Histoire des Faits Économiques - Licence Eco-gestion – 1ère année - Séance 10 - PDF
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Université Paris Nanterre
2024
Patrice Baubeau
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These are lecture notes from a course on economic history. The lecture notes cover issues of industrial revolutions, banking, and the history of money. The date of the lecture is given as 9/12/2024.
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Histoire des Faits Économiques Licence Eco-gestion – 1ère année Séance 10 – 9/12/2024 De la naissance des banques à l’essor des banques centrales Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Résumé de la séance précédente : la révolution industriel...
Histoire des Faits Économiques Licence Eco-gestion – 1ère année Séance 10 – 9/12/2024 De la naissance des banques à l’essor des banques centrales Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Résumé de la séance précédente : la révolution industrielle L’expression de révolution industrielle (R.I.) apparaît à la fin du XVIII e siècle – Mais elle ne se généralise qu’à la suite de la publication de l’œuvre posthume de Toynbee en 1884 – Elle désigne d’abord une transformation des processus de production (usines et machine à vapeur) et des objets et services offerts aux consommateurs (textiles de coton, métallurgie, transports…) Toutefois, la tentative d’identifier statistiquement ce processus échoue – Ni take off ni big spurt ne sont visibles dans les données macroéconomiques ou macrosociales – La R.I. est en effet D’un point de vue productif, un phénomène local, qui touche des régions ou des secteurs économiques limités D’un point de vue technique et scientifique, un phénomène diffus qu’il est difficile d’attribuer à un lieu ou à une époque précise En conséquence, la notion de révolution industrielle a évolué depuis Toynbee – Enrichie par l’étude de la demande et des transformations sociales – L’idée d’une rupture brutale est remplacée par une approche gradualiste – Les processus de diffusion et d’extension de la R.I. doivent aussi sur insister sur ses limites Enfin, la dimension sociale et anthropologique devient peu à peu cruciale – Augmentation rapide de la population humaine – Evolution des comportements démographiques : natalité, mortalité, morbidité – Evolution de la part des grands secteurs productifs (modèle de Clark) du fait des gains de productivité et des échanges internationaux – Transformation profonde des sociétés, individualisation Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Introduction : de la monnaie aux banques La séance 2 a abordé la naissance des monnaies (frappe, fiduciarité, convertibilité) Nous avons vu que la monnaie était un des principaux instruments de coordination des sociétés urbaines, avec l’État Mais « la » monnaie se présente en réalité sous des formes très diverses. En simplifiant, il en existe deux grandes catégories : 1. Des monnaies dont la valeur est associée à un support : ce sont les « monnaies cash » – Des coquillages (cauris), des coupons de tissus, des objets spécifiques de fer, de laiton ou de cuivre et surtout de l’or, de l’argent et d’autres métaux – La valeur de ces objets, dont les métaux, s’appuie sur leur beauté, sur leur rôle dans la parure et sur leur infalsifiabilité 2. Des monnaies qui sont créées à partir d’un rapport entre des individus ou des institutions : ce sont les « monnaies dettes » – Leur valeur dépend des règles établies entre ces individus et institutions et du rapport entre la quantité de ces monnaies et leurs usages – Par exemple des monnaies fabriquées dans un métal de faible valeur (cuivre, bronze) – Les reconnaissances de dettes établies entre commerçants (les effets de commerce) – Les billets non convertibles émis depuis la Première Guerre mondiale et surtout depuis 1971/1976 Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Introduction : de la monnaie aux banques Évidemment, ces deux catégories de monnaies ne sont ni indépendantes l’une de l’autre, ni parfaitement substituables : elles coexistent le plus souvent – Elles reposent souvent sur une forme ou l’autre de confiance – Elles s’échangent les unes contre les autres selon des règles de change et de convertibilité Par ailleurs, monnaies et dettes sont des instruments de pouvoir et c’est pourquoi les États se sont très tôt arrogé le pouvoir monétaire : – Lorsque vous possédez une créance sur quelqu’un, que cette personne est endettée à votre égard, elle est votre obligée : Vous avez un certain pouvoir sur cette personne, ne serait-ce que le pouvoir de la faire payer (étymologie : payer = faire la paix) – De la même manière, l’autorité qui émet la monnaie, dispose d’un pouvoir monétaire : Les signes émis peuvent ou doivent être employés par d’autres agents comme monnaie légale (c’est ce qu’on appelle le cours légal) La différence entre le coût d’émission des signes monétaires et leur valeur monétaire, constitue un profit : le seigneuriage Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Introduction : de la monnaie aux banques Mais il y a deux limites à ce pouvoir monétaire : – Les règles de convertibilité : Si vous avez le droit d’échanger une