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Université d'Orléans
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Ce document français détaille le droit civil français relatif à l'attribution et à l'utilisation du nom, couvrant les aspects liés à la filiation, l'accouchement sous X et l'adoption. Le texte explique les différentes règles applicables selon les situations et les changements d'état. Il aborde le contexte juridique lié aux noms de famille dans la législation française.
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Chapitre 1. Le nom 1. Section 1. L’attribution du nom 1. § 1. L’attribution par la filiation 2. § 2.Le cas particulier de l’accouchement sous x 2. Section 2. L’utilisation du nom 1. § 1. Le changement de nom 2. § 2. La...
Chapitre 1. Le nom 1. Section 1. L’attribution du nom 1. § 1. L’attribution par la filiation 2. § 2.Le cas particulier de l’accouchement sous x 2. Section 2. L’utilisation du nom 1. § 1. Le changement de nom 2. § 2. La protection du nom Deux questions principales vont nous intéresser, celle de l’attribution du nom (Section 1) et celle de l’utilisation du nom et des droits qui s’y attachent (Section 2). Section 1. L’attribution du nom Il existe deux modes d’attribution du nom. Le nom est le plus couramment attribué en raison de la filiation (§1) mais il peut avoir une autre origine, en cas d’accouchement sous x notamment (§2). § 1. L’attribution par la filiation Trois situations sont possibles. L’enfant est né dans les liens du mariage (A), hors de ces liens (B) ou a été adopté (C). A. L’enfant né dans les liens du mariage Traditionnellement, l’enfant né du mariage prenait de plein droit le nom de son père. Désormais, la loi du 4 mars 2002, en principe applicable aux enfants nés après le 1 er janvier 2005, offre aux parents la faculté de donner à l’enfant un autre nom que celui du père à condition qu’ils expriment leur volonté en ce sens au moment de la déclaration de naissance. Selon l’ article 311-21 du Code civil, « lorsque la filiation d’un enfant est établie à l’égard de ses deux parents au plus tard le jour de la déclaration de sa naissance ou par la suite mais simultanément, ces derniers choisissent le nom de famille qui lui est dévolu : soit le nom du père, soit le nom de la mère, soit leurs deux noms accolés dans l’ordre choisi par eux dans la limite d’un nom de famille pour chacun d’eux. En l’absence de déclaration conjointe à l’officier de l’état civil mentionnant le choix du nom de l’enfant, celui-ci prend le nom de celui de ses parents à l’égard duquel sa filiation est établie en premier lieu et le nom de son père si sa filiation est établie simultanément à l’égard de l’un et de l’autre. En cas de désaccord entre les parents, signalé par l’un d’eux à l’officier de l’état civil, au plus tard au jour de la déclaration de naissance ou après la naissance, lors de l’établissement simultané de la filiation, l’enfant prend leurs deux noms, dans la limite du premier nom de famille pour chacun d’eux, accolés selon l’ordre alphabétique ». En outre, il est prévu par cette même disposition que « lorsqu’il a déjà été fait application du présent article, du deuxième alinéa de l’article 311-23 ou de l’article 357 à l’égard d’un enfant commun, le nom précédemment dévolu ou choisi vaut pour les autres enfants communs ». Afin d’éviter les problèmes liés à l’addition de nom au fil des générations, il est prévu que lorsque les parents ou l’un d’entre eux portent un double nom de famille et décident d’attribuer à leur enfant le nom de chacun d’eux, ils peuvent lui transmettre qu’un seul des éléments de ce double nom. L’enfant de M. A-B et de Mme C-D pourra par exemple avoir pour nom A-C ; B-D. B. L’enfant né hors du mariage Tout dépend ici si les deux parents ont déclaré l’enfant au moment de sa naissance ou si tel n’est pas le cas. Prenons la première hypothèse, la filiation est établie à l’égard des deux parents dès la déclaration de naissance. Par principe, dans cette situation, s’appliqueront les mêmes règles que celles relatives à l’enfant né dans le mariage. L’enfant prend donc le nom de son père à défaut de manifestation contraire de volonté de la part de ses deux parents au moment de la déclaration de naissance Prenons la seconde hypothèse, la filiation de l’enfant est établie successivement à l’égard de l’un puis de l’autre de ces parents. La mère a par exemple déclaré son enfant dès la naissance et son père ne l’a reconnu que plus tard. Dans ce cas, l’enfant porte en principe le nom de celui dont la filiation a été établie en premier. Toutefois, par déclaration conjointe devant l’officier d’état civil, les parents peuvent pendant la minorité de l’enfant, et sous réserve de son accord s’il a plus de 13 ans : substituer au nom qu’il portait jusqu’à présent le nom de celui de ses parents à l’égard duquel la filiation a été établie en second lieu ; ou lui donner un nom formé des noms de ses parents accolés… (v. règles précédentes). C. L’enfant adoptés Les règles varient selon la nature de l’adoption qui peut être plénière (1) ou simple (2). 1. L’adoption plénière Du fait de l’adoption plénière de l’enfant, sa filiation d’origine est évincée. L’éviction de la filiation emporte alors aussi celle du nom. L’article 357 du Code civil dispose que « l’adoption confère à l’enfant le nom de l’adoptant. En cas d’adoption de l’enfant du conjoint ou d’adoption d’un enfant par deux époux, l’adoptant et son conjoint ou les adoptants choisissent, par déclaration conjointe, le nom de famille dévolu à l’enfant : soit le nom de l’un d’eux, soit leurs deux noms accolés dans l’ordre choisi par eux, dans la limite d’un nom de famille pour chacun d’eux. Cette faculté de choix ne peut être exercée qu’une seule fois. En l’absence de déclaration conjointe mentionnant le choix de nom de l’enfant, celui-ci prend le nom de l’adoptant et de son conjoint ou de chacun des deux adoptants, dans la limite du premier nom de famille pour chacun d’eux, accolés selon l’ordre alphabétique. Lorsqu’il a été fait application de l’article 311-21, du deuxième alinéa de l’article 311-23 ou du présent article à l’égard d’un enfant commun, le nom précédemment dévolu ou choisi vaut pour l’adopté. Lorsque les adoptants ou l’un d’entre eux portent un double nom de famille, ils peuvent, par une déclaration écrite conjointe, ne transmettre qu’un seul nom à l’adopté. Sur la demande du ou des adoptants, le tribunal peut modifier les prénoms de l’enfant. » On le voit il s’agit ici d’adapter à l’adoption les règles précédemment énoncées pour un enfant né durant le mariage de ses parents. 2. L’adoption simple Dans le cas d’une adoption simple l’article 363 du Code civil dispose : « L’adoption simple confère le nom de l’adoptant à l’adopté en l’ajoutant au nom de ce dernier. Toutefois, si l’adopté est majeur, il doit consentir à cette adjonction. Lorsque l’adopté et l’adoptant, ou l’un d’eux, portent un double nom de famille, le nom conféré à l’adopté résulte de l’adjonction du nom de l’adoptant à son propre nom, dans la limite d’un seul nom pour chacun d’eux. Le choix du nom adjoint ainsi que l’ordre des deux noms appartient à l’adoptant, qui doit recueillir le consentement personnel de l’adopté âgé de plus de treize ans. En cas de désaccord ou à défaut de choix, le nom conféré à l’adopté résulte de l’adjonction en seconde position du premier nom de l’adoptant au premier nom de l’adopté. En cas d’adoption par deux époux, le nom ajouté à celui de l’adopté est, à la demande des adoptants, celui de l’un d’eux, dans la limite d’un nom. Si l’adopté porte un double nom de famille, le choix du nom conservé et l’ordre des noms adjoints appartient aux adoptants, qui doivent recueillir le consentement personnel de l’adopté âgé de plus de treize ans. En cas de désaccord ou à défaut de choix, le nom conféré à l’adopté résulte de l’adjonction en seconde position du premier nom des adoptants selon l’ordre alphabétique, au premier nom de l’adopté. Le tribunal peut, toutefois, à la demande de l’adoptant, décider que l’adopté ne portera que le nom de l’adoptant ou, en cas d’adoption de l’enfant du conjoint, que l’adopté conservera son nom d’origine. En cas d’adoption par deux époux, le nom de famille substitué à celui de l’adopté peut, au choix des adoptants, être soit celui de l’un d’eux, soit leurs deux noms accolés dans l’ordre choisi par eux et dans la limite d’un seul nom pour chacun d’eux. Cette demande peut également être formée postérieurement à l’adoption. Si l’adopté est âgé de plus de treize ans, son consentement personnel à cette substitution du nom de famille est nécessaire. » § 2.Le cas particulier de l’accouchement sous x Cette attribution est prévue par l’article 57 alinéa 2 du Code civil. Il dispose que : « La femme qui a demandé le secret de son identité lors de l’accouchement peut faire connaître les prénoms qu’elle souhaite voir attribuer à l’enfant. À défaut ou lorsque les parents de celui-ci ne sont pas connus, l’officier de l’état civil choisit trois prénoms dont le dernier tient lieu de nom de famille à l’enfant. L’officier de l’état civil porte immédiatement sur l’acte de naissance les prénoms choisis. Tout prénom inscrit dans l’acte de naissance peut être choisi comme prénom usuel ». Ainsi, l’enfant sans filiation connue reçoit de l’officier d’état civil un nom et un prénom. L’attribution provisoire s’effacera si un lien de filiation est créé. Section 2. L’utilisation du nom Durant la vie d’un personne son nom peut être amené à changer selon certaines conditions (§1). En outre, ce nom patronymique doit être protégé (§2). § 1. Le changement de nom Le changement de nom peut résulter d’un changement d’état (A) ou non (B). A. Le changement de nom par changement d’état Parmi différentes situations, nous en envisagerons deux, le changement d’état est lié à un changement de filiation ou à une demande de francisation. D’une part, lorsque le lien de filiation a été établi ou modifié, il est nécessaire de donner à l’enfant le nom qui correspond à sa nouvelle filiation. Ainsi, la reconnaissance d’un enfant pour lequel le secret de la naissance avait d’abord été réclamé emporte l’éviction du nom que lui avait donné l’officier de l’état civil (art. 58 al. 6 c. civ.). De même que l’adoption simple peut pour des motifs graves être judiciairement révoquée de sorte que tous les effets qui s’y attachent, et pour ce qui nous intéresse, le nom de l’enfant, disparaissent. D’autre part, toute personne qui acquiert ou recouvre la nationalité française peut demander la francisation de son nom, mais aussi de ses prénoms, lorsque son apparence, sa consonance ou son caractère étranger « peut gêner son intégration dans la communauté française ». Plusieurs possibilités existent pour la francisation du nom : Traduire le nom s’il peut l’être ; Transformer le nom étranger pour lui donner une consonance française ; Reprendre le nom français d’un ascendant français. En revanche, il est impossible de prendre un nouveau nom sans rapport avec le nom de naissance ou jamais porté dans sa famille. La francisation peut être sollicitée lors de la demande de naturalisation ou de réintégration ou de déclaration d’acquisition de la nationalité française. Tout intéressé peut faire opposition dans les deux mois suivant la publication de l’acte au journal officiel. B. Le changement de nom en l’absence de changement d’état La loi du 8 janvier 1993 n° 93-22 dispose que « toute personne qui justifie d’un intérêt légitime peut demander à changer de nom ». Il faudra pour l’auteur de la demande, qui peut être présentée à tout moment, démontrer la légitimité de l’intérêt