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Haute École Léonard de Vinci

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philosophie du soin éthique care humanisme

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Ce document présente un résumé de la philosophie du soin, abordant des notions telles que le care et la cure. Il explore les concepts liés à la subjectivité, l'intersubjectivité et la souffrance en lien avec les soins.

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PHILOSOPHIE - RESUME CURE = basé sur le CURATIF, sur le TRAITEMENT CARE = met l’accent sur les SOINS / l’AIDE / la GUERISON → Possibilité du transfert (Roustang), confiance donnée au médecin et du sentiment capacitaire et sécurisant reçu en retour...

PHILOSOPHIE - RESUME CURE = basé sur le CURATIF, sur le TRAITEMENT CARE = met l’accent sur les SOINS / l’AIDE / la GUERISON → Possibilité du transfert (Roustang), confiance donnée au médecin et du sentiment capacitaire et sécurisant reçu en retour 1 6 catégories selon Winnicott : 1) Les hiérarchies doivent tomber face à la relation interpersonnelle (colloque singulier) 2) Nous avons besoin de nos patients autant qu’ils ont besoin de nous : qui est malade interroge Winnicott → la dépendance, le médecin répond aux besoins de celui qui est malade, mais le malade répond aux besoin des soignants (soigner) = dû moral Les malades précèdent la médecine 3) Réunir le Care et le Cure, ne pas juger le patient, être fiable (honnête sur son savoir ou son non-savoir), le protéger de l’imprévisible, du fonctionnement somatique de l’angoisse. 4) Les autres effets, la capacité de se livrer aux identifications croisées : se mettre à la place de l’autre et permettre à l’autre d’en faire autant. Dépasser l’aspect purement technique du domaine médical : avoir de l’empathie. 5) La gratitude comme acte propitiatoire : si tout se passe bien le patient estime que c’est normal. S’il y a une erreur médicale, un oubli, une négligence, il va se plaindre. Les médecins ne doivent pas attendre trop de leurs patients. Un patient fort est toujours un patient ingrat. 6) Le holding : la facilitation. La croissance duelle. L’environnement facilitant = enjeu du care. Ce sont les soins de l’entourage qui vont permettre à l’enfant de développer sin système motivationnel et exploratoire. Il existe un continuum des soins de l’enfance à l’âge adulte. Ce que les gens attendent des soignants = la DEPENDANCE / la VULNERABILITE : besoin de fiabilité, empathie, confiance. Le care permet le sentiment d’identité personnelle. Il est tout aussi important que le cure qui prône l’approche scientifique. → Alliance thérapeutique, besoin l’un de l’autre (relation patient/soignant). Celui qui va porter la question phorique, c’est celui qui va faire qu’on peut espérer quelque chose du monde. Et le monde peut-être pourra aussi espérer quelque chose de nous. 3 étapes clés / 3 fonctions de la mère :  Intégration du self : maintien = holding  La résidence de la psyché dans le corps : maniement = handling  L’établissement de la relation d’objet : présentation d’objets Premières années de la vie = enclenchement de processus de maturation fiables et de résilience. Attention si lors de ces premières années, le bébé est exposé à une défaillance de l’environnement facilitant → risque de troubles comportementaux, du développement cognitif et émotionnel. Conclusion : La mère donne des raisons de croire que le monde est un lieu dans lequel existe l’espoir de trouver l’équivalent de ce qui est attendu, imaginé et nécessaire. Soin de la mère : capacité de l’élaboration imaginative = milieu de rencontre entre le bébé et le monde peut se faire. 2 Cure : technique, objectif curatif évident en rapport avec un diagnostic, mais parfois moins circonscrit : valorise le traitement d’une pathologie « Confrontant le curatif (cure), essentiellement technique, au « prendre soin » (care), qui s'étale sur une plus longue période avec une dominante relationnelle, c'est toute la complexité de la position du soignant qui est synthétisé par ces deux notions » (C. Joannes, Psychologue clinicien) « Sous-estimer le travail de « care », du « prendre soin » revient à mettre en péril les possibilités curatives » Rothier Bautzer E., Entre cure et care, Les enjeux de la professionnalisation infirmière, Collection Fonction Cadre de santé, Gestion des ressources humaines, Edition Lamarre Care : relationnel, contextuel, humainement complexe et d’ordre processuel et développemental : valorise la personne, plus que la maladie Pour C. Gilligan et L. Kohlberg, le care comme souci du soi : « se définit par un souci fondamental de bien-être d’autrui et centre le développement moral sur l’attention aux responsabilités et à la nature des rapports humains » et « le care correspond à la traduction du concept heideggérien sorge, lequel signifie « souci » Pour P. Molinier, S. Laugier et P. Paperman (2009), le care comme acte de prendre soin d’un soi : « ce terme est à la fois un verbe d’action qui signifie « s’occuper de », « faire attention », « prendre soin », « se soucier de » et un substantif qui pourrait selon les contextes être rendu en français par soin, attention, sollicitude, concernement. » Pour la philosophe F. Brugère (2009), le care comme « ordinarité » et singularité : « La réflexion éthique s’inscrit dans des vies ordinaires chargées d’affects, d’histoires singulières et de relations complexes à autrui alors que la morale est du côté d’une abstraction qui tient dans un ensemble formulé de préceptes » Pour E. Noël-Hureaux (2015) : « La notion de care recouvre donc différents niveaux : individuel, relationnel, collectif et institutionnel. Elle est lisible en termes de relations, d’acteurs, de pratiques et de dispositifs. Caring : intégration du cure et du care dans une thérapeutique globale (bio- psycho-sociale), politique et institutionnelle « Le caring n’est jamais acquis une fois pour toutes, car il s’exerce dans un environnement qui peut parfois le bousculer et le négliger. Il y a donc toutes une dimension, autant personnelle qu’institutionnelle, à promouvoir pour que le caring puisse garder son humanisme fondamental. » (P. Svandra) Principes d’une philosophie du soin selon B. Pain 1) une culture du respect de la personne et de son histoire, de sa dignité, et de sa singularité ; 2) une manière d’être des professionnels au-delà d’une série d’actes ; 3) une valorisation de l’expression des usagers ; 4) un aller-retour permanent entre penser et agir ; 5) une démarche continue d’adaptation à une situation donnée. Quelques repères pour la mise en œuvre de ces dimensions à travers quatre grandes parties : 1) L’usager coauteur de son parcours : donner une réalité à la liberté de choix ; l’accompagnement de l’autonomie ; la communication individuelle et collective ; un projet d’accueil et d’accompagnement défini et évalué. 2) La qualité du lien entre professionnels et usagers : le respect de la singularité, fondement de l’intervention ; la vigilance concernant la sécurité physique et le sentiment de sécurité des usagers ; un cadre institutionnel stable. 