Introduction à la Psychologie Clinique PDF
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Ce document fournit une introduction à la psychologie clinique, explorant ses origines et ses fondements en relation avec la médecine et la psychopathologie. Il discute des méthodes, des théories et de la pratique de la discipline, se concentrant sur la perspective du sujet individuel et du groupe.
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INTRODUCTION À LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE CHAPITRE 1 : FONDEMENTS DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE Le terme psychologie a pour origine l’expression latine psychologia qui apparaît au xvi siècle et qui dérive elle-même du grec psuk...
INTRODUCTION À LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE CHAPITRE 1 : FONDEMENTS DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE Le terme psychologie a pour origine l’expression latine psychologia qui apparaît au xvi siècle et qui dérive elle-même du grec psukhê, signifiant âme ou esprit, et de logos qui correspond au discours ou à la raison. La psychologie est donc, selon ses origines étymologiques, un discours rationnel sur l’âme ou esprit. « Psychologie clinique » évoque autant une méthode qu'un domaine qui se confond pour une part avec celui de la psychopathologie Aujourd’hui, on peut considérer la psychologie comme une discipline qui propose un abord rationnel de la vie psychique aussi bien du point de vue du sujet individuel que du groupe. Dans cette perspective, elle développe différentes méthodes, théories et pratique qui lui sont propres afin de mieux comprendre et expliquer cet objet d’étude particulier que représente le psychisme humain. I. LES ORIGINES A. La Notion de Clinique Le terme clinique vient de la médecine. Sur le plan étymologique le mot clinique vient du latin « clinicus » et du grec « klinè » qui signifient « lit » ; le mot clinique a ainsi les sens suivants : Au sens propre Qui concerne l'ensemble de l'art médical donné auprès du lit du malade Qui peut être effectué ou constaté par le médecin au lit du malade sans le recours d'appareils ou de méthodes de laboratoire Au sens figuré Enseignement de l'art médical donné auprès du lit du malade et ensemble des connaissances acquises de cette manière 1 Service hospitalier où se donne cet enseignement et local spécialement affecté à cet usage. Le mot clinique désigne donc une activité, un savoir et un lieu. Le psychologue clinicien se caractérise et se distingue donc par le fait qu’il se situe au « chevet du malade ». La psychologie clinique se fonde donc sur cette tradition médicale. Ainsi, on parle beaucoup de sémiologie (ou séméiologie) en psychologie clinique, c’est-à-dire de l’étude des signes de la maladie. La démarche clinique va, dans les faits, du recueil des signes à leur association en syndromes et à la découverte de la maladie ou du fonctionnement. Au centre de la clinique se place ainsi l'importance de voir et de nommer. Cependant, la Psychologie Clinique, si elle retient de la médecine le contact avec le malade et le rôle de l'observation, s'en distingue en ce sens qu'elle place la signification des conduites, l'implication du professionnel et la prise en compte totale des différents aspects du sujet, au centre de ses conceptions. Son souci est de replacer le relevé des signes et de la maladie dans l'histoire du patient et de sa singularité. B. Les Racines de la Psychologie Clinique On peut considérer que cinq disciplines scientifiques ont mis en place les conditions de la création de la psychologie clinique et continuent de l’influencer. Ce sont : 1. La Psychiatrie Il s’agit de la branche de la médecine qui s’occupe de l’étude et du traitement des maladies mentales. Quelques noms sont à retenir : Philippe Pinel (1745-1826, directeur de l’hôpital Bicêtre), père de la psychiatrie française constitue une figure importante car il a humanisé la vie des malades en institution (suppression des chaînes et de la coercition), proposé un traitement « moral » (conseil réconfortant et activités constructives), contribué au développement d’une connaissance intime du caractère du patient en prenant des histoires de cas, en exigeant des dossiers plus précis et en faisant des tentatives de classification. 2 De son côté Benjamin Rush (1745-1813), père de la psychiatrie américaine faisait aussi des efforts semblables : attitude plus humaine, traitement moral et essais de classification qui ont aboutis à la parution d’un traité sur les maladies mentales paru en 1813. Ces idées ont été prolongées et développées dans la seconde moitié du 19è siècle par les travaux sur les problèmes psychologiques et psychopathologiques avec 2 grandes orientations : Celle de Ribot, Janet, Dumas, Kraepelin, Witmer (faire recherches) Celle de Charcot, Liébault, Bernheim, Freud (faire recherches) 2. Le mouvement humanitaire Les idées humanitaires ont aussi trouvé des défenseurs comme : William Tuke (1732-1822) quaker et marchand influent qui a fondé la « Retraite » de York où les malades étaient à l’abri des problèmes de la vie et pouvaient vivre, travailler et se reposer dans une atmosphère paisible et religieuse. Elle a servi de modèle à bon nombre d’hôpitaux psychiatriques aux Etats Unis. Dorothy Dix (1802-1887), institutrice révoltée par les conditions de vie dans les institutions, s’est battue pour obtenir des réformes pour un traitement humain et adéquat pour les malades mentaux, les personnes déficientes et les criminels. Ces différents efforts ont abouti à la création du Comité National pour l’Hygiène Mentale aux Etats Unis (il s’occupe de la prévention par information et éducation du public, de coordination des services existants et recherche). L’attitude, le développement et les objectifs de la psychologie clinique sont profondément influencés par ces idées. 3. La Psychologie Générale et expérimentale C’est grâce à elle que la psychologie s’est émancipée de la philosophie, de la médecine et de la physiologie pour devenir une discipline autonome. Elle a fourni à la psychologie clinique le modèle méthodologique de base (modèle qui a dû évoluer et s’adapter pour l’étude des phénomènes cliniques), et de nombreuses informations à partir de ses recherches sur le fonctionnement général de l’être humain (pensée, mémoire, intelligence, perception, émotions etc.) qui sont la base de la clinique. 3 4. La Psychologie Différentielle En établissant l’intérêt de l’étude scientifique des différences individuelles (avec Galton, Wundt - un des pères de la psychologie expérimentale - Cattell, Binet, Stern) elle a introduit la mesure et l’analyse statistique pour étudier et classifier les individus. Ses travaux ont abouti à la création de la psychométrie (mesure des phénomènes psychiques) et de la méthode des tests qui va jouer un rôle important dans le développement de la psychologie clinique. 5. La Philosophie de la vie et la phénoménologie Bien que n’étant pas une racine aussi directe que les autres, on peut la citer car des auteurs comme Dilthey ont développé des idées qui ont eu une influence sur le plan des méthodes. Ces auteurs ont proposé de ne pas suivre le modèle des sciences naturelles comme le proposait Wundt mais adopter une méthode tenant compte de l’originalité de l’objet humain, du caractère immédiat, historique et structural de l’expérience vécue. Il faut donc ne pas seulement chercher à expliquer, mais surtout à comprendre cet objet). Donc aboutissement avec Husserl à la méthode phénoménologique : pas objectivation et explication mais description et abstraction génératrice de concepts. Cette orientation s’est fait sentir dans la psychologie générale et expérimentale, dans la psychologie du développement, dans la psychologie de la personnalité et par ce biais, dans la psychologie clinique. C. Les fondateurs Nous citerons essentiellement trois auteurs principaux qui sont considérés comme les fondateurs de la psychologie clinique même si leur action n’a pas eu de suite immédiate ou s’ils ont très peu employé le terme eux-mêmes. 1. Witmer Lightner (1867-1956) Il a fondé en 1896 aux Etats Unis la première « Psychological Clinic » où il soignait les enfants handicapés mentaux. Il a présenté sa conception de cette nouvelle discipline à « L’Américan Psychological Association » (APA) en utilisant pour la première fois les termes de Psychologie Clinique et méthode clinique, a créé une Revue de Psychologie Clinique et donné une formation 4 professionnelle à des étudiants. Mais son action a eu peu d’influence par la suite, principalement parce qu’il s’est centré essentiellement sur les déficiences intellectuelles et les problèmes pédagogiques, en délaissant la psychiatrie, et qu’il ne croyait pas en la psychanalyse. 2. Janet Pierre (1851-1947) Ce célèbre psychiatre et psychologue français a parlé à plusieurs reprises de la psychologie clinique dans un sens qui se rapproche aujourd’hui de celui de psychologie médicale (branche de la psychologie s’occupant des problèmes de la médecine). Il la destinait aux médecins s’occupant des maladies mentales. Plus que cette conception, c’est surtout l’ensemble de ses travaux qui constitue, sans qu’il en revendique le terme, une véritable succession de travaux de psychologie clinique, dans la mesure où il a tenté de promouvoir une réflexion psychologique : critique de l’excès de rationalité, intérêt soutenu pour le particulier et pour les faits impliquant le recours à l’observation fine, savoir constitué par l’étude exhaustive de cas pris isolément, critique des résultats de laboratoire qui isolent les variables. 