Analyse Filmique Cours PDF
Document Details
Uploaded by ManeuverableKoto
Université Paul Valéry Montpellier 3
Jessie Martin
Tags
Summary
This document provides an introduction to film analysis, focusing on the vocabulary and techniques used in cinema. It details concepts such as shot, frame, and mise-en-scène, along with discussion points.
Full Transcript
Analyse filmique :cours Séance :1 (vocabulaire de cinéma ) Sur la nécessité de passer par la description avant l’analyse/interprétation : la description permet de “ limiter l’autoritarisme dévastateur de l'interprétation.” Bien décrire permet de bien construire une analyse, de la rendre cohérente,...
Analyse filmique :cours Séance :1 (vocabulaire de cinéma ) Sur la nécessité de passer par la description avant l’analyse/interprétation : la description permet de “ limiter l’autoritarisme dévastateur de l'interprétation.” Bien décrire permet de bien construire une analyse, de la rendre cohérente, pertinente. Jessie Martin, Décrire le film de cinéma, Paris : Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2011 Otto Pächt: « Comme notre vision est toujours déjà imprégnée de savoir et que ce savoir fonctionne comme une sorte de lentille, qui peut avoir un effet déformant, il est parfois bon de se faire plus bête que l'on est et de s'efforcer de voir les choses avec le plus de naïveté possible. » dans Questions de méthode en histoire de l'art (1994), p.33. « La description met en jeu un parcours du regard. » p.15 Introduction générale Pour analyser il faut savoir décrire une image, décrire une séquence, et hiérarchiser toutes ces informations. On ne décrit pas tout en vrac. On organise la description. Aspect technique du cinéma résultats fictionnels matérialité de la construction d'un film le découpage technique de séquence Une description du film dans son état final fondée sur deux types d'unités : le plan et la séquence. Les paramètres principaux de cette description sont 1. La durée des plans 2. L'échelle des plans 3. Les mouvements du et dans le cadre 4. Le montage 5. La bande-sonore 6. La lumière Un bon découpage technique (et une bonne description filmique) prend en compte tous ces paramètres, et parvient à hiérarchiser leurs usages au sein de la séquence. Séance 1 (16/09) : Le plan, le cadre et leurs paramètres Amandine D'Azevedo Qu'est-ce qu'un plan ? -Le plan est l'unité de base du langage cinématographique. -Le plan est un morceau d'espace-temps extrait de la continuité du film, de la réalité cinématographique. -Le plan, malgré sa simplicité de définition apparente1, est une notion ambiguë, notamment dans la langue française : -Tourner un plan (unité au tournage) -Les plans d'une Images (avant-plan, arrière-plan) -Un plan comme unité de montage -L'échelle des plans Le même mot ne désigne pas du tout la même chose ! Attention donc à l'extrême précision dans son emploi. Le cadre Le cadre définit ce qui est à l'image et ce qui n'y est pas. Il nous assigne donc à une position imaginaire par rapport à ce qui est filmé. Terme employé dans bien d'autres arts : objet qui isole l'œuvre. Au cinéma, la spécificité du cadre est qu'il peut bouger et évoluer par rapport à ce qui est cadré. Sa mobilité est la nôtre. (exp: ils ont choisi le cadre de cowboy de son dos) 1 Bande sonor (music,bruit..) relation entre l’image et le son (Définitions à maîtriser) Le cadrage Valeur de plan (echelle du plan): Plan général (le plus grand possible) Plan d'ensemble Plan moyen/en pied Plan italien Plan américain (pas beaucoup utilisé) Plan rapproché/poitrine ou épaule Gros plan Très gros plan Axes/angles de prise de vue Angle vertical : (neutre) Plongée (au-dessus de l'objet filmé) Contre-plongée (en-dessous de l’objet filmé) Cas du “plan tatami” Angle horizontal : Droit Incliné le hors-champ fait partie de l’espace filmique (imaginaire) / il existe: les éléments du champs qui nous aide à faire le hors Attention ! Toutes ces terminologies sont relatives : pas de mesure universelle Il y a des modifications