monnaie contre une autre monnaie, et que le prix auquel se fait cet échange est (relativement) fixe ou indépendant du pouvoir, alors vous pouvez échapper au pouvoir de l’autorité monétaire C’est pourquoi, dans les dictatures ou les pays en crise, l’autorité interdit souvent le change ou la conversion des monnaies, voire la possession de monnaies étrangères – Les règles de la confiance : Si l’autorité abuse de son pouvoir monétaire – par exemple en émettant de la monnaie en très grande quantité – alors les agents vont tâcher de se débarrasser de cette monnaie, ce qui fait baisser son prix / sa valeur / son pouvoir d’achat C’est le mécanisme de l’inflation et plus spécialement de l’hyperinflation – L’hyperinflation est généralement définie comme étant un rythme annuel d’inflation de 50 % par an ou plus pendant plusieurs années ou de 100 % pour une année (doublement des prix) – Cela vous permet aussi de comprendre pourquoi la plupart des hyperinflations ont pris place dans des pays à la fois en crise et autoritaires, c’est-à-dire où les règles de convertibilité et de confiance étaient violées simultanément Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Introduction : de la monnaie aux banques La plupart des autorités politiques, et tous les États modernes, ont tâché de capter ce pouvoir monétaire, de deux façons : – En s’assurant le monopole de l’émission de monnaie (en particulier du cash) – En prenant le contrôle des règles de convertibilité et de confiance Mais l’autorité n’a pas le même pouvoir sur toutes les monnaies – Certaines monnaies sont facilement contrôlées par l’autorité : Monnaies matérielles, comme les pièces et les billets – D’autres monnaies résultent en partie de processus de marché, que l’autorité peut réguler mais pas entièrement contrôler : Monnaies cambiaires issues des dettes entre particuliers Monnaies bancaires et scripturales Monnaies de compte ou virtuelles de type Bitcoin associées à des processus de marché On dira donc que certaines monnaies sont plutôt – verticales, fondées sur une relation d’autorité ou sur la confiance dans cette autorité – horizontales, fondées sur une relation d’échange ou de confiance envers d’autres agents Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Introduction : de la monnaie aux banques Etat Monnaie Autorité Impôts Agents à revenus et contribuables Consommation Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Introduction : de la monnaie aux banques Etat Dettes Monnaie Autorité Achats Impôts Monnaie Producteurs Clients Salaires et profits Agents à revenus et contribuables Consommation Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Introduction : de la monnaie aux banques Etat Système monétaire et bancaire Monnaie Monnaie Producteurs Clients Agents à revenus et contribuables Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Introduction : de la monnaie aux banques Un système monétaire combine et organise les relations d’échange entre les monnaies verticales et les monnaies horizontales – Ou entre la dimension horizontale et la dimension verticale d’une monnaie L’institution qui réalise cette articulation est la banque ou plus généralement le système bancaire – La banque est l’activité ou l’institution qui transforme une dette en monnaie ou une monnaie en dette et qui gère l’échange entre les différentes sortes de monnaie Les banques n’ont pas été « inventées », elles ont évolué progressivement – Soit à partir de pratiques commerciales : échange de marchandises, tirage des effets de commerce correspondants, paiements, arbitrages sur le prix des métaux, opérations de change, tenue du compte des clients, virements entre ces comptes, certificats de dépôts… – Soit à partir de pratiques étatiques : paiement des dignitaires et soldats, placements auprès des épargnants des titres de la dette publique, paiement des arrérages de cette dette,transfert des impôts et tributs, équilibre des besoins de financement à court terme de l’État, émission de monnaie manuelle ensuite utilisée pour la collecte des taxes et des impôts… Nous allons nous concentrer ici sur la partie la plus récente de cette histoire, celle qui accompagne la révolution industrielle – Mais il ne faut pas oublier que les banques sont beaucoup plus anciennes et remontent à l’Antiquité Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Introduction : de la monnaie aux banques I. Les trois modèles de la banque commerciale A. La banque d’escompte B. La banque de dépôts C. La banque de gage et de commission D. De la banque spécialisée à la « banque à tout faire » II. Des banques commerciales aux banques d’émission A. Transformer une dette en monnaie B. Le modèle baltique C. Le modèle continental III. Des banques d’émission aux banques centrales A. Le monopole fiduciaire B. La non-lucrativité C. Le prêt en dernier ressort D. La supervision Patrice Baubeau I. Les trois modèles de la banque commerciale A. La banque d’escompte La banque d’escompte est l’un des plus anciens modèles de banque Elle est née du négoce et se retrouve dans toute l’Eurasie et l’Afrique du Nord – cf. exemple des commerçants de Tanis et Assûr Le principe de la banque d’escompte est assez simple : – Un négociant ou un industriel