Synthèse neuropsychologie, psychologie cognitive et psycholinguistique PDF
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This document provides a synthesis of neuropsychology, cognitive psychology, and psycholinguistics, focusing on cognitive functions, perception, and experimental approaches. It includes examples and discussions of different aspects of human cognition. The document also examines the relationship between cognitive psychology and other fields, such as social psychology and psychopathology.
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**Synthèse neuropsychologie, psychologie cognitive et psycholinguistique** **Chapitre 1 -- La cognition** Section 1 : de quoi on parle ? 1. La cognition Qu'est ce que la cognition... ? Prenons des exemples pour le comprendre intuitivement : [Exemple 1] : bien qu'on ait l'impression que la peti...
**Synthèse neuropsychologie, psychologie cognitive et psycholinguistique** **Chapitre 1 -- La cognition** Section 1 : de quoi on parle ? 1. La cognition Qu'est ce que la cognition... ? Prenons des exemples pour le comprendre intuitivement : [Exemple 1] : bien qu'on ait l'impression que la petite fille s'enfonce dans le sol (photo), elle est belle et bien accoudée à un muret. Il semblerait que l'on perçoive autre chose que ce qui est physiquement présent dans le monde (et sur la photo). [Exemple 2 ]: qu'entend-on si une personne nous répète 20 fois une même paire de syllabes, les 3 premières en regardant la personne et les 3 suivantes ayant les yeux fermés... ? [Exemple 3 ]: bien qu'on regarde autant de temps qu'on le veuille cette alternation de deux photos différentes, on ne va pas voire la différence, pourtant il y a un changement. Comment est-ce possible de ne pas le remarquer ? [Exemple 4] : si on nous demande ce qu'on faisait le jeudi 21 septembre 2023 à 10h24, il est fort probable qu'on pense ne pas s'en souvenir alors que si on réfléchit... On peut se rappeler que c'était un lundi et qu'on avait probablement X cours. Si c'est le cas, on peut alors répondre. Ces 4 exemples renvoient à des domaines de la psychologie cognitive : perception (1&2), attention (3) et mémoire (4). Ce sont des **fonctions cognitives** : activités de notre esprit qui nous permettent d'être en interaction avec notre environnement. - « Esprit » = ensemble des capacités mentales propres au système nerveux central. ![](media/image2.jpeg)Dans notre vie, nous traitons des informations de notre réveil au moment où on se couche (lumière, sons, etc.) grâce à ces fonctions cognitives. Cette activité mentale de **traitement de l'information** par notre cerveau définit ce qu'on appelle la **cognition humaine**, c'est notre « **appareil à penser **». Les infos reçues sont le socle de notre vie mentale, sans perception, attention, mémoire, prise de décision, langage, raisonnement,... impossible de faire quoi que ce soit ! - L'objet de la psychologie cognitive est d'étudier les fonctions cognitives pour expliquer la vie mentale humaine. - Psycholinguistique = champ d'étude qui s'intéresse aux processus cognitifs mis en œuvre dans le traitement et la production du langage. 2. Psychologie cognitive et autres domaines La complexité de la cognition amène deux conséquences : 1. La place de la cognition au-delà de la psychologie cognitive. On ne s'intéresse pas à la cognition juste dans le domaine de la psychologie cognitive. Un champ de recherche porte sur la cognition sociale, au carrefour de la psychologie sociale et de la psychologie cognitive. Il est aussi apparu la psychopathologie cognitive -- but ? examiner en quoi les dysfonctionnements cognitifs contribuent au développement ou au maintien de symptômes psychopathologiques et des difficultés qui y sont associées. 2. Contacts entre la psychologie cognitive et d'autres champs. La psychologie cognitive s'est développée au contact d'autres disciplines. Parfois la rencontre entre deux domaines a donné un nom à un troisième domaine. La neuropsychologie cognitive s'intéresse au cerveau des patients, en tant qu'objet d'étude. Il a commencé à se développer en s'intéressant à la localisation des fonctions psychologiques du cerveau. Exemple de Paul Broca (chirurgien du 19^e^ siècle) : bien plus complexe aujourd'hui... *Mr Leborgne a un sévère déficit du langage à la suite d'une grosse crise d'épilepsie. Totalement valide et intelligent, il comprend tout ce qu'on lui dit mais ne sait répondre que par « tan » (**aphasie** : perte de la capacité à parler). Post-mortem, P. Broca ouvre le cerveau du patient et découvre une lésion Dans une partie de la région frontale du cerveau du côté gauche. Il en a donc conclu que cet endroit (appelé l\'**aire de Broca**) était responsable de la capacité à parler.* La neuropsychologie cognitive s'intéresse au fonctionnement cognitif et pas juste à la structure du cerveau) comme la psychologie cognitive. La différence est que : - La neuropsychologique cognitive étudie la cognition à travers des patients ayant des troubles cognitifs (**acquis/développementaux**) dont l'origine est dans le cerveau. - La psychologie cognitive étudie le fonctionnement cognitif en examinant comment des personnes avec des habilités cognitives normales (« **personne saine **») effectuent des tâches. Étudier le fonctionnement permet non seulement de comprendre le fonctionnement cognitif de l'être humain mais aussi de développer de la **réhabilitation**. Les neuropsychologues clinicien.nes aident les patients à retrouver leur fonctionnement cognitif normal ou à ralentir le déclin des fonctions cognitives. - Les neurosciences sont l'ensemble des disciplines qui étudient le système nerveux, depuis l'échelle moléculaire jusqu'au niveau des organes. Section 2 : Comment étudier la cognition ? 1. L'expérimentation La plupart du temps, nos intuitions sont fausses ou **non généralisables**. Elles ne permettent pas une conclusion valable pour tous, tandis qu'en études scientifiques en psychologie, on cherche un caractère commun ou universel. On utilise principalement l'**expérimentation**. - Expérimentation = faire des expériences dans lesquels des facteurs sont explicitement manipulés tandis qu'un ou plusieurs autres facteurs sont mesurés. Facteurs manipulés = variables indépendantes ; facteurs mesurés = variables dépendantes. Les processus cognitifs sont souvent non conscients ou se déroulent si rapidement que les intuitions ne fournissent aucun guide, l'**introspection** non plus... 2. La démarche expérimentale La recherche en psychologie s'inscrit dans le cadre d'une démarche expérimentale (paire avec l'expérimentation). Le but de la science est de comprendre des phénomènes, d'accumuler des connaissances sur des phénomènes, en se basant sur des théories et des hypothèses. - Théorie = proposition scientifique pour expliquer un phénomène. - Hypothèse = une des parties de la théorie pour expliquer un aspect précis du phénomène étudié. Elle est admise provisoirement avant d'être soumise au contrôle de l'expérience. Si on admet la théorie que : la lecture est automatique, on a donc une hypothèse testable. À partir de là, on peut imaginer la tester. On donne des listes de mots (« bleu » écrit en rouge, « vert » écrit en jaune, etc. VS « bleu » écrit en bleu, « vert » écrit en vert, etc.) et on demande de dire la couleur des mots sans lire le mot. Si les résultats sont meilleurs dans le deuxième cas, cela signifie que l'hypothèse est correcte. - Ce qui est manipulé : « type de liste » = VI - Ce qui est enregistré : « nombre d'erreurs » = VD Si la hypothèse n'est pas validée, c'est que soit la hypothèse de départ n'est valide (affaiblissant l'ensemble de la théorie, soit l'expérience n'était pas adéquate en fonction de l'hypothèse. **Stimulus** : « cause externe ou interne capable de provoquer la réaction d'un organisme vivant ». La relation **théorie-hypothèse-expérience** n'est la seule méthode !! Il faut bien retenir que : - Les théories ne tombent pas du ciel, elles découlent d'autres expériences. Une théorie n'est viable que si les hypothèses qui en découlent sont confirmées. - La science avance à petit pas. Pour qu'une théorie soit solidement étable, il va falloir lui apporter des expérimentations (plusieurs fois pour voir si on a les mêmes résultats). - La science est une affaire collective. - La route n'est pas toujours droite. Sur base d'expériences qui vont « nulle part », les chercheurs.es vont réfléchir. - Les théories scientifiques ne sont pas immuables, on procède par essais-*erreurs*. Si des scientifiques ne sont pas d'accords entre eux, ils peuvent finir par utiliser la même expérience et tomber d'accord. Les théories sont constamment renouvelées. **\ ** **Chapitre 2 -- La perception** Section 1 : C'est quoi la perception But ? Comprendre la base de toute vie mentale. La vie mentale, orchestrée par notre cerveau, commence par de la prise d'informations. Ensuite, cette information est traitée et c'est ce que nous allons voir dans ce chapitre. 1. [Comprendre le terme « perception » ] On ne sait pas réellement définir ce qu'est la perception et pour ça qu\'on donne juste des synonymes. Lorsque on perçoit quelque chose, c'est souvent dans le contexte de nos sens ; entendre le chant d'un oiseau, voir un vélo, un glaçon sur notre peau, reconnaitre de la joie sur un visage. Ces quatre situations simples engagent différents mécanismes, décrits comme la **sensation**, la **perception** et **l'identification**. - **Sensation** = recevoir une stimulation physique via ses sens + l'encoder dans notre SN (Aschraft, 1998). Base de notre vie mentale : recevoir des ondes lumineuses via nos yeux / ondes sonores via nos oreilles =\> traduites en signaux électriques / chimiques (ex : potentiels d'actions qui se propagent le long des axones des neurones). - **Perception** = basé sur ces signaux et correspond aux processus par lesquels on interprète ces informations transmises par nos sens. - **Identification** (/ **reconnaissance**) = assigner le produit de la perception (« percept » ou « représentation perceptive ») à une catégorie mentale, càd un ensemble d'objets encodés en mémoire pour lesquels on a déjà des informations. - La perception ne mène pas toujours à l'identification !! ![](media/image4.jpeg) Exemple : 1. En regardant ces deux figures, nos yeux perçoivent des ondes lumineuses qui excitent des neurones présents au fond de nos yeux =\> **sensation**. 2. Notre cerveau perçoit alors des contours droits / courbés avec un contraste plus fort au centre qu'en arrière-plan =\> **perception**. 3. Dans un cas seulement, notre cerveau va très rapidement associer la représentation perceptive à une catégorie mentale (catégorie des triangles) =\> **identification** / **reconnaissance**. - On a ici la preuve qu'on peut percevoir sans spécialement identifier ! On peut aussi se demander si... - Percevoir = identifier ? Non ! - Percevoir = voir ? Non, on peut percevoir avec d'autres sens ! - Percevoir = devenir conscient ? Non, on peut avoir vu quelque chose sans avoir l'impression ! Définition de la perception : processus par lequel on interprète les informations transmises par nos sens. Si la perception n'existait pas, les autres fonctions cognitives n'existeraient pas ! 2. [Les organes utilisés pour voir ] La perception repose sur la sensation via nos 5 sens. Les cellules et les tissus spécialisés es organes sensoriels reçoivent des stimuli bruts qu'ils traduisent en des signaux que le système nerveux peut utiliser. Des nerfs relaient alors ces signaux vers le cerveau qui les interprète au cours du processus de perception. Même si nos cinq sens peuvent nous permettre d'étudier la perception, les deux principaux sont la vue et l'ouïe, pourquoi... ? - La présence des personnes avec des déficiences auditives et visuelles a intensifié les recherches scientifiques. - Il a été démontré que la vision est le sens dominant dans le fonctionnement humain. Gibson (1933) a montré que la vision prend le dessus sur le toucher quand les infos sont contradictoires. 