Chapitre III: Postulats de la mécanique quantique (PDF)
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J. Barjon
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Ce document est un chapitre de notes de cours sur la mécanique quantique, en notations de Dirac, écrit par J. Barjon. Il présente un aperçu des postulats et des concepts fondamentaux de cette branche de la physique.
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Chapitre III : Postulats de la mécanique quantique en notations de Dirac J. Barjon 8 novembre 2022 Table des matières A Espace vectoriel des états quantiques...
Chapitre III : Postulats de la mécanique quantique en notations de Dirac J. Barjon 8 novembre 2022 Table des matières A Espace vectoriel des états quantiques 3 B Bases orthonormées (BON) 4 1 Bases discrètes.......................... 4 2 Bases continues.......................... 5 3 Relation ket - fonction d’onde.................. 7 C Le rôle central des opérateurs linéaires 8 1 Opérateurs x̂ et p̂ de Ex..................... 8 2 Commutation des opérateurs.................. 9 3 Projecteurs et fermeture..................... 9 4 Représentation matricielle.................... 10 5 Opérateur adjoint †....................... 10 6 Opérateur auto-adjoint † = Â................. 11 D Valeurs propres et vecteurs propres 12 1 Rappels.............................. 12 2 Propriétés des observables.................... 13 E L’espace des états approprié 13 1 Produit tensoriel......................... 13 2 Etats factorisables ou intriqués (facultatif)........... 14 3 Mouvement 3D : opérateurs R̂ et P̂ dans Er.......... 15 F Principe de correspondance 16 G Evolution temporelle 16 1 Equation de Schrödinger..................... 16 2 Etats stationnaires........................ 17 1 H Mesures quantiques 18 1 Probabilités de mesure d’un observable Â........... 18 2 La mesure modifie l’état du système.............. 19 3 Mesures successives........................ 21 4 Préparation d’un état quantique................ 23 5 [Â, Ĥ] = 0 : constante du mouvement.............. 23 6 [B̂, Ĥ] 6= 0 : oscillations de Bohr et règles de sélection.... 24 2 Le concept de fonction d’onde développée aux deux premiers chapitres vous a donné les bases pour décrire une particule massive en interaction avec un potentiel. Cela a permis de mettre en évidence de premiers phénomènes purement quantiques (effet tunnel, quantification de l’énergie dans un puits,...) mais l’approche du monde quantique avec les fonction d’onde reste insuf- fisante. Certaines grandeurs purement quantiques (Ex : le moment cinétique de spin de l’électron responsable du magnétisme de la matière, la polarisa- tion du photon,....) ne se décrivent pas avec des fonctions d’ondes. Dans ce chapitre, les principes établis précédemment pour les fonctions d’onde seront généralisés pour aborder les postulats de la mécanique quantique. A Espace vectoriel des états quantiques L’équation de Schrödinger introduite pour les fonctions d’ondes est linéaire : si ψ1 et ψ2 sont solutions alors toute combinaison linéaire ψ1 + λψ2 , λ ∈ C sera également solution. Cette propriété fondamentale, appelée principe de superposition 1 , donne à l’ensemble des fonctions d’onde une structure d’espace vectoriel sur le corps des complexes. Postulat I : Tout système physique est décrit par un espace vectoriel sur le corps des nombres complexes, appelé l’espace des états E. L’état du système à l’instant t est défini par un vecteur normé de E, appelé ket et noté |ϕ(t)i. Remarque : difficulté conceptuelle du fait que la dimension de l’espace des états, dim E, peut être fini (ex : spin de l’électron dim Espin = 2) ou infini (ex : mouvement 1D d’une particule dim Ex = ∞). Pour la clarté de l’exposé, les concepts seront d’abord introduits à un instant t donné et la variable temporelle pourra être omise jusqu’au moment d’aborder l’évolution temporelle (partie G). Les fonctions d’onde étant normées, l’espace des états est doté d’une norme, définie à l’aide d’un produit scalaire : q k |ψi k = |hψ|ψi|2 En 1927, Dirac a introduit les notations qui portent son nom. Le pro- duit scalaire de deux états |ψi et |ϕi est noté entre crochets (”bracket” en anglais). hψ | ϕi |{z} |{z} bra ket 1. La combinaison linéaire des mathématiciens est appelée superposition par les phy- siciens. 3 R +∞ Le caractère normé des fonctions d’ondes k |ψi k = −∞ |ψ(x)|2 dx = R +∞ ∗ −∞ ψ (x)ψ(x)dx = 1 est sous-tendu par un produit scalaire des fonctions d’ondes ψ1 et ψ2 tel que Z +∞ hψ1 |ψ2 i = ψ1∗ (x)ψ2 (x)dx −∞ On retiendra la propriété fondamentale du produit scalaire de E hψ2 |ψ1 i = hψ1 |ψ2 i∗ Nota bene : propriétés très différentes du produit scalaire a · b de deux vec- teurs a et b de l’espace euclidien R3 où a · b = b · a. Linéarité : hϕ|ψ1 + λψ2 i = hϕ|ψ1 i + λhϕ|ψ2 i ∀λ ∈ C linéaire à droite hϕ1 + λϕ2 |ψi = hϕ1 |ψi + λ∗ hϕ2 |ψi ∀λ ∈ C anti-linéaire à gauche B Bases orthonormées (BON) Les manipulations mathématiques dans un espace vectoriel sont considérablement simplifiés lorsqu’on dispose d’une BON. Elle pourront être discrètes (ex : états stationnaires du puits quantique) ou continues (ex : ondes planes d’im- pulsions p qui varient continument dans un paquet d’ondes). 