constantes en cours de séquence avec les mouvements du et dans le cadre ! Usage = analyser la fonction de ces cadrages Mais il ne faut pas plaquer des significations ! Noël Burch et le hors-champ Il théorise 6 zones de hors-champ Le champ et le hors-champ « fonctionnent » ensemble dans la plupart des cas: Entrée et sortie du champ Interpellation Complétion imaginaire Autre distinction : le hors-champ « concret» le hors-champ « imaginaire » Le hors-champ : quelques fonctions → pouvoir de suggestion = atténuation, amplification, abstraction, etc. → relation avec le champ - communication - renversement seance 2 : Les formats du film et de l'image Le terme de format désigne deux aspects distincts : 1. La largeur de la pellicule (film). 2. Le format de l'image projetée à l'écran (dimensions). Ces deux éléments ne sont pas forcément liés. On peut par exemple créer une image carrée tout en l'imprimant sur une pellicule très large et rectangulaire. 1889 : George Eastman (Kodak) lance la pellicule photographique en celluloïd, utilisée pour la première fois dans un appareil photo grand public. Cette pellicule mesure 35 mm de large. 1909 : Adoption d'un standard international qui établit un rapport largeur/hauteur de l'image de 1,33:1 (24 mm de large pour 18 mm de haut), correspondant à la vision humaine. Ce standard restera en vigueur pour les films muets pendant 20 ans. Chronologie des formats de pellicule et projection 1. 1909-1927 : ○ 1,33:1 — Ce format devient le standard pour les films muets, avec une largeur de pellicule de 35 mm, mais les films sont projetés en noir et blanc sans bande sonore. Ce rapport d'aspect est jugé naturel car il correspond à une vision humaine plus large que haute. 2. 1927-1932 : ○ 1,22:1 — L'arrivée du cinéma sonore introduit la bande sonore optique sur la plus pellicule, réduisant ainsi l'espace dédié à l'image. Cela crée une image carrée, ce qui posait problème pour la composition visuelle. 3. 1932-1950 : ○ 1,37:1 — Pour compenser la perte de largeur due à la bande sonore, l'image est légèrement reconfigurée, augmentant la hauteur pour retrouver un équilibre visuel. Ce format, appelé Academy Ratio, devient le standard pour les films sonores et est utilisé tout au long de cette période. Formats développés à partir des années 1950 CinemaScope (1953) : Développé par la 20th Century-Fox, le CinemaScope repose sur un procédé technique appelé l'anamorphose, inventé par le professeur Henri Chrétien. L'anamorphose consiste à comprimer horizontalement l'image lors de la prise de vue pour ensuite la décompresser lors de la projection, créant ainsi une image très large. Dimensions de l'image : 18,7 mm x 23,8 mm sur pellicule 35 mm. Rapport d'aspect écran : 1:2,55, puis 1:2,35, ce dernier devenant le standard pour les films projetés en CinemaScope. Piste sonore : Sur le CinemaScope initial, la bande sonore prenait également une partie de la largeur de la pellicule, ce qui fut ajusté avec le format 1:2,35 pour ne pas affecter la qualité sonore. Super 35 (années 1990) : Le format Super 35 permet de revenir à l'intégralité de la surface de la pellicule en supprimant les contraintes imposées par l'anamorphose. Il permet d'obtenir une image de haute qualité, tout en facilitant l'adaptation à différents formats de projection (cinéma et vidéo). Formats panoramiques : 1,85:1 — Appelé "panoramique américain", ce format devient le standard dominant du cinéma hollywoodien dès les années 1950. Il permet une meilleure immersion du spectateur, en particulier dans les films d'aventure et les épopées. 1,66:1 — Ce format est plus utilisé en Europe, et est appelé "panoramique français". Il offre une image légèrement moins large que le format américain mais reste couramment utilisé dans les productions européennes. 