Introduction à la protection sociale

Introduction à la protection sociale

• L'étude de la protection sociale permet de comprendre comment les sociétés élaborent des mécanismes de solidarité face aux risques sociaux et économiques.
• L'évolution de la protection sociale est intrinsèquement liée aux transformations des rapports sociaux, économiques et politiques à travers les époques.
• L'analyse de l'histoire de la protection sociale met en lumière les principales dynamiques qui ont façonné son développement et influencé les modèles contemporains.

Moyen Âge - XVIIIe siècle : Genèse des mécanismes de solidarité

• Dès le Moyen Âge, la pauvreté est perçue comme une fatalité sociale nécessitant une prise en charge.
• Une distinction est faite entre les indigents valides, aptes au travail, et les invalides, considérés comme dignes de charité.
• L'assistance est assurée par les structures paroissiales et les communautés locales, dans un cadre religieux et philanthropique.
• Aux XIVe et XVe siècles, l'urbanisation croissante transforme le vagabondage en enjeu de régulation sociale, menant à des lois pour limiter la mendicité et organiser l'accueil des indigents dans des hospices.
• En 1445, la fondation de l'Hôtel-Dieu à Beaune illustre l'émergence d'une approche hospitalière structurée, financée par des dons privés et gérée par des ordres religieux.
• Au XVIe siècle, L'État commence à intervenir dans la gestion des aides sociales, les municipalités deviennent des acteurs clés du soutien aux populations les plus défavorisées, grâce aux impôts locaux.
• Au XVIIIe siècle, la pensée économique évolue, introduisant l'idée que la pauvreté peut être réduite par le travail. Le développement du salariat amorce une réflexion sur la nécessité d'une régulation des conditions de vie et de travail.

Révolution française - XIXe siècle : Premières régulations étatiques

• En 1790, la Révolution introduit des principes fondamentaux en matière de protection sociale, avec l'inscription du droit au secours pour les travailleurs inaptes dans le cadre républicain, marquant une reconnaissance progressive des responsabilités publiques.
• La Constitution de 1793 annonce que le but de la société est le bonheur commun (Article 1) et formalise les secours publics comme un devoir de l'État (Article 21), établissant ainsi une première approche institutionnelle de la lutte contre le chômage.
• Au XIXe siècle, la révolution industrielle transforme les structures économiques et sociales, l'urbanisation et l'essor du prolétariat salarié conduisant à une précarisation accrue des travailleurs et à une prise de conscience que le travail salarié ne suffit pas à résoudre la pauvreté.
• En 1806, une illustration de cette situation naît avec la création des mines d'anthracite à La Mure sous Napoléon qui témoigne de l'essor du travail industriel et des dangers associés.
• À la fin du XIXe siècle, les premiers mouvements ouvriers réclament des protections face aux aléas du travail, engageant une transition entre charité privée et régulation par l'État.
• En 1898, la loi sur les accidents du travail marque une avancée en reconnaissant la responsabilité patronale et en instaurant une indemnisation obligatoire des victimes.
• En 1905, une loi sur l'assistance aux vieillards, infirmes et incurables est adoptée, amorçant une prise en charge publique des populations les plus vulnérables.

Fin XIXe - Début XXe siècle : Institutionnalisation des assurances sociales

• En 1883 (Allemagne - Bismarck), le chancelier allemand introduit les premières assurances sociales obligatoires, couvrant la maladie, l'accident du travail et l'invalidité.
• En 1910, les retraites ouvrières et paysannes sont mises en place, initiant une première protection vieillesse basée sur un système de cotisations obligatoires.
• En 1932, les allocations familiales sont créées, amorçant la notion de redistribution intergénérationnelle et le soutien aux familles nombreuses.
• En 1941, le régime de Vichy instaure une politique familiale nationale, renforçant le rôle de l'État dans le soutien aux familles.

1945 - 1980 : Expansion et structuration du modèle social français

• En 1945, la fin de la Seconde Guerre mondiale marque un tournant majeur avec l'adoption d'un système généralisé de Sécurité sociale.
• Le système de Sécurité sociale combine les logiques beveridgienne (universalité) et bismarckienne (assurance contributive), visant à garantir une couverture sociale étendue pour tous les travailleurs et leur famille.
• En 1947, création du régime de retraite complémentaire pour les cadres (AGIRC), puis extension aux non-cadres en 1961 (ARRCO).
• En 1958, création du régime d'assurance chômage, visant à protéger les salariés contre la perte d'emploi.
• En 1967, une réforme éclate la Sécurité sociale en trois branches (maladie, vieillesse, allocations familiales), accompagnée de mécanismes de régulation financière pour contenir les déficits.
• Dès les années 1960, l'augmentation des dépenses de santé, le vieillissement démographique et les tensions budgétaires remettent en question la soutenabilité du modèle.
• Des plans de stabilisation économique sont mis en place : en 1959, le plan Rueff propose une augmentation du taux de cotisations ; en 1967, les ordonnances de Jeanneney déplafonnent les cotisations et baissent le taux de remboursement d'une consultation.
• Dans les années 1970, le ticket modérateur et les premières franchises médicales sont introduits pour maîtriser les dépenses.
• Deux échecs sont constatés avec la Sécurité sociale : l'absence de caisse unique et des problèmes liés au paritarisme de la gérance des caisses.

Internationalisation du modèle et perspectives comparatives

• La France exporte son modèle en Algérie, au Maroc et en Tunisie à partir des années 1950-1960, influençant ainsi les systèmes de protection sociale en Afrique subsaharienne.
• Pendant les Trente Glorieuses, la protection sociale devient un levier de stabilisation macroéconomique, avec des dépenses sociales atteignant près d'un tiers du PIB, renforçant le rôle de l'État-providence.