Budget Programme : Ambitions, Vertus et Contraintes (PDF)
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Ce document présente un programme budgétaire, ses ambitions, ses aspects positifs et les contraintes liées à sa mise en œuvre. Il décrit les réformes des finances publiques au sein de l'UEMOA, mettant l'accent sur la transparence, l'efficacité et la performance.
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BUDGET PROGRAMME AMBITIONS , VERTUS ET CONTRAINTES L’UEMOA a adopté en 2009, en vertu des dispositions de l’article 67 de son Traité, six (06) Directives formant un nouveau cadre harmonisé des finances Publiques. Il s’agit de : la Directive n°01/2009 du 27...
BUDGET PROGRAMME AMBITIONS , VERTUS ET CONTRAINTES L’UEMOA a adopté en 2009, en vertu des dispositions de l’article 67 de son Traité, six (06) Directives formant un nouveau cadre harmonisé des finances Publiques. Il s’agit de : la Directive n°01/2009 du 27 mars 2009, portant Code Transparence dans la gestion des finances publiques au sein de l’UEMOA ; la Directive n°06/2009 du 26 juin 2009, portant lois de finances au sein de l’UEMOA ; la Directive n°07/2009 du 26 juin 2009, portant Règlement Général de la Comptabilité Publique au sein de l’UEMOA ; la Directiven°08/2009 du 26 juin 2009 portant Nomenclature Budgétaire de l’Etat au sein de l’UEMOA ; la Directive n° 09/2009 du 26 juin 2009, portant Plan Comptable de l’Etat au sein de l’UEMOA ; la Directive n°10/2009 du 26 juin 2009, portant Tableau des Opérations Financières de l’Etat au sein de l’UEMOA. Le délai pour la transposition de ces Directives dans les législations nationales des Etats était fixé au 1er janvier 2012. Cependant, pour quelques dispositions dont l’application nécessitait une certaine préparation comme celles portant sur le Budget Programme, l’échéance avait été portée au 1er janvier 2017 soit un différé de cinq (05) ans. Le Conseil des Ministres de l’UEMOA du 31 mars 2017 a dû repousser ce délai au 1er janvier 2019, du fait des difficultés de la plupart des Etats à mettre en œuvre cette réforme pourtant capitale dans la gestion des finances publiques. Sur la base de ce nouveau Cadre harmonisé ont été aussi adoptées les Directives n°01/2011 du 24 juin 2011 et n°03/2012 du 29 juin 2012, portant respectivement Régime financier des collectivités territoriales et Comptabilité des matières au sein de l’UEMOA. Le Sénégal a entamé la mise en œuvre du Budget Programme partiellement à travers la loi de finances 2021 avant de le généraliser en 2022. L’ambition de ces réformes est d’adapter les systèmes de gestion des finances publiques des Etats membres de l’UEMOA aux normes et pratiques internationales. A cet égard, les innovations apportées par le nouveau cadre harmonisé des finances publiques sont notamment structurées autour des éléments suivants : le renforcement de la transparence et de l’efficacité dans la gestion des finances publiques, de la prévision à l’exécution budgétaire ; la mesure de la performance de l’action publique grâce à une Gestion axée sur les résultats avec un budget par objectif plutôt qu’un budget de moyen ; la mise en place d’un budget programme et d’une programmation pluriannuelle ; l’instauration d’une discipline budgétaire nécessaire à la viabilité de la politique budgétaire des Etats membres conformément aux obligations communautaires relatives au solde budgétaire de base et celles relatives à la politique d’endettement des Etats membres contenues dans le Pacte de convergence, stabilité, de croissance et de solidarité de l’UEMOA ; la mise en place d’une déconcentration de la fonction d’ordonnateurs, permettant aux différents Ministres et Chefs d’institutions de l’Etat d’être ordonnateurs de leurs dépenses avec un pouvoir de régulation toujours conféré au ministre chargé des finances ; le renforcement du contrôle par le Parlement (notamment par la formalisation du Débat 2 © Grant Thornton Senegal Tous droits réservés -Juin 2022 d’orientation budgétaire, l’encadrement des modalités d’élaboration et de vote des lois de finances, la fourniture par l’Exécutif