Histoire des Idées Politiques - Première Partie du Cours PDF

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Ce document décrit la première partie d'un cours sur l'histoire des idées politiques. Il aborde les fondamentaux de la pensée politique, en commençant par les penseurs grecs et la genèse de concepts comme la démocratie. 

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Histoire des idées politiques Partie 1: LES FONDEMENTS DU POLITIQUES OU LA CITE FONDÉE EN NATURE Le phénomène de l'Etat était un phénomène qui pouvait être connu par certaines sociétés archaïques. En outre ces sociétés archaïques sont tout le contraire de nos sociétés laïques actuelles, car elles...

Histoire des idées politiques Partie 1: LES FONDEMENTS DU POLITIQUES OU LA CITE FONDÉE EN NATURE Le phénomène de l'Etat était un phénomène qui pouvait être connu par certaines sociétés archaïques. En outre ces sociétés archaïques sont tout le contraire de nos sociétés laïques actuelles, car elles ne faisaient pas la différence entre la religion et la politique. De la même manière, il était inconcevable au sein de ces sociétés de déplaire aux Dieux et de déplaire au souverain. Il y a avait donc une fusion du profane et du sacré qui se matérialise à travers la déification des souverains. Section 1: LE CONCEPT DE POLITIQUE: LE/LA POLITIQUE Il y a de la politique indépendamment de l'existence d'un État. A titre exemplaire, le fait de s'organiser autour d'un mythe commun suffit à former la politique. En outre, nous pouvons affirmer qu'il y a de la politique là où il y a regroupement d'Homme sur un territoire. I. LA NAISSANCE DU POLITIQUE En outre, l'histoire des idées retient la société antique comme le phénomène de la politique, notamment avec les nouveautés mises en place à Athènes. Ceci est appelé le Miracle Grec au V av J.C. ### A. ****Le berceau grec : paradigme de la politique**** - ****Recherche du meilleur régime**** : Les Grecs se questionnent constamment sur le régime politique idéal. - ****Figures majeures**** : Hérodote, Thucydide, Protagoras, Calliclès, Thrasymaque, Clisthène, Périclès, Isocrate, Xénophon. La société Grec demeure le paradigme de la politique, puisque les Grecs étaient en constante recherche du meilleur régime. #### a. ****Le problème du régime politique : influences et réformes**** ****Explications mythologiques:**** 1. ****Sparte : Lycurgue et les réformes légendaires**** - ****Mythe de Lycurgue**** : Création d\'une Constitution et d\'un Sénat pour équilibrer le pouvoir entre le roi et le peuple. - ****Réformes sociales et monétaires**** : - Instauration d\'une monnaie métallique. - Sparte reste une société inégalitaire : - Pratique de l\'eugénisme. - Usage généralisé de l\'esclavage. 2. ****Athènes : des réformes aux bases de la démocratie**** - ****Mythe de Solon**** : - Abolition de l\'usure et réduction des impôts. - Abolition de l\'esclavage pour dettes. - Participation citoyenne étendue avec la création de l'Ecclésia et de la Boullè. - ****Clisthène**** (réformateur clé) : - Mise en place de l'isoménie (égalité politique). - Création de l'Ecclésia, de l'Agora, et des circonscriptions (Dèmes). - Considéré comme le père fondateur de la démocratie. - ****Périclès**** : - Réformes sociales : indemnités pour participation politique (misthophorie). - Exclusion des femmes et des esclaves de la citoyenneté. #### b. ****Les Sophistes et le relativisme politique**** - ****Protagoras**** : - Théorie relativiste : « L'Homme est la mesure de toute chose ». - La majorité doit prévaloir sur la minorité. - L\'État est la source de la morale ; les vérités peuvent changer. - ****Calliclès**** : - La loi comme instrument des faibles pour limiter les forts. - Critique de la démocratie comme oppression des plus forts par la multitude. ****Les explications historiques et les fondements de la Cité**** #### a. ****Les explications historiques : Hérodote et Thucydide**** - ****Hérodote**** : - Analyse les avantages et inconvénients de la démocratie. - Bien que soumise aux passions du peuple, la démocratie assure un meilleur contrôle des responsables politiques. - ****Thucydide**** : - Considère Athènes comme un modèle en raison de son régime démocratique. - Le modèle athénien se distingue par la quête du meilleur régime, orientée par les Hommes et non par les Dieux. - Religion = soutien du régime politique, non plus sa source. #### b. ****Les fondements de la Cité : Socrate, Platon, Aristote**** 1. ****Socrate**** : - Deux disciples majeurs : Platon et Xénophon. - Critique la démocratie, qu\'il considère comme un mauvais régime : - Les citoyens manquent de qualifications pour gérer les affaires publiques. - Recherche des notions stables du juste et de l'injuste : - Refus des maximes sophistiques telles que « Faire du bien à ses amis, du mal à ses ennemis » et « La justice est ce qui est avantageux aux plus forts ». - ****Vision de la justice**** : - Justice = sagesse ; Injustice = vice. - La justice correspond à une harmonie entre l'âme (sagesse) et la cité (justice). - La sagesse implique la connaissance de soi (reconnaître ses savoirs et ignorances). 2. ****Platon**** : - Critique la démocratie aux côtés de Socrate. - Cherche à bâtir le meilleur régime basé sur la justice. - ****Œuvres majeures**** : **La République**, **Les Lois** (écrits sous forme de dialogues). - Trois expériences politiques : - Conseiller auprès de Denis II après avoir été réduit en esclavage par Denis I. - ****Projet politique**** : - Déçu par la société contemporaine, imagine une cité idéale sans lieu physique mais fondée sur des principes réels. 3. ****Aristote**** **(non mentionné explicitement dans votre texte, mais souvent inclus dans cette partie pour le contexte)** : - La cité comme entité naturelle visant le bien commun. - Distinction entre différentes formes de régimes (monarchie, aristocratie, démocratie) et leur dégénérescence. 1\. ****Qui est Platon ?**** - Philosophe grec (427-347 av. J.