Introduction au droit pénal PDF
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Frydman B. et Rorivel I.
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Ce document traite de l'introduction au droit pénal, en se concentrant sur les procédures, les principes fondamentaux et les droits impliqués dans le système pénal. Il aborde des concepts clés tels que la présomption d'innocence et le droit au silence, ainsi que la place de la victime dans le processus pénal.
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FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit SECTION 6 : LE PROCES PENAL Le procès pénal...
FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit SECTION 6 : LE PROCES PENAL Le procès pénal constitue le cadre dans lequel sont jugées les personnes soupçonnées d’avoir commis une infraction. Les sanctions pénales ont pour objet de punir l’auteur de l’infraction, notamment dans un but de défense sociale. Suivant la Cour de cassation, la peine* est « un mal infligé par la justice répressive, en vertu de la loi à titre de punition [ou de sanction] d’un acte que la loi défend »232. Il s’agit principalement de l’emprisonnement, de la peine de travail et de l’amende. La condamnation pénale est conçue comme un acte grave, qui ne peut être prononcée qu’à l’issue d’une procédure qui protège les droits de la défense* et est entourée d’un maximum de garanties. Ces garanties du procès équitable* constituent un des droits humains fondamentaux. À la différence du procès civil qui traite d’un conflit relatif aux intérêts privés des parties en cause, le procès pénal relève de l’ordre public dans la mesure où il oppose un particulier à la collectivité représentée par un membre du ministère public. Cette asymétrie du procès pénal influence profondément les règles relatives à son administration et à la charge de la preuve*. La procédure pénale tend à rétablir un certain équilibre en dotant la personne à qui une infraction est reprochée d’une série de droits qui viennent s’ajouter aux garanties du procès équitable. Mais la procédure pénale est également organisée de manière à assurer une répression efficace des infractions en conférant notamment aux enquêteurs des moyens spécifiques pour accomplir au mieux leur tâche d’investigation (perquisitions, détentions préventives, écoutes téléphoniques, etc.). De telles prérogatives sont susceptibles de mettre à mal les libertés fondamentales (droit à la vie privée et à l’inviolabilité du domicile, droit à la liberté individuelle, droit au secret de la correspondance, etc.). Dans un État de droit, tout l’art de la procédure pénale consiste à concilier, en amont et au cours du procès, ces deux impératifs qui tiennent à l’efficacité des poursuites pénales, d’une part, et au respect des libertés fondamentales, d’autre part. Les principes fondamentaux propres à la procédure pénale Outre les garanties du procès équitable prévues par l’article 6, § 1er, de la Convention européenne des droits de l’homme qui s’appliquent aux instances pénales comme aux instances civiles, le procès pénal est entouré de garanties particulières en raison de sa nature spécifique. 232Cass., 14 juillet 1924, Pas., 1924, I, p. 474 (« punition ») et Cass., 16 mars 1970, Pas., 1970, I, p. 632 (« sanction »). DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 183 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 183 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit La présomption d’innocence En vertu de l’article 6, § 2 de la Convention européenne des droits de l’homme : « Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ». Ce principe de la présomption d’innocence a de nombreuses implications, notamment : - l’interdiction du recours à la détention préventive pour exercer une répression immédiate ; - le fait que la charge de la preuve incombe à la partie poursuivante et que le doute profite à la personne poursuivie ; - le fait que les preuves doivent, en principe, être recueillies de manière loyale ; - le devoir de réserve des magistrats dans les communications à la presse. Le droit au silence Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques consacre expressément le droit au silence : « Toute personne accusée d’une infraction pénale a droit (…) à ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s’avouer coupable »233. Le droit au silence est également consacré par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Ce droit au silence a des implications fondamentales dans le procès pénal, notamment : - la personne soupçonnée d’une infraction est libre de répondre ou non aux questions qui lui sont posées ; - elle ne peut être contrainte de collaborer à la production d’éléments de preuve ; - le silence de l’inculpé ne peut entraîner aucune sanction, notamment sous la forme d’une détention préventive ; - l’assistance d’un avocat dès le premier interrogatoire est de nature à assurer l’effectivité du droit au silence234. 233Art. 14.3.g du Pacte signé à New-York le 19 décembre 1966 et ratifié par la Belgique le 15 mai 1981. 234 Cour eur. dr. h., Salduz c. Turquie, 27 novembre 2008. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 184 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 184 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit Droits de la défense renforcés Dans son article 6, § 3, la Convention européenne des droits de l’homme énumère, de manière non limitative, les droits de la défense qui doivent être reconnus à la personne soupçonnée d’avoir commis une infraction : « Tout accusé a droit notamment à : a) être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et de manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui ; b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; c) se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat désigné d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent ; d) interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ; e) se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience ». Les violations caractérisées des droits de la défense entachent l’instance, en principe, de manière irrémédiable. Les autorités publiques se privent de la possibilité d’exercer des poursuites si elles ne se plient pas aux règles du jeu qui doivent encadrer un procès pénal dans un État de droit. Ce principe vise à sanctionner les autorités, notamment policières, lorsqu’elles se livrent à des manœuvres ou à des actes illégaux pour confondre les délinquants ou forger des preuves contre eux. Toutefois, ce principe a été largement vidé de sa substance en Belgique par une série d’évolutions jurisprudentielles et législatives qui privilégient nettement le souci de la répression sur celui du respect de la légalité. La phase préliminaire Une fois qu’une infraction a été commise, il s’agit d’en rechercher l’auteur et, le cas échéant, de le juger. Cette double démarche, l’enquête et le jugement, correspond aux deux étapes du procès pénal : la phase préliminaire, qui prend la forme d’une information* ou d’une instruction*, et la phase de jugement proprement dite. La phase préliminaire du procès pénal est consacrée à la recherche des infractions et de leurs auteurs, au rassemblement des preuves ainsi qu’à la constitution du dossier répressif*. Pour mener à bonne fin pareille entreprise, deux voies sont prévues par la loi : DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 185 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 185 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit - l’ouverture d’une information* sous la direction du procureur du Roi*. Cette forme d’enquête préliminaire concerne toutes les contraventions*, certains délits* et les crimes* correctionnalisés* par le ministère public ; - l’ouverture d’une instruction* sous la responsabilité du juge d’instruction*. Cette forme d’enquête préliminaire concerne certains délits et certains crimes. Les crimes qui relèvent de la cour d’assises doivent impérativement faire l’objet d’une instruction. Lorsque les besoins de l’enquête relative à la commission d’un crime ou d’un délit conduisent à poser des actes attentatoires aux libertés individuelles, l’intervention du juge d’instruction est en principe requise, sauf dans les cas où la loi autorise le procureur du Roi à les poser. Les réformes récentes de la procédure pénale accroissent de manière considérable les prérogatives du ministère public, qui prend de plus en plus le pas sur le juge d’instruction, dont la suppression est envisagée. L’information 1. L’ouverture de l’information Lorsqu’une infraction est constatée, elle est le plus souvent portée à la connaissance du procureur du Roi par l’intermédiaire des services de police judiciaire*235. Ceux-ci dressent des procès-verbaux* qui constatent les infractions à la commission desquelles ils assistent directement, enregistrent les plaintes des personnes qui en sont victimes ou recueillent les déclarations des témoins d’actes pénalement répréhensibles. Les fonctionnaires de police sont tenus d’informer le procureur du Roi des infractions dont ils ont connaissance. 