Procédure civile PDF (Cours Fini) - L3 Droit Privé 2024-2025
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2024
Mme Bonis
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Ce document est un cours sur la procédure civile, ciblant l'année 2024-2025. Il explique les bases de la procédure civile en détail, incluant les concepts fondamentaux, les acteurs impliqués, et les différentes étapes d'un processus juridique. Le cours explique notamment la procédure civile en relation avec le droit du travail, social et commercial.
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PROCÉDURE CIVILE MME BONIS L3 Droit privé - Semestre 5 Année 2024-2025 Introduction 05/09/2024 La procédure est un ensemble de règles de droit, un droit objectif mais qui présente la particularité d’énoncer des règles de forme. C’est à...
PROCÉDURE CIVILE MME BONIS L3 Droit privé - Semestre 5 Année 2024-2025 Introduction 05/09/2024 La procédure est un ensemble de règles de droit, un droit objectif mais qui présente la particularité d’énoncer des règles de forme. C’est à dire que c’est un ensemble de règles qui vont permettre à un justiciable de savoir de quelle manière il doit s’adresser à un juge civil pour obtenir en justice le respect ou la reconnaissance de ses droits subjectifs. La procédure civile est intimement liée a l’idée de justice, de procès. Aborder la procédure civile c’est d’une certaine manière se dire “comment concrètement je fais respecter les droits civils de fonds qui sont les miens ?”. C’est la description des règles qui permettent en justice de faire valoir ou reconnaitre ses droits. La procédure civile c’est avant tout de la procédure, du latin “procedere” qui signifie “aller vers, aller en avant”, c’est l’idée de progresser vers quelque chose. En soit, le mot procédure n’est pas exclusivement juridique, il est aussi utilisé dans le langage courant. Pour le juriste le mot procédure a un sens tout de même plus précis c’est un ensemble d’actes juridiques qui doivent être accomplis pour soumettre un problème juridique à un juge et parvenir au terme du processus à une décision de justice. La procédure est tout ce qui va permettre de faire que le procès se déroule jusque son terme étant l’obtention d’une décision de justice. Le procès lui peut être défini comme une difficulté de fait ou de droit que l’on soumet à un juge. Toutefois ces difficultés peuvent être de nature très différentes. Difficulté avec son employeur Femme mariée à son conjoint victime de violences conjugales qui porte plainte afin de condamner son mari pénalement (juge pénal → procédure pénale) et qui veut obtenir le divorce et modalités de garde pour les enfants (juge civil → procédure pénale) Salarié en litige avec son employeur à propos de l’exécution du contrat de travail Consommateur en litige avec le commerçant Quand on parle de procédure civile on parle de règles qui vont permettre d’aboutir a la mise en oeuvre de droit civil stricto sensu mais également des règles qui vont permettre de mettre en oeuvre et faire respecter le droit du travail, social, commercial… La procédure civile a vocation à s’appliquer à tous les litiges qui concernent les personnes privés, qui touchent les intérêts privés de personnes physiques ou morale. C’est cet élément là qui permet de distinguer la procédure civile de la procédure pénale ou administrative. En effet, lorsque l’on aborde la procédure pénale, ce ne sont plus deux intérêts privés qui s’opposent, il y a une opposition d’un intérêt souvent privé mais avec est l’intérêt général. Dans le cadre de la procédure administrative, ce sont des intérêts publics, c’est un litige entre deux administrations, deux services de l’État. Donc, le mot procédure est lié au mot procès mais la procédure civile n’est lié qu’à un type de procès, celui où s’oppose deux intérêts privés. C’est la disparité des intérêts qui est essentielle et non la disparité des personnes. Très souvent, on ne rattache le Procureur de la République, représentant de l’intérêt général, seulement au procès pénal, seulement il est aussi présent dans le cadre du procès civil. À ce titre, les articles 421 et suivants du code de procédure civile prévoient qu’il peut être présent dans un procès civil en qualité de partie, de la sorte, il viendra assurer la défense de l’ordre public face a des faits qui portent attente à l’ordre public. En matière de mariage, si les époux ont consentis à l’union mais que le Procureur de la République a la conviction que le consentement de l’un des époux n’était pas libre, le ministère public peut agir en justice tout comme l’époux, en vu de faire annuler pour défaut de consentement ce mariage. En cas de choix de prénom contraire aux intérêts de l’enfant, l’officier d’État civil qui aurait inscrit ce prénom et qui aurait un doute peut porter l’information au Procureur de la République qui lui pourra saisir le JAF pour entamer une procédure de changement de prénom. De la même manière, les grands principes qui guident la procédure civile, pénale et administrative sont très similaires. Autrefois, les principes qui guidaient ces 3 contentieux étaient très différents, dans certains il y avait la publicité, parfois la procédure accusatoire et d’autre inquisitoire. Depuis le XX°/XIX°, les 3 se rapprochent sensiblement car le droit constitutionnel et le droit européen ont oeuvré a ce rapprochement. Aujourd’hui, surtout depuis la QPC, le Conseil constitutionnel dégage des principes de procédure communs à toutes les procédures. Introduction 1 On trouve alors aujourd’hui dans les 3 procédures les droits de la défense, c’est à dire qu’une personne doit être mise en mesure et se défendre face aux arguments de la partie adverse ou encore le principe du contradictoire qui sorte de préalable à l’exercice des droits de la défense, il oblige les parties et le juge à faire circuler entre eux les informations, les pièces, les actes dont ils disposent. De la même manière on retrouve dans ces différents contentieux des principes tels que la publicité des débats, la collégialité, l’indépendance du juge… Les principes eux-mêmes ne permettent pas de dire quelle est la nature exacte du contentieux. Toutefois, il y a peut être un principe qui permet d’identifier un contentieux, celui de la présomption d’innocence, on ne le retrouve qu’en procédure pénale. Le rapprochement entre les 3 types de contentieux a donné à ce que l’on appelle le droit processuel, il s’agit d’un droit qui procède a la comparaison des procédures entre elles. Le droit processuel est défini comme une science comparative fondée sur le rapprochement des procédure et l’étude des thèmes communs à tous les procès mais il s’agit là d’une définition un peu trop ancienne. Motulsky concevait ainsi le droit processuel comme étant un droit comparatiste des procédures civile, pénale et administrative, on doit le droit processuel a Vizioz qui était spécialiste de procédure civile. Depuis une vingtaine d’années, à cette conception classique, a succédé une approche plus moderne du droit processuel qui consiste a dégager des notions communes à tous les procès et à étudier ces notions, c’est aujourd’hui un droit qui ne vient plus comparer mais qui cherche à prendre de la hauteur pour dégager une science du procès. Cette évolution s’est faite à la suite du développement du droit européenne et notamment sur la jurisprudence de la CourEDH sur la base de l’article 6 de la ConvEDH. Le droit processuel est aujourd’hui un ensemble de droits que l’on peut considérer comme fondamentaux pour le justiciable mais aussi un ensemble de principes communs à la justice, que ceux-ci soient juridiques mais aussi politiques, qui s’approchent d’une logique managériale de la justice. On y trouve des questions telles que celles du coût de la justice, de la lenteur de la justice mais aussi des moyens matériels, financiers et humains de la justice. I. La notion de procédure civile A. Le contenu de la procédure civile C’est un ensemble d’actes, de formalités qui vont permettent qu’un litige soumis à une juridiction civile obtiennent une réponse par le biais d’un acte juridictionnel qu’on appelle jugement. La notion de juridiction civile sera entendu comme englobant les juridictions statuant en droit civil stricto sensu mais également celles en statuant en droit commercial, social… soit le droit civil en général. La procédure civile est un catalogue de formalité a accomplir mais ce n’est pas que cela, l’étude de la procédure civile doit aussi permettre de déterminer quel est le juge compétent, à qui on doit adresse cette demande, quel est le rôle des parties, celui du juge, quelles sont les voies de recours… C’est une vision progressive, chronologique de la démarche du justiciable qui, confronté a un problème juridique entend le soumettre à un juge jusqu’a avoir une solution qu’il trouve satisfaisante. La procédure civile intègre à la fois les questions de compétence mais aussi les différentes instances qui peuvent se dérouler au premier et second degré mais aussi éventuellement en cassation. Cette définition a posé en doctrine des difficultés et a conduit à utiliser des terminologies différentes. En effet la doctrine distingue essentiellement 3 phases différentes : Celle qui consiste à comprendre comment fonctionne l’appareil judiciaire, ce qu’est la justice dans notre pays Celle qui consiste à étudier la manière dont le justiciable peut mettre en oeuvre ses droits Celle qui consiste à étudier l’exécution de la décision La procédure civile ne regroupe pas ces 3 phases, elle comprend de l’avis de tous les auteurs la deuxième phase, la plupart des auteurs incluent également dans la procédure civile la question de la determination du juge compétent. En revanche, la première phase est parfois étudié au titre des institutions judiciaires et la troisième phase est étudié dans le cadre de la procédure civile d’exécution. Certains, au lieu de parler de procédure civile parlent de droit judiciaire privé, il s’agit d’une