d’informations détaillées permettant d’apprécier la fiabilité et la sincérité des prévisions) ; la création des conditions d’une information claire et régulière des citoyens ; l’élargissement de la compétence de la Cour des Comptes par un contrôle de l’efficacité de la dépense au-delà du contrôle juridictionnel); la précision des rôles et responsabilités de chaque acteur (responsable de programme, ordonnateur, comptable, responsable du contrôle à priori et autorité chargée du contrôle à postériori) ; la mise en place d’une comptabilité patrimoniale permettant à nos Etats de pouvoir identifier à tout moment leurs biens mobiliers et immobiliers ; la comptabilisation des dépenses et des recettes suivant le principe des droits constatés permettant de maîtriser le niveau des recettes et des dépenses ; l’encadrement des relations financières entre l’Etat, d’une part, et les collectives locales, les établissements publics à caractère administratif et les organismes de protection sociale, d’autre part. La réforme phare de ce nouveau Cadre est assurément l’avènement du Budget programme dont les ambitions, les vertus mais aussi les contraintes sont importantes. I. AMBITIONS ET VERTUS DU BUDGET PROGRAMME Comme le laisse apparaître sa dénomination, le Budget Programme est un outil de planification et de gestion budgétaire bâti autour de Programmes c’est-à-dire sur un ensemble d’actions cohérentes définies et menées généralement dans une perspective de moyen terme, avec des objectifs précis, des résultats à atteindre et des indicateurs mesurables. Ces résultats font l’objet d’évaluations régulières et donnent lieu à un rapport de performance. C’est pourquoi, le Budget programme constitue véritablement un Budget de Performance et le Programme en est l’élément fondamental Ainsi, aux termes des lois de finances, les crédits budgétaires sont décomposés en Programmes pour les ministères ainsi que pour les institutions lorsque les actions de ces dernières concourent à la réalisation d’une politique publique. Les crédits budgétaires alloués aux Institutions constitutionnelles sont regroupés en Dotations lorsqu’ils sont directement destinés à l’exercice des missions de celles-ci. En tout état de cause, les crédits budgétaires non répartis en Programmes sont ventilés en Dotations. Chaque dotation regroupe un ensemble de crédits globalisés destinés à couvrir des dépenses spécifiques auxquelles ne peuvent être directement associés des objectifs de politiques publiques ou des critères de performance. C’est le cas des : crédits destinés aux pouvoirs publics pour chacune des institutions constitutionnelles couvrant les dépenses de personnel, de biens et services, de transfert et d’investissement directement nécessaires à l’exercice de ses fonctions constitutionnelles ; crédits globaux pour des dépenses accidentelles et imprévisibles ; crédits destinés à couvrir les défauts de remboursement ou appels en garantie intervenus sur les comptes d’avances, de prêts, d’avals, et de garanties ; des charges financières de la dette de l’Etat. Les crédits de chaque programme sont décomposés selon leur nature en crédits de : Personnel ; Biens et services ; Investissement ; Transferts. 3 © Grant Thornton Senegal Tous droits réservés -Juin 2022 Les ambitions du Budget Programme sont d’autant plus grandes que celui-ci est adossé à un cadre logique axé sur les résultats et les impacts. Par ailleurs, le Budget programme présente plusieurs vertus par le fait qu’il garantit : 1. Une gestion des finances publiques conforme aux meilleures pratiques internationales Le Forum de haut niveau tenu à Paris en mars 2005 a abouti à des engagements importants de la plupart des pays, institutions de développement, Organisations non gouvernementales relativement aux principes et paradigmes devant gouverner l’aide au développement en vue d’améliorer son efficacité. Lesdits engagements sont l’objet de la « Déclaration de Paris ». Cette volonté exprimée a été renforcée à travers le « Programme d’action d’Accra » adopté en septembre 2008, lors d’un autre Forum de haut niveau. Les