qu’il évoque à l’appui de sa requête. (Articles 60 à 61-4 du Code civil) La demande de changement de nom pour motif légitime concerne par exemple les cas suivants : nom difficile à porter, car pouvant être perçu comme ridicule ou péjoratif ; ou nom s’étant illustré de manière éclatante sur le plan national, (porter le nom d’une personne célèbre avec une mauvaise réputation). consacrer l’usage constant et continu d’un nom (établir l’utilisation d’un autre nom depuis longtemps et que celui-ci identifie la personne publiquement). si les frères et sœurs portent des noms différents et que tous souhaitent porter le même nom éviter les conséquences résultant de la gravité des agissements pour lesquels les père ou mère ont été condamné. À noter, dans une décision du 16 mai 2018 , le Conseil d’État a rappelé que des motifs d’ordre affectif peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, caractériser l’intérêt légitime requis par le Code civil pour changer de nom de famille. Dans cette affaire, la requérante demandait à ne plus porter le nom de son père et à se voir attribuer celui de sa mère, qui l’avait élevée. À l’appui de sa demande, elle faisait valoir qu’elle avait été abandonnée par son père à l’âge de quatre ans. Celui-ci n’avait plus eu aucun contact avec elle depuis lors. Il n’avait subvenu ni à son éducation ni à son entretien, alors pourtant qu’il en avait l’obligation en vertu d’une décision du juge aux affaires familiales. Il n’avait pas non plus exercé le droit de visite et d’hébergement qui lui avait été reconnu. Le Conseil d’État a considéré que ces circonstances exceptionnelles étaient de nature à caractériser l’intérêt légitime requis pour changer de nom et a accepté sa demande. Le changement de nom doit alors être autorisé par décret. Il prend effet lorsqu’il n’y a pas d’opposition à l’expiration d’un délai de deux mois. L’opposition peut, par exemple, venir d’une personne qui porte le nom qu’autrui souhaite prendre. Le Conseil d’État va alors apprécier la légitimité des intérêts en présence : risque de confusion, d’atteinte à l’image d’une famille déjà connue sous le nom voulu… En cas d’opposition, le décret prend effet au rejet de l’opposition. La modification du nom s’étend de plein droit aux enfants du bénéficiaire s’ils ont moins de 13 ans, au-delà leur consentement est requis. Mention est portée sur le registre d’état civil de chacun des intéressés. La protection du nom En raison de ces caractères bien particuliers (A), le nom va pouvoir faire l’objet d’une protection notamment contre l’usurpation (B). A. Les caractères du nom En premier lieu, on dit que le nom est immuable. Une personne ne saurait a priori acquérir un nom différent de celui que désigne son acte de naissance. Il existe une exception à ce principe celle de l’utilisation prolongée d’un nom d’emprunt. Ce mode particulier d’acquisition d’un nom suppose que l’usage invoqué a été loyal (sans fraude), public (un nom couramment employé), incontesté (nul ne s’est élevé contre l’emprunt de ce nom) et anciennement établi, ce qui suppose en pratique une possession d’état prolongé de l’ordre de plusieurs décennies. Cour de cassation chambre civile 1 Audience publique du mercredi 23 juin 2010 Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches, ci-après annexé : Attendu que Mme X… est née le 25 mars 1990 à Bastia ; qu’elle avait été reconnue par sa mère, Mme Y…, avant sa naissance, le 2 mars 1990 ; qu’elle a été légitimée par le mariage, célébré le 6 décembre 1997, de Mme Y… avec M. X… ; que le 8 juin 2007, après son émancipation, Mme X… a saisi le président du tribunal de grande instance d’une demande de rectification de son nom patronymique au motif qu’elle justifiait d’une possession loyale et prolongée du nom maternel Y… depuis sa naissance ; Attendu que Mme X… fait grief à l’arrêt attaqué (Bastia, 25 juin 2008) de l’avoir déboutée de sa demande tendant à voir substituer le nom « Y… » au nom « X… » dans les actes de l’état civil ; Attendu que si la possession d’un no est propre à conférer à celui qui le porte le droit à ce nom, la loi n’ayant réglé ni la durée, ni les conditions d’une telle possession, il appartient aux juges du fond d’en apprécier souverainement la loyauté et les effets ; que la cour d’appel, qui a justement retenu que la possession devait être suffisamment longue pour témoigner d’une volonté persistante de s’approprier ce nom, a constaté, d’abord, que Mme X… avait acquis le nom de son père en 1997 à la suite de la légitimation puis, que pour justifier de l’usage du nom de sa mère, elle produisait des pièces concernant sa scolarité, ses activités culturelles, sa mutuelle, sa carte nationale d’identité et des pièces bancaires couvrant une période de dix ans, entre le 6 décembre 1997 et 2007 ; qu’elle en a souverainement déduit que ces éléments étaient insuffisants pour établir une possession prolongée de nature à permettre l’acquisition du nom de « Y… » et a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision En deuxième lieu, le nom est indisponible. En tant que droit extrapatrimonial, le nom est indisponible, il ne saurait ainsi être cédé à un tiers. Toutefois, son titulaire peut renoncer à le défendre contre une éventuelle usurpation moyennant une contrepartie financière. Le tiers cherchant par exemple à utiliser ce nom dans un contexte commercial. Le nom ne peut pas non plus être transmis par voie testamentaire sauf exception tirée de la loi du 2 juillet 1993 relative aux citoyens morts pour la patrie. Selon l’article 4 de la loi « tout individu, s’il est dans l’ordre de la descendance, le dernier représentant d’une famille, peut, en prévision du cas où il serait tué à l’ennemi sans postérité, transmettre son nom de famille par disposition de dernière volonté à l’un de ses parents au degré successible, même non appelé à sa succession ». En troisième est dernier lieu, le nom est imprescriptible. En principe, le nom ne saurait se perdre par le nom usage. Il est toujours possible d’agir en justice pour en assurer la défense. B. L’usurpation Toute personne peut contester l’utilisation illicite par un tiers de son nom ou encore l’attribution à un tiers de son propre nom. L’article 433-19 du code pénal dispose qu’« Est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende le fait, dans un acte public ou authentique ou dans un document administratif destiné à l’autorité publique et hors les cas où la réglementation en vigueur autorise à souscrire ces actes ou documents sous un état civil d’emprunt : 1° De prendre un nom ou un accessoire du nom autre que celui assigné par l’état civil; 2° De changer, altérer ou modifier le nom ou l’accessoire du nom assigné par l’état civil. » Une difficulté peut survenir lorsque le nom d’une personne est utilisé par une entreprise, un artiste, un romancier… pour désigner un produit ou un personnage. Dans ces situations, il importe de concilier le droit au respect du nom avec l’exercice des libertés fondamentales du commerce, de l’industrie, de la création littéraire et artistique ou encore de la liberté d’expression. Ce qui importe ici c’est le risque de confusion. S’il est impossible de constater un risque de confusion préjudiciable au titulaire du nom, ce dernier ne saurait s’opposer à l’utilisation du mot que constitue son nom de famille au rang de marque servant à désigner un produit personnage. Ainsi, M. Dop n’a pas pu empêcher l’usage de son nom par la marque Dop ; ni le docteur Virag pour le viagra. Selon la même logique, le titulaire du nom ne saurait interdire que ce dernier serve à identifier un personnage de BD, de roman… lorsque son nom est très répandu ou sert à désigner un personnage de fiction qui évolue dans des conditions très différentes de celles dans lesquelles vit le demandeur. Illustration Cour de cassation chambre civile 1, 10 avril 2013, n° 12-14525, Bull. I n° 73 Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 25 février 2010), que la société américaine Coca-Cola Company commercialise des boissons sous la marque française dénominative « Coca-Cola light sango », dont elle est titulaire ; que M. X…, invoquant l’atteinte ainsi portée à son nom d’artiste et à son nom patronymique, a assigné en réparation la société Coca-Cola entreprise ; que les sociétés Coca-Cola Company et Coca-Cola services France sont intervenues volontairement à l’instance ; Attendu que M. X… fait grief à l’arrêt de le débouter de ses demandes alors, selon le moyen : 1°/ que l’auteur jouit non seulement du droit au respect de son œuvre mais également du droit au respect de son nom ; que comme le faisait valoir M. X…, il avait droit au respect de son nom patronymique constituant également son nom d’artiste, de telle sorte que celui-ci ne soit pas ridiculisé par son apposition aux côtés d’une marque de boisson gazeuse censée faire référence à l’orange sanguine dont cette boisson était composée ; qu’en déboutant M. X… de sa demande aux motifs qu’il ne pouvait prétendre à la protection de son nom patronymique en tant que tel, quand cette protection était revendiquée pour son nom en tant qu’auteur, la cour d’appel a violé l’article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle ; 2°/ que M. X… a fait valoir qu’il avait acquis une certaine renommée en tant que scénariste dans le milieu du cinéma, de sorte que l’usage de son nom à des fins commerciales caractérisait une usurpation lui portant préjudice ; que pour débouter M. X… de sa demande de protection sur le fondement du droit des marques, la cour d’appel a estimé qu’il n’était pas démontré que le patronyme X… aurait acquis une notoriété certaine auprès des professionnels du cinéma ou de l’audiovisuel dès lors qu’il résultait des extraits des pages jaunes obtenues à l’aide du moteur de recherches Google que ce nom était amplement porté notamment dans le département des Hauts-de-Seine ; qu’en statuant par ces motifs inopérants, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ; Mais attendu que le droit moral de l’auteur au respect de son nom est attaché à l’œuvre de l’esprit qui porte l’empreinte de sa personnalité ; que c’est, dès lors, à bon droit que la cour d’appel a retenu que M. X… ne pouvait prétendre, sur le fondement de l’article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle, à la protection de son nom patronymique en tant que tel, fût-il utilisé pour l’exercice de son activité artistique, ce nom, quelle que soit sa renommée prétendue, ne constituant pas, en lui-même, une œuvre de l’esprit ; Et attendu que c’est sans encourir le grief de la seconde branche du moyen que les juges d’appel, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui leur étaient soumis, ont, par motifs propres et adoptés, estimé, d’abord, que M. X… ne démontrait pas que le patronyme « X… » aurait acquis, auprès des consommateurs français ou des professionnels du cinéma ou de l’audiovisuel, une notoriété certaine attachée à sa personnalité et relevé, ensuite, qu’il résultait des extraits des « pages jaunes » obtenues à l’aide du moteur de recherche Google que ce nom était amplement porté, notamment dans le département des Hauts-de-Seine, et qu’ils en ont déduit que le choix de ce terme pour former une marque ne pouvait induire un risque de confusion susceptible de porter atteinte aux droits de la personnalité de M. X… ; D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; On note ici que l’élément déterminant pour le Cour est le fait que ce nom soit amplement porté et qu’en conséquence il n’y avait aucun risque de confusion possible Chapitre 2. Les accessoires et compléments du nom 1. Section 1. Le prénom 1. § 1. Le choix du prénom 