3) L’enrichissement des structures et des accompagnements par toutes les contributions internes et externes pertinentes : travailler avec l’entourage et respecter les relations de l’usager avec ses proches ; l’articulation avec les ressources extérieures ; la promotion de l’expression et de l’échange des perspectives ; l’ouverture à l’évaluation et à la recherche. 4) Le soutien aux professionnels dans leur démarche de « bientraitance » : une promotion de la parole de tous les professionnels ; une prise de recul encouragée et accompagnée ; un projet d’établissement ou de service construit, évalué et réactualisé avec le concours des professionnels et garant de la « bientraitance ». 3 Vulnérabilité et (inter)subjectivité comme ALTERITE  L’éthique d’E. Levinas : Rencontre avec l’autre, l’ontologie n’est pas la première question (qu’est-ce qu’il est, son être), mais bien la question de l’éthique. L’autre c’est sa vulnérabilité. L’autre n’est pas un sujet de connaissance, l’autre n’est pas un objet (de représentation) que je pourrais connaître, pas observable à travers des propriétés ou des caractéristiques (pas de rapport de connaissance avec moi-même). Je ne peux le distinguer, je ne peux le discriminer ce qui est le cas si je le considère comme un objet. − L’éthique est première, le sujet est directement éthique, car directement responsable de toutes les subjectivités. L’ontologie et la connaissance sont secondaires. L’autre est autrement qu’être, le rapport à l’autre se joue en dehors de l’être, il est inconnaissable. − Le nœud du subjectif « se noue » dans une éthique de la responsabilité : la subjectivité est un « pour l’autre » et non un « pour soi ». Le sentiment de responsabilité fait la proximité avec la personne (indépendante de la proximité géographique) : Exemple du sentiment de culpabilité face au suicide d’un proche. Ce qui fait que je me sens engagé pour lui. La subjectivité (la personne) renvoie à une réalité non objectivable, à quelque chose qui nous dépasse, d’infini. − La personne n’est pas d’abord quelque chose, une propriété ou des caractéristiques observables : elle n’est pas objet de représentation, elle n’est pas alter ego, elle est résistance par sa vulnérabilité. Etablir une relation davantage dans une expérience symétrique. Empêcher de « pouvoir pouvoir » sur l’autre en tant que soignant. − La personne est d’abord « responsabilité pour autrui ». Se sentir responsable de l’autre de par sa vulnérabilité (se mettre à son service). Je suis responsable de l’autre, de par sa vulnérabilité, cette responsabilité m’incombe. Elle est première, avant même l’acte dont je pourrais être responsable, la responsabilité « va au-delà de ce que je fais ». « Je suis responsable de ce qu’il fait, de ce qui lui arrive, je suis responsable de sa responsabilité même… » et cette responsabilité fait notre proximité avec l’autre. Cela n’implique pas de lui dire ce qu’il doit faire ou non. Se sentir concerné par ce qu’on doit faire ou pas : exemple de l’euthanasie. 4 Philosophie : vulnérabilité et subjectivité narrative  Paul Ricoeur : Continuer la question de la relation à soi → PROJET d’EXISTANCE « Par le concept d’identité narrative, Paul Ricœur a su réintroduire une temporalité souvent négligée dans la question de l’identité personnelle et collective. Comportement, action des uns et des autres qui joue l’identité narrative.  Concept important et opérant qu’on rencontre beaucoup dans le cadre des stages. Lorsqu’on est face à un récit, une histoire de vie, on joue quelque chose de l’identité narrative. L’identité est quelque chose de dynamique qui s’élabore dans le rapport aux autres, à l’expérience et à soi-même. Ricoeur = interrogation de la relation à soi : elle peut se construire (co-construire) dans un projet de mise en intrigue / narration de notre vécu. Relation à soi → 2 rapports : 1) Immédiat : directement collé à soi. Rapport à soi-même peut être dans un rapport d’évidence / transparence / clairvoyance, je me connais, je sais qui je suis. Pas de doutes ou d’étonnement. = Notion d’IDEM (le même, identique à soi) → le QUOI (contenu, ce que nous sommes). 2) Médiation : envisager un rapport de distance par rapport à soi. Capacité à se remettre en question, être critique par rapport à soi-même pouvoir accueillir la critique des autres. Construire l’écart entre soi et soi. = Notion d’IPSE, qui est propre à soi-même, rapport de médiation par lequel on s’approprie soi- même → le QUI (qui nous sommes). Ipséité = rendre propre à soi quelque chose qui ne l’était pas forcément (elle peut se faire de pleins de manières différentes). Mouvement de réflexion. Exemples : trait de caractère, la gentillesse. Ipséité = toutes ces manières par lesquelles on a introduit de la distance entre soi et soi-même et qui nous ont permis de développer notre propre manière d’être gentil. Il existe selon Paul Ricoeur une manière de réflexivité particulière et intéressante car elle permet de construire encore notre identité qui est « l’identité narrative ». C’est une manière d’entrer en médiation avec soi-même pour se construire, se retrouver → le COMMENT (manière par laquelle on devient qui on est). Identité narrative = Comment ce que je suis (mon idem) devient qui je suis = liant entre IDEM et ISPEITE Exemple : rendre propre à soi une expérience dont on est détaché ou qu’on a subi. Le passé qui s’impose à soi via les traumatismes (événement qu’on subit) et qui détermine qui je suis en cristallisant mon identité. Il a tendance à diminuer la représentation qu’on a de soi (dévalorisation, baisse d’estime de soi). Si je garde ce rapport à ce trauma, les ouvertures futures risquent d’être diminuées (diminution de la puissance d’agir). 5 Processus thérapeutique : travail de résilience → permettre à des sujets de pouvoir considérer que le passé les caractérise en tant que personne diminuée (blessée, …) ou en rupture avec elle- même de pouvoir depuis le présent travailler sur des ouvertures qui vont nous permettre de comprendre qu’il est possible d’initier des relations ACTIVES. Considérer le passé comme une expérience vécue et lui donner activement un sens. Exemple : verbaliser le traumatisme, lui donner du sens en lui donnant des mots. On peut aussi partager cette expérience avec d’autres qui ont vécu une expérience similaire : partager. Se rendre compte que ce partage peut être utile à une autre personne. Passer d’un rapport au vécu qui s’impose à nous à un vécu qu’on va pouvoir signifier, partager et rendre utile à d’autre = notion de déplacement. Avoir un POUVOIR d’ACTION Relation aux autres : Dans l’identité narrative, il y a une distance entre SOI et SOI-MEME + une réflexion du rapport à l’AUTRE. Mon identité n’est pas déjà là et celle de l’autre n’est pas en lui – notre identité se construit à l’INTERVALLE de notre relation, elle se construit à l’intérieur de la relation. L’identité se construit en se disant, en se racontant. Elle se rencontre dans l’interstice / l’intervalle / « l’entre-deux » entre 2 personnes. Mon identité est toujours notre identité : je ne suis que dans le rapport avec qui je suis (et inversement). Nous sommes toujours dans le rapport aux autres. Exemple : cas particulier des personnes en situation de handicap