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UNIVERSITÉ MOHAMMED V - Faculté des Sciences Juridiques, Économiques et Sociales de Salé

Sonia Benjamaa

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économie marocaine économie analyse économique

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Présentation de l'économie marocaine. Le document comprend des informations sur l'histoire, les secteurs, les statistiques, les forces et faiblesses du pays avec des chapitres dédiées.

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UNIVERSITÉ MOHAMMED V Faculté des Sciences Semestre S3 Juridiques, Économiques et Sociales de Salé ECONOMIE DU MAROC Pr: Sonia BENJAMAA 1 SOMMAIRE: Introduction...

UNIVERSITÉ MOHAMMED V Faculté des Sciences Semestre S3 Juridiques, Économiques et Sociales de Salé ECONOMIE DU MAROC Pr: Sonia BENJAMAA 1 SOMMAIRE: Introduction: Fiche d’identité du Maroc Chapitre I: L’histoire de l’économie marocaine Chapitre II: Les secteurs de production de l’économie marocaine Chapitre III: Statistiques économiques et financières par secteur: Secteur réel Secteur monétaire Secteur des Finances Publiques Secteur extérieur 2 SOMMAIRE: Chapitre IV: analyse des atouts et des faiblesses de l’économie marocaine Chapitre V: Défis et perspectives de l’économie marocaine - Les Objectifs du Nouveau modèle de développement - La lutte contre le réchauffement climatique et le stress hydrique 3 INTRODUCTION: LE MAROC, FICHE D’IDENTITE I- La localisation et la géographie du Maroc Le Maroc est un pays du Maghreb situé au Nord-Ouest de l’Afrique. Le territoire marocain est délimité au Nord par le Détroit de Gibraltar et la mer Méditerranée, au Sud par la Mauritanie, à l’Est par l’Algérie et à l’Ouest par l’Océan Atlantique. 4 INTRODUCTION: LE MAROC, FICHE D’IDENTITE Le Maroc est à la porte de l’Europe et il est l’un des seuls pays avec l’Espagne et la France à être doté de rivages sur la mer Méditerranée d’un côté et l’Océan Atlantique de l’autre. La Zone Economique Exclusive (ZEE) du Maroc (bande de mer ou d’océan située entre les eaux territoriales et les eaux internationales sur laquelle un Etat riverain dispose de l’exclusivité des ressources halieutiques, en pétrole et gaz offshore) s’étend sur 200 Milles marins (320 Km environ) au large des côtes marocaines. La superficie du Maroc est de 710850 KM2 et l’espace 5 INTRODUCTION: LE MAROC, FICHE D’IDENTITE raison pour laquelle seulement 10% des terres sont cultivables. II - La démographie du Maroc: La population du Maroc est estimée à environ 37 millions d’habitants en 2024 et la densité de population est de 88,20 hab/km². 64,80 % de la population vit en zone urbaine et 35,20% vit en zone rurale. Le taux de natalité est de 17,16 ‰ (contre 50,782 ‰ en 1960), le taux de mortalité est de 5,77 ‰ (contre 22,75 ‰ en 1960) et l’Indice de fécondité est de 2,30 enfants par femmes en 2022 (contre 7 enfants/femme en 1960). L’espérance de vie à la naissance est en 2022 de 75,5 6 INTRODUCTION: LE MAROC, FICHE D’IDENTITE III- Sa religion: La religion d’Etat est l’Islam. La majorité des marocains sont donc de confession musulmane avec une minorité de marocains de confession juive. IV – Ses langues officielles: l’Arabe et l’Amazigh V – Sa monnaie: le Dirham marocain (MAD) VI – Le taux d’alphabétisation des 15 ans et plus: Femmes : 67,0 % en 2022 (contre 39,6% en 2004) 7 INTRODUCTION: LE MAROC, FICHE D’IDENTITE VII- Son régime politique: Le Royaume du Maroc est une monarchie constitutionnelle semi-parlementaire: la Constitution définit les pouvoirs de l’exécutif, du législatif et du judiciaire. Le pouvoir exécutif est constitué du Roi et du gouvernement, le pouvoir législatif est constitué de la chambre des Représentants et de la chambre des Conseillers, et le pouvoir judicaire est constitué de la Cour de cassation, des Cours d’appel et des Tribunaux de première instance. En plus de ces instances, le pouvoir judiciaire est constitué d’une Cour.8 constitutionnelle dont le rôle est le contrôle de la INTRODUCTION: LE MAROC, FICHE D’IDENTITE Dans le cadre la politique de régionalisation, le Royaume du Maroc est aujourd’hui divisé en 12 régions: 1: Tanger-Tétouan-Al Hoceima, 2: Oriental, 3: Fez-Meknès, 4: Rabat-Salé-Kénitra, 5: Beni Mellal-Khenifra, 6: Casablanca- Settat-, 7: Marrakesh-Safi, 8: Drâa-Tafilalt, 9: Souss-Massa, 10: Guelmim-Oued Noun 11: Laâyoune-Sakia El Hamra, 12: Dakhla-Oued Eddahab. VIII- La classification du Maroc dans l’économie mondiale: Le taux de croissance du PIB a été de 3,4% en 2023 contre 1,5% en 2022. Le PIB du Maroc a franchi pour la première fois la barre des 1400 Milliards de Dirhams en 9 2023 soit 147 Milliards de Dollars et INTRODUCTION: LE MAROC, FICHE D’IDENTITE le RNBD (Revenu National Brut Disponible) a atteint les 3700 $/hab Dans la nouvelle classification des pays par revenu 2024-2025, la position du Maroc avec un RNBD de 3700 $/hab reste inchangée et se maintient dans la catégorie « revenu intermédiaire de la tranche inférieure » avec de nouveaux seuils compris entre 1146 et 4515 $. Cette catégorie regroupe 18 pays dont le Cameroun, l’Egypte, l’Inde, le Sénégal et le Soudan. En termes de développement humain, le Maroc se classe au 120ème rang sur 193 pays avec un IDH de 0,698 en 2022, ce qui le place dans la catégorie des 10 CHAPITRE I: HISTOIRE DE L’ECONOMIE DU MAROC (1956-2003) 11 Introduction: L’histoire de l’économie du Maroc de 1960 à 2000 peut être divisée en quatre grandes phases : La période de transition ou la reconquête de la souveraineté (1956-1960) La période des plans de développement (1960- 1980), La période d'ajustement structurel (1983-1993), et la phase de sortie du PAS et de poursuite de la libéralisation économique (1993-2000). 12 Section I: La période de transition ou la reconquête de la souveraineté (1956-1960) Au lendemain de l’indépendance, la priorité a été la formulation d’un projet de construction nationale qui a consisté dans:  L’unification des budgets des zones Nord et Sud du pays: le territoire marocain entre 1912 et 1956 était soumis à trois statuts: le protectorat espagnol au Nord, le protectorat français sur plus des deux-tiers et le statut particulier de la ville de Tanger soumis à l’administration internationale.  L’abrogation de l’acte d’Algésiras de 1906 qui avait été à l’origine du protectorat, et l’institution de la protection douanière. 13 Section II: les plans de développement (1960- 1980) Au lendemain des années 1960, le Maroc se relève à peine de son expérience coloniale, avec une économie essentiellement agricole, peu diversifiée et marquée par de profondes inégalités. L'agriculture, qui représente environ 30% du PIB, emploie plus de 60% de la population. Le secteur industriel est embryonnaire, et centré sur des activités à faible valeur ajoutée comme les industries extractives (notamment les phosphates) et la transformation agroalimentaire. L’Etat va adopter une série de plans de développement qui visent notamment à promouvoir l'industrialisation, la modernisation agricole, et le développement des 14 Section II: les plans de développement (1960- 1980) Les différents plans de développement mis en place: (1960-1964), (1965-1967), (1968-1972), (1973-1977) et (1978-1980) s’appuient sur la stratégie d’industrialisation par substitution aux importations (ISI). Cette stratégie consiste pour l’Etat à protéger les industries locales naissantes en restreignant l’importation de produits finis étrangers par une politique commerciale protectionniste, et en se lançant dans des investissements massifs pour encourager la production locale. 1. Le premier plan quinquennal 1960-1964 Le plan quinquennal 1960-1964 constitue la première étape du développement économique de l’économie 15 Section II: les plans de développement (1960- 1980) envisagé dans son ensemble, et des orientations et des objectifs sont formulés dans le cadre d’une politique de développement portant sur plusieurs années. L’objectif principal du plan quinquennal est le développement industriel par la stratégie d'industrialisation par substitution aux importations. L’agriculture, qui employait plus de 60% de la population, devait être modernisée par l’introduction de techniques agricoles modernes et la création d’infrastructures d’irrigation,. 