2. L’objet de l’information L’information est définie par la loi comme « l’ensemble des actes destinés à rechercher les infractions, leurs auteurs et les preuves et à rassembler les éléments utiles à l’exercice de l’action publique ». Ces actes sont de nature très diverse. Il peut s’agir d’une descente sur les lieux par laquelle le procureur du Roi, assisté des fonctionnaires de police, se déplace à l’endroit des faits pour y procéder à toutes les constatations utiles. Les magistrats du parquet ainsi que les fonctionnaires de police peuvent également procéder à l’audition de personnes, qu’elles soient suspectes, témoins ou tiers, à la condition qu’elles comparaissent volontairement. Comme tous les autres modes de preuve, les auditions de personnes sont soumises 235Parmi les fonctions de police, on distingue celles de police judiciaire qui visent la recherche et la constatation des infractions et celles de police administrative qui ont pour objet principal le maintien de l’ordre public. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 186 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 186 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit au principe de loyauté de l’administration de la preuve. Sont donc proscrites toutes formes de menace tant verbale que physique à l’égard de la personne entendue ainsi que toute ruse ou tromperie destinée à induire en erreur la personne entendue pour obtenir une version particulière des faits. Des règles spécifiques existent depuis l’arrêt Salduz de la Cour européenne des droits de l’homme concernant les droits des personnes auditionnées en qualité de suspects. Celles-ci se voient informées qu’elles ont le droit de faire une déclaration, de répondre aux questions qui leur sont posées ou de se taire. Elles ont le droit de se concerter confidentiellement avec un avocat avant leur audition. Elles peuvent se faire assister par leur avocat pendant leur audition, si les faits concernent une infraction punissable d’une peine privative de liberté ou si elles sont sous le coup d’une arrestation judiciaire. Outre les auditions, le procureur du Roi peut ordonner la saisie des pièces à conviction. Il peut aussi commander l’arrestation d’une personne à l’égard de laquelle existent des indices sérieux de culpabilité Il s’agit de l’arrestation judiciaire qui ne peut jamais entraîner une privation de liberté pour une durée supérieure à quarante-huit heures. Au-delà de ce délai, une personne ne peut être privée de sa liberté qu’en vertu d’un mandat d’arrêt* décerné par un juge d’instruction236. 3. Les actes attentatoires aux libertés individuelles En principe, les actes posés dans le cadre de l’information ne peuvent comporter de mesures de contrainte, ni porter atteinte aux libertés et aux droits individuels. Il n’y a donc pas, à ce stade, de perquisition sans le consentement de la personne disposant de la jouissance des lieux (inviolabilité du domicile), pas d’exploration corporelle sans le consentement écrit et préalable de la personne majeure concernée (droit à l’intégrité physique), pas de mise sur écoute téléphonique (droit au respect de la vie privée et au secret des « lettres »). Dans certaines circonstances, la loi habilite expressément le procureur du Roi à poser des actes attentatoires aux libertés individuelles. En cas de flagrant délit*, par exemple, le procureur du Roi et les fonctionnaires de police peuvent procéder à des perquisitions, même nocturnes, à l’exploration corporelle, à la mise sur écoute téléphonique, etc. Le législateur a également organisé la mini-instruction qui permet au procureur du Roi de solliciter du juge d’instruction l’accomplissement de certains actes attentatoires aux libertés individuelles sans ouvrir de véritable instruction. Au fil des réformes de la justice, ces actes sont de plus en plus nombreux, même si 236 L’arrestation judiciaire ne doit pas être confondue avec l’arrestation administrative. Cette dernière relève de la décision d’un fonctionnaire de police et ne peut être ordonnée qu’en cas « d’absolue nécessité » et dans les circonstances prévues par la loi, comme le trouble effectif pour la tranquillité publique. L’arrestation administrative ne peut entraîner une privation de liberté excédant 12 heures (la fameuse « nuit au poste »). DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 187 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 187 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit la Cour constitutionnelle a sanctionné certaines réformes237. Le procureur du Roi peut ainsi demander au juge d’instruction d’entendre un témoin sous serment, de décerner un mandat d’amener* à charge d’un suspect ou d’un témoin, de réaliser une enquête bancaire ou d’ordonner un prélèvement forcé en vue d’une analyse ADN. Le juge d’instruction peut accepter ou refuser d’exécuter l’acte demandé. Dans ces deux hypothèses, le juge d’instruction décide également de la suite à réserver à l’enquête : soit il renvoie le dossier au procureur du Roi, soit il se saisit de l’affaire et poursuit lui-même les investigations en ouvrant une instruction en bonne et due forme. 4. La fin de l’information L’information peut se clôturer de différentes manières qui vont du classement sans suite à la citation devant le juge en passant par différentes solutions intermédiaires où le ministère public joue un rôle décisif dans le règlement de l’affaire. 1°) Le classement sans suite Une des prérogatives fondamentales du procureur du Roi est d’être seul juge de l’opportunité des poursuites*. La décision de poursuivre ou de ne pas poursuivre un suspect devant les cours et tribunaux relève donc de l’entière discrétion du procureur du Roi. Ce dernier peut, au terme de l’enquête, prendre une décision motivée de classement sans suite* où il exprime les motifs pour lesquels il s’abstient de mettre l’action publique en mouvement à l’égard d’une personne suspectée d’avoir commis une infraction. En pratique, cette motivation est limitée et standardisée. Il s’agit d’une décision d’opportunité qui ne repose pas sur des critères définis par la loi et qui ne préjuge en rien de la culpabilité ou de la non- culpabilité de la personne ayant fait l’objet de l’information. L’opportunité des poursuites joue un rôle de tri. Elle permet d’éviter le procès pénal dans des cas où il ne s’avère pas indispensable en raison, par exemple, de l’évolution des mœurs ou de la situation particulière de la personne suspecte. Elle permet également d’éviter l’asphyxie des tribunaux. Dans la pratique, une très large majorité des affaires soumises au parquet fait l’objet d’un classement sans suite. La décision de classement sans suite est provisoire tant que l’action publique n’est pas éteinte. Le dossier peut toujours être rouvert soit par une autre décision d’opportunité s’il survient des éléments nouveaux, soit sur injonction positive du procureur général près de la cour d’appel ou du ministre de la Justice, soit enfin en cas de constitution de partie civile* de la victime entre les mains du juge d’instruction. Dans ces deux derniers cas, le procureur du Roi est obligé de poursuivre et de mettre l’action publique en mouvement. Si les cas d’injonction 237Voy., par exemple, l’arrêt de la Cour constitutionnelle n° 148/2017 du 21 décembre 2017 qui retire au procureur du Roi la possibilité de requérir du juge d’instruction une perquisition dans le cadre d’une mini-instruction. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 188 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 188 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit positive sont rarissimes en pratique, ceux de constitution de partie civile sont nombreux et constituent un tempérament important au pouvoir discrétionnaire du ministère public. La décision de classement sans suite est définitive à partir du moment où l’action publique est éteinte. - Il en est ainsi lorsque l’auteur de l’infraction est décédé puisque le droit belge ne connaît pas de principe de responsabilité pénale pour autrui. Les héritiers ne peuvent donc ni être poursuivis, ni être punis pour les infractions commises par le défunt. - Il en va de même par le jeu de la prescription de l’action publique à la suite de l’écoulement du temps. La durée de prescription augmente en fonction de la gravité de l’infraction. Ainsi, les contraventions se prescrivent par 6 mois, les délits et certains crimes correctionnalisés par 5 ans. La prescription des autres crimes varie de 10 à 20 ans selon leur nature et la gravité des peines prévues par la loi. Enfin, les crimes du droit humanitaire, comme le génocide ou les autres crimes contre l’humanité, sont imprescriptibles. Ils peuvent toujours être poursuivis tant que leur auteur est vivant. 2°) La médiation pénale L’action publique peut également être définitivement éteinte en cas de médiation pénale* réussie. Pour autant que les faits constatés ne lui paraissent pas de nature à être punis d’un emprisonnement de plus de deux ans, le procureur du Roi peut inviter l’auteur présumé à réparer le dommage qu’il a causé à la victime en lieu et place de poursuites devant les juridictions pénales. Le procureur peut également convoquer la victime et mener une médiation entre les parties sur l’indemnisation et ses modalités. Cette dernière peut prendre les formes les plus diverses : réparation en nature, réparation par équivalent, réparation symbolique, excuses orales ou écrites, etc. Le procureur du Roi peut subordonner l’extinction des poursuites à d’autres mesures comme le suivi d’une formation ou d’un traitement médical quand l’assuétude à l’alcool ou aux stupéfiants est une des causes de l’infraction. Le procureur du Roi peut également poser comme condition l’exécution d’un travail d’intérêt général. Une procédure d’homologation est prévue devant le juge du fond qui devra ainsi contrôler, d’une part, si les conditions d’application légales de la médiation sont respectées et, d’autre part, si les mesures proposées sont proportionnées à la gravité des faits et à la personnalité du suspect. 3°) La transaction pénale238 Pour autant que les faits constatés ne lui paraissent pas de nature à être punis d’un emprisonnement de plus de deux ans et qu’ils ne comportent pas d’atteinte grave à l’intégrité physique, le procureur du Roi peut proposer l’extinction de l’action publique contre le paiement d’une somme d’argent. Cette 238 Il ne faut pas confondre la transaction pénale avec la transaction civile qui est un contrat par lequel les parties mettent fin à un litige par des concessions réciproques. Le point commun est le fait de mettre fin à un litige, mais les moyens et les circonstances diffèrent complètement. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 189 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 189 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit proposition nécessite que les victimes de l’infraction aient été préalablement dédommagées par l’auteur. Le juge chargé d’homologuer cette transaction pénale doit vérifier le caractère proportionné de celle-ci par rapport à la personnalité du suspect ainsi qu’à la gravité des faits, et si le suspect a bien accepté la transaction proposée de manière libre et éclairée. L’objectif de la transaction pénale est de permettre un règlement rapide des affaires dans le but d’éviter l’encombrement des tribunaux. 4°) La reconnaissance préalable de culpabilité Pour autant que les faits constatés ne lui paraissent pas de nature à être punis d’un emprisonnement de plus de cinq ans et qu’aucun jugement définitif au pénal n’ait été prononcé, le procureur du Roi peut proposer au suspect ou au prévenu de reconnaître sa culpabilité moyennant l’application d’une peine inférieure à celle que le parquet aurait normalement requise. Cette proposition peut être effectuée à la demande du suspect ou prévenu ou de son avocat ou bien d’office. Le suspect ou prévenu qui accepte doit être assisté d’un avocat. Les déclarations par lesquelles il reconnaît sa culpabilité et accepte la peine proposée sont consignées dans une convention dressée par le ministère public et communiquées aux victimes connues. La convention est déférée au tribunal compétent à une audience dite d’« homologation ». Le juge vérifie, à cette occasion, si la procédure remplit les conditions légales, si l’auteur a donné son consentement de manière libre et éclairée, que les faits sont réels et leur qualification correcte et que la peine est proportionnelle à la gravité des faits, à la personnalité de l’auteur et à sa volonté de réparer le dommage. Si ces conditions sont réunies, le juge prononce les peines prévues. Dans le cas contraire, le juge rejette la requête en homologation de la convention par une décision motivée. L’affaire est renvoyée devant une chambre du tribunal autrement composée. La convention et les autres pièces relatives à la reconnaissance de culpabilité sont écartées du dossier et ne peuvent être retenues à charge du prévenu. 5°) La citation devant le tribunal Dans les affaires où il décide d’entamer des poursuites, le procureur du Roi va, le plus souvent, citer directement* le suspect devant le tribunal de police ou le tribunal correctionnel en fonction de leurs compétences respectives. L’instruction 1. La mise à l’instruction L’ouverture d’une instruction fait suite soit à la décision du procureur du Roi d’introduire un réquisitoire aux fins d’instruire*, soit à la décision du juge DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 190 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 190 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit d’instruction de se saisir de l’affaire dont il a eu à connaître dans le cadre d’une mini-instruction*, soit à la décision de la victime de mettre l’action publique en mouvement en se constituant partie civile* entre les mains du juge d’instruction. Si la loi ne fixe aucun critère pour déterminer quelles affaires doivent être mises à l’instruction, les prérogatives conférées au juge d’instruction plaident pour réserver son intervention aux affaires importantes susceptibles de mettre en cause les droits et libertés individuels. À compter du jour où le juge d’instruction est saisi d’un dossier, la direction et la responsabilité de l’enquête lui reviennent et les services de police exécutent les devoirs judiciaires utiles à la manifestation de la vérité sous sa direction. 