résolutions contenues dans ces différents documents visent à promouvoir la modernisation et la transparence de la gestion des finances publiques, notamment dans les pays bénéficiaires de l’aide au développement. Elles ont largement inspiré les réformes du cadre harmonisés des finances publiques de l’UEMOA adoptées en mars et juin 2009. Les CINQ (05) PRINCIPES FONDAMENTAUX issus de la « Déclaration de Paris » sont les suivants : L’appropriation 1 Les pays bénéficiaires de l’Aide Public au Développement (APD) exercent une réelle maîtrise sur leurs politiques et stratégies de développement et assurent la coordination de l’action destinée à l’appui du développement ; L’alignement 2 Les donateurs font reposer l’ensemble de leur soutien sur les stratégies nationales de développement, les institutions et les procédures des pays bénéficiaires de l’APD. Dans la continuité du principe d’appropriation, l’alignement suggère que les pays bénéficiaires soient les véritables acteurs de leur développement ; L’harmonisation 3 Les programmes des donateurs sont mieux harmonisés et plus transparents, et permettent une plus grande efficacité collective. Il s’agit ici de réduire la complexité des procédures d’octroi et de gestion de l’APD grâce à une convergence à la source ; 4 la Gestion axée sur les résultats Gérer les ressources et améliorer le processus de décision en vue d’obtenir des résultats. Il s’agit de promouvoir la performance et les résultats à atteindre ; 5 Responsabilité mutuelle Les donateurs et les pays bénéficiaires sont responsables des résultats obtenus en matière de développement ; ce qui met en exergue le « partenariat gagnant- gagnant». 4 © Grant Thornton Senegal Tous droits réservés -Juin 2022 « Le Programme d’action d’Accra » (PAA), conçu pour renforcer et approfondir la mise en œuvre de la Déclaration de Paris, vise à rendre opérationnelle celle-ci par : l’appropriation Les pays ont plus d’influence sur les processus de développement à travers une plus large participation à la formulation des politiques de développement, un plus fort leadership dans la coordination de l’aide et une plus grande utilisation des systèmes nationaux pour l’acheminement de l’aide. les partenariats inclusifs Tous les partenaires participent pleinement - dont les donneurs du Comité d’assistance de l’aide de l’OCDE et les pays en développement, ainsi que les autres donneurs, fondations et la société civile. l’obtention de résultats L’aide est axée sur un impact réel et mesurable du développement. le développement des capacités Construire la capacité des pays pour gérer leur propre future 2. Une allocation optimale des ressources La mise en œuvre d’un Programme doit aboutir à des résultats et impacts mesurables. En conséquence les ressources y afférentes doivent être déterminées de façon optimale. Cette approche d’une gestion axée sur les résultats constitue le point de rupture fondamentale d’avec la logique de budget de moyens qui a prévalu avant. L’allocation optimale des ressources, sur une base pluriannuelle, dédiées à chaque programme est dès lors une condition essentielle d’efficacité du Budget programme. C’est pourquoi, le Code transparence comme la loi de finances y attachent une importance particulière en insistant sur : la sincérité, le réalisme et la prudence des prévisions de recettes et de dépenses(ni sous- estimation des charges, ni surestimation des ressources); l’exhaustivité du budget permettant la couverture de l’ensemble des opérations budgétaires ; la cohérence, l’exactitude et la fiabilité des informations des données budgétaires. A cet effet, prend tout son sens le Débat d’orientation budgétaire obligatoirement mené au Parlement, au plus tard le 30 juin de chaque année et portant sur le Document de Programmation Budgétaire et Economique Pluriannuel (DPBEP) et le Document de Programmation Pluriannuel des Dépenses (DPPD). 