16 Section II: les plans de développement (1960- 1980) Et les infrastructures devaient être améliorées grâce à des projets d’infrastructure ambitieux, notamment la construction de routes, de barrages et d’installations hydrauliques pour soutenir le développement agricole Par ailleurs, le plan quinquennal prévoyait une scolarisation massive et une formation professionnelle appropriée devant permettre la marocanisation rapide des postes occupés par les Etrangers. Quel bilan? Le premier plan quinquennal s’est traduit par une augmentation considérable des dépenses publiques 17 Section II: les plans de développement (1960- 1980) Malgré la hausse importante des dépenses publiques, l'industrialisation n'a pas progressé de manière significative et la production a stagné en raison de la baisse des investissements privés. Cette situation a rendu nécessaire le plan triennal de stabilisation 1965-1967. 2. Le plan triennal de stabilisation 1965-1967 Le plan 1965-1967 a été conçu en réaction à l’irréalisme des objectifs du plan précédent et au gaspillage des ressources qu’il avait entraîné, et une série de mesures furent prises pour arrêter la dégradation financière: 18 Section II: les plans de développement (1960- 1980)  Restriction des importations  Réduction du déficit budgétaire  Freinage de la demande interne On assiste également, durant cette période, à une révision des priorités: celles-ci deviennent l’agriculture, le tourisme et l’amélioration de la formation des cadres, et le développement industriel n’est plus l’objectif principal. 3. Le plan 1968-1972: Ce plan maintiendra ces priorités tout en se fixant des objectifs modérés de croissance et en adoptant une politique monétaire orthodoxe. 19 Section II: les plans de développement (1960- 1980) 3. Le plan quinquennal 1973-1977: Dans le cadre de ce plan, l’Etat va se fixer un taux de croissance annuel élevé de 7,5%, et va adopter une politique économique plus dynamique et plus volontariste pour développer le secteur industriel basée sur l’augmentation des investissements publics, le contrôle des prix et le protectionnisme commercial. Cette politique volontariste a été favorisée par le boom phosphatier: les prix du phosphate ont été multipliés par cinq entre 1973 et 1975 (de 14$ à 68$) à et ont permis un excédent de près de 1% de la 20 balance des paiements et une augmentation des Section II: les plans de développement (1960- 1980) Ces recettes inattendues ont généré d’importantes ressources financières créant l’illusion de l’abondance et conduisant à des décisions peu réalistes compte tenu du caractère conjoncturel de la flambée des prix du phosphate:  un programme d’investissement massif fut lancé faisant passer le taux d’investissement de 14% en 1973 à 33% en 1977.  Le taux de croissance du PIB passa de 5,6% en 1973 à 10,8% en 1976 pour retomber à 6% en 1977.  Les dépenses publiques augmentèrent rapidement de 18,2% du PIB en 1973 à 38,4% du PIB en 1976. 21 Section II: les plans de développement (1960- 1980) Pour industrialiser le pays, le Maroc va investir dans plusieurs secteurs notamment:  Le secteurs de la sidérurgie et de la métallurgie. La création par l’Etat en 1974 de la Société Nationale de Sidérurgie (SONASID) a pour ambition de promouvoir une industrie nationale capable de répondre à la demande locale en acier et en métaux.  Le secteur énergétique: Le Maroc a commencé à investir dans le secteur de l’énergie pour satisfaire la demande croissante en électricité et en carburant. Des centrales thermiques ont été construites, ainsi que des infrastructures pour l’exploitation du charbon (Jerrada). 22 Section II: les plans de développement (1960- 1980)  Le secteur textile: des zones industrielles ont été créées dans plusieurs villes, notamment Casablanca et Tanger, pour attirer des investissements dans ce secteur, pour augmenter la production destinée à la consommation locale, mais aussi pour développer l’exportation des produits textiles.  L’Industrie chimique avec notamment la production d'engrais phosphatés et de produits chimiques liés aux phosphates, destinés et au marché local et à l'exportation. 23 Section II: les plans de développement (1960- 1980) Mais la politique volontariste de l’Etat va se heurter très vite à la faiblesse du marché intérieur qui entraîna la sous-utilisation des capacités de production, et aboutir à la failllte du modèle de substitution aux importations à fort taux d’intrants importés. Par ailleurs, le secteur agricole, touché par des épisodes de sécheresse n’arrivait pas à satisfaire la demande intérieure, ce qui s’est traduit par une augmentation des importations des produits alimentaires, un exode rural important et une accentuation des disparités sociales. 24 Section II: les plans de développement (1960- 1980) A partir de 1976, la situation économique du pays se dégrade rapidement:  les prix du phosphate vont fortement chuter, réduisant considérablement les recettes de l'État et les recettes en devises.  Face à la baisse de ses recettes, l’Etat est obligé d’accroître massivement son endettement extérieur  Le solde du compte courant passe d’une situation excédentaire de 3,1% du PIB en 1974 à un déficit de 16,5% du PIB en 1977 25 Section II: les plans de développement (1960- 1980) 3. Le plan 1978-80: un essai de stabilisation Le plan de stabilisation 1978-80 fixa un taux de croissance de 4,6% au lieu de 7,5% durant le plan 1973-1977 en essayant de réduire les déséquilibres interne et externe:  En réduisant le déficit budgétaire par une baisse des dépenses publiques et une hausse des prélèvements  En améliorant le solde de la Balance des Paiements par la restriction des importations et la promotion des exportations  En contractant les crédits alloués au secteur privé à l’exception des crédits à l’exportation Mais aucun de ces objectifs ne fut atteint à moyen terme et la décennie 70 commencée dans l’euphorie26 Section II: les plans de développement (1960- 1980) La situation va continuer de se dégrader et en 1983, le Maroc n’avait plus assez de devises pour assurer une journée d’importation, et se déclara en cessation de paiement. Face à l’accumulation de la dette et à l’incapacité du pays à honorer ses engagements, le Maroc va appeler à son chevet le Fonds Monétaire International pour l’aider à sortir de la situation d’incapacité de remboursement. Cela a conduit à la mise en place au Maroc d’un Programme d’ajustement structurel (PAS) par le FMI en 1983. 27 Section III: le programme d’ajustement structurel (1983- 1993) Le PAS est une politique économique appliquée par le FMI à tous les pays qui se retrouvent en situation d’incapacité de remboursement de leur dette et qui demandent l’aide du Fonds. Le FMI conditionne alors l’obtention de prêts à la mise en place d’un programme d’ajustement structurel. C’est le principe de la conditionnalité du Fonds. La politique d’ajustement structurel comprend deux volets:  une politique de court terme (ou conjoncturelle) basée sur l’orthodoxie financière pour réduire l’endettement extérieur et maîtriser l’inflation.  et une politique de long terme (ou structurelle) basée sur28 Section III: le programme d’ajustement structurel (1983- 1993) 1. L’orthodoxie financière ou la politique de rigueur Plusieurs mesures vont être mises en place à partir de 1983 pour rétablir les équilibres macroéconomiques interne et externe:  La réduction drastique des dépenses publiques notamment des dépenses de fonctionnement: gel des salaires publics (entre 1983 et 1987), réductions substantielles des recrutements, diminution des dépenses sociales (dépenses d’éducation et de santé), et baisse des subventions aux produits de base, comme les carburants et les produits alimentaires, qui s’est traduite par une augmentation des prix des biens de consommation courante. L’Etat a également réduit ses dépenses d’investissement dont la part dans l’investissement total est passée de 34% en 1982 à 3,5%29 Section III: le programme d’ajustement structurel (1983- 1993)  La maîtrise de l’inflation par la mise en place d’une politique monétaire restrictive pour réduire la masse monétaire en circulation et freiner la demande interne.  Le rétablissement de la viabilité de la balance des paiements en encourageant les exportations par l’exonération de l’impôt sur les revenus d’exportation au cours des cinq premières années de la production, et l’exonération des droits de douane sur les intrants consacrés aux exportations. 2. La politique de libéralisation de l’économie: Plusieurs mesures vont être prises dans le cadre du PAS pour libéraliser l’économie et l’ouvrir sur l’extérieur: 30 Section III: le programme d’ajustement structurel (1983- 1993)  La dévaluation du dirham: pour encourager les exportations qui deviennent moins chères et améliorer la compétitivité du Maroc à l'étranger. Le dirham a connu deux dévaluations importantes : la première de l’ordre de 16,4% s’étale de 1983 à 1985, et la deuxième de l’ordre de 9,25% date du 10 Mai 1990.  