qui, à l’âge adulte ont atteint une certaine autonomie. Lors du décès de leurs parents, ils sont susceptibles de perdre une partie de cette autonomie. Comment accompagner cette personne face à son deuil (perte d’autonomie + perte des parents) = phénomène récent. Mesure de la teneur éthique : Rappels sur l’identité narrative : Raconter = se donner l’occasion de construire l’intervalle entre nous (idem) et nous-même (ipsé). Cela peut se faire seul ou à plusieurs. Générer, créer des points de vue sur notre existence qui n’étaient pas forcément préexistants. Depuis ces points de vue on peut revivre des événements selon une signification, une appropriation différente de ce qu’on a vécu auparavant. Lorsqu’on génère ce point de vue, on se donne l’occasion en tant que sujet (ou dans une intersubjectivité – plusieurs sujets) d’adopter une perspective sur notre existence – adopter un point de lecture / de visibilité sur notre existence qui nous apparaît de façon unifiée selon la trame de l’histoire qu’on en donne. Adopter ce point de lecture va nous permettre de pouvoir regretter ou apprécier sa vie. Estimer que sa vie = expression d’1 REUSSITE ECHEC 6 Adopter une posture de lecture (un regard, un point de vue) par rapport à sa vie = prendre position par rapport à son existence et pouvoir être déçu, reconnaissant, gratifié, valorisé, … Ce point de vue est insubstituable / irremplaçable. On est témoin de son existence (subjectivité) Elle procède que le soi n’est pas un objet mais une intention. La relation à nous-même n’est pas un processus d’objectisation, mais la traduction d’une relation intentionnelle à nous-même. Rapport d’intention, de désir, de volonté. Nous avons par rapport à nous-même, des objectifs, des projets, des réalisations. Ce qui rend possible l’identité narrative : o La réflexivité, tension, dynamique entre l’idem et l’ipsé. o Cette réflexivité est possible parce que le soi est dans un rapport intentionnel avec lui- même. Nous avons pour nous-même un projet = rapport d’externalisation, de réalisation. Cela va s’inscrire dans un rapport de temps, celui de la narration / du récit. Philosophie et herméneutique : identité narrative, raconter la vulnérabilité et la souffrance : J-C Ameisen : identité narrative et éthique des soins selon la perspective de P. Ricoeur Vivant jusqu’à la mort ?  Notion du regard que portent les accompagnants dans les soins palliatifs. Le fait de savoir, de sentir que la vie va finir consiste à reporter sur les survivants cet amour de la vie dont on pense qu’on ne va plus pouvoir le faire vivre. Allusion à Jorge Semprun 1) Il revient plusieurs fois, la notion de transfert, du report sur les autres, sur ceux qui entourent. Le soignant est-il capable d’accepter ce report, ce transfert, cet amour de la vie qui est reporté ? 2) Notion d’être seul à mourir parce qu’on est toujours seul à vivre sa mort, mais qu’on peut mourir accompagné (pas seul). Différence entre le concept d’agonisant selon Ricoeur → 2 regards : celui qui est en train de vivre jusqu’à la mort = regard qui s’attache à l’accompagnement celui qui est vu comme le moribond (de l’extérieur par l’observateur comme étant bientôt un mort et non comme étant vivant jusqu’à la mort, mais étant déjà un mort) = Regard qui exclut déjà la personne même si elle est encore en vie. Ricoeur dit que ce regard extérieur qui constate / anticipe, mais qui n’accompagne pas confond la personne qui va mourir avec les morts et avec la mort. Ce regard fait peur à P. Ricoeur. La réflexion de « vivre jusqu’à sa mort » ou « être déjà parmi les morts ou dans la mort » peut se transposer à la question de la maladie : La personne qui est en train de vivre sa maladie Où la personne est un ou une malade qu’on voit déjà à travers la maladie Même réflexion par rapport à une personne qui vit une situation de handicap : Est-elle une personne handicapée parmi les autres Ou est-elle une des figures d’une espèce d’essence abstraite qu’est le handicap dans laquelle le regard la rejette ? Ce passage interroge profondément dans ce qu’il appelle l’accompagnement = la forme la plus proche de ce qui est impossible : le partage. 7 La question du REGARD se pose, car le geste peut aider à vivre, mais le regard peut déjà commencer à tuer alors qu’on est encore vivant. Le regard de la science selon Martin Buber fait de celui qui est regardé un objet d’étude. Un regard performatif, qui peut avoir un effet, qui peut modifier la façon dont se vit une personne malade, handicapée ou proche de la fin de vie. 1) Ce n’est pas seulement le manque de compassion (qui n’est pas la pitié, mais souffrir avec, se battre avec l’accompagné), mais il y a une forme d’indifférence qui peut exercer un effet extrêmement nocif. 2) Le second aspect relate l’importance qu’il attache à cette identité narrative = l’identité ne se construit qu’en se disant (il n’y a pas d’identité avant qu’elle ne soit dite). Il n’y a pas une identité qui est dite mais un travail permanent de l’identité qui se fait et se défait en permanence. Elle est en elle-même son facteur d’instabilité (ce que nous disons change en permanence). Le concept de « médecine narrative » est important car il va permettre à la personne d’incarner son histoire pour qu’elle soit perçue au mieux par le soignant, mais pour qu’elle puisse au mieux s’approprier, dans cette relation, l’épreuve qu’elle est en train de vivre.  Théâtre du vécu : il y a plusieurs étapes, plusieurs formes d’identités narratives qui s’emboîtent les unes dans les autres et qui se modifient. On demande aux patients qui le souhaitent d’écrire leur histoire pour ensuite la mettre en scène avec des acteurs professionnels pour qu’ils puissent ensuite assister à la pièce de théâtre. Ce processus favorise la construction, la déconstruction et la reconstruction de l’identité narrative qui est une identité émergente. L’anamnèse est le récit que le patient fait de sa maladie. Il est considéré comme quelque chose de figé. Mais l’anamnèse n’est pas quelque chose qu’on met dans un dossier, c’est quelque chose qui se reconstruit en permanence.  Ce concept peut être transposé dans le projet de vie qu’on écrit un jour, qu’on considère comme figé et qu’on va se condamner soi-même à vivre. Résonnance profonde du « je » et du « tu » de Buber sur le regard extérieur de la science. L’espace entre 2 personne qui se construit est plus important que les 2 personnes elles- mêmes. C’est dans l’espace de le relation qu’émerge réellement la personne. On entre véritablement en ETHIQUE quant à l’affirmation par soi de la liberté s’ajoute la volonté que la liberté de l’autre soit, je veux que ta liberté soit. Liberté collective = ma liberté + la liberté de l’autre. La liberté de l’un permet à la liberté de l’autre d’émerger et réciproquement. La réciprocité fait émerger le caractère insubstituable de l’autre c’est-à-dire que ce qui est échangé est à jamais singulier. Visée éthique des soins : souci de soi et de l’autre. Parler du tiers, idée d’institution. L’accès aux soins : notion de collectivité et intégration de ceux qui ne sont pas intégrés dans la relation. 