3. Freud Sigmund (1856-1939) Ce psychiatre, père de la Psychanalyse, a très peu utilisé le terme de psychologie clinique. Ce sont ses préoccupations, sa démarche générale avec son souci de compréhension des phénomènes psychologiques et le recours à l’intelligibilité des conduites, sa méthode d’analyse approfondie des cas individuels et la mise en évidence des particularités de la relation entre le sujet et l’observateur (notion de transfert) qui peuvent être qualifiés de « psychologie clinique ». II. CONSTITUTION ET DEVELOPPEMENT DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE. A. Historique De façon générale, malgré l’existence auparavant d’activités de psychologie clinique comme les Centres de guidances pour enfants et les institutions pour adultes, c’est après la seconde guerre mondiale qu’il y a eu un tournant décisif pour la reconnaissance de la psychologie clinique. 5 On peut distinguer quatre grandes périodes : o 1896 : Witmer Lightner fonde la discipline 1. De 1896 à 1918 : développement des premiers tests, la psychologie clinique est une discipline auxiliaire et le clinicien a essentiellement des activités diagnostiques. Activités : Mesure de l’intelligence et des aptitudes, des performances scolaires des enfants. 2. De 1918 à 1940 : développement dû d’abord à la nécessité d’examiner les recrues pour la première guerre mondiale. Les activités s’étendent ensuite aux adultes (psychologie dans les entreprises) et aux hôpitaux psychiatriques grâce au développement des tests de personnalité (questionnaires, Rorschach, TAT), développement de l’influence de la psychanalyse et des psychothérapies. 3. De 1940 à 1970 : on assiste à une véritable révolution. La seconde guerre mondiale a nécessité l’utilisation des nombreux cliniciens pour la prise en charge des problèmes importants de santé mentale qui ont été créés chez les soldats, avec le soin de leur pathologie et le problème de leur réhabilitation sociale. D’où reconnaissance de leur utilité et nécessité de formation pour en avoir beaucoup plus. L’APA aux Etats- Unis va, en 1947 proposer un programme de formation spécifique aboutissant au diplôme de psychologue clinicien. Elle pose les bases d’un cadre de recherche propre et la psychologie clinique est reconnue comme une discipline scientifique liée directement à la psychologie. En France, la médecine a été un lourd obstacle au développement de la psychologie clinique car elle estimait qu’il s’agissait de son domaine exclusif. Ce sont les transformations de la psychiatrie en 1945 qui ont fait apparaître des besoins dans les domaines de l’observation clinique, de l’analyse institutionnelle, de l’évaluation, de l’analyse psychopathologique, des psychothérapies etc. C’est alors qu’ont pu être formés les premiers psychologues cliniciens. On doit à Lagache Daniel (1903-1972) (Philosophe, psychiatre et psychanalyste) l’édification de départ de la psychologie clinique en France. Juliette Favez-Boutonier (médecin, philosophe, psychanalyste) a poursuivi et complété les travaux de Lagache. Elle a systématisé la discipline, et s’est étendue vers d’autres domaines moins marqués par la pathologie. A partir de 1966 elle va obtenir et gérer la création d’un certificat de maîtrise intitulé « Psychologie Clinique » puis, après 1968 elle sera un des 6 fondateurs de l’UER de « Sciences Humaines Cliniques » à l’Université de Paris VII. 4. Depuis les années 1970 : la psychologie clinique continue de se développer en particulier dans les domaines des activités thérapeutiques et de l’action préventive. Des théories thérapeutiques autres que la psychanalyse ont fait leur place. Elle a ainsi intégré un courant plus proche du modèle des sciences de la vie. La psychologie clinique a initié un mouvement de critique et de développement de ses instruments ; certaines de ses interventions ont été dévolues à d’autres professionnels formés à la psychologie qui se sont révélés aussi efficaces. L’évolution de la société l’a en outre orientée vers des domaines comme les addictions, la délinquance, l’influence de la stagnation économique, le terrorisme, les épidémies, etc. En ce qui concerne l’évolution de la Psychologie clinique, l’opposition entre psychologie clinique et psychologie expérimentale demeure. B. Conceptions de la psychologie clinique 1. Identité de la psychologie Clinique. La clinique trouve son origine dans une pratique médicale qui consiste à appréhender la situation singulière de l'individu malade, pour concevoir l'aide qui lui est nécessaire. La psychologie clinique étend cette démarche à l'étude des conduites humaines aussi bien normales que pathologiques et se différencie ainsi de la clinique psychiatrique. Ainsi, la méthode clinique s'avère être une méthode qui va plus près de l'individu, au fond de son intimité. Elle aborde l'individu dans sa totalité, elle ne peut pas se contenter de l'intuition immédiate, elle se justifie par une analyse des différents fonctionnements et des liens qui les relient entre eux. Ce que découvre le psychologue clinicien, c’est la singularité du sujet. Sa spécificité n’est plus son lieu de travail, ou la recherche de la généralité. Le psychologue clinicien n’est plus celui qui se tient au pied du malade puisque la saisie de l’individu dans sa totalité n’est pas seulement la saisie de l’individu malade mais la saisie de l’individu dans tous ses aspects historiques et sociaux, l’individu enfant, adulte, vieillard, mais aussi l’individu à l’école, au travail, en famille. 7 La Psychologie Clinique est une discipline autonome qui ne se confond ni avec la psychanalyse, ni avec la psychopathologie, la psychologie médicale, la psychiatrie ou la psychométrie. La psychologie clinique représente aujourd'hui, en France comme dans les autres pays où elle est connue, surtout l'Allemagne et les États-Unis, le secteur le plus développé de la psychologie bien qu'il s'agisse de la branche la plus récente des disciplines psychologiques, née seulement après la Seconde Guerre mondiale. 2. Quelques grands auteurs français (psychologues ou non) et leur conception de la psychologie clinique a) Les conceptions valorisant la clinique à main nue Elles valorisent surtout la relation d’entretien et restent proches de la psychanalyse. On y trouve des auteurs comme Didier Anzieu, Juliette Favez-Boutonier, Claude Revault d’Allonnes, Michèle Huguet, Colette Chiland et Roger Perron. (a) Daniel Lagache (1903-1972) Le caractère original du modèle français tient à la conception éclectique particulière de son principal fondateur Daniel Lagache qui l'a formulée en 1949 dans un petit ouvrage connu depuis comme un véritable manifeste de la nouvelle discipline (« L'unité de la psychologie »). À vrai dire, Lagache ne crée pas de toutes pièces le modèle de la psychologie clinique. Il l'introduit en France, à partir des États-Unis où elle commençait à se diffuser (Rapaport, Rosenzweig), mais en la concevant selon une philosophie personnelle, comme une discipline faisant transition entre la psychologie expérimentale et la psychanalyse. Dès sa création, la psychologie clinique en France est caractérisée par une forme originale de référence au modèle psychanalytique. Il considérait que le but de la psychologie clinique était de conseiller, de guérir et d’éduquer. Elle est fondée sur l’étude aussi détaillée que possible des cas, en particulier les conduites humaines qui ne sont pas directement du ressort de la psychiatrie mais peuvent être inadaptées. Pour lui, « Elle a pour objet premier l’étude de la conduite humaine individuelle et de ses conditions (hérédité, maturation, conditions physiologiques et pathologique, histoire de la vie), en un mot, l’étude de la personne totale en situation ». 