1,75:1 — Moins courant, ce format est principalement utilisé en Italie pour certains films panoramiques. Système 2P : Un format économique développé pour réduire l'usage de pellicule en limitant les perforations. Utilisé principalement au Japon et en Égypte, le système 2P fonctionne avec seulement deux perforations par image, permettant ainsi d'économiser du film tout en conservant une image stable. Formats de pellicule plus larges : Plusieurs formats de pellicule plus larges ont été développés pour offrir une meilleure qualité d'image, notamment pour les films de grand spectacle. 58 mm — Utilisé pour le Chronophotographe de George Demený, développé en 1895. 56 mm — Magnifilm, inventé par Lorenzo del Riccio, utilisé par la Paramount en 1929. 70 mm — Utilisé pour le procédé Fox Grandeur en 1929, ce format permettait une image beaucoup plus large et plus immersive, idéal pour les épopées et les films à grand spectacle. 63 mm — Utilisé dans le procédé Natural Vision, développé par Spoor et Berggren en 1930 pour la RKO. 70 mm — Le procédé Todd-AO, créé en 1955, utilisait une pellicule de 65 mm pour la prise de vues, avec 70 mm pour la projection (5 mm supplémentaires étant utilisés pour les pistes sonores). Ce format proposait un rapport d'aspect de 1:2,22, avec 5 perforations par image au lieu des 4 habituelles du 35 mm. 65 mm (Vistavision) — Développé par Paramount, ce procédé utilisait une pellicule 35 mm projetée horizontalement au lieu de verticalement, pour améliorer la qualité de l'image. Vertigo d'Alfred Hitchcock (1958) est un exemple célèbre de film tourné avec ce procédé. 70 mm IMAX — Inventé en 1970, mais popularisé dans les années 1990, ce format utilisait également une pellicule de 70 mm, projetée horizontalement pour offrir une qualité d'image exceptionnelle et une immersion totale. Il est encore utilisé aujourd'hui pour certains films événementiels et documentaires. Formats réduits : Outre les formats plus larges, plusieurs formats de pellicule réduits ont été utilisés pour diverses applications, notamment les films amateurs et les films documentaires. 16 mm — Ce format est souvent utilisé pour les films amateurs et les reportages télévisés. Il était populaire dans les années 1950-1980 et pouvait être gonflé en 35 mm pour une diffusion en salles de cinéma. Super 8 et 8 mm — Ces formats sont souvent associés aux films amateurs et à des époques spécifiques du cinéma. Leur petite taille limite la définition, mais ils produisent des effets esthétiques particuliers, souvent recherchés pour des effets nostalgiques. Problèmes d'adaptation des formats à la télévision : Avec l'apparition de la télévision dans les années 1950, le problème de l'adaptation des films au petit écran est devenu crucial. Les premiers téléviseurs utilisaient un format d'image 1,33:1 (ou 4:3), correspondant au standard des films muets. Cependant, avec l'essor des formats larges au cinéma, la diffusion à la télévision impliquait souvent une mutilation de l'image. 1,66:1 à la télévision : Mutilation des bords latéraux. 2,35:1 en 1,33:1 : Mutilation du haut et du bas, entraînant une perte significative de la composition originale du film. Un exemple notable de l'adaptation de formats est le film Post Tenebras Lux qui utilise un rapport 1,37:1 avec un flou périphérique, accentuant l'effet de décalage entre le format et l'image projetée. Séance 3 : Le plan et sa durée Objectifs de la séance : 1. Comprendre ce qu'est un plan au cinéma et ses différentes significations. 2. Apprendre à distinguer la durée du plan et la durée dans le plan. 3. Analyser l'usage du plan-séquence et ses enjeux techniques et narratifs. 