3. Un monitoring efficace Aux termes de la loi de finances, les crédits répartis en programmes et dotations, décomposés par nature, constituent des plafonds de dépense dont l’observance par les ordonnateurs et comptables est obligatoire. La flexibilité introduite dans l’exécution des programmes consistant à autoriser les ordonnateurs à modifier la nature des crédits en vue de leur utilisation efficace, permet un monitoring dynamique, sous la responsabilité du ministre concerné. Sont dans ce cas : les crédits de personnel, pour majorer les crédits de biens et services, de transfert ou d’investissement ; les crédits de biens et services et de transfert, pour majorer les crédits d’investissement. 5 © Grant Thornton Senegal Tous droits réservés -Juin 2022 4. Une amélioration de l’efficacité de la dépense L’un des enjeux majeurs de la réforme des finances publiques est de passer de la logique de Budget de moyen à celle de budget de résultat pour que chaque Franc CFA dépensé contribue de manière efficace et efficiente aux objectifs poursuivis par le programme. L’efficacité de la dépense c’est-à-dire ses effets et impacts sur les bénéficiaires des programmes et projets constituent même l’essence du Budget programme. C’est tout le sens des nouvelles compétences données à la Cour des comptes en matière de contrôle de l’efficacité des programmes. GAR : Trajectoire vertueuse et chaine d’impact développement Objectif de Impact Amélioration de la situation socioéconomique Amélioration des conditions Effets de vie des bénéficiaires stratégiques d’investissement institutionnelles / activités Extrants Couverture du groupe cible et déperdition Programmes (activités Utilisation des biens et services Activités Niveau de satisfaction des DÉPENSES bénéficiaires /projets) Intrants Produits (biens et services, livrables des programmes) 5. Un renforcement de la transparence Les lois de finances, le Budget programme conçus dans le cadre harmonisé des finances publiques de l’UEMOA ont été bâti sur le socle que constitue le Code de transparence. C’est la raison pour laquelle la Directive portant Code de Transparence a été adopté en mars 2009 alors que les autres l’ont été en juin 2009. C’est autour des principes et valeurs édictés par le Code de transparence en matière de publicité des opérations financières, de responsabilité, de redevabilité et de reddition de comptes, d’intégrité des acteurs, d’information du public et des citoyens, de cohérence de la politique économique que sont structurées les orientations du Budget programme. Le rattachement au ministre chargé des finances, des contrôleurs financiers même si ceux- ci sont affectés auprès d’ordonnateurs est aussi un gage de transparence introduit dans le cadre de la mise en œuvre du Budget programme. 6 © Grant Thornton Senegal Tous droits réservés -Juin 2022 6. une responsabilisation des acteurs L’instauration de la gestion axée sur les résultats et le développement de la démarche de performance ont pour corollaire, la fixation d’objectifs à réaliser assortis d’indicateurs de mesure de la performance et la responsabilisation des acteurs de la gestion des finances publique. La responsabilité individuelle est largement consacrée dans le cadre du Budget programme. Ainsi la fonction nouvelle de Responsable de programme a été créée à charge pour le titulaire d’atteindre les résultats fixés pour le programme concerné et d’en répondre devant la Cour des Comptes. C’est le personnage central du nouveau dispositif de Budget programme. La déconcentration de la fonction d’ordonnateur en ce qui concerne les dépenses est également une innovation majeure introduite par le Budget programme. Le ministre des finances n’est plus seul Ordonnateur, les autres chefs de Département ou d’Institution deviennent Ordonnateurs de leur budget. La concentration entre les mains du seul ministre chargé des finances de tous les pouvoirs d’ordonnancement n’est pas compatible avec la responsabilisation accrue des gestionnaires avec la mise en œuvre de la gestion axée sur les résultats. Le ministre chargé des finances reste cependant responsable de la centralisation des opérations budgétaires des ordonnateurs, du respect des équilibres budgétaires et financier et de la régulation budgétaire. Il est l’ordonnateur principal unique des recettes du budget général, des comptes spéciaux du Trésor et de l’ensemble des opérations de trésorerie. II. CONTRAINTES LIÉES À LA MISE EN ŒUVRE DU BUDGET PROGRAMME Si le Budget programme présente autant de vertus et progrès dans la gestion des finances publiques, il engendre aussi des contraintes dont la levée est une condition nécessaire du succès escompté. Parmi celles-ci, cinq (05) sont notamment identifiées. 