3. [Comprendre la perception est un défi !] Nous percevons, la plupart du temps, sans aucun effort, sans même que nous en ayons conscience et de façon extrêmement rapidement (quelques fractions de secondes). C'est pour cela que la perception est si complexe à étudier. On peut aussi se dire que les ordinateurs sont plus intelligents que nous mais ils n'ont pas les compétences de perception d'un enfant de 5 ans ! Ils sont incapables d'identifier des formes. 4. [La perception est une construction ] La plus grosse idée reçue, c'est que la perception est simplement des copies du monde extérieur. Mais il y a un problème avec cette idée, appelée « **réalisme** **naïf** », c'est que c'est faux ! Les processus perceptifs ajoutent des « choses » et des interprétations à ce qui est disponible via nos organes sensoriels. Illustration 1 : les illusions ![](media/image6.jpeg)Lorsque nous voyons ces deux flèches, nous avons tendance à dire que celle du dessus est plus longue que celle du dessous, alors que nous savons que c\'est une illusion et que nous sommes trompés. Ceci est encore une preuve que percevoir, ce n'est pas voire. Idem pour ces deux carrés de lignes. On aurait tendance à dire que celles de gauche sont obliques, alors qu'elles sont parallèles, tout comme la figure de droite. On pourrait dire que ces illusions sont juste des erreurs de perception. On considère plutôt que les illusions sont des manifestations de mécanismes qui interviennent dans toutes les situations perceptives. Les illustrations ne montrent donc pas tant les limites de notre système, mais plutôt comment il s'adapte aux situations ambiguës. D'autre illusions ont prouvé que la perception consiste en une interprétation de l'information sensorielle et que nous construisons ce que nous voyons. Le deuxième problème avec le « réalisme naïf », est qu'il ne donne aucune explication sur comment la perception se déroule : dire « ce que je perçois, c'est ce que je vois » ne donne pas d'informations sur les mécanismes en jeu. Section 2 : Base de la perception visuelle On ne peut pas comprendre la perception sans connaitre le fonctionnement de base des systèmes physiologiques associés aux modalités sensorielles. Il y a des choses que nous ne pouvons pas percevoir, non pas parce que nous aurions les limites cognitives, mais parce que les caractéristiques de nos systèmes sensoriels imposent des restrictions sur nos capacités perceptives. 2.1 [Quelques notions d'anatomie ] La lumière est une **radiation** **électromagnétique** semblable aux autres si ce n'est qu'on est équipés d'un organe sensoriel spécialisé pour la détecter ; l'œil. - Radiation électromagnétique = mode de propagation de l'énergie dans l'espace. Un classement des rayonnements électromagnétiques a été crée en fonction de leur longueur d'onde : On peut voir que seule une petite partie est visible par l'être humain. On appelle ça la « **lumière visible** ». La lumière blanche (ex : soleil) envoie un mélange égal de toutes les longueurs d'onde dans toutes les directions, les rayons lumineux. Ils sont constitués de photons (particules d'énergie) et peuvent varier en longueur d'onde et intensité. Quand ces rayons lumineux traversent des éléments, il se produit des phénomènes... : - L'**absorption** : des photons rentrent en collision avec de la matière, perdent leur énergie et disparaissent. - Une autre partie est **réfléchie** : quand un rayon frappe une surface sombre, la surface absorbe la plupart de la lumière mais quand cette surface est claire, les photons sont réfléchis. Des surfaces absorbent différentes longueurs d'onde dans des proportions différentes et diffusent les différentes longueurs d'onde dans des proportions différentes, ce qui donne les couleurs. - Synthèse : lorsque les rayons lumineux rencontrent de la matière, leurs caractéristiques changent. Les nouvelles caractéristiques rentrent dans nos yeux et portent les informations sur les éléments rencontrés avant, et c'est ce que notre œil va traiter. ![](media/image8.jpeg)Quand les ondes lumineuses (OL) rentrent dans l'œil, elles traversent différentes espaces dont le **cristallin**. Il focalise la lumière venant des objets observés vers les récepteurs sensibles à la lumière -- il permet que la projection de l'image soit nette sur la rétine. (Une image n'est en réalité qu'un patron d'énergie lumineuse traduit) La rétine est composée de 3 niveaux de neurones : cônes et bâtonnets (CB), bipolaires et ganglionnaires. Les CB tapissent la rétine et sont stimulés en 1^e^ par les OL, ce sont les récepteurs spécialisés de la lumière (la lumière doit d'abord traverser les 2 premiers niveaux de cellules + vaisseaux sanguins avant d'atteindre les CB). Ils contiennent des **photos-pigments**, ils se transforment en absorbant la lumière et créent un influx nerveux qui se transmet aux neurones suivants. Les récepteurs sensoriels traduisent l'énergie extérieur en énergie bio-électrique. Une fois les CB activés par la lumière, ils transmettent le message aux cellules bipolaires, qui le transmettent aux cellules ganglionnaires. Les longs axones de ces cellules convergent et sortent par l'arrière de l'œil, formant le **nerf optique.** ![](media/image10.jpeg)On a un nerf optique par œil : tous les axones de la partie gauche se regroupent au **chiasma optique** et vont vers l'**hémisphère gauche** (idem pour la droite). Les nerfs optiques filent à travers le cerveau pour atteindre le **lobe occipital** où le **cortex visuel primaire** est. Ce CVP est divisé en plusieurs zones (de V1 à V8 + MT/VS) en fonction de leur spécialisation fonctionnelle : V4 pour la couleur, V3+V4 pour la forme, V3 pour le mouvement, V1+V2 distribuent les signes aux aires appropriées. Il existe 4 systèmes qui traitent en parallèle les diverses caractéristiques d'un objet. La tâche aveugle : notre œil est tel qu'il y a un endroit de la rétine où il n'y a pas de neurones. Comme il n'y a pas de neurones pour traiter l'information, nous sommes aveugles à la lumière projetée sur cette surface. Comme les TA ne coïncident pas, on pourra toujours percevoir les objets car au moins un des deux yeux capte l'information mais sous un certain angle, si l'objet n'est vu que par un seul œil, il peut être occulter. L'acuité, les CB : les CB ne se répartissent pas uniformément sur la rétine donc on peut voir 3 zones : **fovea** (0,5-1mm) de diamètre), **parafovea** (3-4mm), **zone périphérique**. La fovea et la parafovea forment la **macula** lutea : quand on fixe un objet, c'est dans la macula lutea que les images se projettent. Seule la macula lutea permet de capter des détails avec une précision bien plus importante que la fovea et parafovea, pourquoi ? Parce qu'elle est remplie de C (petites cellules concentrées dans l'espace), qui ont besoin de beaucoup d'E lumineuse pour fonctionner et qui codent pour les couleurs et les détails précis. Les B sont très sensibles aux variations de lumière et permettent de voir dans la pénombre (mais pas les couleurs !). Les CB sont distribués différemment sur la membrane rétinienne parce que les C sont concentrés dans la zone fovéale. 2.2 [Collecte de l'information visuelle] On pense souvent que lorsqu'on regarde autour de nous on capte de l'information en continue, mais c'est faux. En réalité on passe d'un point à un autre très rapidement : **saccades** (25 et 100ms). Elles sont interrompues par des pauses où notre regard se fixe sur un point de la scène visuelle : **fixations** (150-250ms). Nos yeux alternent constamment entre saccades et fixations, pourquoi ? Il n'y a qu'une zone de la rétine qui code pour les informations visuelles précises : dans la macula lutea, la fovea. On a besoin de faire correspondre l'objet fixé avec cette zone sensible aux détails. Pendant les saccades, il n'y a pas de prise d'information : **suppression saccadique** ! Pendant une saccade, la lumière change tout le temps et ne permet pas de recevoir une information claire, il y a des mécanismes physiologiques de blocage. La prise d'information se fait pendant les fixations, entre deux saccades. La durée d'un cycle complet (*fixation-puis-saccade*) est de 200-300ms (entre 3, 4 et 5 cycles/seconde). Chaque cycle enregistre une scène visuelle distincte et séparée. Les informations du monde extérieur nous viennent de manière discrète et non continue. En cognitive, on dit qu'on **échantillonne** différentes régions de la scène visuelle. 2.3 [Mémoire sensorielle visuelle] Où va l'information ? Ces informations vont dans la **mémoire sensorielle visuelle** (= « **mémoire iconique **» - Neisser, 1967) mais sont maintenues que pour un bref instant. Exemple (Aschraft, 1998) : lorsqu'on regarde des éclairs, on peut, grâce à la lumière, distinguer le jardin. En réalité, un éclair est constitué de 3, 4 brefs éclairs mais nous ne percevons qu'un flash de lumière de +/- 1seconde. On appelle ça la **persistance visuelle** : il y a une persistance visuelle au-delà de sa durée physique. On a souvent l'impression de pouvoir explorer la scène visuelle et qu'elle s'estompe progressivement. Notre perception du jardin éclairé au-delà de 200ms est un **évènement mental**, qui reflète le phénomène de persistance visuelle. Toute cette persistance de l'information au-delà de la présence physique définit le terme de **mémoire** (fait de persister une information alors qu'elle n'est plus présente physiquement). On a besoin de cette mémoire visuelle parce que notre cerveau a besoin d'interpréter les signaux qu'il reçoit. Les informations sont souvent trop rapides et il faut un endroit pour les stocker : la mémoire sensorielle visuelle. 1. [Démonstration] : étude de la mémoire iconique - Sperling (1960) 1^e^ expérience : il a présenté une matrice de 12 lettres (3x4) à des participants. La matrice n'était présente que 50ms et le but était de mémoriser un maximum de lettre Et de dire à haute voix les lettres souvenues. Sperling a appelé ça : **rappel intégral**. Ils en rapportaient en moyenne 4/12 (33%). - Mais est-ce qu'ils n'en ont vu que 4 ou elles ont toutes été encodées dans le système visuel mais ils ont pu en rapporter que quatre..? Sperling a fait une 2^e^ expérience avec cette fois un **rappel partiel**. C'était la même situation mais cette fois les participants ne devaient rappeler qu'une ligne (4 lettres) mais sans savoir à l'avance la ligne qui allait être demandée, ils devaient donc mémoriser un maximum. Les résultats ont montré que les participants rapportaient bien plus de lettres, environ 3/4 (80%). Cela suggère que pendant un bref instant, ils ont conservé en mémoire toute la matrice. Une 3^e^ expérience a montré que ce type de résultats n'est obtenu que si le signal désignant une ligne est immédiat. S'il survient 1s après, la performance chute d'environ 33%. Revenons sur le fait que les résultats (2^e^ exp.) ne sont obtenus que si le signal survient immédiatement après. Sperling propose une explication : les sujets utilisent un registre sensoriel visuel pour reconnaitre la rangée. Lorsqu'ils voient le signal, ils font sélectivement attention, dans le registre, à la rangée indice et essayent d'identifier les lettres de cette rangée. Les résultats dépendent de la clarté des informations dans le registre : durée entre le signal et le stimulus. Au plus la clarté de l'image sensorielle diminue, au plus il est difficile de reconnaitre les lettres. - Une fois l'information visuelle codée par les neurones de la rétine, cette info brute est stockée dans un registre d'information visuel pendant 1s. La **vitesse de dégradation** peut dépendre de l'intensité, du contraste, de la durée mais aussi de la vitesse à laquelle on passe au stimulus suivant. ![](media/image12.jpeg) 2. Et ensuite...? Il est indispensable de savoirs où sont les objets autour de nous et comment ils se comportent. Le système perceptif doit donner des infos utiles pour qu\'une bonne représentation du percept soit mise en contact avec les infos de la mémoire (Pour reconnaitre un objet). Pour ça, on doit faire la distinction entre vision de haut et de bas niveau. Section 3 : La perception visuelle de bas niveau La rétine est une surface bidimensionnelle, pourtant nous voyons en 3D, comment se fait-il ? C'est très compliqué car un nombre illimité d'objets peuvent produire la même image sur la rétine, exemple : les 3 barres mènent à la même image sur la rétine, pourtant elles ne sont pas les mêmes. Pour comprendre comment notre système perceptif gère ce type de situation, il faut se demander comment se situe les objets, leur localisation et leur mouvement. 