8 Définition OMS : La spiritualité est un besoin = le besoin d’être reconnu comme une personne, le besoin de solidarité et de relation avec ses proches, le besoin de relire sa vie et faire lien entre les événements, le besoin de quête de sens, le besoin d’espoir, le besoin de se déculpabiliser, de se réconcilier, de pardonner et de se faire pardonner, le besoin de croire à la continuité, de laisser une trace, le besoin de s’ouvrir au divin et à la transcendance, … J. Pillot : "Le questionnement (de la personne en fin de vie) sur le sens de cette expérience douloureuse ouvre un questionnement (sur elle-même), sur sa vie, comme un dernier accouchement de soi-même. La personne cherchera le fil conducteur de sa vie, réfléchira sur ses blessures, ses échecs, et sera lancée dans un processus éprouvant qui peut être créateur en même temps. Se relier à son histoire, à la trame de sa vie, peut conduire certains à une autre quête d’un sens plus universel, religieux ou philosophique, afin de dépasser leur mort comme fin individuelle. » (Une psychiatre : Aspects psycho-relationnels de la fin de vie. J. Pillot. La Revue du Praticien, 1999; 49:1057-61) Quelques chiffres : Lors d’une visite courante au cabinet médical, dans 33% des cas, les patients aimeraient que le médecin les interroge sur leur spiritualité. Lorsque le patient est hospitalisé pour une raison qui n’est pas trop grave, on en vient à 40%. Lorsqu’ils sont près de mourir, 70% de ces patients aimeraient que le médecin aborde le sujet. Dans une enquête multicentrique sur 1824 patients, P. Corrigan propose que religion et spiritualité sont associées au bien-être psychologique et à une diminution des symptômes psychiatriques, et il constate des effets positifs (espoir, amélioration des symptômes, acceptation de la maladie, …) chez environ 90% des patients schizophrènes. La spiritualité selon l’OMS n’est pas reliée à des aspects religieux, mais davantage à des questions de reconnaissance = reconnaître la personne en tant que personne (dans d’autres dimensions que simplement un diagnostic). Permettre à la personne d’être autre chose que sa pathologie. Si on lie l’identité narrative à cette spiritualité comme besoin de reconnaissance, cette identité narrative devra soutenir la possibilité pour les sujets de se rouvrir dans toutes les dimensions de leur être et au-delà des caractérisations que ces personnes pourraient recevoir de la part de l’une ou l’autre institution. Avoir un choix de détermination par exemple par rapport à une psychopathologie. Ne pas définir la personne uniquement à travers le spectre de cette psychopathologie. Exemple : notion de spiritualité dans les soins : pouvoir prendre soin, accompagner dans la relation. Soins psychosociaux et approche psychosociale. → Le besoin de spiritualité se traduit par le besoin de reconnaissance, mais aussi par un besoin de solidarité, de communauté (se sentir proche de personnes qui vivent la même chose). Notion du pardon : pouvoir pardonner et se pardonner. C’est adopter des points de vue par rapport à son existence. Comprendre qu’à un moment donné où on adopte une perspective sur son existence : on regrette certains événements (notion de culpabilité), mais on peut se pardonner et accepter. Notion de réconciliation avec soi-même ou avec des proches. Enjeu dans les soins palliatifs. Importance de l’accompagnement. Conclusion : Le soi = une intention par laquelle l’être se rend insubstituable. Question de la spiritualité et de la reconnaissance, notre être ne peut être réduit à notre handicap, pathologie, … Un être = ouverture à soi, une construction de sens = notion dynamique. 9 Janine Pillot (CHU Grenoble - développement des soins palliatifs en France). Elle met en avant l’importance de l’aspect psychorelationnel de l’accompagnement du questionnement en fin de vie. Adopter une position d’ipséité de réflexion par rapport à sa vie en la racontant dans l’identité narrative (relire sa vie). Au stade de la fin de vie, les expériences dispersées, chaotiques, sans lien apparent les unes avec les autres deviennent des expériences qui peuvent amener à un travail d’unification (recherche d‘unité dans notre vie là où le désordre paraissait). Et ce, grâce à une rétrospective faite sur son existence (probablement la dernière), une réflexion sur ses blessures, ses échecs. Recherche d’une TRAME afin de comprendre notre vie de manière plus unifiée à travers un dernier point de vue. Elle voit le questionnement de fin de vie comme un dernier accouchement de soi-même = processus éprouvant. Dimension de LIRE ou RELIRE sa vie en adoptant une perspective narrative afin de s’approprier un vécu, de signifier un vécu, de donner du sens à ce qu’on vit. On le fait en le partageant à une personne. Nommer, mettre des mots sur ce vécu, cela peut aussi se faire via l’écriture. Narrativité = faire sien d’éléments qui n’étaient pas vraiment les vôtres. David Lebreton (psychologie / anthropologie / philosophie) – « Entre douleur et souffrance, une approche anthropologique ». Il essaie de comprendre le rapport entre la douleur et la souffrance. La souffrance ne serait- elle pas une manière de s’ouvrir à la douleur pour la signifier ? Il propose une distinction entre la souffrance et la douleur : la douleur est quelque chose que l’on souffre et la souffrance est une manière de donner du sens à sa douleur Exemple de la mutilation : hypothèse, le fait de marquer son corps (de le blesser) serait une manière de s’approprier, de se rendre accessible, de rendre relatif à soi en inscrivant dans sa chair une douleur qui serait trop diffuse / ambiguë / trop peu palpable. Donner un sens à cette douleur, la rendre accessible ? Exemple d’un trauma : on peut « souffrir la douleur d’un trauma » mais commencer à signifier le trauma, lui donner du sens, pouvoir le travailler, l’intégrer à mon processus développemental / identitaire. = passer d’une position de victime du trauma à une position d’acteur (aide des soignants prépondérante dans ce processus). « l’identité narrative » selon Lebreton : manière par laquelle nous adoptons une position qui nous permet d’agir, de se retrouver dans une condition d’action par rapport à un vécu qui pourrait nous échapper, ne pas être palpable → le conscientiser, le rendre propre à soi. Philosophie et existence : la souffrance, la douleur et la mort Schopenhauer est un philosophe qui initie le PESSIMISME en Europe au 19è siècle. → Comprendre les enjeux en termes de soins selon la philosophie d’Arthur Schopenhauer. → Comment réfléchir le soin et l’accompagnement de la souffrance et de la fin de vie. Selon A. Schopenhauer, la vie est essentiellement souffrance et douleur car elle ne peut jamais assouvir son désir de vivre, elle en est toujours animée, mais rien ne peut jamais véritablement le satisfaire définitivement. Cet état de fait produit la souffrance existentielle. Selon A. Schopenhauer, la souffrance est l’occasion d’un apprentissage et d’un mûrissement. Elle nous permet de mesurer la profondeur, le sérieux et la teneur de la vie humaine, car elle est plus réelle que tout autre chose : elle est métaphysique. Il ne faut donc pas la fuir, la craindre, mais la vivre et l’éprouver car elle nous offre un enseignement. 