La privatisation et restructuration du secteur public : de nombreuses entreprises publiques ont été privatisées dans le cadre du PAS (Ciments du Maroc, Samir, Cosumar…) pour améliorer leur efficacité, redynamiser le système productif et alléger les charges financières de l’Etat.  L’ouverture de l’économie marocaine au marché international: les droits de douane ont été abaissés, l’exigence de la marocanité du capital a été supprimée et le Maroc a adhéré au GATT (accord général sur les tarifs douaniers et le commerce) en 1987. Section III: le programme d’ajustement structurel (1983- 1993) 3. Quel bilan? La politique d’austérité mise en place par le Royaume dans le cadre du PAS a permis de:  réduire les déficits budgétaires (de 15% du PIB en 1982 à 2% du PIB en 1992)  réduire le déficit du compte courant de la balance des paiements (de 12,3% du PIB en 1982 à 2% du PIB en 1993) et  baisser l’inflation (de 10,5% en 1982 à 5% en 1993). Grâce à la gestion orthodoxe des finances publiques et aux rééchelonnements, la dette extérieure a été beaucoup mieux maîtrisée. Et le secteur exportateur marocain a bénéficié de l’ouverture des marchés. 32 Section III: le programme d’ajustement structurel (1983- 1993) Mais cette politique s’est traduite par une grave détérioration des conditions sociales de la population: la réduction des dépenses publiques et des subventions a conduit à la hausse des prix des produits de base, à la dégradation des services publics, à une augmentation de la pauvreté et des inégalités et à une hausse du chômage, ce qui a exacerbé les tensions sociales. En 1984, des émeutes ont éclaté dans plusieurs villes du Maroc en réaction à ces difficultés économiques, témoignant du mécontentement populaire. 33 Section III: la libéralisation de l’économie marocaine (1993-2003) Durant la période 1993-2003, le Maroc a poursuivi la politique de libéralisation de l’économie et s’est engagé dans des réformes ambitieuses visant à promouvoir le développement du secteur privé, à améliorer l’efficience du secteur financier et à mieux s’intégrer dans l’économie mondiale. 1. Les opérations de privatisation: Les opérations de privatisation régies par la loi n°39-49 autorisant le transfert d’entreprises publiques au secteur privé ont effectivement débuté en 1993 avec la privatisation de l’entreprise sucrière SODERS, et ont concerné 112 entreprises dans un délai de six ans. Ces opérations de privatisation ont permis:  Réduire le déficit public en générant des recettes pour l’Etat 34 Section III: la libéralisation de l’économie marocaine (1993-2003)  Renforcer la compétitivité des entreprises et l’ouverture vers l’extérieur. Quel bilan?  Les résultats des entreprises cédées ont été multipliées par cinq et ont amélioré leur savoir-faire et leur productivité grâce à de grands groupes comme nouveaux partenaires (Vivendi Universal, Total, Altadis…)  La privatisation a contribué à l’ouverture aux marchés à de nouveaux opérateurs et a favorisé la libre concurrence grâce au démantèlement des monopoles. 35 Section III: la libéralisation de l’économie marocaine (1993-2003)  L’impact de la privatisation sur les finances publiques a été très positif. Les recettes de privatisation ont représenté en moyenne 5,8% des recettes ordinaires sur la période 1993-2003 avec des pics de 24,5% en 2001 et 13,8% en 2003 (Guide de la Privatisation). Une grande partie de ces recettes a été allouée au Fonds Hassan II pour le Développement Economique et Social (FHDES).  Le programme de privatisation s’est traduit par une hausse des Investissements Directs Etrangers dans les secteurs des télécommunications, financier, du tourisme et de l’énergie. A fin septembre 2005, la contribution de ces investissements a atteint 63 Milliards de dirhams avec une contribution importante 36 de la France (70% du total des recettes Section III: la libéralisation de l’économie marocaine (1993-2003)  Le programme de privatisation a aussi été un facteur essentiel de la dynamisation du marché financier. En septembre 2005, la capitalisation des entreprises privatisées représentait 53% de la capitalisation de la Bourse, et la privatisation d’entreprises par émission publique de titres avait rapporté 16% des recettes de la privatisation, et contribué à une augmentation de la liquidité du marché et au développement des sociétés de bourse. 37 Section III: la libéralisation de l’économie marocaine (1993-2003) 2. L’intégration au commerce mondial: Entre 1993 et 2003, le Maroc a entrepris des réformes significatives pour s’intégrer davantage au commerce mondial. Cette période a marqué une transition vers une économie plus ouverte visant à attirer les investissements étrangers et à promouvoir les exportations.  Le Maroc a adhéré à l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) en 1995, ce qui l’a engagé à respecter les règles du commerce mondial et à réduire progressivement les barrières tarifaires et non tarifaires.  L’accord d’association avec l’Union Européenne a été signé en février 1996 et est entré en vigueur en mars 2000; L’objectif de l’accord était d’établir une zone de libre- échange industrielle, de libéraliser les échanges de services et d’approfondir la libéralisation du commerce, des produits38 Section III: la libéralisation de l’économie marocaine (1993-2003)  L’accord libre-échange Maroc-AELE (Islande, Liechtenstein, Norvège, Suisse) a été signé en juin 1997 et est entré en vigueur en mars 2000. Cet accord a pour objet la libéralisation progressive des échanges industriels sur le plan bilatéral avec chacun des Etats membres de l’AELE, l’échange de concessions en matière de produits agricoles et la libéralisation du commerce des services. 3. La libéralisation financière: Le système financier marocain a connu une profonde réforme à partir des années 90 dont l’objectif était de moderniser et de libéraliser aussi bien le secteur bancaire que les marchés financiers:  La loi bancaire de 1993 a introduit le décloisonnement et la notion d’établissement de crédit qui regroupe les banques de 39 dépôt (y compris les anciens Organismes Financiers Section III: la libéralisation de l’économie marocaine (1993-2003) La libéralisation des taux d’intérêt débiteurs en 1996 Le désencadrement du crédit en 1991 La suppression progressive des emplois obligatoires Le renforcement des règles prudentielles du secteur bancaire dans le cadre de la loi bancaire de 1993 La réforme du cadre réglementaire du marché financier et la mise en place, en 1993, d’une autorité de régulation des marchés de capitaux, le Conseil Déontologique des Valeurs Mobilières (CDVM). Quel bilan? La libéralisation financière qui s’est poursuivie dans les décennies suivantes a renforcé la solidité financière des banques et modernisé et développé les marchés de capitaux; 40 CHAPITRE II: EVOLUTION RECENTE DE L’ECONOMIE MAROCAINE (2003-2023) 41 Section I: l’économie marocaine au début des années 2000, état des lieux: La libéralisation de l’économie marocaine entamée au début des années 80 avec la mise en place du PAS et poursuivie durant toute la décennie 90 a permis de transformer l’économie marocaine en une économie de marché caractérisée par une ouverture et une intégration croissante au commerce international. La politique d’ouverture économique et financière a permis d’accomplir des avancées significatives en matière de modernisation des structures économiques et financières. Mais l’économie marocaine du début des années 2000 est une économie qui présente encore un grand nombre d’insuffisances notamment: 42 Section I: l’économie marocaine au début des années 2000, état des lieux:  Le taux de croissance s’est situé en moyenne à 3% durant la période 1992-2002, très en deçà du seuil de croissance de 6% nécessaire pour faire baisser le taux de chômage à moyen terme.  L’économie nationale est très vulnérable aux aléas climatiques, ce qui se traduit par une forte volatilité de la croissance suite aux fortes fluctuations du PIB agricole.  L’économie reste très peu diversifiée: la structure du PIB est marquée par la part importante de l’agriculture et par le niveau de développement insuffisant de l’industrie.  Le niveau d’investissement est insuffisant pour stimuler la croissance: il faudrait un taux d’investissement d’au moins 25% du PIB pour assurer une croissance économique soutenue et durable. 