2. § 2. Le changement de prénom 2. Section 2. Les pseudonymes, particules et titres de noblesse 1. § 1. Les pseudonymes 2. § 2. Les particules et titres de noblesse A côté du prénom qui s’ajoute obligatoirement au nom sur l’acte d’état civil (Section 1), on trouve d’autres éléments comme le pseudonyme, la particule ou le titre de noblesse (Section 2). Section 1. Le prénom Une fois le prénom choisi (§1), des changements peuvent intervenir (§2). § 1. Le choix du prénom L’attribution d’un prénom est obligatoire (art. 57 al. 1er c. civ.). Le choix est librement effectué par les parents au titre de l’autorité parentale dont ils disposent. Pour autant, cette liberté est contrôlée. Longtemps le choix du prénom était limité par la loi à ceux présents dans le calendrier, ceux des personnes connues dans l’histoire ancienne (Loi du 11 germinal an XI). Il était alors interdit aux officiers d’état civil d’en admettre d’autres. La loi du 8 janvier 1993 n° 93-22, est venue modifier la règle. Désormais la liberté est de mise, sous contrôle de l’officier d’état civil qui reçoit la déclaration de naissance. Si les prénoms choisis ou l’un d’eux seul ou associé aux autres prénoms ou au nom lui paraissent contraires à l’intérêt de l’enfant ou au droit des tiers à la protection de leur nom de famille, il en avise sans délai le procureur de la République. Si ce dernier estime fondées les réserves formulées, il saisit le Juge aux affaires familiales. Au terme de la procédure, si le magistrat conclut dans le même sens, il ordonne la suppression du ou des prénoms litigieux des registres de l’état civil. Les parents devront alors choisir un nouveau prénom qui devra recevoir l’aval du juge. S’ils s’obstinent à retenir des prénoms inacceptables, le juge procédera lui- même au choix du prénom. Cour de cassation chambre civile 1, 15 février 2012 n° 10-27512 Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 7 octobre 2010), que M. X… a déclaré vouloir prénommer son fils, né le 7 novembre 2009, Titeuf, Gregory, Léo ; que l’officier d’état civil a informé le procureur de la République que le choix du premier prénom, Titeuf, lui paraissait contraire à l’intérêt de l’enfant ; que, sur le fondement de l’article 57 du Code civil, le parquet a fait assigner les parents afin de voir prononcer la suppression du prénom Titeuf ; que, par jugement du 1er juin 2010, le tribunal de grande instance de Pontoise, se fondant sur l’intérêt de l’enfant, a ordonné la suppression du prénom Titeuf de son acte de naissance et dit qu’il se prénommera Grégory, Léo ; Attendu que M. X… et la mère de l’enfant, Mme Y…, font grief à l’arrêt de confirmer le jugement, alors, selon le moyen : 1°/ que la contrariété à l’intérêt de l’enfant qui peut justifier que le prénom choisi par ses parents soit supprimé doit être appréciée de façon objective ; qu’en appréciant la conformité à l’intérêt de l’enfant du prénom Titeuf uniquement par référence à un personnage de bande dessinée dont la notoriété est nécessairement éphémère et limitée, dont elle relève au demeurant qu’il est « plutôt sympathique », et en se livrant à une analyse subjective des caractéristiques de ce personnage, sans se prononcer au regard de critères objectifs seuls à même de garantir le principe d’égalité devant la loi, la cour d’appel a violé l’article 57 du Code civil, ensemble l’article 3 de la Convention de New York du 20 novembre 1989 et l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme ; 2°/ que toute restriction à la liberté de choix du prénom de l’enfant par ses parents ne peut être justifiée que par l’intérêt de l’enfant ; qu’en jugeant que le prénom Titeuf n’était pas conforme à l’intérêt de l’enfant et en ordonnant sa suppression de l’acte de naissance, sans rechercher, ainsi qu’elle y était invitée, si le fait qu’au moins un autre enfant ait reçu ce prénom sans opposition du ministère public et que d’autres enfants aient reçu les prénoms d’autres personnages de bande dessinée ou dessins animés n’était pas de nature à mettre en évidence que le choix du prénom litigieux ne portait pas atteinte à l’intérêt de l’enfant, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 57 du Code civil, ensemble l’article 3 de la Convention de New York du 20 novembre 1989 et l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme ; Mais attendu que c’est par une appréciation souveraine qu’en une décision motivée la cour d’appel a estimé qu’il était contraire à l’intérêt de l’enfant de le prénommer Titeuf ; que le moyen qui ne tend en réalité qu’à contester cette appréciation ne peut être accueilli Pour finir, si ni le père, ni la mère ne sont connus, il appartient à l’officier d’état civil de lui attribuer un prénom. § 2. Le changement de prénom Le changement de prénom peut se faire par la voie ordinaire (A) et par volonté de francisation (B). A. Le changement par voie ordinaire Toute personne peut demander à changer de prénom si elle justifie d’un intérêt légitime (article 60 à 61-4 du Code civil). À l’origine la procédure était judiciaire, désormais l’article 56 de la loi du 18 novembre 2016 n° 2016-1547 a déjudiciarisé la procédure de changement de prénom. La demande de changement de prénom doit aujourd’hui être portée devant l’officier de l’état civil du lieu de résidence de la personne concernée ou du lieu où l’acte de naissance a été dressé. Si l’enfant est âgé de plus de 13 ans, son consentement personnel est requis. De même le majeur sous tutelle doit consentir personnellement au changement puisque la demande figure au nombre des actes personnels (C. civ., art. 458). L’officier de l’état civil devra apprécier l’intérêt légitime au changement sollicité. Après examen, l’officier pourra prendre une décision d’autorisation de changement de prénom qui sera communiquée au demandeur ou à ses représentants légaux par tout moyen dans un délai raisonnable. Mais il pourra également saisir le procureur de la République s’il estime que la demande ne revêt pas un intérêt légitime et devra en informer parallèlement l’intéressé par tous moyens. Si le procureur de la République s’oppose, par une décision motivée à ce changement, il devra notifier sa décision par tous moyens au demandeur et en informer l’officier de l’état civil saisi initialement. Le demandeur pourra alors saisir le juge aux affaires familiales. Cour de cassation chambre civile 1, 23 mars 2011 n° 10-16761 Vu l’article 60 du Code civil ; Attendu que, pour rejeter la demande de changement de prénom de Brigitte en celui de Laetitia, subsidiairement en adjonction du prénom de Laetitia avant celui de Brigitte, l’arrêt retient que Mme Brigitte X…, qui a la double nationalité française et israélienne et dispose d’un acte du ministère de l’intérieur israélien attestant du changement de son patronyme ainsi que de son prénom en Laetitia, n’explique pas la raison de ce changement et, qu’eu égard à la discordance importante existant entre son identité française et son identité israélienne, sa demande de changement de prénom apparaît prématurée ; Attendu qu’en statuant ainsi, alors que l’acte du 10 octobre 2005 par lequel le ministère de l’intérieur israélien l’avait autorisée à changer son prénom en celui de Laetitia caractérisait à lui seul l’intérêt légitime, la cour d’appel a violé le texte susvisé: Vu l’article L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire, et attendu que la cour de cassation est en mesure de mettre fin au litige: PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 9 septembre 2008, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ; DIT n’y avoir lieu à renvoi ; Dit que Mme X…, née le 12 octobre 1958 à Paris (17e) de Mme Camille Z… et de M. Elie X…, justifie d’un intérêt légitime pour changer le prénom de Brigitte en celui de Laetitia et qu’elle est autorisée à porter ce dernier prénom en remplacement de celui de Brigitte ; La demande de changement de prénom peut aussi avoir pour but de mettre en conformité le prénom avec le sexe apparent, qu’il y ait eu ou nom changement de sexe biologique (CEDH 25 mars 1992, B c/France, n° 13343/87, Renée devenue René) (V. Chapitre suivant). B. Le changement de prénom par la voie de la francisation Comme pour le nom de famille, il est possible de franciser son prénom lorsque son caractère étranger est susceptible de gêner son intégration dans la communauté française (articles 1 et 2 de loi 25 octobre 1972 précitée). La personne concernée devra indiquer dans sa requête le nouveau prénom dont elle veut bénéficier. Section 2. Les pseudonymes, particules et titres de noblesse À côté du nom et du prénom, d’autres éléments peuvent permettre l’identification de la personne, sans toutefois être obligatoires. Il s’agit des pseudonymes (§1), particules et autres titres de noblesse (§2). § 1. Les pseudonymes En pratique, ce nom d’emprunt a souvent vocation à dissimuler la véritable identité d’une personne dans l’exercice de son activité professionnelle, artistique ou commerciale. Or, par principe, aucune personne ne peut porter de nom autre que celui inscrit dans son acte de naissance. C’est pourquoi, une réglementation vient encadrer l’usage de ce nom d’emprunt. Celle-ci permet d’abord de déterminer dans quelles conditions il est possible de choisir un nom d’emprunt. On note ici que comme pour l’utilisation du nom à titre de marque c’est le risque de confusion qui importe. En effet, il faut éviter que le choix du nom d’emprunt ne porte préjudice à autrui de par le risque de confusion. Un arrêt de la Cour d’Appel de Paris permet de l’illustrer. En l’espèce, un compositeur interprète exerçant sous le pseudonyme Saint-Preux prétendait solliciter la nullité des marques Saint-Preux exploitées par la société Saint-Preux (fonds de commerce de Boulangerie). Le Tribunal de Grande Instance a déclaré irrecevable la demande en nullité des marques et dit que le compositeur ne justifiait pas d’un usage sérieux et durable de son pseudonyme. Le compositeur a interjeté appel. La cour d’appel déboute le compositeur de sa demande de cessation d’utilisation de son pseudonyme à titre commercial. Pour les juges du fond, les activités exercées sont différentes, il y a donc aucun risque de confusion. Le compositeur utilise son pseudonyme dans le cadre d’activités musicales. La société St Preux exerce une activité de Boulangerie. Peu importe ici la bonne foi de celui qui choisit le pseudonyme. Cette réglementation permet ensuite d’encadrer l’utilisation concrète du nom d’emprunt. En effet, celle-ci ne doit pas être générale, elle doit donc se limiter à des activités déterminées servir à détourner une prohibition légale (porter le nom d’un ex-conjoint sans autorisation) couvrir l’exercice d’une profession réglementée (médecin.) être employé pour souscrire à un acte authentique ou public Si ces conditions sont remplies, le pseudonyme utilisé loyalement, de manière continue, public et paisible entraîne la création d’un droit patrimonial qui à ce titre est juridiquement protégé. § 2. Les particules et titres de noblesse La particule, du de la le, complète le nom, elle fait partie du nom patronymique et à ce titre est protégée comme ce dernier. Si elle a été omise sur l’acte d’état civil, elle pourra faire l’objet d’un rétablissement par le recours à une action en rectification des actes d’état civil. Elle ne constitue pas une qualification nobiliaire. La noblesse en tant que classe sociale investie de privilèges a disparu depuis le mois d’août 1789. Les titres de noblesse eux ont été rétablis par la Charte de 1814, dont l’article 71 dispose : « l’ancienne noblesse reprendra ses titres, la nouvelle conservera les siens. », puis par un décret