Synthèse neuropsychologie, psychologie cognitive et psycholinguistique PDF
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Ce document présente une synthèse de la neuropsychologie, de la psychologie cognitive et de la psycholinguistique. Il explore les concepts fondamentaux de la cognition, de la perception et de la façon d’étudier ces processus. Le texte aborde l'interaction entre le cerveau et les fonctions cognitives.
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Synthèse neuropsychologie, psychologie cognitive et psycholinguistique Chapitre 1 – La cognition Section 1 : de quoi on parle ? 1.1 La cognition Qu’est ce que la cognition… ? Prenons des exemples pour le comprendre intuitivement : Exemple 1 : bien qu’on ait l’i...
Synthèse neuropsychologie, psychologie cognitive et psycholinguistique Chapitre 1 – La cognition Section 1 : de quoi on parle ? 1.1 La cognition Qu’est ce que la cognition… ? Prenons des exemples pour le comprendre intuitivement : Exemple 1 : bien qu’on ait l’impression que la petite fille s’enfonce dans le sol (photo), elle est belle et bien accoudée à un muret. Il semblerait que l’on perçoive autre chose que ce qui est physiquement présent dans le monde (et sur la photo). Exemple 2 : qu’entend-on si une personne nous répète 20 fois une même paire de syllabes, les 3 premières en regardant la personne et les 3 suivantes ayant les yeux fermés… ? Exemple 3 : bien qu’on regarde autant de temps qu’on le veuille cette alternation de deux photos différentes, on ne va pas voire la différence, pourtant il y a un changement. Comment est-ce possible de ne pas le remarquer ? Exemple 4 : si on nous demande ce qu’on faisait le jeudi 21 septembre 2023 à 10h24, il est fort probable qu’on pense ne pas s’en souvenir alors que si on réfléchit… On peut se rappeler que c’était un lundi et qu’on avait probablement X cours. Si c’est le cas, on peut alors répondre. Ces 4 exemples renvoient à des domaines de la psychologie cognitive : perception (1&2), attention (3) et mémoire (4). Ce sont des fonctions cognitives : activités de notre esprit qui nous permettent d’être en interaction avec notre environnement. ➔ « Esprit » = ensemble des capacités mentales propres au système nerveux central. Dans notre vie, nous traitons des informations de notre réveil au moment où on se couche (lumière, sons, etc.) grâce à ces fonctions cognitives. Cette activité mentale de traitement de l’information par notre cerveau définit ce qu’on appelle la cognition humaine, c’est notre « appareil à penser ». Les infos reçues sont le socle de notre vie mentale, sans perception, attention, mémoire, prise de décision, langage, raisonnement,… impossible de faire quoi que ce soit ! 1 ➔ L’objet de la psychologie cognitive est d’étudier les fonctions cognitives pour expliquer la vie mentale humaine. ➔ Psycholinguistique = champ d’étude qui s’intéresse aux processus cognitifs mis en œuvre dans le traitement et la production du langage. 1.2 Psychologie cognitive et autres domaines La complexité de la cognition amène deux conséquences : 1. La place de la cognition au-delà de la psychologie cognitive. On ne s’intéresse pas à la cognition juste dans le domaine de la psychologie cognitive. Un champ de recherche porte sur la cognition sociale, au carrefour de la psychologie sociale et de la psychologie cognitive. Il est aussi apparu la psychopathologie cognitive – but ? examiner en quoi les dysfonctionnements cognitifs contribuent au développement ou au maintien de symptômes psychopathologiques et des difficultés qui y sont associées. 2. Contacts entre la psychologie cognitive et d’autres champs. La psychologie cognitive s’est développée au contact d’autres disciplines. Parfois la rencontre entre deux domaines a donné un nom à un troisième domaine. La neuropsychologie cognitive s’intéresse au cerveau des patients, en tant qu’objet d’étude. Il a commencé à se développer en s’intéressant à la localisation des fonctions psychologiques du cerveau. Exemple de Paul Broca (chirurgien du 19e siècle) : bien plus complexe aujourd’hui… Mr Leborgne a un sévère déficit du langage à la suite d’une grosse crise d’épilepsie. Totalement valide et intelligent, il comprend tout ce qu’on lui dit mais ne sait répondre que par « tan » (aphasie : perte de la capacité à parler). Post-mortem, P. Broca ouvre le cerveau du patient et découvre une lésion Dans une partie de la région frontale du cerveau du côté gauche. Il en a donc conclu que cet endroit (appelé l'aire de Broca) était responsable de la capacité à parler. La neuropsychologie cognitive s’intéresse au fonctionnement cognitif et pas juste à la structure du cerveau) comme la psychologie cognitive. La différence est que : - La neuropsychologique cognitive étudie la cognition à travers des patients ayant des troubles cognitifs (acquis/développementaux) dont l’origine est dans le cerveau. 2 - La psychologie cognitive étudie le fonctionnement cognitif en examinant comment des personnes avec des habilités cognitives normales (« personne saine ») effectuent des tâches. Étudier le fonctionnement permet non seulement de comprendre le fonctionnement cognitif de l’être humain mais aussi de développer de la réhabilitation. Les neuropsychologues clinicien.nes aident les patients à retrouver leur fonctionnement cognitif normal ou à ralentir le déclin des fonctions cognitives. ➔ Les neurosciences sont l’ensemble des disciplines qui étudient le système nerveux, depuis l’échelle moléculaire jusqu’au niveau des organes. Section 2 : Comment étudier la cognition ? 2.1 L’expérimentation La plupart du temps, nos intuitions sont fausses ou non généralisables. Elles ne permettent pas une conclusion valable pour tous, tandis qu’en études scientifiques en psychologie, on cherche un caractère commun ou universel. On utilise principalement l’expérimentation. ➔ Expérimentation = faire des expériences dans lesquels des facteurs sont explicitement manipulés tandis qu’un ou plusieurs autres facteurs sont mesurés. Facteurs manipulés = variables indépendantes ; facteurs mesurés = variables dépendantes. Les processus cognitifs sont souvent non conscients ou se déroulent si rapidement que les intuitions ne fournissent aucun guide, l’introspection non plus… 2.2 La démarche expérimentale La recherche en psychologie s’inscrit dans le cadre d’une démarche expérimentale (paire avec l’expérimentation). Le but de la science est de comprendre des phénomènes, d’accumuler des connaissances sur des phénomènes, en se basant sur des théories et des hypothèses. ➔ Théorie = proposition scientifique pour expliquer un phénomène. ➔ Hypothèse = une des parties de la théorie pour expliquer un aspect précis du phénomène étudié. Elle est admise provisoirement avant d’être soumise au contrôle de l’expérience. Si on admet la théorie que : la lecture est automatique, on a donc une hypothèse testable. À partir de là, on peut imaginer la tester. On donne des listes de mots (« bleu » écrit en rouge, « vert » écrit en jaune, etc. VS « bleu » écrit en bleu, « vert » écrit en vert, etc.) et on demande de dire la couleur des mots sans lire le mot. Si les résultats sont meilleurs dans le deuxième cas, cela signifie que l’hypothèse est correcte. - Ce qui est manipulé : « type de liste » = VI - Ce qui est enregistré : « nombre d’erreurs » = VD Si la hypothèse n’est pas validée, c’est que soit la hypothèse de départ n’est valide (affaiblissant l’ensemble de la théorie, soit l’expérience n’était pas adéquate en fonction de l’hypothèse. 3 Stimulus : « cause externe ou interne capable de provoquer la réaction d’un organisme vivant ». La relation théorie-hypothèse-expérience n’est la seule méthode !! Il faut bien retenir que : - Les théories ne tombent pas du ciel, elles découlent d’autres expériences. Une théorie n’est viable que si les hypothèses qui en découlent sont confirmées. - La science avance à petit pas. Pour qu’une théorie soit solidement étable, il va falloir lui apporter des expérimentations (plusieurs fois pour voir si on a les mêmes résultats). - La science est une affaire collective. - La route n’est pas toujours droite. Sur base d’expériences qui vont « nulle part », les chercheurs.es vont réfléchir. - Les théories scientifiques ne sont pas immuables, on procède par essais-erreurs. Si des scientifiques ne sont pas d’accords entre eux, ils peuvent finir par utiliser la même expérience et tomber d’accord. Les théories sont constamment renouvelées. 4 Chapitre 2 – La perception Section 1 : C’est quoi la perception But ? Comprendre la base de toute vie mentale. La vie mentale, orchestrée par notre cerveau, commence par de la prise d’informations. Ensuite, cette information est traitée et c’est ce que nous allons voir dans ce chapitre. 1.1 Comprendre le terme « perception » On ne sait pas réellement définir ce qu’est la perception et pour ça qu'on donne juste des synonymes. Lorsque on perçoit quelque chose, c’est souvent dans le contexte de nos sens ; entendre le chant d’un oiseau, voir un vélo, un glaçon sur notre peau, reconnaitre de la joie sur un visage. Ces quatre situations simples engagent différents mécanismes, décrits comme la sensation, la perception et l’identification. - Sensation = recevoir une stimulation physique via ses sens + l’encoder dans notre SN (Aschraft, 1998). Base de notre vie mentale : recevoir des ondes lumineuses via nos yeux / ondes sonores via nos oreilles => traduites en signaux électriques / chimiques (ex : potentiels d’actions qui se propagent le long des axones des neurones). - Perception = basé sur ces signaux et correspond aux processus par lesquels on interprète ces informations transmises par nos sens. - Identification (/ reconnaissance) = assigner le produit de la perception (« percept » ou « représentation perceptive ») à une catégorie mentale, càd un ensemble d’objets encodés en mémoire pour lesquels on a déjà des informations. ➔ La perception ne mène pas toujours à l’identification !! Exemple : 1. En regardant ces deux figures, nos yeux perçoivent des ondes lumineuses qui excitent des neurones présents au fond de nos yeux => sensation. 2. Notre cerveau perçoit alors des contours droits / courbés avec un contraste plus fort au centre qu’en arrière-plan => perception. 3. Dans un cas seulement, notre cerveau va très rapidement associer la représentation perceptive à une catégorie mentale (catégorie des triangles) => identification / reconnaissance. On a ici la preuve qu’on peut percevoir sans spécialement identifier ! On peut aussi se demander si… - Percevoir = identifier ? Non ! - Percevoir = voir ? Non, on peut percevoir avec d’autres sens ! - Percevoir = devenir conscient ? Non, on peut avoir vu quelque chose sans avoir l’impression ! 5 Définition de la perception : processus par lequel on interprète les informations transmises par nos sens. Si la perception n’existait pas, les autres fonctions cognitives n’existeraient pas ! 