43 Section I: l’économie marocaine au début des années 2000, état des lieux: L’investissement public enregistre une tendance à la baisse depuis la mise en place du Programme d’Ajustement Structurel (PAS). La mobilisation de l’épargne est insuffisante et ne permet pas de financer une hausse de l’investissement. Le taux de chômage reste élevé (13,6% en 2000) notamment le chômage urbain, le chômage des jeunes âgés de moins de 25 ans, les diplômés et les femmes. Le marché de l’emploi est caractérisé par la part élevée de la main d’œuvre non qualifiée dans l’emploi total, et par la faible adéquation entre la formation et l’emploi. Le taux de bancarisation de la population reste faible (environ 20% en 2000) malgré la modernisation des structures financières. 44 Section II: l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure (2003- 2013) Pour tenter de remédier aux faiblesses de l’économie marocaine, les autorités marocaines vont adopter, à partir du début des années 2000, un modèle de croissance basé sur la demande intérieure. Ce modèle consiste à tirer la croissance par la demande intérieure, c’est-à-dire par l’augmentation de l’investissement et de la consommation finale des ménages: PIB = C + I + (X-M) en économie ouverte I - Augmentation de la consommation finale des ménages: L’augmentation de la consommation finale des ménages va être favorisée par: 45 Section II: l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure (2003- 2013) Des mesures de soutien à la consommation privée mises en place par le gouvernement La maîtrise de l’inflation par la politique monétaire de Bank Al-Maghrib pour augmenter le revenu réel des consommateurs L’amélioration du marché du travail par l’insertion professionnelle, la lutte contre le chômage et une meilleure adéquation formation/emploi. 46 Section II: l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure (2003- 2013) 1. Les mesures de soutien à la consommation privée:  Mise en place d’une politique d’élargissement et de renforcement des classes moyennes en favorisant les facteurs de la promotion sociale ;  Elargissement de la protection sociale en matière de couverture médicale et de retraite;  Création du « Fonds d’appui à la cohésion sociale » destiné à financer et à renforcer les actions sociales ciblant les populations démunies : RAMED, Tayssir, personnes à besoins spécifiques …;  Développement de l’économie sociale et solidaire et des activités génératrices de revenus pour lutter contre la pauvreté 47 Section II: l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure (2003- 2013) 2. La maîtrise de l’inflation: 48 Section II: l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure (2003- 2013) 3. L’amélioration du marché du travail: 49 Section II: l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure (2003- 2013) II - Augmentation de l’investissement: L’augmentation de l’investissement va être favorisée par: une hausse sans précédent de l’investissement public avec le développement de grands projets d’infrastructure Le lancement de politiques sectorielles innovantes telles que le plan d’émergence industrielle Le renforcement substantiel de l’épargne 50 Section II: l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure (2003- 2013) 1. Une hausse sans précédent de l’investissement public: A partir du début des années 2000, l’investissement public va être érigé en priorité, et la manne financière de la privatisation, avec la mise en place du Fonds Hassan II pour le développement économique et social (FHADES), va être mobilisée au service du développement de grands chantiers d’infrastructure:  port Tanger Med, LGV, autoroutes, aéroports, gares ferroviaires, gares routières, Programme d’Electrification Rurale (PERG), Programme d’accès à l’eau (PAGER)  programme national des technopoles, villes nouvelles, aménagement de la vallée du Bouregreg, hôpitaux, collèges et lycées, universités.. Cette politique des Grands chantiers a pour objectif de générer des effets d’entrainement importants 51 sur Section II: l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure (2003- 2013) Evolution de l’investissement public (2007- 2014) 187,0 189,0 En MM.DH 167,3 180,3 162,3 135,0 116,3 83,9 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 52 Section II: l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure (2003- 2013). Lancement de politiques sectorielles innovantes: Les politiques sectorielles sont élaborées conjointement par les pouvoirs publics et les acteurs économiques dans le cadre de contrat-programmes (avec des objectifs précis, les moyens nécessaires et les mécanismes de suivi). Cette nouvelle démarche a concerné de nombreux secteurs notamment le secteur industriel, le secteur agricole, le secteur de la pêche etc……. 53 Section II: l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure (2003- 2013) Mise à niveau et Valorisation des modernisation du potentialités du secteur secteur de la pêche agricole PLAN HALIEUTIS PLAN MAROC VERT  Préservation des ressources ;  Investissement 2009-2020 d’environ  Renforcement de la productivité ; 120 MMDH  Amélioration de la compétitivité.  Renforcement des productions à fortes VA (olivier, maraîchage, agrumes) Réduction des coûts de  Création de six agropoles la logistique Accélération des STRATÉGIE moteurs d’exportations LOGISTIQUE et d’IDE  Plates formes logistiques PACTE NATIONAL POUR (20)2005 multimodales ; L’ÉMERGENCE  Réalisation d’infrastructures INDUSTRIELLE autoroutières, portuaires  Ciblage des métiers mondiaux comme (TangerMed), …  Instauration de plus de concurrence ; moteur d’exportation  I  Section II: l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure (2003- 2013) 3. Le renforcement substantiel de l’épargne: En % du PIB 36 34 32,9 32,2 32,4 32 30,7 31,0 31,0 30,4 30,2 30,5 29,7 30 28 28,0 27,0 26,4 25,3 26 24,3 24 22 20 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 55 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? I – Les répercussions positives du modèle de croissance augmentation de l’investissement de près de 10 points de PIB en une décen PIB 38,1 36,0 35,3 34,7 35,6 35,1 32,2 32,5 29,1 27,4 29,4 25,9 28,8 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 56 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? 2. Le passage à un palier supérieur de croissance: 4,4% sur la période 2000-2013 contre seulement 3% au cours des décennies 80 et 90. Le lancement des politiques sectorielles et de la politique des grands chantiers ont permis: La diversification des sources de la croissance L’autonomisation du PIB total par rapport au PIB agricole La baisse de la volatilité de la croissance 57 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? Autonomisation de la croissance économique par rapport à la campagne agricole : Une croissance positive quelque soit l’évolution du PIB agricole (2000, 2005, 2007, 2012, 2014) PIB/PIB agricole en % 58 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? Croissance davantage tirée par la demande Rappelons que intérieure: PIB = C + I + (X-M) (économie ouverte) Investissemen t Consommatio Solde des n échanges extérieurs 59 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? 3. Une nette progression des revenus: la hausse de la croissance a généré un accroissement annuel du PIB/ hab de près de 6%. 27102 En DH 15798 2001 2014 60 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? 4. Une amélioration des indicateurs sociaux: en plus de l’augmentation du niveau de vie, la hausse de la croissance a également généré une amélioration des indicateurs sociaux notamment:  une baisse de la pauvreté monétaire (de 14,2% en 2004 à 8,8% en 2012)  une baisse de la pauvreté multidimensionnelle suite à la mise en place du PERG et du PAGER et à la généralisation de l’accès à l’eau et à l’électricité notamment dans les zones rurales, à la généralisation de la scolarisation primaire et à l’amélioration des indicateurs démographiques. 61 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? 2007 2011-2012 DEMOGRAPHIE : Taux brut de natalité (pour mille) 19,8 ‰ 18,7 ‰ Taux brut de mortalité (pour mille) 5,5 ‰ 5,1 ‰ EDUCATION ET FORMATION : Taux spécifique de scolarisation au primaire (de 6 à 11 ans) (en %) 90,7 % 97,5 % Taux d'analphabétisme (en %) 40,5 % 30,0 % SANTE : Nombre d'habitants par médecin (public et privé) 1 850 1 630 Espérance de vie à la naissance (en nombre d'années) 72,5 73,3 NIVEAU DE VIE ET EQUIPEMENTS DE BASE : Part de la population située au dessous du seuil de la pauvreté (en%) 14,2 % (2004) 8,8 % Part de la population rurale bénéficiant de l'eau potable (PAGER) (en %) 86,0 % 92,0 % 62 Taux d'Electrification Rurale (PERG) (en %) 93,0 % 97,4 % Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? II – Les faiblesses du modèle de croissance basé sur la demande intérieure: Plus de dix ans après l’adoption du modèle de croissance basé sur la demande intérieure, des progrès significatifs ont été réalisés mais l’économie marocaine continue de souffrir de fragilités persistantes:  Le déficit commercial est élevé et n’a pas cessé de se creuser  Le taux de chômage des jeunes et des diplômés reste très élevé  Le modèle de croissance s’est essoufflé après 2010  Les inégalités sociales sont toujours aussi élevées  Les indicateurs de développement n’ont pas connu d’amélioration notable. 