du 27 janvier 1852. Le titre nobiliaire ne fait pas partie du nom, il n’en est que l’accessoire, il n’a pas pour rôle d’identifier une personne. Cas pratique Le nom et le prénom Claire ROBERT, née DURAND, a donné naissance à un petit garçon. Elle et son mari Axel veulent tous deux donner leur nom à leur enfant sans parvenir à se mettre d’accord. En revanche, ils sont d’accord sur une chose, leur fils se prénommera Goldorak. Que pensez-vous de leur conflit et de leur choix pour le prénom de leur enfant ? Correction Un couple marié donne naissance à un enfant mais ne s’entend pas sur le nom qu’ils veulent lui attribuer en revanche ils s’accordent sur le prénom de « Goldorak ». Comment est attribué le nom patronymique de l’enfant ? L’article 311-21 du Code civil ouvre une faculté de choix du nom de l’enfant lorsque celui-ci est l’objet d’un double lien de filiation établi de façon simultanée. Trois hypothèses sont alors visées. Il peut s’agir de l’enfant d’un couple marié. Il peut s’agir d’un enfant dont les parents, non mariés, ont procédé à une double reconnaissance prénatale. Enfin, ce peut être le cas de l’enfant d’un couple non marié dont les parents ont procédé à une double reconnaissance postnatale simultanée. Par ailleurs, cet article dispose que lorsque les parents sont en désaccord quant au choix du nom, l’officier de l’état civil inscrit le nom de chacun des parents, dans l’ordre alphabétique. Il faut alors que les parents signalent leur désaccord à l’officier d’état civil au plus tard au jour de la déclaration de naissance. Aux termes de l’article 311-21 du Code civil, les époux choisissent : soit le nom du père, soit le nom de la mère, soit les deux noms accolés. Le choix résulte d’une déclaration conjointe des parents mentionnant le nom de l’enfant. En cas de désaccord des parents signalé à l’officier d’état civil celui-ci inscrit le nom de chacun des parents dans l’ordre alphabétique. S’il ne dise rien, l’enfant prend de nom de son père. En l’espèce, deux situations peuvent se présenter. Soit les parents ne pensent pas à signaler leur désaccord : l’enfant se nommera alors Robert. Soit les parents signalent leur désaccord : l’enfant se nommera alors Durand-Robert. Un homme souhaite appeler son enfant Goldorak et se demande si on pourra le lui refuser. Les parents d’un enfant peuvent-ils choisir de prénommer celui-ci Goldorak ? Selon l’article 57 alinéa 2 du Code civil, l’attribution d’un prénom est obligatoire. Le choix est librement effectué par les parents de l’enfant. Aux termes de l’alinéa 3, si les prénoms choisis ou l’un d’eux seul ou associé aux autres prénoms ou au nom paraissent à l’officier d’état civil, contraires à l’intérêt de l’enfant ou au droit des tiers à la protection de leur nom de famille, il en avise sans délai le procureur de la République. Si ce dernier estime fondées les réserves formulées, il saisit le Juge aux affaires familiales. Au terme de la procédure, si le magistrat conclut dans le même sens, il ordonne la suppression du ou des prénoms litigieux des registres de l’état civil. Les parents devront alors choisir un nouveau prénom qui devra recevoir l’aval du juge. S’ils s’obstinent à retenir des prénoms inacceptables, le juge procédera lui-même au choix du prénom. Cass. 1re civ., 15 février 2012 : « c’est par une appréciation souveraine qu’en une décision motivée la cour d’appel a estimé qu’il était contraire à l’intérêt de l’enfant de le prénommer Titeuf ; que le moyen qui ne tend en réalité qu’à contester cette appréciation ne peut être accueilli » Aux termes de l’article 57 alinéa 2 du Code civil, les parents choisissent librement le prénom qu’ils souhaitent donner à leur enfant. Toutefois, si l’officier d’état civil juge ce prénom contraire à l’intérêt de l’enfant il peut refuser de l’inscrire et avertir le procureur de la République. En l’espèce, les parents souhaitent appeler leur enfant Goldorak. Ce prénom fait référence à un dessin animé et comme dans l’arrêt du 15 février 2012, pourrait être considéré comme contraire à l’intérêt de l’enfant (ridicule…) Il semble donc opportun de conseiller au couple de faire un autre choix. Chapitre 2. Les effets de la personnalité 1. Section 1. Le droit au respect de l’intégrité morale de la personne 1. § 1.Le respect du droit à la vie privée 2. § 2. Le respect du droit à l’image 2. Section 2. Le droit au respect de l’intégrité physique de la personne 1. § 1. Les principes d’inviolabilité et d’intégrité du corps humain 2. § 2. L’indisponibilité (du corps humain et de l’état des personnes) et la non-patrimonialité L’obtention de la personnalité juridique s’accompagne de l’obtention de droits parmi lesquels on trouve le droit à l’intégrité morale (Section 1) et le droit à l’intégrité physique (Section 2). Plus largement, c’est bien souvent la dignité de la personne que l’on cherche ici à protéger. En droit interne, la valeur constitutionnelle de la sauvegarde de la dignité de la personne humaine a été affirmée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 94-343-344 DC du 27 juillet 1994 relative aux lois sur la bioéthique : « la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d’asservissement et de dégradation est un principe à valeur constitutionnel ». Ainsi, les lois de bioéthique consacrent le droit à la dignité et l’article 16 du Code civil dispose que « la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ». Autrement dit, le respect de la dignité humaine est un droit fondamental. C’est aussi, une composante de l’ordre public. En effet, le Conseil d’État, par deux arrêts du 27 octobre 1995, a affirmé « qu’il appartient à l’autorité investie du pouvoir de police municipale de prendre toute mesure pour prévenir une atteinte à l’ordre public ; que le respect de la dignité de la personne humaine est une composante de l’ordre public ; que l’autorité investie du pouvoir de police municipale peut, même en l’absence de circonstances locales particulières, interdire une attraction qui porte atteinte au respect de la dignité humaine ». Ainsi, l’ordre public vient justifier une ingérence dans l’exercice des libertés individuelles d’une personne au nom du respect de sa propre dignité (CE, Ass, 27 octobre 1995, Commune de Morsang-sur-Orge, n° 136727). CE 27 oct. 1995 n° 136727 Commune de Morsang-sur-Orge Le 23 janvier 1992, le maire d’une commune interdit par un arrêté le spectacle de lancer de nains. La société productrice du spectacle demande alors au tribunal administratif d’annuler cet arrêté. Le tribunal administratif de Marseille annule l’arrêté au fondement que l’attraction litigieuse ne portait pas atteinte à la dignité de la personne humaine et qu’ainsi elle ne mettait pas en cause ni la sécurité ni la moralité publique. La mairie par une requête sommaire et mémoire complémentaire demande au conseil d’État d’annuler le jugement du tribunal administratif Le maire d’une commune peut-il interdire, dans l’exercice de ses pouvoirs de police, un spectacle de lancer de nains ? Un spectacle de lancer de nain pour lequel les participants ont librement consentis est-il contraire au principe du respect de la dignité humaine ? Solution Le Conseil d’État annule le jugement du Tribunal administratif aux motifs : Qu’il appartient à l’autorité investie du pouvoir de police municipale de prendre toute mesure pour prévenir une atteinte à l’ordre public et que le respect de la dignité et de la personne humaine est l’une des composantes de l’ordre public. L’attraction de lancer de nains par son objet même porte atteinte à la dignité de la personne humaine. Dès lors, l’autorité investie du pouvoir de police municipale pouvait interdire cette attraction. Dans cet arrêt on met en avant le respect de la dignité humaine pour empêcher la réification du corps humain. En effet, utiliser une personne de petite taille comme projectile revient à le traiter comme une chose, en cela il s’agit d’un acte contraire à la dignité humaine. Il faut bien noter qu’en l’espèce la personne utilisée comme projectile avait donné son consentement et en tirait même un certain profit. Le CE est passé outre le fait qu’il y ait consentement, car le respect de la dignité humaine est un principe d’ordre public. Section 1. Le droit au respect de l’intégrité morale de la personne De nombreux droits pourraient ici être étudiés, droit à la vie privée (§1), droit à l’image (§2), mais aussi le droit à l’honneur ou encore au respect de la présomption d’innocence, nous ne verrons pour notre part que les deux premiers, droit à la vie privée et droit à l’image. § 1.Le respect du droit à la vie privée L’article 9 du code civil dispose que chacun a droit au respect de sa vie privée. Pour en comprendre le sens, il nous faut d’abord nous intéresser aux conditions de la protection (A) pour ensuite apprécier les sanctions envisagées (B). A. Les conditions de la protection Pour que la protection puisse jouer encore faut-il pouvoir constater une atteinte à la vie privée, il importe dès lors de cerner les contours de cette notion (1). Ceux-ci appréhendés, un autre élément va s’avérer déterminant, l’autorisation donnée à la divulgation (2). 1. Les contours de la notion de vie privée La première difficulté tient au fait que la notion de vie privée n’est pas définie par la loi. Pour saisir la notion, on oppose traditionnellement vie privée et vie publique en incluant dans la première la vie personnelle et familiale et dans la seconde les activités sociales et professionnelles. Il existerait alors des faits publics par nature, à cause de leur notoriété, du caractère public du lieu où ils se sont déroulés. À l’inverse certains faits seraient privés par nature lorsqu’ils concernent la famille par exemple. Ainsi, la vie privée est une notion large qui recoupe tout autant l’identification, l’orientation sexuelle, la vie personnelle et familiale que la situation patrimoniale. La seconde difficulté est liée au domaine très large de la notion. Ainsi, le domicile est par exemple un lieu dont la protection est garantie au nom de la vie privée. Plus précisément, l’inviolabilité du domicile est garantie par la loi pénale (art. 228-4 c pen), la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (art. 8), et ce, au nom du droit au respect de la vie privée. Une illustration de la difficulté liée à la notion de vie privée peut être trouvée dans le droit du travail. En effet, la vie privée doit aussi être respectée au travail sans que ce respect ne puisse être total. Il doit se concilier avec les droits de l’entreprise. Le principe est que les obligations découlant du travail doivent respecter les convictions religieuses du salarié (art. L 1132-1 c. trav.), de la vie privée et familiale Par exemple une salariée de chez Renault avait acheté comme véhicule personnel une Peugeot et pour cette raison avait été licenciée. Or, la Cour de cassation a considéré comme abusif le licenciement dans la mesure où dans sa vie privée la salariée était libre d’acheter les biens, produits et marchandises de son choix. Néanmoins, les libertés du salarié peuvent être restreintes en raison de la nature de la tâche à accomplir si ces limites sont raisonnables (proportionnées au but recherché). 