terminologie qui a été utilisé pendant très longtemps. Cette appellation englobe la procédure civile mais elle permet d’aller au delà de la stricte procédure civile puisque c’est l’étude de l’ensemble des règles de droit qui permettent d’obtenir une décision juridictionnelle en envisageant aussi bien les règles relatives à l’organisation que les règles strictes de procédure. En bref, le droit judiciaire privé est l’addition des institutions civiles, de la procédure civile et de l’arbitrage. La procédure civile c’est l’étude des règles qui permettent à un justiciable d’identifier le juge compétent pour lui soumettre un problème de droit en vue d’obtenir une décision de justice, il s’agira donc pour nous d’étudier essentiellement l’instance civile donc le laps de temps qui va de la demande en justice jusque l’obtention de la décision du jugement. La déclaration d’appel est une nouvelle demande qui marque le début d’une deuxième instance. Il peut donc, dans une même affaires plusieurs instances. L’instance permet de définir une période qui s’écoule entre une demande et la réponse du juge, c’est un laps de temps, mais il s’agit aussi un lien entre des parties, elle fait alors naître des droits mais aussi des obligations à la charge des parties (demandeur, défendeur), lien placé sous le contrôle du juge. Introduction 2 B. Les fonctions de la procédure civile Définir la procédure civile comme un ensemble de formalités ne rend pas parfaitement compte des fonctions de la procédure car le rôle du juge dans la procédure civile consiste certes à trancher des litiges mais pas seulement. D’une part la procédure civile va permettre de définir le rôle du juge mais surtout le rôle des parties car elles sont essentielle dans le procès civil, le juge n’est uniquement la que pour trancher un litige en fonction de ce que les parties auront demandés et apportés dans le procès. C’est aux parties de rapporter les preuves, le juge ne vient intervenir seulement comme un “arbitre”. Le juge se voit aujourd’hui reconnaitre davantage de pouvoirs. Si l’on s’intéresse au but de la procédure, elle doit permettre de trancher un litige mais pas seulement, elle a deux fonctions différentes : une fonction contentieuse une fonction gracieuse 1. La fonction contentieuse de la procédure civile C’est celle que l’on connait le mieux, c’est celle qui consiste pour un individu à saisir le juge pour faire reconnaitre/respecter ses droits puisque les individus ne respectent pas les droits subjectifs qui sont les siens. Cette situation est certes connue mais elle demeure assez accidentelle dans le champ du droit civil. En effet, la plupart des rapports d’obligations entre les individus s’exécutent sans qu’il soit nécessaire de faire appel à un juge. La situation dans laquelle on fait appel à un juge, est particulière puisqu’elle vient faire appel au droit civil et à la procédure civile et le lien est très différent que celui que l’on peut retrouver entre le droit pénal et la procédure pénale. Le droit civil existe au quotidien sans le procès donc sans la procédure civile. En revanche, le droit pénal dans son aspect pratique n’existe pas sans la procédure pénale, en effet, le droit pénal consiste a définir ce qui est interdit et y prévoir une peine pour celui qui viendrait transgresser l’interdit, sauf que si l’on veut mettre ces règles en oeuvre, que l’on veut condamner une personne, il faut nécessairement passer par le procès pénal donc par la procédure pénale Cette différence s’explique de manière assez évidente puisqu’en droit civil il s’agit d’intérêts privés et donc les individus peuvent régler leur différend par eux-même alors qu’en droit pénal il s’agit d’intérêt public et donc la société doit être représenté. La première fonction du juge civil est de trancher un procès civil en proposant une solution a des parties qui ne sont pas parvenues par elles- mêmes à trouver une solution. Le désaccord bien entendu doit être résoluble sur un plan juridique. 2. La fonction gracieuse de la procédure civile La fonction gracieuse renvoie à ce que l’on appelle la matière gracieuse qui se caractérise par deux éléments : l’absence de litige (il n’y a pas de partie adverse, pas d’opposition) la norme juridique exige que le juge contrôle une situation qui ne pourra produire d’effet qu’après Ainsi, en matière d’adoption, de changement de régime matrimonial, alors même que les époux sont d’accord, la loi exige parfois du juge qu’il opère un contrôle pour s’assurer que les intérêts des personnes ou des tiers ne soient pas malmenés. Des époux peuvent envisager de changer de régime matrimoniale mais cela aura un impact sur les enfants, sur les créanciers des époux, la sorte exige dès lors que ce changement soit soumis à un juge pour qu’il le contrôle dans l’intérêt de tous afin qu’il soit homologué par le biais d’une décision de justice Le juge vient homologuer un acte et par conséquent, il donne force juridique à quelque chose qui n’avait que force conventionnelle. Article 25 du code de procédure civile “Le juge statue en matière gracieuse lorsqu'en l'absence de litige il est saisi d'une demande dont la loi exige, en raison de la nature de l'affaire ou de la qualité du requérant, qu'elle soit soumise à son contrôle.” La fonction gracieuse peut également intervenir en cas de litige entre les deux parties réglé de façon conventionnelle, elles pourront ensuite le faire homologuer ce qui permettra à l’une des partie d’aller voir un commissaire de justice en cas de nos respect de l’obligation conventionnelle. C. Les caractères de la procédure civile Ils sont au nombres de 2 : un caractère impératif et un caractère formaliste. 1. Le caractère impératif Introduction 3 C’est l’idée que les règles de procédure civile sont d’ordre public et cela emporte deux conséquences, cela signifie que que les parties ne peuvent pas d’un commun accord définir des règles différentes en écartant les règles de procédure civile. Mais également que le juge doit vérifier le respect des règles de sa propre initiative même si les parties ne lui demandent pas de vérifier Il existe toutefois certains pans de règles qui ne sont pas impératives et qui laissent place a la volonté individuelle notamment en ce qu’il s’agit des règles de compétences. Pour éviter que certaines juridictions ne soient surchargées par rapport a d’autres, le code de procédure civile et le code de l’organisation judiciaire prévoient une réparation de compétence des juges et des juridictions (compétence matérielle et territoriale). Dans ce domaine, sur la question de compétence territoriale, les parties disposent de la possibilité de s’écarter de la loi et de choisir leur juge. Deux commerçants passent un contrat et sont en litige du fait de son inexécution, l’un habite Bordeaux, l’autre Marseille et le contrat a été signé à Toulouse. La loi prévoit que la juridiction compétence est celle du lieu de livraison de la chose, dans leur contrat, les parties ont pu prévoir une règle dérogatoire. Cette possibilité s’explique par le fait que les règles de la compétence territoriale ne sont pas toutes impératives. 2. Le caractère formaliste Il y a plusieurs choses à respecter tels que des délais, un ordre d’accomplissement très particulier… Ce formalisme fait que la procédure civile à mauvaise réputation car souvent un plaideur peut avoir le sentiment de perdre un procès ou de ne pas pouvoir le conduire pour des vices mineurs. Ce formalisme a conduit très souvent à dire que les spécialistes de procédures étaient des procéduriers. Ce formalisme est lourd, ennuyeux, il est une contrainte pour les parties bien qu’il ne soit pas exigé pour les ennuyer. Le formalisme est ici un moyen d’atteindre un but qui est la protection des parties. En procédure pénale, Ihering écrivait qu’elle était “la soeur jumelle de la liberté”, en effet, le formalisme vient préserver la liberté des individus. Les exigences formelles de la procédure civile sont un moyen de prévenir les parties contre l’arbitraire du juge mais aussi de se préserver des manoeuvres des parties. Le formalisme apporte de la sécurité à celui qui s’y trouve soumis. C’est un moyen de garantir une bonne justice. La question peut se poser si le formalisme tel qu’il est prévu n’est pas un formalisme excessif ? En principe il ne l’est pas mais des plaideurs estiment que des règles sont trop pointilleuses, exigeantes sans que cela ne soit justifié par la protection des droits des individus. Cela a conduit la France de se faire condamner par la CourEDH pour formalisme excessif puisque certaines règles n’étaient pas nécessaires. 12/09/2024 II. Les sources de la procédure civile A. Les sources nationales Ces sources nationales sont de deux types : la norme (sources législatives et réglementaires) mais aussi, il y a des sources plus informelles de la procédure comme la jurisprudence et la pratique. De plus, rapport entre loi et règlement très diff de ce que l’on voit habituellement. 