63 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? 1. Une balance commerciale déficitaire dont le déficit n’a pas cessé de se creuser: Entre 2000 et 2013, les importations ont augmenté beaucoup plus rapidement que les exportations, et ce malgré le bon comportement des métiers mondiaux du Maroc en termes d’exportations: la part de ces secteurs dans le total des exportations a gagné 5,3 points en 2013 pour atteindre 36,4%. Quant aux exportations du secteur de l’automobile, qui représentaient il y a 5 ans la moitié seulement des expéditions du secteur du textile- habillement, elles sont devenues le principal pourvoyeur de devises. Mais les progrès réalisées au niveau des MMM n’ont pas permis d’atténuer le déficit commercial qui a continué 64 d’augmenter sous l’effet de plusieurs facteurs aussi bien Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? Postes à l’origine de l’aggravation du déficit commercial Facture énergétique Facture céréalière Importations des demi-produits et des biens d’équipements Ralentissement de la demande étrangère et de la croissance dans les pays de l’Union Européennes Dégradation de la part de marché absolue du Maroc Faible diversification des exportations manufacturées en termes de produits et de marchés Concentration des exportations manufacturées sur des produits à faible niveau technologique Faible intégration au niveau local du secteur manufacturier exportateur 65 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? Déficit de la balance commerciale / Importations énergétiques et céréalières 22,2% du PIB 202,1 198,3 14,4% du PIB 182,8 186,1 171,0 151,0 148,4 135,8 125,6 115,0 110,4 107,4 98,6 85,1 90,0 79,9 70,0 68,3 62,9 52,2 46,9 50,2 44,1 44,0 30,6 28,3 33,2 26,5 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 66 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? 2. Un taux de chômage des jeunes et des diplômés qui reste Letrès tauxélevé: de chômage a enregistré une baisse au cours de la période 2000-2013 (de 13,6% en 2000 à 9,2% en 2013) mais le marché du travail connaît la persistance d’un certain nombre de déséquilibres. L’emploi des jeunes en général et des jeunes diplômés en particulier reste pour les autorités marocaines l’un des défis majeurs à relever:  Le taux de chômage des 15-24 ans a augmenté sur les dix dernières années passant de 15% en 2005 à un peu plus de 19% fin 2013.  La forte augmentation du chômage des jeunes s’explique essentiellement par un taux de chômage très élevé des diplômés: autour de 19% pour les diplômés ayant au moins le DEUG contre 4% seulement pour la population active sans diplôme. Cette situation s’explique par la croissance 67 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? Evolution du taux de chômage des jeunes âgés de 15 à 24 ans (en %) 68 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? 3. Un essoufflement du modèle de croissance basé sur la demande intérieure après 2010: A partir du début de la décennie 2010, plusieurs évolutions reflètent l’essoufflement du modèle de croissance:  Un ralentissement de l’investissement entre 2010 et 2013: le taux d’investissement est passé de 36% du PIB en 2011 à 32,2% du PIB en 2014  Un ralentissement de la contribution moyenne de la consommation finale des ménages à la croissance de 4,2 points entre 2006 et 2009 à 3,5 points entre 2010 et 2014  Une forte dégradation des finances publiques: le déficit budgétaire est passé de 6,2% du PIB en 2011 à 7,1% en 2012 avant d’être ramené à 5,4% du PIB en 2013.  Un ralentissement du taux de croissance moyen de 5,1 % entre 69 2001 et 2009 à 3,6% entre 2010 et 2014. Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? 4.La persistance des inégalités sociales: Les progrès réalisés en termes de croissance n’ont pas permis au Maroc de réduire les inégalités sociales qui ont enregistré une quasi-stagnation entre 2000 et 2014. L’examen des données sur les dépenses de consommation des ménages reflète l’évolution des inégalités en termes de niveaux de vie au Maroc:  En 1984-85, la part des dépenses de 10% des ménages les plus riches s’élevait à plus de 30%, soit 15 fois supérieure à celle des 10% les plus pauvres (moins de 2%).  En 2007, les 10% des ménages les plus riches totalisaient près de 33% de la consommation totale des ménages soit 12 fois plus que la consommation des 10% les plus pauvres (2,75% du total).  En 2014, la part des dépenses de 10% des ménages les plus pauvres a tendance à se maintenir au même niveau qu’en 2007: 2,70% du total, alors que la part des dépenses des 10% les plus riches a diminué de 33% à 31,9% du total; 70 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? Cette réduction de l’inégalité par le haut a permis d’augmenter légèrement (d’environ 1%) la part des dépenses des classes de niveau de vie intermédiaire. La quasi-stagnation des inégalités de niveaux de vie en 2014 est illustrée par l’évolution de l’indice de Gini qui est passé de 0,393 pendant la décennie 90 à 0,406 en 2001, 0,407 en 2007, et a enregistré une légère baisse à 0,395 en 2014.  Le coefficient de Gini est une mesure du degré d'inégalité de la distribution des revenus dans une société donnée, développée par le statisticien italien Corrado Gini. Le coefficient de Gini est un nombre variant de 0 à 1, où 0 signifie l'égalité parfaite (tout le monde a le même revenu) et 1 signifie l'inégalité totale (une personne a tout le revenu, les autres n'ont rien). 71 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? 5. Une faible amélioration des indicateurs de Le développement: passage à un palier supérieur de croissance ne s’est pas traduit par une amélioration significative des indicateurs de développement. Ces indicateurs restent toujours inférieurs à ceux des autres pays de la région MENA:  L’indice de développement humain (IDH) a progressé en moyenne de près de 2,5 % pour s’établir à 0,6451 en 2013 au lieu de 0,49 en 1999.  Malgré les progrès de l’IDH, le rang mondial du Maroc, 130 ème sur 179 pays en 2013, n’a pas changé de manière significative et le Maroc reste toujours classé parmi les pays à développement humain moyen et plus mal classé que des pays voisins comme l’Algérie et la Tunisie, du fait non seulement de la persistance des déficits sociaux mais également de la progression des autres pays à des rythmes supérieurs à ceux du Maroc. 72 Section III: Quel bilan après une décennie du modèle de croissance? L’inefficacité des politiques sociales affecte le classement du Maroc en termes de développement humain L’augmentation du niveau de vie ne s’est pas traduite par une amélioration du bien être de l’ensemble de la population essentiellement en raison de l’absence d’efficacité des politiques éducatives et de santé. La Banque mondiale reconnait le rôle du capital humain comme moteur de la croissance inclusive, et explique que l’amélioration du capital humain au moyen de politiques d’éducation et de santé plus efficaces permettrait de réduire les inégalités sociales et d’améliorer le bien être de l’ensemble de la population. 73 Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable Le ralentissement de la croissance suite à l’essoufflement du modèle de croissance basé sur la demande intérieure depuis 2013 et la persistance des fragilités de l’économie marocaine ont rendu nécessaire la réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable, la diversification en termes de produits et le repositionnement sur de nouveaux marchés, dont le marché africain. Le nouveau modèle de croissance consiste donc à réajuster le modèle économique pour qu’il puisse « marcher sur ses deux jambes » tout en continuant à soutenir la demande intérieure. Il s’agit de:  Consolider le potentiel de croissance des nouveaux secteurs émergents de l’économie marocaine  Lancer une nouvelle génération de stratégies sectorielles et de réformes visant le renforcement du potentiel de la croissance et son caractère inclusif. 