1. Le plan : Définition et terminologie Le terme plan est polysémique dans le domaine cinématographique. Il peut être utilisé dans plusieurs contextes, à savoir : Plan comme surface : L’image cinématographique est projetée sur une surface plane (l’écran), c’est l’origine du mot. Profondeur imaginaire de l’image : La surface de l'image contient plusieurs « couches » imaginaires en profondeur, visibles selon l'échelle de plan. ○ Premier plan : La zone de l'image qui semble la plus proche du spectateur. ○ Arrière-plan : Ce qui est situé à l’arrière de l’image, plus éloigné. Définition technique du plan : Un plan est un fragment de film compris entre deux coupures ou changements de plans. Un plan est donc une unité visuelle définie par sa continuité avant la coupure ou la transition vers un autre plan. 2. La durée du plan vs la durée dans le plan Durée du plan : La durée du plan désigne le temps réel pendant lequel le plan est projeté à l'écran, c'est-à-dire sa durée matérielle. Elle correspond simplement à combien de temps le plan dure en termes de secondes ou minutes dans la réalité. Durée dans le plan : La durée dans le plan renvoie à la représentation fictive du temps qui se déroule dans l'univers diégétique (l’histoire). Un plan peut montrer une longue période de temps en quelques secondes (accéléré) ou inversement, un court instant peut être étiré sur plusieurs secondes (ralenti). Exemple : Accéléré : Un plan de quelques secondes peut illustrer la croissance d'une fleur sur plusieurs jours. Ralenti : Un plan de quelques secondes peut illustrer un mouvement de balle brisant une vitre qui prend quelques millisecondes dans la réalité. 3. La cadence au cinéma La cadence représente le nombre d'images par seconde (ips) qui sont filmées et projetées. La norme du cinéma sonore est de 24 images par seconde, mais cette cadence peut varier : Ralenti : Lorsque la cadence de prise de vue est plus élevée que la cadence de projection (ex : 50 ips filmées et 24 ips projetées). Cela donne un effet de ralentissement. Accéléré : Lorsque la cadence de prise de vue est inférieure à celle de projection (ex : 12 ips filmées et 24 ips projetées). Cela donne l'impression que le temps s'écoule plus rapidement. Exemples : Film muet projeté à une cadence plus rapide (24 ips au lieu de 16-20 ips), ce qui donne un effet saccadé et accéléré. Extrait de Nosferatu de Murnau (1922) avec des effets d'accéléré. Extrait de Ghost Dog de Jim Jarmusch (1999) pour un exemple de ralenti. 4. L'importance du temps narratif Le cinéma est un art de la manipulation du temps. Le temps narratif ne correspond pas toujours à la durée réelle de ce qui est montré à l’écran. Cette distorsion permet au réalisateur de jouer avec la perception du spectateur. Exemple : Dans Hitori Musuko de Yasujiro Ozu, un plan montre un coin de pièce où le jour se lève en une minute de film, alors que l'événement représenté prend cinq heures dans l'histoire. 5. Manipulation technique du temps : Arrêt sur image et retour en arrière Le cinéma permet de figer le temps à travers des techniques spécifiques : Arrêt sur image : Utilisé à des fins dramatiques ou comiques pour suspendre un moment particulier. ○ Exemple : Fin du film Les 400 coups de François Truffaut (1959). Retour en arrière : Il est également possible de faire défiler une séquence en arrière, inversant ainsi le "temps de la fiction". ○ Exemple : Le Testament d'Orphée de Jean Cocteau (1959). 6. Le plan-séquence : une variation particulière Le plan-séquence est un type de plan où une séquence entière est filmée sans interruption, dans un seul et même plan. Ce procédé est particulièrement exigeant en termes de mise en scène, de coordination entre les acteurs et l’équipe technique, et de mouvements de caméra. 1. Définition : Plan-séquence : Un plan suffisamment long pour représenter une séquence entière avec une unité narrative (action continue sans coupure). ○ Exemple : La Corde (Rope, 1948) d'Alfred Hitchcock. 2. Usages et Enjeux Importance de la durée réelle (le temps de tournage = temps à l’écran). ○ Plan-séquence utilisé pour donner une impression de continuité et de réalisme. ○ Exemples : L'Arche russe (2002) de Sokourov (un seul plan de 90 minutes), Week-end de Jean-Luc Godard (1967). 