2. L’autorisation Le consentement donné par la personne intéressée à la divulgation de sa vie privée exclue toute atteinte. Cette autorisation n’a pas besoin d’être expresse et peut donc rester tacite. Par exemple, le déballage de sa vie privée par autobiographie est une autorisation tacite donnée à la divulgation de sa vie privée. Si un fait est devenu public en raison notamment du comportement ou des indiscrétions de la personne concernée, alors la presse peut licitement en informer le public. Toute la difficulté sera ici d’assurer l’équilibre entre la liberté d’information et le droit au respect de la vie privée. Illustration Cass. 1re civ., 6 octobre 2011, n° 10-23606 Attendu que le magazine Le Point a publié dans son édition du 17 juin 2010 un article de M. X… intitulé « Mes enregistrements secrets du Maître d’hôtel », dans lequel il était relaté que le maître d’hôtel de Mme Y… avait, un an durant à partir du mois de mai 2009, capté les propos échangés dans la salle de l’hôtel particulier de Neuilly-sur-Seine où Mme Y… tenait « ses réunions d’affaires » avec certains de ses proches dont M. Z… chargé de la gestion de sa fortune ; que l’article diffusé le 14 juin sur le site de l’hebdomadaire, fut suivi d’autres, les 17 et 21 juin, également diffusés sur ce site ; que M. Z… a assigné la société d’exploitation de l’hebdomadaire Le Point, MM. A…, directeur de la publication et X…, journaliste, devant le juge des référés pour, notamment, voir ordonner le retrait du site de l’hebdomadaire de tout ou partie de la transcription des enregistrements illicites réalisés au domicile de Mme Y…, l’interdiction de toute nouvelle publication de ces retranscriptions et la publication d’un communiqué judiciaire ; Sur le premier moyen : Vu les articles 226-1 et 226-2 du Code pénal ensemble l’article 809 du code de procédure civile ; Attendu que pour rejeter les demandes de M. Z… tirées de l’existence d’un trouble manifestement illicite, l’arrêt énonce que l’article 226-2 du Code pénal n’englobe pas dans sa prévention la diffusion de tout enregistrement de propos réalisé – « dans la sphère privée » – sans le consentement de l’auteur qui les a tenus, mais uniquement ceux qui portent « atteinte à l’intimité de la vie privée d’autrui », comme l’énonce l’article 226-1 du Code pénal, que relèvent par essence de l’intimité de la vie privée, la vie affective et sentimentale, la vie familiale ainsi que la santé physique et mentale de la personne et qu’il s’ensuit que le seul fait que les propos diffusés aient été enregistrés dans le consentement de leurs auteurs, n’est donc pas en lui-même suffisant pour qualifier de manifestement illicite le trouble causé par leur diffusion ; que l’arrêt ajoute que les entretiens publiés concernent la gestion du patrimoine de Liliane Y… et sont de nature professionnelle pour M. Z… et patrimoniale pour Mme Y… et que les informations ainsi révélées mettant en cause la principale actionnaire de l’un des premiers groupes industriels français, et dont l’activité et les libéralités font l’objet de très nombreux commentaires publics, relèvent de la légitime information du public ; Attendu cependant que constitue une atteinte à l’intimité de la vie privée, que ne légitime pas l’information du public, la captation, l’enregistrement ou la transmission sans le consentement de leur auteur des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ; d’où il suit qu’en statuant comme elle l’a fait, quand il ressort de ses propres constatations que les entretiens litigieux présentaient un tel caractère, la cour d’appel a violé les textes susvisés ; C. Les sanctions de l’atteinte à la vie privée Sur le fondement de l’article 9 du Code civil, des dommages et intérêts peuvent être demandés. Notons qu’en la matière l’article 9 n’impose pas la preuve d’une faute de la part de l’auteur de l’atteinte. A cela peuvent s’ajouter des sanctions pénales. L’article du Code pénal interdit « au moyen d’un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l’intimité de la vie privée d’autrui : 2° En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé ». Les sanctions prévues sont d’un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Toutefois, « lorsque les actes […] ont été accomplis au vu et au su des intéressés sans qu’ils s’y soient opposés, alors qu’ils étaient en mesure de le faire, le consentement de ceux-ci est présumé ». Par ailleurs, le juge peut ordonner des sanctions préventives en nature pour éviter le préjudice comme la non-parution d’un article de presse litigieux ou encore la parution d’un communiqué rectificatif. Il peut aussi ordonner la saisie ou la séquestre d’un journal, d’un livre ou d’un film. Mais cette sanction n’est possible que si l’atteinte à l’intimité de la vie privée est d’une gravité intolérable, qui ne peut pas être réparée par des dommages et intérêts. Enfin, toute personne physique ou morale mise en cause par une publication écrite, une émission audiovisuelle, internet, même sans faute, bénéficie d’un droit de réponse à condition de ne pas porter atteinte ni aux lois, ni aux bonnes mœurs, ni à l’honneur du journaliste, ni à l’intérêt légitime d’un tiers et que la réponse soit en rapport avec l’article en cause. Ce droit se prescrit par trois mois. § 2. Le respect du droit à l’image Par principe, une personne a droit au respect de son image (A), toutefois ce droit n’est pas sans condition (B). On retrouve ici les mêmes sanctions que celles vues précédemment. A. Le principe Une personne peut s’opposer à ce qu’un tiers capte et utilise son image, peu importe ici le support ou le fait que le tiers ait agi ou non avec malveillance. Plusieurs fondements ont été avancés pour justifier cette protection, le droit de la propriété, le droit à la vie privée (toutefois, l’image peut faire l’objet d’une atteinte en dehors de la vie privée notamment lorsque la photographie est prise dans un lieu public) ou encore la protection de la dignité de la personne. Ce droit est respecté quel qu’en soit le support : photographie, télévision, dessin, affiche, caricature… B. Les conditions Une personne peut prétendre à faire respecter son image uniquement si elle est identifiable et qu’est, le plus souvent mise en cause sa vie privée (1). Ce droit disparaît si la reproduction de l’image a été autorisée ou justifiée par les nécessités de l’information (2), sauf si elle porte atteinte à la dignité de la personne (3). 1. Une personne identifiable et une mise en cause de la vie privée Il ne peut y avoir atteinte à l’image d’une personne que si elle l’identifie. Toutefois, il n’est nullement nécessaire qu’un nom accompagne l’image, seul compte le fait que la personne soit discernable. Cour de cassation 1re civ. 5 avril 2012, Bull I, n° 86 Attendu que prétendant, selon l’arrêt attaqué (Paris, 19 janvier 2011) que la société Tereos, exploitant la marque Beghin Say, à l’occasion d’une campagne commerciale dite « Année du Brésil », avait fait figurer sans son autorisation, sur l’emballage de morceaux de sucre, reproduit par ailleurs sur son site internet, une photographie de sa personne réalisée lorsqu’elle avait prêté son concours à une troupe de danse lors de spectacles sur le même thème, Mme X… a introduit une action en justice pour atteinte portée à son droit sur son image ; qu’elle a été déboutée ; Attendu que, par motifs propres et adoptés, la cour d’appel, après avoir relevé, outre la taille de trois millimètres sur deux du visage litigieux, sur une vignette occupant seulement la plus grande face d’un morceau de sucre, la mauvaise définition générale de l’image, a estimé que la personne représentée était insusceptible d’identification ; qu’à partir de ces constatations et appréciations souveraines, elle a pu retenir qu’aucune atteinte à l’image n’était constituée ; que le moyen n’est pas fondé ; Outre l’identification de la personne, la jurisprudence retient que l’atteinte à la vie privée est déterminante. Ainsi, la reproduction de l’image d’une personne sans son autorisation constitue une immixtion irrégulière du seul fait qu’elle a eu pour objet sa vie privée. Cour de cassation 1re civ. 16 mai 2012, n° 11-18449 Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 3 mars 2011), que la société Hachette Filipacchi et associés (la société) a publié, dans le numéro 3299 du magazine Ici Paris daté du 23 au 29 septembre 2008, un article intitulé « PPDA et Anna-La tendre complicité », annoncé dès la page de couverture, et illustré de quatre photographies représentant M. Patrick X… seul ou en compagnie de la femme ainsi concernée ; que la société a été condamnée à dommages-intérêts envers M. Patrick X… pour atteinte à l’intimité de sa vie privée et violation de son droit sur son image ; Attendu que la cour d’appel, à partir des exergues ou commentaires relevés dans l’article litigieux et reproduit par elle, a considéré que le journal, au lieu de se contenter du constat objectif de faits ou clichés saisis lors d’événements médiatisés et concernant un journaliste jouissant d’une certaine notoriété, lui avait prêté des sentiments sur la nature desquels le lecteur ne pouvait se méprendre, spéculant sur sa vie sentimentale et s’immisçant dans l’intimité de sa vie privée, malgré sa constante opposition à toute divulgation à ce propos, sans qu’il y ait lieu de s’interroger sur un caractère prétendument anodin ou sur une absence de malveillance ; qu’elle a ainsi légalement justifié sa décision ; Et attendu, par ailleurs, que la publication de photographies représentant une personne pour illustrer des développements attentatoires à sa vie privée porte nécessairement atteinte à son droit au respect de son image. Néanmoins, l’atteinte à la vie privée n’est pas pour autant indispensable. Une photographie prise dans un lieu public peut être considéré comme une atteinte à la vie privée. 2. L’exception : l’absence de protection en cas d’autorisation ou de nécessité de l’information Pour qu’une publication porte atteinte au droit qu’une personne a sur son image, il faut qu’elle ait été faite sans autorisation. On considère que l’autorisation expressément donnée par une personne est limitée à son objet et à sa cause. C’est ce que permet d’illustrer la décision suivante : Cass. 1re civ. 4 novembre 2011, Bull. I, 196 Sur le moyen unique : Vu l’article 1134 du Code civil ; Attendu, selon l’arrêt attaqué, que des fonctionnaires de police estimant avoir été victimes d’atteintes à leur vie privée lors d’un reportage où ils apparaissaient dans l’exercice de leurs missions au sein de la brigade anticriminalité de Nice, ont assigné la société de télévision TF1, M. X…, directeur de la programmation et de la diffusion, et la société de Productions Tony Comiti en réparation de leurs préjudices ; Attendu que pour rejeter ces demandes, l’arrêt énonce que ces policiers ont accepté d’être filmés et que leur image soit diffusée sans être « floutée » mais qu’ils dénoncent le fait que leurs noms et grades ont été divulgués alors qu’ils n’avaient donné aucune autorisation à cet égard, que dès lors qu’elle avait été autorisée à diffuser les images de ces policiers, la société de production était fondée à se croire tacitement autorisée à divulguer également leurs noms et grades, et qu’il n’y a pas eu dans ce contexte et de ce seul fait atteinte portée au respect de leur vie privée, sachant que la révélation publique de leur profession découlait nécessairement et complètement de la seule diffusion de leur image, sans que cette révélation ait été en elle-même majorée par celle de leur nom et grade, même si l’une et l’autre de ces révélations ont pu conduire à des différences de réaction du public ; Qu’en statuant ainsi, alors que l’accord donné par une personne pour la diffusion de son image ne peut valoir accord pour la divulgation de ses noms et grade, la cour d’appel a violé l’article susvisé. De surcroît, si le droit à l’image est absolu, il connaît une limite liée aux nécessités de l’information et de la création artistique. Quand une personne est impliquée dans un évènement et que l’image est en relation avec l’information, le droit du public à être informé l’emporte sur le droit de la personne sur son image. Ainsi, la publication de l’image d’une personne se trouvant dans une manifestation ou un lieu public n’est pas soumise à autorisation. En outre, si les personnes célèbres se voient reconnaître un droit à l’image, la jurisprudence concilie ce principe avec le droit du public à l’information. Dès lors, la captation et l’utilisation de l’image d’une personne publique dans le cadre de ses activités publiques ne nécessitent pas d’autorisation particulière. Par ailleurs, des photographies peuvent être diffusées sans autorisation pour rendre compte des évènements d’actualités que la personne concernée soit célèbre ou non (Cass. 1 re civ., 20 février 2001, Bull. I n° 42, 98-23471).). Toutefois, les images ainsi prises doivent être des images banales, prises sans recherche de sensationnalisme, elles ne doivent pas porter atteinte à la dignité de la personne (Cass., 1 re civ., 20 février 2001 précité). 