2. Le rôle du juge d’instruction Juge au tribunal de première instance, le juge d’instruction est désigné à cette fonction particulière pour une durée déterminée. En charge de l’enquête, le juge d’instruction doit mener toutes les investigations nécessaires au bon déroulement de celle-ci. Mais, comme son nom l’indique, le juge d’instruction, avant d’être un enquêteur, est un juge qui se caractérise par son indépendance et son impartialité. Il n’a pas la qualité de partie à l’action publique. Au contraire du ministère public, il n’exerce pas de poursuites. Il doit instruire tant à charge qu’à décharge, c’est-à-dire qu’il lui incombe de rechercher les éléments de preuve qui soutiennent à la fois les thèses de l’accusation et celles de la défense. Dans la phase préliminaire du procès pénal, le juge d’instruction exerce des fonctions juridictionnelles en adoptant des décisions, appelées ordonnances*, par lesquelles il prescrit les mesures d’instruction nécessaires à la manifestation de la vérité. Au cours de l’instruction, il est susceptible de prescrire de nombreux actes attentatoires aux libertés et droits fondamentaux, notamment : - Il peut décider d’entendre personnellement les personnes mises en cause dans le cadre de l’instruction. Pour ce faire, il est habilité à décerner un mandat d’amener* qui constitue une injonction, aux agents de la force publique, de lui amener la personne qu’il désigne. - Il peut convoquer un témoin à comparaître, si besoin est en décernant un mandat d’amener*. Le juge d’instruction est habilité à entendre un témoin sous serment au terme duquel la personne auditionnée jure, en levant la main droite, de dire toute la vérité et rien que la vérité. À la différence de l’auteur présumé qui bénéficie du droit au silence, le témoin est tenu de répondre aux questions qui lui sont posées, sous peine de se voir condamner aux peines prévues par la loi pour refus de témoignage. - Il peut inculper une personne contre laquelle existent des indices sérieux de culpabilité et, de ce fait, l’impliquer dans la procédure pénale. - Assisté de son greffier, il peut descendre sur les lieux pour faire procéder aux premières constatations. Une telle descente sur les lieux est d’usage pour les faits criminels particulièrement graves. Par ailleurs, le juge d’instruction peut toujours revenir sur les lieux d’un crime pour en organiser la reconstitution. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 191 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 191 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit - Il peut rendre une ordonnance de perquisition* par laquelle, tout officier de police judiciaire se voit habiliter à pénétrer dans un endroit protégé par l’inviolabilité du domicile, en vue d’y rechercher des preuves et, le cas échéant, de saisir les pièces à conviction d’un crime ou d’un délit. Sauf exceptions prévues par la loi239, aucune perquisition ne peut avoir lieu entre 21 heures et 5 heures du matin. - Il peut exiger des organismes bancaires et financiers de lui communiquer tout renseignement utile à l’enquête portant sur les comptes et avoirs de leurs clients. - Il peut décréter l’investigation d’un système informatique. - Il peut ordonner qu’un médecin procède à une exploration corporelle. Selon la définition qu’en donne la Cour de cassation, il s’agit de toute mesure d’instruction susceptible de porter atteinte à la pudeur240. - Il peut, à certaines conditions, ordonner, si besoin est sous la contrainte, le prélèvement de cellules humaines (prélèvement sanguin, de muqueuses de la joue, de bulbes pileux, etc.)241. - Il peut faire procéder à toute expertise utile à la manifestation de la vérité (autopsie, expertise en balistique, expertise comptable, expertise psychiatrique, etc.). - Il peut ordonner le repérage des données d’appels téléphoniques, leur localisation et même la mise sur écoute et l’enregistrement de communications privées. - Il peut décerner un mandat d’arrêt* au terme duquel une personne sera mise en détention préventive. Le mandat d’arrêt est l’ordonnance rendue par le juge d’instruction qui permet de priver une personne de sa liberté au-delà du délai de quarante-huit heures que ne peut dépasser l’arrestation judiciaire*. Pour mener à bien sa mission, le juge d’instruction dispose, on le voit, d’une panoplie de mesures très variées, susceptibles de mettre directement à mal les libertés individuelles. Dans un État de droit, il incombe au législateur d’encadrer strictement de telles atteintes sans céder aux dérives sécuritaires. 3. Le rôle du procureur du Roi et les droits de l’inculpé Dans le cadre de l’instruction, le procureur du Roi qui est, rappelons-le, partie à la cause, continue à jouer un rôle fondamental. En raison du caractère asymétrique du procès pénal, le procureur du Roi se voit même, à ce stade, 239Voyez par exemple la loi du 27 avril 2016 relative à des mesures complémentaires en matière de lutte contre le terrorisme, M.B., 9 mai 2016. 240 Cass., 1er avril 1968, Pas., 1968, I, p. 939. 241 Art. 90undecies du C.I.C. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 192 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 192 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit reconnaître des prérogatives plus importantes que l’inculpé. Il dispose, par exemple, du droit de se faire communiquer, par le juge d’instruction, toutes les pièces du dossier, à n’importe quel moment de la procédure. Il dispose également d’un pouvoir général de réquisition qui lui permet de solliciter l’accomplissement de tous les actes qu’il considère utiles à l’instruction. Quant à l’inculpé, il a le droit de demander au juge d’instruction d’accéder au dossier et d’en obtenir une copie. Sauf lorsqu’il est détenu préventivement, l’inculpé ne dispose pas d’un droit d’accès automatique au dossier. Le juge d’instruction peut lui refuser la communication de certaines pièces au motif notamment que « les nécessités de l’instruction le requièrent » ou que « la communication présente un danger pour les personnes ou porte gravement atteinte à leur vie privée ». Par ailleurs, à l’instar du procureur du Roi, l’inculpé peut solliciter, de la part du juge d’instruction, l’accomplissement d’un acte d’instruction complémentaire. 4. Le rôle des juridictions d’instruction La mission du juge d’instruction est exercée sous le contrôle des juridictions d’instruction*, c’est-à-dire de la Chambre du conseil* et de la Chambre des mises en accusation*. La Chambre du conseil est une juridiction de première instance rattachée au tribunal correctionnel. La Chambre des mises en accusation est une juridiction d’appel rattachée à la cour d’appel. 1°) La Chambre du conseil La Chambre du conseil intervient principalement à deux occasions : premièrement, pour contrôler le maintien de la détention préventive* décidée par le juge d’instruction ; deuxièmement, au moment de la clôture de l’instruction, pour statuer sur le règlement de la procédure*. (a) La détention préventive La mise en détention préventive est particulièrement délicate dans la mesure où elle implique la privation de liberté d’une personne présumée innocente qui n’a pas encore eu l’occasion de défendre sa cause devant un juge, dans le cadre d’un débat contradictoire. Il est cependant des cas où la protection de la sécurité publique justifie une telle atteinte à la liberté individuelle. Dans un État de droit, ces cas doivent rester exceptionnels. Si les législations qui se sont succédé en Belgique tendent à renforcer le caractère exceptionnel de la détention préventive, dans la pratique, elle reste largement utilisée. Le régime de la détention préventive est subordonné au principe de la liberté individuelle, telle qu’elle est garantie par la Constitution et la Convention européenne des droits de l’homme. L’article 12 de la Constitution prévoit que « Hors le cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté qu'en vertu de l'ordonnance motivée du juge, qui doit être signifiée au moment de l'arrestation, ou au plus tard dans les quarante-huit heures ». Quant à la Convention européenne des droits de l’homme, elle contient, dans son article 5, plusieurs dispositions destinées à DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 