3.1 [La perception des couleurs] - La couleur est l'effet perceptif causé par les variations de la longueur d'onde de la lumière. ![](media/image14.jpeg)La couleur est une des caractéristiques fondamentales des objets. Les récepteurs sensibles à la composition spectrale sont les cônes. Il y en a 3 sur la rétine, qui contiennent des pigments différents. [Un certain type de C contient un pigment qui absorbe préférentiellement des photons dont la longueur d'onde correspond au bleu, un autre au rouge et un autre au vert.] C'est la pondération de ces trois couleurs qui nous permet de voir toutes les couleurs. Parfois il peut arriver d'avoir des anomalies (ex : le daltonisme -- déficience d'un ou plusieurs types de C de la rétine (pas de C codant pour le vert). Il peut aussi avoir des anomalies même avec un système visuel opérationnel ! On peut percevoir les couleurs de façon déformée par rapport à la réalité. Si on observe un disque rouge sur fond blanc (40s) et qu'il est ensuite agrandi, on va avoir l'impression que le centre du deuxième rond va être moins rouge. Cet exemple illustre que « toute exposition prolongée à une caractéristique provoque généralement un **phénomène de fatigue** qui rend le système moins sensible à la caractéristique considérée ». Dans l'exemple, au centre, les récepteurs sont devenus moins sensible au rouge que ceux de la périphérie Pas stimulés dans la 1^e^ phase. Dans une 2^e^ expérience, on observe un disque rose (40s) puis on fond blanc et on va avoir l'impression de voir du vert. Ça illustre que certaines nuances constituent des couples. La diminution de la sensibilité à un des pôles du couple correspond à une augmentation de la sensibilité du pôle opposé. 2. [La localisation des objets] Pour localiser des objets, on doit les séparer les uns des autres et de l'arrière-plan : **ségrégation**, déterminer leur distance par rapport à nous : **distance** et **profondeur** et se représenter la direction et la vitesse (si mouvement) de façon à prédire sa localisation : **mouvement**. - Ces dimensions sont nécessaires pour déterminer où est un objet, elles sont donc liées les unes aux autres et sous-tendu es par les mêmes aires neurales. 1. [La ségrégation ] ![](media/image16.jpeg)Le monde est constitué de couleurs mais aussi de surfaces qui se coupent et d'objet stables et solides. Le système visuel possède la capacité de structurer le monde visuel. Notre système perceptif permet de distinguer les figures du fond, ce qui permet de localiser les objets. Certaines ségrégations sont assez claires mais d'autres moins. Il existe des cas où plusieurs organisations fond/forme sont possibles mais ne peuvent pas coexister simultanément (chat -- éléphant). Il peut aussi arriver que le système perceptif construise des contours illusoires en l'absence de données sensorielles (triangles). Quels sont les indices que nous utilisons pour ségréguer ? (« Gestalt psychologues ») Quand on regarde quelque chose, notre cerveau va vouloir créer des « groupes » avec ce qu'il voit et va les définir via le principe de **proximité** ou de **similitude**. On retrouve aussi la **bonne continuation** : notre système perceptif préfère les contours qui continuent sans incident durant le trajet (un bâton derrière un rectangle, on va tout de suite penser que le bâton est entier mais ça pourrait aussi être deux bâtons). 2. [La distance et la profondeur ] Même si cela nous semble sans effort, notre système visuel intègre beaucoup d'informations différentes pour déterminer la profondeur... ! 1. Avec un seul œil Certaines informations ne requièrent que d'un seul œil : l'interposition, la perspective linéaire et la taille relative. - **Interposition** : si un objet interrompt le contour d'un autre, il est perçu comme devant. - **Perspective linéaire** : si des lignes convergent graduellement, elles sont perçues comme parallèles et donnent une indication de la profondeur. - **Taille relative** : s'il y a deux objets identiques mais que l'un est plus petit, il va sembler plus loin. - **Ombre projetée **: aide à déterminer l'apparente position d'un objet, voire sa forme. Le **mouvement parallaxe** (quand l'objet est immobile mais l'observateur bouge) est une source d'information importante pour percevoir la distance. 2. Avec les deux yeux En vision binoculaire, pour que notre cerveau perçoive un objet tridimensionnel, il a besoin des images bidimensionnelles envoyées par chaque œil. Il va ensuite les fusionner et élaborer une perception unique de l'objet observé. 2 facteurs interviennent : la **convergence** et la **disparité** **binoculaire**. La convergence est le mouvement permettant aux yeux de pivoter vers un objet rapproché (+/-- en fonction de la distance). But ? Faire apparaître les images d'un objet sur des parties homologues des deux ![](media/image18.jpeg)rétines (au-delà de 18cm, la convergence ne varie plus en fonction de la distance). C'est un indice de profondeur. Tout objet situé sur le plan frontal et sur l'axe du regard produit des projections de même taille sur les deux rétines. Mais dès qu'un objet est situé de manière oblique par rapport à l'axe du regard, cela produit des projections de taille différente et les images captées sont légèrement différentes sur les deux rétines. Ce décalage horizontal est la disparité binoculaire. Quand son regard converge en A, on voit que l'image rétinienne qui représente la distance entre les objets A et B est plus petite pour l'œil gauche que droit et que l'objet C (qui est situé plus près du point de convergence) provoque ce qu'on appelle une **disparité croisée**. La combinaison de ces infos permet un excellent indice de profondeur. 3. [Le mouvement ] Quand on bouge dans notre environnement, l'image de n'importe quel objet sur notre rétine bouge aussi. Il faut donc distinguer notre mouvement du mouvement de l'objet. Les indices de **taille relative** d'un objet jouent un rôle clé : si un objet bouge vers nous, il devient plus grand, et inversement. Le **mouvement apparent** : perception du mouvement sur base d'images fixes. Quand on regarde un film, ce n'est pas un film continu mais une série d'images discrètes présentées très rapidement (24 images/s). Comment sommes-nous capables de transformer une suite d'images fixes en perception continue et animée ? Grâce à la découverte de Wertheimer en 1912, appelé le **phénomène phi** (ou MA). Lorsque deux images s'alternent lentement, on peut les percevoir bien distinctement, mais lorsque la vitesse entre les deux s'accélère, on ne distingue plus l'une de l'autre. Nous basculons dans un mode de perception continu. Dans certains cas, notre cerveau invente les images qu'il n'a pas reçu, la perception du mouvement est une construction de notre esprit !! Que se passe-t-il lors d'une atteinte cérébrale, au niveau des régions cérébrales codant pour le mouvement -- V5 ou MT (*médio-temporal*) ? Prenons le cas de Mme L.M. (Naccache, 2020) : *En octobre 1978, Mme L.M., âgée de 43 ans, est victime d'un accident vasculaire cérébral veineux, aussi appelé thrombophlébite cérébrale. Elle se plaint d'avoir perdu la capacité à percevoir le mouvement visuel. Pour elle, les individus se déplacent comme dans le jeu « 1, 2, 3 soleil », elle ne perçoit plus non plus les mouvements de bouche de ses interlocuteurs. Après plusieurs recherches, le diagnostic révèle une akinétopsie cérébrale, elle ne perçoit ni le mouvement réel ni le mouvement apparent. Les images sont univoques : la région V5 est détruite dans les deux hémisphères, ainsi que les régions avoisinantes (prédominance dans l'hémisphère droit).* Naccache (2020) -- pas de lésions cérébrales : dans d'autres cas, des personnes migraineuses peuvent avoir des dysfonctionnements juste avant une migraine (« aura migraineuse »). Durant ce moment, le réseau cortical est perturbé. **Mot de la fin** : la perception de bas niveau correspond aux premières étapes du traitement visuel, où sont traitées les propriétés locales. Une fois les informations perçues, comment elles sont stockées ? (Prochain chapitre...). Tout au long de notre vie on stocke en mémoire. Notre mémoire (à long terme) contient des descriptions de nombreux types de formes. Lorsqu'on regarde un objet, notre système perceptif en construit une description et nous la comparons avec celles stockées en mémoire. S'il y a un « match », alors on reconnait l'objet (y compris ce qui ne se manifeste pas par des impressions sensorielles). Section 4 : La reconnaissance des formes La reconnaissance des formes et aussi appelé « **perception de haut niveau** ». Pour chaque objet du monde, il en existe des milliers de variations mais malgré ça, on le reconnait en un quart de seconde s'il est stocké dans une catégorie qu'on connait. 4.1 La perception des symboles Plusieurs théories ont été proposées pour expliquer comment on peut reconnaitre si vite tous les différents stimuli... 4.1.1 Théorie de l'appariement des gabarits ![](media/image20.jpeg)Dans cette théorie, on reconnaîtrai les lettres sur base d'un **appariement de gabarits**. Un gabarit peut être utilisé pour classifier un nouveau patron. L'idée est que quand on voit une nouvelle forme, une image rétinienne est produite et transmise au cerveau où elle est comparée avec des autres gabarits déjà en mémoire. Exemple : si la lettre A est représenté devant nous, les rayons lumineux rentrés dans nos yeux excitent un [patron de cellules réceptrices sur la rétine]. Quand on connecte ces récepteurs à un groupe de cellules dans le cerveau qui activent la représentation mentale de la lettre A, on a un [gabarit de récepteurs] spécifiquement conçu pour détecter la lettre A. Ce ne sont pas les mêmes récepteurs pour le L. **Vocabulaire** : la représentation mentale c'est une image que la personne se forge d'un objet, une personne, etc. Elle est nourrie par des infos venant de notre stock en mémoire et de nos sens. Nous sommes entourés de machines fonctionnant sur base de cette théorie (ex : tri postal). Mais il y a 3 inconvénients majeurs à cette théorie (vite abandonnée à cause de ceux-ci) : - Si nous reconnaissons les stimuli par appariement des gabarits, nous devrions en stocker un nombre infini. Bien que notre mémoire soit grande, elle n'est pas infinie, donc ce n'est pas plausible. - Chaque gabarit devrait être appris avant que le stimuli visuel correspondant soit reconnu. La théorie n'explique pas comment on est capable de reconnaitre un objet alors qu'on a pas de gabarit correspondant. - S'il y a une toute petite déviation du stimuli tel qu'il est projeté sur la rétine par rapport à ce à quoi le détecteur est supposé réagir, ce détecteur ne va pas s'activer. 4.1.2 Théorie des traits (1950) Cette théorie propose que nous décomposons les patrons visuels en leurs constituants. Toutes les formes que nous avons à reconnaitre sont composé de morceaux séparables, des **traits**. Pour comparer les traits, il faut qu'il y en ait déjà en mémoire ! Chaque lettre est spécifiée par une combinaison de propriétés élémentaires, caractérisées de manière binaire (trait / pas trait). Cette théorie est-elle plausible ? Oui, car : - **Principe économique**, avec quelques traits visuels, on peut faire beaucoup de catégories. - Elle est compatible avec un certain nombre d'observations physiologiques. Hubel et Wiesel (1959), ont mis en évidence des détecteurs neuronaux de contours « simples » et « complexes » dans le cortex visuel primaire chez le chat (va aussi pour les humains). Ils ont utilisé la technique d'**enregistrement de cellules isolées**. Grâce à ça, ils ont récolté un signal électrique de certains neurones dans le cortex visuel du chat en fonction des traits qu'il avait face à lui. Ça a montré qu'il y a certains neurones qui détectent spécifiquement des lignes d'une certaines orientation présentée dans une certaine partie du champ visuel. - L'idée de reconnaissance des formes sur base de la détection de traits est compatible avec certaines confusions des traits chez l'humain. Kinney, Marsetta et Showman (1966) ont présenté des symboles alphanumériques pendant un bref instant. Si les sujets se trompent, cela devrait être sur une lettre ![](media/image22.jpeg)ressemblante à celle projetée pour confirmer la théorie... Et c'est le cas ! À cause du partage de traits, certaines lettres se ressemblent. 