8 (b) Juliette Favez-Boutonier (1903-1994). Au rôle fondateur de Lagache doit être associée la personnalité marquante de Juliette Favez- Boutonier. Ils ont le même type de formation associant la philosophie à la médecine, la psychologie et la psychanalyse. Elle a créé à Paris en 1959 le premier laboratoire de psychologie clinique en France, appelé ensuite « psychologie individuelle et sociale » (1968). Puis elle obtient la dénomination « psychologie clinique » au sein des options de la maîtrise créées en 1967. Juliette Favez-Boutonier, dix ans après la formulation par Lagache de son modèle (1959), fait une différence plus grande entre psychologie clinique et modèle médical en l'orientant davantage vers une « psychologie générale clinique ». Sa conception de la Psychologie Clinique est fondée sur la spécificité de l’individu et son unicité. Elle a développé en 1958 et 1959 différents aspects de la psychologie clinique : distinction d’avec la Psychologie médicale et d’avec la Psychanalyse, description rigoureuse de la subjectivité et des références à la dimension « vécue » de l’expérience, étude de l’individu sans comparatisme, critique de la prédominance du diagnostic au profit d’une observation continue. Elle met l'accent particulier sur le thème, cher à la phénoménologie française, de l'intersubjectivité ouvrant la psychologie clinique à d'autres domaines moins marqués par la pathologie (éducation, petits groupes, orientation). A la « clinique armée» de Lagache, elle préfère la conception plus souple d'une « clinique aux mains nues ». C'est cette tradition qu'a désignée de son côté la formule bien venue de « psychologie de la vie quotidienne ». Pour Favez-Boutonier la psychologie clinique est « l'étude d'une personnalité singulière dans la totalité de sa situation et de son évolution » ; il s'agit de « l'approche contrôlée de l'homme par l'homme dans une situation d'implication réciproque ». Le courant de la psychologie sociale clinique, présent presque dès la création du laboratoire de Favez-Boutonier, a pris aujourd'hui une consistance et une autonomie propres. (c) Didier Anzieu (1923-1999) Didier Anzieu (1979, 1982), psychologue et psychanalyste, s'est attaché à préciser davantage les relations entre la psychologie clinique et la psychanalyse. D'après lui aussi, la référence psychanalytique est dominante mais non exclusive en psychologie clinique. Les perspectives économique et topique, de même que le maniement du transfert appartiennent en propre à la psychanalyse, mais elle partage avec la psychologie clinique les perspectives dynamique et génétique. La psychologie clinique met en outre l'accent sur le double point de 9 vue adaptatif et interrelationnel, et peut en fin de compte s'envisager comme une forme particulière de psychanalyse appliquée. De cette façon, elle se présente aussi bien comme « une psychologie individuelle et sociale, normale et pathologique ». Les contributions d'Anzieu à la psychologie clinique sont essentielles. Il développe, dans une inspiration psychanalytique, une école française de techniques projectives mais aussi l'étude des groupes. (d) Françoise Dolto (1908-1988) Françoise Dolto (1983), psychanalyste, dans la perspective originale d'un lacanisme ouvert à la psychologie, propose de distinguer sans les opposer les rôles respectifs du psychologue clinicien et du psychanalyste : le premier travaille dans la réalité, tandis que le second s'en tient à la fantasmatique. Il revient au psychologue de faire une juste anamnèse, et à cette fin le recours aux tests dans la relation avec l'enfant est utile, et même indispensable. Cependant, le psychologue peut aussi procéder à des psychothérapies de soutien, « dans lesquelles le thérapeute utilise le transfert sans analyser la relation de l'enfant à sa propre personne ». Par ailleurs, le rôle du psychologue implique la coexistence d'une attitude neutre et de l'engagement. S'il y a une décision à prendre, dans le cadre institutionnel, c'est au psychologue d'agir et non au psychanalyste. Par exemple dans les cas de maltraitance, il peut être amené à adresser un rapport au juge des enfants, tout en maintenant une écoute neutre vis à vis des maltraitants. Enfin, Françoise Dolto propose cette définition très réaliste de l'articulation du rôle du psychologue à celui du psychanalyste : « Le métier de psychologue ? Assistance à personne en désarroi ou en danger. Et c'est aussi parfois la préparer à l'analyse, parce que ça se prépare, une analyse ». b) Les auteurs développant des conceptions objectivantes Cette tendance tire sa source de la tradition de la clinique médicale, psychiatrique et la psychologie expérimentale. Elle privilégie la clinique armée (tests) et les méthodes. (a) Henri Piéron (1881-1964) Il est intéressant de mentionner, bien qu'elle ne soit pas à proprement parler « récente », la définition de la psychologie clinique proposée en 1951 par Piéron dans son Vocabulaire de la psychologie, laquelle d'ailleurs paraphrase des termes repris à Lagache : «Science de la conduite 10 humaine, fondée principalement sur l'observation et l'analyse approfondie de cas individuels, aussi bien normaux que pathologiques, et pouvant s’étendre à celle de groupes. Concrète dans sa base, et complétant les méthodes expérimentales d'investigation, elle est susceptible de fonder des généralisations valables. Une conception plus étroite la limite à une « psychologie appliquée au domaine médical ». (b) Daniel Widlöcher (1929-2021) Pour ce psychiatre et psychanalyste: « La psychologie clinique repose sur l'observation, c'est à dire sur l'étude d'événements mentaux accessibles à la conscience du sujet ou s'exprimant par des comportements d'une durée suffisante pour être accessible à l'observateur. Elle porte sur des expériences individuelles. La psychologie clinique n'est pas une psychologie de la santé. » (c) Le modèle anglo-saxon D'un caractère encore plus objectivant, le modèle anglo-saxon propose une définition de la psychologie clinique envisagée comme une technologie visant la prévention et la thérapie des problèmes et des « troubles psychiques ». Cette notion de trouble est elle-même inspirée par l'approche a-théorique et purement descriptive propre aux nouvelles classifications du type CIM 10, 11 (Classification Internationale des Maladies version 10 ou 11) ou DSM-IV, DSM- V (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders – version 4 ou 5). Ce modèle s'insère lui-même dans un cortège de disciplines nouvelles en expansion : neuropsychologie, psychologie de la santé, psychologie communautaire. Il est maintenant répandu, en Europe en particulier en Belgique, en Allemagne et de plus en plus en France. Psychologie clinique française se libère de sa fixation sur la psychanalyse, sorte de ses querelles locales et retrouve le dialogue avec la communauté scientifique internationale.» (l993) Dans une certaine mesure, on peut rattacher Janet, Wallon, Lagache, Pedinielli et Huber à ce courant. C. Définition de la Psychologie Clinique De nombreuses définitions existent et proposent une description valable de la Psychologie Clinique. Les deux auteurs retenus s'accordent sur des définitions de la psychologie clinique se référant à une méthode et à un savoir constitué vérifiable, public, falsifiable et non pas à un lieu d'exercice professionnel qui exclurait celle-ci d'un enseignement à l'université et 11 réduirait le sujet à un de ses aspects : celui de sujet souffrant. Nous retiendrons deux définitions principales pour notre part : La définition de Lagache : « faire de la clinique, c’est « envisager la conduite dans sa perspective propre, relever aussi fidèlement que possible la manière d’être et d’agir d’un être humain concret et complet aux prises avec une situation, chercher à en établir le sens, la structure et la genèse, déceler les conflits qui la motivent et les démarches qui tendent à résoudre ces conflits, tel est en résumé le programme de la psychologie clinique ». Sa conception pose les principales caractéristiques de la psychologie clinique actuelle. - Une Pratique appuyée sur une méthode (clinique) visant un objet (l’homme en conflit) et procédant essentiellement par analyse de cas, - La constitution d’un Savoir supposant une généralisation à partir de cas singulier. - Tout en reconnaissant une relative infériorité de la psychologie clinique sur la psychologie expérimentale sur les plans de la scientificité, de l’administration des preuves et de la prédiction des phénomènes, Lagache pose qu’elle constitue l’approche la plus adaptée aux conduites humaines concrètes. Cependant, c’est une définition qui donne l’esprit de l’approche de la Psychologie clinique mais elle ne différencie pas approche clinique et Psychologie clinique comme discipline. En gardant à l’esprit cette première définition, nous allons, à l’instar de Jean Louis Pedinielli, dire de façon générale que : « La psychologie clinique doit être définie comme la sous-discipline de la psychologie qui a pour objet l’étude, l’évaluation, le diagnostic, l’aide et le traitement de la souffrance psychique quelle que soit son origine (maladie mentale, dysfonctionnement, traumatismes, évènements de vie, malaise intérieur…). Elle se fonde sur des méthodes cliniques parmi lesquelles l’étude de cas, l’observation des comportements et l’analyse des discours, sans recours à l’expérimentation (reproduction contrôlée des comportements). Le terme de psychologie clinique désigne donc à la fois un type de pratique et un ensemble de connaissances validées par cette pratique : une partie de ces connaissances, établies grâce à la méthode clinique, ne concerne pas seulement le domaine de la souffrance et des difficultés mais a trait à la psychologie générale. » Cette définition reprend l’essentiel des caractéristiques de la Psychologie clinique en tant que branche de la Psychologie. Le terme de souffrance 12 n’implique pas que celle-ci soit consciente ni que cette difficulté de fonctionnement soit du domaine de la pathologie. D. Objet de la Psychologie Clinique Selon Roger Perron, il faut considérer que : « L'objet de la psychologie clinique est le fonctionnement psychologique du sujet individuel », soit encore « le fonctionnement psychique de l'humain individuel, normal et/ou pathologique ». On doit à Lagache cette phrase très actuelle sur l’objet de la psychologie clinique : « C’est l’être humain en tant qu’il est porteur d’un problème, et d’un problème mal résolu ». Elle est la science de la « conduite humaine concrète », adaptée ou inadaptée, normale ou pathologique. Pour Juliette Favez-Boutonnier : Son objet est « l’être humain en tant qu’il existe et se sent exister comme un être unique ayant une histoire personnelle, vivant une situation qui ne peut être assimilée à aucune autre » La psychologie clinique se propose donc l'étude de « l'individu complet et concret » et de son fonctionnement. Cet être humain est envisagé tant dans sa « singularité » que dans son « drame » : c’est-à-dire « une personnalité aux prises avec un certain entourage... un problème mal résolu », une situation problème. L’objectif de cette étude vise à rapporter « l'histoire de ce cas » à l'ensemble de ses conditions... (hérédité, maturation, conditions physiologiques et pathologiques, histoire de vie) et à en tirer compréhension et connaissance. La psychologie clinique a également pour objet les groupes, ce qui l'ouvre aussi sur une psychologie sociale clinique : psychodrame, dynamique de groupe. Cette voie indiquée par Lagache sera développée en particulier par Anzieu, entre autres auteurs. 