vend un produit à un commerçant – Mais le commerçant ne pourra payer l’industriel qu’une fois qu’il aura lui- même vendu ce produit Le problème est donc le suivant : comment réconcilier – L’industriel qui veut vendre et être payé maintenant – Le commerçant qui veut acheter mais n’aura les fonds que plus tard, quand il aura vendu Patrice Baubeau I. Les trois modèles de la banque commerciale A. La banque d’escompte La solution réside dans l’émission d’un effet de commerce ou traite qui est tiré par l’industriel sur le commerçant en échange d’un taux d’intérêt et d’une échéance – L’industriel livre les marchandises au marchand et tire une traite sur ce marchand – Le marchand accepte la traite et reçoit les marchandises de l’industriel L’industriel détient alors un titre de créance sûr : une traite acceptée – Sa valeur est associée à la marchandise qui a été fabriquée et livrée au marchand – Le marchand s’est engagé à payer cet effet de commerce à une date proche et convenue d’avance L’industriel peut alors négocier, c’est-à-dire vendre, cette traite à un agent qui dispose de liquidités qu’il souhaite placer, puisque la traite porte un intérêt – Cet agent qui escompte (achète) l’effet de commerce fait une opération bancaire Patrice Baubeau I. Les trois modèles de la banque commerciale A. La banque d’escompte Mouvement de signature ou de papier Mouvement de valeur Accepte la LDC Tireur / Bénéficiaire Tiré / Preneur Donneur (de la marchandise) (de la marchandise) Remet les marchandises Escompte la LDC Négocie la LDC Présente la LDC à l’échéance Banquier Payeur de la LDC Paye la LDC à l’échéance Patrice Baubeau I. Les trois modèles de la banque commerciale B. La banque de dépôts La banque de dépôts est tout aussi ancienne et a deux sources : – Des institutions, souvent des temples ou des organismes étatiques, qui recevaient des paiements de type fiscal, en monnaie ou en nature (récoltes, produits manufacturés) – Des négociants ou des orfèvres qui proposaient de conserver des objets de valeur dans leurs coffres Ces dépôts sont inscrits sur des livres, c’est-à-dire des registres où l’on note : – Le nom et l’adresse des déposants – La nature et le montant de leurs dépôts et de leurs retraits – Le solde de leur compte Ces dépôts, ensuite, peuvent être mobilisés de trois manières – La technique la plus simple consiste à venir déposer ou chercher des fonds chez le banquier – Mais le client peut aussi demander au banquier de lui remettre un certificat de dépôt pour une somme convenue (inférieure au montant du solde de son compte) ensuite employé pour payer un achat ou rembourser une dette – à condition que son créancier ait confiance dans la banque – Enfin, le client peut demander au banquier de virer directement une somme convenue depuis son compte sur le compte de son créancier si ce dernier dispose d’un compte auprès du même banquier. Ce virement entre parties réduit les risques de pertes ou de vol et rend les paiements très simples Ces banques de dépôts se sont notamment développées en Italie du Nord – les banquiers sont alors de gros négociants, comme Marco Datini – ou à Londres, et ce sont plutôt des orfèvres Patrice Baubeau I. Les trois modèles de la banque commerciale C. La banque de gage et de commission Imaginons maintenant que le producteur ait déjà fabriqué ou transporté son produit, sans attendre d’avoir trouvé un client au préalable, donc sans pouvoir tirer de traite – Mais le producteur a quand même besoin de fonds, par exemple pour payer ses ouvriers ou rembourser ses fournisseurs La solution consiste à gager ou à warranter la marchandise – Le producteur dépose sa marchandise dans un magasin ou entrepôt tenu par un magasinier – il reçoit un warrant ou certificat de dépôt, qui garantit qu’il est le propriétaire de la marchandise décrite et que cette marchandise est bien entreposée dans ledit magasin. – Il paye une commission pour les frais de garde et une assurance pour la marchandise Cette marchandise entreposée en magasin, le plus souvent près d’un port, est proposée à la vente – Lorsque l’acheteur repère la marchandise qui lui convient, il ne peut l’emporter qu’avec le warrant – Muni du warrant, l’acheteur peut retirer la marchandise du magasin Mais qui détient le warrant / certificat de dépôt, et pour quel usage ? – Cela peut être le producteur ou déposant initial, comme preuve de propriété – Mais ce warrant peut aussi être remis en garantie d’un prêt bancaire – Le crédit sur (dépôt de) marchandises est donc gagé sur la valeur de la marchandise. Si le débiteur ne peut payer à l’échéance, alors le banquier prêteur peut faire vendre la marchandise puisqu’il dispose du warrant Comme vous voyez, qu’il s’agisse de A, B ou C, l’opération de banque repose toujours sur la possibilité d’un crédit ou sur un décalage des paiements dans le temps Patrice Baubeau I. Les trois modèles de la banque commerciale D. De la banque spécialisée à la « banque à tout faire » En Europe, jusqu’au XVIIe siècle, l’activité bancaire n’est le plus souvent que l’une des activités de gros négociants, parfois spécialisés dans l’une des trois formes (A, B, C) ci-dessus. Ces marchands-banquiers jouent également un grand rôle dans le financement des