1 Bases discrètes L’ensemble des kets {|ii}i∈N forme une base orthonormée de E lorsque les vecteurs de base sont normées et orthogonaux deux à deux : ∀i, hi|ii = 1 et ∀i 6= j, hi|ji = 0. Ce qu’on résume en ∀(i, j) ∈ N2 hi|ji = δi,j 0 si i 6= j grâce au symbole de Kronecker δi,j = 1 si i = j Un ket quelconque |ψi se définit par l’ensemble de ses composantes ci dans la base qu’on représente en vecteur colonne. . . X . |ψi = ci |ii = ci i .. 4 Les composantes s’expriment sous la forme d’un produit scalaire (c.f. l’analogie de la projection dans R3 ) ci = hi|ψi P P P Démo : calculons hj|ψi = hj| i ci |iii = i ci hj|ii = i ci δj,i = cj. Il s’agit bien de la j ème composante de |ψi. Le produit scalaire de deux états |ψi et |χi de composantes respectives ci et bi vaut alors X hψ|χi = c∗i bi i Démo : hψ|χi = h i ci |ii| j bj |jii = i,j c∗i bj hi|ji = i,j c∗i bj δi,j = i c∗i bi P P P P P Le produit scalaire s’évalue donc par le produit d’un vecteur ligne avec un vecteur colonne. Avec les notations de Dirac, le produit scalaire hψ|χi sera vu comme l’action du bra hψ| sur le ket |χi. Le bra hψ| est donc un vecteur ligne qui est le transposé du vecteur |ψi où toutes ses composantes ont été conjuguées : hψ| =... c∗i.. On retiendra aussi que la norme de |ψi est la somme des modules au carré de ses composantes : X |||ψi||2 = hψ|ψi = |ci |2 i Remarque : même si dim E = ∞, il existera toujours une base discrète. Ce résultat qui vient de l’étude des espaces Hermitiens, préHilbertien et de Hilbert en mathématiques assoit l’utilisation des notations de Dirac. Même en dimension infinie avec une base continue, il reste justifié de considérer un ket comme un vecteur colonne et un bra comme un vecteur ligne. 2 Bases continues Pour une base continue, l’indice des vecteurs de base α varie continument α ∈ R. Leur utilisation, délicate, est justifiée par la théorie mathématique des distributions. L’ensemble des kets {|αi}α∈R forme une base orthonormée de E lorsque hα|α0 i = δ(α − α0 ) si α 6= α0 0 0 avec la distribution de Dirac δ(α − α ) = +∞ si α = α0 5 La distribution de Dirac centrée en x = 0, notée δ(x), se présente comme la limite de la fonction créneau f (x) lorsque sa largeur tend vers 0. Un Dirac en centré en x = x0 s’écrit par translation δ(x − x0 ). On en déduit les propriétés suivantes des distributions de Dirac en x = 0 en x = x0 R +∞ R +∞ 0 −∞ δ(x)dx = 1 −∞ δ(x − x )dx = 1 f (x)δ(x) = f (0)δ(x) f (x)δ(x − x0 ) = f (x0 )δ(x − x0 ) R +∞ R +∞ 0 0 −∞ f (x)δ(x)dx = f (0) −∞ f (x)δ(x − x )dx = f (x ) Le tableau (à savoir) résume les outils de manipulation des BON, y compris la relation de fermeture de la base introduite par la suite. base discrète base continue {|ii}i∈N {|αi}α∈R BON hi|ji = δi,j hα|α0 i = δ(α − α0 ) P R décomposition |ψi = i ci |ii |ψi = c(α)|αidα composante ci = hi|ψi c(α) = hα|ψi hψ|χi = i c∗i bi hψ|χi = c∗ (α)b(α)dα P R produit scalaire hψ|ψi = i |ci |2 hψ|ψi = |c(α)|2 dα P R norme ˆ |αihα|dα = Iˆ P R fermeture i |iihi| = I 6 3 Relation ket - fonction d’onde Le mouvement 1D d’une particule est décrit par l’espace des états Ex de dimension infinie. On considère la base des positions {|xi}x∈R où l’in- dice de base x correspond à la position sur l’axe. Avec les propriétés de la distribution de Dirac, une fonction d’onde ψ(x) s’écrit R +∞ 0 0 0 ψ(x) = −∞ ψ(x )δ(x − x )dx R +∞ 0 0 0 = −∞ ψ(x )hx|x idx + Z +∞ 0 0 0 = hx ψ(x )|x idx −∞ | {z } |ψi La fonction d’onde ψ(x) du ket |ψi est donnée par l’ensemble de ses com- posantes dans la base des positions {|xi} : ψ(x) = hx|ψi Remarque 1 : le choix d’une base fixe une représentation du vecteur par l’ensemble de ses composantes 2 dans la base. La fonction d’onde est la représentation du vecteur dans la base {|xi}, en abrégé on parle parfois de la représentation x du ket |ψi. Mais il existe d’autres bases de Ex et il faut sou- ligner qu’un choix de base différent dégénère un set de coordonnées différent. Par exemple dans la base des impulsions {|pi}p∈R qui correspond à celle des ondes Rplanes pour les fonctions d’onde, un état quelconque se décompose |ψi = ψ(p)|pidp avec les composantes ψ(p) = hp|ψi = T F {ψ(x)}. La fonction d’onde n’est qu’une des représentations possibles d’un vec- teur de Ex : Z Z |ψi = ψ(x)|xidx = ψ(p)|pidp | {z } deux représentations du même ket Remarque 2 : La fonction d’onde associée au ket particulier noté |x0 i de la base des positions est la distribution δ(x−x0 ). La fonction d’onde associée ip0 x 1 au ket particulier |p0 i de la base des impulsions est l’onde plane 3 √2π~ e ~. Aucune des deux n’est de carré sommable. Cela ne nous empêchera pas de les utiliser pour décomposer un état de Ex de la même manière qu’on utilisait les ondes planes pour former un paquet d’ondes. 2. appelées aussi coordonnées dans l’espace euclidien. 