13 CHAPITRE 2 : CHAMPS ET CARACTERISTIQUES DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE I. SPECIFICITES DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE A. Caractéristiques de la psychologie clinique Quatre grandes caractéristiques sont à retenir : 1. L'humanisme Dans une perspective commune, Lagache et Favez-Boutonier envisagent la psychologie clinique comme l'expression de la « tendance humaniste et totalisante » de la psychologie. La méthode clinique vise l'interprétation compréhensive des conduites d'un sujet, dont elle établit « le sens, la structure, la genèse ». Elle se présente comme l'étude approfondie, l'observation intensive, l'exploration exhaustive, « l'investigation systématique et aussi complète que possible de cas individuels... qui ne sont pas forcément médicaux... » En un mot, il se donne pour cadre « toute l’évolution » de la personnalité. Colette Chiland, parlera de la psychologie clinique comme la « psychologie de la vie quotidienne », et propose une formule très expressive : « la psychologie au service d'autrui. » R. Perron, inspiré par la même référence « humaniste », est plus technique : « La psychologie clinique se donne pour but d'expliquer les processus psychiques de transformation dont la personne est le siège. La personne est un système, une structure régie par des lois d'autorégulation, par le jeu de régulations synchroniques et diachroniques. » 2. La place de la psychanalyse L'approche clinique se distingue à la fois de l'approche expérimentale, qualifiée par Lagache de « naturaliste », et de l'approche psychanalytique. Sa méthode qualitative, ne lui interdit pas de fonder des généralisations valables mais dans le seul cadre de cas de «synthèses limitées». En fait, la psychologie clinique est comprise « dans la psychologie générale, comme un complément, comme une ouverture » sur les autres disciplines psychologiques. En ce qui concerne la psychanalyse, même si elle est « une forme de psychologie clinique », elle conserve 14 « une place à part ». Elle est en réalité une sorte d'« ultra clinique » (Lagache), c'est à dire de « super observation de la conduite » (Favez-Boutonier). Cependant, la psychologie clinique existe en tant que telle ; elle ne saurait être remplacée, par la psychanalyse. Cette situation à la fois latérale, mais dominante, du référent psychanalytique est surtout caractéristique de l'école française. 3. La centration sur la personnalité Il s'agit tout d'abord de l’influence des différents modèles classiques de la personnalité, morphologiques (Kretschmer, Sheldon), psychologiques (Jung, Rorschach), factoriels (Eysenck, Cattell). D'autre part, les outils d'investigation que constituent les tests contribuent largement (on parle de « clinique armée ») à l'établissement du profil de la personnalité et du fonctionnement du sujet. Les données mesurables font l'objet d'une interprétation clinique centrée sur la dynamique de la conduite ou relevant des catégories de la psychanalyse. 4. La Méthode clinique La Psychologie clinique se caractérise aussi par l’utilisation de la méthode clinique. Dès 1938, Lagache envisageait déjà le projet d'une « nouvelle psychologie » opposée à la psychologie «classique », et qu'il proposait de relier à l'ensemble des grands courants de la psychologie et de la philosophie de l'époque. Par la suite, dans le manifeste de 1949, il marquera davantage que « ce qui spécifie la psychologie clinique, c'est la méthode clinique, c'est à dire la nature des opérations avec lesquelles le psychologue approche la conduite humaine ». Et ceci en opposant une telle « attitude méthodologique » propre à la psychologie clinique au « contrôle artificiel des facteurs caractéristiques de l'expérimentation ». Selon M. Reuchlin : « La clinique est une méthode d'étude approfondie des sujets individuels par des techniques d'investigation normalisée ou non (et ne faisant pas nécessairement appel à des élaborations statistiques). » Selon Beauchesne : « La psychologie clinique est caractérisée par l'investigation systématique et aussi complète que possible des cas individuels. » À partir des années 1990, les positions nouvelles qui s'exprimeront sur la psychologie clinique insisteront de plus en plus sur le thème de la méthode clinique, de portée plus vaste que la psychologie clinique comme discipline. 15 B. La Notion de psychisme vue par la Psychologie Clinique C’est une notion centrale en psychologie. En Psychologie clinique, on peut comprendre le psychisme comme l’ensemble des éléments conscients et inconscients qui définissent l’identité objective et subjective du patient, qui lui permettent d’avoir une certaine conception du monde qui l’entoure et qui lui donnent accès à la perception de sa place dans le monde et du type d’interaction qui en découlent. II. LES GRANDS CHAMPS ET COURANTS A. Les grands courants Deux grands courants s’affrontent dans le champ de la psychologie clinique. 1. La Psychologie d’obédience générale et expérimentale influencée par les neurosciences De ce côté, on a les partisans d’une psychologie plus objective, à la recherche de généralisation, de fiabilité des méthodes utilisées et des données recueillies 2. La psychologie d’obédience psychanalytique ou psychodynamique. De ce côté, on a les partisans d’une psychologie plus affective et plus humaine, n’excluant pas pour autant une analyse rigoureuse au moyen d’outils en cohérence avec les objectifs de recherche. B. Les principaux champs d’étude De façon générale, au-delà de ces différences de base, on peut distinguer trois grandes tendances dans le champ de la psychologie clinique : L’étude des compétences psychologiques, l’étude des processus et modes de fonctionnement de l’activité mentale, l’étude du fonctionnement intrapsychique et inter-psychique. 16 1. Compétence et performances L’investigation des compétences psychologiques a pris son essor grâce aux progrès des découvertes en neurosciences. On note deux orientations dans le champ de la recherche et de l’application : 1. Les rapports entre comportement et fonctionnement neurologique, comportement et fonctionnement cognitif. On trouvera ici des apports importants des théories cognitives et comportementales ainsi que des neurosciences sur les déficits causés par les lésions cérébrales et les caractéristiques de ces déficits aux plans du cognitif (intelligence, mémoire, perception, etc.), des états émotifs et des comportements. 2. La démarche d’investigation au moyen des tests. L’évaluation des capacités cognitives et celles de l’organisation de la personnalité s’organise autour des différents tests : Tests cognitifs, Tests neurologiques, Tests de personnalité (projectifs, questionnaires, etc.) 2. Processus et fonctionnement mental L’utilisation des tests s’est révélée insatisfaisante pour examiner le fonctionnement cognitif et affectif d’une personne lorsqu’on voulait se centrer non sur le quantitatif mais sur l’analyse des processus de fonctionnement. C’est ainsi que des orientations ont été privilégiées afin de combler cette insuffisance. On a ici deux approches principales : 1. L’investigation clinique du fonctionnement intellectuel à partir des travaux de Jean Piaget. Piaget propose une théorie du développement de l’intelligence de l’enfant qui est certes générale et génétique mais il se centre sur les mécanismes de structuration et de fonctionnement à partir de conflits, de systèmes de coordination, de mouvements d’interaction, etc. Les épreuves qu’il a mises au point et sa méthode d’investigation se sont révélées utile dans le cadre de l’examen clinique et pour l’évaluation du développement cognitif et de ses dysfonctionnements. 17 2. La psychanalyse en tant que méthode d’investigation et la clinique psychosomatique. Le concept de pensée opératoire a permis à des auteurs comme Pierre Marty de rendre compte du fait que les processus de pensée peuvent être altérés par le fonctionnement affectif et fantasmatique du sujet. Les particularités des patients psychosomatiques imposent des types d’investigation qui demandent la prise en compte de concepts psychanalytiques et d’épreuves projectives. Ce type d’approche s’est révélé utile pour comprendre aussi des difficultés de fonctionnement qui ne sont pas liées au niveau intellectuel. 