3. L’exception à l’exception : l’atteinte à la dignité La liberté d’expression permet la publication d’une photographie sans l’autorisation de l’intéressé du moment qu’elle est en rapport avec l’information même lorsqu’elle touche à sa vie privée mais seulement si elle ne porte pas atteinte à la dignité de la personne. La dignité de la personne fait ainsi tomber l’exception de l’information du public pour en revenir au principe de l’atteinte au droit à l’image en l’absence d’autorisation de la personne. Dans l’affaire Erignac, Cass. 1 re civ., 20 décembre 2000, Bull. I 341, après la parution d’une photographie du préfet défunt, la question avait été posée aux juges de savoir si le droit au respect de la vie privée devait s’écarter devant la liberté d’expression. Ainsi, soit l’on devait considérer que ces images étaient attentatoires au droit au respect de la vie privée (article 9 C. civ.), voire au principe de dignité (article 16 C. civ.), soit l’on devait conclure que l’image devait bien être publiée au nom de la liberté d’expression et qu’aucune responsabilité ne devait être recherchée. La Cour de cassation, ayant relevé que la photographie publiée représentait distinctement le corps et le visage du préfet assassiné gisant sur la chaussée d’une rue, décida que l’image était attentatoire à la dignité de la personne humaine et contraire au respect de la vie privée de la famille du défunt. Section 2. Le droit au respect de l’intégrité physique de la personne En la matière plusieurs grands principes s’appliquent, celui de l’inviolabilité et de l’intégrité (§1) et celui de l’indisponibilité (§2). § 1. Les principes d’inviolabilité et d’intégrité du corps humain Après avoir énoncé la définition de ces principes (A), nous verrons les atteintes légales (B). A. L’énoncé des principes L’article 16-1 du Code civil dispose en son alinéa 2 que « le corps humain est inviolable ». L’article 16-3 alinéa 1 prévoit qu’« il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l’intérêt thérapeutique d’autrui ». Et l’alinéa 2 de poursuivre : « le consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même de consentir ». Ainsi, le corps humain ne peut être violé par autrui. C’est pourquoi le droit pénal prohibe toutes les infractions attentatoires au corps (homicide, coups et blessures). De même, le droit civil permet la réparation des dommages corporels. À côté des atteintes illicites portées au corps, le législateur admet l’existence d’atteintes licites. Pour les atteintes licites, telles que les actes de soin, l’article 16-3 alinéa 2 met en avant le consentement nécessaire et préalable de la personne, et ce, après l’information nécessaire du médecin sur la nature et les risques de l’intervention. Au reste, le texte prévoit que cette atteinte ne peut avoir lieu qu’en cas de nécessité médicale. B. Les atteintes licites De ce qui précède, il résulte qu’une atteinte à l’intégrité du corps humain ne peut être effectuée que sous deux conditions : un intérêt légitime prévu par la loi (intérêt médical, thérapeutique…) et le consentement de la personne. Quelques situations permettent de l’illustrer. Prenons tout d’abord, le don et l’utilisation des éléments et produits du corps humain. L’exigence d’un consentement préalable pour une intervention dans l’intérêt thérapeutique d’autrui se retrouve dans le don et l’utilisation des éléments et produits du corps humain. Mais, ça n’est pas la seule condition exigée par la loi. Il faut tout d’abord respecter un principe de précaution : les éléments et produits du corps humain ne peuvent être utilisés si le risque mesurable en l’état des connaissances pour le receveur potentiel est supérieur à l’avantage escompté pour celui-ci. Il faut ensuite respecter le principe du consentement préalable du donneur. Ce consentement est révocable à tout moment. Il faut également respecter un principe de gratuité qui s’impose : aucun paiement ne peut être reçu, sous quelque forme que ce soit. Il faut enfin respecter un principe d’anonymat (art. 16-8 du Code civil) : le donneur ne peut connaître l’identité du receveur ni le receveur celle du donneur. Néanmoins, certains produits du corps humain ne sont pas soumis à ces principes (liste fixée par décret en Conseil d’État n° 95-904 du 4 août 1995) : ce sont les cheveux, les poils, ongles, dents, ils sont cessibles à titre onéreux, de la main à la main. Prenons ensuite la question de la recherche biomédicale. La question de la recherche biomédicale est délicate, car ce n’est plus l’intérêt médical direct de la personne qui est en cause, mais l’intérêt plus diffus de la science. L’atteinte à l’intégrité du corps humain est donc moins admissible. C’est pourquoi la recherche sur l’être humain est très encadrée. S’impose ici encore le nécessaire consentement libre et éclairé de la personne ainsi que le principe de gratuité (hors remboursement des frais). À cela s’ajoutent des conditions drastiques relativement à la recherche entreprise : recherche fondée sur le dernier état des connaissances scientifiques ; risque prévisible proportionné avec le bénéfice de la recherche ; nécessité de réduire la douleur, les désagréments pour la personne. De manière générale, l’intérêt des personnes qui se prêtent à une recherche médicale prime toujours les seuls intérêts de la science et de la société. Malgré les deux conditions posées par la loi pour qu’une atteinte soit licite, on constate que dans certains cas, le législateur se contente d’une seule condition. En effet, il arrive que le consentement préalable ne soit pas requis. C’est le cas notamment pour l’intervention chirurgicale d’urgence. L’article 16-3 alinéa 2 du Code civil prévoit en effet l’hypothèse dans laquelle l’état du malade rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même de consentir. Cela recouvre la situation dans laquelle le patient est hors d’état de manifester sa volonté (coma, par ex.). Toutefois, la jurisprudence a dans, une hypothèse bien différente, fait bénéficier d’une immunité du même ordre au médecin dans le cas des transfusions sanguines pratiquées pour sauver la vie d’un patient, et ce, malgré son refus motivé par des raisons d’obédience religieuse (Témoins de Jéhovah). Le patient en l’occurrence n’était pas hors d’état de manifester sa volonté, puisqu’il a clairement mentionné qu’il ne souhaitait pas être transfusé pour autant la jurisprudence a retenu que le médecin n’engageait pas sa responsabilité. En effet, le Conseil d’État a posé en principe que l’obligation pour le médecin de sauver la vie ne saurait prévaloir de façon générale sur celle de respecter la volonté du malade (CE, 26 octobre 2001, n° 198546) ; cependant, le médecin ne porte pas une atteinte grave à la liberté du malade lorsqu’après avoir tout mis en œuvre pour convaincre le patient, il accomplit dans le but de le sauver un acte indispensable à sa survie et proportionné à son état. L’absence de la condition du consentement se présente également pour la vaccination obligatoire : il y a bien là une atteinte à l’intégrité du corps humain qui s’opère sans le consentement préalable de l’intéressé. Le Conseil d’État a pu considérer que les vaccinations obligatoires ne constituaient pas une atteinte illicite aux principes d’inviolabilité et d’intégrité du corps humain, dès lors qu’elles sont mises en œuvre pour assurer la protection de la santé et qu’elles sont proportionnées à leur objectif (CE, 26 novembre 2001, n° 222741). § 2. L’indisponibilité (du corps humain et de l’état des personnes) et la non-patrimonialité Le corps humain est hors du commerce. Dès lors, les conventions portant sur le corps humain sont interdites. Là encore, il existe certaines exceptions ; le don de sang ou encore l’essai thérapeutique. Il en résulte que l’aliénation du corps ou de certains de ses éléments est interdite (article 16-1 et 16-5 cciv) ; qu’il est impossible de vendre les services de son corps. C’est sur ce fondement qu’a été prononcée l’annulation des contrats de maternité de substitution. Ass. Plen. 31 mai 1991, Bull. AP n° 4 Faits : Afin de remédier à la stérilité de la femme, un couple a recours au procédé d’insémination artificielle. Le mari donne son sperme à une autre femme qui est alors inséminée artificiellement porte et met au monde un enfant. À la naissance l’enfant est déclaré comme né du père, mais sans indication de la filiation maternelle (la mère biologique accouche sous X). L’épouse introduit alors une requête en adoption plénière. Le tribunal de GI de paris ayant rejeté cette demande le 26 juin 1989 un appel fut interjeté. La CA de Paris infirme cette décision et prononce l’adoption plénière de l’enfant à l’égard de l’épouse stérile. La méthode de maternité substituée devant être considérée comme licite et non contraire à l’ordre public et que cette adoption est conforme à l’intérêt de l’enfant. Le procureur général près de la cour de cassation forme alors un pourvoi dans l’intérêt de la loi. Les conventions de maternité de substitution sont-elles licites ? Solution, non, il s’agit d’un détournement de l’institution de l’adoption et porte atteinte au principe de l’indisponibilité du corps humain. « cette adoption n’était que l’ultime phase d’un processus d’ensemble destiné à permettre à un couple l’accueil à son foyer d’un enfant, conçu en exécution d’un contrat tendant à l’abandon à sa naissance par sa mère, et que, portant atteinte aux principes de l’indisponibilité du corps humain et de l’état des personnes, ce processus constituait un détournement de l’institution de l’adoption, la cour d’appel a violé les textes susvisés » Ensuite, aux termes de l’article 16-1 alinéa 3 du Code civil, « le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un droit patrimonial ». En outre, l’article 16-5 du même code précise que « les conventions ayant pour effet de conférer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses éléments ou à ses produits sont nulles ». Enfin, l’article 16-6 du Code civil prévoit qu’aucune « rémunération ne peut être allouée à celui se prête à une expérimentation sur sa personne, au prélèvement d’éléments de son corps, ou la collecte de produits ». La non-patrimonialité du corps humain se poursuit même après la mort de la personne. Une affaire, dans laquelle il était question d’utilisée des cadavres à des fins commerciales, portée devant la Cour de cassation permet de l’illustrer. En février 2009 l’exposition dénommée « Our Body » devait avoir lieu à Paris, il s’agissait d’exposer des cadavres humains. La Cour de cassation a retenu l’interdiction de l’exposition muséale de cadavres humains en s’appuyant sur les dispositions de l’article 