10 Selon A. Schopenhauer, la souffrance ouvre également à la compassion (pâtir avec) et donc à la relation. Chaque être humain connait la souffrance et sait qu’elle ne peut être évitée dans la vie, mais chaque être humain sait également que tous les autres êtres humains se trouvent dans la même condition de vulnérabilité (vulnérabilité universelle). Cette considération ouvre à la compassion des êtres humains en souffrance actuelle ou potentielle. Il propose une figure intéressante de la vulnérabilité : elle apparaît comme une disposition à la blessure, comme la possibilité d’être blessé. Cette définition intéressante car elle permet de rejouer les relations humaines et de concevoir autrement la position soignant-soigné. Eviter de verser dans une relation d’ordre hiérarchique qui ne serait pas toujours productive et efficace par rapport à la prise en charge (prise en soins) du patient. Dans le cadre des soins, cela signifie que le soignant a un rôle à jouer dans l’accompagnement de cette souffrance, dans son expression, sa verbalisation, son identification, surtout, dans la possibilité de son partage. Vulnérabilité : soignant et soigné sont des êtres humains, l’un et l’autre sont vulnérables. = humain La possibilité d’être blessé, dans le passé / présent / futur, individuellement / collectivement peut recouvrir la forme d’une souffrance. La souffrance selon Schopenhauer peut recouvrir différentes dimensions (on en a vu 3). → 2 focales à toujours considérer ensembles qui sont complémentaires mais distinctes : le monde comme volonté et représentation.  La volonté : est une conscience intime et immédiate de nous-même, c’est un sentiment vital d’existence, le sentiment d’exister lui-même, c’est un désir de vivre, une sorte d’attraction immédiate pour la vie. C’est le monde de notre intériorité (vie intérieure). La volonté est donc éminemment subjective et elle est partagée par toute l’humanité. C’est une manière de perception intérieure de toute chose. Elle représente une pulsion aveugle de vie, un désir incessant d’être en vie, d’éprouver la vie = appréhender l’objet (ou le corps) intérieurement, immédiatement.  La représentation : est une conscience médiate et extérieure du monde et de notre corps. C’est une connaissance qui comprend par conceptualisation et par catégorisation. Elle a une tendance plus objective. Nous sommes un être qui connaît, qui se représente les choses (on se représente dans l’espace et dans le temps grâce notre cerveau et notre système nerveux ). Le corps apparaît comme un objet dans l’espace et dans le temps. Mon propre corps est un corps représenté comme un objet de représentation qui m’apparaît dans l’espace et dans le temps (le corps matériel) et en même temps il m’est donné immédiatement de l’intérieur. Exemple : si on ne se voit que de l’extérieur on interprèterait nos membres comme des corps étrangers à nous.  La souffrance peut également être appréhendée intérieurement et extérieurement. Exemple : EVS (échelles de valeurs subjectives), évaluation de la douleur entre 0 et 10. Le patient va objectiver un ressenti intérieur qui est subjectif. Rapport complémentaire entre l’interne et l’externe. 11 RAPPORT à la MORT : « Excepté l’homme, aucun être ne s’étonne de sa propre existence ; c’est pour tous une chose si naturelle, qu’ils ne la remarquent même pas. La sagesse de la nature parle encore par le calme regard de l’animal ; car chez lui, l’intellect et la volonté ne divergent pas encore assez, pour qu’à leur rencontre, ils soient l’un à l’autre un sujet d’étonnement. Ici, le phénomène tout entier est encore étroitement uni, comme la branche au tronc, à la Nature d’où il sort ; il participe, sans le savoir plus qu’elle-même, à l’omniscience de la Mère universelle. – C’est seulement après que l’essence intime de la nature (le vouloir-vivre dans son objectivation) s’est développée, avec toute sa force et toute sa joie, à travers les deux règnes de l’existence inconsciente, puis à travers la série si longue et si étendue des animaux ; c’est alors enfin, avec l’apparition de la raison, c’est-à-dire chez l’homme, qu’elle s’éveille pour la première fois à la réflexion ; elle s’étonne de ses propres œuvres et se demande à elle-même ce qu’elle est. Son étonnement est d’autant plus sérieux que, pour la première fois, elle s’approche de la mort avec une pleine conscience, et qu’avec la limitation de toute existence, l’inutilité de tout effort devient pour elle plus ou moins évidente. De cette réflexion et de cet étonnement nait le besoin métaphysique qui est propre à l’homme seul. L’homme est un animal métaphysique. » (SCHOPENHAUER. A., Sur le besoin métaphysique de l’humanité, op. cit., pp. 7-8.) La subjectivité et la vie sont consubstantiels : lorsque la vie prend conscience d’elle-même elle le fait à travers une subjectivité. Lorsque la subjectivité se conscientise elle le fait à travers les mouvements de la vie. L’un et l’autre se composent → interdépendance. Selon Schopenhauer, la souffrance est un vécu, une expérience de vie. La douleur n’est pas à craindre et encore moins à éviter. → Il y a dans la souffrance, un apprentissage, une maturation, un murissement qui peut se faire à travers l’expérience de la douleur. Le soin est déterminant, car dans quelle mesure une souffrance qui n’est pas accompagnée (par un soignant ou des aidants proches) peut-elle faire l’expérience d’elle-même ? Avons-nous besoin des autres pour que la souffrance devienne une occasion de s’expérimenter, d’expérimenter et d’apprendre quelque chose dans la vie ? En tant que soignant il faut être attentif au fait que ce n’est pas toujours le moment d’apprendre de la souffrance : il faut respecter cette subjectivité. Il y a un instant pour chaque moment de vie et un respect à avoir par rapport à cela. Chacun souffre à sa manière de façon unique et singulière. Existentielle Dimensions de la souffrance : Métaphysique Universelle 1) Existentielle Pour lui, la vie est essentiellement souffrance et douleur car elle ne peut jamais véritablement assouvir le désir de vivre qui l’anime toujours. Rien ne peut définitivement satisfaire ce désir de vivre. Pulsion aveugle qui cherche à se réaliser et rien ne peut véritablement jamais la satisfaire. Notion de désir insatiable. Une fois satisfait, un nouveau désir va apparaître → conception Bouddhiste. Selon Schopenhauer le désir est lui-même la cause de la souffrance. Si on veut se libérer de ce désir, il faut pouvoir l’annihiler. Cet état d’insatisfaction permanent nous dispose à une sorte de souffrance. La souffrance est existentielle car l’état d’insatisfaction permanent (ou cet état de satisfaction qui ne peut jamais durer) nous dispose dans notre existence à une sorte de souffrance. La souffrance est essentielle à l’existence. 