1. Les sources écrites La procédure civile a fait l’objet d’une codification, depuis 1810 il y a un code de procédure civile et avant, cette matière avait déjà fait l’objet de début de codification (notamment dans le code Louis). a. L’identification de la source écrite Depuis 1958, année d’adoption de la Constitution de la V° République, les matières sont réparties entre le pouvoir législatif et le pouvoir règlement de sorte que les lois viennent régir les matières énoncées à l’article 34 alors que ce sont les règlements qui viennent régir les matière autres entendues par l’article 38. Contrairement à de nombreuses autre matières juridiques et à la procédure pénale qui figure à l’article 34, la procédure civile n’y figure pas. On déduit que la procédure civile relève de l’article 38 donc du règlement. Jusque 1958, la procédure civile était défini par le parlement, elle a basculé du domaine de la loi au domaine du règlement. En procédure civile, les sources écrites sous surtout de nature règlementaire. Cela a conséquence importantes au regard du contrôle de la norme, il est rare de trouver des QCP ou des décisions du Conseil constitutionnel, cela ne signifie pas pour autant que la loi n’a aucune place dans le champ de la procédure civile. L’article 34 de la Constitution prévoit que la création de nouveaux ordres de juridiction relève du Parlement, or, la procédure civile a des liens avec l’organisation juridictionnelle, cela peut alors avoir un impact sur la procédure civile. Cela est d’autant plus vrai lorsque l’article 34 parle de Introduction 4 création de nouveaux ordres de juridiction, il ne faut pas le comprendre comme la création d’un nouvel ordre a coté de l’ordre judiciaire et administratif mais comme la création de nouvelles catégories de juridiction. Pendant longtemps, le contentieux civil a été partagé entre le tribunal d’instance et le tribunal de grande instance puis il y a eu la création du tribunal de proximité qui a récupéré à son tour du contentieux, par les suites ces juridictions de proximité ont été supprimés et le tribunal d’instance et le tribunal de grande instance ont fusionné pour donner le tribunal judiciaire. Toutes ces réformes relèvent du domaine de la loi. La loi a un second impact en ce qu’elle va donner souvent de grandes orientations de la procédure civile et définir des droits subjectifs qui ont des conséquences sur le plan de la procédure (tout ce qui est en lien avec le droit de la défense, le droit d’accès à un juge…). C’est d’ailleurs souvent la loi qui fixe de grandes orientations. Le législateur contemporain a voulu développer une politique de l’amiable → pour désengorger les tribunaux, il a voulu faire en sorte qu’un certain nombre de litiges soient réglé par un conciliateur ou médiateur plutôt que par un juge à la demande de ce dernier ou de façon spontanée Cette politique de l’amiable a été au départ lancée à travers une loi. À charge ensuite pour le Gouvernement, à l’aide de décret de définir comment cela va se mettre en place. b. Localisation de la norme La procédure civile a d’abord fait l’objet d’une codification napoléonienne promulguée en 1806 et entrée en vigueur le 1er janvier 1807. C’est en quelque sorte ici le premier code de procédure civile. Ce code de procédure civile a été quand même assez vite critiqué dès la fin du XIX°, on va songer à le réformer notamment parce qu’il n’était pas très novateur et conservait un certain nombre de vieux principes qui existaient sous l’Ancien régime et qui n’étaient plus adaptés a la justice moderne. À la fin du XIX° jusque la moitié du XX°, ces projets de réformes n’ont jamais aboutis. Il a fallut attendre la fin des années 60 pour qu’un mouvement de réforme se mette en place sous l’impulsion de Jean Foyer alors grade des sceaux sous la présidence de Charles de Gaulle. Il a mis en place une commission de réforme du CPC qu’il présidait et qui réunissait des praticiens de la procédure civile qui sont des avocats, magistrats mais également universitaires dont deux très importants qui sont Cornu et Motulsky. Les travaux de ces derniers ont été très importants non seulement pour aboutir a une nouvelle réforme mais aussi dans ce code par la manière dont il est structuré. Les travaux ont abouti a la création d’un nouveau code promulgué le 5 décembre 1975 entré en vigueur le 1er janvier 1976. Ce code avait non seulement un contenu différent du précédent et s’intitulait “Nouveau code de procédure civile”. Le nouveau code de procédure civile succédait au code de procédure civile, en effet ce nouveau code de procédure civile n’était pas venu remplacer complètement le code de procédure civile de 1806, seule une partie de ce dernier était abrogée et remplacée mais notre partie restait toujours en vigueur. De sorte qu’en 1976, il fallait se reporter, selon la question, soit au code de procédure civile soit au nouveau code de procédure civile. Les deux appellations différentes ont permis d’éviter la confusion, ce n’est qu’en 2007, par le biais d’une loi de simplification du droit, que l’on a abrogé le code de 1806 et qui n’est resté que le nouveau code de procédure civile renommé code de procédure civile comportant l’ensemble des règles de procédure. Aujourd’hui ce code de procédure civile est divisé en 6 livres : Livre Ier : Dispositions communes à toutes les juridictions (Articles 1 à 749) Livre II : Dispositions particulières à chaque juridiction (Articles 750 à 1037-1) Livre III : Dispositions particulières à certaines matières (Articles 1038 à 1441-4) → plan de ce livre quasi identique au code civil lui même Livre IV : L'arbitrage (Articles 1442 à 1527) Livre V : La résolution amiable des différends (Articles 1528 à 1571) → règles conciliation, médiation… Livre VI : Dispositions relatives à l'outre-mer (Articles 1575 à 1582) Ce code, du point de vue de la forme est plutôt bien organisé puisqu’il va du général au particulier. C’est un code bien écrit pour plusieurs raisons : les articles sont généralement assez courts, assez généraux et ils comportent souvent des définitions de notions avant de les utiliser dans la suite des articles. Introduction 5 Articles 53 et suivants définissent des notions essentielles à la procédure civile telles que la demande initiale (“celle par laquelle un plaideur prend l'initiative d'un procès en soumettant au juge ses prétentions”), l’assignation (“acte d'huissier de justice par lequel le demandeur cite son adversaire à comparaître devant le juge”), la demande incidente… Article 30 qui défini l’action en justice → “L'action est le droit, pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée” Si l’on va chercher d’autres articles plus récemment introduits dans le code de procédure civile, la matière est plus détaillé et technique (on peut le remarquer avec par exemple l’article 750-1). Néanmoins, ce code de procédure civile ne sera pas suffisant pour comprendre les règles de procédure civile, nous serons amené a utiliser deux autres codes en complément. En effet, les règles relatives à la compétence des juridictions sont dans le code de l’organisation judiciaire (plus récent donc la numération est différente, il date de 2006 et est codifié par la codification “L111-1 et suivants ou R111-1 et suivants” qui se réfère au plan du code). Mais il y a aussi le code des procédures civiles d’exécution qui vient définir les règles d’exécution des décisions de justices, qui sont les règles qui permettent à une personne de faire exécuter une décision si la personne ne respecte pas ses obligations. 2. Les sources non écrites On pourrait trouver ici toutes les sources non écrites du droit mais essentiellement ce que l’on peut observer c’est qu’il y a un rôle assez important de la jurisprudence et de la pratique. a. La jurisprudence La procédure civile présente la particularité d’être analysée, contrôlée aussi bien par les juridictions de l’ordre judiciaire que les juridictions de l’ordre administratif et à certains égards, la jurisprudence constitutionnelle est assez importante. La jurisprudence judiciaire On entend ici surtout celle de la Cour de cassation, il n’y a aucune des chambres de la Cour de cassation, pas même l’une des 3 chambres civiles qui n’est spécialisé en procédure civile, hormis la chambre criminelle, les 5 chambres autres chambres de la Cour de cassation sont compétente pour appliquer et contrôler la mise en oeuvre des règles de procédures civiles par les juges du fond. Devant ces chambres se posent un problème de droit de fond, la matière est dévolue à une chambre en matière du droit de fond en jeu. Si à l’occasion d’un contentieux devant une juridiction du 1er ou de 2nd degré, si il y a un problème de procédure, il va alors accompagner le problème de fond devant la chambre de la Cour de cassation. Le contrôle de la mise en oeuvre d’une règle de procédure civile peut être fait par deux chambres différentes et donc l’appréciation de la Cour de la cassation peut différer aussi, il peut y avoir des divergences entre les chambres civiles, sociale et commerciale. Cela se traduit par de nombreux arrêts en procédure civile qui émanent d’une chambre mixte ou par l’Assemblée plénière de la Cour de cassation. La jurisprudence administrative Elle a aussi sa place en matière de procédure civile, on peut être amené à s’intéresser a la jurisprudence du Conseil d’État en raison de l’origine règlementaire de la procédure civile. Si l’on veut contester quelque chose vis-à-vis d’un article, c’est devant le Conseil d’État qu’on le fait. L’article 12 du code de procédure civile comportait à l’origine plusieurs alinéas → décision du Conseil d’État du 12 octobre 1979 a annulé l’alinéa 3 Plus récemment, l’article 750-1 du code de procédure civile, qui définit les conditions de recevabilité d’une demande de juge devant le tribunal judiciaire, a été réformé pour prévoir que dans certaines matières, avant de saisir le juge, les parties devaient rechercher une solution amiable à leur différend. Cependant, le texte comportait des exceptions notamment la dispense des parties de cherche cette solution amiable surtout si elles étaient confrontés à un motif légitime tel que l’absence de conciliateur → le Conseil d’État l’a annulé en raison de son imprécision, les droits d’accès aux juges s’en retrouvaient compromis en fonction de l’interprétation donnée (arrêt du 22 septembre 2022 au motif que l’indisponibilité des conciliateurs n’étaient pas suffisamment précisé dans ses modalités et délais). Réécriture de l’article par un décret du 11 mai 2023 qui a précisé que l’indisponibilité des conciliateurs avait pour conséquence de rendre impossible la tenue d’une première réunion de conciliation dans un délai de 3 mois a compter de la saisie du conciliateur (entré en vigueur le 1er octobre 2023). La jurisprudence constitutionnelle Cette jurisprudence est plus rare puisque la matière est d’origine règlementaire et non législative. Cela ne veut pas dire pour autant qu’elle n’existe pas, cette jurisprudence peut avoir une incidence