1.2 Les organes utilisés pour voir La perception repose sur la sensation via nos 5 sens. Les cellules et les tissus spécialisés es organes sensoriels reçoivent des stimuli bruts qu’ils traduisent en des signaux que le système nerveux peut utiliser. Des nerfs relaient alors ces signaux vers le cerveau qui les interprète au cours du processus de perception. Même si nos cinq sens peuvent nous permettre d’étudier la perception, les deux principaux sont la vue et l’ouïe, pourquoi… ? - La présence des personnes avec des déficiences auditives et visuelles a intensifié les recherches scientifiques. - Il a été démontré que la vision est le sens dominant dans le fonctionnement humain. Gibson (1933) a montré que la vision prend le dessus sur le toucher quand les infos sont contradictoires. 1.3 Comprendre la perception est un défi ! Nous percevons, la plupart du temps, sans aucun effort, sans même que nous en ayons conscience et de façon extrêmement rapidement (quelques fractions de secondes). C’est pour cela que la perception est si complexe à étudier. On peut aussi se dire que les ordinateurs sont plus intelligents que nous mais ils n’ont pas les compétences de perception d’un enfant de 5 ans ! Ils sont incapables d’identifier des formes. 1.4 La perception est une construction La plus grosse idée reçue, c’est que la perception est simplement des copies du monde extérieur. Mais il y a un problème avec cette idée, appelée « réalisme naïf », c’est que c’est faux ! Les processus perceptifs ajoutent des « choses » et des interprétations à ce qui est disponible via nos organes sensoriels. Illustration 1 : les illusions Lorsque nous voyons ces deux flèches, nous avons tendance à dire que celle du dessus est plus longue que celle du dessous, alors que nous savons que c'est une illusion et que nous sommes trompés. Ceci est encore une preuve que percevoir, ce n’est pas voire. Idem pour ces deux carrés de lignes. On aurait tendance à dire que celles de gauche sont obliques, alors qu’elles sont parallèles, tout comme la figure de droite. 6 On pourrait dire que ces illusions sont juste des erreurs de perception. On considère plutôt que les illusions sont des manifestations de mécanismes qui interviennent dans toutes les situations perceptives. Les illustrations ne montrent donc pas tant les limites de notre système, mais plutôt comment il s’adapte aux situations ambiguës. D’autre illusions ont prouvé que la perception consiste en une interprétation de l’information sensorielle et que nous construisons ce que nous voyons. Le deuxième problème avec le « réalisme naïf », est qu’il ne donne aucune explication sur comment la perception se déroule : dire « ce que je perçois, c’est ce que je vois » ne donne pas d’informations sur les mécanismes en jeu. Section 2 : Base de la perception visuelle On ne peut pas comprendre la perception sans connaitre le fonctionnement de base des systèmes physiologiques associés aux modalités sensorielles. Il y a des choses que nous ne pouvons pas percevoir, non pas parce que nous aurions les limites cognitives, mais parce que les caractéristiques de nos systèmes sensoriels imposent des restrictions sur nos capacités perceptives. 2.1 Quelques notions d’anatomie La lumière est une radiation électromagnétique semblable aux autres si ce n’est qu’on est équipés d’un organe sensoriel spécialisé pour la détecter ; l’œil. ➔ Radiation électromagnétique = mode de propagation de l’énergie dans l’espace. Un classement des rayonnements électromagnétiques a été crée en fonction de leur longueur d’onde : On peut voir que seule une petite partie est visible par l’être humain. On appelle ça la « lumière visible ». La lumière blanche (ex : soleil) envoie un mélange égal de toutes les longueurs d’onde dans toutes les directions, les rayons lumineux. Ils sont constitués de photons (particules d’énergie) et peuvent varier en longueur d’onde et intensité. Quand ces rayons lumineux traversent des éléments, il se produit des phénomènes… : - L’absorption : des photons rentrent en collision avec de la matière, perdent leur énergie et disparaissent. 7 - Une autre partie est réfléchie : quand un rayon frappe une surface sombre, la surface absorbe la plupart de la lumière mais quand cette surface est claire, les photons sont réfléchis. Des surfaces absorbent différentes longueurs d’onde dans des proportions différentes et diffusent les différentes longueurs d’onde dans des proportions différentes, ce qui donne les couleurs. ➔ Synthèse : lorsque les rayons lumineux rencontrent de la matière, leurs caractéristiques changent. Les nouvelles caractéristiques rentrent dans nos yeux et portent les informations sur les éléments rencontrés avant, et c’est ce que notre œil va traiter. Quand les ondes lumineuses (OL) rentrent dans l’œil, elles traversent différentes espaces dont le cristallin. Il focalise la lumière venant des objets observés vers les récepteurs sensibles à la lumière – il permet que la projection de l’image soit nette sur la rétine. (Une image n’est en réalité qu’un patron d’énergie lumineuse traduit) La rétine est composée de 3 niveaux de neurones : cônes et bâtonnets (CB), bipolaires et ganglionnaires. Les CB tapissent la rétine et sont stimulés en 1e par les OL, ce sont les récepteurs spécialisés de la lumière (la lumière doit d’abord traverser les 2 premiers niveaux de cellules + vaisseaux sanguins avant d’atteindre les CB). Ils contiennent des photos-pigments, ils se transforment en absorbant la lumière et créent un influx nerveux qui se transmet aux neurones suivants. Les récepteurs sensoriels traduisent l’énergie extérieur en énergie bio-électrique. Une fois les CB activés par la lumière, ils transmettent le message aux cellules bipolaires, qui le transmettent aux cellules ganglionnaires. Les longs axones de ces cellules convergent et sortent par l’arrière de l’œil, formant le nerf optique. On a un nerf optique par œil : tous les axones de la partie gauche se regroupent au chiasma optique et vont vers l’hémisphère gauche (idem pour la droite). Les nerfs optiques filent à travers le cerveau pour atteindre le lobe occipital où le cortex visuel primaire est. Ce CVP 8 est divisé en plusieurs zones (de V1 à V8 + MT/VS) en fonction de leur spécialisation fonctionnelle : V4 pour la couleur, V3+V4 pour la forme, V3 pour le mouvement, V1+V2 distribuent les signes aux aires appropriées. Il existe 4 systèmes qui traitent en parallèle les diverses caractéristiques d’un objet. La tâche aveugle : notre œil est tel qu’il y a un endroit de la rétine où il n’y a pas de neurones. Comme il n’y a pas de neurones pour traiter l’information, nous sommes aveugles à la lumière projetée sur cette surface. Comme les TA ne coïncident pas, on pourra toujours percevoir les objets car au moins un des deux yeux capte l’information mais sous un certain angle, si l’objet n’est vu que par un seul œil, il peut être occulter. L’acuité, les CB : les CB ne se répartissent pas uniformément sur la rétine donc on peut voir 3 zones : fovea (0,5-1mm) de diamètre), parafovea (3-4mm), zone périphérique. La fovea et la parafovea forment la macula lutea : quand on fixe un objet, c’est dans la macula lutea que les images se projettent. Seule la macula lutea permet de capter des détails avec une précision bien plus importante que la fovea et parafovea, pourquoi ? Parce qu’elle est remplie de C (petites cellules concentrées dans l’espace), qui ont besoin de beaucoup d’E lumineuse pour fonctionner et qui codent pour les couleurs et les détails précis. Les B sont très sensibles aux variations de lumière et permettent de voir dans la pénombre (mais pas les couleurs !). Les CB sont distribués différemment sur la membrane rétinienne parce que les C sont concentrés dans la zone fovéale. 2.2 Collecte de l’information visuelle On pense souvent que lorsqu’on regarde autour de nous on capte de l’information en continue, mais c’est faux. En réalité on passe d’un point à un autre très rapidement : saccades (25 et 100ms). Elles sont interrompues par des pauses où notre regard se fixe sur un point de la scène visuelle : fixations (150-250ms). Nos yeux alternent constamment entre saccades et fixations, pourquoi ? Il n’y a qu’une zone de la rétine qui code pour les informations visuelles précises : dans la macula lutea, la fovea. On a besoin de faire correspondre l’objet fixé avec cette zone sensible aux détails. Pendant les saccades, il n’y a pas de prise d’information : suppression saccadique ! Pendant une saccade, la lumière change tout le temps et ne permet pas de recevoir une information claire, il y a des mécanismes physiologiques de blocage. La prise d’information se fait pendant les fixations, entre deux saccades. La durée d’un cycle complet (fixation-puis-saccade) est de 200- 300ms (entre 3, 4 et 5 cycles/seconde). Chaque cycle enregistre une scène visuelle distincte et séparée. Les informations du monde extérieur nous viennent de manière discrète et non continue. En cognitive, on dit qu’on échantillonne différentes régions de la scène visuelle. 9 2.3 Mémoire sensorielle visuelle Où va l’information ? Ces informations vont dans la mémoire sensorielle visuelle (= « mémoire iconique » - Neisser, 1967) mais sont maintenues que pour un bref instant. Exemple (Aschraft, 1998) : lorsqu’on regarde des éclairs, on peut, grâce à la lumière, distinguer le jardin. En réalité, un éclair est constitué de 3, 4 brefs éclairs mais nous ne percevons qu’un flash de lumière de +/- 1seconde. On appelle ça la persistance visuelle : il y a une persistance visuelle au-delà de sa durée physique. On a souvent l’impression de pouvoir explorer la scène visuelle et qu’elle s’estompe progressivement. Notre perception du jardin éclairé au-delà de 200ms est un évènement mental, qui reflète le phénomène de persistance visuelle. Toute cette persistance de l’information au-delà de la présence physique définit le terme de mémoire (fait de persister une information alors qu’elle n’est plus présente physiquement). On a besoin de cette mémoire visuelle parce que notre cerveau a besoin d’interpréter les signaux qu’il reçoit. Les informations sont souvent trop rapides et il faut un endroit pour les stocker : la mémoire sensorielle visuelle. 