Cours d'Introduction à la Science Politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024 PDF
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Université Aix-Marseille
2024
H THOMAS
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Ce document présente un cours d'introduction à la science politique, se concentrant sur l'analyse du concept d'animal politique selon Aristote. Il explore la distinction entre zoé et bios, et discute de la place des différentes catégories d'êtres humains dans la Cité (polis). Ce cours est destiné aux étudiants de première année de science politique à l’Université Aix-Marseille (AMU).
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Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 1 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. Chapitre II A comme animal politique ie. vivant dans une Cité...
Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 1 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. Chapitre II A comme animal politique ie. vivant dans une Cité PLAN détaillé « Anthropos phusei politikon zoon (Άνθρωπος φύσει πολιτικών ζώον) » : L'homme est par nature(phusis) un être vivant(zoôn) politique Cause formelle ou matérielle : la polis c’est quoi ? (I et II) et (cause Finale le III) vivre en Cité dans quel but ? à quelle fin vivre en Cité I. « Anthropos phusei politikon zoon (Άνθρωπος φύσει πολιτικών ζώον) » : L'homme est par nature un être vivant politique. A. Que signifie le mot « zoon » (souvent traduit par animal) dans ce livre I de La politique ou des Politiques d'Aristote ? 1.Définition de zoon (le vivant) et sa différence avec le bios : 2. L’actualisation de la distinction vie nue et vie qualifiée Arendt Agamben 3. Vie organique et vie qualifiée : les genres de vie qualifiée De la Zoe aux 3 catégories de vie qualifiées dans l’ordre décroissant de désirabilité B. la distinction entre l’humain (anthropos) et le vivant non humain : la distinction logos/phone ne recouvre pas vraiment la distinction entre l’homme et l’animal telle que nous l’envisageons encore aujourd’hui 1.Phonè et logos 2. Les barbares sont-ils des animaux ? 3. Quel est le propre de l’homme ? Les humains sont des êtres vivants dans une cité, donc des animaux pas comme les autres 4. Tous sensibles ? animaux humains et non humains II. La Cité (polis) et la famille (oikos) La polis lieu naturel de la vie des Hommes ? Polis ethnos et oikos A. Une minorité de citoyens vivant dans la Cité quand la majorité est confinée dans l’Oikos 1.Le confinement dans l’oikos ou la privation de l’agora 2. Les distinctions entre les hommes et leurs modes de vie naturels selon leur naissance1 Le travail (du corps), l’ouvrage (le travail de ses mains) et l’œuvre (création de l’esprit) ou oikos, tekhne et polis ou philosophia 3. L’idéal de l’autarcie B la question de l’esclavage et des relations entre les citoyens et les non citoyens 1. L’esclavage est naturel ou conventionnel 2. L’amitié (philia entre citoyen) entre le maître et l’esclave et dans le couple 3. La dialectique du maître et de l’esclave III Les fins de la polis : le bonheur est dans l’équilibre (eu zen) et atteint grâce à la justice (dikaion). (non évalué et non traité en 2024 sauf le B 2. A Le bonheur des philosophes antiques : le bonheur est dans la vie philosophique 1/ Le bonheur selon Epicure (342 Av J.C – 270 Av J.C) les cyniques et les stoïciens 2 : le bonheur selon Saint Augustin (354 – 430) et Saint Thomas d’Aquin (1225 ou 1226-1274) et voient le bonheur par rapport à Dieu (comme Pascal). 3/ Le bonheur vu par les philosophes contemporains entre le 16ème siècle et le 19ème siècle. Montaigne Rousseau Schopenhauer B./ L’idéal de la bonne vie et du bonheur des citoyens dans le eu zen (la justice). La réponse aristotélicienne prolongée par le droit romain et la théorie thomiste 1.le eu zen ou équilibre que Thomas d’Aquin traduit par ‘’sum cuique tribuere’’ è donner à chacun ce qui lui revient de droit, naturellement.` 2. Les trois formes de justice chez Aristote universelle, commutative, distributive Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 2 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. (A comme Aristote/ Agamben/ Arendt, agora/anthropos) « Anthropos phusei politikon zoon (Άνθρωπος φύσει πολιτικών ζώον) » : L'homme est par nature(phusis) un être vivant(zoôn) politique NB : Cause formelle ou et matérielle : la polis c’est quoi ? et à quelle fin vivre en Cité (cause Finale le III) La citation dont nous partons dans ce chapitre est tirée de la Politique aussi appelée Les politiques d’Aristote car c’est un texte qui a été écrit en plusieurs fois et les différents livres ont été réordonnés par les traducteurs et les disciples depuis le 4eme siècle (voir Annexe 1) : La politique livre I (traduction Tricot ancienne) « Il est manifeste, à partir de cela, que la cité (polis) fait partie des choses naturelles, et que l’homme est un animal politique (zoon politikon), et que celui qui est hors cité (apolis), naturellement bien sûr et non par le hasard des circonstances, est soit un être dégradé soit un être surhumain […] Car un tel homme est du coup naturellement passionné de guerre, étant comme un pion isolé au jeu de tric trac. C’est