-C.), élève de Socrate et maître d'Aristote. - Considéré comme le ****fondateur de l'idéalisme**** : - Les Idées (ou Formes) ont une existence réelle, indépendante des choses matérielles et de l'esprit humain. - Les Idées sont supérieures à l'Homme. #### 2. ****La politique selon Platon**** - ****Définition**** : « L'art de conduire des bipèdes sans cornes et sans plumes, avec leur consentement » (i.e., les Humains). - ****Légitimité de l'État**** : - L'État est légitime s'il obtient le consentement des citoyens. - La politique vise le ****bonheur de la cité****, qui est supérieur au bonheur individuel. #### 3. ****Le modèle hiérarchisé de la Cité**** - Platon conçoit la Cité selon un ****modèle en trois fonctions**** (inspiré des sociétés indo-européennes) : 1. ****Fonction souveraine**** (gouvernants) : Philosophes-rois. 2. ****Fonction des armes**** (gardiens) : Défense et sécurité. 3. ****Fonction productive**** (artisans et agriculteurs) : Subvenir aux besoins de la cité. - En Inde, ce modèle se retrouve dans le ****système des castes****. #### 4. ****Le philosophe-roi**** - Le meilleur régime politique, selon Platon, est celui où les ****philosophes gouvernent****. - ****Philosophie**** : **Philéô** (aimer) + **Sophía** (sagesse). - Les sages possèdent la connaissance nécessaire pour diriger. - Dans le meilleur des régime, après avoir vu qu'il fallait un philosophe comme gouvernant, Platon explique qu'il faut une mise en commun des biens et des femmes, afin que les citoyens puissent pleinement s'investir dans le bien de la Cité. #### 5. ****Critique des régimes politiques**** - ****Démocratie**** : - Critique : Donne trop d'importance aux opinions individuelles au détriment de la connaissance. - ****Monarchie**** : - Peut être positive (si gouvernée par un sage) ou négative (si dirigée par un tyran). - ****Tyrannie**** : - Uniquement valable si dirigée par un sage (paradoxe : peut-on être sage et tyrannique à la fois ?). - ****Oligarchie**** : Plusieurs formes possibles : - ****Timocratie**** : Gouvernement fondé sur l'honneur. - ****Démo-aristocratie**** : Mélange d'égalité démocratique et de mérite aristocratique. - ****Gérontocratie**** : Gouvernement des anciens, valorisant la sagesse liée à l'âge. #### 6. ****Réformes radicales**** - Propose la ****mise en commun des biens et des femmes**** pour les classes dirigeantes, afin que les citoyens se concentrent sur le bien de la Cité. 1\. ****Qui est Aristote ?**** - Philosophe grec (384-322 av. J.-C.), élève de Platon mais ****opposé à son idéalisme****. - Originaire de Stagire, en Macédoine (donc pas Athénien). - ****Précepteur d'Alexandre le Grand**** : l'initie aux sciences, à la médecine, et à la curiosité intellectuelle. - Fondateur du ****Lycée****, où il enseigne diverses matières (mathématiques, économie, philosophie) en se promenant (péripatéticien). - Partisan d\'une approche plus ****terre-à-terre****, fondée sur l'observation des réalités sociales. #### 2. ****La nature politique de l'Homme**** - ****« L'homme est, par nature, un animal politique »**** : - L\'Homme s'épanouit pleinement uniquement au sein d'une communauté. - La ****Cité**** est la forme la plus accomplie des associations humaines (au-dessus de la famille et du village). - La Cité n'est pas une création artificielle, mais découle de la ****nécessité naturelle**** de vivre ensemble. #### 3. ****Le Logos et la vie en communauté**** - ****Logos**** (raison, parole) : ce qui distingue l'Homme des animaux. - Permet de délibérer sur ce qui est juste et injuste, bon et mauvais. - Base de la vie politique, car il permet de discuter et d\'établir des lois. - La Cité existe pour permettre aux hommes de mener une ****vie bonne****, orientée vers la justice et le bien commun. #### 4. ****La justice comme fondement de la Cité**** - ****Justice**** : Donner à chacun ce qui lui est dû selon son mérite et sa contribution à la communauté. - Assure l'ordre, la stabilité, et la cohésion sociale. - Se développe à travers la vie commune. - La justice est donc à la fois un ****produit**** et un ****principe structurant**** de la Cité. #### 5. ****La hiérarchie naturelle et le rôle des citoyens**** - Certains individus sont naturellement faits pour ****gouverner****, d'autres pour ****obéir**** : - Basé sur la possession du ****Logos**** et de la vertu. - Ceux qui possèdent ces qualités en abondance doivent diriger. - La politique concerne uniquement les ****citoyens libres**** (exclus les femmes, esclaves, et étrangers). - Les citoyens sont ceux qui participent activement à la vie publique. #### 6. ****Les types de régimes politiques**** - Aristote distingue ****six régimes politiques****, répartis en deux séries : ----------------------------------- ------------------------------------------------------ 1\. ****Monarchie**** 4\. ****Tyrannie**** (déviation de la monarchie) 2\. ****Aristocratie**** 5\. ****Oligarchie**** (déviation de l'aristocratie) 3\. ****République**** (politeia) 6\. ****Démocratie**** (déviation de la république) ----------------------------------- ------------------------------------------------------ - ****Formes Pures**** : Visent le bien commun. - ****Formes Dérivées**** : Corrompues, elles servent les intérêts personnels des dirigeants. B. La maturité romaine En outre, 3 formes de régimes ont été significatives dans la Rome antique: la première forme est la monarchie apparue avec le règne de Romulus, la seconde forme de gouvernement a été la République, qui a été caractérisée par des conflits entre les élites et les plébéiens. Tout cela mènera à une dictature, qui par la suite, deviendra l'Empire. ### ** ***A. Une Influence Grecque***** ****PENSEUR DE LA REPUBLIQUE**** #### ****1. Polybe : Le Penseur du Régime Mixte**** - ****Originaire de Grèce****, Polybe est influencé par son héritage grec en observant la société romaine. - Polybe admire Rome pour sa ****stabilité politique**** : il voit dans son système un mélange harmonieux entre monarchie, aristocratie, et démocratie. - Le ****Consul**** représente la monarchie. - Le ****Sénat**** incarne l\'aristocratie. - Les ****Comices**** (assemblées populaires) symbolisent la démocratie. - Cette analyse mène Polybe à théoriser le ****régime mixte****, un modèle combinant les éléments positifs des trois régimes pour éviter leur dégénérescence. - ****Anacyclose**** : Selon lui, les régimes politiques se succèdent de manière cyclique (monarchie → tyrannie → aristocratie → oligarchie → démocratie → anarchie). - Pour briser ce cycle, il prône un système qui intègre des éléments des trois formes stables. - ****Critique implicite**** : Bien que Polybe idéalise Rome, il néglige les inégalités internes, notamment le pouvoir limité des comices par rapport à celui du Consul. #### ****2. Cicéron : Le Philosophe de la République**** - ****Cicéron**** (106-43 av. J.