et les bourgeois, propriétaires des usines, s’enrichissent considérablement. Les ouvriers, eux, ne bénéficient d’aucune protection, presque d’aucun droit : ils sont les premiers à s’échiner pour confectionner les produits qui seront vendus par leurs patrons. Ils sont ceux qui créent la richesse, mais ils ne gagnent pas de quoi vivre dignement. Leurs conditions de travail sont pénibles, leurs journées sont longues et leur intégrité physique n’est pas assurée. Ils n’ont ni sécurité sociale, ni congés payés, ni assurance maladie ! Des artistes engagés Face à cette situation qu’ils jugent injuste et scandaleuse, de nombreux artistes romantiques prendront la défense des ouvriers. C’est que les artistes romantiques sont convaincus d’avoir été élus par une force supérieure pour guider le commun des mortels vers un monde meilleur, au premier rang desquels Victor Hugo, qui croit fermement en sa mission d’éclaireur du peuple. Celui que l’on désigne Cours 10 3 Français 5G Mme Kohl souvent comme le « chef de file du Romantisme » fait partie de ceux qui choisissent de dénoncer les injustices dans leurs œuvres. Il suffit de lire son roman Les Misérables pour s’en convaincre. Jean Valjean, le personnage principal, est d’abord condamné au bagne pour avoir volé du pain. Après sa sortie, lui qui ne connait des hommes que leur méchanceté, commet encore quelques délits, jusqu’à ce qu’un homme d’église, Monseigneur Myriel, fasse pour lui un geste d’une grande charité qui transformera son âme. À partir de là, Jean Valjean, qui prend le pseudonyme de M. Madeleine pour échapper à son passé d’ancien forçat, se montrera toujours d’une grande bonté envers les autres (il a secouru Fantine, s’est occupé de Cosette, est devenu maire, a obtenu la légion d’honneur). Quand un homme est arrêté en tant que Jean Valjean, il décide, après un long débat intérieur, de se livrer aux autorités pour éviter la condamnation d’un innocent. Après une longue vie de douleurs et d’injustices, de bonheurs et de générosité, il décède, entouré des siens et son âme est emportée par un ange. Mais les romantiques ne se contentent pas de dénoncer les injustices de leur époque dans leurs œuvres ! Plusieurs d’entre eux s’engagent en politique : Vigny, Hugo, Lamartine se présentent aux élections. Alphonse de Lamartine joue un rôle de premier plan lors de la Révolution de 1848. Au même moment, Victor Hugo (encore lui !) est élu député, mais quand le pouvoir, détenu par Napoléon III, se montre trop oppressant, retirant le droit de vote à certains citoyens, limitant la liberté de la presse, réprimant avec violence les journées de manifestations, il n’hésite pas à crier haut et fort son désaccord avec le pouvoir en place : il publie un pamphlet contre celui qu’il surnomme avec mépris « Napoléon le petit ». Il payera cher son insolence puisqu’il sera exilé durant de nombreuses années. Le drame romantique Stendhal (1783-1842), l’un des théoriciens du drame romantique (Racine et Shakespeare, 1823), présente Shakespeare (1564-1616) comme le modèle à suivre par les dramaturges romantiques. En effet, de nombreux auteurs romantiques ont été largement inspirés par le génie britannique qui, dans ses pièces, n’hésite pas à user alternativement du vers et de la prose, de formules poétiques et d’autres fort triviales, des ressorts de la tragédie, produisant terreur et pitié, et de ceux de la comédie déclenchant le rire. Dans les pièces les plus sérieuses de Shakespeare, ni la vraisemblance ni la bienséance ne bornent l’imagination. Le peuple y côtoie les princes car c’est l’ensemble d’une société que Shakespeare met en scène. Stendhal définit le drame romantique comme une œuvre en prose qui dure plusieurs mois et se passe dans des lieux divers. Pour lui, le vers est incongru dans la bouche de héros des temps modernes, qui sont ceux des drames romantiques (plusieurs drames romantiques seront, de fait, écrits en prose), Hugo (1802-1885) ne le suit pas : pour lui, le vers confère à une pièce un surcroit de valeur artistique mais, précise-t-il, il s’agira d’un « vers libre osant tout dire sans pruderie, tout exprimer sans recherche, sachant briser à propos et déplacer la césure pour déguiser sa monotonie d’alexandrin ». Cours 10 4 Français 5G Mme Kohl Victor Hugo, qui est considéré comme l’écrivain-phare du drame romantique, est d’ailleurs l’auteur de Cromwell (1827), une pièce réputée injouable et qui d’ailleurs n’a jamais, comme telle, été jouée. Cromwell, drame en cinq actes qui compte plus de six-mille vers, est à la fois fresque historique de l’Angleterre du XVIIe siècle et portrait de Cromwell, le lord protecteur de l’ile. La pièce se déroule dans divers lieux londoniens, autant de décors à déployer sur scène, où se côtoient plus de soixante personnages issus de milieux différents, des aristocrates au peuple. Elle raconte un triple échec : deux conspirations contre Cromwell qui ne viennent pas à bout du futur roi et l’échec du futur roi lui-même qui ne parvient pas à assoir sa légitimité. Le ton y est tantôt tragique, tantôt comique. Le drame romantique est essentiellement un drame historique. Entendez par là que l’action, c’est-à- dire la trajectoire des personnages, est déterminée par l’état général de la société, par les relations, souvent conflictuelles, entre les groupes sociaux dont ils sont des figures typiques. Par ailleurs, cette action, située dans un passé plus ou moins lointain, donne à réfléchir sur la conjoncture sociopolitique contemporaine. Cet aspect-là se manifeste dans la création de héros en rupture avec l’ordre social où l’enrichissement est devenu une préoccupation majeure. Tant Stendhal que Hugo considèrent que les règles classiques ne s’appliquent plus au drame romantique, qui doit répondre à l’ère nouvelle. De la règle des trois unités, Victor Hugo ne retient que « L’unité d’action, la seule admise de tous parce qu’elle résulte d’un fait : l’œil ni l’esprit humain ne sauraient saisir plus d’un ensemble à la fois. » © Van in Cours 10 5