3. La base {|pi} est celle des ondes planes. En effet, la fonction d’onde d’un vecteur particulier |p0 i de la base {|pi} est celle d’une onde plane d’impulsion p0. En effet, hx|p0 i = ipx ip0 x ψp0 (x) = T F −1 {hp|p0 i} = T F −1 {δ(p − p0 )} = √2π~ 1 δ(p − p0 )e ~ dp = √2π~ 1 R e ~. 7 C Le rôle central des opérateurs linéaires  Un opérateur  transforme un ket en un autre ket |ϕi − → Â|ϕi. On comprend le rôle fondamental joué par les opérateurs linéaires en mécanique quantique avec le Postulat II : Toute grandeur physique A est décrite par un opérateur linéaire et auto-adjoint agissant dans E, noté  et appelé observable. 1 Opérateurs x̂ et p̂ de Ex Les observables x̂ et p̂ de Ex sont introduits en représentation x, par leur action sur les fonctions d’ondes 1D. La généralisation à un espace 3D sera faite à la fin de ce chapitre. Opérateur position x̂ La position x de la particule est décrite par l’opérateur linéaire x̂ réalisant la ”multiplication par x” de la fonction d’onde ψ: x̂ ψ(x) −→ x ψ(x) Opérateur impulsion p̂ est symétriquement défini par son action sur la transformée de Fourier ψ de ψ, comme la ”multiplication par p” : p̂ ψ(p) −→ p ψ(p) L’action de p̂ sur la fonction d’onde vient des propriétés de la transformée de Fourier (voir annexe chapitre I) : p̂ ~ ∂ψ ψ(x) −→ i ∂x Remarque : Les opérateurs x̂ et p̂ permettent de calculer moyennes et écart- types des mesures par un produit scalaire : Z Z hxi = 2 x|ψ(x)| dx = ψ(x)∗ (x ψ(x)) dx = hψ|x̂|ψi R R Z Z p|ψ(p)|2 dp = ψ(p)∗ p ψ(p) dp = hψ|p̂|ψi hpi = R R Ce résultat se généralise à tout observable : La valeur moyenne des mesures de A pour un système dans l’état |ψi vaut : hAi = hψ|Â|ψi 8 2 Commutation des opérateurs L’ordre d’action de plusieurs opérateurs sur un ket n’est pas anodin. En effet, le produit d’opérateurs est généralement non-commutatif ÂB̂ 6= B̂ Â. Pour caractériser la propriété de commutation, on utilise l’ Opérateur ”commutateur de  et B̂” : [Â, B̂] = ÂB̂ − B̂  Si [Â, B̂] = 0,  et B̂ commutent. Si [Â, B̂] 6= 0,  et B̂ ne commutent pas. Cas important (la relation d’indétermination de Heisenberg en découle) x̂ et p̂ ne commutent pas. [x̂, p̂] = i~Iˆ où Iˆ est l’opérateur identité. ~ ∂ Démo : ∀ψ, [x̂, p̂]ψ = x ~i ∂ψ ∂x − i ∂x (xψ) = − i ψ = i~ψ ~ | {z } =ψ+x ∂ψ ∂x 3 Projecteurs et fermeture Considérons l’opérateur P̂ψ = |ψihψ|. Son action sur un ket quelconque |ϕi s’écrit P̂ψ |ϕi = |ψihψ|ϕi. On reconnait le vecteur |ψi multiplié par le produit scalaire hψ|ϕi. La signification géométrique est claire : il s’agit de l’opérateur ”projection sur le vecteur |ψi ”. On peut facilement vérifier que P̂ψ est linéaire et qu’il vérifie la propriété P̂ψ2 = P̂ψ que possède tout projec- teur dans un espace vectoriel. Par extension, P̂ψ1 + P̂ψ2 est le projecteur sur le sous-espace vectoriel de E engendré par les deux vecteurs indépendants |ψ1 i et |ψ2 i (analogie avec la projection sur un plan dans R3 ). Relation de fermeture d’une base orthonormée Une base est ortho- normée ssi hi|ji = δi,j. La relation de fermeture est une autre définition - équivalente - du caractère orthonormée de la base. Elle stipule qu’on peut reconstituer un vecteur quelconque à partir de la somme de ses projections P sur les vecteurs de base : i P̂i = I, ˆ ce qu’on retient sous la forme : X |iihi| = Iˆ pour une base discrète {|ii}i∈N. i Z |αihα|dα = Iˆ pour une base continue {|αi}α∈R. 9 Remarque : très utile pour naviguer entre différentes représentations. Insérer la fermeture de la base |xi de Ex dans le produit scalaire de deux kets permet par exemple de vérifier qu’il coı̈ncide bien avec celui des fonctions d’onde : ˆ = hψ| |xihx|dx|ϕi = hψ|xihx|ϕidx = ψ ∗ (x)ϕ(x)dx R R R hψ|ϕi = hψ|I|ϕi 4 Représentation matricielle Un opérateur linéaire  se définit par son action sur un vecteur quel- conque. Lorsqu’on dispose d’une base orthonormée, il suffit de connaı̂tre son action sur l’ensemble des vecteurs de base : {Â|ji}j que l’on range en colonnes dans la représentation matricielle de l’opérateur .. h1| Â|ji... .. h2|Â|ji... .......... .. ......  = .. hi|Â|ji... ............ ...... .. hN |Â|ji... L’élément de matrice ai,j figurant à la ie ligne et la j e colonne s’écrit : ai,j = hi|Â|ji L’utilisation correcte des notations de Dirac dans les espaces de dimen- sions infinies se fait en gardant en tête la représentation matricielle. Un opérateur restera psychologiquement une matrice, un ket un vecteur colonne, ceci même avec une infinité de composantes. 5 Opérateur adjoint † L’opérateur adjoint † de  est défini par : hϕ|† |ψi = hψ|Â|ϕi∗ ∀|ϕi, |ψi ∈ E 2 Les éléments de matrice a†i,j de l’adjoint † sont tels que a†i,j = a∗j,i 10 En d’autres termes pour obtenir la matrice de † il suffit de transposer la matrice de  et de conjuguer tous ses éléments. † † † Propriétés : † = Â, λ = λ∗ † ,  + B̂ = † + B̂ † , † ÂB̂ = B̂ † †. Conjugaison hermitique L’opération qui consiste à transformer un ket en bra ou un opérateur en son adjoint est appelé conjugaison hermitique. Au niveau mathématique un bra hψ| est une application qui transforme hψ| un ket quelconque |ϕi en un produit scalaire : |ϕi −→ hψ|ϕi. L’ensemble des bras associés aux kets de E forme un espace vectoriel E ∗ appelé espace dual. Un des intérêts des notations de Dirac est de permettre d’oublier les mathématiques de l’espace dual, ceci grâce aux Règles de conjugaison hermitique : Inverser l’ordre des bra et ket de l’expression en transformant bra en ket |ψi hψ|, ket en bra hϕ| |ϕi, λ λ∗ ,  †. Regrouper les scalaires devant. Exercice : nature et conjugaison hermitique de l’expression λ|uihv|wi ? hu|† B̂hv|ui ? λhu|Â|vi|wihψ| ? 