sur la procédure civile dans la mesure ou le Conseil constitutionnel va veiller au respect des droits et libertés fondamentaux. En effet, l’accès aux juridictions, le droit de se défendre doivent être garantis par la loi. Introduction 6 Le Conseil constitutionnel va être amené a prendre des décisions qui vont avoir un impact sur la procédure civile même parfois au regard des libertés fondamentales telle que la liberté personnelle. En ce qui concerne l’action de substitution syndicale qui est la possibilité donnée a un syndicat professionnel d’agir en justice pour défendre les interêts d’un salarié, le Conseil constitutionnel dans une décision du 25 juillet 1989, a considéré que cette action était possible mais à la condition qu’elle ne vienne pas contrecarrer la liberté personnelle du salarié. Autrement dit le Conseil constitutionnel a exigé que l’action de substitution syndicale soit mis en oeuvre de telle manière que le salarié lui-même soit informé de cette action et qu’il puisse s’y opposer et au titre de sa liberté personnelle doit engranger la liberté d’agir ou de ne pas agir soi- même en justice. Alors même que dans les textes a valeur constitutionnelle, il n’y a pas véritablement de règle de procédure civile, par l’intermédiaire de règles plus générales, le Conseil constitutionnel peut être amené a examiner la conformité de textes qui ont un impact sur la procédure civile. La jurisprudence constitutionnelle a un impact sur la procédure civile mais celui-ci est indirect car les textes à valeur constitutionnels ne comportent pas eux-mêmes des règles de procédure civile. Le contrôle peut être opéré au regard de droits et libertés fondamentaux qui ont des incidences sur la procédure. La doctrine a pu parler de constitutionnalisation de la procédure civile pour définir ce phénomène qui consiste à dire que la jurisprudence du Conseil constitutionnel peut avoir des répercussions sur la procédure civile. D’une manière générale, ce phénomène est du à l’essor dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel de la notion de “procès équitable” et donc a l’essor des droits fondamentaux, pourtant dans le bloc de constitutionnalité, le droit a un procès équitable n’est pas inscrit. Depuis de nombreuses années, le Conseil constitutionnel est venu dégager cette notion de l’article 16 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Article 16 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen “Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution” Le Conseil constitutionnel en a déduit de cet article qu’il ne doit pas être porté atteinte au droit à un procès équitable. Il y a bien un essor des droits fondamentaux, on le voit aussi avec la CourEDH, et les droits de chacun ne sont pas uniquement des droits de fond mais également des droits liés à la procédure. b. La pratique La pratique en tant que telle n’est pas une source du droit, la pratique s’apparente un peu à la coutume mais le terme est plus précis, plus circonstancié. La coutume suppose une habitude de faire sur une période suffisamment longue dans un secteur géographique donné (corridas…), la pratique, elle, c’est la coutume des praticiens du droit, il s’agit des habitudes qu’ont les magistrats pour rendre la justice. Ces pratiques ont un impact assez important en procédure civile pour deux raisons, la première tient à la relative généralité de la norme qui ne peut pas tout prévoir dans ses détails les plus concrets de mise en oeuvre. Un article du code de procédure civile peut prévoir que dans un cas de figure, un juge se dessaisisse du dossier au profit d’un autre juge, le texte du code peut prévoir des délais pour ce faire, les différents modes de transmission… les textes ne vont pas dire comment on fait, c’est la pratique dans un tribunal qui va définir la manière de faire. Ainsi, la pratique possède une grande place puisqu’elle vient préciser des détails. De plus, la pratique va venir influencer la norme future, très souvent, une pratique qui vient se mettre en place vient pallier à la carence d’un texte. Très souvent, un décret va ensuite être adopté pour entériner cette pratique qui deviendra alors la norme pour l’avenir. Lorsqu’un juge est confronté à un problème de droit, il sait le gérer de manière générale, mais parfois il va être confronté à une difficulté technique, morale ou éthique. Lorsqu’il est confronté a une difficulté technique, il la résout en faisant appel a un expert (le code de procédure civile comporte des dispositions pour savoir a quel moment le juge peut faire appel a un expert) mais lorsqu’il est confronté à un problème éthique, moral, ce n’est pas un expert qui vient le régler mais pourtant leur avis peut être interessant pour permettre au juge de prendre position, la pratique est de faire appel a un “ami de la cour” (amicus curiae) qui vient faire état de la pensée à un moment donné. Mais la règle n’est pas inscrite. Introduction 7 Plus récemment, cette pratique a été partiellement consacré puisque existe désormais dans le code de l’organisation judiciaire un article L431-3-1 qui permet à la Cour de cassation de faire appel a un ami de la cour. Désormais donc, sur le fondement de ce texte, cette possibilité a été consacré pour la Cour de cassation uniquement. On peut parfaitement imaginer que les juridictions du fond puissent faire appel a un ami de la cour mais il s’agirait ici encore de pratique. La Cour de cassation a aujourd’hui envie d’ouvrir le débat vers la société civile lorsque se pose des débats qui la concernent. Dans le “rapport cassation 2030”, la Cour a la volonté de développer cette justice plus ouverte en créant ce qu’elle appelle une “procédure interactive ouverte” pour des affaires phares. L’idée serait que pour le jugement de ces affaires, avant l’audience classique, se tienne une séance préparatoire publique marquée par l’oralité au cours de laquelle les magistrats entendraient les parties et leurs avocats mais aussi des personnalités extérieures, des experts, des amis de la cour pour disposer d’un éclairage plus large sur la problématique posée. Cela permettrait aux juges de rendre de manière plus éclairée leurs décisions mais aussi d’ouvrir la justice au public dans un but pédagogique puisque cela donnerait plus de visibilité et donc plus de légitimité à la justice. Parmis les pratiques plus récentes on trouve aussi les conventions d’écriture, dans certains barreaux ont été mis en place ces conventions c’est à dire la mise en place entre le tribunal et le barreau d’une convention en vertu de laquelle les avocats s’obligent a rédiger d’une certaine manière leurs conclusions au delà du formalisme imposé. On peut y retrouver une exigence de mots-clés particuliers, une limitation de caractère ou bien encore à prévoir que le document sera écrit dans tel police ou telle taille ce qui permet au magistrat de gagner du temps. Ces conventions d’écriture sont né de la pratique, pour l’instant elles n’ont pas été intégré dans la norme mais certains éléments l’ont déjà été. Ces pratiques font gagner du temps mais il y a une difficulté, c’est que ces conventions d’écriture sont propres à un barreau, devant les juridictions bordelaises, peuvent intervenir des avocats du barreau de Bordeaux mais également des avocats d’autres barreaux qui n’ont pas forcement de conventions d’écriture et qui en ont d’autre donc on peut s’interroger sur l’attitude du tribunal si les conclusions n’ont pas la forme imposée par la convention d’écriture de la juridiction bordelaise. La doctrine a pu relever que certaines conventions d’écritures commençaient a imposer des sanctions tel que le refus de réceptionner l’acte. On pourrait dès lors renforcer les communications à l’égard de ces conventions d’écriture, on pourrait aussi prévoir une harmonisation et il est possible que cela soit cette direction qui va être prise en raison de la dématérialisation de la procédure. B. Les sources internationales Le procès civil se tient devant des juridictions nationales et donc obéit majoritairement à des règles nationales. Toutefois, au niveau international, il y a deux types de normes : les normes internationales qui viennent définir les droits fondamentaux du procès des règles de procédure civile qui ont un champ d’application bien particulier concernant les litiges transfrontaliers (entre deux États, qui impliquent des citoyens de deux États) En revanche, il y a devant les juridictions françaises, un impact des sources internationales s’agissant des droits fondamentaux. An niveau international, plusieurs textes fondamentaux viennent poser des règles relatives à un procès équitable, c’est le cas de la déclaration universelle des droit de l’homme de 1948. Il y a un autre texte que l’on trouve souvent qui est le Pacte international des droits civils et politiques adopté dans le cadre des nations unis le 19 décembre 1966 qui contient des dispositions qui vient intéresser la procédure civile. On trouve également la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (ConvEDH) adopté le 4 novembre 1950 et entrée en vigueur le 3 septembre 1953 dans le cadre du Conseil de l’Europe, ratifiée par la France en mai 1974 par Alain Poher. Dans cette convention on trouve un article essentiel qui est l’article 6 qui vient englober toute les règles issus du procès équitable sous la phrase “Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi (…)”. Dans cette phrase se trouve résumé toutes les idées fondamentales qui guident la procédure civile : le fait que la justice est étatique, le droit à un juge de qualité qui est indépendant et impartial et le droit à une justice de qualité, une justice qui est rendue de manière équitable, en considération des différents arguments. Le droit a un procès équitable a été utilisée par la première fois dans l’arrêt de la CourEDH Golder c/ Royaume-Uni du 21 février 1975. On voit la CourEDH utiliser cette notion comme une notion englobante de tout un tas de droit important. Il faut que chacun puisse