12 2) Métaphysique La souffrance est l’occasion d’un apprentissage et d’un mûrissement de la vie, de son expérience. Lorsque nous souffrons (selon Schopenhauer), nous mesurons la profondeur, la teneur de la vie humaine, toute sa gravité. Pour lui, dans la souffrance, il y a quelque chose de plus réel que tout autre chose, on peut mesurer sa profondeur. Elle n’est pas à fuir ou à craindre. Pour Schopenhauer, la vie a besoin de nous pour se conscientiser. Quand nous voyons / craignons la mort, c’est la vie qui, à travers nos yeux de chair, prend peur d’elle-même car elle voit à travers nous sa propre fin = conditions métaphysiques du 19è siècle qui ont encore une certaine teneur aujourd’hui. Il faut qu’on puisse travailler sur nous de telle sorte qu’on puisse accueillir la souffrance comme l’occasion d’un enseignement : « apprendre à moins désirer la vie dans ce rapport d’affirmation d’un désir ». Les moments de douleur et de souffrance ont tendance à nous plonger dans des profondeurs qui nous amènent à jeter sur la vie entière une perspective (là où d’autre émotions s’y prêtent moins). La teneur métaphysique nous propose qu’il y a quelque chose de très réel dans cette souffrance-là (pas spécialement claire ni identifiable). Cela nous plonge dans la profondeur de l’existence et d’éprouver toute la gravité. 3) Universelle (elle offre une compassion universelle pour l’ensemble des êtres vivants) Il existe une universalité de la souffrance : tous les êtres vivants ont connu, connaissent et connaîtront la souffrance. Quand on rencontre d’autres personnes, la souffrance peut être passée, actuelle ou potentielle. Cette reconnaissance universelle d’une souffrance propre aux êtres vivants (humains, animaux) chaque être humain se trouve dans une même condition de vulnérabilité. Vulnérabilité Compassion Ouverture vers universelle universelle Importance pour les soignants (= corps médical / aidants proches / famille) afin de comprendre que (dans cette philosophie) la souffrance est un lieu potentiel d’expérience et d’épreuve valables qui vaut la peine d’être vécu. L’idée n’étant pas d’imposer la souffrance au patient sous prétexte qu’elle serait pour lui l’occasion d’un apprentissage. Mais lorsqu’un patient vient avec l’expression d’une souffrance c’est de mesurer la réalité et l’importance que cela pourrait avoir pour lui et de répondre à un besoin fondamental. Si ce besoin se trouve dans le cadre de la mort, il peut être en lien avec la spiritualité (besoin reconnu par l’OMS). C’est un besoin de se relier à sa personne et à sa vie. Besoin d’être reconnue en tant que personne au-delà de la maladie. Connexion avec le besoin de laisser une trace, de continuer au-delà de son existence. 13 COLLABORATION AIDANTS PATIENT SOIGNANTS COOPERATION Aider le patient à : Identifier Comprendre Verbaliser Exprimer SOUFFRANCE L’expression de la souffrance n’est pas toujours verbale. Elle peut se faire de différentes manières selon la personne, par exemple via :  L’art  Le corps (rigidité / tensions)  Des comportements  L’expression de la souffrance Il est fondamental de permettre au patient de partager sa souffrance afin qu’il ne souffre pas seul. Il y a quelqu’un pour écouter ma souffrance. Pouvoir la partager avec des pairs qui souffrent de la même pathologie. + importance de prendre en charge un patient afin de l’autonomiser. Lien entre la philosophie de Schopenhauer et le monde des soins : permettre aux soignants et aux soignés d’entrer dans une relation qui favorise l’expérience de la souffrance :  S’approprier une souffrance, lui donner du sens.  S’approprier un trauma pour passer de la position de victime à la position d’acteur. Travail du deuil (pas spécialement en lien avec la perte d’un proche, mais qui peut être lié à un changement physique majeur) : de sa vie antérieure, de son corps, d’une image. Accompagnement du patient afin de l’intégrer dans un processus, une dynamique de construction, de développement, d’intégration, de résilience. Conclusion : Lien avec la philosophie de Janine Pillot afin que l’expérience du rapport à la mort soit une expérience vivante. Ne pas renvoyer la personne à la mort alors qu’elle est encore vivante (Ameisen/Ricoeur). Lui permettre de ne pas passer à côté de ce qu’elle vit, d’accueillir l’événement et de se permettre de se laisser altérer par l’événement. = Travail collectif, interindividuel, interpersonnel où on essaie de comprendre ce qu’il se passe, conscientiser ce qui est en train de se jouer. Permettre au patient de dire dans une relation ce qu’elle ne dit pas dans l’autre (lien avec l’identité narrative et la singularité des relations). 14 Article de Michel Dupuis = réflexion (métaéthique) sur les soins de manière générale Dans un contexte scientifique et culturel mouvant, l’éthique clinique et l’éthique organisationnelle des soins de santé ont un rôle essentiel à jouer mais elles ont besoin d’une métaéthique qui vérifie la justification de leurs concepts et de leurs procédures. Une telle métaéthique permet d’identifier une compétence de base - l’empathie dans un sens précis - et un métaprincipe qui régule l’usage des divers principes d’éthique. 2 NIVEAUX D’ETHIQUE :  L’éthique clinique : bien enracinée dans la tradition = l’éthique de la relation médicale soignante.  L’éthique organisationnelle : plus récente, qui reste largement à investir = l’éthique de l’organisation de ce travail. Chacun sait aujourd’hui que le discours scientifique est scientifique notamment parce qu’il est systématiquement falsifiable, c’est-à-dire que ses significations et sa validité sont systématiquement mises en question et vérifiées. Ce qui vaut pour les énoncés scientifiques vaut également, et tout particulièrement, pour les discours normatifs qui proposent ou imposent des jugements de valeurs, et qui permettent ou interdisent certains comportements et certains gestes. Bien qu’un jugement éthique soit toujours susceptible d’être remis en question, il importe de vérifier le fondement, ou les fondations, de nos démarches d’éthique clinique et d’éthique organisationnelle = réflexivité professionnelle. 1. L’appel externe à une méta-bioéthique : = facteur qui en appelle à un renouvellement du fondement de nos analyses éthiques. On se pose la question de la pertinence des fondements de la philosophie ancienne qui n’est plus adaptée aux techniques actuellement utilisées en médecine (IVG, PMA, …). Importance de la prise en compte de nouveaux modèles ontologiques moins connus (Whitehead). Il importe donc, face à la nouveauté des problématiques, d’interroger la capacité de nos outils éthiques classiques : sont-ils à même d’éclairer les pratiques, de baliser les chemins, de mettre en évidence les conflits de valeurs et les conflits d’intérêts, etc. ? C’est bien un appel à une réflexion d’un type supérieur (n + 1), en l’occurrence à une métabioéthique. = évolution des mentalités en lien avec l’évolution technologique 15 2. L’appel interne à une méta-bioéthique : Notre époque se caractérise par une fluidité ou une « liquidité » marquée des états de choses, de plus en plus « plastiques », modifiables, transformables à souhait. → Déracinement subjectif (selon Cl. Laroche). La stabilité, la fixité et l’ancrage psychologico-émotionnel étant affaiblis, une espèce de submersion devient possible, où l’intérieur est envahi par l’extérieur et où - voilà ce qui m’occupe ici - les manières de sentir, de ressentir, de juger et d’évaluer deviennent à leur tour flottantes, discontinues, imprévisibles. Dé-territorialisation et dé-différenciation iraient ainsi de pair, en produisant une véritable