3. La clinique de l’activité psychique Elle est fondamentale dans le domaine de la psychopathologie et de la psychothérapie et dans des champs comme les relations mère-enfant, les conflits juvéniles, les troubles du fonctionnement de la personnalité. Les outils utilisés sont l’observation, l’analyse des productions du sujet et les entretiens. Ici encore deux directions : 1. L’investigation intrapsychique : on se centre ici sur le fonctionnement interne du sujet avec ses représentations, ses conflits, ses défenses, ses processus de symbolisation, ses identifications etc. Il s’agit ici d’atteindre ce qui est peu ou pas visible et qui peut être à l’origine de certains de nos comportements. Les méthodes de la psychanalyse, l’observation à l’aide de jeux et de tests, films sont les principales utilisées. 2. L’investigation inter-psychique : L’accent est mis sur l’intersubjectif, les relations interpersonnelles, l’interaction. Des auteurs comme J. R. Greenberg ou S. A. Mitchell se détachent de la théorie des pulsions pour se centrer sur la relation d’objet. On va ainsi développer des théories comme celles de l’attachement après les travaux de J. Bowlby, les interactions mère-enfant inspirées des théories de la communication, ou de la fantasmatique mise en évidence par la psychanalyse (R. Spitz, D. Winnicott). 18 CHAPITRE 3 : LA DEMARCHE EN PSYCHOLOGIE CLINIQUE I. LES RELATIONS AVEC LES AUTRES DISCIPLINES A. La médecine L’association de la psychologie avec la psychanalyse a permis aussi à la première de prendre distance et même de s'émanciper à l'égard de la philosophie, de la médecine et de la biologie, les trois disciplines dominantes auxquelles elle était depuis toujours en majeure partie inféodée. En fait, c'est sous cette triple tutelle que la psychologie débutante avait accompli d'importants progrès depuis cent cinquante ans. L'institution médicale a résisté aussitôt et pendant de longues années à cette émancipation d'une psychologie clinique sous la tutelle implicite de la psychanalyse. La médecine, s'autorisant de la riche tradition de la clinique médicale et psychiatrique en France, prétendait à une hégémonie de droit, en les contrôlant de façon cloisonnée, sur ces deux disciplines nouvelles. Aujourd’hui, le lien avec la psychiatrie de l’enfant, de l’adolescent et de l’adulte se maintient à travers la psychopathologie et la pratique thérapeutique d’autant plus que la psychiatrie semble vouloir intégrer de plus en plus les découvertes de la psychologie (cognitive, du comportement, des systèmes, etc.) et de la psychanalyse. Il y a cependant une tendance de la médecine à vouloir assimiler la psychologie clinique à la psychopathologie malgré une différence dans les objectifs et les méthodes. B. La philosophie La relation entre la psychologie et la philosophie est aujourd'hui particulièrement distendue en France, en particulier. Il existait dans la psychologie française un courant dont l'origine se rattache plus ou moins au fondateur de la philosophie positive Auguste Comte (1798-1857), exprimant une forte méfiance à l'égard de la philosophie, passant notamment par Théodule Ribot et Henri Piéron, et plus ou moins accrédité par l'approche de Maurice Reuchlin dans son « Histoire de la psychologie » (1957, Paris : PUF). Mais il est clair que cette dénégation de la philosophie, d'ailleurs fréquente à d'autres titres chez d'autres philosophes Kierkegaard, Nietzsche, etc. exprime elle-même en l'occurrence une forme de philosophie de caractère réductionniste, à la fois positiviste et matérialiste. 19 En ce qui concerne la philosophie, un courant non négligeable de ses personnalités officielles s'est éloigné ostensiblement de la psychologie. En 1956, Georges Canguilhem, dans une conférence célèbre prononcée devant la Société de philosophie, formulait un réquisitoire sévère et d'un retentissement durable contre la psychologie. Depuis, la ligne de fracture n'a cessé de s'élargir, sans nul effort de part et d'autre pour essayer de la combler. C. La psychanalyse Le modèle de Lagache présente le projet d'une alliance originale et majorante, c'est à dire non réductrice, entre la psychologie et la psychanalyse. Dans la même période, 1’enseignement de Jacques Lacan, instauré au lendemain d'un célèbre « rapport du congrès de Rome » (septembre 1953), inaugurait un nouveau courant de la psychanalyse qui est déterminé à rejeter ce modèle d'une psychologie clinique alliée à la psychanalyse, tout en intégrant les autres théories de la psychologie. Lacan lui oppose le contre-modèle structuraliste d'une psychanalyse pure, comme cadre d'une authentique psychopathologie psychanalytique. Son discours prononce la rupture entre la conception lacanienne de la psychanalyse et l'ensemble des sciences psychologiques. Cependant la tendance représentée par des auteurs comme D. Anzieu revendique toujours une psychologie clinique qui reste liée à la psychanalyse revendiquant toujours d'une certaine manière l'héritage idéologique de son maître Lagache. Ce que partagent la psychologie clinique et la psychanalyse est de tenter d’apporter une théorisation, une compréhension de l’humain singulier à un moment donné de son histoire, en prenant en compte toutes ses dimensions. Au point de vue de la pratique, l’exercice de la psychanalyse implique que l’on soit dans le cadre d’un suivi psychothérapeutique. A l’inverse, l’exercice de la psychologie clinique peut se faire en dehors de la psychothérapie. C’est le cas des situations de bilans psychologiques qui se font à l’aide de tests et des situations de formation. La référence à la psychanalyse est importante mais elle n’est pas exclusive en psychologie clinique ; d’autres modèles théoriques sont utilisés comme les modèles cognitifs, comportementaux, interactionnistes, systémiques, etc. dans une perspective complémentariste et intégrative. 20 D. La Psychopathologie Il est historiquement difficile de différencier l’apparition de la psychopathologie et de la psychologie clinique. C’est progressivement qu’elles se sont mieux constituées de façon autonome. La psychopathologie abordée en psychologie clinique est la somme de savoirs tentant de décrire, comprendre et expliquer comment une pathologie peut apparaître ou est apparue au regard de la dynamique psychologique du sujet. En effet, s’il est difficile d’envisager une psychologie clinique qui exclue la psychopathologie car les deux abordent les déséquilibres du psychisme, il demeure que la psychologie clinique s’inscrit à la fois dans les processus normaux et les processus pathologiques. La psychologie clinique par ailleurs a d’autres objets d’étude que la pathologie comme la clinique des groupes, la pratique dans les structures de réinsertions sociales, dans les structures d’adoption, des milieux scolaires, les soins palliatifs, etc. De son côté, la psychopathologie inclue des aspects parfaitement distincts de la psychologie clinique : la psychopathologie biologique, la méthode expérimentale utilisée pour étudier les mécanismes des pathologies et les généraliser. Le lien principal entre les deux se situe dans l’utilisation de la méthode clinique dans le champ du psychisme. Il ne s’agit pas d’un simple discours comme en psychiatrie autour de la pathologie mentale, mais d’une approche plus vaste qui implique l’analyse globale dont les éléments psychiques préexistant et non symptomatiques. II. LA DEMARCHE EN PSYCHOLOGIE CLINIQUE A. Caractéristiques de la démarche clinique L’auteur Claude Revault d'Allonnes (1989) s'intéresse au thème de « la démarche clinique en sciences humaines ». Il insiste sur certains caractères de la démarche clinique : a. Le lien étroit avec la pratique (en particulier dans la recherche), b. L’importance du rôle de la demande et de la relation entre le client et le psychologue, c. La prise en compte de l'implication du clinicien, 21 d. La référence aux théories du clinicien (la psychanalyse, théories systémiques, comportementales, etc.) e. L’évaluation de la dimension sociale. B. Différenciation de la démarche médicale et de la démarche psychologique en Psychopathologie 22 1. La méthode diagnostique utilisée en pathologie médicale SYMPTÔME Ce dont le patient se plaint SIGNE La traduction de ce symptôme en un ensemble sémiologique connu Ensemble de signes qui vont ensemble et SYNDROME caractérisent une entité sémiologique à part entière. Ils peuvent appartenir à plusieurs maladies Analyse sémiologique et Nomination de la DIAGNOSTIC pathologie mentale. Le diagnostic dépend de la calssification (nosographie) utilisée PRONOSTIC Evolution probable de la maladie Supprimer, améliorer la TRAITEMENT pathologie (surtout médicaments) 23 2. La méthodologie diagnostique utilisée en psychologie clinique La psychologie clinique va utiliser le même schéma de base. Cependant, la différence essentielle tient à un niveau complémentaire. Le recueil d’information est plus complet et se fait aussi avec d’autres instruments que l’entretien et l’observation. SYMPTÔME Ce dont le patient se plaint La traduction de ce symptôme en un SIGNE ensemble sémiologique connu Anamnèse complète (Histoire, développement, entourage) Evaluation de la personnalité (Entretien, Tests) INFORMATIONS COMPLEMENTAIRES Structure psychopathologique sous-jacente, sens des sympômes Etude des mécanismes de défense et des stratégies d'adaptation Ensemble de signes qui vont ensemble et SYNDROME caractérisent une entité sémiologique à part entière. Ils peuvent appartenir à plusieurs maladies Analyse sémiologique et Nomination de la pathologie mentale ou du fonctionnement présent. DIAGNOSTIC Les Nosographies utilisées ne sont pas uniquement psychiatriques Evolution probable de la maladie en tenant PRONOSTIC compte la personnalité et les éléments de l'entourage Supprimer, améliorer la pathologie (Psychothérapies, décisions sociales, TRAITEMENT Rééducations, etc.) 24 CHAPITRE 4 : LES PRATIQUES PROFESSIONNELLES I. LE PSYCHOLOGUE CLINICIEN A. Identité du psychologue clinicien 1. Sa formation Licence de Psychologie + Maitrise + DESS de Psychologie clinique ou Maitrise + DEA de Psychologie clinique + 6 mois de stage ou Master pro de Psychologie clinique ou Master de recherche de Psychologie + 6 mois de stage En plus Formations post universitaire en psychothérapie requises Thérapie personnelle fortement recommandée En Côte d’Ivoire, c’est une formation qui existe depuis 1975 à l’Université de Cocody et on peut compter chaque année autour de 800 étudiants en formation au Département de Psychologie. Cependant, le métier n’est pas à ce jour reconnu comme corps par la fonction publique. Beaucoup des étudiants formés intègrent ainsi d’autres secteurs à partir de concours nationaux ou en se prévalant de leur niveau de Master. Les principaux employeurs restent le secteur privé, les infrastructures gérées par les ONG et le domaine de l’éducation publique sous des appellations diverses : enseignant, enseignant-chercheur, conseiller d’orientation, employés des ministères, etc. La demande est cependant en forte évolution même si elle est limitée par les possibilités économiques de la population vue la défection du recrutement par l’état. A titre d’exemple, en France, sur 2 400 000 étudiants il y a en moyenne 45 000 étudiants de psychologie dans les Universités. Entre 1/3 et 1/4 finissent leur formation. Le flux annuel des étudiants formés à l'Université munis du titre de psychologue est d'environ 5000. Deux psychologues diplômés sur trois sont employés. Il y avait, en janvier 2020, 74 058 psychologues exerçant en France dont environ la moitié de cliniciens. La plupart des postes de psychologues cliniciens ont été créés entre les années 1960 et 1985, mais surtout à partir des années 1970, où se repère aussi, comme on l'a vu, une forte expansion 25 de l'intérêt pour la psychanalyse avec la demande accrue par l'émergence de nouvelles valeurs centrées sur l'épanouissement personnel et la réalisation de soi. À cette époque, le psychologue clinicien s'attachait à repérer son propre espace, entre les positions respectives du médecin, du psychanalyste et du directeur de conscience religieux. Le titre de psychologue publié en France en 1985, lui assure désormais un statut reconnu. La profession est soumise à un code de déontologie. 2. Domaines d’intervention Aux Etats- unis, le psychologue est défini non par son approche mais est directement formé par son domaine d’intervention (psychologue des entreprises, de la santé, psycho-oncologue, etc.) En France le psychologue a une formation de clinicien et ensuite se spécialise ou s’adapte à un domaine d’intervention. Le clinicien intervient, à l'heure actuelle, dans six domaines principaux : L'enfance et la famille Parfois le travail La santé La justice L'école et la formation L'exercice libéral A l’inverse de l’activité en libéral, dans l’exercice institutionnel, le psychologue est salarié et son activité est régie par une fiche de poste et un contrat de travail. Il intervient donc en collaboration avec d’autres professions et se situe dans des liens hiérarchiques. Lorsqu’il a le statut de libéral, il est soumis à toutes les charges et impôts attenants à son cadre d’exercice (loyers, salaires, assurances, taxes professionnelles, impôts sur le revenu, etc.) 26 Répartition des Psychologues par type d'activité Education nationale 25% Hôpitaux publiques 20% Institutions Justice privées(diverses) 2% 15% Recherche 3% Exercice libéral 25% Autres 10% En ce qui concerne les cliniciens, on avait en 1995 autour de 5500 psychologues dans les hôpitaux publics, 1500 dans les cliniques et hôpitaux privés, 9300 dans les institutions spécialisées, 4200 dans le secteur de la petite enfance, 4000 en libéral. On les trouve essentiellement dans : Les Organismes de formation : (Ecole d'infirmières - Foyer d'éducateurs - Formation professionnelle pour adultes - Conseiller Information Orientation- Universités- centres de formation continue) Les Etablissements pour enfants : IME, IMP, IMPRO, CMP (Institut Médico- Educatif, Institut Médico-Pédagogique, Institut Médico-Professionnel, Centre Médico- psychologique) - Centres Hospitalier pour enfants - Halte-garderie - Maison d'accueil - Lieu de parentalité- Maternité- Centres de rééducation- Aide sociale à l’enfance - Les Organismes pour adultes : CHS (Centre Hospitalier Spécialisé) - CHU - Associations spécialisées (Point d’écoute santé, centre d’accueil pour femmes battues, associations de demandeurs d’emploi, etc.) – SMP (Service-Médico-Psychologique) – Maisons de retraite – appartements thérapeutiques - Les Municipalités : les services de soins à domicile – Les structures de recherche : Les sociétés privées de recherche, les universités et centres de recherche Les structures judiciaires : Secteur pénitentiaire, structures médico-judiciaires Les écoles : (mais on a surtout des psychologues scolaires), les lycées et collèges. 27 Beaucoup d'étudiants en Master de psychologie clinique suivaient une cure psychanalytique de type orthodoxe et envisageaient la profession de psychologue clinicien comme un palier provisoire vers la carrière de psychothérapeute. En Allemagne et aux États-Unis, la psychanalyse orthodoxe semble avoir beaucoup moins de vitalité et de prestige qu'elle n'en conserve encore en France et dans un certain nombre de pays méditerranéens. En revanche, il existe dans ces deux pays une psychologie clinique nettement plus comportementaliste et beaucoup moins liée à la psychanalyse que la psychologie clinique française. Ce modèle anglo- saxon parait très bien implanté en Allemagne, mais aussi en Belgique. Aujourd’hui, une évolution s’effectue en France avec un meilleur équilibre dans les modalités psychothérapeutiques. B. Fonctions D'après Lagache, « La psychologie clinique a quatre buts principaux : le diagnostic... et le pronostic, le conseil, le traitement, l'éducation » (1951, 1955). Les formulations ultérieures proposées par d'autres auteurs modifieront à l'occasion quelque peu le vocabulaire de Lagache, mais sans ajouter rien d'essentiel à sa pensée. Anzieu (1982) définit les « grandes fonctions » de la psychologie clinique dans les termes suivants, à certains égards plus restrictifs : diagnostic, formation, expertise, éventuellement psychothérapie. L'ouvrage collectif de Perron habille l'ensemble des notions précédentes dans une formulation nouvelle sur certains points. Les fonctions du psychologue clinicien se définissent comme l'évaluation (Diagnostic et expertise), l'aide (le conseil, le soin - psychothérapie, thérapie familiale, cure institutionnelle - le soutien, l'accompagnement et le travail en institution), la prévention et l'éducation (formation). Ces fonctions délimitent un registre d'interventions multidimensionnel, ce qui distingue la tâche et la position du psychologue clinicien de celles du psychanalyste et des autres psychothérapeutes. II. LE CHAMP DE LA PRATIQUE A. Procédures de travail Dans ces divers contextes, le psychologue clinicien est amené à mettre en œuvre les techniques et les procédures les plus diverses, d'après l'énumération qu'en produisent les ouvrages de 28 caractère professionnel : Examen psychologique Supervision, Orientation, (Bilan psychologique) Encadrement Bilan de compétences, Diagnostic proprement Stages de Expertise, dit, perfectionnement Audit, Counselling, Séminaires, Prévention et traitement Entretien d'aide, Sessions pédagogiques, des conflits dans les Psychothérapie, Intervention dans les groupes Psychanalyse, réseaux Etc. Animation de groupes, organisationnels, Conduite de réunions, Recrutement, sélection, La variété des fonctions du psychologue clinicien présuppose, comme imposé par la pratique même, le caractère interdisciplinaire de la psychologie clinique, qui est au confluent d'un grand nombre de domaines et de modèles : psychiatrie et psychopathologie, psychanalyse, psychologie différentielle, psychologie de la personnalité, psychologie de la forme, psychologie génétique, psychologie sociale, phénoménologie, sans oublier de nos jours les théories systémiques ainsi que certaines contributions importantes de la psychologie cognitive et des neurosciences. Cet aspect inter-domanial de la