accéder à un juge, que celui-ci présente des garanties institutionnelles (indépendance et impartialité). On inclut dans le procès équitable le principe de publicité, celui de la collégialité, celui de l’oralité mais aussi le principe de légalité des armes dégagé par la CourEDH sur le fondement de l’article 6 qui signifie que les parties doivent avoir des droits similaires, mis sur des paliers similaires. La CourEDH est allé plus loin encore dans un arrêt Hornsby c/ Grèce du 19 mars 1997 par lequel elle est venue dire que le justiciable devait également avoir le droit à l’exécution effective de la décision obtenue. On retrouve cette idée que par l’intermédiaire de l’article 6, les droits Introduction 8 subjectifs doivent être concrets et effectifs, à charge pour les États de décliner dans leur norme des règles très concrètes qui permettent que cela soit respecté. Ce qui fait la force de la ConvEDH c’est qu’elle est invocable de deux manières différentes : d’une part, cette convention est invocable devant les juridictions française, on peut saisir un juge français au motif qu’il y a une violation de l’article 6. En effet, le juge français a compétence pour opérer un contrôle de conventionnalité de la norme française, s’il constate que le texte de droit interne n’est pas conforme, il refusera de l’appliquer. Le droit européen a autorité en droit interne (article 55 de la Constitution) d’autre part, la ConvEDH comporte dans ses dispositions la création de la CourEDH qui peut être saisi par un justiciable français après épuisement des voies de recours internes en invoquant une violation de l’article 6. Cela peut conduire a une condamnation de l’État français qui aura une répercussion au niveau national puisque l’État français pourra réformer son droit, cela peut aussi conduire à une réouverture d’une instance devant les juridictions françaises à la suite d’une condamnation de la France La loi J21 qui est la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XIX° qui est venue créer dans le code de l’organisation judiciaire et dans le code de procédure civile des articles qui prévoient cette procédure de réexamen. Dans le code de procédure civile il s’agit des articles 1031-8 et suivants. L’impact sur la procédure civile est indéniable mais passe uniquement par le prisme des droits fondamentaux. 19/09/2024 III. Les évolutions contemporaines de la procédure civile Au gré des réformes et des difficultés économiques, sociétaires, l’image de la justice s’est peu à peu ternie et la doctrine parle alors de crise de la justice civile qui a donné lieu à des réformes qui sont encore en cours. A. La crise de la justice civile Elle a été annoncé très tôt, début des années 90 notamment par François Terré, dans un article qui a parlé de la crise des 3C pour renvoyer à trois degré de crises (repris dans la doctrine notamment par Prof Cadillac). Une crise de croissance qui traduit l’idée que tout au long du XX° et sans doute encore plus au XIX°, on assiste a une explosion de la demande en justice. De plus en plus de justiciable n’hésitent pas a présenter des demandes au juges. Plusieurs facteurs (la doctrine en identifie 4) : une augmentation du nombre de justiciables une inflation normative une idéologie de la réparation (femme qui avis mis son chihuahua dans le micro-onde pour le faire sécher et chien mort donc demande elle réparation) l’érosion des solidarités (familiale, professionnelle, institutionnelles…) Face a cette explosion de contentieux, les effectifs et moyens de la justice n’ont pas augmenté de manière proportionnelle. Au milieu XIX° → 6 000 magistrats pour 37 millions d’habitants Aujourd’hui → 9 000 magistrats pour 70 millions d’habitants Au niveau européen, il y a des rapports notamment rapport de la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ) et en 2020 elle note qu’en France on compte 10,9 juges pour 100 000 habitants alors que la moyenne européenne est de 21 juges pour 100 000 habitants. On remarque alors un allongement des délais de procédures avec des contentieux pour lesquels ils faut attendre des mois jusque 18 mois et ces délais sont d’ailleurs aussi long en appel qu’en 1ère instance. Une crise de confiance, c’est l’idée que les français n’ont pas confiance en la justice de la France. Elle est vieille, coûteuse, pas forcement accessible, certains même se demandent si les magistrats sont vraiment indépendants. Une crise de conscience qui renvoi au regard que les magistrats et autres professionnels un regard sur leur propre justice, il y a depuis quelques années une dégradation sociale du statut de magistrat. Il y a une perte de prestige du métier car ils se trouvent confrontés à des tâches de plus en plus ingrates, à régler des problèmes du quotidien où leur présence n’est pas forcement utile. Il y a alors un profond sentiment d’insatisfaction. Cela se traduit par la tribune des 3000 magistrats à la suite du décès d’une jeune magistrate, cette pétition a permet de crier le mal-être et le malaise de leur profession. Cela a eu pour conséquence une réaction du Gouvernement avec les États généraux de la justice et la remise d’un rapport le 8 juillet 2022 “Rendre justice aux citoyens”. Cette prise de conscience a conduit à des réformes. Introduction 9 B. Les réformes en cours Sans attendre le rapport de 2022, le législateur avait conscience de ces difficultés et depuis les années 90 se succèdent des réformes qui ont pour objectif d’apporter des solutions et trouver des remède. Cadiet en 2019 donne 3 axes de réformes : une défragmentation de l’organisation judiciaire Il faut simplifier la tâche du justiciable en ne multipliant pas les juridictions mais avec un point d’entre devant les tribunaux judiciaires. Traduit par la suppression juridiction de proximité, la loi du 23 mars 2019 qui a permis la fusion TI et TGI en TJ. Par cette défragmentation on entendait simplifier la tâche du justiciable mais aussi réduire les coûts afin d’avoir plus de moyens une dématérialisation Passage du papier au virtuel, utilisation des nouvelles technologies dans le secteur de la justice. Elle est toujours en cours mais a bien avancée puisqu’elle a été amorcée avec un décret de 2005. Aujourd’hui, un certain nombre d’actes de la procédure peuvent être effectué directement en ligne, et aujourd’hui les échanges entre avocats et juridictions de font virtuellement (RVPA → réseau virtuel privé avocats / RVPJ → réseau virtuel privé justice) une déjudiciarisation C’est la multiplication des voie de délestages, on va insister a utiliser d’autres modes afin de régler les litiges. Depuis la loi du 23 mars 2019, il y a une volonté de recentrer le juge sur sa fonction première qui est de dire le droit, donc de trancher litige par application de la règle de droit seulement là où c’est nécessaire. Désormais, le juge, peut enjoindre une partie de rencontrer un médiateur pour trouver à l’amiable une solution au litige sans que lui ait a trancher. On constate aussi que par décret, le pouvoir normatif a parfois rendu obligatoire la recherche amiable de solution avant de saisir le juge. C’est le cas pour les demandes pour les litiges inférieures à 5000 euros, ainsi que les conflits de voisinages depuis 1er janvier 2020. En effet l’article 750-1 du code de procédure civile oblige les parties à rechercher à l’amiable une solution et la demande adressé au juge n’est recevable qu’à partir du moment où il y a un constat d’échec de la voie amiable. Cette recherche amiable est aujourd’hui présenté comme une voie importante et depuis 2023 on voit une réelle politique de l’amiable sur initiative du Garde des Sceaux Dupond-Moretti. Depuis une dizaine d’années, la justice civile du fait de cette volonté connait pas mal de réforme alors que durant des décennies, elle avait été stable. Introduction 10 Partie I - Titre I - Chapitre I - La nature de l’action en justice Partie I - Le droit d’agir en justice Il y a un rôle important joué par les parties, elles saisissent le juge, définissent l’objet du litige et le juge est surtout la comme arbitre pour dire le droit. C’est une procédure accusatoire puisque les parties amène les choses dans le débat et ensuite le juge vient tranche. C’est n’est pas comme la procédure pénale qui est mixte (accusatoire + inquisitoire). Le juge civil est en position de repli mais il peut quand même faire des choses, il travaille surtout a partir de ce que les parties ont amenés. En procédure civile, il existe un juge de mise en état qui a un rôle de préparation, son travail consiste a vérifier que les parties ont bien apportés les éléments, à temps, qu’il n’en manque pas, il organise les choses mais à charge pour les parties d’apporter les éléments du litige au juge. L’action en justice est la notion centrale de la procédure civile, elle est a ce point importante au point que le Titre II du CPC intitulé “l’action” lui est consacré, il compte 4 articles essentiels : 30,31,32 et 32-1. Article 30 du code de procédure civile “L'action est le droit, pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée. Pour l'adversaire, l'action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention.” C’est un article qui est le fruit de très nombreuses réflexions doctrinales qui a eu un rôle très important car il donne définition de l’action en justice qui fait de l’action un droit subjectif. Toute personne peut agir en justice, c’est un droit subjectif processuel, qui concerne la justice, un droit qui vient s’ajouter a des droits subjectifs de fond comme le droit au respect de la vie privée, le droit de propriété… Cette conception de l’action en justice, nous la devons à Motulsky. Article 31 du code de procédure civile “L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.” Cet article vient définir les conditions d’existence du droit d’action. Article 32 du code de procédure civile “Est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.” Cet article vient définir la sanction qui s’appliquera à une personne qui agira en justice alors quelle n’a pas le droit d’agir, c’est une sanction procédurale, l’irrecevabilité. Article 32-1 du code de procédure civile “Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.” Cet article vient sanctionner par le biais d’une amende civile et d’une obligation à réparation celui qui agit en justice de manière abusive ou dans le but de nuire (de manière dilatoire). À partir de ces articles, ce que le code énonce est d’une part ce que l’on appelle la théorie de l’action (Titre I) et le régime de l’action (Titre II). Partie I Titre I Chapitre I La nature de lʼaction en justice 1 Titre I - La théorie de l’action Chapitre I - La nature de l’action en justice I. La définition de l’action L’article 30 du code de procédure civile définit l’action comme un droit, c’était la première fois que dans un texte on définissait avec autant de fermeté l’action comme un droit processuel. Cette définition est résultat d’une réflexion doctrinale et donc d’un choix qui emporte de multiples conséquences. 