-C.) : Homme d\'État, avocat et philosophe romain, influencé par le droit naturel d'Aristote. - Dans son ouvrage ****« La République »****, Cicéron cherche à définir le ****meilleur régime politique**** et le ****citoyen idéal****. - Un bon gouvernement doit permettre aux citoyens d'exercer leur ****rationalité****, en accord avec la justice et la vertu. - Cicéron rejette le fondement divin des lois, s'inspirant du ****droit naturel**** basé sur la ****raison humaine****. - Pour lui, la ****loi naturelle**** est universelle et immuable, inscrite dans la nature même de l'Homme. - Cette loi guide les hommes vers la ****justice**** et l'****harmonie sociale****. - ****Définition de la République selon Cicéron**** : - Une ****res publica**** (chose publique) : Elle est « la chose du peuple », fondée sur un ****pacte de justice****. - Contrairement à Aristote, la ****raison**** (et non la justice) devient le principe structurant de la société. #### ****3. Les Frères Gracques : Les Réformateurs du Peuple**** - ****Tiberius et Caius Gracchus**** (IIe siècle av. J.-C.) : Réformateurs romains qui tentent de corriger les inégalités sociales. - Redistribution égalitaire des terres. - Régulation du prix du blé pour le rendre accessible. - Les Gracques symbolisent la ****défense du peuple**** contre les élites. ### ****Comparaison Cicéron vs. Aristote**** - ****Aristote**** : La justice découle de la Cité, basée sur la hiérarchie naturelle et les rôles sociaux. - ****Cicéron**** : La Cité découle de la raison, fondée sur un respect universel de la loi naturelle. ****Les Penseurs de l\'Empire Romain**** #### ****1. La Transition de la République à l\'Empire**** - ****Fin de la République romaine**** : La République romaine s\'effondre en raison de l\'utilisation excessive de la dictature et des crises internes. Le passage à l\'Empire marque une transformation fondamentale du régime politique. - ****Le rôle d\'Auguste**** : Auguste, en devenant le premier empereur, assume une forme de dictature en s'adressant directement au Sénat comme **princeps** (premier citoyen). Son pouvoir semble être une forme de ****dyarchie**** où l\'empereur conserve l\'autorité suprême tout en maintenant une façade républicaine. #### ****2. Les Stoïciens et la Liberté sous l\'Empire**** - ****Stoïcisme et pouvoir**** : Pendant la période impériale, les philosophes stoïciens développent une réflexion sur la ****liberté individuelle**** tout en acceptant l\'ordre extérieur imposé par l\'Empire. - Les stoïciens considèrent que la ****liberté intérieure**** peut être préservée tant que l'ordre extérieur (incarné par l\'Empire) est perçu comme rationnel. - Ils approuvent en grande partie la domination impériale, bien qu\'ils espèrent voir un équilibre entre ****l\'autorité impériale et celle du Sénat****. - ****Sénèque**** : Philosophe stoïcien et conseiller d\'Auguste, Sénèque prône un équilibre entre la ****diarchie**** de l'Empire et le Sénat. Il espère initier l\'empereur aux principes stoïciens de modération. - ****Tacite**** : Historien et philosophe stoïcien, Tacite observe que le peuple romain accepte le régime impérial, considérant que l'empereur détient la ****légitimité politique****. Cependant, il critique le despotisme de certains empereurs. #### ****3. Le Decline et le Dominat**** - ****Dynastie des Sévères (235)**** : À la fin de la dynastie des Sévères, l\'Empire romain entre dans une phase de crise, marquée par l\'anarchie militaire. Cela ouvre la voie au ****système du dominat****, où le pouvoir impérial devient ****plus autoritaire**** et centralisé. - ****Le Bas-Empire**** : Ce régime, caractéristique du Bas-Empire, se distingue par une concentration accrue du pouvoir entre les mains de l'empereur, renforçant l'autorité impériale. #### ****b. L\'Influence Chrétienne et la Séparation des Pouvoirs**** - ****La conversion de Constantin**** : L\'empereur Constantin, par son ****Édit de Milan**** en 313, autorise la pratique du christianisme. Cette conversion marque le début d\'un changement profond dans l\'Empire romain. - Le ****Conseil de Nicée**** (325) fixe le crédo chrétien pour contrer les hérésies comme l'arianisme, qui contestait la divinité de Jésus. - ****Distinction entre pouvoir temporel et spirituel**** : - Le christianisme introduit une distinction entre le ****pouvoir temporel**** (politique) et le ****pouvoir spirituel**** (religieux), une question qui crée des tensions dans la structure politique de l\'Empire. - Le christianisme ouvre le débat sur ****l\'origine divine du pouvoir impérial**** : l\'empereur tire-t-il son autorité de Dieu ? - Pendant des siècles, pouvoir politique et spirituel ont été liés, mais cette séparation commence à s\'imposer, créant un terrain fertile pour les conflits de pouvoir entre l\'Église et l\'Empire. ### ****Résumé et Conclusion**** - L'Empire romain, tout en s'effondrant sous les crises internes, a vu naître des réflexions philosophiques influencées par le ****stoïcisme****, qui acceptaient l'ordre impérial tout en prônant la ****liberté intérieure****. - L\'****influence chrétienne****, amplifiée par la conversion de Constantin, introduit la ****séparation entre les pouvoirs temporel et spirituel****, remettant en question le fondement divin du pouvoir impérial et marquant un tournant dans la pensée politique de l\'Empire ### ****a)** **La Révolution de l\'Évangile**** L\'apparition de l\'Évangile, par l\'enseignement du Christ, représente une ****révolution**** fondamentale dans l\'histoire de la pensée politique et religieuse. Voici les principales idées qui en découlent : #### ****1. Le Règne de Dieu et la Fin de la Politique Terrestre**** - ****Annonce du Règne de Dieu**** : Le Christ proclame la venue du ****Règne de Dieu****, un royaume spirituel qui n\'a pas de lien direct avec les structures politiques terrestres. Ce Règne marque une rupture avec la vision