193 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 193 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit sauvegarder les droits de toute personne arrêtée et détenue dans le cadre d’une instance pénale : - « Toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu’elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle ». - « Toute personne arrêtée ou détenue (…) doit être aussitôt traduite devant un juge (…) et a le droit d’être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure ». - « Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale ». Les garanties consacrées par la Convention européenne des droits de l’homme sont reprises et précisées dans la loi belge relative à la détention préventive242. En cas de non-respect de ces dispositions, la détention est illégale* et la personne qui en est victime doit obtenir réparation intégrale de son dommage contre l’État243. Dans les quarante-huit heures de son arrestation, la personne privée de sa liberté doit être déférée devant un juge d’instruction. À défaut, elle doit être libérée. Le juge d’instruction peut, après avoir interrogé l’inculpé, décerner un mandat d’arrêt « en cas d’absolue nécessité pour la sécurité publique seulement, et si le fait est de nature à entraîner pour l’inculpé un emprisonnement correctionnel d’un an ou une peine plus grave (…). Cette mesure ne peut être prise dans le but d’exercer une répression immédiate ou toute autre forme de contrainte »244. Ce mandat d’arrêt doit être motivé en visant « les circonstances de fait de la cause et celles liées à la personnalité de l’inculpé qui justifient la détention préventive »245. Dès la délivrance du mandat d’arrêt, la personne détenue a le droit de communiquer librement avec son avocat. Le mandat d’arrêt est valable pour une durée maximale de cinq jours. Endéans ces cinq jours, l’inculpé doit comparaître devant la Chambre du conseil ou être libéré. La Chambre du conseil examine tant la légalité du mandat d’arrêt que l’opportunité de maintenir la détention préventive au regard des critères prévus par la loi. Elle statue à huis clos sur le rapport du juge d’instruction, après avoir entendu les réquisitions du ministère public et les plaidoiries de la défense. L’ordonnance de la Chambre du conseil est susceptible d’appel devant la Chambre des mises en accusation dont l’arrêt peut également faire l’objet d’un pourvoi en cassation. 242 Loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive, M.B., 14 août 1990. 243 Art. 27 de la loi du 13 mars 1973 relative à l’indemnité en cas de détention préventive inopérante, M.B., 10 avril 1973. 244 Art. 16, § 1er, de la loi du 20 juillet 1990 précitée. 245 Art. 16, § 5, de la loi du 20 juillet 1990 précitée. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 194 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 194 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit Si l’inculpé est maintenu en détention préventive, la Chambre du conseil est appelée à statuer régulièrement (de mois en mois, puis de deux en deux mois) sur le maintien de la détention préventive. Elle contrôle la persistance d’indices sérieux de culpabilité à charge de l’inculpé et vérifie si la détention préventive se justifie toujours au regard d’une nécessité absolue pour la sécurité publique. À tout moment de l’instruction, le juge d’instruction peut ordonner la remise en liberté de l’inculpé en donnant mainlevée du mandat d’arrêt. Comme la détention préventive s’applique toujours à une personne présumée innocente en attente d’un procès, il est des affaires où une personne détenue préventivement est ultérieurement acquittée au fond ou est condamnée à une peine de prison inférieure à celle déjà purgée. Dans ce cas, on parle de détention inopérante ou injustifiée* pour laquelle l’État est tenu de réparer le préjudice subi par la personne qui a ainsi été détenue. Une telle réparation demandée au ministre de la Justice n’est jamais intégrale, car, contrairement à la détention illégale, le prescrit de la loi a été respecté. Son montant « est fixé en équité en tenant compte de toutes les circonstances d’intérêt public et privé »246. (b) Le règlement de la procédure Au moment de la clôture de l’instruction, lorsque le juge d’instruction a terminé son enquête, intervient le règlement de la procédure à l’occasion duquel la Chambre du conseil statue sur les mérites de l’instruction et sur le sort à réserver à l’affaire qui a été instruite. À cette occasion, la Chambre du conseil décide s’il existe des charges suffisantes pour renvoyer l’inculpé devant la juridiction de fond compétente, soit le tribunal de police, soit le tribunal correctionnel. Dans l’affirmative, la Chambre du conseil prononce une ordonnance de renvoi ; dans la négative, une ordonnance de non-lieu. Une telle décision est motivée et est prise aux termes d’une procédure contradictoire. À l’audience, les différents protagonistes sont entendus : le juge d’instruction fait rapport, le procureur du Roi prend des réquisitions, la défense et la partie civile*, qui ont eu dans l’intervalle accès au dossier répressif, présentent leurs plaidoiries. Si la Chambre du conseil estime que la cour d’assises est compétente, il renvoie l’affaire devant le procureur général qui saisit la chambre des mises en accusation. 2°) La Chambre des mises en accusation Juridiction d’instruction du second degré, la Chambre des mises en accusation connaît notamment des appels des décisions de la Chambre du conseil statuant sur la détention préventive ou sur la clôture de l’instruction. Elle est également seule compétente pour statuer sur les recours dirigés contre les ordonnances du juge d’instruction. Elle est en outre seule compétente pour renvoyer un prévenu devant la cour d’assises. 246Art. 28, 2, de la loi du 13 mars 1973 relative à l’indemnité en cas de détention préventive inopérante, M.B., 10 avril 1973. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 195 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 195 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit Le caractère asymétrique de la procédure pénale se manifeste à nouveau dans les possibilités de saisine de la Chambre des mises en accusation. Le ministère public dispose du droit de faire appel d’un acte juridictionnel posé au cours de l’instruction dans des hypothèses plus nombreuses que l’inculpé. Un recours n’est ouvert à ce dernier que dans les cas expressément prévus par la loi. Par exemple, l’inculpé pourra interjeter appel contre une ordonnance de renvoi s’il invoque une cause d’extinction de l’action publique, mais pas si la seule base de la contestation porte sur l’existence de charges suffisantes. La Chambre des mises en accusation est également compétente pour contrôler, outre la régularité de la procédure, le bon déroulement de l’instruction et peut décider d’étendre celle-ci à des faits ou des personnes non visés par les poursuites, donner des injonctions au juge d’instruction voire même le décharger de l’instruction en désignant un magistrat comme conseiller-instructeur. La place de la victime Dans le procès pénal, la victime occupe une place délicate. Sa présence n’est pas nécessaire au bon déroulement de l’instance qui oppose au premier chef la personne poursuivie et le ministère public. Pourtant, l’issue du procès pénal est, dans une large mesure, déterminante pour la situation de la victime : si la personne poursuivie est reconnue coupable d’avoir commis une infraction, elle aura nécessairement commis une faute sur le plan civil, faute qu’elle devra réparer en application des principes de la responsabilité aquilienne. Pour obtenir réparation, la victime peut s’engager dans l’une des voies suivantes : - soit, elle introduit une action en responsabilité devant la juridiction civile compétente qui, pour statuer, devra attendre la décision du juge pénal (en application du principe suivant lequel le criminel tient le civil en état) ; - soit, elle se greffe à l’action publique en cours en se constituant partie civile*. Cette constitution de partie civile peut s’opérer au stade de l’instruction, mais également au stade du procès au fond ; - soit, elle met l’action publique en mouvement en se constituant directement partie civile entre les mains du juge d’instruction ou en citant directement l’auteur présumé devant le tribunal correctionnel ou devant le tribunal de police. Afin de permettre à la personne victime d’une infraction – mais qui n’est pas (encore) partie civile – d’être avisée de l’évolution procédurale du dossier, une « déclaration de personne lésée » peut être effectuée par ses soins. Une telle déclaration fait naître dans le chef de la victime le droit d’être assistée ou représentée par un avocat, de déposer au dossier tout document utile et surtout d’être avisée du classement sans suite et de son motif, de la mise à l’instruction du dossier et des actes de fixation devant les juridictions d’instruction et de jugement. Cette information permet alors à la victime de se constituer partie civile. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 196 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 196 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit Depuis les événements qui ont donné lieu à la « marche blanche » en octobre 1996 à la suite de l’affaire Dutroux, les responsables politiques ont le souci de réserver une place plus importante à la victime s’étant constituée partie civile dans le procès pénal. De nouvelles dispositions législatives ont été adoptées pour lui permettre, au même titre que l’inculpé, d’accéder au dossier dans la phase préliminaire du procès, de solliciter copie du dossier (art. 61ter C.I.C.) et, pour lui donner un droit de regard, de demander un contrôle sur le bon déroulement de l’instruction après une année (art. 136 C.I.C.). Elle peut également solliciter l’accomplissement de devoirs complémentaires (art. 61quinquies C.I.C.). Enfin, sauf à de très rares exceptions près (diffamation et calomnie, par exemple), la victime ne peut jamais paralyser l’exercice de l’action publique. Retirer une plainte ne permet pas en soi d’interrompre les poursuites pénales. Un tel acte peut néanmoins conduire le procureur du Roi à classer un dossier sans suite. Les caractéristiques de la phase préliminaire du procès pénal La phase préliminaire du procès pénal a un caractère inquisitoire en ce sens qu’elle est, dans une large mesure, unilatérale et secrète. Ici, le procès n’est pas « la chose des parties ». L’initiative revient au magistrat du ministère public ou au juge d’instruction. 1. Caractère unilatéral Dans la phase préliminaire du procès, les recherches sont menées d’autorité par le parquet ou le juge d’instruction. Ces derniers dirigent, de manière unilatérale, le cours de l’enquête. Ainsi, par exemple, alors que les expertises* judiciaires sont en principe contradictoires, celles ordonnées par le parquet, au stade de l’information, ou par le juge d’instruction, au cours de l’instruction, ne le sont pas. La Cour constitutionnelle a pu considérer que cette différence de traitement était raisonnablement justifiée : « le législateur a voulu que la procédure pénale soit encore inquisitoire [au stade de l’information et de l’instruction] afin, d’une part, compte tenu de la présomption d’innocence, d’éviter de jeter inutilement le discrédit sur les personnes, d’autre part, dans un souci d’efficacité, d’être en mesure d’agir vite, sans alerter les coupables »247. Si la phase préparatoire du procès pénal reste principalement unilatérale plusieurs applications du principe du contradictoire ont été introduites dès ce stade. Tant la défense que la partie civile disposent d’une certaine emprise sur la phase préliminaire du procès : elles peuvent demander l’accès au dossier ; elles peuvent solliciter des devoirs complémentaires du juge d’instruction ; elles sont 247 C.A., 13 janvier 1999, arrêt n° 1/99, point B.5. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 197 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 197 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit habilitées à saisir la Chambre des mises en accusation lorsque l’instruction n’est pas clôturée après une année d’investigations. 2. Caractère secret Les raisons qui justifient le caractère unilatéral de l’information et de l’instruction en motivent également le caractère secret : d’une part, il s’agit de respecter l’intégrité morale et la vie privée de toute personne présumée innocente ; d’autre part, il importe de mener l’enquête de manière efficace. Ce secret implique que, dans la phase préliminaire du procès pénal, toutes les pièces du dossier sont réservées à une utilisation judiciaire par des acteurs tenus au secret professionnel (magistrats, policiers, avocats, etc.). La violation du secret professionnel constitue une infraction punie par le Code pénal (art. 458 C.P.). Même devant les juridictions d’instruction, la procédure se déroule en principe à huis clos. Trois exceptions viennent tempérer la rigueur du secret de l’information et de l’instruction248. Toute personne interrogée par le juge d’instruction, le procureur du Roi ou les services de police peut demander une copie du procès-verbal de son audition et doit être informée de ce droit. Les parties ont, dans certaines limites, la possibilité d’accéder au dossier et d’en prendre copie. Tant le procureur du Roi, lorsque l’intérêt public l’exige, que l’avocat, dans l’intérêt de son client, ont la faculté de communiquer des informations à la presse. De tels communiqués doivent respecter la présomption d’innocence, les droits de la défense des suspects, des victimes et des tiers, la vie privée et la dignité de toute personne. Lorsque l’affaire est à l’instruction, le procureur du Roi ne peut faire aucune déclaration à la presse sans l’accord du juge d’instruction. En outre, la presse et les médias ne sont pas tenus au respect du secret de l’instruction, qui est une règle de la procédure. En vertu du principe de la liberté de la presse, ils peuvent publier et rendre compte des informations qui leur parviennent. Ils ne peuvent cependant, sous peine de diffamation ou de calomnie, présenter comme coupables des personnes qui n’ont pas encore été jugées ni condamnées. La phase de jugement La phase de jugement se déroule devant les juridictions du fond qui sont, en première instance, le tribunal de police, le tribunal correctionnel et la cour d’assises. Devant le tribunal de police et le tribunal correctionnel, la personne 248 Voy. les articles 28quiquies, 57 et 61ter du C.I.C. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 198 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 198 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit poursuivie porte le nom de prévenu*. Devant la cour d’assises, on parle d’accusé*. Le terme d’inculpé* est réservé à l’instruction. Ces juridictions ont pour mission de connaître du fond de l’affaire, c’est-à- dire de déclarer la prévention pénale établie ou non. Dans l’affirmative, elles prononcent une peine ou une mesure substitutive de la peine et, si la victime s’est constituée partie civile, elles statuent sur la réparation à lui accorder. À la différence de la phase préliminaire du procès pénal qui a un caractère inquisitoire, la phase de jugement repose sur une procédure de type accusatoire : l’instance est contradictoire, publique et orale. L’oralité des débats n’interdit cependant pas aux juges de fonder leur conviction sur les pièces du dossier répressif constitué au cours de l’information ou de l’instruction. La règle de l’oralité est toutefois plus stricte en assises où les jurés n’ont pas accès à l’ensemble du dossier : ils ne peuvent pas avoir connaissance des déclarations faites par les témoins au cours de l’instruction préparatoire ; ces témoins doivent être entendus sous serment à