pourquoi il est évident que l’homme est un animal politique (politikon zoon) plus que n’importe quelle abeille et que n’importe quel animal grégaire. Car, comme nous le disons, la nature (phusis) ne fait rien en vain ; or seul parmi les animaux l’homme (anthropos) a un langage (logos). Certes la voix (phonè) est le signe du douloureux et de l’agréable, aussi la rencontre-t-on chez les animaux ; leur nature, en effet, est parvenue jusqu’au point d’éprouver la sensation du douloureux et de l’agréable et de se les signifier mutuellement. Mais le langage existe en vue de manifester l’avantageux et le nuisible, et par suite le juste et l’injuste. Il n’y a en effet qu’une chose qui soit propre aux hommes par rapport aux autres animaux : le fait que seuls ils aient la perception du bien, du mal, du juste, de l’injuste et des autres notions de ce genre. Or avoir de telles notions en commun c’est ce qui fait une famille (oikos et une cité (polis) » http://projetbabel.org/forum/viewtopic.php?t=150 Aristote, Politiques, I, 1 « Aristote (né à Stagire Macédoine 384 av. J.-C. – mort à Chalcis en Eubée, 322 av. J.-C.) est un philosophe grec de l'Antiquité qui fut l’élève de Platon (né et mort à Athènes 428/427 av. J.-C.- en 348/347 av. J.-C.). Il vint vers l'an 368 à Athènes, y suivit pendant 20 ans les leçons de Platon, et commença dès lors à se faire connaître par ses écrits. »Plusieurs fois exilé il meurt d’ailleurs en exil quelques mois après Alexandre dont il avait été le précepteur « Il est généralement considéré comme l'un des premiers philosophes occidentaux, sinon comme l’inventeur de la philosophie, dont il fut le disciple à l'Académie, il est l'un des penseurs les plus influents que le monde ait connus. Il est aussi l'un des rares à avoir abordé pratiquement tous les domaines de connaissance de son temps : biologie, physique, métaphysique, logique, poétique, politique, rhétorique et de façon ponctuelle l'économie. Chez Aristote, la philosophie est comprise dans un sens plus large qu'aujourd'hui: elle est à la fois recherche du savoir pour lui- même, interrogation sur le monde et science des sciences.). » La suite sur Wikipedia https://fr.wikipedia.org/wiki/Aristote Nous allons examiner successivement dans ce chapitre ce que signifie le mot Zoon dans la pensée aristotélicienne et son opposition avec le mot bios qui désigne lui aussi la vie, la distinction entre les Anthropos (hommes) et les animaux (distinction logos phone) avant d’envisager la place des différentes catégories d’êtres humains (anthropoï) dans la Cité (polis) fondée sur la distinction entre la polis et l’oikos (la famille), les polites (citoyens), et les autres et de s’interroger sur la place des femmes des étrangers (xenos) et plus particulièrement des esclaves (doulos) I. « Anthropos phusei politikon zoon (Άνθρωπος φύσει πολιτικών ζώον) » : L'homme est par nature un être vivant politique. A. Que signifie le mot « zoon » (souvent traduit par animal) dans ce livre I de La politique Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 3 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. ou des Politiques d'Aristote ? Il signifie « être vivant » et non pas animal (qui se définirait par opposition à l’être humain et inversement) ou tout simplement comme il a été souvent traduit dans le sens contemporain du terme de « vivant « (gérondif substantivé) 1.Définition de zoon (le vivant) et sa différence avec le bios : Règne d'une espèce dont le programme est de naître, croître, se reproduire et mourir. Dans la représentation antique il y a trois mondes qui forment le cosmos : les dieux, le vivant et l'inanimé (les éléments fondamentaux : la terre, le feu, l’eau, l’air) qui forment le cosmos (qui veut dire monde ou univers comme en français le mot cosmos). Chez les Grecs, on ne parle pas d'univers mais de κόσμος (kósmos, « monde ordonné » en grec) : un monde clos qui a un ordre (par opposition au chaos) et distingue notamment le monde supralunaire (les astres et les dieux) et le monde sublunaire (la Terre et les hommes). Ainsi pour Socrate : « À ce qu’assurent les doctes pythagoriciens, Calliclès, le ciel et la terre, les Dieux et les hommes sont liés entre eux par une communauté, faite d’amitié et de bon arrangement, de sagesse et d’esprit de justice, et c’est la raison pour laquelle, à cet univers, ils donnent, mon camarade, le nom de cosmos, d’arrangement, et non celui de dérangement non plus que de dérèglement. »Platon, Gorgias, 507e - 508a 2. L’actualisation de la distinction Certains auteurs du XXème siècle vont proposer une relecture d’Aristote et repenser la distinction entre les deux termes qui désignent le vivant donc entre le Zoon -ou zoè- et le bios pour l’actualiser et la penser de l’Antiquité à nos jours. Ils vont distinguer comme Giorgio Agamben la zoe qui serait la vie purement biologique celle où l’humain se réduit à ses fonctions vitales (manger, excréter, dormir se reproduire) et la satisfaction des besoins vitaux des autres humains (se nourrir, se vêtir, se protéger du froid et du chaud et des prédateurs) et que Agamben va appeler la vie nue ar opposition à la vie qualifiée (la bios) terme qu’il reprend à Hannah Arendt dans Condition de l’Homme moderne