dé-subjectivation. Être sujet, c’est être limité activement et passivement : limité au sens de la finitude d’un être fini, le sujet est aussi limitant pour soi (se tenant, se maintenant, se retenant ; c’est une forme de respect des autres) et pour les autres (limitant leur emprise sur lui et, par exemple, sa capacité et sa liberté de penser par lui- même ; c’est une forme de respect de soi). L’estompement des frontières et des alternances (attestées par des décisions de type « stop ou encore », « ici ou là », « dedans ou dehors », etc.) serait à la fois cause et conséquence d’une fluidité, d’un flux continu d’informations ou d’éléments dont plus aucun ne fait obstacle ou stase au processus. Pour changer d’image, je dirais que nous serions dans une espèce de désert sans dune, où ne se produit plus aucun événement, au sens de ce qui fait « date » ou point d’arrêt, ou point de référence, plus aucune valeur, au sens de ce qui compte vraiment et pour longtemps, plus rien qui retienne le regard en l’empêchant de voguer au loin, de silhouette en silhouette. Les plus pessimistes des analystes associent cette fluidité à l’hypo-attention ou même à une inattention généralisée, conçue comme une incapacité contemporaine à fixer, à se fixer, à se concentrer. Nous revoilà au cœur de notre question. En matière d’éthique, cet état de fait signifie une plasticité inouïe des évaluations, des balises et des jugements. A propos d’une situation donnée, pratiquement toute lecture (ou comme on dit souvent, relecture) éthique est possible, audible, tolérable. Plus problématique, le nivellement de ces lectures semble induire non plus leur relativité (qu’il ne faut pas contester) mais leur validité même : si tout se vaut plus ou moins, qu’est-ce qui importe ? Autrement dit, la cohérence et la cohésion des lectures deviennent moins importantes. L’idée d’une règle générale devient floue et de toute manière suspecte : on dirait que le sens ancien du relativisme moral, lié au jeu des cultures et des traditions collectives différentes, s’est transformé en un sens moderne, selon lequel le relativisme s’impose à l’intérieur même des options individuelles, comme s’il n’y avait plus de cadre de référence personnel stable. La question « Qu’est-ce qui compte pour moi ? » ne trouverait plus de réponse durable. → Il importe de prolonger cette analyse en dégageant plus finement un effet particulier que j’estime positif, et un effet général que j’estime négatif. 16 Positive : la conséquence d’une certaine flexibilité dans les organisations de soin car elle rend possible la continuité des services dans le temps, y compris durant ces moments particuliers auxquels correspondent ce qu’on nomme des horaires « inconfortables » de prestations. Négative : une délégation de tâches mal pensée, ou pensée uniquement en fonction des coûts financiers sans égards pour la qualité et la spécificité des actes ainsi délégués. On détecte ici, dans cet aspect négatif de la flexibilité, ce qui se dévoilait déjà plus haut : une forme de dé-différenciation, une dé-territorialisation relative des compétences, une sous-évaluation des histoires individuelles, des cultures de métiers, etc… Autrement dit, une neutralisation des repères individuels - et nous retrouvons le fil de notre perplexité sur les analyses éthiques pratiquées dans ces conditions. La prise de recul ou la distanciation, la mise en perspective, la contextualisation : autant d’exercices indispensables à l’analyse éthique d’une situation en matière de soins de santé. Autant d’espaces, de limites et de frontières à reconnaître et, le cas échéant, à transgresser. Quand P. Ricoeur insistait sur le rôle de l’imagination en matière d’éthique, alors que le rôle de la volonté y est survalorisé, c’est précisément à ce genre de mouvements mentaux qu’il pensait : il s’agit de changer de place, de point de vue, de vision… sans aucun doute, mais selon une fantaisie régulée, et pas n’importe comment. Pas d’après un caprice ou une certitude qui dure un instant. Cette menace d’une flexibilité insensée ou désorientée, c’est donc ce que je reconnais comme un facteur interne à nos pratiques de réflexion éthique, qui en appelle à une métaéthique, c’est-à-dire à une régulation de nos manières de réguler, une réflexion sur nos manières de réfléchir… Dans le contexte d’urgence généralisée, objectivement présente et peut-être mal contrôlée ou subjectivement ressentie et peut-être survalorisée, on comprend aisément que le questionnement éthique trouve parfois difficilement sa place et son moment - alors que dire d’un questionnement supplémentaire, métaéthique ? Je voudrais suggérer que la métaéthique produit des effets de deux types : 1) des effets de déconstruction et de mise en question des procédures courantes 2) des effets d’instauration ou d’installation de procédures et de méthodes, de valeurs et de principes, innovants en matière de réflexion éthique. On peut donc dire qu’il existe quelques « cibles » visées et des « bénéfices » produits. 17 Pour s’introduire dans les pratiques quotidiennes des soins, et surtout pour y demeurer vivante, la réflexion éthique a dû s’adapter aux logiques techno-scientifiques et à leur langage assez formalisé, qui repose sur des données scientifiques et techniques certainement jamais de droit indiscutables mais le plus souvent de fait indiscutées. Réflexion / réflexion éthique → importance de prendre de la distance et de s’interroger ! (aussi en matière d’EBP…) 1) Le questionnement métaéthique visera les méthodes et les langages utilisés pour ce travail d’éthique. Utilisation d’outils pratiques (faciles et rapides) pour des acteurs spécialisés dans leur discipline : Grilles Principes Tables d’orientation … → ce n’est pas l’éthique ! Permet d’aller vite ?!? D’où la belle tentation d’établir des systèmes d’analyses et de décisions éthiques sur le modèle d’autres systèmes d’aide à la décision. Malheureusement, chez bien des professionnels de bonne volonté et qui manifestent un vrai souci de l’éthique dans leur travail de soignants, l’analyse éthique se résume à l’utilisation devenue machinale de grilles, de codes, d’outils de description. → Contradiction de l’approche méta-bioéthique des manières de faire qui réduisent le travail d’éthique à un formalisme pratique. Quelle que soit l’urgence de l’agir, elle en appelle à une « explication » - éventuellement donnée dans l’après-coup. Elle force à prendre un certain recul par rapport au processus décisionnel. Elle ouvre un espace de réflexion qui permettra de mettre en lumière le jeu des accords et des désaccords entre les acteurs, et la logique de la prise de décision finale. 2) Le réductionnisme biologique à l’œuvre dans nos perceptions de la vie vécue dans la maladie, la douleur, l’inconscience, la fin de vie.  Importance du gain de la déconstruction.  Importance de l’analyse critique de la manière dont les professionnels pratiquent la réflexion éthique sur le terrain : bénéfique clinique ?  Imposition d’une certaine vision naturaliste de la « vie » par la biomédecine contemporaine (être). Spontanément, la bioéthique et l’éthique des soins se trouvent du côté de la biologie.  