1. Le choix de la qualification En 1975, Motulsky explique son point de vue qui est de faire de l’action un droit subjectif, cette position est nouvelle, elle prend place au sein d’un important débat doctrinal car auparavant la doctrine s’était divisé sur la nature de l’action en justice. Pour certains auteurs, l’action en justice n’était pas un droit a part entière mais un droit subjectif de fond à l’état de guerre, théorie de Demolombe. Pour ce dernier, l’action en justice n’était pas dissociable du droit de fond dont elle vient assurer la défense. Justiciable a un droit de propriété sur une chose, ce droit de propriété est subjectif, pour Demolombe ce droit de propriété avait deux facettes : celui à l’état de paix (celui que l’on a, qui nous permet d’exercer ce droit) et celui à l’état de guerre qui permettait à la défendre d’agir en justice pour défendre ce droit Pour d’autres auteurs, notamment Vizioz, l’action n’était pas non plus un droit mais une liberté, la liberté de saisir un juge pour lui soumettre une prétention. Cette définition est intéressante et sur certains égards exacte mais présente une difficulté puisqu’elle définit l’action comme l’accès au juge or l’action n’est pas seulement l’accès au juge. C’est le droit de soumette au juge une prétention et d’obtenir de celui-ci qu’il se prononce dessus. C’est à partir de cette analyse que Motulsky a conçu sa définition. Dans sa définition, l’action en justice s’apparente davantage à une théorie des pouvoirs avec 3 pouvoirs qui sont mis en oeuvres : le pouvoir de saisir le tribunal, le pouvoir de soumettre au juge une prétention et le pouvoir d’exiger du juge qu’il statut sur cette prétention. Ces 3 pouvoirs ont conduit a identifier et à qualifier l’action en justice de droit subjectif au bénéfice des parties qui en sont créancières, le débiteur étant le juge mais il s’agit aussi un droit processuel, c’est un droit de s’adresser au juge et un droit subjectif distinct des droits de fond a tel point que l’on pourrait classer les droits subjectifs en deux catégories : ceux de fond et ceux de forme (droit d’agir en justice et d’autres créés par la Cour de cassation comme le droit à la preuve). 2. Les conséquences de la qualification Elles sont doubles, le fait de définir l’action comme un droit permet d’identifier un titulaire de ce droit et la titularité du droit emporte des conséquences sur la transmission du droit et la capacité à renoncer au droit. A. La titularité du droit L’article 30 du code de procédure civile est particulier car il désigne deux titulaires du droit d’agir en justice, l’alinéa 1er désigne comme titulaire du droit d’agir “celui qui soumet au juge une prétention” mais l’alinéa 2 énonce que “l’adversaire” est aussi titulaire du droit d’agir puisque c’est pour lui “le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention”. C’est alors le droit du demandeur mais aussi le droit du défendeur. Cette définition est assez contestable est a d’ailleurs été contesté puisque les deux alinéas de l’article 30 semblent renvoyer a deux choses différentes et il y a une confusion. Si l’on défini l’action comme le droit de soumettre au juge une prétention, l’alinéa 2 n’est pas utile puisqu’il ne reprend pas cette idée de soumettre au juge une prétention, il donne une définition différente. Certaines auteurs considèrent alors que l’alinéa 2 n’a pas vraiment de raison d’être, l’alinéa 1er suffit pour englober tant les droits du demandeur que ceux du défendeur car cet alinéa 1er est très bien rédigé. L’alinéa 1er parle d’auteur alors cela permet d’envelopper aussi bien le demandeur que le défendeur. L’alinéa 2 serait alors superflu puisqu’il n’apporte rien de plus dans la définition du droit d’agir, de plus, il sème le doute car il confond le droit d’agir en justice et le droit de se défendre. B. La transmissibilité du droit Comme le droit d’agir est défini comme un droit subjectif, le titulaire du droit d’agir a des droits sur ce droit, d’une part il a le droit d’y renoncer et d’autre part, de le transmettre. 1. La renonciation à l’action Partie I Titre I Chapitre I La nature de lʼaction en justice 2 Elle peut être temporaire ou définitive. a. La renonciation temporaire Une personne titulaire du droit d’agir peut renoncer momentanément a ce droit, donc a la possibilité de saisir un juge si ses droits subjectifs sont menacés, cette possibilité existe notamment dans le champ contractuel, toute les fois ou les cocontractants insèrent dans leur contrat une clause aux termes de laquelle ils s’engagent en cas de litige a essayer de trouver une solution amiable avant de porter leur litige devant un juge → clauses de conciliation ou de médiation préalable obligatoire. Elles s’imposent ainsi d’un commun accord de s’adresser d’abord a un médiateur/conciliateur, elles renoncent a saisir immédiatement le juge. La jurisprudence s’est longtemps interrogé sur les conséquences et les effets a faire produire a ces clauses et dans plusieurs affaires la justice a été saisi par l’un des cocontractants qui s’était adressé direct au juge sans respecter la clause de conciliation ou de médiation préalable. La Cour de cassation a considéré que la clause contractuelle était parfaitement valable et que la saisine du juge n’était pas possible, elle a déclaré la demande irrecevable. Cela ne veut pas dire que demandeur n’a pas le droit d’agir mais seulement qu’il ne l’a pas a ce moment la. À coté, le législateur développe la politique de l’amiable, on trouve alors des hyptohèses où le juge ne peut pas être directement saisi puisque les parties doivent tenter la voie amiable, si parties s’adressent juge sans préalable, irrecevable (article 750-1 du code de procédure civile). 26/09/2024 b. La renonciation définitive Elle est possible mais ne peut se faire une fois que le litige est né, on ne peut renoncer par anticipation. On ne pourrait pas prévoir dans un contrat un accord qu’en cas de difficulté on ne saisira pas le juge En revanche, une fois que le conflit est né, il est possible pour l’une des parties ou les deux de renoncer à l’action. Tout d’abord, il est tout a fait possible pour le titulaire du droit d’agir de ne pas saisir les tribunaux, nul n’est forcé à agir en justice. Le titulaire du droit d’agir en justice peut toujours y renoncer une fois que le juge a été saisi mais avant qu’il ne statue sur la prétention. Il est ainsi possible pour la partie d’abandonner ses prétentions contre l’adversaire → désistement d’action. Le juge constatera ce désistement et cette décision fera obstacle à une nouvelle action que la partie voudrait engager devant le même adversaire pour la même prétention. La renonciation peut aussi passer par un autre acte que l’on appelle l’acquiescement → le défendeur renonce à l’action car il reconnait que les prétentions de son adversaire sont fondés, il renonce à discuter le bien fondé des prétentions de la partie adversaire. Le juge statuera uniquement au regard des prétentions du demandeur. Les deux parties ont la possibilité de renoncer d’un commun accord à l’action en concluant une transaction qui vient mettre un terme à leur litige. Article 2052 du code civil “La transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet.” 2. La transmission de l’action en justice C’est l’idée que l’on puisse transmettre son action a quelqu’un d’autre, c’est possible à deux moments différents : au décès de la personne → transmission à cause de mort quand les deux sont vivants → cession entre vifs a. La transmission à cause de mort Le décès d’une personne lui ôte toute possibilité d’exercer une action en justice mais le droit d’agir qui était le sien ne s’éteint pas nécessairement avec elle, tout dépend du type d’action. Si l’action est relative à la personne (divorce, recherche de paternité…) → l’action s’éteint avec la personne et ne peut être transmise En revanche, si l’action n’est pas relative à la personne (notamment patrimoniale) → les héritiers vont recevoir l’action en justice comme s’ils héritaient d’un bien du patrimoine, cela emporte 2 conséquences : si durant sa vie, la personne avait déjà engagé elle même l’action en justice, son décès est une cause d’interruption d’instance mais le cours de celle-ci pourra reprendre à l’initiative des héritiers, ils se contentent de prolonger l’action engagée par le défunt Partie I Titre I Chapitre I La nature de lʼaction en justice 3 il est possible que de son vivant, la personne n’ait pas mis en oeuvre son droit, les héritiers qui trouvent cette action dans le patrimoine du de cujus peuvent faire naître, à leur demande, une instance. Néanmoins, cela n’empêche pas les héritiers d’exercer leur propre action en parallèle. b. La cession entre vifs L’action fait partie du patrimoine d’une personne de telle sorte qu’elle peut se transmettre et notamment avec un bien qui l’accompagne. Je fais construire une maison, j’ai une garantie décennale qui existe à l’encontre du constructeur, si je vends la maison avant les 10 