Zoon = Neutre Bios = Masculin. « Les Grecs ne disposaient pas d'un terme unique pour exprimer ce qu nous entendons par le mot vie. Ils se servaient de 2 mots. « Zôe », qui exprimait le simple fait de vivre, commun à tous les êtres vivants (animaux ou êtres humains) et « bios » qui indiquait la forme ou la façon de vivre propre à un individu ou à un groupe ». Agamben « Le philosophe Italien Giorgio Agamben (1942-) travaille ce concept dans son livre Homo Sacer : le pouvoir souverain et la vie nue. La zoë est relié par Agamben lui-même à la description de la « vie nue » du réfugié par Hannah Arendt dans Les Origines du totalitarisme (1951). La réalité de l'« homo sacer » est, selon lui, une rupture totale entre les vies politique et biologique de l'individu. Par sa « vie nue », l'« homo sacer » se trouve soumis à la souveraineté de l'état d'exception et, bien que sa vie biologique continue, il n'a plus aucune existence politique. https://fr.wikipedia.org/wiki/Homo_Sacer « L’objet de la souveraineté, selon Giorgio Agamben, c’est non pas la vie qualifiée du citoyen, bavard et bardé de droits, mais la vie nue et réduite au silence des réfugiés, des déportés ou des bannis : celle d’un « homo sacer » exposé sans médiation à l’exercice, sur son corps biologique, d’une force de correction, d’enfermement ou de mort. Au modèle de la cité, censé régir la politique occidentale depuis toujours, il oppose celui du camp, « nomos de la modernité », paradigme de cette « politisation de la vie nue » qui est devenu l’ordinaire du pouvoir. La structure de la politique occidentale, nous dit-il, ça n’est pas la parole, c’est le ban. Cette thèse a une actualité évidente. Les mesures de santé publique, de mise au travail, de contrôle de l’immigration ou la prohibition des drogues révèlent la nature éminemment biopolitique des politiques publiques contemporaines. Elles s’appliquent précisément à des vies nues prises dans les catégories et les dispositifs d’un pouvoir qui les traitent comme telles - vies exposées et administrées. On pense immédiatement aux sans-papiers, bien sûr, objets Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 4 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. de camps très littéraux, très réels. La suite sur http://www.vacarme.org/article255.html C’est une interview d’Agamben Homo Sacer, le pouvoir souverain et la vie nue, Seuil, 1997 ; Ce qui reste d’Auschwitz, Bibliothèque Rivages, 1999. Platon (428-347) est un « philosophe antique de la Grèce classique, contemporain de la démocratie athénienne (et des sophistes, qu'il critiqua vigoureusement. Il reprit le travail philosophique de certains de ses prédécesseurs, notamment Socrate dont il fut l'élève, ainsi que celui de Parménide, Héraclite et Pythagore, afin d’élaborer sa propre pensée laquelle explore la plupart des champs importants, notamment la métaphysique et l’éthique, la philosophie de l’art et la politique…. »https://fr.wikipedia.org/wiki/Platon 3. Vie organique et vie qualifiée : les genres de vie qualifiée « Zoé » Processus de vie biologique. Processus de vie organique commun à tous les êtres vivants. Selon Aristote, le programme commun à tous : Naissance, croissance, mort. 2 formes de vie : Une vie proprement organique et corporelle : rester en vie, se reproduire. C'est le programme commun à tous les êtres vivants, c'est un processus naturel. « Bios » : vie qualifiée par la maîtrise d’une technique et des outils (bios tekhnikos) du logos (bios philosophikos ou politikos) ou des armes pour défendre la cité. Pour Aristote vivre dans la Cité c'est comme vivre dans une famille. La Cité est un regroupement plus évolué. Qui fait partie de la Cité ? Ceux qui sont dans le bios politikos, dans le bios ethikos ou philosophikos ou encore dans le bios technikos. Plus simplement, l'homme qualifié qui vit dans la Cité n'est pas un animal comme les autres : il a une vie politique, une vie pour maîtriser la technique (artisan) et la vie des idées philosophiques. Platon, dans le livre 7 de la République avait défini le modèle de Gouvernement idéal selon lui : les philosophes. 3 catégories de vie qualifiées dans l’ordre décroissant de désirabilité : être philosophe bios ethikos soit mener une vie contemplative c’est être affranchi des nécessités de la production de biens de survie pour l’espèce, de consommation (nourriture, élevage et éducation des enfants, soins au corps des autres) détruits par cette consommation. Celle et celles et ceux qui les assurent sont eux-mêmes hors du bios (les femmes, les serviteurs, les paysans attachés aux terres et les domestiques servant dans l’oikos , hommes et femmes libres ou esclaves C’est aussi ne pas avoir à se préoccuper d’agir comme législateur, administrateur ou combattant pour défendre la police, de diriger la cité, de pouvoir se consacrer à l’étude et à la philosophie être hors du monde pour penser et créer des œuvres de l’esprit. Être citoyen qui gère les affaires de la société ou part la défendre à la guerre politis dans l’action politique en relation avec les autres être artisan. Celui qui crée des objets durables de ses mains et les vend (commerce). Il durent plus longtemps que les produits qui permettent de se nourrir