16-1-1, alinéa 2 du Code civil, en vertu desquels « les restes des personnes décédées doivent être traités avec respect, dignité et décence ». Elle en a conclu que « l’exposition de cadavres à des fins commerciales méconnaît cette exigence », et qu’elle devait être interdite en conséquence (Civ. 1 re, 16 septembre 2010, n° 09-67.456). Les expositions de cadavres à des fins commerciales sont donc prohibées, fussent-elles d’ordre muséal. Cas pratiques Les effets de la personnalité Cas n° 1. Sansa cherche à gagner un peu d’argent pour pouvoir rentrer chez elle et refaire sa vie. Elle n’a aucune compétence particulière et n’a pas vraiment le temps de trouver un travail, l’hiver approche et elle voudrait très vite regagner sa maison. Elle décide alors de vendre ses cheveux, seulement cela ne rapporte pas grand-chose. Elle envisage alors de vendre également un rein. Qu’en pensez-vous ? Cas n° 2. Sophie a récemment gagné une médaille d’or aux jeux olympiques de Sydney. Elle est devenue célèbre et a même rencontré le président de la République il y a quelques jours. Hier en se promenant dans la rue avec son chien Rackam elle découvre avec stupeur que le magazine « Oups » va publier prochainement une photo volée d’elle alors qu’elle se trouve dans le jardin de la maison de campagne de ses parents. On la voit en compagnie de son nouveau petit ami avec qui elle entretient une liaison secrète depuis quelques mois. Elle est d’autant plus choquée que l’article spécule sur une éventuelle grossesse, la photo semblant laisser deviner un ventre plus arrondit que d’ordinaire. Que peut-elle faire pour protéger ses droits ? Corrections Cas n° 1 : Une femme souhaite vendre ses cheveux et son rein. Une personne peut-elle vendre ses cheveux et son rein ? Article 16-1 du Code civil « Chacun a droit au respect de son corps. Le corps humain est inviolable. Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un droit patrimonial. » Décret n° 95-904 du 4 août 1995 relatif aux produits du corps humain non soumis aux dispositions du titre Ier du livre VI du code de la santé publique Art. 1er. - Ne sont pas soumis aux dispositions du titre Ier du livre VI du code de la santé publique les produits du corps humain désignés ci-après : Les cheveux ; Les ongles ; Les poils ; Les dents. Aux termes de l’article 16 -1 du Code civil, les éléments et produits du corps humain ne peuvent pas faire l’objet d’un droit patrimonial. Toutefois, l’article 1er du décret du 4 août 1995 fait dérogation à ce principe à l’égard notamment des cheveux. Or, en l’espèce Sansa souhaite vendre ses cheveux et son rein. Au regard de la loi, si elle ne pourra pas vendre son rein, elle pourra, en revanche, céder ses cheveux à titre onéreux. Cas n° 2 : Une sportive célèbre, récemment médaillée, a été prise en photographie à son insu. Cette photographie est parue dans la presse accompagnée d’un article spéculant sur sa vie sentimentale. La photographie d’une personne célèbre prise à son insu porte-t-elle atteinte à son droit à l’image ? Selon l’article 9 du code civil, l’image de la personne est protégée. Le simple fait que la personne soit identifiable sur l’image en question porte atteinte à ses droits. Toutefois, la jurisprudence décide que l’atteinte n’est pas constituée lorsque la personne a consenti à cette captation ou quand la protection de l’image doit être conciliée avec la liberté de la presse. Si les personnes célèbres se voient reconnaître un droit à l’image, la jurisprudence concilie ce principe avec le droit du public à l’information. Dès lors, la captation et l’utilisation de l’image d’une personne publique dans le cadre de ses activités publiques ne nécessitent pas d’autorisation particulière. Au-delà de cette situation, il est permis de déroger à la nécessité d’autorisation lorsque l’image concerne des personnes se trouvant impliquées dans un événement d’actualité. Dans cette situation, des photographies peuvent être diffusées sans autorisation pour rendre compte des évènements (Cass. 1 re civ., 20 février 2001, Bull. I n° 42, 98-23471).). Toutefois, les images ainsi prises doivent être des images banales, prises sans recherche de sensationnalisme, elles ne doivent pas porter atteinte à la dignité de la personne (Cass., 1 re civ., 20 février 2001 précité). De surcroît, la jurisprudence retient que « la publication de photographies représentant une personne pour illustrer des développements attentatoires à sa vie privée porte nécessairement atteinte à son droit au respect de son image » (Cass., 1re civ., 27 février 2007, Bull. I n° 85, n° 06-10393). En l’espèce, Sophie n’a pas donné son autorisation pour la publication de cette image, en outre, la photographie a été prise alors qu’elle était chez elle. On peut donc considérer non seulement que l’image a été prise dans un lieu privé, mais aussi que l’activité en cause n’est pas publique. Néanmoins, Sophie venant de gagner une médaille se trouve au cœur de l’actualité sportive ce qui pourrait justifier qu’une photographie d’elle soit diffusée même sans son autorisation afin de rendre compte d’un évènement d’actualité. Reste que l’on ne saurait considérer, en l’espèce, que les images soient banales en raison du caractère sentimental de celle-ci. L’atteinte à l’image est donc constituée. Un article de presse spéculant sur les relations sentimentales d’une sportive célèbre peut-il constituer une atteinte à sa vie privée ? L’article 9, alinéa 1er, du Code civil dispose que « Chacun a droit au respect de sa vie privée ». La protection de la vie privée interdit à un organisme de presse de révéler au public des informations relatives à la vie sentimentale d’une personne (Cass. 1re civ., 5 novembre 1996, Bull. I n° 378, n° 94-14798). Toutefois, le principe de protection de la vie privée connaît certaines limites relatives, notamment, à la notoriété des personnes concernées. Si ces personnes ont le droit au respect de leur vie privée, ce droit doit être concilié avec la liberté de la presse et le droit du public à l’information (Cass., 1 re civ., 9 juillet 2003 Bull. I n° 172, n° 00-20289). C’est la nature des informations révélées et leur importance réelle pour le public qui commande alors la solution. Ainsi, la révélation de l’existence d’un enfant naturel du Prince de Monaco quelques jours après son accession au trône a été considérée comme une atteinte à sa vie privée (Cass. 1 re civ., 27 févr. 2007, précité : « Toute personne, quel que soit son rang, sa naissance, sa fortune, ses fonctions présentes ou à venir a droit au respect de sa vie privée »). En l’espèce, les informations contenues dans l’article concernent bien la vie privée de Sophie. Sa célébrité pourrait remettre en cause l’atteinte ainsi portée à sa vie privée si comme le dit la jurisprudence les informations sont réellement importantes pour le public. Or, l’article mentionne sa vie de couple et une grossesse potentielle, ce qui ne revêt pas un caractère d’importance pour le public. De sorte que l’atteinte à sa vie privée est constituée. De quels moyens dispose une personne pour faire cesser une atteinte à sa vie privée et à son image ? Concernant l’atteinte à son image Les sanctions applicables en cas d’atteinte illicite au droit à l’image sont de deux ordres. Des sanctions civiles peuvent tout d’abord être prononcées sur le fondement de l’article 9 du Code civil. En outre, l’article 226-1 du Code pénal interdit « au moyen d’un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l’intimité de la vie privée d’autrui : 2° En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé ». Les sanctions prévues sont d’un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Toutefois, « lorsque les actes […] ont été accomplis au vu et au su des intéressés sans qu’ils s’y soient opposés, alors qu’ils étaient en mesure de le faire, le consentement de ceux-ci est présumé ». En l’espèce, Sophie pourra donc, obtenir, la réparation du préjudice résultant de l’atteinte à son image. De surcroît, l’image a été prise alors qu’elle se trouvait dans un lieu privé. La photographie a été prise à son insu. Par conséquent, les sanctions pénales prévues par l’article 226-1 du Code pénal sont applicables. Concernant l’atteinte à sa vie privée Ces sanctions sont de même nature que celles qui ont été envisagées au titre du droit à l’image Néanmoins, la jurisprudence estime que le préjudice résultant de l’atteinte et celui qui résulte du droit à l’image sont deux préjudices distincts devant être réparés distinctement (Cass. 1re civ., 10 mai 2005, Bull. I, n° 206, n° 02-14730). En outre, la seule constatation de l’atteinte à la vie privée suffit à engager la responsabilité (Cass. 1 re civ., 5 nov. 1996, précité) sans qu’il soit nécessaire de caractériser la faute de l’auteur de cette atteinte et l’existence d’un préjudice subi. L’article 9, alinéa 2 du Code civil, dispose que « les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesure, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée ; ces mesures peuvent, s’il y a urgence, être ordonnées en référé ». La personne à la vie privée de laquelle il est porté atteinte peut demander, en vertu de ce texte, non seulement la réparation du dommage subi mais aussi la mise en œuvre de sanctions propres à faire cesser le dommage. Ainsi, Sophie pourra obtenir des dommages et intérêts et saisir le juge des référés pour obtenir la saisie et le séquestre des exemplaires du journal. Avant que la perte de la personnalité ne soit définitive (Section 2), deux situations préliminaires sont envisageables, l’absence et la disparition (Section 1). Section 1. L’absence et la disparition Dans certaines situations, il est impossible de savoir si la personne est morte ou non. Ce ne sont pas des raisons médicales qui sont en cause mais des raisons purement factuelles. Ainsi, lorsque l’on ignore si la personne est morte ou vivante, on parle d’absence (§1). Mais lorsque l’incertitude est moins grande, que la mort est quasi certaine, on parle de disparition (§2). § 1. L’absence (articles 102 à 132 du Code civil) Juridiquement, une personne absente est celle qui a cessé de paraître à son domicile ou à sa résidence sans avoir donné de nouvelles (article 112 c. civ.) Depuis une réforme du 28 décembre 1977, entrée en vigueur le 31 mars 1978, il est possible de distinguer deux temps, celui de la présomption d’absence où l’on présume que l’intéressé est vivant (A) et celui de la déclaration d’absence où l’on présume que l’intéressé est décédé (B). A. La présomption d’absence Il importe, dans un premier temps, de faire constater la présomption d’absence (1) ce qui permettra, dans un second temps, de protéger les intérêts du présumé absent (2). Une fois que cette période de présomption d’absence aura pris fin, certains effets pourront se produire (3) 1. La constatation de l’absence de Il s’agit principalement dans un premier temps de préserver les intérêts patrimoniaux l’absent et de sa famille, mais aussi de permettre dans un second temps l’abrégement du délai imposé avant l’obtention d’une décision de déclaration d’absence. Pour obtenir cette protection, il faut, d’une part, saisir le juge (a) et, d’autre part, remplir les conditions de la constatation (b). a. La saisine du juge La demande de constatation de l’absence peut émaner des parties intéressées. Il s’agit par cette expression de désigner ceux qui ont intérêt à voir protéger les intérêts patrimoniaux de l’absent. On désigne ainsi le conjoint, les héritiers présomptifs, les créanciers, les associés de l’absent. Finalement, tous ceux qui ont intérêt à la désignation d’un administrateur chargé d’assurer la gestion du patrimoine de