ancienne selon laquelle la politique pouvait participer à la réalisation du bien suprême ou du salut. - ****Existence terrestre comme \"anecdotique\"**** : En annonçant ce règne, le Christ invite les hommes à relativiser leur existence terrestre. La politique, les préoccupations matérielles et les institutions humaines deviennent secondaires, car le but ultime est d\'atteindre le salut et la vie éternelle. La politique n\'a pas de valeur dans le ****Ciel**** et, par conséquent, n'est qu\'une réalité temporaire et transitoire. #### ****2. Séparation des Pouvoirs Spirituel et Temporel**** - ****Rendre à César ce qui est à César**** : Bien que le Christ insiste sur la primauté du ****Règne de Dieu****, il reconnaît également la nécessité de respecter les autorités terrestres. Dans l\'Évangile, la célèbre maxime \"Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu\" (Matthieu 22:21) illustre cette distinction. Il ne nie pas l\'autorité politique, mais il marque clairement que celle-ci n'a pas de place dans le royaume céleste. - ****Séparation définitive**** : Cette déclaration inaugure une ****séparation radicale**** entre les affaires politiques et les affaires religieuses. L\'autorité divine et l\'autorité humaine sont désormais considérées comme distinctes et ne doivent pas interférer l\'une avec l\'autre. Cette séparation influencera profondément l\'évolution de la pensée politique et théologique au cours des siècles suivants. #### ****3. Une Révolution Durable**** - La ****révolution de l\'Évangile**** est donc une révolution de pensée qui redéfinit les rapports entre l\'homme, la politique et la spiritualité. Elle ne se limite pas à une remise en question des institutions politiques de l\'époque, mais elle ****révolutionne**** la manière dont la politique est perçue par rapport à la foi. - Cette séparation des pouvoirs spirituel et temporel constituera un fondement majeur des futures conceptions de l'État et des institutions, en particulier à l'époque médiévale et moderne, où l\'idée de ****laïcité**** prendra forme dans les sociétés occidentales. ### ****Conclusion**** L\'Évangile, par ses enseignements, marque ainsi un tournant majeur : non seulement il annonce la primauté du Règne de Dieu, mais il introduit également une distinction nette entre les domaines politique et spirituel, transformant pour l'éternité la manière dont les sociétés humaines aborderont la relation entre pouvoir politique et foi religieuse. ****b)** **Les Apports de la Patristique**** La ****Patristique****, ou la période des Pères de l'Église, joue un rôle majeur dans la formation de la pensée chrétienne concernant le pouvoir politique. Plusieurs figures importantes de cette époque, telles que ****Saint Pierre****, ****Saint Paul****, ****Saint Jean Chrysostome****, ****Eusèbe de Césarée****, et ****Saint Augustin****, ont contribué à la définition de la relation entre l'autorité divine et la politique terrestre. #### ****1. L'Autorité du Prince et l'Obéissance au Pouvoir**** - ****Saint Pierre**** exhorte les chrétiens à obéir au prince, affirmant que l\'autorité du prince pourrait être d\'origine divine. Ainsi, obéir au prince devient un acte de soumission à la volonté de Dieu. Cette pensée s\'inscrit dans une vision chrétienne de l'ordre, où la soumission à l'autorité terrestre est perçue comme un devoir religieux. - ****Saint Paul****, de manière similaire, enseigne que toute autorité vient de Dieu. Il affirme que \"il n\'y a point de pouvoir qui ne vienne de Dieu\" (Romains 13:1), et donc, l'obéissance au prince est non seulement un devoir civique, mais un respect des préceptes divins. Cette doctrine permet de justifier la soumission des citoyens à l'autorité, indépendamment de leur perception personnelle du gouvernement. - L'idée sous-jacente est que ****l'homme, étant pécheur****, ne peut exister dans une société vertueuse sans autorité. Le besoin de l'État apparaît comme une conséquence du péché originel, un moyen pour maintenir l\'ordre dans un monde corrompu. ****L'absence de vertu dans l'humanité**** justifie l\'existence d\'une autorité extérieure. #### ****2. L'Empereur comme Représentant de Dieu**** - ****Saint Jean Chrysostome**** renforce cette idée en expliquant que la rébellion contre le pouvoir établi est une rébellion contre Dieu. Selon lui, l'obéissance au prince découle directement du péché originel. Ainsi, toute désobéissance à l\'autorité terrestre serait perçue comme une offense à Dieu. - ****Eusèbe de Césarée****, un autre penseur influent, soutient cette vision en rapprochant le pouvoir politique de l\'autorité divine. Il distingue le monde divin, où Dieu et son Fils règnent, du monde terrestre, où l'empereur et ses ministères exercent leur autorité. Selon Eusèbe, l'empereur devient le représentant de l'autorité divine sur Terre, et le pouvoir impérial s'apparente à celui du royaume céleste. #### ****3. Saint Augustin et la Distinction entre les Deux Cités**** - ****Saint Augustin****, l\'un des Pères de l'Église les plus influents, a introduit une distinction fondamentale entre ****la Cité de Dieu**** et ****la Cité des hommes****. Dans son ouvrage majeur **La Cité de Dieu**, il soutient que la Cité des hommes, symbolisée par Rome, est vouée à disparaître. Elle est ****mortelle**** par nature, contrairement à la Cité de Dieu qui est ****éternelle****. - Augustin répond à ses détracteurs païens qui reprochaient au christianisme d'avoir fait fuir les divinités antiques. Selon lui, les ****dieux païens**** n'ont ni la capacité de protéger la Cité terrestre, ni celle de garantir le salut. Dieu, de même, n'a pas pour vocation de sauver Rome, car ****la Cité des hommes est condamnée à la mortalité****. - Cependant, l'idée d'Augustin a été mal interprétée par certains, ce qui a mené à la naissance de l'****Augustinisme politique****, une pensée qui tendait à confondre les deux cités. Augustin, lui, souhaitait maintenir une ****distinction claire**** entre la sphère spirituelle, régie par la Cité de Dieu, et la sphère politique, régie par la Cité des hommes. ### ****Conclusion**** Les ****Pères de l'Église****, à travers leurs réflexions, ont profondément influencé la conception chrétienne du pouvoir politique. L'idée que l'autorité terrestre découle de Dieu a justifié la ### ****II-** **Le Critère du Politique chez Carl Schmitt**** ****A. L'autonomie du politique: la distinction «ami-ennemi»**** #### ****1. La Question Fondamentale : Qu\'est-ce qui est Politique ?