Le sujet - Cours de Philosophie
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Ce document présente un cours sur le sujet en philosophie, couvrant des notions comme les caractéristiques d'un sujet souverain, les remises en question du sujet classique et la question de la liberté du sujet.
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Le Sujet I. Les caractéristiques du sujet souverain II. Les remises en cause du sujet classique III. La question de la liberté du sujet Introduction (activité découverte) Chercher tous les sens du mot « sujet » Isoler le sens ou la définition qui nous semble la plus intéressante...
Le Sujet I. Les caractéristiques du sujet souverain II. Les remises en cause du sujet classique III. La question de la liberté du sujet Introduction (activité découverte) Chercher tous les sens du mot « sujet » Isoler le sens ou la définition qui nous semble la plus intéressante sans exclure pour autant les autres Essayer de définir le concept : qu’est-ce que le sujet ? A quoi s’oppose-t-il ? Quel est son contraire ? Qui ou quoi est sujet ? De quoi est composé un sujet ? Questionnement possible sur le concept de sujet I. Les caractéristiques du sujet souverain A) La définition du sujet 1) Subjectum : ce qui est dessous Le mot « sujet » vient du latin subjectum qui signifie « ce qui est dessous ». Le terme de sujet a donc un sens très large. Dans les textes du Moyen-Âge, il ne désigne pas uniquement l'être humain mais n'importe quelle réalité. Ce terme est d'ailleurs utilisé dans le langage commun dès qu'on évoque une substance ou un support : on parle de sujet d'un verbe, de sujet d'un examen, de sujet d'une discussion, etc. I. Les caractéristiques du sujet souverain 2) L’opposition entre sujet et objet Dans la philosophie moderne, le sujet désigne plus précisément ce qui s'oppose à l'objet. La première supposition tient donc à l'existence d'une âme ou d'une subjectivité. C'est pour cette raison qu'on distingue le sujet de l'objet, mais aussi de l'animal. On retrouve également cette opposition entre sujet et objet en grammaire. I. Les caractéristiques du sujet souverain B) Le Cogito cartésien 1) Un sujet pensant Le Cogito cartésien est le raisonnement de Descartes selon lequel la certitude première est celle de la conscience de soi (« je pense donc je suis » en latin « cogito ergo sum »). Elle est à la base de l'opposition entre l'homme et l'animal, de la supériorité de la conscience sur le corps et de la conscience du monde. La première caractéristique du sujet mise en avant par le Cogito cartésien est d'être un sujet pensant. Descartes prouve en effet l'existence d'une substance pensante (esprit ou âme). Même lorsque j'applique le principe du doute méthodique en remettant en question tout ce qui est extérieur à moi, je peux toujours dire « je doute » donc « je pense » et donc j'existe (« je suis »). Descartes pose donc l'existence de la conscience comme une première certitude indubitable. I. Les caractéristiques du sujet souverain 2) Un sujet immédiat avec lui-même Le sujet est d'autre part capable de se saisir lui-même de manière immédiate. Selon la technique du doute méthodique mise en place par Descartes dans le Cogito, il faut d'abord douter du monde entier pour ensuite acquérir des certitudes. En doutant, il ne reste rien d'autre de certain que la conscience, et cela suffit pour s'affirmer en tant qu'être pensant. La conscience a donc la particularité de n'avoir besoin d'aucune médiation pour rendre compte d'elle-même : la conscience possède une relation immédiate à elle-même. I. Les caractéristiques du sujet souverain C) Un sujet unificateur 1) Le pouvoir unificateur de la conscience On ne peut parler de sujet que s'il y a persistance d'un fond qui demeure identique. Or l'homme connaît dans sa vie beaucoup de changements et sa personne est constituée de multiples pensées, réactions, goûts, etc. L'homme est sujet car il possède la capacité d'unifier tous ces éléments : c'est le pouvoir unificateur de la conscience. I. Les caractéristiques du sujet souverain 2) Le pouvoir de dire « je » Être sujet, pour Kant, c'est en effet avoir la capacité d'unifier toutes ses représentations. Seul l'homme, à partir d'un certain âge, a le pouvoir de dire « Je ». L'utilisation de ce simple pronom est la concrétisation exacte de la capacité du sujet à se représenter comme un sujet « transcendantal », c'est-à-dire un sujet unifié. Kant montre donc que le sujet a un pouvoir unificateur, qui se matérialise dans le pouvoir de dire Je. « Le je pense doit pouvoir accompagner toutes mes représentations. » Critique de la raison pure, Kant, 1781 II. Les remises en cause du sujet classique A) Une souveraineté remise en question 1) Le produit des circonstances extérieures Étant soumis à des déterminations extérieures, le sujet peut être considéré comme produit plutôt que comme principe ou origine. Pour Marx, le sujet est en effet un produit de sa « classe » sociale et de ses « conditions matérielles d'existence ». Tout sujet est donc soumis à des déterminismes majeurs, il n'est pas entièrement libre de ses pensées ni de ses actions. « Ce n'est pas la conscience des hommes qui détermine leur existence, c'est au contraire leur existence sociale qui détermine leur conscience. » Critique de l'économie politique, Marx, 1859 II. Les remises en cause du sujet classique 2) Le produit de l'inconscient Freud remet en question le concept de sujet souverain. En chaque homme, il se déroule un certain nombre de processus qui ne sont pas accessibles à la conscience et qui relèvent de l'inconscient. Ces processus trouvent souvent leur origine dans l'histoire antérieure de l'individu et ses relations avec les