74 Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable Les différentes réformes menées ont pour objectif de porter la contribution du secteur industriel au PIB de 14% en 2014 à 23% en 2023. I - Confirmation du potentiel de croissance des nouveaux secteurs émergents de l’économie marocaine:  Confirmation du processus de transformation de la structure de la valeur ajoutée agricole dans le cadre du Plan Maroc Vert en faveur des filières les plus rentables à savoir l’arboriculture (olivier et agrumes) et l’élevage ;  Démarrage d’une 2ème ligne de production portant la capacité de l’usine Renault-Tanger à 340.000 unités/an. ; Cette nouvelle ligne doit assembler essentiellement la nouvelle version de la Dacia Sandero.  Signature d’une convention avec l’usine PSA pour la construction d’une usine à Kenitra 75 Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable  Ancrage plus marqué de l’activité de l’OCP sur les engrais, augmentation des exportations vers les principaux clients du Maroc (Inde / Brésil…) et repositionnement sur le marché africain (production de 2 millions de tonnes d’engrais dans le cadre de la coopération Maroc-Gabon) II - Lancement d’une nouvelle génération de stratégies sectorielles et de réformes visant le renforcement du potentiel de la croissance et son caractère inclusif Accélération de la transformation industrielle 2014-2020 ; Plan d’accélération logistique 2014-2020 ; Ajustement de la stratégie nationale pour le repositionnement du secteur du textile habillement… Plan chimie-parachimie 2023 76 Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable 1. Lancement du Plan d’accélération industriel (PAI) en 2014 La nouvelle stratégie vise à faire de l’industrie un levier majeur de croissance. Pour ce faire, elle doit atteindre deux objectifs majeurs à l’horizon 2020: L’accroissement de 9 points de la contribution du secteur industriel au PIB passant de 14% en 2014 à 23% en 2023. La création d’un demi-million d’emplois, pour moitié provenant des IDE et pour moitié du tissu industriel national rénové. Pour atteindre ces objectifs, le Plan d’Accélération Industrielle (PAI) se décline en 10 mesures: 77 Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable 1. Création et animation des écosystèmes La mise en place d’écosystèmes intégrés permet la collaboration entre leaders industriels et les PME dans des zones industrielles dédiées autour de programmes ciblés de coopération aboutissant à des contrats de fourniture à long terme et des transferts technologiques. Pour les pouvoirs publics, le développement de ces écosystèmesindustrielle 2. Compensation est au cœur de la politique industrielle. Pour favoriser le développement industriel, l’Etat peut, dans le cadre de marchés publics de taille importante, imposer aux fournisseurs des actions de compensation par exemple l’achat de produits et services auprès du tissus local, les transferts de technologies et la mise à niveau des Ressources Humaines. 3. Accompagnement de l’informel vers le formel Pour favoriser l’accompagnement des très petites entreprises, un dispositif complet d’intégration de la TPE a été mis en place comprenant le statut d’autoentrepreneur, une couverture sociale ainsi qu’un volet fiscal et des solutions de financement adaptées. 78 Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable 4. Qualification des ressources La formation de techniciens en nombre et la conception de plan de formations par les industriels leaders: le programme Skills de l’OCP qui vise à fournir des formations et un soutien à la création d'entreprises à des dizaines de milliers de jeunes sera généralisé pour assurer une meilleure adéquation entre l’offre de formation et les besoins des entreprises. 5. Amélioration de la compétitivité des PME Dans le but de renforcer la compétitivité des entreprises, le programme IMTIAZ soutient les PME à fort potentiel de croissance en leur accordant une prime à l’investissement correspondant à 20% de l’investissement total (la prime est plafonnée à 5 MDH par projet de développement). 6. Soutien financier La mise en place par l’Etat d’un Fonds de Développement industriel de 20 MM DH avec des mécanismes innovants basés sur le partenariat public-privé pour permettre au tissu industriel de se 79 consolider, de se moderniser et de développer sa capacité de Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable 7. Infrastructure accessible en location En matière de préparation du foncier industriel, 1000 hectares seront mobilisés pour la mise en place de parcs industriels locatifs avec des locaux clé en main à proximité des bassins d’emploi et des services de base notamment la restauration, l’habitat et les télécoms. 8. Intégration du Royaume à l’international Le PAI cherche à améliorer le positionnement du Maroc à l’international en assurant la surveillance du respect précis des dispositions des Accords de Libre Echange (ALE), en facilitant l’approvisionnement en intrants et l’accès aux biens d’équipement, et en renforçant l’intégration industrielle. 80 Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable 9. Deal making et IDE Le PAI prévoit de promouvoir l’investissement étranger en instaurant une culture de « deal making » avec l’implication des professionnels de l’intermédiation (banques d’affaires et experts dédiés) pour ouvrir le Maroc aux opportunités de l’évolution du marché international, par exemple la délocalisation annoncée de 85 millions d’emplois chinois. 10. Amplification de la vocation africaine Le PAI prévoit l’accompagnement pour l’installation des industriels en Afrique et l’assistance pour l’obtention de projets d’investissement sur le continent, l’objectif étant de privilégier les relations avec les partenaires africains dans le cadre d’une stratégie gagnant-gagnant (win win strategy) 81 Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable 2. Les progrès réalisés à fin 2019: En six ans, le potentiel de croissance des nouveaux secteurs de l’économie marocaine a été amélioré et la contribution du secteur industriel au PIB est passée de 14% en 2014 à 18% en 2020. La capacité de production a augmenté et des emplois ont été créés dans plusieurs secteurs notamment dans les secteurs automobile et aéronautique: 1. Secteur automobile: Capacité de production en hausse avec le démarrage de la deuxième ligne de production de Renault en 2014, la mise en service de l’usine Peugeot à Kénitra en juin 2019 et les implantations de groupes étrangers de renom tels que SNOP, GMD, BAMESA, DELPHI, YAZAKI, SEWS, et SAINT- GOBAIN. Huit écosystèmes créés:1.Câblage automobile, 2. Intérieur véhicule & sièges, 3. Métal 82 /emboutissage, 4. Batteries automobiles, Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable En ce qui concerne l’écosystème « moteurs et transmission », le Maroc a intégré le cercle fermé des producteurs et exportateurs de moteurs. L'installation de 27 fournisseurs dans l'écosystème PSA a permis d’atteindre un taux d’intégration (pièces fabriquées sur place) de 60%. 117.000 emplois créés et 27% de l’emploi industriel total. 1er secteur exportateur en 2018 avec 26% des exportations totales et un Chiffre d’affaires à l’export de 72 milliards de Dirhams en 2018 (plus de 80% de la production exportée est destinée aux pays européens). 83 Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable 2. Secteur aéronautique: Chiffre d’affaires de 19 milliards Dirhams en hausse de 20% par an 17.000 nouveaux emplois créés en 2019 142 projets d’investissements étrangers réalisés 3. Secteur textile: 15% des exportations du secteur industriel 185.000 emplois créés 15 projets d’investissement pour un total de 232 millions dirhams 4. Secteur des phosphates: 74 milliards Dirhams d’investissement (2014-2019) 84 Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable 3. Lancement de la deuxième génération du Plan d’accélération industrielle (2020-2025) Pour consolider les acquis accomplis dans le cadre de la première phase du PAI (2014-2020) et de les généraliser à toutes les régions du Royaume, les pouvoirs publics vont mettre en place la deuxième génération du Plan d’Accélération Industrielle (2021- 2025) dont l’objectif est la souveraineté industrielle et qui prévoit de: Consolider le développement industriel à l’échelle nationale en créant de nouveaux secteurs. Déployer des mesures pour encourager la recherche et l’innovation Promouvoir les capacités technologiques  Soutenir l’adoption de modes de production innovants pour 85 Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable Dans le cadre de la stratégie d’accélération industrielle, l’industrie a connu une réorganisation autour de 54 écosystèmes, en nouant des partenariats avec 32 associations professionnelles et universités. 