**** - ****Objectif de Carl Schmitt**** : - Schmitt ne cherche pas à définir ce qu\'est le politique en général, mais à identifier ****le critère distinctif**** qui permet de reconnaître un acte comme étant politique. - Selon lui, ce critère est ****l'opposition ami/ennemi****. #### ****2. L\'Opposition Ami/Ennemi**** - ****Distinction centrale**** : - Schmitt définit la politique comme étant fondée sur la distinction ****ami/ennemi****. Cette opposition représente le degré extrême d'union (l'ami) et de désunion (l'ennemi). - Elle est ****fondamentale**** pour comprendre l'existence politique, car elle détermine qui fait partie de la même communauté politique et qui en est exclu. - ****Caractère extrême de l\'opposition**** : - Cette distinction peut devenir tellement forte qu'elle peut mener à un ****conflit ouvert****, voire à la guerre. - En ce sens, Schmitt s\'appuie sur les propos de ****Clausewitz****, qui affirme que \"la guerre n\'est que la continuation de la politique par d\'autres moyens.\" Cela signifie que la politique et la guerre sont intimement liées, la guerre étant une forme extrême de la politique. #### ****3. L\'Autonomie du Politique**** - ****Autonomie de la sphère politique**** : - Schmitt soutient que la politique a son propre domaine et est ****autonome**** par rapport aux autres sphères sociales (économie, morale, etc.). - La politique se distingue donc par la capacité à organiser et à gérer la distinction ami/ennemi, ce qui détermine son caractère politique spécifique. - ****Lien avec l\'État**** : - La souveraineté de l\'État se manifeste dans sa capacité à décider de ****l\'ennemi**** et à mobiliser les ressources pour le combattre si nécessaire. - En cela, l\'État doit être capable de tracer cette frontière entre l\'ami et l\'ennemi pour assurer sa stabilité et son existence. ****A quoi reconnaissons-nous** **quelque chose de politique?**** #### ****1. Distinction entre l\'État Polémique et l\'État Agonale**** - ****État Polémique**** : - L\'État polémique renvoie à un ****conflit violent et direct****, où les adversaires sont en guerre ouverte, cherchant à imposer leur domination par la force. - Dans cette configuration, la ****violence**** et ****l\'hostilité**** sont les éléments clés. Il s\'agit d\'un combat où les protagonistes s'affrontent comme des ennemis. - ****Objectif**** : Imposer sa force à l\'autre par la guerre et l'hostilité. - ****État Agonale**** : - L\'État agonale, quant à lui, repose sur un ****conflit non violent****. Le terme \"agon\" en grec fait référence à une lutte ou un combat, mais qui n\'implique pas nécessairement la violence. - L\'État agonale est le lieu du ****conflit politique sans violence physique****. Il s\'agit d'un ****conflit d\'opinions**** où l'objectif n'est pas d'imposer sa volonté par la force, mais plutôt de défendre son point de vue dans un cadre démocratique. - ****Exemple**** : La démocratie est considérée par Schmitt comme l'État agonale par excellence, car elle repose sur la confrontation d\'idées et de points de vue, sans violence directe. #### ****2. La Nature du Conflit dans l\'État Agonale**** - ****Conflit sans violence**** : - L\'État agonale permet une confrontation ****verbale et idéologique****, où les adversaires peuvent exprimer des opinions opposées tout en respectant un cadre démocratique. - Contrairement à l\'État polémique où l\'ennemi doit être défait, dans l\'État agonale, l\'objectif est de maintenir ****l\'équilibre des conflits****. - ****Rôle de la médiation**** : - Dans l\'État agonale, un ****tiers**** peut émerger pour maintenir l\'agonalité. Cela peut se produire par : - ****Compromis**** : Trouver une solution qui réconcilie les positions opposées. - ****Victoire d\'un côté**** : Lorsque l'un des deux camps prend le dessus, mais toujours dans une dynamique où la légitimité de l\'autre est reconnue. #### ****3. La Démocratie comme État Agonale**** - ****La démocratie, cadre du conflit idéologique**** : - La démocratie est vue par Schmitt comme un modèle d\'État agonale, où les partis s'affrontent sur des idées et des valeurs, mais sans recourir à la violence. - Les ****élections****, les ****débat politiques**** et les ****démarches parlementaires**** sont les moyens par lesquels ce type de conflit se manifeste. - ****Risque de basculement vers la violence**** : - Bien que la démocratie soit fondée sur des conflits non violents, elle est ****fragile**** et peut basculer dans l\'État polémique (violent) si le conflit devient trop intense et échappe au contrôle. - Ce basculement peut être évité ou retardé par la présence d'un ****tiers**** qui cherche à ****pacifier**** les affrontements. III\. L'essence du politique chez Julian Freund A. Définition de l'essence du politique L'essence est une activité permanente et innée appartenant à l'Histoire: en outre, c'est une identité qui ne varie pas, puisque c'est la nature propre d'une chose. Dès lors, appréhender l'essence du politique peut se faire à travers une donnée, 1 ou plusieurs présupposé ou 1 ou plusieurs finalités. B. Données et présupposées du politique - Selon Freund, il existe six ****essences fondamentales**** dans toute organisation sociale ou humaine. Ces essences sont les ****composantes clés**** qui définissent différents aspects de la vie collective. Elles incluent : 1. ****Essence Politique**** : - Le politique est essentiellement une ****relation**** caractérisée par plusieurs oppositions ou structures relationnelles : - ****Ami/ennemi**** : Une distinction centrale pour identifier le politique, où l'on se confronte à des adversaires potentiels. - ****Public/privé**** : La séparation entre les espaces politiques ouverts au public et les domaines privés de la vie individuelle. - ****Commandement/obéissance**** : La relation hiérarchique au sein de l'autorité politique, où certains commandent et d\'autres obéissent. 