3. Comparaison internationale En anglais, un plan-séquence est appelé "long take". ○ Différence avec "long shot" (plan long) qui concerne la distance, pas la durée. a. Caractéristiques du plan-séquence Durée exceptionnelle : Contrairement à un plan ordinaire qui dure souvent quelques secondes ou minutes, un plan-séquence peut durer de plusieurs minutes à la totalité du film dans des cas exceptionnels. Unité narrative complète : Un plan-séquence peut contenir toute une scène ou une séquence complète, avec un début, un milieu et une fin, sans coupure de montage. Mouvement de la caméra : La caméra doit souvent suivre l’action de manière fluide, en se déplaçant à travers différents espaces et situations. Cela nécessite des compétences techniques élevées pour réussir des mouvements fluides et synchronisés. b. Exemples de films avec des plans-séquences célèbres La Corde (Alfred Hitchcock, 1948) : Ce film est composé d’une série de longs plans, certains durant jusqu’à 10 minutes. Hitchcock a tourné le film de manière à ce que les coupures soient presque invisibles, donnant l’impression que tout le film est un seul plan continu. L'Arche russe (Alexandre Sokourov, 2002) : Le film entier est tourné en un seul plan-séquence ininterrompu de 90 minutes, ce qui est un exploit technique notable. Birdman (Alejandro G. Iñárritu, 2014) : Bien que le film utilise des effets numériques pour masquer les coupures, il donne l’impression d’un seul plan continu, renforçant la sensation de proximité avec les personnages et l'action. 4. La manipulation du temps dans le plan La durée du plan peut également être manipulée après le tournage, à l’aide de techniques telles que le ralenti, l’accéléré ou l’arrêt sur image. a. Le ralenti Le ralenti est obtenu lorsque la cadence de prise de vue (le nombre d’images par seconde) est supérieure à la cadence de projection. Par exemple, si une scène est filmée à 120 images par seconde mais projetée à 24 images par seconde, le mouvement à l’écran sera beaucoup plus lent que dans la réalité. Fonction narrative : Le ralenti est souvent utilisé pour accentuer un moment dramatique ou émotionnel, ou pour permettre au spectateur de se concentrer sur un détail ou un mouvement. Exemple : Matrix (Lana et Lilly Wachowski, 1999) utilise le ralenti pour les fameuses scènes de "bullet time", où les mouvements deviennent presque suspendus, créant une esthétique iconique. b. L’accéléré L’accéléré, à l’inverse, est obtenu lorsque la cadence de prise de vue est inférieure à la cadence de projection. Si une scène est filmée à 12 images par seconde mais projetée à 24 images par seconde, l’action apparaît deux fois plus rapide que la normale. Fonction narrative : L’accéléré est souvent utilisé pour montrer des événements qui prennent beaucoup de temps en un laps de temps plus court, comme la croissance d’une plante ou le mouvement des nuages dans le ciel. Exemple : Les films muets utilisaient fréquemment l’accéléré pour dynamiser les scènes d’action, comme dans Le Mécano de la Générale (Buster Keaton, 1926). c. L’arrêt sur image L’arrêt sur image est une technique où une image fixe est prolongée à l’écran, interrompant ainsi l’action en cours. Cela permet de figer un moment précis pour en accentuer la signification ou l’importance. Exemple célèbre : Les 400 coups (François Truffaut, 1959) se termine par un arrêt sur image sur le visage du personnage principal, symbolisant l’incertitude de son avenir. 7. Évolution Historique de la Durée des Plans 1. Tendance vers la réduction de la durée des plans : 1895-1905 : films d’un seul plan, d’environ 1 minute. Années 1930-1960 : durée moyenne des plans (DMP) de 8 à 11 secondes. Années 1980 : chute à 5-7 secondes, parfois 3-4 secondes. ○ Exemple : Dark City (1998) d'Alex Proyas avec une DMP de 1,8 seconde. 2. Bordwell et Thompson (analyse) Films récents avec DMP très courts, jusqu’à 2-4 secondes (films d’Oliver Stone ou Michael Bay). La montée du plan-séquence est une résistance à cette fragmentation excessive du montage. Extraits et Films Cités : 1. Nosferatu - Friedrich Wilhelm Murnau (1922). 2. Les 400 coups - François Truffaut (1959). 3. La Corde - Alfred Hitchcock (1948). 4. L'Arche russe - Sokourov (2002). 