12 secteurs industriels à fort potentiel ont été ciblés par le PAI et ont fait l’objet d’écosystèmes. L’Etat s’est engagé auprès de ces 12 secteurs dans le cadre de contrats de performance: les entreprises doivent réaliser un certain nombre de performances en contrepartie des avantages consentis par l’Etat : Chaque contrat de performance prévoit des mesures spécifiques selon le secteur, par exemple: prime relative à l’emploi direct créé ( Ecosystèmes Offshoring), 86 soutien à la mobilisation de l’expertise technique (Ecosystèmes Section IV: La réorientation progressive du modèle de croissance vers une approche basée sur l’offre exportable 87 CHAPITRE III: ANALYSE DES FORCES ET DES FAIBLESSES ACTUELLES DE L’ECONOMIE MAROCAINE 88 Introduction Après avoir adopté depuis le début de la décennie 2000 un modèle de croissance basé sur la demande intérieure, le Maroc a réorienté son modèle vers une approche basée sur l’offre exportable afin de consolider le potentiel de croissance des nouveaux secteurs émergents, de renforcer la souveraineté industrielle du Royaume et d’atteindre des taux de croissance plus élevés à même de réduire le chômage, les inégalités sociales et d’améliorer la qualité de vie des marocains. Plusieurs avancées ont été réalisées et l’économie marocaine dispose aujourd’hui de plusieurs atouts qui ont permis de hisser le Maroc au rang de puissance régionale dans le continent africain. Mais malgré les progrès réalisés dans le cadre des deux modèles de croissance, un grand nombre de fragilités structurelles persistent. 89 Section I: Les forces et les atouts de l’économie marocaine aujourd’hui Les progrès réalisés au cours des dernières décennies ont permis à l’économie marocaine de bénéficier aujourd’hui de plusieurs atouts notamment: I – Un bond gigantesque en matière de développement des infrastructures:  Le Maroc a été classé premier en Afrique dans les domaines du développement des infrastructures en 2024: infrastructures routière, ferroviaire, portuaire et aéroportuaire.  Tanger Med est le premier port africain en termes de capacité et est classé 4ème dans l’indice mondial de performance des ports à conteneurs.  Deux infrastructures portuaires de rang mondial, Nador West Med et Dakhla Atlantic sont en cours de réalisation et 90 Section I: Les forces et les atouts de l’économie marocaine aujourd’hui II – Les succès du PAI notamment dans les secteurs automobile et aéronautique:  Le secteur automobile est le premier secteur exportateur avec des exportations qui dépassent 130 MM DH en 2023. Le Maroc est aujourd’hui le premier producteur automobile en Afrique devant l’Afrique du Sud et le premier fournisseur du marché européen avec une production annuelle de plus de 600 000 unités destinées à 90% à l’export et une capacité de production de 1M de voitures.  Le secteur automobile a attiré ces dernières années des investissements étrangers notamment chinois pour développer le secteur des batteries électriques.  Le secteur aéronautique occupe la 20ème place mondiale et est aujourd’hui classé premier sur le continent africain. 91 Section I: Les forces et les atouts de l’économie marocaine aujourd’hui  Les exportations du secteur aéronautique ont atteint 21,8 MM DH en 2023 soit environ 2,17 MM Dollars.  De nombreux groupes internationaux ont délocalisé une partie de leur processus de production au Maroc et plus de 140 entreprises opèrent aujourd’hui dans le secteur, employant environ 20 000 personnes.  L’expertise des entreprises marocaines dans le secteur III –aéronautique a permis d’atteindre La position géostratégique du Maroc: un taux d’intégration élevé de 40%.  Le Maroc est à la porte de l’Europe et l’un des seuls pays avec l’Espagne et la France à être doté de rivages sur la mer Méditerranée d’un côté et l’Océan Atlantique de l’autre. Il sert aujourd’hui de trait d’union entre l’Afrique, la Méditerranée et l’Europe, ce qui le rend très attractif en matière d’IDE notamment pour des pays comme la Chine. Sa position géostratégique a été renforcée par le92 Section I: Les forces et les atouts de l’économie marocaine aujourd’hui IV – Un secteur touristique au fort potentiel:  Les réformes sectorielles mises en œuvre: Vision 2010, Vision 2020, le développement des infrastructures et de la capacité aéroportuaire ainsi que la multiplicité des mesures entreprises par l’Etat pour appuyer la relance du secteur après la crise du Covid 19 ont permis d’accroître la résilience du secteur touristique et de consolider son potentiel de croissance: ֊ la mise en œuvre d’un plan d’urgence doté d’un budget de 2 milliards de dirhams, ֊ l’opération Marhaba, et le renforcement de la promotion touristique, ֊ la consolidation de la connectivité aérienne et maritime, 93 l’adoption des e-visas, … Section I: Les forces et les atouts de l’économie marocaine aujourd’hui  Le secteur touristique a enregistré un rebond important post pandémie: Les arrivées touristiques au Maroc, 10,2 millions à fin août 2023, ont augmenté de 10% relativement à la même période de 2019, et les recettes touristiques, 71,4 milliards de dirhams, se sont accrues de 35% au titre de la même période. IV – Un déficit budgétaire relativement maîtrisé:  Malgré un contexte national et international difficile à partir de 2020, le Maroc a pu faire face aux tensions inflationnistes et assurer la soutenabilité des finances publiques: ֊ Le déficit budgétaire a été maîtrisé sur la période 2013- 2019, avec un déficit budgétaire moyen de 3,84% pour les sept années. 94 Section I: Les forces et les atouts de l’économie marocaine aujourd’hui ֊ Après une aggravation à -7,1% du PIB en 2020 consécutive à la crise sanitaire, le déficit budgétaire a amorcé, à partir de 2021, une amélioration en s’établissant à 5,2% du PIB en 2022 contre 5,5% en 2021 et 7,1% du PIB en 2020. ֊ Cet allégement du déficit budgétaire s’est concrétisé en raison de la bonne progression des recettes fiscales malgré l’effort budgétaire consenti pour faire face aux répercussions de la crise sanitaire, alléger l’effet de la remontée des prix des matières premières pour soutenir le pouvoir d’achat des ménages, et certains secteurs spécifiques de l’économie (transport, tourisme, agriculture), dynamiser l’économie et les entreprises ainsi que pour lancer des réformes sociales structurelles (protection sociale, santé et 95 Section I: Les forces et les atouts de l’économie marocaine aujourd’hui Evolution du déficit budgétaire (2000-2022) en % du PIB 96 Section II: Les fragilités persistantes de l’économie marocaine Malgré les progrès réalisés au cours des deux dernières décennies, l’économie marocaine souffre de la persistance d’un certain nombre de fragilités notamment un taux de croissance qui n’arrive pas à dépasser un plafond de verre malgré les réformes sectorielles mises en place et les grands projets d’infrastructures, la persistance de fortes disparités sociales, un taux de chômage élevé surtout chez les jeunes et les diplômés, et un déficit commercial structurel. I – Une « panne » dans la croissance: Le rythme de croissance, 3,5% en moyenne sur la dernière décennie, est en deçà de ce qu’il devrait être compte tenu des réformes sectorielles et des grands projets d’infrastructures mis en place. Plusieurs facteurs expliquent cette « panne » dans la croissance notamment: 97 Section II: Les fragilités persistantes de l’économie marocaine 1. Une croissance basée sur l’accumulation du capital public:  S’agissant des facteurs de la croissance liés à l’offre, le modèle repose essentiellement sur l’accumulation du capital (essentiellement le capital public) et non sur la productivité globale des facteurs et l’amélioration du capital humain. Or, pour relever le potentiel de croissance au niveau nécessaire pour baisser sensiblement le chômage (6% en moyenne), l’amélioration de la productivité globale des facteurs (PGF) est indispensable.  L’investissement public représente les 2/3 de l’investissement total, or pour avoir une dynamique de croissance, celle-ci doit être portée essentiellement par l’investissement privé. 98 Section II: Les fragilités persistantes de l’économie marocaine 2. Une économie peu diversifiée en termes de produits et de marchés:  Au cours de la dernière décennie, le Maroc a lancé une stratégie de diversification de ses échanges commerciaux vers le continent africain mais également vers l’Asie, mais l’économie reste encore peu diversifiée en termes de marchés: 70% des échanges commerciaux se font toujours avec l’Union Européenne.  