psychologie clinique n'est pas toujours perçu de façon valorisante et positive par tous les auteurs, mais parfois de façon plus ambiguë. Par exemple, R. Perron qualifie la perspective interdisciplinaire de Lagache d' « œcuménisme ». La psychologie clinique donne parfois l'apparence, va-t-il jusqu'à dire, d'un « fourre-tout théorique». En tout état de cause, une vaste culture dans le domaine des disciplines psychologiques, dans celui éventuellement aussi de l'histoire des idées et des mentalités, est nécessaire au psychologue clinicien. En tant que psychologue, son activité est régie par un cadre déontologique (code de Déontologie des psychologues 2012) et des règles de confidentialité strictes. B. Les pratiques d’Evaluation La pratique du bilan psychologique est une des activités les plus communes des psychologues. Elle permet de répondre avec des arguments psychologiques à des demandes d’exploration 29 afin de contribuer au diagnostic, d’apporter les éléments permettant de définir une intervention ou stratégie thérapeutique, d’évaluer des changements après une prise en charge. Les outils du bilan sont : 1. L’entretien : Il s’agit surtout d’entretiens semi-directif et non directif 2. Les tests : a. Tests d’efficience i. Echelles d’intelligence : 1. Batteries mixtes : WISC, NEMI 2. Tests à base théorique : K-ABC, tests piagétiens 3. Tests de facteurs G (PM-38, D48, D2000), ii. Epreuves de développement (Brunet-Lézine) iii. Les tests d’aptitudes- (MEM, FCR, Alouette, FROSTIG, NEPSY, TEA-Ch, etc.) b. Les tests de personnalité i. Les tests psychométriques : 1. Questionnaires (16 PF, NEO-PI R - MMPI, etc.) 2. Tests objectifs de personnalité ii. Les tests projectifs (Rorschach, TAT, PN, Dessin de famille, etc.) 3. L’observation L’examen psychologique donne lieu à un compte rendu (synthèse) oral et/ou écrit à destination du patient et des tiers demandeurs (parents, école, psychiatre, neurologue, etc…) C. Les pratiques thérapeutiques Les suivis thérapeutiques constituent le domaine de prédilection du psychologue clinicien. De même que le bilan, cette activité est soutenue par des théories cliniques et psychopathologiques. Ces activités de suivi comprennent le soutien psychologique et les psychothérapies. 1. La thérapie de soutien C’est une forme de suivi qui consiste en un accompagnement dans « l’ici et le maintenant ». Il 30 s’agit de soutenir le patient dans une difficulté précise et circonstanciée. Il s’agit moins d’un travail d’introspection psychique que d’une mobilisation des ressources pouvant aider le patient à mieux gérer une situation source de déséquilibre et avec des répercussions sur sa dynamique psychologique. a) Ses indications Trois contextes sont généralement indiqués pour une thérapie de soutien : Problème spécifique en lien avec la santé o Acceptation difficile d’une hospitalisation, anxiété préopératoire, difficulté d’adaptation à une maladie, annonce d’une maladie grave, soutien aux proches d’un malade, soutien pendant des traitements lourds et contraignants, etc. Problème précis en rapport avec d’autres dimensions plus sociales o Accompagnement à la réinsertion sociale, procédures de divorce, deuil d’un proche, enfant en difficulté scolaire, violence conjugale, etc. Cadre d’intervention réduit o Patient en fin de vie, débriefing psychologique sur le lieu d’un drame, accompagnement pour une démarche personnelle difficile, etc. b) Ses méthodes Il ne s’agit pas d’une forme inférieure de psychothérapie. Elle a de véritable fonction d’encadrement psychique. Son objectif est de permettre au sujet de mieux gérer et s’adapter à une situation actuelle et de mieux la vivre. Elle peut avoir une dimension préventive ou aboutir à une autre psychothérapie. Les groupes de parole (à différencier des groupes d’auto-support), animés par des professionnels de la thérapie peuvent être perçus comme une forme de thérapie de soutien. On utilise l’entretien de face en face individuel ou en petit groupe, de suivi assez courte (maximum quelques mois). L’approche peut être d’orientation psychanalytique ou d’orientation humaniste avec l’approche centrée sur la personne de Carl Rogers. 2. Les psychothérapies Ce sont des modalités de prise en charge psychologique d’un trouble psychique chez un patient ou plusieurs (psychothérapies de groupe). Ce trouble peut être dû à un déséquilibre purement psychologique ou en répercussion d’un autre évènement (deuil, traumatisme, etc.) Les 31 modalités mises en place relèvent de la mobilisation des capacités en lien avec l’esprit humain, dans un cadre approprié. Elles visent à entrainer un changement permettant une meilleure qualité de vie, une souffrance moins importante ou mieux gérée, un bien-être psychologique. Les attributions d’un mal peuvent être diverses (possession, mauvais sort, problèmes magnétiques, circulation d’énergie, etc.) et les prises en charge variées (religieux, tradipraticiens, etc.). Cependant, on réserve le terme de psychothérapie à un type de prise en charge dans le champ des pratiques scientifiques des difficultés psychiques. Chaque psychothérapie est constitutive d’un modèle psychopathologique donné. L’essence de la psychothérapie est de mettre en place des moyens de nature psychologique afin d’agir sur le déséquilibre. Celui-ci peut être d’origine psychologique, environnemental ou somatique. Les psychothérapies peuvent avoir un effet physiologique sur le patient. Pour être appelé psychothérapie, une pratique doit posséder : Une intention thérapeutique en lien avec un savoir éclairé et validé par des données fondamentales et cliniques. Un champ d’expertise permettant d’avoir un regard fiable sur les éléments impliqués dans le processus utilisé et de pouvoir évaluer ces pratiques. Un lien direct avec une conception claire et déontologique de l’humain et une théorisation psychopathologique donnée. Ainsi, toute psychothérapie nécessite : La mise en place d’un cadre, en fonction des références théoriques Un thérapeute qui doit avoir des connaissances en psychologie et en psychopathologie et avoir reçu une formation adéquate Un relationnel singulier qui se développe entre le patient et son thérapeute dans ce cadre Une analyse stricte et permanente de l’évolution du patient et de la relation selon une grille de lecture donnée. 3. Les différents modèles thérapeutiques Ils se différencient par leurs techniques, et par les modèles théoriques utilisés. Nous avons ainsi : a) La psychothérapie psychanalytique Elle s’appuie sur la psychanalyse en tant que théorie et s’appuie sur les conflits inconscients comme base de certaines situations pathologiques, en particulier les névroses. Elle s’effectue 32 dans un cadre codifié (divan, séances, règle fondamentale, attention flottante), etc. Il consiste en l’analyse des productions verbales et du transfert pour identifier la dynamique inconsciente avec les fantasmes, les mécanismes de défense, les conflits. La cure type est un dispositif qui mobilise fortement le psychisme et ne peut être proposé à tous. Des dispositifs plus allégés existent comme les thérapies d’inspiration analytique, les thérapies mère-enfant, les thérapies brèves, les suivis ethnopsychanalytiques. b) Le modèle cognitif et comportemental (Thérapies cognitivo-comportementales : TCC) Il s’appuie pour l’aspect comportemental sur le Behaviorisme : Pavlov (théorie du conditionnement), Watson (Stimulus/Réponse), Skinner (Renforcements positifs et négatifs des comportements), Bandura (apprentissage vicariant par observation, efficacité perçue) et Seligman (Impuissance apprise) Pour l’aspect cognitif, il s’appuie sur la notion de traitement de l’information par des schémas cognitifs. On peut avoir ainsi des distorsions cognitives et des pensées dysfonctionnelles qui entrainent des interprétations inadaptées des situations. Les TCC vont chercher à déconditionner le patient, l’amener à faire des apprentissages sociaux et et à restructurer leurs pensées mais ne s’intéressent plus au symptôme qu’à l’histoire de vie. c) Les thérapies systémiques Le modèle systémique s’appuie sur les théories de la communication de l’école de Palo Alto. Elle considère le sujet comme faisant partie de systèmes qui ont des modes de fonctionnement propres et qui peuvent avoir des anomalies en particulier en ce qui concerne la communication qui peut devenir paradoxale. (1) Quelques autres Modèles On a aussi : (2) L’Analyse existentielle Elle développe l’approche phénoménologique. (3) L’hypnothérapie Elle utilise les différents courants de la pratique de l’hypnose : L’Hypnose Ericksonnienne (la plus répandue), L’Hypnoanalyse, et le Rêve Eveillé de Desoille (verbalisation des productions 33 imaginaires) (4) La Gestalt-thérapie Elle vient de la psychologie de la forme. Pour comprendre une conduite, il faut identifier l’ensemble plus grand auquel elle appartient avec ses lois perceptives. Elle vient de Fritz Perls. Elle met en jeu « l’ici et le maintenant » au niveau du corps, des émotions, des affects, des productions imaginaires et de la parole. (5) Les thérapies à médiation Elles sont médiatisées par une activité donnée. C’est l’objet qui est la base de travail et non la parole. Art-Thérapie : Dessin, peinture, sculpture, travail d’écriture, etc. Médiation corporelle : relaxation, sophrologie, training autogène, etc.) Les thérapies à médiation par l’animal (zoothérapie, équithérapie, etc.) Etc. (6) Choix et efficacité des psychothérapies Le choix des psychothérapies dépendra de la formation du psychologue et des indications de la méthode. On considère que quelle que soit la modalité de prise en charge, l’efficacité maximale se situe autour de 70 à 80% des cas quand l’indication est bien posée. 