5. Week-end - Jean-Luc Godard (1967). Bonus Moodle et Ressources Comparaison Tarantino vs. Hou Hsia Hsien sur Youtube : ○ Lien 1 ○ Lien 2 Conclusion La durée du plan et sa manipulation sont des éléments fondamentaux du langage cinématographique. Ils permettent de jouer avec le rythme narratif, d’influencer la perception du spectateur et de créer des effets esthétiques uniques. Que ce soit par l’utilisation de plans courts pour dynamiser l’action, de plans longs pour instaurer une atmosphère contemplative, ou encore par l’utilisation de techniques comme le ralenti ou l’accéléré, le temps cinématographique est une construction artistique qui participe pleinement à l’expérience visuelle et émotionnelle du spectateur. Séance 4 (07/10) : Les Mouvements de Caméra Bibliographie : Bordwell David, Thompson Kristin, L'Art du film : une introduction, Bruxelles : De Boeck, 2000, 2014, Chapitre 5 / Partie 3, pp. 290-312. Les Mouvements au Cinéma Dans les débuts du cinéma, la caméra restait fixe, posée à un endroit déterminé par le cadreur. La préoccupation principale était de remplir l'espace, d'organiser les éléments dans le cadre, sans mouvements de caméra. Exemple : Les vues des frères Lumière, où la caméra capture simplement une scène qui se déroule devant elle, avec une perspective similaire à celle du théâtre, appelée "l’œil du prince." Deux types de mouvement au cinéma : 1. À l'intérieur du cadre : Déplacements des personnages ou des objets. 2. Le cadre lui-même : Mouvements de la caméra. Enjeux des Mouvements de Caméra Les mouvements de la caméra apportent une variété de points de vue au sein d’un même plan et modifient la perception du spectateur : Types de mouvements : Panoramique, travelling, grue. Impact : Ils jouent sur la continuité et la modification du cadre, notamment en rendant visible le hors-champ, modifiant l'échelle des objets, ou encore en passant de la plongée à la contre-plongée. Analyse du Mouvement Les mouvements de caméra influencent l’analyse des plans et de la séquence entière. Tous les paramètres (image, son) peuvent être affectés par un mouvement de caméra. Degré d'autonomie : Quelle est la relation entre le mouvement de la caméra et celui des personnages ? ○ Simple recadrage ? ○ Mouvement d'accompagnement ou d'anticipation ? ○ Mouvement indépendant, descriptif (paysage), poétique ou d'ambiance ? Exemple : Nos Années sauvages (Wong Kar-wai, 1990) où un mouvement de caméra poétique et atmosphérique, détaché des personnages, contribue à l’ambiance visuelle et sonore. Caractéristiques du Mouvement Un mouvement de caméra a toujours : Une direction : gauche/droite, bas/haut, oblique. Une vitesse : lente ou rapide. Les Types de Mouvements de Caméra 1. Le Panoramique La caméra pivote sur elle-même sans se déplacer. Un panoramique peut être : ○ Vertical : de haut en bas ou de bas en haut. ○ Horizontal : de gauche à droite ou de droite à gauche. ○ Oblique. Usage traditionnel : Souvent utilisé pour décrire un paysage. ○ Exemple : Cowboys and Aliens (2011), avec un panoramique dans un désert, de gauche à droite. Panoramique d’accompagnement : Suivre un objet ou un personnage en mouvement. ○ Exemple : Casino (Martin Scorsese, 1995), où un panoramique filé suit le regard des personnages de façon très rapide. 2. Le Travelling Déplacement de la caméra, soit en avant, en arrière, latéralement, diagonalement, ou de façon circulaire. ○ Exemple : Alexandre Promio et Félix Mesguich utilisaient une charrette pour déplacer la caméra (début du 20e siècle). Le Travelling d'accompagnement : Suivre un personnage ou un objet en mouvement. ○ Caméra portée ou embarquée. ○ Exemple : Breaking the Waves (Lars von Trier, 1996), où la caméra portée donne un effet réaliste. Steadicam : Stabilisation de la caméra portée, permettant un mouvement fluide tout en suivant un personnage. ○ Exemple : Rocky (John G. Avildsen, 1976), première utilisation importante de la Steadicam. Exemple d'analyse des mouvements de caméra dans "La La Land" Séquence choisie : La scène d’ouverture "Another Day of Sun" Contexte : La scène d'ouverture du film se déroule dans un embouteillage à Los Angeles. Les