l’audience. La phase de jugement commence par la saisine de la juridiction compétente qui conduit à la fixation d’une audience, laquelle débouche sur le prononcé d’un jugement. Les spécificités de la procédure devant la cour d’assises ne seront pas examinées ici de façon systématique. L’introduction de l’instance et l’accès au dossier Afin d’être valablement traduite devant les juridictions de jugement, la personne poursuivie doit être avertie du procès pénal entamé à son encontre. Elle le sera le plus souvent par citation dans des formes très proches de celles prévalant en matière civile. La citation à comparaître doit énoncer les faits reprochés afin de permettre au prévenu de préparer sa défense et, pour la même raison, elle doit prévoir un délai de comparution suffisant. En règle, celui-ci est de dix jours, mais il peut être abrégé par le juge, notamment si le prévenu est en détention préventive. À compter de la signification de la citation, le dossier répressif est déposé, dans son intégralité, au greffe de la juridiction de jugement où il peut être consulté par la personne poursuivie et par la partie civile. Ce dossier contient des éléments très variés : procès-verbaux, réquisitoire de mise à l’instruction, constitution de partie civile, ordonnances du juge d’instruction, échanges de correspondance, rapports d’expertise, plan des lieux de l’infraction et photographies, inventaire des pièces à conviction, extrait du casier judiciaire de la personne poursuivie, rapport de moralité établi par la police, etc. L’accès au dossier répressif est un élément essentiel des droits de la défense. C’est en effet sur la base de ce dossier écrit de la procédure, constitué dans le cadre de l’information ou de l’instruction, que le débat judiciaire va se nouer devant la juridiction de fond. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 199 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 199 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit L’audience 1. La comparution de la personne poursuivie En règle et contrairement à l’instance civile, l’audience doit se dérouler en présence de la personne poursuivie pour donner une effectivité pleine et entière à l’instruction d’audience*. Le prévenu qui ne comparaît pas est jugé par défaut*. La loi prévoit toutefois quelques tempéraments à cette règle en permettant au prévenu de se faire représenter par son avocat notamment dans certaines affaires de roulage. 2. L’instruction d’audience L’instruction d’audience a pour but de mettre à plat les éléments du dossier pénal. Comme ces derniers ont été recueillis au cours de la phase préparatoire du procès qui se déroule, dans une large mesure de manière unilatérale et secrète, l’instruction d’audience est l’occasion de les livrer au feu du débat contradictoire afin qu’ils soient, le cas échéant, complétés ou réfutés. L’instruction d’audience consiste tout d’abord en un face-à-face entre le juge et le prévenu, en présence du ministère public, du greffier et, le cas échéant des avocats de la défense et de la partie civile. C’est l’occasion pour le juge de mieux cerner les tenants et les aboutissants de l’affaire qu’il doit trancher, tant sur le plan des faits infractionnels eux-mêmes que sur celui de la personnalité du prévenu. Au cours de l’instruction d’audience, chaque partie peut demander que des experts ou des témoins (agents verbalisant ou toute personne susceptible de fournir des renseignements utiles) soient entendus. Le juge apprécie souverainement si un témoin à charge ou à décharge doit être entendu pour former sa conviction. Dans l’affirmative, le témoin est cité à comparaître et est tenu de témoigner sous serment au risque d’encourir une peine pour refus de témoignage. Le tribunal peut procéder à l’audition des témoins même s’ils ont déjà été entendus au cours de l’information ou de l’instruction préparatoire. Dès l’instruction d’audience, le juge doit contribuer activement à la recherche de la vérité. Il n’est pas un spectateur passif des éléments qui sont portés devant lui par les parties au procès. Contrairement au procès civil, le procès pénal n’est à aucun stade « la chose de parties ». Le juge doit prendre, d’office ou à la demande des parties, toutes les initiatives nécessaires pour étayer les investigations réalisées au cours de l’enquête si elles sont insuffisantes pour lui permettre de trancher le litige. À la condition de respecter le principe du contradictoire, le juge peut donc ordonner que soit accompli tout devoir complémentaire utile à la manifestation de la vérité : expertise, descente sur les lieux, etc. En pratique cependant, les audiences devant le tribunal de police et le tribunal correctionnel n’utilisent guère les possibilités offertes par la loi quant à DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 200 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 200 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit l’instruction de l’audience. Les tribunaux acceptent rarement d’entendre des témoins à la barre et s’en réfèrent exclusivement aux déclarations de ceux-ci telles qu’elles ont été consignées dans les procès-verbaux dressés par le juge d’instruction, le représentant du ministère public, ou le plus souvent par des officiers de police judiciaire. L’ordonnance de mesures d’instruction complémentaires ou une descente sur les lieux sont extrêmement rares. L’instruction d’audience s’effectue pour l’essentiel sur dossier entre professionnels du droit. Les parties elles-mêmes, les prévenus et les victimes n’y comprennent souvent pas grand chose et se bornent généralement à faire de la figuration. Le principe de l’oralité des débats est donc fortement tempéré par cet examen de l’affaire limité aux pièces du dossier. L’instruction d’audience en est également très accélérée. En réalité, seule l’audience d’instruction devant la Cour d’assises utilise pleinement les possibilités d’examen des preuves prévues par la loi car il faut produire les éléments de preuve de l’accusation et de la défense oralement devant les jurés. 3. Les débats À la fin de l’instruction d’audience, le juge donne la parole aux parties. La plaidoirie de la partie civile précède généralement le réquisitoire du ministère public. La défense plaide toujours en dernier lieu. Outre cet exposé oral, les parties peuvent déposer un document écrit qui reprend leur argumentation. Ce document porte le nom de conclusions* lorsqu’il émane du prévenu ou de la partie civile et de réquisitions* lorsqu’il provient du ministère public. Le dépôt de conclusions n’est pas anodin. Il oblige le juge, dans sa décision, à rencontrer l’ensemble des moyens* qui y sont soulevés pour qu’elle soit correctement motivée. Le jugement Le jugement pénal obéit aux mêmes règles que le jugement civil, sous réserve de certaines règles particulières. Le jugement doit être motivé. En vertu du principe de légalité* du droit pénal, le juge doit constater la réunion des éléments constitutifs de l’infraction au regard des dispositions légales applicables. La motivation doit porter tant sur la question de la culpabilité que sur celle de la peine retenue. Le législateur reconnaît au juge une large marge d’appréciation quant à la mesure (« fourchette » pour les peines d’amende et de prison), à la nature (emprisonnement, travail, etc.) et aux modalités (suspension du prononcé, sursis, etc.) de la peine. Il importe dès lors que le juge justifie son choix : « le jugement indique, d’une manière qui peut être succincte mais doit être précise, les raisons du choix que le juge fait de telle peine DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 201 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 201 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit ou mesure parmi celles que la loi lui permet de prononcer. Il justifie en outre le degré de chacune des peines ou mesures prononcées »249. Le jugement est prononcé en audience publique. Il est revêtu de l’autorité de la chose jugée. En vertu du principe général du droit* non bis in idem, une personne condamnée ou acquittée ne peut plus être ultérieurement poursuivie pour les mêmes faits. Le jugement pénal n’est en principe pas exécutoire immédiatement. Il ne le devient qu’après l’écoulement des délais prévus pour exercer les voies de recours. Au pénal, contrairement au civil, le pourvoi en cassation a un effet suspensif. Les voies de recours Comme au civil, les voies de recours au pénal sont l’opposition, l’appel et le pourvoi en cassation. Dans une large mesure, les règles prévues par le Code judiciaire s’appliquent également. 