États L’essor des économies lié à la Révolution industrielle, le développement du commerce et la taille croissante des entreprises, se traduisent dans l’évolution des banques : – Elles font progressivement tous les métiers (A, B et C) au cours du XVIIIe siècle – Elles animent les marchés financiers, où elles financent et refinancent leurs opérations – Elles changent de taille, notamment en collectant les dépôts des entreprises et des particuliers Au début du XIXe siècle, ces banquiers créent des sociétés en nom collectif, étroitement imbriquées dans des réseaux familiaux (Hope, Lecoulteux, Rothschild, Goüin, Baring…) – Ces sociétés collectent des capitaux plus importants – Elles développent une activité nouvelle : l’émission d’emprunts publics pour le compte des États, puis des nouvelles entreprises industrielles – Mais elles dépendent de leurs capitaux propres, par définition limités malgré la richesse de ces banquiers Patrice Baubeau I. Les trois modèles de la banque commerciale D. De la banque spécialisée à la « banque à tout faire » Ainsi, en Angleterre, en France et en Allemagne, on voit apparaître des banques géantes dans la seconde moitié du XIXe siècle, sous la forme de sociétés de capitaux anonymes à responsabilité limitée – Les Big Five au Royaume-Uni : Barclays, Lloyd, Midland, National Provincial et Westminster Aujourd’hui : HSBC, Barclays, RBS, Lloyds et Standard Chartered – Les 4D en Allemagne : Deutsche Bank, Dresdner Bank, Darmstadter Bank et Diskonto Gesellschaft Aujourd’hui : Deutsche Bank ; DZ Bank et Commerzbank – Les grands établissements de crédit en France : Crédit lyonnais, Société générale, CIC, Comptoir d’Escompte de Paris Aujourd’hui : Le Crédit lyonnais (CL) a été racheté par le Crédit agricole ; le Comptoir d’escompte a fusionné dans BNP Paribas ; le CIC a été racheté par le Crédit mutuel – seule la Société générale existe encore comme entreprise indépendante Ces banques géantes deviennent des banques à tout faire, car non seulement elles font toutes les opérations, nationales et internationales, mais elles s’adressent peu à peu à tous les publics – États, entreprises privées, services publics, collectivités locales et particuliers Patrice Baubeau II. Des banques commerciales aux banques d’émission A. Transformer une dette en monnaie Dans les trois cas abordés (A, B, C), le banquier enregistre donc à son bilan deux valeurs équivalentes : – A son passif, une dette : par exemple le montant des dépôts ou de ses emprunts sur le marché financier – A son actif, une créance : l’avance accordée sur la marchandise, l’escompte de l’effet de commerce, le découvert sur le compte, le crédit accordé à l’entreprise ou au ménage Cette créance à l’actif, le banquier peut décider de – La mettre en circulation, c’est-à-dire d’émettre pour un montant équivalent un titre de paiement : le billet de banque – La vendre, le plus souvent en réunissant ensemble des créances similaires, de manière à réduire le risque propre à chaque créance (risque idiosyncrasique) : c’est ce qu’on appelle la titrisation Patrice Baubeau II. Des banques commerciales aux banques d’émission A. Transformer une dette en monnaie Ainsi, un billet de banque n’est rien d’autre que la reconnaissance de dette d’un banquier, inscrite à son passif. Cette reconnaissance de dette est garantie par une valeur équivalente inscrite à son actif : – Soit des valeurs matérielles (or, argent, marchandises) – Soit des titres de créance Effets de commerce, comme des lettres de change, des traites, etc. Titres financiers, comme des actions ou des obligations de sociétés de capitaux – Soit même des crédits directs Investissements dans des entreprises, pour financer leur développement Avances en compte courant pour financer la trésorerie d’entreprises, découverts Si ce billet de banque est accepté par les autres agents pour régler leurs ventes et leurs créances, alors ce billet joue le rôle de la monnaie : la banque a transformé une dette en monnaie – Regardons ce qu’il se passe à partir du bilan d’une banque… Patrice Baubeau II. Des banques commerciales aux banques d’émission A. Transformer une dette en monnaie Exemple : une banque dont le bilan est de 100 K€ prête 40 K€ à un emprunteur Situation initiale Etape 1.1. Etape 1.2. ACTIF PASSIF ACTIF PASSIF ACTIF PASSIF Liquidité Capital Liquidité Capital Liquidité Capital 20 20 20 20 20 20 Crédits Dépôts Crédits Dépôts Crédits Dépôts 80 80 80 80 80 80 Nouvx Nouvx Nouvx crédits 40 ? crédits 40 dépôts 40 Ratios : Ratios : Fonds propres : 0,25 Fonds propres : 0,17 Liquidité : 0,25 Liquidité : 0,17 Patrice Baubeau II. Des banques commerciales aux banques d’émission B. Le modèle baltique Les États du XVIIe siècle sont bien sûr très intéressés par ces techniques bancaires. Ils y voient un moyen : – D’améliorer le commerce, et donc d’augmenter leurs ressources fiscales – De vendre leurs dettes aux banques pour obtenir ainsi une sorte de monnaie, afin de financer leurs guerres Les États du nord, héritiers de la Hanse, vaste ensemble coordonné d’échanges commerciaux de la Baltique à la Mer du Nord, développent de telles banques publiques Cela va permettre l’émergence d’un premier modèle de banque d’émission : le modèle baltique (Juha Tarkka) : – La Banque de Stockholm, première banque d’émission en Europe, 1656/1660 – La Kurantbank du Danemark, 1736-1813 – La Banque royale de Prusse, 1765 – La Banque (d’Assignat) de Russie, 1786 – La Banque de Finlande, 1811/12 Patrice Baubeau II. Des banques commerciales aux banques d’émission B. Le modèle baltique Le modèle baltique repose sur quelques principes simples : – Une division de la banque d’émission en deux départements distincts : Une banque de dépôts et d’émission, qui procède au change, aux virements et à l’émission de certificats métalliques ou de valeur : les billets Une banque de crédit, fondée sur le rôle de place commerciale du port concerné (banque d’emporium). – Des opérations fondées sur des actifs tangibles : Marchandises Métaux précieux, monnayés ou non – Une propriété et un contrôle publics Le bilan type de la banque baltique ACTIF PASSIF Numéraire Billets Effets de commerce Dépôts Marchandises consignées HORS BILAN Avals sur EDCs Marges sur marchandises Patrice Baubeau II. Des banques commerciales aux banques d’émission B. Le modèle baltique L’organisation en deux départements : Contrôle de l’Etat Direction unique Département Département d’émission / monétaire bancaire / de crédit Change Crédit Réserves Gages Emission de billets Tenue de comptes Exemple de daler, monnaie de cuivre suédoise, fin XVIIe siècle Patrice Baubeau II. Des banques commerciales aux banques d’émission B. Le modèle baltique Mais ce modèle de banque apparaît en fait très risqué Sa conception est trop focalisée sur le risque de solvabilité – D’où une faible attention au problème de la liquidité bancaire – Renforcé par risque de collatéral plus élevé que généralement supposé Il n’y a pas de proportion établie automatiquement entre émission de billets et besoins de liquidité de l’économie – Mais seulement avec les besoins de liquidité du commerce international – D’où des crises de la dette externe et des crises inflationnistes (dévalorisation du billet) Le biais politique et social est élevé, d’où une incitation à la surémission – Comme le stockage de produits permet automatiquement d’émettre de la monnaie, il y a risque de surstockage ou de surévaluation des stocks afin d’alimenter l’État en monnaie – Cela s’observe dans les cas suédois et russe, où l’on observe des épisodes d’hyperinflation de nature politique – Ces défauts alimentent la spéculation sur marchandises et le risque de corners Les taux ne sont pas flexibles – En particulier, ils sont trop dépendants de la saisonnalité des productions agricoles et industrielles - c’est l’une des raisons pour lesquelles les États-Unis finiront par se doter d’une banque centrale en 1913 (FED) Patrice Baubeau II. Des banques commerciales aux banques d’émission B. Le modèle baltique 1. L’exemple suédois de la Sveriges Riksbank La première banque d’État suédoise, la Banque de Stockholm est créée par Johan Palmstruch (né Hans Wittmacheren) en 1657, à la suite d’un privilège royale accordé en 1656 – En 1661 elle commence à émettre des billets – la première en Europe – Sur pression du Roi, qui se sert de la Banque pour financer ses opérations militaires, ces billets sont émis en surnombre par rapport aux garanties présentes à l’actif – Aussi, elle fait faillite en 1667 – Palmstruch est condamné à mort mais sa peine est commuée en emprisonnement et il meurt en prison en 1670 – La Banque de Stockholm est remplacée en 1668 par la Riksens Ständers Bank, ce qui en fait la plus ancienne banque centrale dans le monde encore en activité Patrice Baubeau II. Des banques commerciales aux banques d’émission B. Le modèle baltique 1. L’exemple suédois de la Sveriges Riksbank La Riksens Ständers Bank, est créée en 1668 Elle est placée sous le contrôle du Parlement pour – …éviter que l’État ne cause la faillite de la nouvelle banque… En forçant la Riksens Bank à acheter de de la dette publique Et par un contrôle opaque sur la banque – …maintenir la confiance dans la monnaie par le contrôle des règles d’émission Le Parlement interdit jusqu’en 1701 l’émission de billets À la fin du XVIIIe siècle, le Parlement ne peut empêcher l’État se s’endetter massivement – Ces dettes sont émises aussi sous la forme de billets du Trésor – Il y a ainsi une double circulation de billets : ceux des banques (et surtout de la RSB) et ceux du Trésor Une réorganisation monétaire s’impose au XIXe siècle – Le Parlement fixe un taux de change fixe entre billets de la RSB et billets du Trésor – Il impose peu à peu la fusion entre ces billets – La RSB devient le principal émetteur de billets du Royaume, est rebaptisée Sveriges Riksbanken 1866 et obtient le monopole d’émission en 1897 Patrice Baubeau II. Des banques commerciales aux banques d’émission C. Le modèle continental Face au modèle baltique, un autre modèle de banque d’émission est développé en Europe continentale et, dans un premier temps, en Angleterre (Banque d’Angleterre, 1694) Ce modèle ne repose pas sur la marchandise, mais sur les effets de commerce ou traites : – Il offre une plus grande sécurité, puisque la création monétaire (l’émission de billets) n’intervient qu’une fois que la marchandise a été vendue (mais pas payée) – Il s’agit donc de banques