1. Le renforcement des capacités des principaux acteurs La mise en œuvre du Budget programme introduit de nouvelles exigences en termes de responsabilité individuelle et de management global des processus tant au niveau des ordonnateurs, des comptables que des statisticiens des finances publiques. Les règles de transparence, d’efficacité et d’efficience qui sous-tendent le Budget programme doivent faire l’objet d’une appropriation parfaite par tous les acteurs. Du responsable de programme à la Cour des comptes en passant par les ordonnateurs, les comptables, les contrôleurs, le Parlement et même le citoyen, chaque acteur doit être suffisamment outillé. La mise à niveau et la formation des acteurs s’avèrent ainsi déterminantes pour la réussite du Budget programme. Dans la mesure où il s’agit d’une réforme nouvelle pour laquelle les acteurs dans leur quasi-totalité n’étaient pas suffisamment préparés, le renforcement des capacités est une condition sine qua non. 2. La rigueur et le respect des règles Une fois que chaque acteur a une parfaite maîtrise de sa mission et du processus, la rigueur et le respect de règles et procédures est absolument nécessaire. A cet effet, le Code de transparence d’abord, les autres Directives ensuite fixent les principes et modalités d’intervention ainsi que les types de contrôle et de surveillance appropriés. Le défaut de respect des règles par un acteur quelconque à quelque niveau du processus, constitue un risque majeur pour la mise en œuvre efficace du Budget programme. C’est pourquoi, une attention particulière est accordée à l’accomplissement par chaque acteur des tâches dévolues. 7 © Grant Thornton Senegal Tous droits réservés -Juin 2022 3. La digitalisation des procédures et l’interconnexion des systèmes d’information La mise en œuvre efficace du Budget programme est aussi subordonnée à la disponibilité en temps réel des données tant au niveau des ordonnateurs que des comptables. C’est aussi la possibilité pour les structures de contrôle (interne et externe), le Parlement, les statisticiens et le citoyen d’accéder à des informations suivant des modalités garantissant la sécurité, la fiabilité et la transparence. Cela suppose évidemment que les systèmes d’information soient au niveau et qu’ils soient surtout interconnectés. La digitalisation des administrations impliquées dans la gestion des finances publiques est alors incontournable. Au demeurant, la Stratégie de mobilisation des recettes à moyen terme (SRMT) dont l’un des objectifs est justement la digitalisation, devra y contribuer. La déconcentration de la fonction d’ordonnateur ne peut être efficace en l’absence d’une d’un dispositif d’échange de données à temps réel entre les ordonnateurs et les comptables. C’est d’ailleurs, la raison pour laquelle l’application des dispositions relatives notamment à la déconcentration de la fonction d’ordonnateur, à la comptabilité sur la base des droits constatés avaient été différés jusqu’au 1er janvier 2017. Les Etats membres de l’UEMOA devaient mettre à profit ce délai pour mettre au point leurs systèmes d’information. 