ans, le droit d’agir contre le constructeur se transmet en même temps L’action en justice peut être transmise de manière accessoire lors de la transmission d’un droit substantiel. II. Les caractères généraux de l’action L’action en justice présente deux caractères, elle est facultative et son exercice est libre 1. Le caractère facultatif Le caractère facultatif signifie que le titulaire du droit a la faculté de l’exercer ou non, c’est lui qui choisi par sa seule volonté. Il en résulte que le législateur ne peut pas forcer une personne a agir ou non, il ne peut pas mettre en place des règles qui pourrait constituer des entraves trop importantes à la faculté d’agir. Le législateur peut poser des conditions mais pas trop strictes au point de priver la personne de la possibilité d’exercer son action. La question s’est posée au regard des normes qui ont rendues obligatoire la recherche d’une solution amiable avant d’accéder au juge, ici, le législateur n’a t-il pas entravé la liberté d’agir ? La CourEDH a eu l’occasion de se prononcer sur cette question en opérant un contrôle de proportionnalité entre le droit d’accès à un juge (article 6 de la ConvEDH) et les restrictions imposés par un droit au nom de la bonne administration de la justice. Dans un arrêt rendu le 26 mars 2015, la CourEDH a considéré qu’il n’y avait pas d’atteinte disproportionné au droit d’accès au juge car d’une part le législateur peut poser des conditions nécessaire à la bonne administration de la justice et d’autre part, il faut s’assurer qu’il y ait des garanties qui préservent la faculté d’agir de la personne. La Cour vérifie que la personne conserve bien le droit d’agir et qu’elle pourra encore l’exercer en temps utile. Au regard des droits et libertés fondamentaux, il y a un contrôle sur les contraintes que le législateur pourrait créer, il y a des questions qui ont été posé devant le Conseil constitutionnel notamment par rapport à l’article 750-1 du code de procédure civile face à l’article 16 de la DDHC dans une décision du 21 mars 2016. 2. Le caractère libre Le caractère libre de l’action emporte comme conséquence que le justiciable ne doit pas supporter les frais liés à l’action, ce n’est pas au justiciable de payer le juge, il est payé par l’État. Cela ne veut toutefois pas dire qu’aucun frais ne sera supporté par le justiciable, il peut y avoir des coûts liés à la justice, il peut y avoir une condamnation au dépend, des dommages-intérêts… Il incombe alors à l’État de mettre en place un mécanisme correcteur pour les justiciables qui ne seraient pas en capacité d’assumer ces frais, c’est le système de l’aide juridictionnelle. Ce n’est pas parce que l’action en justice est gratuite qu’il faut abuser du droit d’agir en justice, en principe, comme l’action est libre, on ne peut pas reprocher à une personne d’avoir agit en justice. On ne peut pas lui reprocher d’avoir agit au seul motif qu’elle a perdu, le simple fait d’agir en justice n’est pas source de responsabilité. Mais, cette liberté comporte une limite qui est l’abus de droit, l’action dans un but dilatoire ou abusive peuvent être sanctionnée, le code de procédure civile à l’article 32-1 prévoit que le juge peut condamner la personne qui a agit de manière abusive ou dilatoire à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros. Il pourra aussi condamner la personne a verser des dommages-intérêts à la partie adverse qui aurait subi un préjudice du fait de l’action abusive. La jurisprudence est assez peu abondante sur le sujet et le texte ne définit pas ce que l’on doit entendre par abus du droit d’agir. Elle considère qu’il faut une faute, une erreur grossière, une intention de nuire… Partie I Titre I Chapitre I La nature de lʼaction en justice 4 Partie I - Titre I - Chapitre II - La classification des actions en justice D’un point de vu pédagogique, on a l’habitude d’opérer les classifications des actions en justice de 2 manières : en fonction de la nature du droit protégé en fonction de l’objet I. Le critère de la nature du droit protégé Ce classement conduit a distinguer les actions réelles des actions personnelles. Alors qu’il n’existe que les droits réels et les droits personnels, il existe 3 types d’actions : les actions réelles les actions personnelles les actions mixtes 1. Les actions réelles Ce sont des actions que l’on peut définir comme ayant pour objectif soit la reconnaissance d’un droit réel soit la protection d’un droit réel, c’est a dire la reconnaissance/protection d’un droit qu’une personne exerce sur une chose. On y range alors les actions en lien avec le droit de propriété et le démembrement de propriété. Au sein de ces actions, on a pour habitude de distinguer : les actions pétitoires les actions possessoires A. Les actions pétitoires Elles visent à établir ou a nier l’existence d’un droit réel sur une chose. Parmis elles ont va retrouver l’action en revendication de propriété (action par laquelle une personne va faire établir son droit de propriété sur une chose), l’action en bornage (permet au propriétaire d’un bien de faire établir une ligne de partage entre son fonds et ceux contiguës)… S’agissant des démembrements de propriété et notamment des servitudes, on parle d’action confessoire si elles visent a reconnaitre l’existence d’une servitude et d’action négatoire si but de faire contester une action en servitude B. Les actions possessoires Elles n’ont pas pour but de protéger la propriété mais la possession qui est une situation de faire où une personne exerce des droits sur une chose sans en être le proprio. Pendant longtemps, le code de procédure civile et code civil contenaient des actions spécifiques pour protéger la possession, il existait donc 3 types d’actions possessoires : la complainte → réagir face à un trouble actuel de la possession la dénonciation de nouvelle oeuvre → la personne ne subissait pas encore de trouble mais inévitablement un trouble futur allait se produire, c’est pour se prémunir contre un trouble futur mais certaine l’action en réintégration → la personne pouvait retrouver la possession d’un bien dont elle a été dépossédé alors qu’elle possédait paisiblement ce bien Ce sont trois actions qui fournissaient des dans contextes différents une voie de droit pour protéger celui qui subissait un trouble dans sa possession. Ces actions ont été supprimées par le législateur en 2015 notamment parce qu’il était souvent difficile d’opérer une distinction entre les action pétitoires et possessoires. En outre, la distinction avait perdu de son intérêt puisqu’à partir de 2015, elles étaient confiés à un même juge alors qu’avant les actions pétitoire était jugées par le tribunal de grande instance et les actions possessoires par le tribunal d’instance. À compter d’une loi du 16 février 2015, l’article consacré aux actions possessoire a été abrogé mais il est toujours possible d’obtenir une protection contre les troubles, il faut donc une action en référé (action qui permet d’avoir en urgence et dans un temps bref une décision du juge afin qu’il ordonne des mesures nécessaires à la situation). Partie I Titre I Chapitre II La classification des actions en justice 1 Ces actions pétitoires ou actions en référé sont des actions qui trouvent essentiellement à s’exprimer en matière immobilière mais cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas d’action réelle mobilière. Puisque l’objectif est de garantir le droit d’une personne sur une chose, on peut autant envisager des biens mobiliers qu’immobiliers, simplement, en pratique, on rencontre plus d’action réelle en matière immobilière étant donné qu’en fait de meuble, la possession vaut titre. L’établissement en justice d’un droit sur une chose mobilière ne présente l’intérêt que lorsque les conditions de l’article 2267 du code civil ne sont pas remplies. 2. Les actions personnelles Permettent de reconnaitre ou de protéger un droit personnel. Ce sont toutes ces actions qui vont permettre d’assurer la protection d’un droit de créance (droit qu’une personne a sur une autre), c’est un rapport d’obligation entre un créancier et un débiteur quelqu’en soit le régime. Les droits personnels sont très divers et nombreux et par conséquent, les actions personnelles sont elles aussi très nombreuses. Action en paiement, action en recouvrement d’un prêt d’argent, action résolutoire, action en garantie des vices cachés… 3. Les actions mixtes Ce sont des actions qui n’ont pas leur correspondance en terme de droit, ces actions se caractérisent par un enchevêtrement de droit réel et de droit personnel, il est impossible de les dissocier. L’action permettant de protéger ces droits est l’action mixte. Action en résolution de vente immobilière → effacer le transfert de propriété (revenir sur titularité des droits réels) et restitution des sommes versés (revenir sur des droits personnels nés du fait de la vente) II. Le classement selon l’objet du droit protégé L’objet du droit conduit a distinguer d’une part, les actions mobilières et d’autre part, les actions immobilières. Si on croise les deux classements, 4 catégories : actions réelles immobilières → existent en nombre limitée actions réelles mobilières → peu nombreuses notamment en raison de l’adage “En fait de meubles, la possession vaut titre” actions personnelles mobilières → très nombreuses actions personnelles immobilières → peu nombreuses Ces distinctions présentent un intérêt du point de vue de la compétence et notamment de la compétence territoriale du juge. En matière réelle immobilière, le juge compétent et celui du lieu de situation de l’immeuble alors que pour toutes les autres actions, en principe, le juge compétent est le juge du lieu de domicile du défendeur. Partie I Titre I Chapitre II La classification des actions en justice 2 Partie I - Titre II - Chapitre I - La condition d’existence de l’action Titre II - Le régime de l’action La question est de connaitre les conditions de mise en oeuvre du droit d’agir, elles sont de 2 