2.3.1 Démonstration : étude de la mémoire iconique - Sperling (1960) 1e expérience : il a présenté une matrice de 12 lettres (3x4) à des participants. La matrice n’était présente que 50ms et le but était de mémoriser un maximum de lettre Et de dire à haute voix les lettres souvenues. Sperling a appelé ça : rappel intégral. Ils en rapportaient en moyenne 4/12 (33%). ➔ Mais est-ce qu’ils n’en ont vu que 4 ou elles ont toutes été encodées dans le système visuel mais ils ont pu en rapporter que quatre..? Sperling a fait une 2e expérience avec cette fois un rappel partiel. C’était la même situation mais cette fois les participants ne devaient rappeler qu’une ligne (4 lettres) mais sans savoir à l’avance la ligne qui allait être demandée, ils devaient donc mémoriser un maximum. Les résultats ont montré que les participants rapportaient bien plus de lettres, environ 3/4 (80%). Cela suggère que pendant un bref instant, ils ont conservé en mémoire toute la matrice. Une 3e expérience a montré que ce type de résultats n’est obtenu que si le signal désignant une ligne est immédiat. S’il survient 1s après, la performance chute d’environ 33%. Revenons sur le fait que les résultats (2e exp.) ne sont obtenus que si le signal survient immédiatement après. Sperling propose une explication : les sujets utilisent un registre sensoriel visuel pour reconnaitre la rangée. Lorsqu’ils voient le signal, ils font sélectivement attention, dans le registre, à la rangée indice et essayent d’identifier les lettres de cette rangée. Les résultats dépendent de la clarté des informations dans le registre : durée entre le signal et le stimulus. Au plus la clarté de l’image sensorielle diminue, au plus il est difficile de reconnaitre les lettres. ➔ Une fois l’information visuelle codée par les neurones de la rétine, cette info brute est stockée dans un registre d’information visuel pendant 1s. La vitesse de dégradation peut dépendre de l’intensité, du contraste, de la durée mais aussi de la vitesse à laquelle on passe au stimulus suivant. 10 2.3.2 Et ensuite…? Il est indispensable de savoirs où sont les objets autour de nous et comment ils se comportent. Le système perceptif doit donner des infos utiles pour qu'une bonne représentation du percept soit mise en contact avec les infos de la mémoire (Pour reconnaitre un objet). Pour ça, on doit faire la distinction entre vision de haut et de bas niveau. Section 3 : La perception visuelle de bas niveau La rétine est une surface bidimensionnelle, pourtant nous voyons en 3D, comment se fait-il ? C’est très compliqué car un nombre illimité d’objets peuvent produire la même image sur la rétine, exemple : les 3 barres mènent à la même image sur la rétine, pourtant elles ne sont pas les mêmes. Pour comprendre comment notre système perceptif gère ce type de situation, il faut se demander comment se situe les objets, leur localisation et leur mouvement. 3.1 La perception des couleurs ➔ La couleur est l’effet perceptif causé par les variations de la longueur d’onde de la lumière. La couleur est une des caractéristiques fondamentales des objets. Les récepteurs sensibles à la composition spectrale sont les cônes. Il y en a 3 sur la rétine, qui contiennent des pigments différents. Un certain type de C contient un pigment qui absorbe préférentiellement des photons dont la longueur d’onde correspond au bleu, un autre au rouge et un autre au vert. C’est la pondération de ces trois couleurs qui nous permet de voir toutes les couleurs. Parfois il peut arriver d’avoir des anomalies (ex : le daltonisme – déficience d’un ou plusieurs types de C de la rétine (pas de C codant pour le vert). Il peut aussi avoir des anomalies même avec un système visuel opérationnel ! On peut percevoir les couleurs de façon déformée par rapport à la réalité. Si on observe un disque rouge sur fond blanc (40s) et qu’il est ensuite agrandi, on va avoir l’impression que le centre du deuxième rond va être moins rouge. Cet exemple illustre que « toute exposition prolongée à une caractéristique provoque généralement un phénomène de fatigue qui rend le système moins sensible à la caractéristique considérée ». Dans l’exemple, au centre, les récepteurs sont devenus moins sensible au rouge que ceux de la périphérie Pas stimulés dans la 1e phase. Dans une 2e expérience, on observe un disque rose (40s) puis on fond blanc et on va avoir l’impression de voir du vert. Ça illustre que certaines nuances constituent 11 des couples. La diminution de la sensibilité à un des pôles du couple correspond à une augmentation de la sensibilité du pôle opposé. 3.2 La localisation des objets Pour localiser des objets, on doit les séparer les uns des autres et de l’arrière-plan : ségrégation, déterminer leur distance par rapport à nous : distance et profondeur et se représenter la direction et la vitesse (si mouvement) de façon à prédire sa localisation : mouvement. ➔ Ces dimensions sont nécessaires pour déterminer où est un objet, elles sont donc liées les unes aux autres et sous-tendu es par les mêmes aires neurales. 3.2.1 La ségrégation Le monde est constitué de couleurs mais aussi de surfaces qui se coupent et d’objet stables et solides. Le système visuel possède la capacité de structurer le monde visuel. Notre système perceptif permet de distinguer les figures du fond, ce qui permet de localiser les objets. Certaines ségrégations sont assez claires mais d’autres moins. Il existe des cas où plusieurs organisations fond/forme sont possibles mais ne peuvent pas coexister simultanément (chat – éléphant). Il peut aussi arriver que le système perceptif construise des contours illusoires en l’absence de données sensorielles (triangles). Quels sont les indices que nous utilisons pour ségréguer ? (« Gestalt psychologues ») Quand on regarde quelque chose, notre cerveau va vouloir créer des « groupes » avec ce qu’il voit et va les définir via le principe de proximité ou de similitude. On retrouve aussi la bonne continuation : notre système perceptif préfère les contours qui continuent sans incident durant le trajet (un bâton derrière un rectangle, on va tout de suite penser que le bâton est entier mais ça pourrait aussi être deux bâtons). 3.2.2 La distance et la profondeur Même si cela nous semble sans effort, notre système visuel intègre beaucoup d’informations différentes pour déterminer la profondeur… ! 1. Avec un seul œil Certaines informations ne requièrent que d’un seul œil : l’interposition, la perspective linéaire et la taille relative. - Interposition : si un objet interrompt le contour d’un autre, il est perçu comme devant. - Perspective linéaire : si des lignes convergent graduellement, elles sont perçues comme parallèles et donnent une indication de la profondeur. - Taille relative : s’il y a deux objets identiques mais que l’un est plus petit, il va sembler plus loin. - Ombre projetée : aide à déterminer l’apparente position d’un objet, voire sa forme. 12 Le mouvement parallaxe (quand l’objet est immobile mais l’observateur bouge) est une source d’information importante pour percevoir la distance. 2. Avec les deux yeux En vision binoculaire, pour que notre cerveau perçoive un objet tridimensionnel, il a besoin des images bidimensionnelles envoyées par chaque œil. Il va ensuite les fusionner et élaborer une perception unique de l’objet observé. 2 facteurs interviennent : la convergence et la disparité binoculaire. La convergence est le mouvement permettant aux yeux de pivoter vers un objet rapproché (+/– en fonction de la distance). But ? Faire apparaître les images d’un objet sur des parties homologues des deux rétines (au-delà de 18cm, la convergence ne varie plus en fonction de la distance). C’est un indice de profondeur. Tout objet situé sur le plan frontal et sur l’axe du regard produit des projections de même taille sur les deux rétines. Mais dès qu’un objet est situé de manière oblique par rapport à l’axe du regard, cela produit des projections de taille différente et les images captées sont légèrement différentes sur les deux rétines. Ce décalage horizontal est la disparité binoculaire. Quand son regard converge en A, on voit que l’image rétinienne qui représente la distance entre les objets A et B est plus petite pour l’œil gauche que droit et que l’objet C (qui est situé plus près du point de convergence) provoque ce qu’on appelle une disparité croisée. La combinaison de ces infos permet un excellent indice de profondeur. 3.2.3 Le mouvement Quand on bouge dans notre environnement, l’image de n’importe quel objet sur notre rétine bouge aussi. Il faut donc distinguer notre mouvement du mouvement de l’objet. Les indices de taille relative d’un objet jouent un rôle clé : si un objet bouge vers nous, il devient plus grand, et inversement. Le mouvement apparent : perception du mouvement sur base d’images fixes. Quand on regarde un film, ce n’est pas un film continu mais une série d’images discrètes présentées très rapidement (24 images/s). Comment sommes-nous capables de transformer une suite d’images fixes en perception continue et animée ? Grâce à la découverte de Wertheimer en 1912, appelé le phénomène phi (ou MA). Lorsque deux images s’alternent lentement, on peut les percevoir bien distinctement, mais lorsque la vitesse entre les deux s’accélère, on ne distingue plus l’une de l’autre. Nous basculons dans un mode de perception continu. Dans certains cas, notre cerveau invente les images qu’il n’a pas reçu, la perception du mouvement est une construction de notre esprit !! Que se passe-t-il lors d’une atteinte cérébrale, au niveau des régions cérébrales codant pour le mouvement – V5 ou MT (médio-temporal) ? 13 Prenons le cas de Mme L.M. (Naccache, 2020) : En octobre 1978, Mme L.M., âgée de 43 ans, est victime d’un accident vasculaire cérébral veineux, aussi appelé thrombophlébite cérébrale. Elle se plaint d’avoir perdu la capacité à percevoir le mouvement visuel. Pour elle, les individus se déplacent comme dans le jeu « 1, 2, 3 soleil », elle ne perçoit plus non plus les mouvements de bouche de ses interlocuteurs. Après plusieurs recherches, le diagnostic révèle une akinétopsie cérébrale, elle ne perçoit ni le mouvement réel ni le mouvement apparent. Les images sont univoques : la région V5 est détruite dans les deux hémisphères, ainsi que les régions avoisinantes (prédominance dans l’hémisphère droit). Naccache (2020) – pas de lésions cérébrales : dans d’autres cas, des personnes migraineuses peuvent avoir des dysfonctionnements juste avant une migraine (« aura migraineuse »). Durant ce moment, le réseau cortical est perturbé. Mot de la fin : la perception de bas niveau correspond aux premières étapes du traitement visuel, où sont traitées les propriétés locales. Une fois les informations perçues, comment elles sont stockées ? (Prochain chapitre…). Tout au long de notre vie on stocke en mémoire. Notre mémoire (à long terme) contient des descriptions de nombreux types de formes. Lorsqu’on regarde un objet, notre système perceptif en construit une description et nous la comparons avec celles stockées en mémoire. S’il y a un « match », alors on reconnait l’objet (y compris ce qui ne se manifeste pas par des impressions sensorielles). Section 4 : La reconnaissance des formes La reconnaissance des formes et aussi appelé « perception de haut niveau ». Pour chaque objet du monde, il en existe des milliers de variations mais malgré ça, on le reconnait en un quart de seconde s’il est stocké dans une catégorie qu’on connait. 