20% des patients n’ont pas d’amélioration et 10% peuvent connaitre une aggravation de leur situation. Les TCC restent les plus efficaces dans les troubles les plus répandues comme les troubles anxieux et les dépressions. Il est cependant difficile de comparer les méthodes quand on sait que 65% des processus de succès thérapeutique relèvent du patient, 25% du thérapeute (qualités personnelles, intégrité psychiques, maturité, qualités professionnelles, capacité d’expertise, pédagogique, etc.) et 10% de la technique elle-même. 34 CONCLUSION GENERALE En définitive, dès ses origines, la psychologie clinique présente deux tendances particulières, deux formes de mentalités, définies l'une par la « clinique armée » au moyen de tests, privilégiant les méthodes l'autre par la « clinique aux mains nues », c'est dire valorisant la relation d'entretien et très proche de la psychanalyse. D’un autre côté, on voit des évolutions allant dans le sens de rapprochements et d’éclairages mutuels des différentes tendances, dans des dimensions plus intégratives. Des tentatives pour développer une psychologie cognitive clinique existent et, par ailleurs, le renouveau des études sur la conscience (ainsi que l'inconscient), dans le cadre des sciences cognitives, pourrait entraîner des repositionnements. Les évolutions de psychologie clinique dénotent ainsi la richesse liée à son objet et à l’évolution de ses connaissances sur cet objet par les différentes disciplines avec lesquelles elle coopère. 35 QUELQUES AUTRES DEFINITIONS LA PSYCHANALYSE D'après la définition très souvent citée qu'en a donnée Freud lui-même, « psychanalyse est le nom 1) d'un procédé d'investigation de processus psychiques, qui sont à peine accessibles autrement ; 2) d'une méthode de traitement des troubles névrotiques, qui se fonde sur cette investigation ; 3) d'une série de conceptions psychologiques, acquises par cette voie, qui s'accroissent progressivement pour former une discipline scientifique nouvelle ». PSYCHIATRIE La psychiatrie, ou médecine mentale, est la branche de la médecine dont l'objet consiste dans l'étude et le traitement des maladies mentales. D'un point de vue différent, la psychopathologie, ou pathologie mentale, constitue une branche de la psychologie en même temps qu'une partie de la psychiatrie : elle en représente le versant théorique complémentaire, ou encore, peut-on dire, « la théorie de la pratique » (Bourdieu), En d'autres termes, la psychopathologie est une réflexion théorique sur la clinique psychiatrique, ou encore la théorie générale du fait psychiatrique. Autrement dit, la psychopathologie est une discipline fondamentale dont la psychiatrie représente le domaine d'application. LA PSYCHOTHERAPIE « La psychothérapie est une méthode de traitement des maladies psychiques utilisant comme moyen thérapeutique la relation entre le médecin et le malade sous la forme du rapport ou d'un transfert » (Roudinesco et Plon, p. 85). LA PSYCHOPATHOLOGIE De nos jours, la psychopathologie est l'objet de définitions multiples, dont le dénominateur commun est à peu près le suivant : il s'agit de l'étude des troubles mentaux, des maladies mentales, du fonctionnement mental anormal, soit encore de la psychologie des conduites pathologiques. 36 La psychopathologie est l’étude scientifique des troubles psychiques par la psychologie et la psychiatrie. La psychopathologie pose le problème de la définition et de la description des troubles, et de la différence entre le normal et le pathologique. Elle porte sur les critères diagnostiques des troubles et leur classification. Elle tente de comprendre les facteurs influençant ou causant les troubles, les mécanismes de mise en place et le développement et de développement des troubles, ce qui permet de proposer des traitements et d’évaluer des pronostics. Pour la psychologie en particulier, elle constitue une approche visant une compréhension raisonnée de la souffrance psychique. La psychopathologie ne doit être confondue ni avec la psychanalyse, ni avec la psychologie clinique. Ces trois disciplines ne sont pas isolées et encore moins comme opposées, mais plutôt articulées, dans leur indépendance, selon un rapport d'intégration historique et épistémologique hiérarchisé. La psychopathologie est à la fois le précurseur et le donateur le plus ancien de la psychologie clinique. ANAMNESE Ensemble des informations susceptibles d'être recueillies par le médecin ou le psychologue auprès du sujet et de son entourage pour connaitre l'histoire de sa maladie. 37 Références Bibliographiques BIOY A. FOUQUES D. (2008) : Psychologie Clinique et psychopathologie, Dunod, Paris, Collection Manuels visuels de licence, PEDINIELLI J. L. (2005) : Introduction à la psychologie clinique, Paris, Armand Colin PERRON R. (ss la dir) (2006) : La pratique de la psychologie Clinique REVAULT D’ALLONNES C. et coll (1999) : La démarche clinique en sciences humaines, Dunod, Paris, coll Psycho Sup SAMACHER R. (ss la dir) (1998) Editions BREAL, Rosny, collection Grand Amphi 38 Table des matières CHAPITRE 1 : FONDEMENTS DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE 1 I. LES ORIGINES 1 A. LA NOTION DE CLINIQUE 1 B. LES RACINES DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE 2 1. LA PSYCHIATRIE 2 2. LE MOUVEMENT HUMANITAIRE 3 3. LA PSYCHOLOGIE GENERALE ET EXPERIMENTALE 3 4. LA PSYCHOLOGIE DIFFERENTIELLE 4 5. LA PHILOSOPHIE DE LA VIE ET LA PHENOMENOLOGIE 4 C. LES FONDATEURS 4 1. WITMER LIGHTNER (1867-1956) 4 2. JANET PIERRE (1851-1947) 5 3. FREUD SIGMUND (1856-1939) 5 II. CONSTITUTION ET DEVELOPPEMENT DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE. 5 A. HISTORIQUE 5 B. CONCEPTIONS DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE 7 1. IDENTITE DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE. 7 2. QUELQUES GRANDS AUTEURS FRANÇAIS (PSYCHOLOGUES OU NON) ET LEUR CONCEPTION DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE 8 A) LES CONCEPTIONS VALORISANT LA CLINIQUE A MAIN NUE 8 39 (A) DANIEL LAGACHE 8 (B) JULIETTE FAVEZ-BOUTONIER (1903-1994). 9 (C) DIDIER ANZIEU (1923-1999) 9 (D) FRANÇOISE DOLTO (1908-1988) 10 B) LES AUTEURS DEVELOPPANT DES CONCEPTIONS OBJECTIVANTES 10 (A) HENRI PIERON (1881-1964) 10 (B) DANIEL WIDLÖCHER (1929-2021 ) 11 (C) LE MODELE ANGLO-SAXON 11 C. DEFINITION DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE 11 D. OBJET DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE 13 CHAPITRE 2 : CHAMPS ET CARACTERISTIQUES DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE 14 I. SPECIFICITES DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE 14 A. CARACTERISTIQUES DE LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE 14 1. L'HUMANISME 14 2. LA PLACE DE LA PSYCHANALYSE 14 3. LA CENTRATION SUR LA PERSONNALITE 15 4. LA METHODE CLINIQUE 15 B. LA NOTION DE PSYCHISME VUE PAR LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE 16 II. LES GRANDS CHAMPS ET COURANTS 16 A. LES GRANDS COURANTS 16 1. LA PSYCHOLOGIE D’OBEDIENCE GENERALE ET EXPERIMENTALE INFLUENCEE PAR LES NEUROSCIENCES 16 40 2. LA PSYCHOLOGIE D’OBEDIENCE PSYCHANALYTIQUE OU PSYCHODYNAMIQUE. 16 B. LES PRINCIPAUX CHAMPS D’ETUDE 16 1. COMPETENCE ET PERFORMANCES 17 2. PROCESSUS ET FONCTIONNEMENT MENTAL 17 3. LA CLINIQUE DE L’ACTIVITE PSYCHIQUE 18 CHAPITRE 3 : LA DEMARCHE EN PSYCHOLOGIE CLINIQUE 19 I. LES RELATIONS AVEC LES AUTRES DISCIPLINES 19 A. LA MEDECINE 19 B. LA PHILOSOPHIE 19 C. LA PSYCHANALYSE 20 D. LA PSYCHOPATHOLOGIE 21 II. LA DEMARCHE EN PSYCHOLOGIE CLINIQUE 21 A. CARACTERISTIQUES DE LA DEMARCHE CLINIQUE 21 B. DIFFERENCIATION DE LA DEMARCHE MEDICALE ET DE LA DEMARCHE PSYCHOLOGIQUE EN PSYCHOPATHOLOGIE 22 1. LA METHODE DIAGNOSTIQUE UTILISEE EN PATHOLOGIE MEDICALE 23 2. LA METHODOLOGIE DIAGNOSTIQUE UTILISEE EN PSYCHOLOGIE CLINIQUE 24 CHAPITRE 4 : LES PRATIQUES PROFESSIONNELLES 25 I. LE PSYCHOLOGUE CLINICIEN 25 A. IDENTITE DU PSYCHOLOGUE CLINICIEN 25 1. SA FORMATION 25 2. DOMAINES D’INTERVENTION 26 41 B. FONCTIONS 28 II. LE CHAMP DE LA PRATIQUE 28 A. PROCEDURES DE TRAVAIL 28 B. LES PRATIQUES D’EVALUATION 29 1. L’ENTRETIEN : 30 2. LES TESTS : 30 3. L’OBSERVATION 30 C. LES PRATIQUES THERAPEUTIQUES 30 1. LA THERAPIE DE SOUTIEN 30 A) SES INDICATIONS 31 B) SES METHODES 31 2. LES PSYCHOTHERAPIES 31 3. LES DIFFERENTS MODELES THERAPEUTIQUES 32 A) LA PSYCHOTHERAPIE PSYCHANALYTIQUE 32 B) LE MODELE COGNITIF ET COMPORTEMENTAL (THERAPIES COGNITIVO- COMPORTEMENTALES : TCC) 33 C) LES THERAPIES SYSTEMIQUES 33 (1) QUELQUES AUTRES MODELES 33 ON A AUSSI : 33 (2) L’ANALYSE EXISTENTIELLE 33 (3) L’HYPNOTHERAPIE 33 (4) LA GESTALT-THERAPIE 34 42 (5) LES THERAPIES A MEDIATION 34 (6) CHOIX ET EFFICACITE DES PSYCHOTHERAPIES 34 CONCLUSION GENERALE 35 QUELQUES AUTRES DEFINITIONS 36 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 38 43