autres, éléments qui sont conservés à son insu. L'inconscient désigne, au sens de Freud, une entité psychique autonome intérieure à chacun et inaccessible à la conscience. Le sujet y refoule des images et des idées qui correspondent à ses pulsions inconscientes. Le sujet ne peut donc pas avoir une connaissance transparente ni une véritable maîtrise de lui-même. Ainsi, au lieu de dire « je pense », chacun devrait dire « ça pense ». C'est ce que défend aussi Rimbaud lorsqu'il dit « Je est un autre ». Le sujet n'est jamais véritablement ce qu'il pense être. « C'est faux de dire : je pense ; on devrait dire on me pense. Pardon du jeu de mots. Je est un autre. » Lettre à Georges Izambard du 1er mai 1871, Rimbaud II. Les remises en cause du sujet classique B) Un sujet produit par le langage 1) La subjectivité du discours Pour certains linguistes, on ne peut pas parler de sujet au sens métaphysique ou psychologique. Si le sujet existe, c'est uniquement parce qu'il y a une « subjectivité du discours », étant donné que dire « je » est complètement différent de dire « il ». Le sujet est donc simplement un produit du fonctionnement du langage. II. Les remises en cause du sujet classique 2) Le « moi » ou le « soi » Avant Freud, Nietzsche montre déjà que la souveraineté du sujet n'est qu'une illusion. En fait, le sens et la conscience sont les jouets d'un « soi », qui est le maître des pensées et des sentiments du « moi ». Pour lui, comme pour les linguistes, la prééminence du « je » comme chez Descartes n'est qu'une affaire linguistique. Le sujet est une illusion créée par le langage. « Derrière tes pensées et sentiments, mon frère, se tient un maître plus puissant, un sage inconnu qui a nom soi. Il habite ton corps, il est ton corps. » Ainsi parlait Zarathoustra, Nietzsche, 1883 – 1885 II. Les remises en cause du sujet classique C. Une réaffirmation nécessaire du sujet Bien que le sujet soit victime d'une certaine détermination extérieure, du fait de son passé et de ses conditions d'existence, il peut toujours se réaffirmer. Comme le dit Freud, l'homme doit retrouver son autonomie, en repérant et en prenant connaissance des éléments qui influencent sa conduite et son être. C'est précisément le but de la cure psychanalytique. La psychanalyse est une méthode d'investigation psychologique visant à élucider la signification inconsciente des conduites, et dont le fondement se trouve dans la théorie de la vie psychique formulée par Freud. C'est pourquoi l'inconscient ne peut servir d'excuse à l'homme, car il possède des moyens d'accéder à une certaine connaissance et donc une maîtrise de lui-même. Il est du devoir du sujet de connaître ce qui le gouverne. « Là où était le ça, le je doit advenir. » (Wo Es war Soll Ich werden) Freud III. La question de la liberté du sujet A) Un sujet libre qui agit selon le futur Selon Freud, c'est l'inconscient produit par le passé qui influence le sujet. Ernst Bloch voit les choses différemment. Pour lui, toute action présente du sujet est faite par anticipation du futur, qu'elle soit consciente ou non. On agit selon ses projets, ses rêves, ses désirs, son imagination, etc. Bloch défend donc le concept d'« inconscient du futur » pour désigner toutes ces représentations qui influencent le sujet. Cette manière de voir le sujet défend sa capacité de décider de ses actes selon ses désirs, donc sa liberté. III. La question de la liberté du sujet B) L'hypothèse d'une liberté totale du sujet 1) L'indétermination et la liberté D'autres auteurs défendent une indétermination originelle et donc une liberté totale du sujet. Pour Sartre, c'est l'existence et non l'essence qui définit le sujet. Le sujet ne peut en effet avoir une définition figée, car il est sans cesse en mouvement, il est libre. Aucune norme ne peut prédominer sur l'action, c'est pourquoi le sujet est totalement responsable de chacun de ses choix. L'inconscient n'existe donc pas ou n'est qu'un acte de « mauvaise foi », car il concerne ce que le sujet préfère ignorer. « L'existence précède l'essence. » L'existentialisme est un humanisme, Sartre, 1945 III. La question de la liberté du sujet 2) La responsabilité, conséquence de la liberté Un sujet libre devient forcément un sujet responsable. Comme le dit Sartre, puisqu'on peut décider librement de ses actions, c'est se voiler la face et faire preuve de mauvaise foi que de tenter d'échapper au sentiment de responsabilité. En vérité, le sujet se doit d'assumer chacune de ses actions car il l'a accomplie en toute conscience et en toute liberté. « L'homme est condamné à être libre. » L'existentialisme est un humanisme, Sartre, 1945 III. La question de la liberté du sujet C) L'homme réduit à la passivité En revanche, d'autres auteurs décident de nier à l'homme toute liberté, en se basant sur les apports de la psychanalyse, de la linguistique ou des sciences humaines. Michel Foucault déclare ainsi la « mort de l'homme » dans Les Mots et les Choses (1996). Dans certains travaux ultérieurs, Foucault évoque cependant les efforts de l'homme pour conquérir sa liberté et demeurer sujet de son existence. Pour certains auteurs, il n'existe donc ni autonomie ni action authentique de l'homme sans un réel travail sur soi. Résumé La conception classique du sujet est celle d'un sujet souverain, capable de penser, d'avoir une relation immédiate avec lui-même et de s'unifier. Cependant, cette vision du sujet a été maintes fois remise en cause, le sujet étant vu comme un produit de circonstances extérieures, de l'inconscient, ou d'une habitude linguistique. Se pose alors la question de la liberté du sujet, considéré comme libre de toute détermination originelle ou au contraire privé de toute liberté.