conducteurs sortent de leurs voitures et commencent à danser, transformant l’autoroute en une scène de comédie musicale. Cette séquence est un long plan-séquence, utilisant divers mouvements de caméra pour accompagner l’énergie du groupe. Analyse du mouvement de caméra 1. Le travelling Dès le début de la scène, un travelling latéral est utilisé. La caméra glisse d’une voiture à l’autre, présentant brièvement les différents personnages bloqués dans le trafic. Ce mouvement latéral crée une continuité visuelle entre les différentes voitures, suggérant une certaine unité dans cet environnement pourtant chaotique. Type : Travelling latéral. Impact visuel : Ce travelling latéral relie les personnages dans l’espace, renforçant l’idée qu’ils partagent tous la même expérience dans cet embouteillage. Effet émotionnel : Le mouvement fluide donne l’impression que la caméra danse elle-même, participant à l’énergie croissante de la scène. 2. Le panoramique d’accompagnement À plusieurs reprises, la caméra effectue des panoramiques rapides pour suivre les danseurs, se synchronisant avec leurs mouvements. Par exemple, lorsque plusieurs danseurs se mettent à courir et sauter, la caméra pivote rapidement pour ne pas les perdre de vue, créant ainsi une connexion dynamique entre l'action et le cadre. Type : Panoramique d'accompagnement. Direction : De gauche à droite et vice-versa. Impact visuel : Ce panoramique d’accompagnement accentue la vitesse et l’énergie des danseurs. Il évite de fragmenter la chorégraphie en coupant le plan, ce qui maintient la continuité de l’action. Effet émotionnel : Le spectateur se sent immergé dans la danse, presque comme s’il faisait partie du spectacle. 3. Le mouvement de grue Vers la fin de la séquence, la caméra monte en grue, s’élevant au-dessus des danseurs pour offrir une vue aérienne de l’ensemble de la chorégraphie sur l’autoroute. Ce mouvement crée un contraste avec les plans plus intimes et rapprochés du début, ouvrant le cadre et révélant l’ampleur du moment. Type : Mouvement de grue. Direction : De bas en haut. Impact visuel : La caméra en hauteur donne une vue d'ensemble de la chorégraphie, soulignant la coordination des danseurs. Elle permet aussi de passer d’une échelle plus intime à une échelle plus large, renforçant le caractère spectaculaire de la scène. Effet émotionnel : L'élévation progressive de la caméra renforce la sensation d'exaltation et de liberté, culminant avec une vue d'ensemble qui marque l'apogée émotionnelle de la séquence. 4. Le Steadicam La scène est célèbre pour son plan-séquence, où la caméra est en mouvement constant sans coupure visible. La fluidité de la caméra est obtenue grâce à l’utilisation d’un Steadicam, qui permet de suivre les danseurs de près, sans mouvements heurtés. La caméra se déplace avec aisance parmi les voitures et les danseurs, accentuant la synchronisation entre la caméra et la chorégraphie. Type : Steadicam. Impact visuel : La fluidité du Steadicam donne un sentiment de légèreté à la scène, permettant de suivre les danseurs avec une grande liberté de mouvement. Effet émotionnel : Ce mouvement fluide renforce l’aspect chorégraphique et immersif de la séquence, tout en soulignant la sensation de liberté et de joie qui émane de la scène. Conclusion de l'analyse Dans cette scène d’ouverture de "La La Land", les mouvements de caméra jouent un rôle essentiel pour capturer l’énergie et l’exubérance de la chorégraphie. Le travelling latéral permet d’introduire les différents personnages et de les relier visuellement, tandis que le panoramique d’accompagnement renforce la vivacité des danseurs. Le mouvement de grue offre une vue d'ensemble spectaculaire qui sublime le moment final, et le Steadicam assure la fluidité de la scène sans interrompre l'action. En combinant ces mouvements, Damien Chazelle réussit à créer une scène dynamique et immersive, où la caméra devient un participant actif de la chorégraphie, et où chaque mouvement renforce l'effet spectaculaire et émotionnel.