mais ne sont pas impérissables. « Zoê » : ceux qui sont dirigés, assujettis, contraints au travail du corps (le labor en latin qui a donné laboureur ou laborieux en français). D'après Hannah Arendt ce travail du corps pénible laborieux (1) et le bios constitue l’œuvre des mains l’artisanat qui nécessite la maîtrise de la technique et des outils et les œuvres de l'esprit (2). Travail en latin = tripallium signifie à la fois accouchement les contractions douloureuses qui permettent la mise bas chez les mammifères et l’accouchement (la délivrance) chez les femmes, et aussi une forme de torture (tripallium). La femme dans la conception d'Aristote, fait partie de la « Zoê », de même que les esclaves. Remplir uniquement les tâches du travail Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 5 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. du corps telle est leur mission nourrir, élever, soigner. Femmes et serviteurs et fermiers n'ont pas accès au travail de leurs mains ils sont cantonnés dans la sphère de la famille (oikos) et privés d’accès à l’espace commun (agora/ forum chez les romains) celui où l’on entre en relation avec les autres, les égaux, pour marchander, acheter vendre bref commercer au sens propre ou débattre de l’avenir de la Cité bref commercer au sens figuré. Ils ne peuvent accéder à l'action politique de la Cité. La différence, c'est que les esclaves et les femmes comme les enfants même futurs citoyens sont confinés dans la sphère domestique et dans la sphère privée. Les relations entre les individus sont fondées sur une inégalité absolue, une inégalité fonctionnelle et naturelle entre le maître et les esclaves (qui veut dire tous les serviteurs et pas seulement ceux de condition non libres) entre eux la dépendance est mutuelle et le maître gouverne en despote (despotes) toutes les humains vivants sur son domaine il exerce un pouvoir paternel (hegemon) comme sur ses enfants tandis que l’unité de base de production des enfants et de reproduction de l’espèce le couple est en théorie une codépendance entre égaux même si la femme n’est pas considéré comme le principe créateur de l’espèce mais bien la semence masculine. Les latins transposeront cette notion sous celle du « paterfamilias ». Le maître (despote) libéré du travail du corps (2) est le seul à avoir accès à l’espace public à l’agora libéré de la nécessité de travailler (car la maisonnée travaille pour lui) et de produire des objets manufacturés (artisans). Au XIXème siècle, l’humain se distingue entre ceux qui travaillent de leurs mains (ouvriers désormais d’industrie et plus seulement artisans et paysans ce sont les cols bleus de l’uniforme de l’usine, ils sont tous pareils et interchangeables) et les cols blancs (ceux qui encadrent et dirigent d’autres personnes ne se salissent pas les mains ni les vêtements. On opposera ensuite Ceux qui exécutent (blue collar workers) / ceux qui commandent ou encadrent ( white- collars leaders puis workers) La main même de l’homme devient avec la première industrialisation (textile, travail du fer, charbonnage) et surtout la seconde (automobile), partie d’une machine comme dans le taylorisme avec le travail à la chaîne. L’humain machine c’est le travailleur industriel dans l’organisation du travail qui préconise la division du travail minutée sur un même lieu (la fabrique devenue usine) et la spécialisation des gestes et non plus simplement celle des tâches afin d’augmenter la productivité en permettant une accélération de la cadence à laquelle les gestes sont accomplis. Il y a une mécanisation du travail et l'invention de l'usine et des chaînes. Charlie Chaplin (Les Temps modernes) homme machine qui fait le même geste à une cadence réglée sur celle de la machine. Ainsi, une idée de mécanisme et élément spatialement positionne face à la machine => on introduit la mesure du temps le chronométrage des gestes. https://www.youtube.com/watch?v=6n9ESFJTnHs F: Le fordisme : New Deal avec Roosevelt : nous allons être normés comme les produits que nous consommons et eux-mêmes standardisés et auquel nous pouvons accéder désormais, car le fordisme avec le New deal devient un keynesianisme qui consiste à augmenter les salaires revenus du travail pour dopper la croissance en augmentant la consommation. C’est cela le fordisme donner aux ouvriers des salaires qui leur permettent de participer à la consommation de produits standardisés qui sont abordables car les salaires sont alors plus élevé. Il y a la standardisation et le problème de l'usage des produits créés et consommer. https://www.youtube.com/watch?v=6_9qNgNGfPE La question n’est plus comment vivre avec les machines ? Mais comme vivre sans machines à laver, à conduire, à écrire, à traduire, à compter, à planifier, à payer, à lire, à communiquer en temps réel, instantanément des images, des textos, des vidéos, à rédiger des dissertations, des discours, des CV…. Qui demande de nouvelles compétences ? Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 6 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. B. la distinction entre l’humain (anthropos) et le vivant non humain : la distinction logos/phone ne recouvre pas vraiment la distinction entre l’homme et l’animal telle que nous l’envisageons encore aujourd’hui 1. Phonè et logos L'animal est sensible à la douleur et au plaisir qu’il exprime par le cri, la voix (phone) permet d’exprimer le sentiment d’agréable ou de désagréable, de bon ou de mauvais au sens propre. Seul le logos donne accès à la joie et à la peine et surtout à la distinction entre le juste et l’injuste, (le bien et le mal ne sont pas des catégories d’entendement antique mais médiévales et modernes associées à la pensée chrétienne). N’ont accès au juste et à l’injuste à leur perception et à leur compréhension que les vivants doués du langage articulé et intelligible (ceux qui parlent et donc pensent en grec). Le barbare (barbaros dont le langage est pareil au chant des oiseaux, qui pépie, tweet en anglais) donc incompréhensible pour le polites Grec comme l’enfant qui babille n’est donc pas doué du logos donc de la capacité à penser. Ce sont des anthropos mais pas des politis. 2. Les barbares sont-ils des animaux ? Barbaros : Celui dont la parole est semblable au chant des oiseaux : on en a tiré barbares (qui veut dire étranger en grec) celui dont la parole au sein de la cité n'est pas écoutée car on ne comprend pas sa langue et l’on considère que comme les femmes ou les animaux il n’est pas doté du logos (langage articulé) mais juste de la phoné (la voix) comme les animaux qui peuvent crier de plaisir ou de douleur mais pas articuler des sons et donc articuler des mots et des idées et donc penser ou faire de la politique. « L'attitude la plus ancienne, et qui repose sans doute sur des fondements psychologiques solides puisqu'elle tend à réapparaître chez chacun de nous quand nous sommes placés dans une situation inattendue, consiste à répudier purement et simplement les formes culturelles : morales, religieuses, sociales, esthétiques, qui sont les plus éloignées de celles auxquelles nous nous identifions. "Habitudes de sauvages cela n'est pas de chez nous ", " on ne devrait pas permettre cela ", etc., autant de réactions grossières qui traduisent ce même frisson, cette même répulsion, en présence de manières de vivre, de croire ou de penser qui nous sont étrangères. Ainsi l'Antiquité confondait-elle tout ce qui ne participait pas de la culture grecque (puis gréco-romaine) sous le même nom de barbare ; la civilisation occidentale a ensuite utilisé le terme de sauvage dans le même sens. Or derrière ces épithètes se dissimule un même jugement : il est probable que le mot barbare se réfère étymologiquement à la confusion et à l'inarticulation du chant des oiseaux, opposées à la valeur signifiante du langage humain ; et sauvage, qui veut dire « de la forêt », évoque aussi un genre de vie animale, par opposition à la culture humaine. Dans les deux cas, on refuse d'admettre le fait même de la diversité culturelle ; on préfère rejeter hors de la culture, dans la nature, tout ce qui ne se conforme pas à la norme sous laquelle on vit. [...] Ainsi se réalisent de curieuses situations où deux interlocuteurs se donnent cruellement la réplique. Dans les Grandes Antilles, quelques années après la découverte de l'Amérique, pendant que les Espagnols envoyaient des commissions d'enquête pour rechercher si les indigènes possédaient ou non une âme, ces derniers s'employaient à immerger des blancs prisonniers afin de vérifier par une surveillance prolongée si leur cadavre était ou non, sujet à la putréfaction. Cette anecdote à la fois baroque et tragique illustre bien le paradoxe du relativisme culturel (que nous retrouverons ailleurs sous d'autres formes) : c'est dans la mesure même où l'on prétend établir une discrimination entre les cultures et les coutumes que l'on s'identifie le plus complètement avec celles qu'on essaye de nier. En refusant l'humanité à ceux qui apparaissent comme les plus "sauvages" ou " barbares " de ses représentants, on ne fait que leur emprunter une de leurs attitudes typiques. Le barbare, c'est d'abord l'homme qui croit à la barbarie. » Claude Lévi-Strauss, Race et Histoire (1961) 2.b Les humains sont des êtres vivants dans une cité, donc des animaux pas comme les autres Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 7 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. L'homme avec un grand H est pensé en tant qu'être humain humanisé et distinct des animaux depuis l’Antiquité. Les humains, les animaux, les plantes et les arbres appartiennent à la même catégorie de la Nature du naturel par opposition à la Culture et à la technique (tekhne) l’artificiel. Cette catégorie de la nature c’est celle des êtres vivants (zoon), qui ont pour particularité en tant qu’individus dans chaque espèce d’être sexués, de naître, grandir, se reproduire et mourir et de faire perdurer ainsi l’espèce humaine comme celles des différents animaux non humains ou encore des plantes dont le développement est pensé de manière anthropomorphique jusqu’au XVIIIème siècle sur le modèle de la croissance, de la reproduction des mammifères en cherchant à distinguer par exemple les fleurs mâles et femelles et en considérant le fruit comme un produit d’une génération sexuée) et de la reproduction des animaux. Cela permet de distinguer les humains des dieux qui eux sont immortels et identiques