6 Opérateur auto-adjoint † =  Les opérateurs autoadjoints (ou hermitiques), tels que † = Â, sont les plus intéressants du point de vue physique car ce sont ceux qui correspondent à des grandeurs mesurables 4. Ils ont des matrices dont les éléments diago- naux sont réels et dont les éléments non-diagonaux présentent une symétrie de conjugaison par rapport à la diagonale. Une telle matrice est dite hermi- tienne. Par exemple : 4 0 0  = † = 0 −2 1 + i 0 1−i 1 Propriété fondamentale : les matrices hermitiennes sont diagonalisables. 4. C’est la raison pour laquelle on les appelle opérateurs observables. 11 Cela signifie qu’on peut trouver une base dans laquelle la matrice est diagonale. Les éléments sur la diagonale sont les valeurs propres et la base est formée des vecteurs propres de l’opérateur. D Valeurs propres et vecteurs propres Postulat III : Les résultats possibles de la mesure d’une grandeur A sont les valeurs propres de l’observable Â. On appellera spectre de l’observable Â, l’ensemble de ses valeurs propres. Le spectre des résultats de mesure pourra être discret (ex : énergies permises dans un puits quantique) ou continu (ex : position d’une particule). 1 Rappels Equation aux valeurs propres d’un opérateur  : Le ket |λi, non-nul, tel que Â|λi = λ|λi est un vecteur propre de  associé à la valeur propre λ. Remarques : (i) Un vecteur propre de  est un vecteur particulier de l’espace vectoriel, qui reste invariant ”en direction” par l’action de Â. L’opérateur transforme un vecteur propre en un vecteur qui lui est colinéaire, le coefficient de pro- portionnalité étant la valeur propre. (ii) Les notations de Dirac sont commodes pour indiquer la valeur propre associée λ dans la notation du vecteur propre |λi. La dégénérescence a g d’une vp est définie comme le nombre de VP indépendants (non colinéaires) qui lui sont associés. g = 1, vp non-dégénérée g ≥ 2, vp dégénérée a. autre vocabulaire : multiplicité, degré, ordre de dégénérescence,... On appelle sous-espace propre de  associé à λ, l’espace vectoriel engendré par g VP indépendants {|λ1 i, |λ2 i,... , |λg i} associés à la même vp λ. 12 2 Propriétés des observables P1 (à démontrer en exercice) : Les valeurs propres d’un observable sont réelles. C’était attendu puisque le résultat d’une mesure physique est réel. P2 (à démontrer en exercice) : Les vecteurs propres d’un observable forment une base orthonormée de l’espace des états. A méditer : on peut ainsi définir la base des positions comme l’ensemble des vecteurs propres de l’opérateur position. Théorème (admis) : Si deux observables  et B̂ commutent, alors on peut construire une BON de E à partir de VP communs à  et B̂. E L’espace des états approprié 1 Produit tensoriel Quel est l’espace vectoriel approprié à la description d’un problème phy- sique donné ? Jusqu’ici nous avons principalement étudié l’espace des états Ex décrivant le mouvement d’une particule dans un problème de symétrie 1D. Il est adapté quand la particule possède un seul degré de liberté x. L’espace adapté à une particule évoluant dans un espace euclidien avec 3 degrés de libertés x, y et z est un autre espace des états. On le notera Er. Il se construit rigoureusement à l’aide du produit tensoriel, noté ⊗, des espaces de symétrie unidimensionnelle Ex , Ey et Ez : Er = Ex ⊗ Ey ⊗ Ez Les degrés de liberté de la particule peuvent être externe, comme les coordonnées classiques x,y et z. Ils peuvent aussi être issus d’une propriété purement quantique, comme le spin de l’électron, qualifié de degré de liberté interne. L’espace vectoriel approprié pour décrire une particule est le pro- duit tensoriel des espaces associés à chacun des degrés de liberté, internes et externes : E = Einterne ⊗ Eexterne. Exemple : l’espace vectoriel décrivant le mouvement d’un électron portant un spin, est : E = Er ⊗ Espin , produit tensoriel d’un espace de dimension infinie Er et d’un espace de dimension 2 Espin. Quid du mouvement de la molécule d’ammoniac et de sa configuration droite et gauche ? 