1. L’opposition L’opposition est ouverte contre tout jugement rendu par défaut, c’est-à-dire, au pénal, celui qui est pris contre la partie poursuivie qui n’a pas comparu ou qui n’a pas présenté ses moyens de défense. En pratique, les possibilités de faire opposition sont devenues très restreintes. Elles impliquent que la partie défaillante qui a eu connaissance de la citation dans la procédure dans laquelle elle a fait défaut fasse état d’un cas de force majeure ou d’une excuse légitime justifiant son défaut lors de la procédure attaquée. Le délai pour faire opposition est de 15 jours à compter de la signification de la décision ou du moment où le condamné en a eu connaissance. L’opposition ramène l’affaire devant le juge qui a rendu le jugement par défaut. L’opposition ne peut nuire à l’opposant : le tribunal ne peut jamais prononcer une condamnation plus grave que celle portée par le jugement rendu par défaut. 2. L’appel Toutes les décisions judiciaires rendues en première instance sont en principe susceptibles d’appel. La loi prévoit toutefois des exceptions à ce principe dont la plus importante concerne la cour d’assises qui statue en premier et dernier ressort. Les parties à l’instance du premier degré (prévenu, ministère public, partie civile) peuvent interjeter appel dans un délai de 30 jours à dater du prononcé de la 249 Art. 195, al. 2 du C.I.C. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 202 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 202 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit décision250. La partie qui fait appel, qu’il s’agisse du prévenu ou du ministère public, doit préciser dans sa requête les griefs, c’est-à-dire les critiques qu’elle adresse au jugement et préciser les points sur lesquels il y a lieu de modifier la décision prise en première instance. Comme en première instance, les différentes parties sont entendues à l’audience et le juge d’appel peut ordonner toutes les mesures nécessaires à la manifestation de la vérité : audition ou ré-audition de témoins, désignation d’experts, etc. Si l’appel est interjeté uniquement par le prévenu, la juridiction d’appel ne peut rendre une décision plus sévère que le juge de première instance. Si, par contre, l’appel est interjeté par le ministère public, la décision de la juridiction d’appel pourra être favorable ou défavorable au prévenu puisque le ministère public agit, non pour son compte personnel, mais dans l’intérêt de la bonne application de la loi. En pratique, le ministère public fait systématiquement appel lorsque le prévenu fait appel de sa condamnation en première instance. L’objectif est dissuasif : le condamné qui fait appel sait qu’il risque aussi une aggravation de sa peine. 3. Le pourvoi en cassation Un pourvoi en cassation peut être introduit contre toute décision rendue en dernier ressort par toute partie au procès pénal. Le délai pour saisir la Cour de cassation est de 15 jours à dater du prononcé de la décision. Le pourvoi doit être motivé et introduit par un avocat qui a suivi une formation spécialisée à la procédure en cassation pénale. L’exécution du jugement C’est au ministère public qu’il incombe d’exécuter le jugement rendu sur l’action publique. En cas de condamnation à une peine d’emprisonnement sans sursis (qui est une modalité d’exécution de la peine consistant à surseoir à son exécution pendant un délai d’épreuve plus ou moins long), le ministère public envoie au prévenu non détenu préventivement un billet d’écrou par lequel ce dernier est invité à se présenter à la date indiquée dans l’établissement pénitentiaire désigné pour y purger sa peine. Si ce billet d’écrou reste sans effet, le ministère public délivre une ordonnance de capture aux termes de laquelle les 250 Une loi du 6 juin 2022 prévoit, sans modifier le délai initial de 30 jours pour interjeter appel à dater de la décision prononcée par une juridiction pénale, que : « 1° si le prévenu ou la partie civilement responsable a interjeté appel, le ministère public dispose d'un délai supplémentaire de dix jours pour interjeter appel. Ce délai court à partir de l'expiration du délai d'appel ouvert au prévenu ou à la partie civilement responsable ; 2° si le ministère public a interjeté appel, le prévenu et la partie civilement responsable disposent d'un délai supplémentaire de dix jours pour interjeter appel. Ce délai court à partir de l'expiration du délai d'appel ouvert au ministère public ». Cette modification législative fait suite à l’arrêt n°96/2019 du 6 juin 2019 de la Cour constitutionnelle. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 203 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 203 FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit agents de la force publique sont habilités à arrêter le condamné et à le conduire de force (manu militari) dans un établissement pénitentiaire. Les tribunaux d’application des peines sont compétents pour statuer sur les demandes relatives aux modifications des modalités d’exécution de la peine, comme les demandes d’assignation à résidence sous surveillance électronique ou de libération conditionnelle, ainsi que de modifications de la peine elle-même (par exemple, la transformation d’une courte peine d’emprisonnement en une peine de travail). SECTION 7 : LA JURISPRUDENCE La jurisprudence* désigne l’ensemble des décisions de justice et les enseignements qu’on en tire sur l’état du droit. Autrement dit, la jurisprudence exprime le droit tel qu’il est appliqué par les juges. De manière spécifique, le terme jurisprudence sert aussi à désigner les décisions judiciaires propres à un État déterminé (la jurisprudence belge, par exemple), à une juridiction déterminée (la jurisprudence de la Cour de cassation, la jurisprudence du tribunal du travail de Bruxelles, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, etc.), à une branche du droit, à une matière ou à une question juridique précise (la jurisprudence administrative, la jurisprudence commerciale, etc.). Les décisions de justice La jurisprudence trouve son siège dans les jugements et arrêts. Ceux-ci sont des actes obligatoires, revêtus de l’autorité de la chose jugée*. Cependant, l’effet obligatoire de la décision et son autorité sont limités à l’affaire en cause. Le jugement énonce donc une décision obligatoire, concrète et particulière. Les jugements n’ont pas et ne peuvent avoir la forme ou la portée d’un règlement251. Le jugement remplit une fonction indispensable. Il constitue l’intermédiaire obligé entre la norme abstraite édictée dans la loi ou le règlement et son application concrète à des situations singulières, en cas de litige ou de contestation. Il faut bien mesurer toute la distance qui sépare, d’une part, les formules verbales consignées dans les textes légaux ou réglementaires et, d’autre part, l’infinie diversité et la complexité des situations où ces textes peuvent trouver à s’appliquer dans les péripéties de la vie sociale. Le juriste, en général, et le juge, en particulier, travaillent à combler cette distance. Il s’agit de comprendre le texte, d’en définir 251 Art. 6 du Code judiciaire. DROI-C-1001 PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 204 DROI-C-1001_A PUB Cours-Librairie, av. P. Héger 42, B-1000 Bruxelles 204