4.1.3 Un modèle de traitement : le Pandemonium La prochaine étape consiste à décrire les processus de la reconnaissance de formes est proposé par le modèle de traitement de l\'information de Selfridge (1958), qui conserve la théorie des traits : le Pandemonium (= « assemblée de démons »). Explications : Au **T1**, la lettre représentée donne lieu à une trace iconique stockée par le démon de l'image et permet l'activation de détecteurs élémentaires de traits visuels. Au **T2**, des démons s'activent en fonction de si l'image contient le trait dont ils sont responsables. Ces démons symbolisent l'excitation de (groupe de) neurones du cortex visuel qui répondent préférentiellement à ces types de traits. Les cinq détecteurs actifs s'activent en même temps et envoient vers la couche de neurones suivante des signaux en fonction de leur excitation. Au **T3**, les détecteurs de lettres « crient le plus fort » (// les + excités) en fonction du taux d'excitation de l'étape précédente. Cette étape explique les confusions qu'il peut avoir pour certaines lettres. Au **T4**, c'est le mécanisme de décision. Un « démon de la décision » va recevoir une information sur l'état d'excitation de tous les détecteurs de lettres et va décider de la réponse à donner. - Derrière chaque démon se cache un petit paquet de neurones qui détectent une propriété. ![](media/image24.jpeg)4.1.4 Théorie structurelle Dans la théorie du Pandemonium, il manque une information concernant les relations spatiales entre les traits. Très souvent les descriptions nécessités une précision dans la façon dont sont regroupés les traits, ex : une barre verticale coupée par une barre horizontale peut nous faire pense à un L, mais aussi un T. La **théorie des traits** (= **théorie décompositionelle**), a pour but de prendre en compte l'organisation spatiale des traits. Clowes (1969), s'est servi de cette image pour justifier la théorie structurelle : en fonction du regroupement des traits, on peut percevoir une raie ou une voile de bateau. [Les théories structurelles reposent sur les théories de traits tout en les enrichissant]. 4.2 La perception des objets en 3 dimensions (3D) Historiquement les théories des traits ont surtout été développées pour modéliser la reconnaissance de formes telles que les lettres. Elle est facilement applicable, sauf pour les objets 3D... Parfois une certaine description des traits est incompatible avec la perception de la forme. Pour les objets tridimensionnels, une description des formes en terme de volumes est généralement plus simple qu'en terme de traits et les deux descriptions peuvent être discordantes. Est-ce plausible que la perception des objets 3D se fonde sur les volumes ? [Modèle de reconnaissance par composants : ] Biederman (1987) propose un modèle de traitement pour rendre compte de la perception des formes tridimensionnelles sur base de leur volume. Selon lui, tous les objets 3D sont composés de composants simples, appelés **géons** (geometrical ions). Nous aurions des composants de base (36 géons) dans notre système de reconnaissance des formes et c'est sur cette base que la perception des formes se produit (théorie pas suffisante pour différencier deux objets +/- semblables). Il y a plusieurs étapes ; - Segmentation du champ visuel : extraction des contours et traitement des régions. - Reconnaissance des géons et de leur structuration - Appariement : géons assemblés et comparé avec des patrons stockés en mémoire. Évidence pour le modèle : examiner les aires d'intersection permet de définir la structuration des géons présents dans la forme. Biederman fait l'hypothèse que la suppression de cette information devrait réduire notre capacité à reconnaitre des formes. Expérience n°1 Il a pris des objets usuels dont il a retiré 65% du contour. Soit il a retiré les milieux des segments permettant de voir les intersections (objet « récupérable »), soit il a retiré les intersections (objet « non récupérable »). Ils ont été présentés très brièvement et les ils devaient dire ce que c'était. Les résultats montrent que quand les intersections des géons sont enlevées, c'est beaucoup plus compliqué de reconnaitre des objets (80% d'erreurs pour les NR vs 100ms = 60% d'erreurs ; 5s = 3% d'erreurs pour les R). Cette information est utilisée préférentiellement par notre système perceptif lors de la reconnaissance des objets. Les données ne permettent pas de dire/n'apportent pas d'évidence direct que l'on utilise les géons (plutôt que les traits) pour reconnaitre les formes. ![](media/image26.jpeg)Expérience n°2 Biederman et Cooper (1991) ont réalisé une 2^e^ expérience - on veut tester si les géons sont importants.. Cette fois, 50% des contours ont été supprimés pour former une paire d'images complémentaires tout en gardant toutes les intersections. La différence entre les images complémentaires du haut et du bas est dans la répartition des géons : - Paire du haut : géons conservés -- un même géon est sur les 2 images. - Paire du bas : géons répartis -- un géon n'est que sur une image, pas les deux. La prédiction et les résultats ont été semblables : les participants répondent plus correctement (et plus rapidement) lorsque les images complémentaires ont les mêmes géons que quand les géons sont différents. 4.3 La perception des visages On sait reconnaitre un visage quelles que soient les conditions : notre cerveau sait en dégager un « invariant physionomique » sous-jacent (visage type), qu'il conserve en mémoire et compare avec le percept. La théorie des traits n'est pas possible pour les visages car ils sont beaucoup plus complexes. On dit parfois que le nez les bouches et les oreilles sont des **traits** **complexes** ou des **traits** **de haut niveau**. On peut diviser les visages en parties mais ça ne veut pas dire qu'on utilise ces traits complexes pour la reconnaissance des visages. Les visages seraient représentés de manière plus **holistique** (globale) que les autres objets. Dans le cas des visages, les gens sont sensibles à d'autres informations telles que la **configuration des parties** et l'**aspect global** des visages. On a pu démontrer qu'on utiliserait des propriétés plus globales que les parties individuelles. Tanaka et Sengco (1997) ont réalisé une expérience avec un visage de base, puis on montrait des parties du visage et il fallait dire si c'était la bonne partie. Il fallait reconnaitre selon 3 conditions : - La partie montrée est en isolation - La partie est montrée dans le même visage que pour l'apprentissage (old configuration) - La partie est montrée dans le même visage mais la configuration globale a été légèrement modifiée (new configuration) Les participants sont meilleurs dans la condition 2 (77% - présentation du visage en entier) que si le trait complexe est représenté seul. C'est encore moins facile lorsqu'il y a l'old configuration. Significatif = généralisable à la population ! ![](media/image28.jpeg)Cela suggère que les individus utilisent l'information globale plutôt que des traits complexes pour reconnaitre les visages. On parle de **traitement holistique** des visages. Le traitement de la configuration ne se produit pas avec d'autres types de formes complexes comme des maisons (une porte se reconnait qu'elle soit avec une sans une maison). Les visages ont un **statut privilégié** dans notre système perceptif, et ce, dès les premiers moments de vie. Cette capacité est le résultat d'une longue évolution concomitante du rôle crucial dans la survie de l'espèce. Desimone et Al, 1991, ont mis en évidence des neurones spécifiques, localisés dans le lobe temporal des singes, qui répondent sélectivement à des visages de singes. Une atteinte de cette même zone du cortex chez l'humain provoque de grosses difficultés dans la reconnaissance des visages humains (Farah, 1992). 4.4 Les troubles de la reconnaissance des formes En cas d'atteinte au cerveau, on peut observer plusieurs choses en fonction de la partie cérébro-lésée, comme l'**agnosie** (« absence de connaissance »). L'**agnosie visuelle** fait référence aux troubles de la perception des formes. La **prosopagnosie** est l'incapacité à reconnaitre des visages. Ils peuvent aller jusqu'à ne plus se reconnaitre soi-même, concevoir qu'iel voit un visage mais ne pas savoir dire que c'est le sien. Le visage perd son statut d'indice visuel d'identification d'une personne. Les patients peuvent voir les yeux, la bouche, etc., mais ne peuvent pas les « ajouter » ensemble (ils s'aident d'indices comme la démarche ou la voix). Est-ce que le cas de double dissociation existe réellement ? Il est difficile de trouver des cas « purs » de patients (avec un seul déficit). Certains ont été rapportés comme des cas purs d'agnosie visuelle correspondant à des cas de doubles dispositions. Certains savent reconnaitre des visages mais sont incapables de reconnaitre certains objets ou formes complexes. En 1997, Moscovitch, Winocur et Behrmann rapportent le cas du patient CK : *CK est un homme canadien, né en 1961. Il subit un traumatisme crânien dans un accident de voiture, été placé dans le coma et a ensuite présenté des déficits moteurs, sensoriels, cognitifs et émotionnels. CK s'est bien rétabli et le seul dommage révélé lors de l'IRM était un amincissement bilatéral dans la région occipito-temporale. Grâce à d'autres tests comme l'analyse de la structure du cerveau, on a pu voir que son acuité visuelle était normale, tout comme son langage, sa mémoire et son raisonnement. Cependant, CK présentait de gros troubles de perception des objets de la vie quotidienne s'il ne se basait que sur la modalité visuelle. Il était incapable de se rendre compte de l'objet présent devant lui s'il n'était pas accompagné d'un indice pour le reconnaitre. Ex : sur la peinture « Rudolfo » d'Arcimbolo, CK voyait parfaitement le visage mais il était incapable de percevoir les fruits qui composent le visage.* **Mot de la fin **: ce type de résultats de la neuropsychologique cognitive, ajoutés aux autres, soutient donc l'idée qu'il y a un système cognitif dédié à la perception des visages, séparé du système de reconnaissance des autres formes, simples et complexes. Section 5 -- Le rôle du contexte 5.1 Processus ascendants et descendants À peu près tous les exemples de construction perceptive qu'on a vus se basent sur l'idée que ce sont les propriétés du stimulus visuel qui permet a reconnaissance du percept : la longueur d'onde pour les couleurs, comment les arrêtes des objets se croisent, etc. Comme si c'était directement depuis l'image sur la rétine à une représentation perceptive complexe... Non ! Si on croise une myrtille sur la route, on va reconnaitre que c'est une myrtille parce qu'à priori, notre système visuel a analysé les caractéristiques visuelles du stimulus et les a comparés avec les connaissances stockées en mémoire. C'est ce qu'on appelle le **processus ascendant/bottom up** (les propriétés élémentaires d'un objet sont traitées et une représentation complexe est construite). Mais il a d'autres facteurs qui interviennes, extérieurs au stimulus. On a pu s'aider du **contexte** pour s'aider à la reconnaissance ou on pourrait avoir des **attentes** (avoir faim/envie de myrtilles et aiguiser notre regard pour en percevoir). Il est possible que ce soit grâce à nos **connaissances sur le monde** (on sait que c'est la saison des myrtilles et non des mures donc si on perçoit un fruit, on va plus vite se dire que c'est une myrtille). Tout ça entraîne les **processus descendants/top down**. 