2. ****Essence Économique**** : - L'économique relève de l'organisation des ressources, de leur distribution, et des relations de pouvoir qui en découlent. L'économie est fondée sur l'échange et la production, en lien avec les besoins matériels de la société. 3. ****Essence Éthique**** : - L'éthique concerne la ****moralité****, les valeurs et principes qui orientent les comportements humains. Elle est liée à la notion de bien et de mal dans la société, influençant ainsi les choix politiques et sociaux. 4. ****Essence Esthétique**** : - L'esthétique s'intéresse à ****l'art****, à la beauté et à la perception visuelle et sensorielle dans la société. Elle joue un rôle dans la culture et les formes d'expression qui peuvent influencer l'ordre social et politique. 5. ****Essence Religieuse**** : - L'essence religieuse concerne le ****sacré****, les croyances et les pratiques religieuses qui peuvent avoir un impact direct sur la politique, en particulier à travers la légitimation du pouvoir et des autorités spirituelles. 6. ****Essence Scientifique**** : - L'essence scientifique est liée à la ****recherche de la vérité**** à travers des méthodes rigoureuses et objectives. La science a un rôle de plus en plus important dans la prise de décision politique, notamment dans des domaines comme la santé publique ou l'environnement. #### ****3. La Finalité du Politique**** - ****Définition de la finalité du politique**** : - Selon Freund, la finalité du politique est de maintenir ****l\'ordre social**** et de garantir ****la sécurité**** à l'échelle d'une unité politique particulière. Cela se fait en assurant à la fois ****la sécurité extérieure**** (protection contre les menaces extérieures) et ****la concorde intérieure**** (harmonie au sein de la société). - Cette finalité repose sur ****l'usage de la force**** légitimée par le droit, permettant de maintenir l\'ordre malgré les luttes internes et les conflits qui existent au sein de la société. En somme, le politique vise à créer une unité politique stable, capable de gérer les tensions et de résoudre les conflits qui surgissent naturellement dans toute communauté. Section II: POLITIQUE ET THÉOLOGIE: DIALECTIQUE DES RAPPORTS ENTRE DIEU ET CÉSAR I. La chrétienté médiévale et sa postérité platonicienne: les doctrines sacerdotalistes A. Sacerdotalisme et augustinisme politique #### ****1. Cinq Périodes Importantes dans l'Évolution du Pouvoir de l'Église et de l'État**** ****Première période (Ve - VIe siècle)**** : - Après la chute de l\'Empire romain en 476, l'Église prend une place centrale dans les sociétés occidentales. - L'Église se distingue par son influence croissante, remplissant un vide laissé par la disparition du pouvoir impérial romain. - L'Église et l'État se partagent les rôles, mais l'Église commence à exercer une influence accrue. ****Deuxième période (VIe siècle, Charlemagne)**** : - Charlemagne devient roi des Francs en 768 et est couronné empereur en 800. - Son couronnement marque la création d'un empire chrétien, distinct de l\'Empire byzantin, renforçant la séparation entre Orient et Occident. - Charlemagne impose un modèle où l\'autorité politique et religieuse sont étroitement liées. ****Troisième période (Empire de Charlemagne)**** : - Charlemagne centralise son pouvoir tout en cherchant à instituer un ordre religieux chrétien. - Le lien entre le politique et le religieux devient fondamental dans son empire, avec l'Église jouant un rôle majeur dans la gestion du pouvoir. ****Quatrième période (Héritage spirituel de Charlemagne)**** : - Après la mort de Charlemagne, l'Église continue d'affirmer son autorité face aux pouvoirs politiques. - Des conflits apparaissent, notamment autour des querelles d'investiture, marquant la lutte pour le pouvoir entre le pape et les souverains laïques. ****Cinquième période (Dynastie des Ottons, Xe siècle)**** : - La dynastie ottonienne établit une alliance forte entre l'Église et le Saint-Empire romain germanique. - Cette alliance survient après la chute de l\'Empire romain et marque une période de renforcement des liens entre l'autorité religieuse et temporelle #### ****2. La Féodalité et la Hiérarchie Sociale**** - ****La féodalité**** se développe surtout après la mort de Charlemagne et la chute de son empire. - La féodalité repose sur des ****liens personnels et directs**** entre le vassal et son seigneur, impliquant un ****serment de fidélité**** et des obligations réciproques de protection. - Ce système est une tentative de reconstruire l'État sur la base de relations locales et hiérarchisées. #### ****3. Les Conflits Entre Pouvoir Politique et Religieux**** - Des ****affrontements**** surviennent entre le pouvoir politique (les princes laïques) et l'Église (la papauté). - Les rois et empereurs cherchent à étendre leur autorité sur tous les aspects de leurs territoires, y compris les affaires religieuses. - Dans ce contexte, le ****sacerdotalisme**** et le ****Césaropapisme**** émergent : - ****Sacerdotalisme**** : L'Église détient l'autorité spirituelle et temporelle. - ****Césaropapisme**** : Le chef politique exerce des fonctions religieuses et le chef religieux joue un rôle politique. #### ****4. La Théorie des Deux Glaives de Saint Bernard de Clairvaux**** - Saint Bernard de Clairvaux défend la ****supériorité de l'Église sur l'État****, selon sa théorie des ****deux glaives**** : - ****Le glaive temporel**** : Détient l\'autorité sur le monde terrestre, mais doit être guidé par l'Église. - ****Le glaive spirituel**** : L'Église détient l'autorité spirituelle et doit guider les affaires temporelles. - Selon cette théorie, les deux glaives proviennent de ****Dieu****, mais l'Église est la détentrice du ****glaive spirituel****, supérieur au ****glaive temporel****. #### ****5. Saint Ambroise et la Relation Entre le Prince et l'Église**** - ****Saint Ambroise**** insiste sur les ****devoirs religieux**** du prince chrétien. - Selon lui, le prince doit se soumettre à l'Église en tant que représentant de Dieu sur Terre. - Cette idée renforce la notion que le pouvoir temporel doit être subordonné à l'autorité spirituelle de l'Église. B. LES TROIS ORDRES DU FEODALISME #### ****1. Contexte : Confrontation entre Dieu et César**** - L\'idée de la confrontation entre Dieu (représenté par l\'Église) et César (représentant le pouvoir temporel) persiste