à eux-mêmes ils ne grandissent et ne gagnent pas en force avant de s’affaiblir et de disparaître. Ils demeurent tels éternellement. Cela les différencie aussi des éléments non vivants et non divins les particules élémentaires dont pour les philosophes présocratiques sont composés les êtres vivants : le feu, l’eau, l’air, la terre et l’éther (milieu des Dieux). Selon les philosophes antiques grecs et romains c’est le fait de disposer d’un langage (logos) qui permet de communiquer non seulement des informations mais aussi d’exprimer des émotions complexes (joie, tristesse) et pas seulement des émotions primaires peur, envie, plaisir, douleur ce que les animaux font aussi car ensemble ils partagent la voix (phonè). A l’époque moderne les animaux seront même philosophiquement sortis du règne du vivant pour être pensés en opposition à l’humain comme des machines, des automates sans volonté, sans émotions complexes et surtout sans raison. Cette nouvelle distinction apparaît avec Descartes : « je pense, donc je suis » et est pensé par lui comme un être rationnel, pensant, capable de calcul de réflexion (voir annexe 3). Auparavant l’homme se définit négativement comme n’étant pas de nature divine, donc à l’âme éternelle et sans corps mais mortelle et doué du logos et de la faculté de penser et la notion est vague. Dans l’Antiquité seuls les citoyens (civis en latin polites en grec) sont des hommes accomplis et libres qui peuvent décider du devenir de la Cité (Polis) Derrida la bête et le souverain 3.Quel est le propre de l’homme ? Réponse d'Aristote (le langage articulé le logos) et des anthropologues préhistoriens et de Diogène de Sinope un bipède sans poils (relaté par Platon) ou un chien: la bipédie (pas le propre de l'homme certains singes marchent sur deux membres) et le rire ( RABELAIS) Henri Bergson après François Rabelais => le rire et donc la capacité à exprimer les émotions= le propre de l'homme). Nous marchons sur deux pieds la bipédie et le langage articulé causé par un changement anatomique ; nous avons un larynx qui est descendu ce qui ns permet d'avoir un langage articulé avec des diphtongues. Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 8 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. Conduit vocal du babouin et de l’homme moderne. On retrouve les mêmes articulateurs - lèvres, langue... -, mais chez l’homme, le larynx est positionné plus bas. Laboratoire de psychologie cognitive (CNRS/AMU) et GIPSA-lab (CNRS/UGA) Partager « La théorie de la descente du larynx est une théorie très puissante, qui se propose d’expliquer pourquoi l’homme peut parler, à la fois de par son évolution en tant qu’espèce, mais aussi du fait de son évolution en tant qu’individu », raconte Louis-Jean Boë, spécialiste de la parole (aujourd’hui retraité) au Gipsa-Lab1, qui cosigne et a dirigé une vaste étude(link is external) publiée ce jour dans Science Advances. En effet, le bébé, comme le singe, possède un larynx haut dans ses premières années d’existence, avant que celui-ci ne descende plus bas dans le cou – sous l'effet de la croissance du crâne qui tend à s’allonger chez l’être humain. « Le problème, comme nous le montrons après vingt années de recherches pluridisciplinaires, c’est que cette théorie ne repose plus sur aucun fondement valide. » https://lejournal.cnrs.fr/articles/depuis-quand-parlons-nous Cela fait-il de nous des humains au sens d’Aristote cela a peu d’intérêt si ce langage articulé ne devient pas parole de savoir et de décision du juste bien, du dikaion du dire le droit qui se confond avec le juste ? Les pleurs comme signe de notre humanimalité et de notre unicité ? « Or, les larmes éphémères, qui s'effacent de la mémoire souvent quand on les a «pleurées», disent bien cela : ce qui vous arrive en intensité de vie quand elles coulent n'arrive pas à quelqu'un d'autre au même moment. C'est pourquoi celui qui vous voit pleurer passe par un stade de surprise, d'émoi, voire de désorientation. Personne ne peut pleurer à votre place, même s'il existe une contagion des larmes, ou une communion. Vos larmes vous ramènent toujours à ce que vous avez d'irremplaçable. Qu'est-ce qu'on fait ensuite de ces larmes ? Comment accepter qu'on soit défait par elles ? Qu'est-ce qu'elles suggèrent de notre attache à la vie ? C'est ce que j'ai cherché… (…) Ce mécanisme physiologique est vital. Il permet de lubrifier, nettoyer les yeux, de les faire cligner. Mais, lorsqu'il s'agit de chagrin, on assiste à une sorte de rééquilibrage : si je suis terrassé par la tristesse au point de pleurer, ces pleurs sont aussi une façon plastique de composer avec l'événement tragique. D'apporter un soulagement. Il y a donc un cheminement dans les larmes, et j'en vois trois origines. Il y a ce que j'appelle les pleurs du mal – douleur physique ou psychique –, puis les larmes de la disparition – d'un être, d'une qualité humaine fondamentale, de sa santé –, et enfin les larmes de la rupture, à tous les sens du terme. Il y a déjà, par le fait de pleurer, une tentative de se remettre de l'événement. Pleurer, ce n'est pas seulement être décomposé par ; c'est aussi désapprendre la maîtrise, revenir à une vie sensible, et tenter Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 