5.2 Impact du contexte dans la perception Le terme général de « contexte » est divisé en deux : le **contexte physique** (infos visuelles autour de l'objet à percevoir) ou le **contexte mental** (infos issues de nos connaissances stockées en mémoire, motivation, etc.). ![](media/image30.jpeg)[Illustration 1] : Leeper (1935) a montré une figure ambiguë et 35% des gens voyaient une jeune femme tandis que 65% voyaient une vieille dame. Il a aussi montré qu'on pouvait orienter la perception des gens. Si on présente une figure non ambiguë de jeune femme juste avant la figure ambiguë, 100% allaient voire une jeune dame, et inversement avec la vieille dame (98%). Cela montre comment l'expérience passé peut affecter notre perception présente et ce ne sont pas juste les caractéristiques du stimulus. [Illustration 2 ]: Bruner et Goodman (1947) ont testé l'impact de l'influence des connaissances sur la perception, pour ça ils ont fait deux groupes d'enfants, un venant d\'un milieu favorisé et l'autre d'un milieu défavorisé. Ils leur ont présenté des pièces de monnaie et des disques de cartons de même taille, et leur ont demandé d'estimer le plus grand. Globalement, ils avaient tous tendance à percevoir les pièces de monnaie plus grande qu'en réalité (sans disque carton). Tandis que les disques sont estimés plutôt correctement. Les enfants perçoivent-ils les pièces plus grandes dues à leur valeur ? Les enfants de milieux défavorisés surestiment plus la taille des pièces que les enfants des milieux favorisés. Est-ce parce que l'argent a plus de valeur pour eux ? Ou parce que les enfants de milieux favorisés ont plus l'habitue de manipuler des pièces ? On ne peut pas le savoir mais les deux reflètent l'intervention des connaissances antérieures. Mot de la fin : ces illustrations démontrent l'influence de processus descendants dans la perception visuelle via l'utilisation d'infos contextuelles/connaissances antérieures. La reconnaissance des formes fait intervenir plein de sources d'infos et engage des processus ascendants et descendants. Section 6 : Conclusion **Percevoir** = construire une représentation visuelle à partir de stimulations sensorielles, et ça consiste à enrichir ce que l'on perçoit avec nos connaissances et nos attentes. La perception fait intervenir plusieurs traitements ; une fois l'info captée par l'œil, elle est stockée dans un registre sensoriel pendant une durée très courte, ce qui permet l'analyse d'infos : couleurs, taille, traits). Sur base des différents traits et dimensions qui sont extraits en parallèle, une représentation perceptive est construite (processus bottom up). La construction de ce percept est aussi influencée par nos connaissances sur le monde et par le contexte (processus top down). Cette représentation est comparée avec nos connaissances en mémoire et s'il y a « match », il y a reconnaissance de la forme. **Chapitre 3 -- L'attention** Section 1 : Perception et attention Ici, on va voir que l'attention influence tout autant ce que l'on perçoit et que la perception et l'attention sont intimement liés ! 1. [L'illusion de la complétude ] Comment peut-on illustrer l'« **attention** » ? on peut utiliser l'**illusion de la complétude**. C'est une expression utilisée par Naccache (2020) pour dire que nous croyons voir tout ce que la scène visuelle contient mais c'est faux (nous ne percevons bien que ce sur quoi notre attention est focalisée), et en plus, on construit la scène visuelle qui est en dehors de notre point d'attention. 1. Perception partielle des scènes visuelles Quand on ne voit pas nos clés alors qu'elles sont devant nous avec plein d'autres objets, on parle de **cécité attentionnelle** (= on ignore ce qui se trouve devant nos yeux quand notre attention est portée sur autre chose). Autre ex : la vidéo de l'ours qui fait du moonwalk. Quand nos yeux « voient » le monde, même si on pense percevoir tout ce qu'il y a devant nous, ce dont nous prenons conscience n'est qu'une petite partie de la scène visuelle imprimée sur notre rétine. Notre attention est portée vers un ou des éléments de la scène visuelle, ce qui nous rend aveugle pour le reste. Ces objets et/ou ces actions s'impriment sur nos rétines mais ne sont pas pour autant intégrés dans notre « **perception consciente **» (fait d'être capable de se rapporter à soi-même ce que l'on a vu). 2. D'où vient l'illusion de la complétude ? Comment se fait-il que nous croyons voir l'ensemble de la scène visuelle ? Parce qu'à notre insu, nous inventons de quoi est constitué l'ensemble de ce qui est face à nous grâce nos connaissances. Nous inventons ce que nous ne percevons pas consciemment du coup, nous croyons tout voir !! [Illustration 1 (McConkie et Rayner -- 1975) : ] Une même phrase est écrite plusieurs fois les unes au-dessus des autres. Sauf qu'à part la première phrase, aucune n'est écrite correctement. Dans la deuxième, les auteurs ont remplacé les segments périphériques par des groupes de X de la longueur des mots de la phrase d'origine ou des **non-mots**. Et ainsi de suite pour le reste des phrases. Ce qui est étonnant c'est que ces changements n'ont pas été remarqués par les participants ! Ils ont l'impression de percevoir l'ensemble de la phrase d'origine sans réellement prendre conscience de la présence des X qui sont pourtant traités par leur rétine et par les premières régions visuelles de leur cerveau. En fait, l'impression de percevoir une page pleine de texte provient d'une [interprétation inconsciente fondée sur le fait que la page *doit* être remplie de mots et de lettres, même si ce n'est pas le cas] (= « **impression de complétude **»). [Illustration 2 (Cohen et al. -- 2020) : ] Cette expérience a montré que la perception de l'information **centrale** (sur laquelle notre attention est portée) peut influencer la perception de ce qui est présenté en périphérie. Les auteurs ont présenté une vidéo aux participants qui est, à l'origine, une simple vidéo en couleur qu'ils peuvent librement explorer. Cependant, au fur et à mesure de la vidéo, les auteurs rendaient la périphérie des images sans couleurs tout en gardant toujours le centre de l'image colorée. La plupart des participants n'ont au final même pas réalisé que l'image avait perdu de sa couleur. Cela montre que malgré notre impression de voir les scènes colorées, les couleurs que nous percevons en périphérie sont en fait très largement construites par notre cerveau à partir des couleurs présentes dans l'endroit où l'on fixe notre attention. 2. [C'est quoi l'attention ? ] 3. Intuitions Si on nous demande « qu'est-ce que l'attention pour vous ? », il y aura plein de réponses différentes. Tout dépend de quel genre d'attention on parle, il peut y avoir référence à - La **concentration** (« porter notre attention sur le cours ») - La **sélection d'informations** (faire attention à une conversation dans une salle remplie de personnes qui parlent) - Au fait d'avoir des **capacités limitées** (quelqu'un qui est capables de faire attention uniquement à une seule chose à la fois) - A l'**automaticité****sériel** (étapes successives) mais ce n'est pas comme ça que ça se passe les processus cognitifs. Section 3 : Et le cerveau dans tout ça ? 3.1 [La notion de niveau d'analyse ] On peut se baser sur un jeu d'échec ; il est composé de pièces et d'un plateau. Qu'elle que soit le matériel sur lequel on joue, on sait que c'est des échecs. Et pour y jouer on doit connaitre le rôle de chaque pièce. Donc, l'aspect physique ne compte pas ! Le **rôle fonctionnel** des pièces peut être discuté sans tenir compte des caractéristiques physiques. On a donc 2 niveaux d'analyse : **niveau physique** et **niveau fonctionnel**, et on peut choisir sur lequel se centrer. On appelle ça le **fonctionnalisme**. C'est une approche qui [accorde une place prépondérante à la fonction des éléments d'un système et au fonctionnement du système]. C'est là-dessus que se base la psychologie cognitive : on s'intéresse au rôle fonctionnel des états neurophysiologiques. - Les états neurophysiologiques sont produits par le cerveau et mènent à ce qu'on appelle les « processus cognitifs ». Pour revenir aux ordinateurs, ils sont composés d'une partie *hardware* (matériel) et d'un *software* (programmes). Sans hardware, l'ordinateur ne sait pas fonctionner. Par analogie, le cerveau (amas de neurones) est le *hardware* sans lequel la pensée ne peut pas être produite. - La psychologie cognitive essaie de spécifier le « *software mental* ». 3.2 [Entre réductionnisme et fonctionnalisme radical ] Dans le **réductionnisme**, on tend à penser qu'un seul niveau est utile pour comprendre la cognition humaine, la neurophysiologie (voire de la chimie). [On pourrait réduire toutes les explications sur le comportement humain au niveau physique élémentaire.] Comprendre l'esprit reviendrait à comprendre les états et processus électrochimiques de base. C'est très difficilement tenable... Selon Pylyshyn (1984), il est impossible d'expliquer les phénomènes mentaux et le comportement sans admettre l'existence de représentations mentales nécessaires pour évoquer les connaissances, croyances, etc. qui déterminent les états mentaux et les actions. « *Supposons que vous vous trouviez au coin d'une rue et que vous observiez une séquence d'événements qui pourrait être décrite comme suit. Un piéton marche sur le trottoir. Soudain, le piéton se retourne et commence à traverser la rue. Au même moment, une voiture se déplace rapidement dans la rue en direction du piéton. Le conducteur de la voiture freine. La voiture dérape et se déporte sur le côté de la route, heurtant un poteau. Le piéton hésite, puis s'approche et regarde à l'intérieur de la voiture, du côté du conducteur. Il court vers une cabine téléphonique au coin de la rue et compose les numéros 1, 1 et 2.* » Avec cet exemple, il nous dit que si on adhère aux idées réductionnistes, on croit que chaque mouvement qui a été fait, provient uniquement de loi physiques naturelles (biologie, chimie et neurophysiologie). En réalité, nos connaissances sur les piétons, les voitures, les accidents, vont au-delà des échanges chimiques dans le cerveau. À l'inverse, on a le **fonctionnalisme radical** : [étude des mécanismes de traitement d'informations (esprit, programme) sans prise en considération de la machine physique (le cerveau).] Cette approche a été dominante en neuropsychologie cognitive à un moment... Et c'est ce qu'on fait dans ce cours. Face à des patients ayant des troubles cognitifs suite à des lésions, c'est cette approche qui est utilisée. Donc même en étudiant des patients cérébro-lésés, on peut ne pas prendre en compte du tout (ou très peu) la machine physique qu'est le cerveau. 3. [Conclusion ] Content (2016) souligne que plusieurs auteurs ont fait des théories en mettant en lien des éléments cognitifs/fonctionnels et neurophysiologiques (théories appelées **bridging theories**). Cela constitue le programme de recherche des neurosciences cognitives (depuis +/- 30ans). Depuis les années 80, des théories de traitement de l'information conçues pour avoir une **plausibilité biologique** ont été proposées. [Dans ces propositions, on se situe toujours dans une perspective fonctionnaliste, mais on s'inspire des découvertes des neurosciences ! ] **À retenir **: on étude la psychologie cognitive en faisant des liens avec les bases neurales et la psychologie doit prendre sa juste place dans le cerveau (ni trop, ni trop peu). **Chapitre 6 -- Psycholinguistique et langage** Section 1 : Introduction [Définition « basique »] : « *La psycholinguistique est un champ d'étude qui s'intéresse aux processus cognitifs mis en œuvre dans le traitement et à la production du langage. En d'autres termes, c'est un sous-champ de la psychologie cognitive, que l'on pourrait traduire par psychologie cognitive du langage. *» 1. [Imaginez que... ] Si on se retrouve dans un endroit où on ne connait pas la langue, il va être très compliqué de communiquer avec les gens. Le langage occupe une place centrale dans nos vies et a permis le développement des cultures et des civilisations. [Le langage joue aussi un rôle primordial dans l'établissement du lien avec d'autres personnes.] Il permet de communiquer des infos sur le monde, sur nos émotions, nos expériences, notre vécu. Mais aussi de mentir, de s'amuser et d'agir sur notre environnement ! [Une parole peut être assimilée à des actes avec de réelles conséquences.] Sur le plan cognitif, le langage repose, au moins une partie, sur d'autres systèmes cognitifs dont on a parlé avec la Perception-Attention-Mémoire. 