à travers les siècles médiévaux. - Cette opposition est au cœur de la structuration de la société féodale, où les rôles sociaux et politiques sont définis par la relation entre l\'autorité religieuse et le pouvoir royal. #### ****2. Les Trois Ordres du Féodalisme selon Georges Duby**** - ****Ouvrage clé**** : **Les Trois ordres du féodalisme** de Georges Duby. - Duby propose une vision de la société médiévale comme étant divisée en trois ordres hiérarchiques, chacun ayant une fonction spécifique et une relation particulière avec l'Église et l'État. ****Les trois ordres**** : - ****Les Priants**** (ou clergé) : Ce sont ceux qui prient, représentés par l\'Église et le clergé, responsables des prières et des rituels religieux. Ils sont considérés comme les garants de la relation avec Dieu. - ****Les Combattants**** (ou noblesse) : Ceux qui combattent et défendent la terre, à savoir les seigneurs, chevaliers et nobles. Leur rôle est de maintenir l\'ordre et la paix dans les royaumes par la force et la guerre. - ****Les Travailleurs**** (ou paysans) : Ceux qui travaillent la terre pour nourrir la société. Ils sont souvent soumis à des conditions de vie difficiles, mais leur rôle est essentiel pour la subsistance de la société médiévale. #### ****3. Hiérarchie et Providence Divine**** - Ces trois ordres sont ****hiérarchiquement ordonnés****, et leur organisation reflète un ****dessein providentiel****. Cette structure sociale est perçue comme étant ordonnée par Dieu, chacun ayant une fonction spécifique et nécessaire dans la société. - L\'idée que Dieu aurait voulu cette division des rôles et de la hiérarchie dans la société renforce l\'idée d\'une ****légitimité divine**** de l\'ordre féodal. #### ****4. Les Formulations Initiales des Trois Ordres**** - ****Adal Berron de Lan**** : Il est l\'un des premiers à formuler les trois fonctions de manière succincte, résumant la division de la société en \"ceux qui prient, ceux qui combattent, et ceux qui travaillent\". - ****Hecmar de Reims**** : Il ajoute que le pouvoir royal doit être guidé par les principes des ****Saintes Écritures****, et que la justice, la charité, et la foi doivent être au cœur du pouvoir monarchique. Cela renforce l\'idée que la monarchie et l\'État doivent être légitimés par la religion. #### ****5. Légitimation du Pouvoir Royal**** - L\'idée que le ****pouvoir royal**** ne doit pas s\'écarter des principes religieux est une manière de justifier la ****monarchie**** et la structure féodale. - Le ****roi****, en tant que dirigeant temporel, doit obtenir sa légitimité à travers la foi chrétienne et doit s\'assurer de respecter les principes de justice et de charité inscrits dans les Écritures. - Cela montre la manière dont la ****monarchie**** médiévale se structure progressivement, en reliant son pouvoir à l'autorité divine et à l\'Église. II\. LA CHRETIENTE MEDIEVAL ET LA POSTERITE ARISTOTELICIENNE: La pensée de St-Thomas d'Aquin A. DE LA NATURE POLITIQUE DE L'HOMME AU DROIT NATUREL #### ****1. Introduction à Saint-Thomas d\'Aquin**** - ****Importance**** : Philosophe et théologien du Moyen Âge, Saint-Thomas d\'Aquin est l\'un des plus grands penseurs chrétiens, qui a su concilier la pensée aristotélicienne avec la foi chrétienne. - ****Contexte**** : Contrairement à d'autres philosophes, Saint-Thomas échappe à l\'excommunication qui risquait de le mettre à l\'écart de la société médiévale. Il réussit à intégrer la philosophie d\'Aristote à la doctrine chrétienne, particulièrement dans la réflexion politique et éthique. #### ****2. L'Influence d'Aristote et le Droit Naturel**** - ****Naturalisme Aristotélicien**** : Saint-Thomas reprend les idées d\'Aristote, notamment son naturalisme, selon lequel la nature humaine est destinée à vivre en société, ce qui conduit à une réflexion sur la politique et le droit. - ****Droit Naturel**** : Saint-Thomas introduit le concept de ****droit naturel****, une loi inscrite dans la nature humaine et dans le cœur de chaque individu. Ce droit naturel est une participation à la loi divine, et il détermine ce qui est juste et moral. - ****Loi Divine**** : La loi divine correspond au plan voulu par Dieu pour l'humanité. Elle est la source première de l'ordre moral. - ****Loi Naturelle**** : Découlant de la loi divine, la loi naturelle est inscrite dans la nature humaine et dans la raison. Chaque individu possède cette loi en lui, ce qui en fait un fondement universel pour toute société. - ****Loi Humaine**** : La loi humaine, qui est la loi positive (les lois spécifiques d\'un pays ou d\'une société), doit se conformer aux principes de la loi naturelle et être un moyen de réaliser la justice. #### ****3. L'Homme et la Nature Politique**** - ****L\'Homme Animal Politique**** : Saint-Thomas reprend la thèse d\'Aristote selon laquelle l'homme est un \"animal politique\" par nature. Cela signifie que l'homme, par sa nature sociale, ne peut vivre seul et a besoin d'une organisation politique pour atteindre son épanouissement. - ****Finalité de la Politique**** : La politique, pour Saint-Thomas, n'est pas un but en soi, mais un moyen d'atteindre la finalité ultime de l'homme, qui est le bien commun et la justice. L'organisation politique doit viser à établir l'ordre dans la cité et à permettre aux citoyens de mener une vie vertueuse. #### ****4. Le Pouvoir et la Loi selon Saint-Thomas**** - ****La Source du Pouvoir**** : Saint-Thomas s'inspire de l\'enseignement de Saint-Paul selon lequel ****tout pouvoir provient de Dieu****. Par conséquent, ****le prince**** ou le souverain ne détient son autorité que comme un ****mandataire de Dieu****. Il est ainsi vu comme un participant au pouvoir divin, et non comme une source autonome de pouvoir. - ****Le Rôle de la Loi**** : La loi, qu\'elle soit divine, naturelle ou humaine, est vue comme un moyen de promouvoir la justice et de garantir l'ordre dans la cité. - ****Éthique et Politique**** : Saint-Thomas n'opère pas une séparation stricte entre éthique et politique. Pour lui, la politique doit être guidée par des principes éthiques, et les lois doivent permettre de réaliser le bien commun et la justice. - ****La Loi comme Moyen**** : La loi, dans sa dimension politique, est un outil pour