4.1 La perception des symboles Plusieurs théories ont été proposées pour expliquer comment on peut reconnaitre si vite tous les différents stimuli… 4.1.1 Théorie de l’appariement des gabarits 14 Dans cette théorie, on reconnaîtrai les lettres sur base d’un appariement de gabarits. Un gabarit peut être utilisé pour classifier un nouveau patron. L’idée est que quand on voit une nouvelle forme, une image rétinienne est produite et transmise au cerveau où elle est comparée avec des autres gabarits déjà en mémoire. Exemple : si la lettre A est représenté devant nous, les rayons lumineux rentrés dans nos yeux excitent un patron de cellules réceptrices sur la rétine. Quand on connecte ces récepteurs à un groupe de cellules dans le cerveau qui activent la représentation mentale de la lettre A, on a un gabarit de récepteurs spécifiquement conçu pour détecter la lettre A. Ce ne sont pas les mêmes récepteurs pour le L. Vocabulaire : la représentation mentale c’est une image que la personne se forge d’un objet, une personne, etc. Elle est nourrie par des infos venant de notre stock en mémoire et de nos sens. Nous sommes entourés de machines fonctionnant sur base de cette théorie (ex : tri postal). Mais il y a 3 inconvénients majeurs à cette théorie (vite abandonnée à cause de ceux-ci) : - Si nous reconnaissons les stimuli par appariement des gabarits, nous devrions en stocker un nombre infini. Bien que notre mémoire soit grande, elle n’est pas infinie, donc ce n’est pas plausible. - Chaque gabarit devrait être appris avant que le stimuli visuel correspondant soit reconnu. La théorie n’explique pas comment on est capable de reconnaitre un objet alors qu’on a pas de gabarit correspondant. - S’il y a une toute petite déviation du stimuli tel qu’il est projeté sur la rétine par rapport à ce à quoi le détecteur est supposé réagir, ce détecteur ne va pas s’activer. 4.1.2 Théorie des traits (1950) Cette théorie propose que nous décomposons les patrons visuels en leurs constituants. Toutes les formes que nous avons à reconnaitre sont composé de morceaux séparables, des traits. Pour comparer les traits, il faut qu’il y en ait déjà en mémoire ! Chaque lettre est spécifiée par une combinaison de propriétés élémentaires, caractérisées de manière binaire (trait / pas trait). Cette théorie est-elle plausible ? Oui, car : - Principe économique, avec quelques traits visuels, on peut faire beaucoup de catégories. 15 - Elle est compatible avec un certain nombre d’observations physiologiques. Hubel et Wiesel (1959), ont mis en évidence des détecteurs neuronaux de contours « simples » et « complexes » dans le cortex visuel primaire chez le chat (va aussi pour les humains). Ils ont utilisé la technique d’enregistrement de cellules isolées. Grâce à ça, ils ont récolté un signal électrique de certains neurones dans le cortex visuel du chat en fonction des traits qu’il avait face à lui. Ça a montré qu’il y a certains neurones qui détectent spécifiquement des lignes d’une certaines orientation présentée dans une certaine partie du champ visuel. - L’idée de reconnaissance des formes sur base de la détection de traits est compatible avec certaines confusions des traits chez l’humain. Kinney, Marsetta et Showman (1966) ont présenté des symboles alphanumériques pendant un bref instant. Si les sujets se trompent, cela devrait être sur une lettre ressemblante à celle projetée pour confirmer la théorie… Et c’est le cas ! À cause du partage de traits, certaines lettres se ressemblent. 4.1.3 Un modèle de traitement : le Pandemonium La prochaine étape consiste à décrire les processus de la reconnaissance de formes est proposé par le modèle de traitement de l'information de Selfridge (1958), qui conserve la théorie des traits : le Pandemonium (= « assemblée de démons »). Explications : Au T1, la lettre représentée donne lieu à une trace iconique stockée par le démon de l’image et permet l’activation de détecteurs élémentaires de traits visuels. Au T2, des démons s’activent en fonction de si l’image contient le trait dont ils sont responsables. Ces démons symbolisent l’excitation de (groupe de) neurones du cortex visuel qui répondent préférentiellement à ces types de traits. Les cinq détecteurs actifs s’activent en même temps et envoient vers la couche de neurones suivante des signaux en fonction de leur excitation. Au T3, les détecteurs de lettres « crient le plus fort » (// les + excités) en fonction du taux d’excitation de l’étape précédente. Cette étape explique les confusions qu’il peut avoir pour certaines lettres. Au T4, c’est le mécanisme de décision. Un « démon de la décision » va recevoir une information sur l’état d’excitation de tous les détecteurs de lettres et va décider de la réponse à donner. 16 ➔ Derrière chaque démon se cache un petit paquet de neurones qui détectent une propriété. 4.1.4 Théorie structurelle Dans la théorie du Pandemonium, il manque une information concernant les relations spatiales entre les traits. Très souvent les descriptions nécessités une précision dans la façon dont sont regroupés les traits, ex : une barre verticale coupée par une barre horizontale peut nous faire pense à un L, mais aussi un T. La théorie des traits (= théorie décompositionelle), a pour but de prendre en compte l’organisation spatiale des traits. Clowes (1969), s’est servi de cette image pour justifier la théorie structurelle : en fonction du regroupement des traits, on peut percevoir une raie ou une voile de bateau. Les théories structurelles reposent sur les théories de traits tout en les enrichissant. 4.2 La perception des objets en 3 dimensions (3D) Historiquement les théories des traits ont surtout été développées pour modéliser la reconnaissance de formes telles que les lettres. Elle est facilement applicable, sauf pour les 17 objets 3D… Parfois une certaine description des traits est incompatible avec la perception de la forme. Pour les objets tridimensionnels, une description des formes en terme de volumes est généralement plus simple qu’en terme de traits et les deux descriptions peuvent être discordantes. Est-ce plausible que la perception des objets 3D se fonde sur les volumes ? Modèle de reconnaissance par composants : Biederman (1987) propose un modèle de traitement pour rendre compte de la perception des formes tridimensionnelles sur base de leur volume. Selon lui, tous les objets 3D sont composés de composants simples, appelés géons (geometrical ions). Nous aurions des composants de base (36 géons) dans notre système de reconnaissance des formes et c’est sur cette base que la perception des formes se produit (théorie pas suffisante pour différencier deux objets +/- semblables). Il y a plusieurs étapes ; - Segmentation du champ visuel : extraction des contours et traitement des régions. - Reconnaissance des géons et de leur structuration - Appariement : géons assemblés et comparé avec des patrons stockés en mémoire. Évidence pour le modèle : examiner les aires d’intersection permet de définir la structuration des géons présents dans la forme. Biederman fait l’hypothèse que la suppression de cette information devrait réduire notre capacité à reconnaitre des formes. Expérience n°1 Il a pris des objets usuels dont il a retiré 65% du contour. Soit il a retiré les milieux des segments permettant de voir les intersections (objet « récupérable »), soit il a retiré les intersections (objet « non récupérable »). Ils ont été présentés très brièvement et les ils devaient dire ce que c’était. Les résultats montrent que quand les intersections des géons sont enlevées, c’est beaucoup plus compliqué de reconnaitre des objets (80% d’erreurs pour les NR vs 100ms = 60% d’erreurs ; 5s = 3% d’erreurs pour les R). Cette information est utilisée préférentiellement par notre système perceptif lors de la reconnaissance des objets. Les données ne permettent pas de dire/n’apportent pas d’évidence direct que l’on utilise les géons (plutôt que les traits) pour reconnaitre les formes. Expérience n°2 Biederman et Cooper (1991) ont réalisé une 2e expérience - on veut tester si les géons sont importants.. Cette fois, 50% des contours ont été supprimés pour former une paire d’images complémentaires tout en gardant toutes les intersections. La différence entre les images complémentaires du haut et du bas est dans la répartition des géons : - Paire du haut : géons conservés – un même géon est sur les 2 images. 18 - Paire du bas : géons répartis – un géon n’est que sur une image, pas les deux. La prédiction et les résultats ont été semblables : les participants répondent plus correctement (et plus rapidement) lorsque les images complémentaires ont les mêmes géons que quand les géons sont différents. 4.3 La perception des visages On sait reconnaitre un visage quelles que soient les conditions : notre cerveau sait en dégager un « invariant physionomique » sous-jacent (visage type), qu’il conserve en mémoire et compare avec le percept. La théorie des traits n’est pas possible pour les visages car ils sont beaucoup plus complexes. On dit parfois que le nez les bouches et les oreilles sont des traits complexes ou des traits de haut niveau. On peut diviser les visages en parties mais ça ne veut pas dire qu’on utilise ces traits complexes pour la reconnaissance des visages. Les visages seraient représentés de manière plus holistique (globale) que les autres objets. Dans le cas des visages, les gens sont sensibles à d’autres informations telles que la configuration des parties et l’aspect global des visages. On a pu démontrer qu’on utiliserait des propriétés plus globales que les parties individuelles. Tanaka et Sengco (1997) ont réalisé une expérience avec un visage de base, puis on montrait des parties du visage et il fallait dire si c’était la bonne partie. Il fallait reconnaitre selon 3 conditions : - La partie montrée est en isolation - La partie est montrée dans le même visage que pour l’apprentissage (old configuration) - La partie est montrée dans le même visage mais la configuration globale a été légèrement modifiée (new configuration) Les participants sont meilleurs dans la condition 2 (77% - présentation du visage en entier) que si le trait complexe est représenté seul. C’est encore moins facile lorsqu’il y a l’old configuration. Significatif = généralisable à la population ! Cela suggère que les individus utilisent l’information globale plutôt que des traits complexes pour reconnaitre les visages. On parle de traitement holistique des visages. Le traitement de la configuration ne se produit pas avec d’autres types de formes complexes comme des maisons (une porte se reconnait qu’elle soit avec une sans une maison). Les visages ont un statut privilégié 19 dans notre système perceptif, et ce, dès les premiers moments de vie. Cette capacité est le résultat d’une longue évolution concomitante du rôle crucial dans la survie de l’espèce. Desimone et Al, 1991, ont mis en évidence des neurones spécifiques, localisés dans le lobe temporal des singes, qui répondent sélectivement à des visages de singes. Une atteinte de cette même zone du cortex chez l’humain provoque de grosses difficultés dans la reconnaissance des visages humains (Farah, 1992). 