13 2 Etats factorisables ou intriqués (facultatif ) L’espace approprié à un système physique formé par deux particules est E = E1 ⊗ E2 , où E1 et E2 sont les espaces pour chacune des particules prises indépendamment. C’est la notion même de produit tensoriel qui donne à comprendre le concept d’intrication quantique et ses propriétés contre- intuitives de non-localité (ex : téléportation quantique). Dans E = E1 ⊗ E2 , deux type de vecteurs se distinguent : les vecteurs factorisables et les autres, intriqués. Un vecteur |ψi de E est factorisable s’il existe deux vecteurs, |ϕ1 i dans E1 et |ψ2 i dans E2 tels que : |ψi = |ψ1 i ⊗ |ψ2 i A partir des bases {|ii} et {|ji} de E1 et E2 , de dimensions respectives N1 et N2 , on peut définir une base de E = E1 ⊗ E2 avec dim E = dim E1 × dim E2 {|ii ⊗ |ji} i=1,··· ,N1 j=1,··· ,N2 Un ket quelconque de E se décompose dans cette base comme suit N1 X X N2 |ψi = ci,j |ii ⊗ |ji i=1 j=1 Un vecteur |ψi de E est factorisable lorsque chacune de ses composantes ci,j est séparable en un produit de composantes ai et bj dans les bases {|ii} et {|ji}. Avec ci,j = ai bj , on obtient en effet N1 X N2 X |ψi = ai |ii ⊗ bj |ji |i=1{z } j=1 | {z } ∈E1 ∈E2 Physiquement, un état factorisable est un état particulier de E qui ne présente pas de corrélation entre les degrés de libertés de E1 et E2. Un état factori- sable apparait comme la simple juxtaposition de deux états issus chacun de son espace. Du point de vue physique, une mesure effectuée dans un espace n’aura pas d’impact sur l’autre. Néanmoins la factorisation n’est pas tou- jours possible. Un état intrinqué est, par définition, un état non-factorisable. Exemple sur Er : la fonction d’onde ψ(x, y, z) représente un état |ψi où les degrés de liberté x, y et z sont intriqués. Au contraire, les fonctions d’ondes 14 à variables séparées de la forme χ(r) = ϕ(x)φ(y)ψ(z) correspondent, elles, à un état |χi factorisable puisque Z Z Z Z 3 |χi = χ(r)|ridr = ϕ(x)|xidx ⊗ ϕ(y)|yidy ⊗ ϕ(z)|zidz Exemple de l’intrication de deux spins : L’espace des états du spin Espin est de dimension 2 avec pour base {|↑i, |↓i}. La base de Espin1 ⊗Espin2 est formée de 4 vecteurs {|↑↑i, |↑↓i, |↓↑i, |↓↓i}. Quels sont les états intriqués parmi : |↑↑i+ |↑↓i ? |↑↑i+ |↓↓i ? |↑↓i+ |↓↑i ? |↑↑i+ |↑↓i+ |↓↑i+ |↓↓i ? La notation du vecteur produit tensoriel |ϕ1 i ⊗ |ψ2 i est lourde : le ⊗ et l’indexation de l’espace 1 ou 2 sont souvent omis en gardant en tête l’ordre d’écriture de chaque espace (sous entendu 1 puis 2) : |ri = |xi ⊗ |yi ⊗ |zi = |xi|yi|zi = |x, y, zi ∈ Er = Ex ⊗ Ey ⊗ Ez 3 Mouvement 3D : opérateurs R̂ et P̂ dans Er L’opérateur position dans Er est défini par R̂ = R̂x ⊗ R̂y ⊗ R̂z , où R̂i ∈ Ei avec i = x, y, ou z. L’action de l’opérateur 5 Rˆx dans Ex est définie comme multiplication par la coordonnée x en représentation |ri. Les deux autres observables R̂y et R̂z réalisent respectivement la multiplication par y et z en représentation |ri. Symétriquement, l’opérateur impulsion dans Er est défini par P̂ = P̂x ⊗ P̂y ⊗ P̂z pour action de P̂x (P̂y , P̂z ) : multiplication par px (py , pz ) en représentation |pi hr|R̂x |ϕi = xhr|ϕi hp|P̂x |ϕi = px hp|ϕi hr|R̂y |ϕi = yhr|ϕi hp|P̂y |ϕi = py hp|ϕi hr|R̂z |ϕi = zhr|ϕi hp|P̂z |ϕi = pz hp|ϕi Comme la multiplication par un scalaire est commutative [R̂i , R̂j ] = 0. De même [P̂i , P̂j ] = 0. Par contre, R̂x et P̂x ne commutent pas : [R̂x , P̂x ] = ˆ On peut démontrer de même que [R̂x , P̂y ] = 0. En résumé, les relations i~I. de commutation des opérateurs position et impulsion s’écrivent : h i h i h i R̂i , R̂j = 0, P̂i , Pˆj = 0 et R̂i , Pˆj = i~Iδ ˆ i,j avec i, j = x, y, z 5. On avait noté précédemment x̂ cet opérateur dans Ex. 15 F Principe de correspondance L’observable quantique  se construit en remplaçant r et p par les obser- vables R̂ et P̂ dans l’expression de la grandeur classique A(r, p). Exemple 1 : moment cinétique L = r ∧ p → L̂ = R̂ ∧ P̂ moment cinétique orbital Exemple 2 : r · p → 21 R̂P̂ + P̂ R̂. Attention à choisir une expression de la grandeur classique ”convenablement symétrisée” pour que l’opérateur ob- † tenu soit autoadjoint. Ce n’est pas le cas pour R̂P̂ = P̂ † R̂† = P̂ R̂ 6= R̂P̂ puisque R̂ et P̂ ne commutent pas. Opérateur Hamiltonien A l’énergie totale E de la mécanique classique est associée l’opérateur Ĥ. Pour une particule sans spin dans un potentiel V (r), écrire l’hamiltonien ne pose pas de problème 6 p2 P̂ 2 E= + V (r) → Ĥ = + V (R̂). 2m 2m Remarque importante : la correspondance grandeur classique → opérateur quantique n’est pas réciproque. Il existe des grandeurs physiques purement quantiques, i.e. sans correspondance classique, comme le moment cinétique de spin. G Evolution temporelle 1 Equation de Schrödinger L’opérateur Hamiltonien, Ĥ associé à l’énergie totale du système a un statut particulier pour le rôle qu’il joue dans l’évolution temporelle d’un état |ψ(t)i, régie par le postulat d’évolution temporelle Postulat IV : Equation de Schrödinger d|ψ(t)i i~ = Ĥ|ψ(t)i dt 2 2 En représentation x à 1D elle s’écrit : i~ ∂ψ ~ ∂ ψ ∂t = − 2m ∂x2 + V ψ. 6. P̂ 2 = P̂x2 + P̂y2 + P̂z2 à ne pas confondre avec l’opérateur P̂ appliqué deux fois. 16 2 Etats stationnaires Les valeurs propres de l’hamiltonien sont les énergies autorisées du système physique considéré. Ses vecteurs propres sont des états stationnaires. Etudions ici le cas d’un spectre d’énergie discret (ex : état lié), les va- leurs permises En sont associés aux états propres |ϕn,τ i, tels que Ĥ|ϕn,τ i = En |ϕn,τ i. Les vecteurs propres sont indicés 7 avec l’entier τ en cas de dégénérescence. Un état quelconque |ψ(t)i se décompose dans la base des états propres de Ĥ : X |ψ(t)i = cn,τ (t)|ϕn,τ i n,τ L’équation de Schrödinger appliquée à |ψ(t)i s’écrit ! ∂ X X X i~ cn,τ (t)|ϕn,τ i = Ĥ cn,τ (t)|ϕn,τ i = cn,τ (t)Ĥ|ϕn,τ i ∂t n,τ n,τ n,τ X ∂ X soit encore i~ cn,τ (t)|ϕn,τ i = En cn,τ (t)|ϕn,τ i n,τ ∂t n,τ Puisque {|ϕn,τ i} forme une base de E, on constate que l’équation de Schrödinger se décline en une série d’équations différentielles, une pour chaque composante du vecteur |ψ(t)i dcn,τ (t) i~ = En cn,τ (t) ∀n∀τ dt La solution est immédiate 8 et montre que chaque composante suit sa propre évolution temporelle, indépendamment 9 des autres composantes, selon iEn t cn,τ (t) = cn,τ (0) e− ~ | {z } état initial Remarque : En effet, si l’état initial est un VP de Ĥ, par exemple |ψ(0)i = iEn t |ϕn,τ i, alors |ψ(t)i = e− ~ |ψ(0)i. L’état initial et à l’instant t ne différent que par un facteur de phase. Or nous allons voir, avec les mesures dans la partie suivante, que ces vecteurs correspondent à un même état physique. Un VP de Ĥ est bien un état du système pour lequel les résultats de mesure 7. pour éviter toute confusion avec le nombre complexe i2 = −1 dcn,τ iEn t 8. cn,τ = d ln(cn,τ ) = −i E~n dt donne ln(cn,τ ) = A − i E~n t soit cn,τ = eA e− ~ , la constante d’intégration étant déterminée par la valeur initiale cn,τ (0). 9. La composante d’indice n évolue à la pulsation ωn = E~n. 17 de n’importe quelle grandeur sont indépendants du temps 10. Remarque : comme nous l’avons vu pour les fonctions d’onde, une superpo- sition d’états stationnaires n’est pas stationnaire. Méthode pour calculer l’évolution temporelle d’un état initial |ψ(0)i (1) trouver les états stationnaires : |ϕn,τ i VP de Ĥ d’énergie En. (2) décomposer |ψ(0)i dans la base des états stationnaires. iEn t (3) multiplier les composantes cn,τ (0) par e− ~. H Mesures quantiques 1 Probabilités de mesure d’un observable  Soit {an } le spectre formé par les vp de  et {|aτn i} la BON de VP associés. τ est un entier qui indice les VP indépendants associés à la même vp an , en cas de dégénérescence gn ≥ 2. Postulat V La probabilité d’obtenir le résultat an lors d’une mesure de A sur le système dans l’état |ψi à un instant a t vaut P(an ) |han |ψi|2 pour une vp non dégénerée gn = 1 = Pgn τ 2 = τ =1 |han |ψi| pour une vp dégénerée gn ≥ 2 La moyenne hAi = n P(an )an des résultats de mesure à l’instant t s’écrit b P hAi = hψ|Â|ψi a. Pour la clarté de l’énoncé, la dépendance temporelle du ket est omise. P b. Démonstration en l’absence de dégénérescence pour faire simple, |ψi = n cn |an i P P P ∗ avec cn = han |ψi. Alors hψ|Â|ψi = h i ci |ai i|Â| i cj |aj ii = i,j ci cj hai |Â|aj i = P ∗ P ∗ i,j ci cj aj hai |aj i = nc cn an = hAi. |n{z } P(an ) Commentaires importants : P (i) Une décomposition du vecteur d’état |ψi = n han |ψi|an i (cas non dégénéré) dans la base des VP de  donne accès à l’ensemble des probabilités (= |composantes|2 ) associées aux résultats de mesure de Â. 10. On peut déjà le constater sur la moyenne des mesures d’un observable. Elle iEn t iEn t est indépendante du temps hAit = hψ(t)|Â|ψ(t)i = e+ ~ e− ~ hψ(0)|Â|ψ(0)i = hAi0 ∀t ∀Â. Il en ira de même des probabilités de résultat de mesure. 18 (ii) Si |ψi = |an i, le système est dans l’état propre |an i, alors on trouvera comme résultat an avec une probabilité P(an ) = 100%. Lorsque le système est dans un état propre de A, le résultat de la mesure est certain. Cette propriété sera exploitée pour la préparation des états quantiques. P (iii) P(an ) = 1, on est certain de trouver un des résultats possibles, a1 ou a2 ou... Cette propriété évidente est assurée par le fait que |ψi est normé. (iv) Le postulat énoncé ici par commodité pour un spectre discret est valable pour un spectre continu R {α}α∈R : la décomposition d’un vecteur quelconque |ψi s’écrit |ψi = hα|ψi|αiα. La probabilité dP(α) d’obtenir le résultat de la mesure compris entre α et α + dα vaudra dP(α) = |hα|ψi|2 dα Exemple : opérateur position x̂ de Ex dont le spectre {x} = R. La probabilité de présence d’une particule entre x et x + dx s’écrit bien dP(x) = hx|ψi = |ψ(x)|2 dx avec la fonction d’onde ψ(x). (v) Deux kets colinéaires à un terme de phase près correspondent à un même état physique. En effet, la mesure sur l’état eiθ |ψi, avec θ ∈ R donnera les mêmes probabilités de résultats que sur |ψi puisque |eiθ |2 = 1. Du point de vue des mesures |ψi et eiθ |ψi ne peuvent être distingués. Un état physique est défini par un vecteur normé de E, à un facteur de phase multiplicatif près 11. 