établir l\'ordre social en conformité avec les principes divins et naturels. B. DU BIEN COMMUN AU RÉGIME POLITIQUE NATUREL #### ****1. Les Deux Cités : Terrestre et Céleste**** - ****Distinction entre les deux cités**** : Saint-Thomas d\'Aquin, tout comme Saint-Augustin, distingue deux cités essentielles : - ****La cité terrestre**** : C'est la société humaine, gouvernée par des lois humaines et temporaires, qui vise à garantir l\'ordre et le bien-être des citoyens. - ****La cité céleste**** : C'est la dimension spirituelle, où les individus visent la béatitude éternelle et où le gouvernement divin régit la vie humaine. - ****Autonomie et Subordination**** : Bien que Saint-Thomas reconnaisse une certaine autonomie au pouvoir terrestre, celui-ci reste subordonné au pouvoir spirituel. Le pouvoir terrestre ****participe au pouvoir de Dieu****, mais doit toujours chercher à être conforme à la volonté divine. #### ****2. Le Meilleur Régime Politique selon Saint-Thomas**** - ****Recherche du meilleur régime**** : Comme Aristote, Saint-Thomas d\'Aquin s'interroge sur le meilleur régime politique. Pour lui, ****le régime mixte****, combinant éléments de monarchie, aristocratie et démocratie, est le plus efficace pour garantir l'ordre et le bien commun. Cependant, il privilégie ****la monarchie****. - ****La monarchie**** : Saint-Thomas préfère la monarchie, car elle permet d\'avoir un ****régime royal**** qui peut incarner l\'ordre divin et maintenir l\'unité de la cité sous une autorité centrale. #### ****3. La Monarchie et le Bien Commun**** - ****Le rôle du roi**** : Dans ce système monarchique, ****le roi**** doit être à la fois souverain et ****écouter le peuple****. Cela implique une interaction entre le souverain et ses sujets, et le roi doit agir pour le bien commun. - ****La participation du peuple**** : Saint-Thomas soutient l'idée que le peuple doit être impliqué dans le pouvoir, mais dans une logique ****subsidiariste**** : - ****Principe de subsidiarité**** : Chaque individu ou groupe doit être responsable de ce qui relève de sa compétence. Il faut laisser à chaque partie de la société ****le soin d\'exercer ses responsabilités****. Cette idée vise à garantir une ****distribution équilibrée du pouvoir**** et de la responsabilité à travers tous les niveaux de la société. III\. THÉOLOGIE ET POLITIQUE, UNE THÉORIE DÉPASSÉE? A. LA POLITIQUE COMME SÉCULARISATION DE LA THÉOLOGIE #### ****1. La Politique comme Sécularisation de la Théologie**** - ****Sécularisation**** : Le phénomène de sécularisation désigne la séparation progressive du politique et du religieux, et la ****l'autonomisation du politique**** par rapport à la théologie. Ce processus est marqué par une rupture avec la chrétienté et une ****réorganisation de l'État**** indépendamment des institutions religieuses. #### ****2. Carl Schmitt et Erik Peterson : Débat sur la Théologie Politique**** - ****Carl Schmitt**** : - Pour Schmitt, ****le catholicisme**** constitue la base de l'État moderne, car de nombreux concepts politiques de l'État moderne proviennent directement de l'Église. Le catholicisme serait ainsi l'****origine du politique**** et l'État moderne serait une ****évolution de concepts théologiques****. - ****Théologie politique**** : Schmitt considère que ****l'État moderne**** s'inspire de structures théologiques et que le processus de sécularisation est une continuité de la pensée chrétienne appliquée à la politique. - ****Erik Peterson**** : - En revanche, Peterson rejette l'idée de théologie politique. Selon lui, ****l'État s'est formé indépendamment de la théologie**** et la séparation entre le politique et le théologique est ****le résultat d'un choix politique****, non d'un processus naturel de sécularisation. #### ****3. L'ouvrage \"Les Deux Corps du Roi\" d'Ernst Kantorowicz**** - ****Les deux corps du roi**** : - ****Corps mortel**** : Le roi est un individu, un homme mortel dont la vie et la mort dépendent de sa condition physique. - ****Corps immortel**** : La royauté, en revanche, est un principe éternel et transcendant. Il représente ****l\'État****, qui perdure au-delà de la vie du roi. Ce modèle est inspiré des ****structures théologiques**** de l'Église, où le pape ou l\'évêque incarne un pouvoir divin qui dépasse sa propre existence. - ****Le pouvoir et le titulaire**** : Kantorowicz soutient que, tout comme dans l'Église, ****le titulaire du pouvoir**** (le roi) peut mourir, mais ****le pouvoir lui-même**** perdure, ce qui montre l'****indépendance du pouvoir**** de la personne qui le détient. B. LA LAÏCITE REPUBLICAINE OU LES VICISSITUDES D'UNE (IM)POLITIQUE (A)THEOLOGIQUE #### ****1. La Laïcité : Origines et Débats**** - ****Origine du terme \"laïcité\"**** : Le terme \"laïcité\" provient du mot ****laos**** en grec, qui désigne le ****peuple****. Dans la Grèce antique, le laos représente un peuple indifférencié, unifié par un destin commun sans distinction de générations, de classes sociales ou de croyances. - ****La laïcité en France**** : Ce concept de \"laos\" est repris pour établir un modèle de société où ****l'unité du peuple**** prévaut, sans distinction religieuse. La laïcité française vise à ****séparer le religieux du politique****, assurant ainsi ****l'indépendance de l'État vis-à-vis des institutions religieuses****. #### ****2. La Laïcité et l\'As-sécularité de l'État**** - ****Évolution de la laïcité**** : Au fil du temps, la laïcité française a évolué vers ce que certains appellent une ****politique d\'as-sécularité****. Ce phénomène consiste en une séparation plus marquée entre l'État et les influences religieuses, au point de ****nier l'origine chrétienne de l'État français****. - ****L\'impact théologique**** : Contrairement à une certaine continuité entre théologie et politique (comme défendu par Carl Schmitt), la laïcité en France, en se sécularisant, cherche à ****rompre avec les racines chrétiennes**** et à établir un ****État neutre**** vis-à-vis des croyances religieuses. Cela se traduit par l'idée que ****l'État doit être un espace où les convictions religieuses n'interviennent pas****, ni dans la gestion publique, ni dans la définition des politiques publiques.

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