d’escompte et d’émission (dites aussi banques de circulation) : Banque d’Angleterre, 1694 Banque Générale crée par John Law et devenue Banque Royale, 1716-1720 Caisse d’escompte, 1776-1793 Banque de Saint-Charles – Madrid, 1782-1829 Banque de France, 1800 Patrice Baubeau II. Des banques commerciales aux banques d’émission C. Le modèle continental Ce sont ces banques de circulation qui obtiennent les plus grands succès aux XVIIIe et au XIXe siècle Le XIXe siècle apparaît ainsi comme le siècle de la « révolution de l’escompte » (Alain Plessis) – Les progrès des transports et communications facilitent l’envoi de millions de lettres de change à l’intérieur des pays comme à l’international – Ces millions de lettres de change sont massivement escomptées par des banques, qui allègent ainsi les contraintes de trésorerie (besoin de fonds de roulement) des entreprises – En cas de besoin, les banques trouvent un accès facile à la liquidité, sous forme de billets ou de crédits en compte courant, auprès de la fenêtre d’escompte des banques d’émission – Ces banques d’émission se trouvent ainsi en position de régulateur du système monétaire et bancaire, notamment en réglant cette fenêtre d’escompte, et en particulier le taux d’escompte qui devient peu à peu le taux directeur de l’économie La Banque de France, la Banque de Belgique ou la Banque du Japon incarnent parfaitement ce modèle – Paradoxalement, la Banque d’Angleterre s’en éloigne avec la réforme de 1844 qui la rapproche du modèle baltique – mais c’est aussi parce que le système bancaire anglais est désormais davantage fondé sur le marché financier que sur le crédit bancaire Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques III. Des banques d’émission aux banques centrales Les banques centrales modernes sont donc les héritières d’une tradition très ancienne de banques d’émission, fondées soit sur le modèle – baltique – banques de marchandises finançant le commerce extérieur sous le contrôle de l’État – continental – banques d’escompte finançant le négoce et « indépendante » à l’égard de l’État Au XXe siècle, banques d’émission se transforment peu à peu en banques centrales en réduisant progressivement leur clientèle aux seules banques commerciales et aux États – Elles deviennent ainsi des banques de premier rang – Les banques commerciales sont alors appelées banques de second rang Elles émettent aujourd’hui deux sortes de monnaie – Des billets fiduciaires, accessibles à tout un chacun – De la monnaie scripturale accessible seulement aux banques de second rang et aux États – Le développement des Monnaies numériques de banque centrale – MNBC – pourrait modifier cette situation dans les années qui viennent Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques III. Des banques d’émission aux banques centrales A partir du XXe siècle, les États ne créent plus de banque d’émission, mais directement des banques centrales – par exemple lors des décolonisations des années 1950 et 1960 – C’est aussi lié à l’abandon de l’usage de l’or et de l’argent comme monnaie Las banques centrales modernes se distinguent des banques ordinaires se par quatre caractéristiques : – Le monopole de l’émission fiduciaire – La non-lucrativité – La fonction de prêteur en dernier ressort – La fonction de supervision et de contrôle prudentiel Patrice Baubeau III. Des banques d’émission aux banques centrales A. Le monopole de l’émission fiduciaire 1. La Banque d’Angleterre, Bank of England – BoE À leur création, la plupart des banques centrales ne disposaient pas du monopole fiduciaire, ou seulement dans une région limitée – Créée en 1694, la BoE ne dispose d’abord que d’un monopole indirect, établi en 1709 : elle est la seule « société anonyme » autorisée à émettre des billets de banque. En comparaison, les autres banques restent donc de petite taille – A partir de 1826, la constitution de sociétés anonymes bancaire est autorisée, mais ces banques ne peuvent pas émettre de billets payables (remboursables en or) à Londres : la Banque d’Angleterre dispose d’un monopole de l’émission des billets de banque dans un périmètre limité de 65 miles (env. 105 km) autour de la City de Londres – En 1844, l’Act of Peel (loi de Peel) établit le monopole national de la Banque d’Angleterre sur l’émission de billets. Toutefois, la loi n’étant pas rétroactive, les banques qui émettaient des billets auparavant peuvent continuer à le faire à condition de ne pas dépasser le maximum d’émission atteint en 1843. Peu à peu, du fait de la hausse de la circulation des billets et du rachat de ces banques privées d’émission, la Banque d’Angleterre domine presque entièrement l’émission fiduciaire britannique – Le monopole de la BoE est confirmé lors de la nationalisation de la Banque d’Angleterre en 1946. Aujourd’hui, il reste trois banques commerciales d’émission en Écosse et trois en Irlande (une a cessé d’émettre en juin 2020) – s’y ajoutent des émetteurs publics dans quelques îles dépendant de la Couronne III. Des banques d’émission aux banques centrales A. Le monopole de l’émission fiduciaire 2. La Banque de France (BdF) La BdF est fondée en 1800, sous le nouveau régime du Consulat, dans un contexte de « free banking », c’est-à-dire