2. [Le langage et les autres fonctions cognitives ] ![](media/image54.jpeg)**Schéma de communication** (Ferdinand de Saussure, 1857-1913) : la personne A est l'émettrice du message et la personne B le destinataire. **(1)** L'émetteur conçoit le message. **(2)** Il est transformé en gestes articulatoires. **(3)** Le son qui sort de la bouche de A se propage par des vibrations de l'air. **(4)** B reçoit le message. **(5)** L'appareil cognitif de B va se baser sur les vibrations, les analyser et les interpréter pour en construire une représentation auditive (1^e^ temps) et en extraire la signification (2^e^). Pour que ça se fasse, il faut que [A se souvienne de ce qu'elle voulait dire] (concepts, mots-clés). B va entendre les sons et si elle est suffisamment attentive, elle va [les assembler pour en construire les représentations auditives et retrouver dans sa mémoire les concepts correspondants]. /!\\ Les paroles sont juste des ondes transformées en influx nerveux, puis transformé en images mentales /!\\ [But du cours] : comprendre les processus par lesquels ont construit la compréhension du langage à partir des vibrations jusqu'aux oreilles + processus impliqués dans la production du langage. Section 2 : Dans « psycholinguistique », il y a « linguistique » 2.1 [Pourquoi faut-il comprendre des concepts linguistiques de base ? ] La linguistique est la [discipline scientifique qui a pour objet l'étude du langage]. La psycholinguistique a repris certains concepts (surtout le vocabulaire) de la linguistique. 2. [Le langage et ses caractéristiques ] Le langage renvoie à la fois au système complexe de communication utilisé par les humains, et à la faculté humaine d'acquérir et d'utiliser ce système complexe de communication. Chez les humains, la faculté du langage se manifeste par l'utilisation d'une langue. 7000 langues différentes mais toutes des points communs ! - **Langue** = français, anglais, néerlandais / **langage** = manière d'agencer les sons Chaque langue constitue un système régulier et cohérent, et est composé d'unités de niveaux différents qui peuvent être assemblés suivants des règles. On appelle ça la régularité du langage. Ensuite, les différentes unités peuvent être agencées pour créer de nouvelles unités, là on parle de productivité, ou de la créativité du langage. /!\\ La régularité du langage renvoie à une structuration interne en unités (« unité » = on ne sait rien lui enlever). 3. [Les unités et les niveaux qui constituent le langage ] Un lapsus correspond à une erreur d'utilisation du langage qu'on peut commettre en parlant et en écrivant. On exprime autre chose que ce que l'on voulait dire. Exemples : - Ne plus trouver le mot qu'on veut dire et en dire un autre ; *bic* au lieu de stylo. - Être enrhumé et dire *bétacognition* à la place de métacognition. - (Ex du JT) Dire *port du voile* au lieu de port du masque. - Être enrhumé et dire *bouche* à la place de mouche, ce qui change le sens. Dans le 3 et 4, l'erreur influence la **signification**, contrairement au 1 et 2. Dans le 1 et 3, l'erreur commise est une **substitution** (échange) d'un mot par un autre. Dans le 2 et 4, il y a une erreur qui peut être de la **prononciation** au niveau d'un seul son. Le 4 est particulier car en changeant un son, le **sens** du mot change. Avec ces exemples, on peut voir que le langage est constitué de **sons** (unités sonores) qui peuvent changer le sens mais qui n'ont pas de sens propre. Il y a un autre type d'unité : **mots**. André Martinet (1908-1999) décrit le principe de **double articulation**, selon laquelle chaque langue parlée par des humains possède une **structuration interne**. Ce sont des unités qui possèdent une forme sonore et une signification, appelés **phonèmes** (ils n'ont pas de signification mais peuvent différencier deux morphèmes (2^e^ articulation)). **Niveau** **Niveau des sons** **Niveau des mots** **Niveau des phrases** **Niveau du discours** ----------------------------------- --------------------- --------------------- ------------------------ ------------------------ **Unité** Phonèmes Mots, morphèmes Phrases Discours, texte **Discipline de la linguistique** Phonologie Morphologie Syntaxe (+sémantique) Pragmatique **Phonèmes (sons) =\> morphèmes (mots) =\> phrases =\> discours (oral/écrit)** La régularité renvoie au fait que chaque langue a une structure interne qui nous dit comment mettre les sons ensembles ! Chaque langue contient entre 20 et 50 phonèmes, et c'est avec un certain agencement de ces phonèmes qu'on crée une langue. Section 3 : Différents niveaux d'analyse 3.1 [Phonologie : niveau des sons élémentaires] L'unité la plus petite qui constitue le langage est le phonème. Mais c'est quoi un phonème ? - C'est une sous-unité sonore qui ne porte pas de signification en soi, mais qui a la propriété de pouvoir différencier 2 morphèmes. La discipline linguistique qui l'étude est la phonologie. Combien y a-t-il de phonèmes dans une langue ? En français, on compte 36 phonèmes ; 15 voyelles, 18 consonnes et 3 semi-voyelles (phonèmes ni des voyelles, ni des consonnes). Les phonèmes et les lettres de l'alphabet de sont pas la même chose ! Dans les conventions, les lettres de l'alphabet sont écrites « littéralement » et les phonèmes sont notés entre 2 barres obliques. Même s'il arrive que ce soit écrit pareil (ex : B et /bé/), ce n'est pas systématique ! [Les phonèmes représentent des catégories de sons : ] Une catégorie est un groupe d'éléments qui ont des caractéristiques communes. Un phonème est donc un groupe de sons légèrement différents les uns des autres, mais suffisamment similaires pour que l'on considère qu'il s'agit d'un même son. Les catégories de phonèmes qu'on trouve dans les langues différentes ne superposent pas nécessairement de la même manière. [Et la psycholinguistique ? Quel est le rapport avec les phonèmes ? ] Les phonèmes sont des sons de la parole et ont également une existence dans notre appareil cognitif en tant que représentation. Les psycholinguistes s'intéressent à/aux... : - Processus cognitifs permettant les représentations phonologiques et les processus impliqués dans la perception et la reconnaissance des phonèmes. - Comment les auditeurs combinent les infos sur les sons entendus pour identifier rapidement et efficacement les mots dans leur langue. - La spécialisation progressive, et aux mécanismes cognitifs qui sous-tendent l'acquisition phonologiques (à la naissance, les bébés comprennent tous les phonèmes). - L'apprentissage d'une langue étrangère (nouveaux sons, etc.) - Quand une personne parle vite, elle peut faire des erreurs, et ces erreurs sont des fenêtres sur la manière dont les phonèmes sont organisés dans notre appareil cognitif. Ils s'intéressent à ces erreurs pour comprendre les mécanismes de production. - Troubles (ex : dyslexie) qui impliquent des difficultés de traitement des phonèmes. En bref, la psycholinguistique s'intéresse aux phonèmes comme **briques fondamentales du langage parlé**. 3.2 [Morphologie : niveau des mots et des morphèmes ] Les morphèmes/mots, constitués de phonèmes, portent une signification. Ils peuvent être caractérisés par le fait qu'il a une forme sonore caractéristique en plus d'une signification, et ces 2 faces représentes l\'unité. Dans le concept de double articulation d'André Martinet, les morphèmes sont des unités de la **1^e^ articulation**. La discipline qui les étudie est la morphologie. [Quel est le lien entre la forme sonore et la signification d'un morphème/mot ? ] En linguistique, on parle de **signe linguistique**, plutôt que de morphèmes/mots. Ferdinand de Saussure constate qu'[il n'existe pas de lien naturel entre la forme sonore et la signification]. Mais il est très important qu'on ait tous la même forme sonore sinon on ne se comprendrait pas. La nature arbitraire et conventionnelle des relations entre le son et leur signification Associée aura 2 conséquences : - Liberté de constituer, dans une langue donnée, un répertoire de signes assez riche que pour désigner de très nombreux concepts. - Les locuteurs doivent mémoriser les associations conventionnelles propres à la langue. Ces associations sont stockées dans le lexique mental, qui se trouve en MLT. [« Morphème » = « mot » ? ] Pas tout à fait ! Un morphème est la plus petite unité qui a une forme particulière et une signification. [Même si parfois un mot correspond à un morphème, il peut aussi être composé de plusieurs morphèmes.] Ex : anti (opposition) -- bio (la vie en grec) -- tique (caractéristique). [Différents types de morphèmes et leur rôle dans le système du langage : ] - Il existe différents types de morphèmes avec des fonctions différentes. - La morphologie est à la base d'une créativité qui permet aux humains d'adapter le vocabulaire à de nouvelles réalités. [Différents types de morphèmes et leurs fonctions : ] Certains morphèmes correspondent à des **concepts** mais d'autres à des « **marques** » (affixes) qu'on va mettre avant (préfixes) ou après (suffixes) le morphème de base (radical/racine). L'ajout d'un pré/suffixe permet de modifier ou de nuancer la signification du morphème de base. Ils peuvent aussi faire changer la catégorie grammaticale, ou encore permettre d'adapter le mot au contexte de la phrase (morphèmes flexionnels). [Les morphèmes en tant que source de créativité du langage : la morphologie dérivationnelle : ] La **morphologie dérivationnelle** = les processus de composition de mot en ajoutant/enlevant des affixes. Ces processus constituent une source de productivité et de créativité du langage, qui permet d'enrichir constamment le vocabulaire. [Et la psycholinguistique ? Quel rapport avec la morphologie ? ] Les morphèmes/mots existent dans notre appareil cognitif comme représentations, et que des processus morphologiques nous permettent de traiter (percevoir/produire) des réflexions et des dérivations, en fonction du contexte. - Comment sont stockés les mots dans notre mémoire ? Comment on fait pour les reconnaitre quand on les entend ? Comment apprend-t-on de nouveaux mots ? - Comment les mots composés/dérivés sont-ils traité ? Ensemble de morphèmes distincts ? Unités entières ? - Pourquoi certains troubles affectent le traitement morphologique ? - Comment les individus planifient la production des mots, surtout lors de réflexions. - Comment les enfants apprennent à parler correctement ? La psycholinguistique s'intéresse aux morphèmes en tant qu'unités de sens qui permettent une vraie créativité et une puissance expressive du langage. Le but est de comprendre comment ces unités sont perçues, stockées et produites. 