4.4 Les troubles de la reconnaissance des formes En cas d’atteinte au cerveau, on peut observer plusieurs choses en fonction de la partie cérébro- lésée, comme l’agnosie (« absence de connaissance »). L’agnosie visuelle fait référence aux troubles de la perception des formes. La prosopagnosie est l’incapacité à reconnaitre des visages. Ils peuvent aller jusqu’à ne plus se reconnaitre soi-même, concevoir qu’iel voit un visage mais ne pas savoir dire que c’est le sien. Le visage perd son statut d’indice visuel d’identification d’une personne. Les patients peuvent voir les yeux, la bouche, etc., mais ne peuvent pas les « ajouter » ensemble (ils s’aident d’indices comme la démarche ou la voix). Est-ce que le cas de double dissociation existe réellement ? Il est difficile de trouver des cas « purs » de patients (avec un seul déficit). Certains ont été rapportés comme des cas purs d’agnosie visuelle correspondant à des cas de doubles dispositions. Certains savent reconnaitre des visages mais sont incapables de reconnaitre certains objets ou formes complexes. En 1997, Moscovitch, Winocur et Behrmann rapportent le cas du patient CK : CK est un homme canadien, né en 1961. Il subit un traumatisme crânien dans un accident de voiture, été placé dans le coma et a ensuite présenté des déficits moteurs, sensoriels, cognitifs et émotionnels. CK s’est bien rétabli et le seul dommage révélé lors de l’IRM était un amincissement bilatéral dans la région occipito-temporale. Grâce à d’autres tests comme l’analyse de la structure du cerveau, on a pu voir que son acuité visuelle était normale, tout comme son langage, sa mémoire et son raisonnement. Cependant, CK présentait de gros troubles de perception des objets de la vie quotidienne s’il ne se basait que sur la modalité visuelle. Il était incapable de se rendre compte de l’objet présent devant lui s’il n’était pas accompagné d’un indice pour le reconnaitre. Ex : sur la peinture « Rudolfo » d’Arcimbolo, CK voyait parfaitement le visage mais il était incapable de percevoir les fruits qui composent le visage. Mot de la fin : ce type de résultats de la neuropsychologique cognitive, ajoutés aux autres, soutient donc l’idée qu’il y a un système cognitif dédié à la perception des visages, séparé du système de reconnaissance des autres formes, simples et complexes. Section 5 – Le rôle du contexte 5.1 Processus ascendants et descendants 20 À peu près tous les exemples de construction perceptive qu’on a vus se basent sur l’idée que ce sont les propriétés du stimulus visuel qui permet a reconnaissance du percept : la longueur d’onde pour les couleurs, comment les arrêtes des objets se croisent, etc. Comme si c’était directement depuis l’image sur la rétine à une représentation perceptive complexe… Non ! Si on croise une myrtille sur la route, on va reconnaitre que c’est une myrtille parce qu’à priori, notre système visuel a analysé les caractéristiques visuelles du stimulus et les a comparés avec les connaissances stockées en mémoire. C’est ce qu’on appelle le processus ascendant/bottom up (les propriétés élémentaires d’un objet sont traitées et une représentation complexe est construite). Mais il a d’autres facteurs qui interviennes, extérieurs au stimulus. On a pu s’aider du contexte pour s’aider à la reconnaissance ou on pourrait avoir des attentes (avoir faim/envie de myrtilles et aiguiser notre regard pour en percevoir). Il est possible que ce soit grâce à nos connaissances sur le monde (on sait que c’est la saison des myrtilles et non des mures donc si on perçoit un fruit, on va plus vite se dire que c’est une myrtille). Tout ça entraîne les processus descendants/top down. 5.2 Impact du contexte dans la perception Le terme général de « contexte » est divisé en deux : le contexte physique (infos visuelles autour de l’objet à percevoir) ou le contexte mental (infos issues de nos connaissances stockées en mémoire, motivation, etc.). Illustration 1 : Leeper (1935) a montré une figure ambiguë et 35% des gens voyaient une jeune femme tandis que 65% voyaient une vieille dame. Il a aussi montré qu’on pouvait orienter la perception des gens. Si on présente une figure non ambiguë de jeune femme juste avant la figure ambiguë, 100% allaient voire une jeune dame, et inversement avec la vieille dame (98%). Cela montre comment l’expérience passé peut affecter notre perception présente et ce ne sont pas juste les caractéristiques du stimulus. Illustration 2 : Bruner et Goodman (1947) ont testé l’impact de l’influence des connaissances sur la perception, pour ça ils ont fait deux groupes d’enfants, un venant d'un milieu favorisé et l’autre d’un milieu défavorisé. Ils leur ont présenté des pièces de monnaie et des disques de cartons de même taille, et leur ont demandé d’estimer le plus grand. Globalement, ils avaient tous tendance à percevoir les pièces de monnaie plus grande qu’en réalité (sans disque carton). Tandis que les disques sont estimés plutôt correctement. Les enfants perçoivent-ils les pièces plus grandes dues à leur valeur ? Les enfants de milieux défavorisés surestiment plus la taille 21 des pièces que les enfants des milieux favorisés. Est-ce parce que l’argent a plus de valeur pour eux ? Ou parce que les enfants de milieux favorisés ont plus l’habitue de manipuler des pièces ? On ne peut pas le savoir mais les deux reflètent l’intervention des connaissances antérieures. Mot de la fin : ces illustrations démontrent l’influence de processus descendants dans la perception visuelle via l’utilisation d’infos contextuelles/connaissances antérieures. La reconnaissance des formes fait intervenir plein de sources d’infos et engage des processus ascendants et descendants. Section 6 : Conclusion Percevoir = construire une représentation visuelle à partir de stimulations sensorielles, et ça consiste à enrichir ce que l’on perçoit avec nos connaissances et nos attentes. La perception fait intervenir plusieurs traitements ; une fois l’info captée par l’œil, elle est stockée dans un registre sensoriel pendant une durée très courte, ce qui permet l’analyse d’infos : couleurs, taille, traits). Sur base des différents traits et dimensions qui sont extraits en parallèle, une représentation perceptive est construite (processus bottom up). La construction de ce percept est aussi influencée par nos connaissances sur le monde et par le contexte (processus top down). Cette représentation est comparée avec nos connaissances en mémoire et s’il y a « match », il y a reconnaissance de la forme. Chapitre 3 – L’attention Section 1 : Perception et attention Ici, on va voir que l’attention influence tout autant ce que l’on perçoit et que la perception et l’attention sont intimement liés ! 1.1 L’illusion de la complétude Comment peut-on illustrer l’« attention » ? on peut utiliser l’illusion de la complétude. C’est une expression utilisée par Naccache (2020) pour dire que nous croyons voir tout ce que la scène visuelle contient mais c’est faux (nous ne percevons bien que ce sur quoi notre attention est focalisée), et en plus, on construit la scène visuelle qui est en dehors de notre point d’attention. 22 1.1.1 Perception partielle des scènes visuelles Quand on ne voit pas nos clés alors qu’elles sont devant nous avec plein d’autres objets, on parle de cécité attentionnelle (= on ignore ce qui se trouve devant nos yeux quand notre attention est portée sur autre chose). Autre ex : la vidéo de l’ours qui fait du moonwalk. Quand nos yeux « voient » le monde, même si on pense percevoir tout ce qu’il y a devant nous, ce dont nous prenons conscience n’est qu’une petite partie de la scène visuelle imprimée sur notre rétine. Notre attention est portée vers un ou des éléments de la scène visuelle, ce qui nous rend aveugle pour le reste. Ces objets et/ou ces actions s’impriment sur nos rétines mais ne sont pas pour autant intégrés dans notre « perception consciente » (fait d’être capable de se rapporter à soi-même ce que l’on a vu). 1.1.2 D’où vient l’illusion de la complétude ? Comment se fait-il que nous croyons voir l’ensemble de la scène visuelle ? Parce qu’à notre insu, nous inventons de quoi est constitué l’ensemble de ce qui est face à nous grâce nos connaissances. Nous inventons ce que nous ne percevons pas consciemment du coup, nous croyons tout voir !! Illustration 1 (McConkie et Rayner – 1975) : Une même phrase est écrite plusieurs fois les unes au-dessus des autres. Sauf qu’à part la première phrase, aucune n’est écrite correctement. Dans la deuxième, les auteurs ont remplacé les segments périphériques par des groupes de X de la longueur des mots de la phrase d’origine ou des non-mots. Et ainsi de suite pour le reste des phrases. Ce qui est étonnant c’est que ces changements n’ont pas été remarqués par les participants ! Ils ont l’impression de percevoir l’ensemble de la phrase d’origine sans réellement prendre conscience de la présence des X qui sont pourtant traités par leur rétine et par les premières régions visuelles de leur cerveau. En fait, l’impression de percevoir une page pleine de texte provient d’une interprétation inconsciente fondée sur le fait que la page doit être remplie de mots et de lettres, même si ce n’est pas le cas (= « impression de complétude »). Illustration 2 (Cohen et al. – 2020) : Cette expérience a montré que la perception de l’information centrale (sur laquelle notre attention est portée) peut influencer la perception de ce qui est présenté en périphérie. Les auteurs ont présenté une vidéo aux participants qui est, à l’origine, une simple vidéo en couleur qu’ils peuvent librement explorer. Cependant, au fur et à mesure de la vidéo, les auteurs rendaient la périphérie des images sans couleurs tout en gardant toujours le centre de l’image colorée. La plupart des participants n’ont au final même pas réalisé que l’image avait perdu de sa couleur. Cela montre que malgré notre impression de voir les scènes colorées, les couleurs que nous percevons en périphérie sont en fait très largement construites par notre cerveau à partir des couleurs présentes dans l’endroit où l’on fixe notre attention. 1.2 C’est quoi l’attention ? 