2 La mesure modifie l’état du système Postulat VI de ”réduction du paquet d’ondes” : Si la mesure de A sur le système dans l’état |ψi donne an , alors l’état du système immédiatement après la mesure est la projection normée de |ψi sur le sous-espace propre associé à an : mesure de a 1 |ψi =⇒n |ψ 0 i = p Pˆn |ψi P(an ) N.B. : En l’absence de dégénérescence, le sous-espace propre associé à an est de dimension 1 si bien que mesure de a |ψi =⇒n |ψ 0 i = |an i Si on refait une mesure de A immédiatement après la première, ce postu- lat indique qu’on retrouvera la même valeur de façon certaine. Mais après la mesure, l’état du système se remettra à évoluer dans le temps (c.f. équation 11. N.B. : c’était déjà le cas pour les fonctions d’onde. 19 de Schrödinger) à partir du nouvel état initial imposé par la mesure : Ce postulat, le moins intuitif de tous, traduit le fait que réaliser une me- sure modifie irréversiblement l’état du système, ce qu’on appelle réduction du paquet d’ondes. VIDEO ”Tout est quantique” : par quelle fente d’Young l’électron est passé ? corpuscule : mitraillette / onde : vagues / paquet d’ondes : passe par les deux fentes et réduction du paquet d’ondes sur l’écran / si on mesure par quelle fente l’électron est passé, réduction du paquet d’ondes au niveau de la fente, ce qui élimine les interférences. Paradoxe du chat de Schrödinger (complément facultatif ) : le pos- tulat de réduction du paquet d’onde avait profondément troublé Schrödinger. Pour en tester les limites, il imagina une expérience de pensée où un chat est enfermé dans une boı̂te avec un dispositif associant un atome instable et un capteur de désintégration qui déclenche l’ouverture d’une bouteille de cyanure, tuant instantanément le chat. Diabolique, ce dispositif couple l’état quantique de l’atome à l’état, vivant ou mort, du chat. Schrödinger propose de regarder dans la boı̂te au temps t de demi-vie de l’atome radioactif. A cet instant la probabilité que l’atome se soit désintégré est de 50%. Lorsqu’on ouvre la boı̂te, il y a réduction du paquet d’onde et on a donc une chance sur deux de trouver le chat vivant ou mort. Mais comment décrire l’état du chat juste avant la mesure ? Le chat serait dans état de superposition quantique 1 |chati = √ (|vivanti + |morti) 2 c’est à dire dans un état ”à la fois vivant et mort” ? C’est effectivement assez difficile à imaginer. 20 L’origine de ce paradoxe tient, bien sûr, dans la nature macroscopique du chat, pour lequel les effets quantiques sont négligeables (c.f. longueur d’onde de de Broglie du chat). Un problème, plus subtil, se pose dans le couplage d’un objet quantique (l’atome radioactif) à un objet macroscopique (le chat). Aujourd’hui la théorie de la décohérence est un domaine de recherche très actif en mécanique quantique. Elle montre en substance que plus un système est gros, plus vite sera brouillé l’état de superposition quantique. Pour un chat, en pratique la durée de vie de la superposition quantique est tellement courte qu’elle est indétectable : même avant d’ouvrir la boı̂te le chat est bien soit vivant soit mort (logique classique) alors que l’atome est dans l’état de superposition à la fois désintégré et non-désintégré (logique quantique). 3 Mesures successives Le protocole de mesures successives de deux grandeurs A et B pour un système dans l’état |ψi va naturellement dépendre des propriétés de commutation des observables associées. La mesure de la deuxième grandeur est effectuée ici immédiatement après 12 la mesure de la première. Lorsqu’ et B̂ commutent [Â, B̂] = 0, partant d’un état initial |ψi, la probabilité de trouver les résultats an puis bp est identique à celle de trouver bp puis an. L’ordre de mesure ne changera pas non plus l’état final, qui sera un VP commun à  et B̂. On pourra donc mesurer  et B̂, simultanément.  et B̂ sont dites compatibles du point de vue de la mesure. Lorsqu’ et B̂ ne commutent pas [Â, B̂] 6= 0, inverser l’ordre des mesures successives de A et B conduit à des probabilités de mesure et un état final différents. Le schéma qui suit propose une illustration de cette conséquence de la réduction du paquet d’onde, par analogie avec l’espace euclidien R2. On note |a1 i et |a2 i la base des VP de  et |b1 i et |b2 i celle de B̂. Puisque [Â, B̂] 6= 0, il n’existe pas de base commune, ces bases sont forcément différentes (ici illustré avec une rotation). Regardons la séquence de mesure donnant le résultat a1 puis le résultat b1 (en rouge). La mesure de A sur l’état initial |ψi, dont on lit la compo- sante |OM1 | sur l’axe |a1 i, donne un résultat a1 avec la probabilité |OM1 |2. Immédiatement après la mesure, l’état du système devient |a1 i par réduction du paquet d’onde. |a1 i est le point de départ pour la mesure de b1 ensuite, qui amène à l’état final |b1 i. On obtient ainsi P(a1 , b1 ) = |OM1 |2 |OM2 |2 12. immédiatement après signifie dans un temps beaucoup plus court que la période des oscillations de Bohr. 21 Si on mesure, à l’inverse, B puis A à partir d’un même état |ψi (en bleu), on trouve P(b1 , a1 ) = |ON1 |2 |ON2 |2 Pour la séquence B puis A, l’état final est différent, égal à |a1 i. Géométriquement on constate que |OM2 | = |ON2 |, alors que |OM1 | 6= |ON1 |, ce qui montre que P(an , bp ) 6= P(bp , an ) En conclusion, lorsque [Â, B̂] 6= 0, les deux grandeurs physiques ne peuvent être mesurées ensemble, elles sont dites incompatibles du point de