3. [Syntaxe et sémantique : niveau des phrases ] La discipline qui étude les phrases, est la syntaxe. On ne peut pas construire des phrases juste en plaçant des mots les uns à la suite des autres, il faut suivre des règles de **syntaxe**. C'est un ensemble de **règles tacites**, **implicites**, qu'on apprend enfant étant simplement *immergé dans le bain linguistique* (on les connait sans le savoir). L'agencement des mots aura un impact direct sur la signification de la phrase, la **sémantique** de la phrase. Tout comme l'ordre des mots ; *le petit garçon câline le gros chat* vs. *le gros chat câline le petit garçon*. [La syntaxe et la créativité du langage : ] Les agencements sont illimités avec un nombre de mots limité. C'est la **puissance expressive** et la **créativité du langage**. [Et la psycholinguistique ? Quel rapport avec la syntaxe ? ] La psycholinguistique s'intéresse à manière dont les règles sont apprises et comment elles sont traitées par notre système cognitif lors de la production et de la compréhension du langage. - Processus cognitifs permettant aux locuteurs d'une langue d'appliquer les règles syntaxiques et d'interpréter les phrases. - Analyser les perturbations et comprendre les troubles neuropsychologiques qui affectent le langage/la capacité à utiliser les structures syntaxiques. - L'efficacité de cet apprentissage dans les 1^e^ années de vie renseigne sur les processus d'apprentissage de façon plus générale. - Les relations entre la syntaxe et d'autres composantes du langage, notamment la sémantique. Comment la syntaxe influence-t-elle la construction de la signification ? Est-ce que la signification influence les traitements sémantiques ? - Les traitements syntaxiques sont des traitements complexes et font intervenir d'autres fonctions cognitives (mémoire, attention). Ils étudient aussi les interactions des traitements syntaxiques avec ces autres systèmes. Les théories psycholinguistiques ont pour réputation d'être abstraites et complexes. 4. [Pragmatique : niveau du discours et des textes ] Quand on s'intéresse à des ensembles plus larges (oraux/écrits), on va parler de **pragmatique**. La pragmatique est la discipline de la linguistique qu'on peut définir comme [l'étude des aspects du langage qui dépendent du contexte et de la situation de communication pour comprendre le sens des énoncés]. ***Contrairement*** à la syntaxe (structure des phrases) et à la sémantique (sens littéral des mots et des phrases), [la pragmatique s'intéresse à la façon dont les locuteurs utilisent le langage en situation, et comment le contexte influence l'interprétation du message]. [Comment le contexte peut-il influencer la signification d'une phrase ? ] Ce qu'on appelle le « **contexte** » peut envelopper plein de choses. Ex : le **contexte physique**, comme l'heure de la journée (« je suis fatiguée.e » peut prendre plusieurs sens différents en fonction du moment de la journée) ou un ressenti (« j'ai froid » peut soit donner une info, soit sous-entendre à quelqu'un de fermer la fenêtre). Il y a aussi le **contexte social**, qui renvoie aux contraintes sociales de la situation (avec qui on parle, etc.). Ou encore le **contexte cognitif** qui englobe toutes les connaissances, les expériences passées, attentes mutuelles entre les locuteurs, etc. Ce contexte permet de comprendre les messages implicites. [Et la psycholinguistique ? Quel rapport avec le discours, le texte et la pragmatique ? ] But : comprendre comment notre système cognitif traite les aspects contextuels du langage, interprète les messages implicites, et adapte l'usage du langage en fonction des situations. - Comment on est capables de comprendre des significations qui ne sont pas exprimées par des mots, mais sous-entendus inférés à partir du contexte. - Comment on perçoit les intentions communicatives derrière les mots. - Développement des compétences pragmatiques : à partir de quel âge et comment se développe la capacité à déduire ? - Étude des troubles (ex : spectre autistique) du langage et l'impact sur la pragmatique. - Comment on construit une compréhension quand on écoute/lit de longs textes ? - Quelles actions on met en place pour ajuster et améliorer notre compréhension. On s'intéresse aux processus cognitifs à l'œuvre dans la construction de la compréhension des textes. On s'intéresse aussi à nos propres capacités de compréhension ; la **métacognition**. C'est la capacité d'évaluer sa propre compréhension (basé sur le sentiment de comprendre ou non), et d'agir là-dessus. Section 6 : Conclusion Le langage humain correspond au **système complexe de communication**, et à la **faculté humaine** (**cognitive**) d'acquérir et d'utiliser ce système complexe de communication. La **régularité du langage** renvoie au fait que chaque langue constitue un système qui fait intervenir des phonèmes, morphèmes, mots et phrases, et qui s'agencent selon des règles. La **créativité** du langage permet de créer de nouveaux mots grâce à l'association de phonèmes et de nouveaux concepts (abstraits et complexes ou concrets). **Chapitre 7 -- Les sons de la parole : perception** Section 1 : Introduction XXX Section 2 : Du son au cerveau Ce qu'on appelle les « oreille » est en réalité un système très large, le **système auditif**, dont une grande partie est cachée à l'intérieur de la boîte crânienne. Ce sont ces structures internes qui contiennent les cellules sensorielles de l'audition. Elles sont capables de traduire le signal sonore venant de l'environnement en un [influx nerveux]. Il pourra ensuite être acheminé vers le cerveau, où le percept auditif sera construit. 2.1 [Le son est une onde ] Comme un caillou dans l'eau, [les sons sont des vibrations, perturbations locales de la pression de l'air, qui se propagent de proche en proche]. Elles proviennent d'un objet qui se déplace dans l'espace. Cet objet engendre une oscillation des molécules dans l'air. Elles vont heurter et mettre en mouvement les molécules à proximité (propagation de l'oscillation). Si on regarde une onde sonore, par endroits, ces molécules sont très concentrées (**compression**) et à d'autres, elles sont plus rares (**dilatation**). Le graphique est représenté en **sinusoïde** -- les pics vers le haut sont des compressions et ceux vers le bas, des dilatations. - Perception visuelle =\> ondes électromagnétiques - Perception auditive =\> ondes mécaniques Le graphique qui représente l'amplitude de l'énergie en fonction du temps de ces ondes, est un **oscillogramme**. L'énergie dont on parle ici, est la force des vibrations des molécules d'air, et donc aux successions de compressions -- dilatations. ![](media/image56.jpeg)L'**amplitude**, c'est l'intensité des sons perçus. Plus elle est élevée, plus la sensation sera forte. Elle est exprimée en décibels (**dB**). La **fréquence** permet de décrire une onde sonore et dépend du temps (toujours en sec). Elle correspond au nombre de cycles entiers qui tiennent en 1s. Elle est mesurée en Hertz (**Hz**). 1Hz correspond à 1 cycle/sec. La fréquence détermine la hauteur du son qu'on va entendre --plus elle est élevée, plus le son sera perçu comme aigu. 2. [Est-ce qu'on peut entendre toutes les fréquences ?] Le système auditif humain n\'est pas adapté pour entendre toutes longueurs d'onde. On n'entend ni les infrasons (+ grave que 20Hz), ni les ultrasons (+/- 16000 à 20000 Hz). - Cette capacité évolue avec l'âge, plus on vieillit, plus on perd la capacité à entendre les sons aigus. 3. [Différents types de sons ] ![](media/image58.jpeg)Une autre caractéristique qui va déterminer la nature du son, c'est la **forme** que l'on va prendre. Une simple onde sinusoïdale, est un **son pur**, ils sont composés d'une fréquence unique (ils n'existent pas dans la nature). Les sons autours de nous sont des **sons complexes**. Parmi eux, il y a des sons **complexes périodiques** (sons **harmoniques**) et des sons **complexes non-périodiques** (**bruits**). La différence entre les 2 est la présence d'un motif régulier qui se répète (sons harmoniques) ou pas (bruits). Un son pur est toujours composé d'1 fréquence unique (ex : 1Hz), et un son harmonique sera de plusieurs fréquences. On le voit mieux sur ce qu'on appelle un **spectre**. C'est une visualisation de l'amplitude en fonction de la fréquence. La [transformée de Fourier] permet de décomposer une onde (procédure math). Tout ce qu'il faut retenir c'est qu'une onde complexe est toujours composée de plusieurs ondes simples. Pour les sons harmoniques, la fréquence la plus basse est appelée **fréquence fondamentale** et les autres fréquences, des **harmoniques** (multiples entiers de la FF). La FF détermine la hauteur perçue et les harmoniques, les timbres. Les voyelles sont des sons complexes harmoniques. ![](media/image60.jpeg)Les bruits peuvent être décomposés en une somme de sinusoïdes simples mais à la différence, il n'y a pas cette structure régulière. Les consonnes sont des bruits. Une 3^e^ manière de voir le son, c'est par **spectrogramme** (avant sonagramme). Il permet de montrer l'amplitude sur différentes bandes de fréquence. Il intègre les 3 dimensions en un seul graphique (amplitude, fréquence, temps). Sur les ordonnées on a les fréquences, multiples lignes horizontales très fines et chaque ligne correspond à une bande de fréquence. L'abscisse représente l'évolution du signe de parole en fonction du temps. Le code couleur donne une info sur l'amplitude ; + c'est fort, + c'est rouge / + c'est faible, + c'est bleu. 4. [Quelques notions d'anatomie ] Le **système auditif**, basé sur des cellules réceptrices spécialisées, transforme la stimulation sonore en influx nerveux. Grâce à ça, le cerveau construit la représentation mentale d'un son. Le système auditif est séparé en 3 parties : - **Oreille externe** : pavillon et conduit auditif - **Oreille moyenne** : tympan et osselets - **Oreille interne** : cochlée et vestibule \(A) oreille externe ; (B) oreille moyenne ; (C) oreille interne ; (D) cochlée avec membrane basilaire La forme particulière du **pavillon** permet d'amplifier le son et de l'acheminer via le **conduit auditif externe** jusqu'au **tympan**. Lorsqu'il reçoit les vibrations, il se met à vibrer. De l'autre côté, le tympan est en contact avec les **osselets** (3 petits os : **marteau** ; **enclume** ; **étrier**). Le marteau est direct relié au tympan, l'enclume est reliée à l'étrier via deux articulations. L'étrier est en contact avec l'oreille interne au niveau de la **fenêtre** **ovale**. Les osselets permettent de : - Amplifier le son. - Transmettre les sons entre 2 milieux : **milieu aérien de l'oreille externe** et **milieu aqueux de l'oreille interne**. L'action de l'étrier sur la fenêtre ovale met en mouvement le liquide à l'intérieur de la cochlée et les vibrations vont se propager dans ce milieu jusqu'à rentrer en contact avec la **membrane basilaire** qui contient les cellules réceptrices de l'audition, **cellules ciliées**. Les axones des cellules ciliées sont connectés aux cellules du **ganglion spiral** dont les axones forment le nerf auditif, qui va acheminer l'influx nerveux vers les **régions auditives** du cortex cérébral, qui se situent au niveau du **lobe temporal**. - ![](media/image62.jpeg)Les cortex auditifs primaire et secondaire sont dans le pli qui sépare le lobe temporal des lobes frontal et pariétal. On retrouve une organisation particulière de l'info au niveau de la membrane basilaire de la cochlée ou du cortex auditif primaire. Les cellules physiquement proches vont traiter des sons/fréquences similaire, on parle d'organisation **tonotopique**. 5. [Quels sons l'oreille humaine peut-elle capter ? ] Nos oreilles sont des organes très **sensibles**, on a un **seuil d'audibilité**. Ce seuil change pour chaque fréquence. La **zone d'émission de la parole** correspond aux fréquences auxquelles on est le plus sensibles. Conclusions : nos oreilles sont adaptées pour entendre les sons du langage. Si les sons sont trop forts, en plus de faire mal, cela peut aboutir à la destruction du tympan, voir des cellules ciliées. Si ces cellules sont détruites, on perd totalement la capacité d'entendre les fréquences correspondantes car elles ne se régénèrent pas. Section 3 : Les sons de la parole : articulation et acoustique On ne peut pas vraiment comprendre les mécanismes de la perception de la parole sans la production de la parole. On parle en expirant : nos poumons se remplissent d'air, qui va passer dans la **trachée** et à travers les **cordes vocales**. Cela va engendrer une vibration de l'air et permettre d'émettre du son. Après le passage des cordes vocales, l'air va atteindre les **cavités buccales/nasales** (caisses de résonnances). Il va y avoir des « obstacles » : les **articulateurs** (luette, palais, langue, dents, lèvres). Leur positionnement va moduler le son et permettre l'expression des phonèmes. 