1.2.1 Intuitions 23 Si on nous demande « qu’est-ce que l’attention pour vous ? », il y aura plein de réponses différentes. Tout dépend de quel genre d’attention on parle, il peut y avoir référence à - La concentration (« porter notre attention sur le cours ») - La sélection d’informations (faire attention à une conversation dans une salle remplie de personnes qui parlent) - Au fait d’avoir des capacités limitées (quelqu’un qui est capables de faire attention uniquement à une seule chose à la fois) - A l’automaticité/automatisation (lorsqu’on a plus besoin de faire attention pour réaliser x ou y tâches parce que l’on est habitué). En bref, nous ne pouvons pas faire deux choses en même temps, bien qu’on puisse s’y entrainer. 1.2.2 Processus mental vs. Énergie de la vie mentale Dans un premier temps, l’attention a été définie comme « un processus mental qui filtre les informations reçues par les sens pour concentrer notre effort mental sur un stimulus externe (conversation donnée) ou interne (nos réflexions sur l’état du monde) ». ➔ Ici, l’attention est un processus qui se déroule dans le système cognitif ! Expérience : un cube en trois dimensions est dessiné et on demande aux participants de compter le nombre d’arrêtes et de lignes, notre énergie va être focalisée sur un stimulus externe. À force, on se rend compte qu’on peut la voir dans deux sens possibles. Ici, l’attention est le processus mental qui focalise nos yeux sur la figure et encode le dessin dans notre système visuel. L’attention soutenue permet ensuite de percevoir l’inversion de la figure. Si on demande aux participants de se concentrer sur un souvenir en même temps que de compter le nombre de lignes et d’arrêtes, on va focaliser notre effort pour retrouver l’évènement mental dans notre mémoire, autrement dit, un stimulus interne. On a ici l’illustration de ce qu’on appelle la concentration. Dans un deuxième temps, on a défini l’attention non pas comme un processus, mais comme « une énergie mentale limitée ou une ressource (limitée) qui alimente notre système mental ». C’est le carburant qui alimente nos cognitions, l’énergie qui nous permet d’être focalisés sur une tâche quand on « fait attention ». Ici, l’attention n’est pas conçue comme un processus, mais comme la ressource mentale nécessaire pour faire fonctionner le système cognitif. Une autre notion fondamentale dans cette conception est la notion de limitation : nos ressources attentionnelles sont limitées, on finit souvent par faire référence à cette idée en parlant de capacités limitées. Dans l’expérience, bien qu’aucun des deux tâches ne soient très difficiles, les faire simultanément met à l’épreuve notre système attentionnel car il faut savoir filtrer l'info. 1.2.3 Attention sélective et attention divisée L’attention sélective est mise en jeu quand on demande à des gens de traiter et de répondre à un seul stimulus parmi plusieurs présentés en même temps. Il s’agit typiquement de faire 24 abstraction des autres flux, de sélectionner ou de filtrer les informations. On a ici l’attention qui est vue comme un processus mental qui joue le rôle de filtre. L’attention divisée c’est l’inverse, on fait écouter plusieurs flux d’informations et on demande aux participants d’y répondre en même temps le mieux possible. Il s’agit de comprendre comment fonctionne l’allocation de ressources attentionnelles pour chaque tâche. On a ici l’attention qui est vue comme une ressource à partager en fonctionne des tâches à effectuer. ➔ Attention = processus qui permet de sélectionner les infos voulues parmi plein d’autres. Section 2 : L’attention sélective ; un filtre pour sélectionner 2.1 Théorie de l’attention comme un filtre précoce Broadbent (1954) procède à une écoute dichotique chez des participants en leur présentant 3 paires de chiffres. Les paires sont séparées d’un demi second Et il faut rapporter les plus de chiffres (pas d’ordre). Les résultats montrent qu’ils arrivent à rapporter 65% de la liste et la quasi-totalité d’une oreille puis l’autre. Ensuite, ils devaient rappeler les chiffres dans l’ordre (intervalle de 0,5 à 2s). Les résultats montrent qu’on n’atteint pas les 65% d’avant et te taux de bonnes réponses varie entre 20 et 50% en fonction de l’intervalle. Pour expliquer ces résultats, Broadbent (1957) propose le modèle du filtre attentionnel (// modèle du goulot). Le tube en dessous représente un canal perceptif à capacité limitée et les branches supérieurs (les oreilles), le registre sensoriel. Il existe donc un registre sensoriel visuel (mémoire iconique) mais pour l’audition, appelée mémoire échoïque. À la jonction des branches supérieures, on retrouve un filtre (// clapet). Il permet de laisser passer une bille à la fois mais pour qu’elle soit retenue dans le registre sensoriel, il faut que le clapet reste un place un certain moment. Il fait l’hypothèse que déplacer l’attention d’une oreille à un autre prend du temps. Si l’intervalle est trop court, le clapet n’aura pas le temps d’aller et venir avant que l’information ne se dégrade et la performance déclinera. Le plus facile est de rapporter les chiffres d’une oreille puis de l’autre. Donc il porte son attention sur le message d’une oreille et l’autre est ignoré. Ensuite, il porte son attention au message de la 2e oreille. Ça ne demande qu’un déplacement, mais ce changement doit se produire avant que l’information pour l’oreille ignorée ne se dégrade dans le registre sensoriel. 25 Il y a donc une restriction au modèle : L’info dans le registre sensoriel doit y rester assez longtemps pour que le participant reporte son attention dessus, sinon l’info se détériore et ne peut plus être rapportée. Dans le modèle, on parle de filtre attentionnel précoce, pourquoi ? Parce que le traitement est limité à la reconnaissance des formes. Quand une info arrive au système sensoriel (l’oreille), elle est stockée temporairement et là, un filtre est appliqué. À cause de (grâce à) ça, la reconnaissance des formes est impactée : tout n’est pas nécessairement reconnu. 2.2 Théorie de l’atténuation Des études ont montré qu’on pouvait quand même rapporter des infos venant du canal ignoré, grâce à la tâche de shadowing : on présent un message continu différent pour chaque oreille et on demande de répéter juste celui d’une oreille (écoute dichotique). L’effet cocktail party se rajoute et montre qu’on peut parfois entendre notre prénom alors qu’on écoutait pas du tout la discussion. Treisman (1964) a montré que si on fait écouter un message continu mais différent pour chaque oreille, les participants ne savent pas répéter juste un des deux messages. Soit c’est très compliqué, soit ils commencent avec l’oreille « à répéter » et finissent la phrase avec le message de l’oreille « à ignorer ». Ce modèle semble incompatible avec le modèle de sélection attentionnel précoce : savoir si tel mot coïncide avec le reste de la phrase, il faut avoir trouvé sa signification en mémoire en plus d’avoir perçu le mot (traitement sémantique). ➔ Sémantique = avoir récupérer le sens, la signification d’un mot en mémoire. Pour avoir accès au sens d’un mot, il faut avoir reconnu la forme du mot (cf. Chap. 2). Cela soulève des questions par rapport à la théorie de Broadbent : si le filtre empêche complètement le message de l’oreille ignorée d’être perçu, comment Les participants pourraient-ils répéter en écho des mots du canal ignoré dont le sens a été traité… ? Treisman (1960-64) répond par un modèle du filtre attentionnel en deux parties : filtre et dictionnaire. Le filtre distingue deux messages en tenant compte de leurs caractéristiques physiques (localisation, intensité) mais n’empêche pas le message de passer, il l’attenue. Le dictionnaire permet la reconnaissance d’un mot ignoré si son intensité ou sa force subjective dépasse le seuil (intensité minimale pour reconnaitre). Le seuil varie selon les mots, certains sont en permanence plus bas que d’autres et sont donc plus facilement reconnus (ex : prénom). Les seuils peuvent être aussi momentanément abaissés par les attentes de l’auditeur. ➔ Il est appelé « Modèle de l’atténuation ». 26 L’atténuation du canal ignoré implique que ces mois soient « entendus subjectivement » moins fort que ces du canal écouté. Leur force sonore ne dépasse pas le seuil à moins qu’il soit très bas ou que leur force a été momentanément diminuée. Le goulot attentionnel se situe au niveau de la perception : toute l’info passe du registre sensoriel au système de reconnaissance des formes, mais une partie est atténuée durant le traitement perceptif. 2.3 Théorie de l’attention comme filtre tardif Deutsch et Deutsch (1963) puis Norman (1968), proposent un 3e modèle. Ils proposent que le goulot opère après la reconnaissance des formes et que les mécanismes attentionnels opèrent non pas sur la perception mais sur la sélection qui a lieu dans la mémoire, après la perception. Ce filtrage / sélection se fait après d’où le nom « modèle de la sélection attentionnelle tardive ». Dans le cas de la tache de shadowing, ils soutiennent qu’on entend les deux conversations mais qu’elles sont rapidement oubliées (sauf si importante), elles n’entrent pas dans le système de mémoire. Notre système perceptif analyserait les deux conversations mais n’enverrait à notre esprit, que l’une d’entre elles. 2.4 Conclusion Modèle 1 : 2 étapes ; filtre et registre sensoriel. L’attention est représentée par un filtre qui détermine l’info qui va être reconnue. Le message sans attention va être reconnu juste si l’attention se déplace vers lui. Modèle 2 : le filtre atténue le message ignoré, très peu de mots sont reconnus (sauf si leur seuil est assez bas que pour dépasser le message atténue). Modèle 3 : 2 étapes ; reconnaissance des formes et sélection. Les 2 messages sont reconnus mais seuls les mots que la sélection autorise rentrent dans la mémoire et peuvent être rappelés. Ces modèles ont suscité beaucoup de débats et d’expériences. L’échec du consensus implique : - L’observateur possède un certain contrôle sur l’emplacement du goulot (flexible). - On s’intéresse plus aux demandes en capacités attentionnelles des différentes tâches faites en même temps. 27 Section 3 : L’attention divisée Ici, la façon dont les informations sont sélectionnées et filtrées, dépend de l’objectif des sujets et des contraintes de la tâche à accomplir : plus le nombre d’étapes de traitement est élevé, plus la demande en ressources cognitives (attention) est élevée et moins d’informations entreront dans le système. 3.1 Principe de capacité limitée 3.1.1 Ressources attentionnelles et double tâche On considère qu’on a une limite générale à la capacité attentionnelles (capacité limitée) et un contrôle sur la distribution des ressources attentionnelles (allocation des ressources). Ex : l’apprentissage du vélo : cela nécessite une intention, la conscience de ce qu’on essaie de faire, et un effort mental pour interférer avec d’autres activités. Une fois qu’on sait faire du vélo, on peut faire autre chose en même temps en oubliant qu’on fait du vélo. Cet exemple montre que parfois notre système laisser passer des infos (ou pas), ce qui amène à pense l’attention pas comme un filtre mais comme une réserve de ressources. En fonction de la tâche, une quantité X de ressource est libérée et alors il restera (ou pas) assez d’énergie pour une seconde tâche. Mais comment on décide de se concentrer ? À quelles conditions… ? Pour cela, on utilise le paradigme de la double tâche : demander à des sujets de réaliser 2 tâches en même temps. 