l’absent. La présomption d’absence peut également être constatée par le ministère public « spécialement chargé de veiller aux intérêts des présumés absents » Lorsque la demande émane du conjoint, celui-ci va saisir le tribunal de grande instance sur le fondement des articles 217 ou 219, 1426 ou 1429 du Code civil. En dehors de cette hypothèse particulière, les autres intéressés saisiront le juge des tutelles. Concernant la compétence territoriale, celle-ci est reconnue au juge qui exerce ses fonctions auprès du tribunal « dans le ressort duquel la personne dont il s’agit de constater la présomption d’absence demeure ou a eu sa dernière résidence connue (art. 1062 al. 1 CPC.). À défaut de domicile ou de dernière résidence connue, le juge compétent est celui du tribunal où demeure le demandeur. Le juge est saisi par simple requête adressée ou remise au secrétariat-greffe de la juridiction (CPC, art. 1063 et 1217). Il est indispensable que le demandeur à l’action démontre que la personne a cessé de paraître à son domicile et qu’aucune nouvelle n’a été obtenue de l’intéresser. L’audience n’est pas publique. En la matière, le juge dispose d’un pouvoir souverain b. Les conditions de la constatation Il appartient au magistrat saisi de vérifier si la personne se trouve bien dans une situation d’absence, celle-ci aux termes de l’article 112 du Code civil se caractérise par deux éléments : l’intéressé a cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence ; l’intéressé n’a donné aucune nouvelle. La réunion de ces deux éléments est suffisante pour que soit judiciairement déclarée une présomption d’absence. Il appartiendra alors à celui qui saisit le juge de faire la preuve d’éléments qui établissent le bien-fondé de sa demande. La preuve de ce fait peut être apportée par tous moyens. En la matière, le juge est souverain pour décider si les éléments de fait rassemblés permettent de constater la présomption d’absence. Il est aussi libre d’en fixer le point de départ. 2. La protection du présumé absent La période de présomption d’absence est au minimum de dix ans à compter du jour où la présomption a été judiciairement constatée ou vingt ans depuis la réception des dernières nouvelles si elle n’a pas fait l’objet d’une telle constatation. Pendant tout ce temps, les situations patrimoniale (a) et familiale (b) du présumé absent seront protégées. a. La situation patrimoniale L’intervention du juge des tutelles n’est que subsidiaire en matière de gestion des biens de l’absent, en effet, il n’a pas à agir dans deux cas : le présumé absent a laissé une procuration suffisante afin de le représenter ou d’administrer ses biens (art. 121 al 1er c. civ.) ; le conjoint peut pourvoir suffisamment aux intérêts en cause par l’application du régime matrimonial, et notamment par l’effet d’une décision obtenue en vertu des articles 217 et 219, 1426 et 1429 (art. 121 al 2 c.civ.). Ainsi, en vertu de ces textes, le conjoint peut ou bien se faire autoriser en justice à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de son conjoint serait nécessaire (art. 217 c. civ.) ou bien se faire habiliter par la justice à le représenter, d’une manière générale, ou pour certains actes particuliers dans l’exercice des pouvoirs résultant du régime matrimonial, les conditions et l’étendue de cette représentation étant fixées par le juge (art. 219, al. 1 er c.civ.). Dans les autres cas, le juge des tutelles a pour mission d’organiser la gestion des biens l’absent. Pour cela, il faut désigner un ou plusieurs parents ou alliés, ou le cas échéant toutes autres personnes pour représenter la personne présumée absente et pour administrer tout ou partie de ses biens (art. 113 c.civ.). Il devra de préférence choisir parmi les parents ou alliés de l’absent dès lors que ce choix préserve les intérêts de l’absent. La représentation du présumé absent et l’administration de ses biens sont soumises aux règles applicables à la tutelle des majeurs (art. 113 c.civ.). Il appartient également au juge de décider comment seront réglées les dépenses mises en œuvre pour l’administration des biens de l’absent. Le juge fixe ainsi selon l’importance des biens, les sommes qu’il convient d’affecter annuellement à l’entretien de la famille et aux charges du mariage et détermine comment il est pourvu à l’établissement des enfants (art. 114 c. civ.). b. La situation familiale L’absent étant présumé vivant, son mariage demeure intact. Toutefois, un éloignement de plus deux ans permet au conjoint d’obtenir le divorce sur le fondement de l’article 238 c. civ pour altération définitive du lien conjugal. Quant aux enfants, ils continuent à bénéficier de la présomption de paternité du mari de l’article 212 du Code civil s’ils sont nés durant cette période d’absence. 3. La fin de la période de présomption d’absence Deux situations, aux conséquences très différentes, peuvent entraîner la fin de cette période : le retour de l’absent (a) ou son décès (b). de a. En cas de retour de l’absent Lorsque le présumé absent revient à son domicile, donne ou fait donner des nouvelles, la période de présomption d’absence prend fin sans toutefois provoquer la disparition automatique des mesures de représentation et d’administration qui ont été prises (art. 118 c. civ.). Les mesures d’administration ne seront ainsi supprimées par le juge des tutelles qu’à la demande de l’intéressé. Celui-ci recouvre alors les biens gérés ou acquis pour son compte durant la période d’absence (art. 118 c. civ.). b. En cas de décès de l’absent Au moment où le décès de l’absent est établi, la période de présomption d’absence prend fin rétroactivement à la date retenue pour le décès. Tous les actes accomplis depuis ce jour par l’administrateur des biens de l’absent, vente ou bail par exemple, sont en principe frappés de nullité dès lors qu’il apparaît en réalité que l’absent a disparu dans des circonstances de nature à mettre sa vie en danger. Toutefois, le législateur a admis que les droits acquis sans fraude sur le fondement de la présomption d‘absence ne seraient pas remis en cause, quelle que fût la date du décès. Il s’agit ici tout autant de protéger les tiers de bonne foi que les intérêts du présumé absent. La précarité des actes passés aurait pu rendre complexe l’administration de ses biens. B. La déclaration d’absence Pour que l’absence puisse produire des effets (2) une procédure précise doit être respectée (1). L’absence sera alors déclarée et durera jusqu’à ce que cette situation prenne fin (3). 1. La procédure Deux situations se présentent : la présomption d’absence a été judiciairement constatée selon les modalités l’article 112 du Code civil ou à l’occasion d’une procédure prévue aux articles 217, 219 1426 ou 1429 du même code, l’absence peut être déclarée une fois écoulé un délai de 10 ans depuis cette constatation. La présomption d’absence n’a pas été constatée judiciairement, le délai est de 20 ans. Le délai part depuis les dernières nouvelles de celui qui un jour avait cessé de paraître à son domicile ou dans sa résidence. 2. Les effets Il y a là une présomption de décès. Le jugement déclaratif d’absence emporte, à partir de la transcription tous les effets que le décès certain de l’absent aurait eus (art. 128 al 1 c.civ.). La décision de déclaration d’absence entraîne la cessation des mesures de représentation et d’administration des intérêts de l’absent mises en place au cours de la période précédente. Elle emporte également ouverture de la succession de l’absent à compter du jour de la transcription opérée à la requête du Procureur de la République sur les registres du décès du lieu du domicile de l’absent ou de sa dernière résidence. À la date de la déclaration de l’absence, le mariage est éteint en conséquence son conjoint peut contracter une nouvelle union (pacs, mariage). 3. La fin de l’état d’absence L’absent qui donne ou fait donner des nouvelles ne saurait continuer à être déclaré absent. Ainsi, dès lors qu’il réparait ou que son existence est prouvée postérieurement au jugement déclaratif d’absence, le TGI peut être saisi aux fins d’annulation de sa décision. L’initiative de la requête appartient à tous intéressés, au procureur de la République et évidemment à l’absent lui-même. Au plan patrimonial, lorsque la déclaration d’absence a été obtenue sans fraude, l’absent dont l’existence est judiciairement constatée recouvre ses biens et ceux recueillis durant son absence par succession… Sans qu’une quelconque indemnité ne soit possible (art. 130 c. civ.). En revanche, si la déclaration d’absence a été obtenue par fraude, celui qui s’en est rendu coupable restituera à l’absent les revenus des biens dont il a eu la jouissance, majorés des intérêts légaux calculés à compter du jour où ils furent perçus, le tout sans préjudice de dommages et intérêts complémentaires (art. 131 al 1 c. civ.). Dans le cas particulier où la fraude est imputable au conjoint du déclaré absent, celui-ci à la faculté d’attaquer la liquidation du régime matrimonial dont le jugement déclaratif avait provoqué la dissolution (art. 131 al 2 c. civ.). Au plan familial, l’article 132 du Code civil décide que le mariage reste dissous, même si le jugement déclaratif d’absence a été annulé. Une autre situation peut se présenter, celle du décès certain de l’absent. L’état d’absence cesse par la certitude du décès. Les actes d’état civil seront alors rectifiés en ce sens. § 2.La disparition (article 88 à 92 du Code civil) Dans cette hypothèse, le décès est extrêmement probable, bien que le corps n’ait pas pu être retrouvé, les circonstances de la disparition, de nature à mettre sa vie en danger , permettent de mettre en œuvre une procédure simplifiée de déclaration de décès. Un jugement déclaratif de décès peut être demandé au tribunal de grande instance dans le ressort duquel la disparition est intervenue (si elle a eu lieu en France, sinon on prend le dernier domicile du disparu). Les personnes pouvant agir sont le procureur de la République ou tout intéressé. Le tribunal peut alors ordonner toutes mesures d’information complémentaires, enquête administrative sur les circonstances de la disparition… La date précise de la mort est alors fixée en tenant compte des présomptions tirées des circonstances de la cause, à défaut est retenue le jour de la disparition (art. 90 al 3 c. civ.). de Le jugement tiendra lieu d’acte de décès (art. 91 al 3 c. civ.) et est opposable aux tiers qui peuvent seulement en obtenir la rectification. Son dispositif est transcrit sur les registres de l’état civil du lieu réel ou présumé du décès ou du lieu du dernier domicile du défunt. Ce jugement emporte dissolution du mariage et ouverture de la succession. Dans le cas où le disparu venait à réapparaître, le procureur de la République ou tout intéressé peut poursuivre dans les formes des articles 89 et s. du Code civil, l’annulation du jugement. Pour les effets de cette réapparition, on appliquera alors les mêmes règles que pour le retour de la personne déclarée absente. Section 2. La fin de la personnalité La mort marque la fin de la personnalité juridique. Une fois le moment de la mort déterminé (§1) certains effets juridiques vont s’y attacher (§2). § 1. Le moment de la mort Le constat de la mort est fait par le médecin. Le décès doit être déclaré dans les 24 heures de sa survenance par n’importe quelle personne. Depuis un décret n° 96-1041 du 2 décembre 1996 (art. R. 1232-1 s. c. civ.). Le constat de la mort lorsqu’une personne présente un arrêt cardiaque et respiratoire persistant est subordonné à la présence de trois éléments : l’absence totale de conscience et d’activité motr