types, celui qui entend un juge doit répondre à des conditions qui sont : la condition d’existence de l’action la condition d’exercice de l’action Chapitre I - La condition d’existence de l’action I. La présentation des conditions d’existence de l’action C’est l’article 31 du code de procédure civile qui énonce les conditions d’existence de l’action, il indique 2 conditions subjectives (qui tiennent à la personne) : l’intérêt à agir la qualité pour agir Toutefois, il y aussi des conditions objectives, il faut : être dans les délais, que l’action ne soit pas prescrite → prescription que l’action n’ait pas déjà été porté devant le juge (la décision d’un juge fait obstacle a une nouvelle décision identique) → chose jugée Dans le cas des conditions objectives, l’idée est que le demandeur a perdu le droit d’agir, il en a disposé a un moment donné mais n’en dispose plus. 1. L’intérêt à agir Article 31 du code de procédure civile “L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.” Ici, n’est pas donné la définition de ce qu’est l’intérêt, en revanche, le législateur fourni un élément qui vient caractériser l’intérêt, il doit être légitime. L’article énonce clairement que “L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt (…)”, l’intérêt est donc la condition cardinale, tous ceux qui ont intérêts peuvent agir. Pour ces personnes, parce qu’elles ont intérêt, l’action leur est ouverte mais l’intérêt ne suffit pas toujours puisque la loi exige une qualité. A. La définition de l’intérêt à agir La doctrine a cherché a définir l’intérêt et l’a défini comme l’utilité, l’avantage que l’action est susceptible de procurer à un plaideur. On dira d’une personne qu’elle a intérêt à agir si l’action est susceptible d’améliorer sa situation juridique. Foyer et Cornu disaient que pour savoir si une personne a intérêt à agir, il faut imaginer que la personne souffre d’un mal et que l’action est susceptible d’admettre un remède à ce mal. Partie I Titre II Chapitre I La condition dʼexistence de lʼaction 1 Une personne qui est marié a bien intérêt a demander le divorce et qu’en revanche une personne divorcée n’a plus d’intérêt a demander le divorce Une personne a intérêt a demander la nullité du testament si elle est l’héritier du testateur, mais si elle n’a a voir avec ce testament, elle n’a pas intérêt pour agir Ainsi défini, l’intérêt ne pas doit être confondu avec le bien fondé de l’action. L’action sera bien fondé si il y aura quelque chose a obtenir, c’est tout le but de l’action que d’établir si l’avantage doit être accordé ou non et si la prétention et bien ou mal fondé. Celui qui agit n’a pas a rapporter dès le départ, la preuve que son action est bien fondé, celui-ci sera établi durant l’instance. L’intérêt à agir doit être vérifié par le juge au moment de sa saisine, c’est au jour de l’introduction de la demande qu’il convient de vérifier que la personne avait intérêt à agir, peu importe ce qu’il s’est passé avant et dans une certaine mesure, ce qu’il s’est passé après. Deux situations se présentent alors : soit la personne a intérêt → aucun problème soit la personne n’a pas encore l’intérêt ou ne l’a plus → le juge constatera un défaut d’intérêt si défaut d’intérêt puisque la personne ne l’a plus → le juge déclarera l’action irrecevable en raison du défaut d’intérêt si défaut d’intérêt puisque la personne ne l’a pas encore → le juge constatera le défaut d’intérêt mais éventuellement, il permettra à la personne de régulariser la situation B. Les caractères de l’intérêt À la lecture de l’article 31 du code de procédure civile, un seul caractère est évoqué, le caractère légitime. La doctrine et la jurisprudence ont interprétés ce caractère de manière extrêmement large et les a conduit a déduire 3 caractères plus spécifiques, l’intérêt doit être : légitime (au sens strict) né et actuel direct et personnel 1. Un intérêt légitime Sur le fondement de la jurisprudence et après bien des hésitations, on retient qu’un intérêt est légitime si celui-ci n’est ni contraire à l’ordre public ni contraire aux bonnes moeurs. Un intérêt qui ne serait pas légitime serait un intérêt non conforme au droit. Une personne qui aurait en sa possession des kg de stupéfiants ne pourrait agir en justice contre un policier qui aurait éventré les sacs de cocaïne puisqu’il s’agit de marchandises illégales Cette définition stricte de l’intérêt légitime est celle actuellement retenue, pendant longtemps les juges avaient confondus “intérêt légitime” et “intérêt juridiquement protégé”. Arrêt Dangereux, chambre mixte, 27 février 1970 a propos du droit a réparation de la concubine qui se prévalait d’un préjudice résultant du décès de son concubin Avant cet arrêt, les juges disaient de la concubine qu’elle n’avait pas intérêt a agir car celui-ci n’était pas légitime puisque le droit ne reconnaissait pas la qualité de concubine, a compter de l’arrêt Dangereux, la Cour de cassation a considéré que la concubine avait intérêt à agir puisque la situation serait susceptible d’améliorer sa situation 2. Un intérêt né et actuel L’intérêt doit exister au jour de la demande donc un intérêt passé ne peut pas valablement saisir le juge. Si l’on saisit le juge pour obtenir réparation d’un préjudice mais que celui-ci a déjà été réparé, le juge déclarera l’action irrecevable car l’intérêt a existé mais est déjà réglé. De la même manière, on ne peut anticiper sur un intérêt futur puisqu’il est éventuel. Néanmoins, il existe dans notre droit des actions préventives, ce sont des actions qui portent sur un intérêt futur mais qui est certain et non hypothétiques, ces actions sont au nombre limité dans notre droit mais elles existent. On y range les actions conservatoires (qui ont pour but de conserver une chose menacée d’un péril) mais aussi une autre action préventive prévue à l’article 145 du code de procédure civile, elle permet de demander au juge qu’il ordonne des mesures d’instructions in futurum. Partie I Titre II Chapitre I La condition dʼexistence de lʼaction 2 Il s’agit d’adresser une demande au juge pour qu’il ordonne une mesure d’instruction qui permettra au demandeur de décider s’il y a lieu ou non d’engager une autre action en justice, cette action est préventive puisqu’elle a pour but d’obtenir une preuve qui servira dans un procès futur. Cela permet à la personne de pouvoir faire valoir un motif. Entreprise 1 pense que par un moyen qu’elle ne connait pas, Entreprise 2 a dérobé un secret de fabrique de l’Entreprise 1. Entreprise 1 pourrait agir en concurrence déloyale contre Entreprise 2 sauf qu’une action immédiate serait peut être un échec car elle n’a aucun élément de preuve. Sur le fondement de l’action 145 du code de procédure civile, Entreprise 1 peut saisir le juge afin qu’il désigne un commissaire de justice pour aller opérer une vérification des comptes, processus dans Entreprise 2 permettant de constituer une preuve qui servirai a Entreprise 1 de poursuivre l’entreprise 2 pour concurrence déloyale Couple marié aisé et le mari a quelques doutes sur la fidélité de son épouse, il pourrait établir un divorce pour faute établi sur l’adultère et a peu de preuves, il peut saisir le juge pour qu’il ordonne qu’un commissaire de justice de se rendre à telle heure, tel jour, pour savoir ce qu’il s’y passe ce qui permettra ensuite une pré constitution d’une preuve pour avoir des éléments s’il entend agir en divorce contre son épouse. 3. Un intérêt direct et personnel Celui qui agit doit agir dans son propre intérêt, l’action doit lui profiter personnellement. Une personne ne peut donc pas agir dans l’intérêt général, cette dernière est assuré par le Procureur de la République. On ne peut pas non plus, en principe, agir dans l’intérêt d’autrui, une personne physique ou morale n’aurait pas intérêt à agir à la place de quelqu’un d’autre. Pour les personnes morales, la règle est parfois délicate à mettre en oeuvre puisqu’elle convient de distinguer les intérêts de la personne morale et les intérêts personnels des membres de la personne morale. Pourtant, il y a parfois des actions qui sont engagés au bénéfice d’une autre, dans ce cas, il faut être vigilant car celui qui a intérêt c’est la personne physique. Si la personne morale ou physique peut agir à la place de la personne physique, c’est car le cas a été prévu par la loi mais cela reste assez limité. À ce stade, nous glissons de la question de l’intérêt a celle de la qualité pour agir. Il faut en déduire que le plus souvent, lorsqu’une personne agit en justice, le juge va vérifier que celle-ci a bien intérêt et qualité, que cet individu soit une personne morale ou physique. Association qui agit dans l’intérêt d’un de ses membre → action doit améliorer situation du membre et il faut s’assurer que l’association avait bien qualité pour agir à sa place Intérêt vérifié par rapport au membre de l’association / Qualité vérifiée par rapport à l’association 2. La qualité pour agir La qualité n’est pas expressément cité à l’article 31 du code de procédure civile, la doctrine a défini la qualité pour agir comme le titre juridique qui confère à une personne le droit d’agir. On dira donc d’une personne qu’elle a qualité si elle a été habilité à agir en justice, cette habilitation devrait être nécessairement légale mais elle peut avoir une origine conventionnelle ou encore jurisprudentielle. Parfois l’habilitation est attribué de manière générale à toutes les personnes qui ont intérêt à agir si bien dans ce cas de figure, la vérification de l’intérêt à agir suffit car la loi à donné qualité à tous ceux qui ont intérêts, on parle dans ce cas d’action banale, dans d’autres cas, la loi a voulu réserver l’action à certaines personne et elle est venu habiliter certaines personnes à agir en leur donnant un titre pour le faire, on parle alors d’action attitrée. Parfois, la loi a donné qualité pour agir pour des personnes qui n’ont pas d’intérêt personnel à agir, soit pour défendre un intérêt d’autrui ou un intérêt collectif.