3.1.2 Allocations des ressources attentionnelles Quand on fait deux tâches en même temps, elles seront moins bien faites que si elles avaient été faites séparément et cela dépend de 3 facteurs : la ressemblance entre les tâches, la difficulté et le niveau d’expertise. a) La ressemblance entre les tâches Si les 2 tâches se ressemblent, probable diminution de la performance si elles sont faites ensembles, on parle d’interférence. Wickens (1984) propose que 2 taches interfèrent d’autant plus que : - Elles contiennent des stimuli dont la modalité (visuelle, auditive) est la même. - Elles mettent en œuvre des processus communs (répétition, mémorisation). - Elles mobilisent le même type de représentations mentales. - Elles utilisent la même modalité de réponse (voix, appui sur une touche). b) Difficulté des tâches Plus les tâches sont dures à faire, moins on peut les faire en même temps. Sullivan (1976) le montre avec son étude de double tâche avec écoute dichotique (attention divisée). Lorsque le message à répéter était compliqué, les performances pour détecter le mot dans l’autre oreille diminuaient beaucoup contrairement à quand la phrase était facile. c) Expertise 28 « Expertise » désigne la capacité à maitriser une activité. Plus on est expert dans une tâche, plus elle peut être correctement exécutée en parallèle d’une autre tâche (processus automatique). 3.2 Processus automatiques et automatisation 3.2.1 Processus automatiques vs. processus contrôlés a) Définition Traitement attentionnel automatique (//mise en jeu de processus automatiques) = compétences développées et routinières (pratique, entrainement) qui ne demandent quasi plus d’attention. Traitement attentionnel contrôlé (// mise en jeu de processus contrôlés) = compétences qui demandent beaucoup d’attention et d’effort mental. Processus automatique Processus contrôlé Ne requiert pas (ou très peu) de ressources Puise dans les ressources de capacités attentionnels attentionnelles Se déroule sans intention, de manière Ne se déroule que s’il y a une décision irrépressible délibérée Le processus mental n’est pas ouvert à la Le processus mental est ouvert à conscience ou à l’introspection l’introspection Rapide (généralement moins de 1sec) Relativement lent Il n’interfère pas avec un autre processus Il interfère avec un autre processus b) Démonstration Effet Stroop (1935) : on présente des planches avec des mots et le participant doit dire la couleur de l’encre avec laquelle le mot est écrit. 3 conditions sont testées : - Condition congruente : l’encre correspond au mot. - Condition incongruente : l’encre et le mot ne correspondent pas. - Condition contrôle : aucun mot écrit. Le temps de réaction est plus lent dans la condition incongruente car même si la lecture est un processus automatique (on ne peut pas s’empêcher de lire), la réponse attendue ne correspond pas à ce qu’on lit, il y a interférence. Comme il faut résoudre ce conflit, ça prend plus de temps. 3.2.2 L’automatisation : avantage ou désavantage ? Les processus cognitifs deviennent automatiques après un long entraînement. Plusieurs modèles proposent des explications pour la diminution du coût attentionnel avec l’entrainement. L’entrainement permet de récupérer rapidement en mémoire les infos similaires, les items ont une représentation bien développée et les interférences se réduisent. Mais il existe des désavantages : ex. les erreurs à la tâche de Stroop, regarder d’abord à droite car en Europe on conduit à droite et si on change de pays il va falloir se dés-automatiser ! Ce sont des processus irrépressibles, ils nous demandent plus aucun effort. Dans une autre étude, on voit que présenter des infos dans un ordre fixe, encourage l’automatisation de la vérification, ce qui réduit alors la capacité à détecter les erreurs. 29 Section 4 : Exemples de déficits attentionnels Les techniques actuelles permettent de savoir qu’il existe plusieurs zones du cerveau qui s’occupe de l’attention, elles s’activent pour des traitements attentionnels différents. 3 exemples de problèmes attentionnels chez des patients cérébro-lésés : La négligence spatiale unilatérale (ou héminégligence spatiale) est un déficit associé à une lésion du cerveau pour lequel les patients échouent à faire attention à l’information qui se trouve d’un côté de l’espace visuel (ex : ils ne voient rien de ce qui se passe sur leur gauche). Le syndrome de Balint, rapporté la première fois en 1909, suite à l’observation de lésions dans le cerveau consécutives à un accident vasculaire cérébrale. Les patients sont incapables de faire attention à deux objets (// stimuli) en même temps. La maladie d’Alzheimer, les patients ont de nombreux déficits, acquis suite à une dégénérescence progressive au niveau neural. Ils ont les pertes de mémoire de plus en plus importantes, des difficultés à déplacer l’attention (d’un flash sur un ordinateur à autre chose, d’un nouvel emplacement dans l’espace après que l’attention ait été attiré à un autre endroit). Ce sont des problèmes de désengagement de l’attention mais à côté de la, ils ont des performances normales dans d’autres types de tâches d’attention. Ces exemples suggèrent qu’il existe différents types de lésions au cerveau et que différents aspects de l’attention peuvent être déficitaires, tout dépend de la région du cerveau touchée. 30 Chapitre 4 – La mémoire Section 1 : étudier la mémoire 1.1 Le rôle central de la mémoire dans la vie mentale La mémoire permet d’utiliser au présent des informations du passé. Elle est utilisée dans plein de domaines tels que la perception, la compréhension, la résolution de problème, etc. Le trio essentiel pour comprendre la base de notre vie mentale et des déficits cognitifs des patients cérébro-lésés est Perception-Attention-Mémoire. En plus de nous permettre de stocker des faits, notre mémoire nous donne des indications pour retrouver le fait exact. Si on nous demande le nombre de fenêtres qu’il y a chez nous, on ne va pas avoir le chiffre en mémoire mais on va s’aider de notre imagerie mentale. Ce qui est stocké n’est pas le nombre de fenêtre mais des informations sur la représentation spatiale. Ensuite, si on nous demande combien de pouces à cette personne ou encore est ce que les éléphants mangent plus que les poules, cela est basé sur une inférence à partir de nos connaissances (combien de pouces ont les humains, corrélations taille/quantité de nourriture). 1.2 Question à se poser pour étudier la mémoire Il existe différents termes pour parler des processus mentaux qui permettent de conserver de l’information : processus mnésiques, processus mnémoniques ou processus de mémoire. Par là, on entend les processus permettant de mémoriser et rappeler les infos via différents systèmes de mémoire. 1. Comment l’information perceptive est-elle mise en mémoire ? On s’intéresse aux aspects de mémorisation, stockage de l’information, encodage, afin de faire entrer en mémoire une information. On peut se poser des questions sur la nature du codage de l’information en mémoire : sous quelle forme sont les informations ? On peut aussi s’intéresser au degré d’abstraction : reconstitution détaillée ou caractère abstrait (qu’une petite partie synthétisée de l’information contenue dans la situation perceptive de départ) ? 2. Une fois mise en mémoire, qu’arrive-t-il à l’information ? On se pose la question du degré de stabilité de l’information : ils ne durent que quelques secondes ou toute la vie ? On parle de rétention (garder l’info en mémoire) et d’oubli. 3. Comment retrouve-t-on l’information stockée en mémoire ? On se pose la question de la récupération. L’incapacité de trouver une info en mémoire ne signifie pas forcément qu’elle a été détruite ou oubliée, on peut avoir des problèmes d’accès. Il existe différentes façons de sonder la mémoire pour récupérer une information : - Le rappel : soit il y a le rappel libre (directement), cela veut dire qu’on a bien stocké l’info et en plus on a un bon processus de récupération. Soit on peut avoir un rappel indicé (donner un indice pour faciliter la récupération). 31 - La reconnaissance : trouver, parmi plusieurs, l’info qu’on devait retenir. Permet d’étudier les processus de stockage en limitant l’intervention des processus de récupération. 4. Y’a-t-il un ou plusieurs systèmes mnésiques ? Depuis les années 1950, les travaux nous ont menés à 3 niveaux de mémoire : - Le système de stockage sensoriel : « zone tampon » qui stocke très brièvement les infos qui viennent à nos sens. La vitesse de détermination est très rapide. Elle correspond à la mémoire iconique, échoïque. - La mémoire à court terme (MCT) : résultat du traitement perceptif. C’est là que le percept est maintenu pour pouvoir être comparé avec les données stockées en mémoire à long terme. - La mémoire à long terme (MLT) : ensemble de nos connaissances. L’info peut parfois y rester indéfiniment. Section 2 : La mémoire à court terme (MCT) 2.1 Introduction Les informations qui rentrent dans la MCT, n’y restent que pour un bref délai. Pour échapper à la disparition, une solution est de répéter l’information à retenir (ex : suite de 5 chiffres). Cela illustre bien les 3 caractéristiques : - La répétition du numéro permet de maintenir l’information en MCT. - La stratégie mise en place (répéter le numéro) est la décision qu’on a choisie (juste répéter le numéro jusqu’au cadenas). Conséquence ? Une fois arrivé au vélo, le numéro temporairement stocké dans notre MCT disparaît. - La capacité limitée de la MCT est suffisante pour maintenir une telle suite de chiffres (5) mais guère plus. 2.2 Capacité de la MCT Le but principal des recherches est la capacité des mesurer la capacité de la MCT : on essaie de voir quelle « quantité maximale » qui « remplit » la MCT. Ce type de tâche est appelé « tâche d’empan mnésique » (empan = ampleur/capacité). 2.2.1 Le nombre magique Miller (1956) propose une estimation : si on doit retenir 15/20 chiffres, à la fin on saura en rapporter en moyenne 7 +/- 2. Le « +/- 2 » tient compte des différences inter-individuelles. Ce chiffre, est la capacité d’items qu’il serait possible de stocker en MCT (on parle de capacité limitée à 7 éléments). L’une des propriétés fondamentales est donc qu’il existe une limite importante quant à la quantité d’infos possible d’encoder et nos activités cognitives sont contraintes par cette limite. 