3.1 [Voyelles] ![](media/image64.jpeg)Il est impossible de prononcer des voyelles si les cordes vocales sont complètement relâchées. La position des articulateurs permet de distinguer les voyelles : ouverture de la bouche, position de la langue, arrondissement des lèvres et nasalité. Le **triangle vocalique** permet de visualiser les voyelles selon les 4 dimensions ; langue (antérieur/postérieur), lèvres (écartées/arrondies),.... Ces caractéristiques articulatoires, sont en lien direct avec leur caractéristiques sonores. La forme donnée au canal vocal par les articulateurs détermine la distribution d'E sur différentes bandes de fréquences. Pour chaque voyelle, l'E acoustique est autour de bandes de fréquences particulières et stables, les **formants**. Les fréquences du 1^e^ et 2^e^ formants suffisent pour identifier les voyelles du français. 3.2 [Consonnes] Les consonnes résultent d'une fermeture partielle/totale d'un endroit particulier du canal vocal. Pour décrire des consonnes, il faut spécifier : - Le mode d'articulation : type de fermeture partielle (constriction/friction) ou totale (occlusion). Il y a donc des consonnes fricatives (ex : /s/) et occlusives (ex : /p/). - Le lieu de fermeture : point d'articulation (lèvres, palais...) - Le voisement : vibration, ou non, des cordes vocales. 3. [(Co-) Articulation des phonèmes à l'intérieur de mots et de phrases ] - ![](media/image66.jpeg)D'un point de vue sonore, il n'y a (presque) pas d'interruption dans le flux de parole ni entre les phonèmes. - Il est possible de distinguer l'alternance de fréquence et d'E entre chaque /s/ et chaque voyelle successive, pour lesquels les formants sont visibles. - Les 4 /s/ du début peuvent être différents car ils prennent en compte le formant d'après. - Dans le « pies », on ne voit pas de discontinuité. Ces remarques montrent que : les phonèmes successifs ne sont pas produits séparément, ni même successivement. On appelle ça la **coarticulation**. Pour la production, la coarticulation correspond au fait que [les gestes qui produisent des phonèmes, se superposent temporellement]. Pour le plan réceptif, la **transmission en parallèle** des phonèmes en est la conséquence. Si un mot est composé de 3 phonèmes, on doit produire 3 gestes articulatoires qui correspondent aux 3 phonèmes successifs qui se **superposent temporellement**. Le geste articulatoire qu'on fait pour produire X phonème, sera influencé par le phonème d'après. Quand on parle de transmission en parallèle, ça veut dire *en même temps*. Le son X sera différent d'un mot à l'autre. Cet indice, notre système cognitif l'utilise pour savoir le phonème qui va suivre =\> l'info est transmise en parallèle. La notion de transmission en parallèle des phonèmes lors de la coarticulation, est cruciale car c'est elle qui [permet de comprendre l'efficience de la transmission de la parole]. Toute théorie cognitive expliquant la perception de phonèmes, devra composer avec cette propriété. Section 4 : La perception de la parole 4.1 [La théorie des traits pour expliquer la perception des phonèmes ] En psychologie de la perception, on peut utiliser la *théorie des traits* qui consiste à reconnaitre une lettre grâce à ses caractéristiques. Si on regarde les conséquences de la coarticulation sur le signal sonore qui correspond aux différentes syllabes produites avec le /d/, on voit ça : ![](media/image68.jpeg)Le son /d/ varie en fonction de la voyelle qui suit et on voit aussi que le /d/ qui se trouve à gauche du formant, et qui devrait être commune à tous, est largement différente. Il est très difficile de trouver de tels traits acoustiques, qui permettent de catégoriser les signaux en phonèmes. Le signal de parole varie très fort. Une même phrase peut beaucoup changer si elle est dite par un homme ou une femme, l'environnement, etc. [En bref, il est impossible de trouver des traits acoustiques communs car il y a trop de variations]. 4.2 [La perception catégorielle] Des chercheurs se sont concentrés sur la recherche de **traits acoustiques**, qui permettrait de catégoriser les phonèmes. Pour ça, il faut les manipuler, les faire varier systématiquement et mesurer si ça modifie la perception. Le trait qui distingue les consonnes, c'est le **voisement** : dans le cas des **consonnes occlusives**, il y a des **consonnes voisées** (/d/) et des **consonnes non-voisées** (/t/). La différence entre les 2 est la présence/absence de [vibration des cordes vocales]. Si elles sont prononcées en début de syllabe (consonne + voyelle), il y aura d'office une vibration car les voyelles font toutes vibre les cordes. La seule différence entre /da/ et /ta/, c'est le moment où les cordes vocales commencent à vibrer. Pour le /da/, la vibration comment avant l'explosion et inversement pour le /ta/. Cet intervalle entre le début de la vibration et l'explosion, s'appelle le **délai d'établissement du voisement** (**DEV**). Pour comprendre comment le DEV modifie la perception, des chercheurs ont créé des sons correspondant aux /da/ et /ta/ mais avec des DEV différents (pas naturels !). Ils ont fait un continuum avec un /da/ à DEV = -150ms et un /ta/ avec un DEV = +150ms. Le but des participants était de dire s'ils entendaient un /ta/ ou un /da/. Leur hypothèse allait dans le sens qu'il faudrait s'attendre à une évolution continue des réponses des participants. - Observer cette évolution voudrait dire que la perception de ces sons est elle-même continue. L'idée étant qu'avec chaque modulation du DEV (-150, -140,...) la syllabe /da/ se rapprocherait du /ta/ et induirait donc une modification de + en + générale. - ![](media/image70.jpeg)Obtenir ce patron de réponses indiquerait que [la perception des différences entre les phonèmes est un phénomène continu]. La réponse obtenue est très différente ! - Les sons avec un DEV en dessous de +25ms (-150 =\> +25ms), ont été perçus comme /da/ et au-dessus, comme /ta/. Ces résultats sont en faveur de l'idée que **notre perception des phonèmes est un phénomène catégoriel**. Cette tâche est appelée « **tâche d'identification des phonèmes** ». Même si cela a beaucoup évolué, on l'utilise toujours pour identifier un déficit de la perception de la parole chez des personnes rencontrant des difficultés dans les apprentissages scolaires. Ces résultats sont en faveur de la notion d'un **mécanisme de perception spécialisé pour les sons de la parole**. 4.3 [L'intégration audio-visuelle de l'information phonétique ] Une expérience a été réalisé sur base de « **l'effet McGurk** ». C'est un phénomène de [fusion entre l'information visuelle et l'information auditive]. ![](media/image72.jpeg)Dans cette étude, 3 groupes (3-4ans / 7-8ans / adultes), ont vu 4 séquences de l'effet McGurk et devaient simplement dire ce qu'ils entendaient. Les réponses ont été classées en 5 catégories selon qu'elles correspondent au son, à l'image, à la fusion entre les deux, à la combinaison des deux ou à d'autres réponses. Les plus intéressant sont les phénomènes de **combinaison** (image = BA-BA / son = ga-ga) et de **fusion** (image = GA-GA / son = ba-ba). Dans le 1^e^ cas, l'occlusion bilabiale, nécessaire pour prononcer /b/, est un indice très saillant qui n'est pas compatible avec le /g/. Il y a conflit entre les deux et ça va conduire à diverses combinaisons. Dans le 2^e^ cas, l'info /ga/ est compatible avec /da/ car ça ne change quasiment rien visuellement. En plus, l'info /ba/ est acoustiquement proche du /da/, ce qui crée une fusion. - Le phénomène de fusion n'est pas affecté par la connaissance préalable de l'illusion. - Les indications d'intégration de l'info auditive et visuelle pour la parole semblent déjà observables chez des bébés de quelques mois. Section 5 : Théorie d'un module spécialisé : la théorie motrice de la perception de la parole Des chercheurs ont proposé l'idée d'un **décodeur de la parole**, qui correspondrait à un **système spécialisé dont le rôle serait d'identifier les phonèmes**. La théorie motrice de la perception de la parole dit que la perception d'un phonème impliquerait un **mécanisme cognitif basé sur la stimulation des commandes motrices nécessaire pour produire les phonèmes**. - Lorsqu'on entend un phonème, notre cerveau produit une activité similaire que quand on prononce ce même phonème. - La mise en lien entre ce qu'on entend et la simulation qui permet la reconnaissance du phonème. 5.1 [Comment notre cerveau produit un mouvement ? ] Pour bouger un membre, il faut que le cerveau envoie une commande vers le bras. Cette commande part du **cortex moteur primaire**, voyage via les nerfs de la moelle épinière vers les muscles du bras. [Le cortex moteur se trouve à l'avant du sillon central qui sépare le lobe frontal du lobe pariétal.] Son rôle est de gérer les commandes motrices de tous les muscles du corps, y compris ceux utile pour parler. Il est organisé de manière **somatotopique** : chaque région du cortex correspond à un groupe de muscles et 2 régions corticales adjacentes envoient des commandes aux muscles adjacents. La taille de la région corticale est proportionnelle à la complexité des gestes que ces muscles produisent. L'**homonculus moteur** a été construit sur base de cette info corticale. 5.2 [Neurones miroirs ] (Expérience réalisée sur des macaques) L'exposition à des mouvements de la main de l'expérimentateur provoque l'activité d'un sous-ensemble de neurones du cortex moteur, qui sont normalement actifs juste quand l'animal réalise lui-même l'action. 5.3 [Activation des régions motrices pendant des tâches de perception des syllabes ] Des chercheurs ont utilisé l'imagerie à résonnance magnétique fonctionnelle (**IRMf**) sur des sujets et ont enregistré leur activité cérébrale lorsqu'ils répétaient mentalement des syllabes avec une consonne labiale, ou avec une consonne dentale. Ils ont aussi enregistré quand ils écoutaient ces mêmes syllabes et quand ils faisaient mentalement des mouvements impliquant leurs lèvres/dents. L'activité dans le cortex moteur est différente selon les syllabes. Les syllabes labiales activent la région corticale correspondant au rôle moteur des lèvres, idem pour les syllabes dentales avec la région corticale de la langue. En bref, des régions spécifiques du cortex moteur étaient activées pour les taches de la perception de la parole. Cette étude ne permet pas de dire que le cortex moteur *joue un rôle* lors de la perception de la parole ! Cela peut être simplement une conséquence secondaire de l'activité dans les aires responsables de la perception(épiphénomène), sans vraiment contribuer à la construction d'une représentation perceptive. 5.4 [Influence de l'activation motrice sur la perception ] Meister et al. (2007) ont utilisé la technique de la stimulation magnétique transcrânienne répétée (**TMS**). Elle permet de stimuler les régions du cerveau de manière non-invasive. Elle va générer un champ magnétique qui va induire une activité électrique locale dans la région cérébrale sous-jacente. Selon les paramètres, elle permet d'exciter ou d'inhiber sélectivement une région du cortex. Il y avait 2 tâches : - **Condition verbale **: ils entendaient des syllabes noyées dans un bruit homogène et devaient décider si c'était /pa/, /ta/ ou /ka/. - **Condition visuelle **: ils devaient discriminer entre 3 couleurs (rouge, bleu et vert). Les 2 conditions ont été calibrées pour que le niveau de performance soit homogène (+/- 75% de bonnes réponses). La stimulation a été appliquée sur une partie du [cortex moteur gauche] (gyrus temporal supérieur gauche -- aires sensorielles auditives). Il y a eu une dégradation des performances au niveau de la condition verbale uniquement Car elle n'a pas été modifiée lors de la stimulation du cortex moteur ni par celle du gyrus temporal supérieur. Si l'activité des régions motrices ne sont pas en lien direct avec le processus de perception, on n'observe pas de dégrad