de liberté de création des banques commerciales d’émission. À cette époque, il en existe donc de nombreuses en France, dont plusieurs à Paris En 1803, Napoléon et son ministre des Finances, Gaudin, décident de confier l’émission fiduciaire locale à des monopoles privés. La Banque de France devient la seule banque autorisée à émettre des billets à Paris A partir de 1819, des banques départementales d’émission sont créées dans les grandes villes de province. Dès les années 1830, leur expansion menace la prééminence de la Banque de France : il y a un conflit de monopoles locaux. Aussi, à partir de 1836, la Banque de France crée des succursales dans les grandes villes qui ne disposent pas encore de banques départementales d’émission La révolution de 1848 met les banques départementales d’émission en difficulté, et la Banque de France obtient, en échange de son soutien au budget de l’Etat, de pouvoir racheter toutes les banques départementales. La Banque de France dispose désormais d’un monopole fiduciaire national, mais qui n’est pas fondé sur la loi, seulement sur l’absence de concurrent En 1860, la France annexe le Dauphiné où existait une banque d’émission, à Annecy. S’ensuit un conflit entre la Banque de France et la Banque du Dauphiné, qui se termine par la victoire totale de la Banque de France en 1864 : son monopole est ensuite inscrit dans la loi et devient perpétuel à partir de la semi-nationalisation de 1936 puis de la nationalisation complète de 1945 Patrice Baubeau III. Des banques d’émission aux banques centrales B. La non-lucrativité Le but de la Banque d’Angleterre, ou de la Banque de France, a d’abord été de gagner de l’argent et de verser des dividendes aux actionnaires – La Banque d’Angleterre est en 1694 un « club » de riches capitalistes (the merchant adventurers) qui prêtent de l’argent à l’État, au taux d’intérêt de 8 %, pour lui permettre de financer ses guerres contre la France. Ces capitalistes se sont groupés en société privilégiée afin de peser plus lourd face à l’État si ce dernier, comme il en avait coutume à l’époque, décidait de ne pas les rembourser – La Banque de France est une société anonyme – la première société anonyme moderne en France (cf. cours 8) créée après 1789 – Elle est très soucieuse de ses profits et du dividende qu’elle verse à ses actionnaires jusqu’en 1945. Cette question des dividendes n’est d’ailleurs pas seulement une question économique : le prestige de la Banque de France repose aussi sur le fait qu’elle n’a jamais été en déficit grâce à une gestion sérieuse et prudente Dans le cas de ces deux banques, l’extension progressive du monopole de l’émission fiduciaire a eu une contrepartie fiscale : Banque d’Angleterre et Banque de France ont dû verser une part croissante de leurs profits à l’État, en particulier après 1844 (BoE) et 1848 (BdF) Patrice Baubeau III. Des banques d’émission aux banques centrales C. Le prêt en dernier ressort Le rôle de Préteur en dernier ressort - PDR (Lender of Last Resort – LLR) est une des fonctions les plus importantes des banques centrales. Il a été défini de manière célèbre par l’économiste Walter Bagehot en 1873 (Lombard Street) comme une intervention en cas de crise bancaire et monétaire : – « very large loans at very high rates are the best remedy for the worst malady of the money market when a foreign drain is added to a domestic drain » D’où les quatre « règles » de Bagehot : – Prêter libéralement – À tous ceux qui en ont besoin – Sur de bonnes garanties – À un taux d’intérêt élevé Le but du PDR est donc de fournir de la liquidité (monnaie) aux opérateurs bancaires du marché lorsque le marché en manque (illiquide) à condition que ces opérateurs soient solvables (bilans sains) – Il s’agit d’éviter des comportements collectifs de panique (bank run ; fire sales) L’institution la mieux placée pour faire cela, c’est la banque centrale Patrice Baubeau III. Des banques d’émission aux banques centrales C. Le prêt en dernier ressort Comme souvent, la pratique a en fait précédé la théorie La Banque de France est intervenue comme PDR – En 1805 – De manière moins nette en 1848, et encore en 1857, 1870, 1881, 1895 et 1913 – Elle a joué un rôle plus ambigu en 1829, en 1839, en 1847 et pendant l’entre-deux- guerres – Depuis 1945, elle assume officiellement ce rôle de PDR La Banque d’Angleterre a joué le rôle de PDR – Lors de la crise de 1825 – Mais l’Act of Peel de 1844 l’a empêchée d’être aussi efficace en 1847 – C’est donc par un compromis pragmatique qu’elle a répondu aux crises de 1857 et 1867, avant d’assumer vraiment, lors de la crise de 1890, le rôle de PDR Patrice Baubeau III. Des banques d’émission aux banques centrales C. Le prêt en dernier ressort Aujourd’hui, toutes les banques centrales jouent ce rôle de PDR, mais… – Le rôle de PDR repose généralement sur une coopération étroite avec le Trésor public (afin de régler les dettes qui demeurent si des banques font finalement faillite) – Il est très difficile de distinguer entre banques « illiquides mais solvables » et banques « insolvables », d’où des hésitations possibles d’intervention de la part de la BC – L’existence d’un PDR peut alimente aussi un risque ou aléa moral : les banques