L’économie reste aussi peu diversifiée en termes de produits exportés: le Maroc exporte environ 1300 produits contre environ 3500 produits exportés en Malaisie ou en Corée du Sud.  Cette faible performance s’explique notamment par le nombre limité d’Entreprises régulièrement exportatrices: 99 moins de 1000 entreprises contre 60 000 entreprises Section II: Les fragilités persistantes de l’économie marocaine 3. Une structure de marché peu concurrentielle:  Plusieurs secteurs se caractérisent par une structure oligopolistique avec ententes: secteur bancaire, télécommunications, hydrocarbures, secteur des eaux minérales, secteur du ciment…..  Cette structure oligopolistique avec ententes entrave la libre- concurrence, crée des situations de rente et empêche l’entrée sur le marché de nouvelles entreprises. 4. La faible compétitivité des entreprises marocaines:  Le tissu industriel marocain se caractérise par la prédominance de TPME (75% environ de l’ensemble du tissu industriel) qui produisent peu de valeur ajoutée et qui sont confrontés à des coûts de production élevés et à des 100 problèmes de financement. Section II: Les fragilités persistantes de l’économie marocaine 5. Le faible taux d’activité des femmes:  Le taux d’activité des femmes est de 19% en 2023. Ce taux qui est parmi les plus faibles au monde enregistre une baisse continue puisqu’il était de 28,1% en 2000. Cette faible participation des femmes au marché du travail qui s’explique par des facteurs économiques, éducatifs et aussi par des normes socioculturelles entrave considérablement l’augmentation du PIB et constitue un obstacle structurel à la croissance. 6. La faible confiance sociale dans les institutions:  La faible confiance sociale dans les institutions juridiques, administratives et politiques augmente l’incertitude et réduit la prise de risque et l’investissement. 101 Section II: Les fragilités persistantes de l’économie marocaine II – L’augmentation du taux de chômage à partir de 2020: La situation du marché du travail s’est beaucoup dégradée après 2020 non seulement en raison de la crise sanitaire mais aussi des épisodes récurrents de sécheresse. Après une tendance à la baisse entre 2016 et 2019 avec un taux de chômage de 9,5% en moyenne, le taux de chômage a commencé à augmenter à partir de 2020 pour s’établir à 13,3 % à fin 2023 malgré une reprise de la croissance à 3,4%. Les secteurs les plus touchés en termes de pertes d’emplois sont le secteur de « l’agriculture, forêt et pêche » et le secteur des « services ». Par catégorie de population, le chômage est plus élevé chez :  Les jeunes de 15 à 24 ans qui restent les plus touchés avec un taux de chômage de 35,8% en 2023 (contre31,2% en 2020),  les diplômés (19,7%) et 102  les femmes (18,3% ) Section II: Les fragilités persistantes de l’économie marocaine II – La persistance de fortes disparités sociales et les faibles performances termes de développement humain: La quasi-stagnation des inégalités de niveaux de vie est illustrée par le maintien de l’indice de Gini autour de 0,40 entre 2014 et 2023. La persistance de ces fortes inégalités s’explique essentiellement par:  La défaillance du système de protection sociale (assurance maladie, allocations familiales, accidents de travail, système de retraite) Les L’absence d’équité performances endu système termes fiscal qui pèse lourdement de développement sur humain restent une partiefaibles également seulement de la population. relativement à ceux des autres pays de la région MENA:  L’indice de développement humain (IDH) est passé de 0,6451 en 2013 à 0,698 en 2023 essentiellement sous l’effet de la baisse du taux d’analphabétisme à 24,8% en 2023 contre 103 32,2% en 2014. Section II: Les fragilités persistantes de l’économie marocaine  Le Maroc a ainsi progressé de trois places en 2023 passant du 123 ème au 120ème rang mondial mais reste toujours classé parmi les pays à développement humain moyen derrière des pays comme l’Algérie, la Tunisie et l’Egypte notamment en raison de la durée moyenne de scolarisation qui reste faible et inchangée depuis 2020 à 6,1 années. IV – Un déficit commercial structurel: La balance commerciale continue d’être déficitaire malgré le bon comportement des secteurs à fort potentiel de croissance en termes d’exportations: secteur automobile, phosphates, aéronautique…. La hausse du déficit commercial a été particulièrement importante en 2021 et 2022 essentiellement sous l’effet de l’augmentation des importations de céréales et de pétrole consécutive à la hausse des prix des céréales et de l’énergie sur les marchés internationaux (conflit russo-ukrainien) 104 et aux épisodes récurrents de sécheresse au Maroc. Section II: Les fragilités persistantes de l’économie marocaine 105 Section III: Les défis à relever dans le cadre du Nouveau Modèle de Développement (NMD) La persistance de ces fragilités depuis deux décennies et les nombreux défis qui en ont résulté ont amené les pouvoirs publics à penser un nouveau modèle de développement qui a été mis en place en mai 2021. Ce nouveau modèle de développement (NMD) est différent des modèles de croissance mis en place précédemment parce qu’il vise une amélioration des structures économiques, mais également sociales, culturelles et mentales du pays à l’horizon 2035. En effet, le développement ne peut être atteint sans croissance mais il nécessite aussi des réformes dans les domaines de la santé, de l’éducation, des institutions etc…. qui permettront une transformation profonde de la société marocaine. 106 Section III: Les défis à relever dans le cadre du Nouveau Modèle de Développement (NMD) Compte tenu des nombreux défis à relever à l’horizon 2035, le Nouveau Modèle de développement s’est ainsi fixé plusieurs objectifs précis notamment:  Inverser le rapport investissement public-privé en faveur de l’investissement privé: 2/3 de l’investissement total.  Augmenter le taux d’activité des femmes de 20% à 45%.  Réduire l’indice de Gini de 0,395 à 0,35.  Passer d’un peu moins de 1000 entreprises à 12 000 entreprises régulièrement exportatrices.  Atteindre le nombre de 3000 entreprises à fort potentiel de croissance et capacité d’innovation. 107 Section III: Les défis à relever dans le cadre du Nouveau Modèle de Développement (NMD) Pour atteindre ces objectifs, quatre grands axes stratégiques ont été identifiés: I – La transformation structurelle de l’économie Il s’agit de transformer l’économie marocaine en une économie productive, diversifiée et créatrice de richesse et d’emplois de qualité. Ce processus de transformation structurelle implique notamment:  le développement de l’initiative entrepreneuriale en protégeant les entrepreneurs et en leur offrant l’égalité des chances, d’où la nécessité de: - lutter contre les pratiques anticoncurrentielles comme les situations d’oligopole avec ententes sur les prix - renforcer l’indépendance et la crédibilité des institutions de bonne gouvernance: le Conseil de la Concurrence, l’Instance nationale de lutte contre la corruption qui ne sont pas encore totalement opérationnels. 108 Section III: Les défis à relever dans le cadre du Nouveau Modèle de Développement (NMD)  l’amélioration de la compétitivité par la baisse des coûts de production (coût de la logistique, de l’énergie, du foncier) et la facilitation de l’accès au financement pour les TPME.  l’orientation de l’investissement privé vers les secteurs à fort potentiel de croissance et forte valeur ajoutée par des politiques publiques et des dispositifs fiscaux incitatifs.  le développement de l’économie sociale et solidaire en revoyant le cadre législatif et réglementaire des associations, des mutuelles, et des coopératives pour en faire un vecteur de création de richesse et d’emploi qui représenterait 8% du PIB à l’horizon 2035. II – Le renforcement du capital humain Il faut renforcer le capital humain notamment:  en assurant une éducation de qualité et  et en améliorant la santé publique 109 Section III: Les défis à relever dans le cadre du Nouveau Modèle de Développement (NMD) III – L’inclusion sociale Les axes majeurs de l’action sociale proposés par le NMD consistent à:  renforcer l’autonomisation des femmes  favoriser l’inclusion et l’épanouissement des jeunes et  assurer la protection sociale des plus démunis. IV – Le développement régional L’une des préoccupations majeures du NMD est de redéfinir les stratégies de développement régional pour replacer les territoires comme source de création des richesses et pour favoriser la durabilité des ressources et leur résilience face aux effets du changement climatique. 110

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