Quid d’une vie vécue, soufferte, espérée ou refusée par les patients ou par leurs proches ? Les considérations « existentielles » ou « psychologiques » ne sont pas complètement absentes, mais la question du sens de tout cela n’est pas toujours clairement posée. Qu’est-ce que le sens d’une vie naissante ou d’une survie qui se prolonge ? Dans quelles conditions une survie est-elle insensée ? Et pour qui ? Il faut (r)éveiller nos éthiques des soins à la prise en compte de cette dimension d’une « vie en existence », où la mort, la maladie, la reproduction, la prévention, le développement ne se réduisent pas au seul aspect biologique.  Quid des « besoins spirituels » qui vont dans ce sens de la globalité du vécu. 18 L’empathie signifie :  tantôt une vague contagion affective, involontaire et quasi automatique,  tantôt un processus cognitif qui suppose une attention au corps de l’autre (que je parviendrais à lire ou à déchiffrer pour percevoir ce que l’autre vit, son émotion, son état mental, quelque chose de son expérience intérieure que je ne peux pas percevoir comme je perçois un objet extérieur, mais que je peux « apercevoir » à travers sa mimique, sa posture, la manière dont son corps se dispose. En matière d’évaluation de la douleur, ce type d’attention et d’observation est largement connu.) C’est le fondement même de la socialité, des relations entre les vivants (c’est le sens de l’autre que moi, qui constitue une partie de mon environnement et avec qui j’ai la possibilité d’entrer en relation).  Fondement de la relation soignante : c’est une condition fondamentale, transcendantale (condition de possibilité, des pratiques soignantes).  Archi-compétence humaine qui devient une compétence de base qui rend possibles la plupart des autres compétences de l’être humain, les rapports intersubjectifs en général, la vie érotique, les relations spontanées et professionnelles de soin. Miser sur l’empathie = c’est miser sur :  la communicabilité plus ou moins étendue des vécus de chacun,  le vouloir-dire de la personne à comprendre  le vouloir-comprendre de la personne qui vit l’expérience d’empathie. Nos métiers de soin sont fondés largement sur ce pari, mais cela n’implique pas pour autant que cette empathie soit toujours éthiquement justifiée, ni non plus qu’elle soit forcément motivée par une visée altruiste. (On sait bien que les stratégies de chasse, de séduction et de manipulation utilisent ce type de connaissance empathique…) Il existe une foncière neutralité axiologique de l’empathie au sens strict : celle-ci n’est ni forcément bienveillante, ni forcément malveillante, et c’est peut-être logique pour une archi- compétence, qui appartient au répertoire de comportements de survie le plus ancien - où la conscience morale n’est guère éveillée sans doute. L’empathie n’est pas la sympathie → c’est une compétence de fond, ouverte sur le bien comme sur le mal - je dirais la même chose du sens clinique, fait d’observation attentive des « signes » corporels notamment, et qui n’est pas « en soi » bientraitant. 19 Le principisme = l’une des formes d’éthique les plus connues des professionnels → Approche axée sur 4 principes intermédiaires : 1) Le respect de l’autonomie 2) La non-malfaisance 3) La bienfaisance 4) La justice Cette manière de présenter l’éthique en quatre principes aisés à comprendre et à appliquer est apparue aux États-Unis à la fin des années 1970. Depuis près de quarante ans, l’analyse éthique des pratiques soignantes est dominée par ce modèle dont la clarté et la facilité d’utilisation sont incontestables. → La discussion sur ces principes est restée bien vivante mais le principisme a orienté l’analyse vers un formalisme assez élémentaire ( dénoncé plus haut). Beaucoup ont cru qu’il suffisait de confronter les pratiques à évaluer à chaque principe pour mener une réflexion d’éthique et produire des décisions justifiées de ce point de vue. On a peine à croire que quatre aspects, bien sûr fondamentaux, puissent résumer la charge éthique d’une situation. Ces quatre piliers suffisent-ils ? Je crois opportun d’enrichir la palette des nuances et j’ai publié une série personnelle de principes d’éthiques qui sont au nombre d’une dizaine (6), incluant les quatre principes classiques. Selon mon point de vue, ces principes ont chacun une force normative qui porte sur l’un ou l’autre aspect des pratiques soignantes : par exemple, la justice, mais sous la double forme tantôt de l’égalité entre tous, tantôt de l’équité qui différencie les besoins de chacun ; ou encore le principe de force du sens qui interroge les ressources et les sources de sens susceptibles d’inspirer et de soutenir les professionnels. Ces divers principes, je les rattache à un métaprincipe, c’est-à-dire à un principe de niveau supérieur qui détermine et coordonne leurs significations particulières en les enracinant dans le sens anthropologique fondamental de la situation, c’est-à-dire dans la réalité du moment présent, ici et maintenant. Le métaprincipe de l’éthique des soins invite à déployer sa pratique soignante, selon l’orientation éthique indiquée par les diverses valeurs et les différents principes, mais avec la disposition fondamentale suivante : à chaque fois, la situation est particulière, le patient est unique, les décisions à prendre le seront pour la première fois… Même si l’expérience professionnelle, la connaissance médicale, les procédures imposées risquent d’induire un comportement non réfléchi, presque réflexe : « voilà ce qu’il faut faire, cela va de soi ! », avec une variante possible : « voilà ce qu’il faut faire, c’est ce qui est prévu ! » Comme me l’a dit un jour une soignante d’une équipe de soins palliatifs en Belgique - cela reste pour moi le témoignage définitif de l’intelligence soignante : « pour nous c’est une bonne pratique, que nous connaissons bien et que nous faisons avec soin, mais pour le patient, c’est la première fois qu’il meurt. » Je ne corrige pas la formule, ma mémoire l’a gravée ainsi, pas tout à fait correcte grammaticalement, mais tout simplement géniale. Ainsi, avant même de vouloir faire bien ce que l’on peut faire pour la personne (en respectant les principes d’éthique), il s’agit de garantir que les gestes posés le sont authentiquement, spécifiquement par une personne singulière à une autre personne singulière, dans la réalité de ce que l’une et l’autre sont et ressentent actuellement. C’est seulement de cette manière que l’on peut espérer éviter la banalisation des pratiques. 20 L’éthique rejoint l’anthropologie : ce que je dois faire en général rejoint ce que je dois faire pour devenir moi-même - vivre au présent. Le présent est le seul lieu de rencontre avec moi- même et avec les autres. Le présent est le seul lieu où je puis être authentique, et le véritable autrui ne se donne qu’au présent. Marc-Aurèle, qui était à la fois empereur et philosophe, écrit dans le même esprit que « le logique, c’est le politique » : ce qui procède du logos vaut pour la cité, pour chacun et pour tous.  Examen : par exemple reconnaître les caractéristique de la philosophie de Jaspers. Force et courage et bonne étude ! 21

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