anticipent l’aide de la BC et prennent donc davantage de risques afin d’augmenter leur rendement – Enfin, certaines banques insolvables peuvent générer une crise d’illiquidité dans le marché, en particulier les TBTF (too big to fail) : ce risque dit systémique oblige donc à élargir les critères du PDR – c’est d’ailleurs ce qui s’est passé en 2008, quand la chute de Lehman Brothers, insolvable, a dégénéré en grave crise de liquidité : il aurait donc fallu que la FED (la BC des Etats-Unis) la soutienne, le temps de dénouer ses opérations Patrice Baubeau III. Des banques d’émission aux banques centrales D. La supervision et le contrôle prudentiel Du fait de la difficulté à distinguer… – Entre banques illiquides et banques insolvables – Entre crises idiosyncrasiques (propres à une seule banque) et crises systémiques (la chute d’une banque risque d’entraîner celle de nombreuses autres) … les BC se sont dotées d’instruments de plus en plus sophistiqués de collecte et de traitement de l’information monétaire et financière Elles disposent pour cela de trois instruments clés : – Comme elles fixent les taux d’intérêt directeurs et accordent tous les jours des prêts aux banques, elles obtiennent des informations très détaillées sur l’état du marché et sur la situation particulière de chaque banque – En tant qu’organes de supervision bancaire, elles reçoivent des banques des informations sur leurs autres opérations (crédits aux ménages ou aux entreprises, dépôts, opérations sur les marchés financiers…) et peuvent aller vérifier sur place toutes les informations qu’elles souhaitent – Elles se servent de ces informations pour fixer le montant des réserves bancaires et les règles d’exposition aux risques (de crédit ou de marché) des banques Patrice Baubeau III. Des banques d’émission aux banques centrales D. La supervision et le contrôle prudentiel Ce rôle de contrôle et de supervision s’est progressivement étendu des banques individuelles… – Aux marchés du crédit : orientation du crédit aux entreprises, insuffisances sectorielles de financement, taux de défaut et risque d’impayé… – Aux marchés financiers : engagements des banques sur les marchés financiers ; surveillance des variations des taux de change ; équilibre des marchés ; évolution du prix des actifs financiers – À la stabilité financière, c’est-à-dire à l’anticipation qu’une difficulté locale ne dégénère en crise générale Par la mise au point de modèles économétriques de plus en plus précis Par la réalisation de stress tests sur les banques individuelles et le secteur bancaire en général L’exercice de cette supervision suppose que les BC : – Soient indépendantes des pouvoirs publics ou des marchés – cette dernière condition étant mal remplie aujourd’hui – Disposent de pouvoirs effectifs d’action et de sanction Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales Conclusion Les banques et les banques centrales jouent un rôle crucial dans les économies modernes. Elles se sont développées en parallèle de l’essor des économies dans le cadre de la Révolution industrielle Il n’y a pas d’économie moderne sans banques : même la Chine « communiste » connaît un grand nombre de banques, publiques ou privées, et sa banque centrale y jouit d’un grand pouvoir – Par exemple, en URSS, l’absence de banque commerciale a été en partie compensée par la création, par les entreprises, de circuits plus ou moins discrets d’échange d’effets de commerce. Parce que ce système était opaque, il a alimenté la croissance de la corruption de l’économie soviétique Enfin, on ne peut pas opposer banques et marchés financiers, car les banques sont devenues les principaux acteurs de ces marchés, notamment parce qu’elles « fabriquent » les « produits » qui s’y négocient Patrice Baubeau Histoire des Faits Économiques Des banques aux banques centrales - Références Bordo Michael D., Oyvind Eithreim, Marc Flandreau, et Jan F. Qvigstad, éd. 2016. Central Banks at a Crossroads What Can We Learn from History? London: Cambridge University Press. Capie, Forrest, Stanley Fischer, Charles Goodhart, et Norbert Schnadt. 1995. The Future of Central Banking:The Tercentenary Symposium of the Bank of England. Cambridge: Cambridge University Press. https://doi.org/10.1017/CBO9780511983696. Edvinsson Rodney, Tor Jacobson, et Daniel Waldenström, éd. 2018. Sveriges Riksbank and the History of Central Banking. Studies in Macroeconomic History. Cambridge: Cambridge University Press. https://doi.org/10.1017/9781108140430. Feiertag, Olivier, et Michel Margairaz, éd. 2016. Les banques centrales et l’État-nation. Mission historique de la Banque de France. Paris: Sciences Po Les Presses. Gillard, Lucien. 2004. La banque d’Amsterdam et le florin européen: au temps de la République néerlandaise, 1610-1820. Paris, France: Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales. Plessis, Alain. 1998. Histoires de la Banque de France. Paris, France: Albin Michel. Tarkka Juha, « The North European Model of Early Central Banking: Collateral Policy before the Real Bills Doctrine », Paper prepared for presentation in the EABH conference on the Critical Function of History in Banking and Finance, Nicosia, Cyprus, 15- 16 May 2009. Patrice Baubeau