32 2.2.2 Des regroupements Il a été démontré qu’on pouvait dépasser cette capacité de « 7+/-2 » grâce à la stratégie de regroupement qui consiste à considérer les items à stocker par groupe. Avec cette technique, on peut stocker beaucoup plus que 7+/-2. On considère alors qu’on peut stocker 7+/-2 éléments ou groupes d’éléments. 2.2.3 Effets de récence et de primauté Aujourd’hui, on considère qu’on est à 4+/-2 éléments, pourquoi ? On vient de voir que la capacité de la MCT se calcule avec une tâche mnésique. Le but est de rappeler un maximum d’items, et on voit c’est généralement autour de 7. Mais ces 7 ne sont pas n’importe où, ce sont les premiers et les derniers. On le voit dans l’expérience de Postman et Philips (1965) : les participants devaient rappeler un max de mots juste après dans l’ordre qu’iels voulaient. Il y avait 3 groupes (1e = liste de 10 mots ; 2e = 20 mots ; 3e = 30 mots), mais le nombre d’items ne changent rien à la performance ! Ils ont tous rappelé 7+/-2 éléments. Ils se sont intéressés à la position sérielle (position du mot dans la liste). Les 2 premiers mots ont été rappelés à 80 et 60%, ceux du milieu à moins d’un sujet sur deux et les derniers à 70%. Ces effets de position sérielle sont appelés effet de primauté et effet de récence. Effet de primauté : le fait que les 1e items sont mieux rappelés car ils auraient été transférés dans la MLT et récupérés au moment du rappel. (Métaphore) La MCT est une boite avec 7 casiers pour stocker 7 items. Ils servent au stockage et au traitement cognitif. Si on entend une liste, au début, il reste de la place en MCT pour traiter, ce qui permet de faire passer les mots en MLT. Ainsi, le 1e mot « maison » et le 2e « chien » il reste 5 casiers pour se représente un chien devant une maison. En faisant ça, on fait des 2 mots une image mentale (les images mentales sont des moyens mnésiques de transférer l’info vers la MLT pour la retenir durablement. Donc très vite les casiers se remplissent et cela ne laisse pas de place pour la fin. Effet de récence : les items de la fin de la liste sont directement récupérés de la MCT. Arguments expérimentaux en faveur de ces 2 explications : Si la théorie de l’effet de récence est juste, donner une tâche qui « vide » la MCT juste avant le rappel devrait faire disparaitre cet effet. Glanzer et Cunitz (1966) ont présenté une liste de 15 mots à 3 groupes différents. Le 1e groupe avait 10s avant de faire le rappel, le 2e en a 30 et le dernier était un rappel immédiat. Ce qu’on voit c’est que l’effet de primauté n’est pas affecté mais compter à rebours a fait disparaitre l’effet de récence. Ce compte à rebours occupe les « casiers » de la MCT et vide les derniers mots stockés. ➔ C’est pour cela qu’on parle de « 4+/-2 », car on considère que 3 viennent de la MLT. 2.3 Durée de stockage et oubli en MCT Les infos stockées en MCT ne restent pas plus d’une dizaine de secondes. Comment démontrer cet oubli ? Avec la tâche de Brown-Peterson : le sujet voit un stimuli (3 lettres), puis il entend 33 un nombre et dois compter à rebours de 3 en 3 à partir de ce nombre. Quand l’auteur dit « stop », il doit rappeler les 3 lettres. Si le rappel est juste après (0s d’intervalle), il y a 90% de réponses correctes. Mais dès que la durée change (3 à 18s), le score de rappel se dégrade (8% après 18s). 2 théories ont été proposées pour expliquer pourquoi on oublie presque tout de suite ce qu’on vient d’entrer en MCT : la théorie de l’effacement de la trace et la théorie de l’interférence. La théorie de l’effacement de la trace : comme une trace de pied dans le sable, toutes les 2, 3s, une nouvelle vague vient recouvrir la trace. Et elle se dégrade jusqu’à disparaître à la 4/5e vague. La théorie de l’inférence : les infos sont remplacées par des nouvelles (elles les « parasitent »). Pas parce qu’elles sont dégradables mais parce qu’il est impossible de ne pas penser. Waugh et Norman (1965) propose une expérience pour les tester : à chaque essai, les participants voient 16 chiffres se succéder, le dernier est la « cible » et il est apparu une fois dans la série. Les sujets doivent se rappeler du chiffre qui suit la cible. Les auteurs ont fait varier deux facteurs : la durée entre les chiffres et le nombre de chiffres entre les 2 présentations de la cible. - Si c’est à cause de la durée de vie fixe (effacement de la trace), le temps de présentation devrait jouer un rôle majeur. On devrait alors être moins bon quand le rythme est lent que quand le rythme est rapide. - Si c’est à cause d’une info qui en chasse une autre (interférence), la séparation devrait jouer un rôle majeur. Plus il y a de chiffres d’écart, plus l’interférences devrait être grande par rapport à un nombre de chiffres d’écart réduit. Les résultats montrent que le temps de présentation n’affecte pas les performances, ce qui est en désaccord avec la théorie de l’effacement de la trace. Cependant, le nombre d’éléments séparant les cibles est important et c’est en accord avec la théorie de l’interférence. L’oubli est probablement dû à un phénomène de substitution en mémoire. Une bonne schématisation est donnée par les démons de Lindsay et Norman (1972) : à gauche on retrouve une liste d’items qui est énoncée et que le sujet doit apprendre. Après le stockage de l’information sensorielle dans le registre sensoriel, le traitement perceptif aboutit à la reconnaissance des formes. La représentation perceptive qui en est issue est stockée en MCT. Les nouveaux « chassent » les précédents. 2.4 La nature du codage en MCT On s’intéresse au format dans lequel les informations y sont codées. Au début on pensait uniquement verbale puis on a vu qu’on pouvait aussi coder et manipuler de l’info visuelle. 34 2.4.1 Codage verbale Conrad (1964), présente une chaine de lettres à des sujets et leur demande un rappel immédiat. Il a observé que lorsqu’ils se trompaient, c’était souvent par des lettres qui « sonnait » comme la bonne. C’est comme si les sujets les avaient recodées verbalement et stockées sous cette forme en MCT. 2.4.2 Codage visuel Pour l’instant, le matériel était uniquement des stimuli verbalisables. Mais peut-on stocker des formes visuelles en MCT ? Oui ! Shepard et Metzler (1971) ont demandé à des participants de comparer 2 dessins en 3D complexe et de voir si le 2 e était une rotation du 1 e stocké en MCT. Ils ont mesuré le temps de réaction de la rotation mentale. Les participants mettent plus de temps à décider s’il s’agit du même dessin lorsque l’angle de rotation est grand. La seule explication selon les auteurs est que les participants manipulent dans leur mémoire, une image visuelle de la figure. Section 3 : De la MCT à la mémoire de travaille Dans les années 70, le terme « mémoire à court terme » a été remplacé par « mémoire de travail » après le constat de 2 problèmes : 1e : La MCT n’est pas unitaire, elle possède des sous-structures qui encodent les informations sous différents formats. La MCT encode des infos verbales, visuelles et des images mentales. Mais ces images seraient stockées autre part que les infos verbales. L’étude Brandimonte (Hitch et Bishop, 1992) a demandé à ses participants de faire une tâche de « soustraction visuelle » mentale. Ils ont dû mémoriser un set d’images et se représenter un des items, puis on leur affiche une partie de cet item qu’ils doivent soustraire à l’image en mémoire. Ils doivent nommer la figure qui résulte de cette « soustraction visuelle » mentale. L’autre moitié des participants ont dû faire la même chose mais avec une suppression articulatoire : pendant la soustraction mentale, ils doivent répéter « la la la la ». Cela empêche une représentation mentale. Les résultats ont montré que la tâche était mieux réussite quand ils répétaient « la la la la ». Le groupe 2 avait 2 tâches à faire en même temps et ont mieux réussi. Quand un stimulus est présenté visuellement, sa représentation est souvent stockée sous une forme verbale (dans les casiers). On propose donc qu’il y aurait 2 systèmes de stockage à court terme. L’un stocke la représentation langagière de l’objet et l’autre la représentation imagée. Quand ils doivent soustraire l’image, ils sont concentrés juste sur l’image car les casiers verbaux ne servent à rien. ➔ Le « 4+/-2 casiers » est trop limité, il faut 2 espaces qui interagissent !! 2e : le traitement de l’information ne semble pas se dérouler au même endroit que le stockage. 35 Le traitement mental se trouve au même endroit que le stockage… Si on doit faire des calculs mentaux importants, notre MCT est rapidement saturé. Ici, le stockage et le traitement sont censés être au même endroit, donc plus la MCT est « grande », meilleurs doivent être les capacités de traitement. Mais des travaux montrent que ces 2 facteurs ne sont pas liés ! Cela conduit à dire que, dans la MCT, le traitement et le stockage sont dans des endroits différents. 3.2 La nouvelle proposition Baddeley et Hitch (1974) ont proposé un nouveau modèle dans lequel le stockage et le traitement d’infos à court terme impliquent 3 composantes : - Boucle phonologique (BP) : maintien et manipulation des infos basées sur le langage. - Calepin visuo-spatial (CVS): maintien et manipulation des infos visuelles. - Centre exécutif (CE) : sélection des stratégies et intégration des infos. 3.2.1 La boucle phonologique La BP est constituée de 2 composants : un registre phonologique (conserve les infos pour +/- 2s) et un mécanisme de répétition (maintien les infos en activité dans le registre). Ce mécanisme de répétition permet de répéter l’info su vocalement pour nous-même, aide à garder l’info dispo en mémoire et rafraichir la trace stockée dans le registre phonologique. Ces 2 composants expliquent les erreurs phonologiques lors des rappels. 3.2.2 Le calepin visuo-spatial 36 Tous les types de matériaux ne sont pas traduits dans un code basé sur la parole. Le CVS permet de maintenir et de manipuler des images visuelles et des infos spatiales. Les travaux à partir de la tomographie par émission de position (PET scan) confirment la distinction entre la BP et le CVS. Smith et Jonidas (1997) ont fait 3 tâches de mémoire simples : - Tâche de mémoire verbale : 4 lettres – blanc – 1 lettre (était-elle présente au début ?) - Tâche de mémoire spatiale : 3 points – endroit X – y avait-il un point à cet endroit ? - Tâche de mémoire visuelle : 2 figures complexes – 1 des 2 – y était-elle au début ? Les résultats montrent que les systèmes de mémoire de travail sont localisés à différents endroits : traitements spatiaux = hémisphère droit / traitements verbaux = hémisphère gauche. 3.2.3 Le centre exécutif La MDT a plusieurs sous-systèmes et il faut quelque chose pour distribuer correctement l’attention, coordonner les systèmes, que les produits soient utilisables et orchestrer cela. Le CE de la MDT gère tout ça ! Il est considéré comme le composant contrôlant l’attention. ➔ Ça n’explique pas pourquoi on ne sait pas combiner des infos de modalités