vue de la mesure. La réduction du paquet d’ondes lors de la première mesure fait ”perdre la mémoire” de l’état initial pour la deuxième. C’est l’origine de la relation d’indétermination quantique généralisée à l’issue de leurs mesures successives : 22 1 ∆A∆B ≥ |hψ|[Â, B̂]|ψi| 2 Elle s’applique en particulier à [x̂, p̂] = i~Iˆ pour donner ∆x∆p ≥ ~ 2, la relation de Heisenberg à 1D. 4 Préparation d’un état quantique L’étude des phénomènes quantiques nécessite de partir d’un état initial bien défini, certain, pour pouvoir confronter le résultat des expériences à la modélisation quantique du système. Cela nécessite une étape d’initialisation de l’état du système, étape absente des protocoles de mesure classiques. Elle repose sur la mesure de grandeurs physiques d’un état quelconque, inconnu avant mesure. Dans le cas simple où un observable  ne présente pas de dégénérescence de ses valeurs propres, alors après sa mesure on sait exactement quel est l’état du système : si la mesure a donné an , l’état du système immédiatement après la mesure est |an i, et ceci indépendamment de l’état avant la mesure. Après la mesure, on est certain que le système est dans cet état, bien défini. C’est la mesure qui réalisera l’initialisation de l’état du système. C’est plus compliqué lorsque  possède des valeurs propres dégénérées. Par exemple, après une mesure ayant donné le résultat a2 dégénérée 2 fois, l’état avant mesure sera projeté dans le plan formé par les deux vecteurs propres associés, pour donner n’importe quelle combinaison linéaire de |a12 i et |a22 i. Dans ce cas, il reste une indétermination sur l’état du système. La mesure ne permet pas d’amener le système dans un état complètement défini. Comme la mesure de A n’est pas suffisante, on cherchera alors un opérateur B̂, compatible avec Â, pour préparer le système dans un état bien défini par la mesure simultanée de  et B̂. Plus généralement, pour initialiser l’état d’un système, on mesure un ensemble 13 complet d’observables qui commutent (ECOC), complet signi- fiant que les ensembles de valeurs propres issues des mesures simultanées sont non-dégénérés. C’est par la mesure d’un ECOC que l’état du système pourra être initialisé sans ambiguı̈té par la mesure. 5 [Â, Ĥ] = 0 : constante du mouvement Considérons une grandeur physique A indépendante du temps : ddt = 0. La question est la suivante : est-ce que les résultats de mesure dépendent du 13. Si B̂ ne suffit pas à lever la dégénérescence, on ajoutera autant d’opérateurs que nécessaire. 23 moment où on les réalise ? Est-ce que les résultats sont identiques si on les enregistre à t = 0 ou à un instant ultérieur t ? Pour y répondre, examinons la dérivée de hAi par rapport au temps : dhAi d d d d = hψ|Â|ψi = hψ| Â|ψi + hψ| |ψi + hψ| |ψi dt dt dt dt |{z} dt =0 d 1 Avec l’équation de Schrödinger dt |ψi = i~ Ĥ|ψi et sa conjugaison hermitique d 1 dt hψ| = − i~ hψ|Ĥ, on trouve que dhAi 1 = h[Â, Ĥ]i dt i~ Cette relation permet de distinguer deux catégories d’observables, celles qui commutent avec Ĥ et les autres. Si [Â, Ĥ] = 0, alors hAi = cste,  est une constante du mouvement. La notion de constante du mouvement traduit une conservation de la grandeur physique étudiée au cours du temps. En mécanique classique, lorsque le potentiel est indépendant du temps l’énergie totale E se conserve. En mécanique quantique aussi : hHi = constante car Ĥ commute bien sûr avec lui-même et est donc la première constante du mouvement que nous pouvons identifier. Autres exemples issus de la mécanique classique qui se transposent en mécanique quantique : conservation de l’impulsion d’une particule libre (si V (r) = 0 alors [Ĥ, P̂ ] = 0), conservation du moment cinétique d’une parti- cule dans un potentiel central,... 6 [B̂, Ĥ] 6= 0 : oscillations de Bohr et règles de sélection Pour ces observables vérifions que la moyenne des mesures n’est pas constante au cours du temps. L’évolution temporelle de l’état du système iEn t est connue : |ψ(t)i = n,τ cn,τ (0)e− ~ |ϕn,τ i et on peut calculer P XX iEn t iEn0 t hBi = hψ(t)|B̂|ψ(t)i = c∗n,τ (0)e+ ~ cn0 ,τ 0 (0)e− ~ hϕn,τ |B̂|ϕn0 ,τ 0 i n,τ n0 ,τ 0 XX i(En −En0 )t hBi = c∗n,τ (0)cn0 ,τ 0 (0) hϕn,τ |B̂|ϕn0 ,τ 0 i e|+ {z ~ } n,τ 0 0 | {z } n ,τ | {z } (2) (1) (3) sélection oscillations conditions initiales 24 La valeur moyenne des mesures de l’observable B̂ n’est pas constante au cours du temps, elle oscille à des pulsations particulières En − En0 = ~ω, appelées oscillations de Bohr. Ce phénomène est très général, les pulsations ne dépendent ni de l’observable B̂, ni de l’état initial |ψ(0)i. En pratique, seules certaines oscillations sont observées. En effet, leur amplitude est pondérée par les éléments non-diagonaux de la matrice de B̂ exprimée dans la base des états stationnaires. Les fréquences autorisées correspondent aux éléments non nuls, à l’origine de la règle de sélection des oscillations de Bohr. Elle indique, par exemple, quelles fréquences du rayon- nement électromagnétique peuvent être absorbées par les atomes. 25