4. La reddition et le contrôle citoyen Le Code de transparence de l’UEMOA qui a été transposé par les Etats membres dans leur dispositif interne indique dans son préambule que « l’argent public est au cœur de l’Etat de droit et de la démocratie ». Ledit Code rend également obligatoires la déclaration de patrimoine pour toute autorité publique, élu ou haut fonctionnaire ainsi que l’adoption de règles déontologiques pour les agents de l’Etat. Il dresse aussi les bases de la sanction de l’enrichissement illicite. La reddition des comptes constitue ainsi un principe sacrosaint dans la gestion vertueuse des finances publiques. Les principes découlant du Code de transparence traversent toutes les dispositions contenues dans les différentes Directives notamment celle relative au Budget programme. La promotion de la transparence est un gage du contrôle citoyen. C’est pourquoi, la mise en œuvre du Budget programme requiert une information objective du public. A cet effet, les dispositions ci-après sont prévues par le Code de transparence et les lois de finances : La publication obligatoire par l’administration publique, dans des délais appropriés, des informations utiles sur l’évolutions des finances publiques, selon un calendrier précis à définir au début de chaque année ; L’information régulière des citoyens et du public sur les grandes étapes de la procédure budgétaire, leurs enjeux économiques, sociaux et financiers avec une participation de tous les acteurs de la société civile à la diffusion des informations ainsi qu’au débat public sur la gestion des finances publiques ; La publication des documents sur les finances publiques à travers les sites internet des institutions compétentes ; La diffusion d’un guide synthétique budgétaire clair et simple sur le budget et ses évolutions en cours d’année. 8 © Grant Thornton Senegal Tous droits réservés -Juin 2022 5. L’impératif des réformes institutionnelles Il va sans dire qu’une réforme aussi profonde que celle introduite par le Budget programme implique des réaménagements au plan institutionnel portant notamment sur : la taille du gouvernement Une fois que la politique nationale est définie, elle est déclinée en programmes dont chacun doit aboutir à des résultats mesurables. La conception de programmes cohérents et réalisables aboutit forcément à une rationalisation de l’Exécutif donc de la taille du Gouvernement donc à une évaluation objective de l’action de chaque ministre ; le rôle clé du ministre chargé des finances La déconcentration de la fonction d’ordonnateur des dépenses ne signifie pas que le ministre chargé des finances a un rôle amoindri. Au contraire, par son pouvoir de régulation, il peut annuler un crédit en vue de prévenir une détérioration de l’équilibre budgétaire ou même subordonner l’utilisation des crédits aux disponibilités de trésorerie ; la prise en compte du nouveau rôle de la Cour des Comptes L’avènement du Budget programme a entraîné l’évolution du rôle de la Cour des Comptes en ce qui concerne le contrôle de l’efficacité des programmes en plus du jugement des comptes. La Cour peut aussi procéder à des enquêtes au profit du Parlement. Elle a l’obligation de publier ses rapports et décisions Ces nouvelles compétences de la Cour des Comptes doivent conduire à une réorganisation interne de l’institution avec des structures et des ressources humaines spécialisées ; le renforcement du Parlement Sur le calendrier budgétaire Les délais sont devenus très précis : Débat d’Orientation Budgétaire au plus tard le 30 juin de l’année sur la base du DPBEP et DPPD ; Dépôt du Projet de LF au plus tard le jour de l’ouverture de la Session budgétaire ; Vote de la loi de finances au plus tard le jour de la clôture, en cas de dépôt tardif possibilité d’une session extraordinaire, s’il n’est pas déposé possibilité de mise en vigueur par ordonnance ; Dépôt de la Loi de Finances Rectificatives en cours d’exercice s’il y a bouleversement des grandes lignes de l’équilibre budgétaire ou financier Sur le droit à l’information Le Code transparence stipule que le Parlement a un droit d’information et de communication sans réserve sur tous les aspects relatifs à la gestion des deniers publics avec une documentation budgétaire détaillée. Par ailleurs, le projet de Loi de finances est accompagné d’annexes décrivant l’impact de la situation économique sur évolution des recettes, les mouvements de crédits et l’état récapitulatif de l’exécution avec mention des détails sur les exonérations, l’endettement, les écarts entre prévision et résultats, les comptes définitifs contrôlés ; Sur la justification de l’intégralité des crédits La notion de « services votés » limitait considérablement la portée de l’autorisation parlementaire votée et la nécessité de justifier les crédits. Compte tenu de l’extrême rigidité des budgets d’une année sur l’autre, les parlementaires se prononçaient sur une fraction très 9 © Grant Thornton Senegal Tous droits réservés -Juin 2022 faible des crédits. Désormais, le Gouvernement est tenu d’expliquer et de justifier l’utilisation de l’intégralité des crédits qu’il sollicite. Chaque franc utilisé doit être détaillé à travers une analyse du coût des politiques publiques Sur le dépôt de la Loi de Règlement Le Parlement règle les comptes de la nation à travers l’adoption de la loi de règlement. La loi de règlement constate les résultats financiers de chaque année civile et approuve les différences entre les résultats et les prévisions de la loi de finances correspondante, complétée par les lois de finances rectificatives. A cette occasion, le Parlement peut charger la Cour des Comptes de toutes enquêtes et études nécessaires à son information et se rapportant à l’exécution des opérations budgétaires. Le monopole de la loi en matière fiscale a été réaffirmée et renforcée. Le Compte unique du Trésor Tous les fonds publics y compris les ressources extérieures mobilisées au titre de projets doivent être déposé dans un compte unique du Trésor public ouvert dans les livres de la BCEAO. Cette importante disposition découle de la volonté d’avoir une gestion vertueuse des finances publiques comme le promeut le Budget programme. Evidemment des dérogations sont prévues du fait de contraintes liées à certaines conventions de financement ou lorsque l’activité concernée se situe dans des localités non couvertes par la BCEAO ou à l’étranger. Dans tous les cas l’autorisation est seule donnée par le ministre chargé des finances. Le réseau des comptables des administrations financières (Douanes-Impôts) Le nouveau cadre harmonisé des finances publiques introduit la possibilité pour les comptables des administrations financières des douanes et des Impôts de s’organiser en réseaux de postes comptables comprenant des comptables supérieurs ou subordonnés, principaux ou secondaires, distincts du réseau du Trésor même si les opérations desdits comptables sont centralisées dans les écritures du Trésor. Cette modalité qui constitue un pas important dans le rapprochement voir la fusion des régies financières devraient être mise en œuvre pour accompagner la réforme en matière de gestion des finances publiques. En France depuis 2008, la Direction Générale des Impôts (DGI) et la Direction Générale de la Comptabilité Publique (DGCP) ont fusionné pour donner naissance à la Direction Générale des finances Publiques (DGFIP) pour plus d’efficacité et d’efficience. Une telle réforme devrait certainement inspirer. La gestion du changement Il va de soi qu’au regard de l’ampleur des réformes introduites par le Budget programme et surtout de leurs incidences sur la gouvernance administrative et politique, des résistances importantes se sont fait jour. A la conception déjà de ces réformes, les réticences ont été nombreuses de la part de beaucoup d’experts qui appréhendaient les mutations qu’engendrerait le Budget programme. Les retards dans la mise en œuvre des réformes accusés par tous les Etats membres de l’UEMOA malgré les délais impartis, sont le signe d’une certaine résistance face à des changements on ne peut plus inéluctables. IL y a lieu, de mettre en œuvre rapidement des programmes de gestion du changement pour permettre non seulement une appropriation des réformes budgétaires, comptables et statistiques préconisées par le nouveau ca cadre de gestion des finances publiques, mais aussi et surtout une totale adhésion des acteurs. C’est à ce prix que les objectifs de transparence, d’efficacité de crédibilité de la gestion des finances publiques seront atteints. 10 © Grant Thornton Senegal Tous droits réservés -Juin 2022 6e étage Immeuble Clairafrique Rue Malenfant - Dakar Plateau BP 7642 - Dakar T 00 221 33 889 70 70 F 00 221 33 821 10 70 E [email protected] www.grantthornton.sn