9 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. une première délivrance. Du passé, regarder déjà vers le futur. (…)Pleurer peut avoir comme futur non pas la déploration – je pleure sans fin –, mais l'imploration – je demande avec des pleurs, dit l'étymologie. C'est alors une demande de justice, de réparation qui s'opère. Une demande existentielle, exprimée avec le corps de celui ou celle qui pleure. (…) Les larmes d’Obama dans un discours cherchant à encadrer l'accès aux armes à feu (2016), sont des larmes de deuil. C'est assez différent avec celles de Greta Thunberg, qui pleure un processus en cours, à savoir la disparition des espèces animales et végétales sous le coup du réchauffement climatique, dont nous sommes les contemporains. Quel futur peut-on envisager à ces larmes, nous qui en sommes les témoins ? Comment les larmes peuvent-elles devenir des armes pour les personnes qui n'en ont pas d'autres, voilà bel et bien la question qui est posée. https://madame.lefigaro.fr/bien-etre/psycho/oser- pleurer-ce-que-nos-larmes-revelent-de-nous-20240324 4. Tous sensibles ? animaux humains et non humains L’animal a-t-il la phonè (la parole pas l’I-phonè) le tweet sur X car il twitte (gazouille) ou un langage (logos) distinction aristotélicienne le langage étant le propre des hommes libres ? a. Le Parlement français a voté un texte en date du 30 janvier 2015 donnant à l'animal la qualité d'être sensible et non plus de chose mais son traitement relève encore du droit des biens et non du droit des personnes (annexe 2). Dans le code rural, les animaux de ferme (les lapins de garenne, les pigeons et colombes d’élevage, les ruches à miel) étaient considérés comme des immeubles tout comme les granges ou les étables d'une exploitation agricole. Ils sont des immeubles qui se vendaient avec le fonds de l’exploitation. Lapin=> dans un clapier ou dans un champ n'est pas un immeuble ne ressemble pas à un immeuble pas plus qu’il ne porte une montre à gousset une redingote ou des gants blancs. C’est ce qu’on appelle une fiction juridique. On utilise des fictions en droit pour raisonner ce sont une variété de concepts comme les présomptions. Le sens commun du mot fiction désigne, selon le dictionnaire Larousse, une « création de l’imagination ; ce qui est du domaine de l’imaginaire, de l’irréel ». 2) La fiction s’oppose ainsi au réel. Partant de cette définition, on pourrait être tenté de définir la fiction en droit comme tout écart entre le droit et la réalité, entre la vérité en droit et la vérité en fait. Dans cette définition très large, il y aurait fiction juridique chaque fois que le droit nie ou déforme le réel. Ainsi, si l’on s’en tient aux textes de notre Code civil, un enfant né d’une relation incestueuse ne peut pas avoir de père sur le plan juridique, alors que biologiquement il a un père. Dans le vocabulaire juridique, la notion de fiction reçoit toutefois une définition plus étroite. On peut se référer au célèbre Vocabulaire juridique publié sous la direction du Professeur Gérard Cornu et de l’Association Henri Capitant. La fiction y est définie comme un 3) « artifice de technique juridique (en principe réservé au législateur souverain), ‘mensonge de la loi’ (et bienfait de celle-ci) consistant à ‘faire comme si’, à supposer un fait contraire à la réalité, en vue de produire un effet de droit ». Ainsi, l’enfant simplement conçu est considéré comme étant déjà né en vue de bénéficier de certains droits, notamment celui d’hériter. Il en résulte que « le législateur met sciemment le faux à la place du vrai ». 4) en vue de produire un effet de droit. Christine Biquet, « Les fictions en droit », www.hanyang.ac.kr/home_news/H5EAFA/0002/101/.../30-1-11.pdf, consulté le 09/09/2015 à 20H37 b. Animaux humains et animaux humains : un droit de vie et de mort ? « Il ne s'agit pas seulement de demander si on a le droit de refuser tel ou tel pouvoir à l'animal (parole, raison, expérience de la mort, deuil, culture, institution, technique, vêtement, mensonge, feinte de la feinte, effacement de la trace, don, rire, pleur, respect, etc. – la liste est nécessairement indéfinie, et la plus puissante tradition philosophique dans laquelle nous vivons a refusé tout cela à l'« animal »), il s'agit aussi de se demander si ce qui s'appelle l'homme a le droit d'attribuer en toute rigueur à l'homme, de s'attribuer, donc, ce qu'il refuse à l'animal, et s'il en a jamais le concept pur, rigoureux, indivisible, en tant que tel. » L'Animal que donc je suis est un livre du philosophe Jacques Derrida publié en 2006 aux éditions Galilée. Il est connu en particulier pour avoir soutenu l'idée de génocide animal1L'Animal que donc je suis, paris Galilée, (p. 185), Jacques Derrida. Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 10 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. II. La Cité (polis) et la famille (oikos) La polis lieu naturel de la vie des Hommes ? Polis ethnos et oikos Aristote a expliqué que la nature de l'Homme est de vivre en groupe mais pas n'importe lesquels dans des familles, tribus ou dans la polis (traduit en latin par civitas, civis qui a donné Cité au sens de regroupement d’un nombre relativement important quelques milliers de personnes qui vivent sous le même gouvernement en suivant les mêmes lois, les mêmes règles (en latin la ville au sens actuel se dit urbs qui a donné urbain) … qui sont les premières formes d'associations humaines. Pour lui vivre ensemble dans la Polis avec des règles est naturel, comme vivre en famille ou sur un même territoire en tribus. Et ce rassemblement est commun aux êtres humains et aux animaux qui ensemble forment le zoon. Polis ethnos et oikos La polis et la famille. « la polis se distingue de la famille en ce qu'elle ne connaît que des égaux alors que la famille (oikos) connaît des inégalités ». A. Une minorité de citoyens vivant dans la Cité quand la majorité est confinée dans l’Oikos 1.Le confinement dans l’oikos ou la privation de l’agora Citation de référence : « L'homme est un vivant/ animal politique Anthropos, Zoon (phusis) politikon » (Aristote) Dans l'Antiquité la nature de l’humain qui sont entre les dieux et les animaux c’est à la différence des premiers d’être mortels et des seconds de ne pas être considérés comme des proies et des outils. La notion d'Homme (anthropos) n'a aucune pertinence puisqu'il n'y a pas différence de Nature (phusis) entre l'Homme et l'animal : les êtres humains font partie d’un ensemble comprenant aussi les animaux et les végétaux, les plantes : la phusis en grec (qui a donné physique en français). La société antique est alors basée sur la différenciation parmi les humains (anthropoï) entre ceux qui vivent une bios politikos (traduit en latin par citoyens ceux qui sont dans la cité (polis en grec) et les non citoyens qui appartiennent à la polis mais se trouvent confinés dans l’oikos (la maison, le foyer, la famille, l’exploitation agricole) sans pouvoir accéder à l’agora (l’espace public) et non entre l’homme et l’animal ou l’homme libre de condition servile et l’esclave l’ilote à Sparte, le doulos à Athènes. Mais la condition servile ne concerne pas que les esclaves et leurs descendants qui appartiennent tout entier à un maître elle s’étend aux dépendants ceux qui ne sont pas considérés comme libres. ILOTE, n. m. XIXe siècle. Emprunté, par l'intermédiaire du latin ilotae, « ilotes », du grec heilôs, heilôtos, « ilote ». ☆1. ANTIQ. GRECQ. À Sparte, nom des esclaves représentant d'anciennes populations vaincues et appartenant à la cité. Exemples : ‘Les révoltes des ilotes’. « Les Spartiates, pour dégoûter leurs enfants de la boisson, enivraient les ilotes ». Expr. fig. et vieillie. Ilote ivre, personnage qui, par le spectacle qu'il donne de ses vices, en détourne Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 11 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. les autres. ☆2. Par anal. Personne maintenue dans un état de soumission, de misère et d'ignorance extrêmes. (On écrit aussi Hilote.) https://www.cnrtl.fr/definition/academie9/ilote. La notion d'Homme quant à elle sera dès les XVII et XVIIIème siècle liée à la notion d’individu d'appartenance à une société civile considérée comme civilisée car occidentale (societas civilis) sinon l’homme qui n’y appartient pas est considéré comme le Sauvage (bon comme chez Rousseau ou cannibale comme chez Montaigne). « Comme le souligne Dominique Colas, la première occurrence historique de la société civile apparaît au ive siècle avant J.-C., chez Aristote, dans la Politique. La koinônia politikè (communauté politique) grecque et sa traduction latine, societas civilis, donneront naissance à notre expression. Déjà chez Aristote, la société civile /communauté politique fonctionne en opposition à d'autres types de communauté (la famille, le peuple). Il s'agit ici de définir la forme la plus haute d'organisation, celle qui accomplit pleinement la nature sociale et politique de l'homme. La valorisation est donc très claire. À partir de là, et par un jeu complexe de transmissions et traductions, le terme évolue dans la topographie des systèmes conceptuels successifs. Ainsi, chez saint Augustin, la société civile se distingue de la cité de Dieu : le terrestre, séparé du céleste, lui est subordonné, sans pour autant que son existence propre soit remise en cause. En revanche, chez les théoriciens contractualistes qui suivirent (Hobbes, Rousseau), le civil s'oppose non plus au céleste mais au « naturel ». La société civile représente alors, en tant que communauté organisée, la sortie de l'état de nature. En ce sens, société civile et État sont identiques. Contrairement à une idée répandue, ces deux entités ne sont donc pas distinctes depuis les débuts de la pensée politique occidentale. » http://www.universalis.fr/encyclopedie/societe-civile/1-histoire/# Les hommes (anthropos) et les animaux appartiennent tous au zoon (qui a donné zoo, zoologie en français) et une partie minoritaire d’entre eux au bios qui a donné biologie en français deux mots pour désigner le vivant, la vie. Ce qui va différencier l'Antiquité et l’Époque contemporaine est que dans l'époque contemporaine, il y a un basculement : agir dans l’espace public une société politique n'est plus réservé à une minorité masculine libre et propriétaire de terres et d’une vaste maisonnée qui a le loisir de gouverner mais cela va être accessible à tous les hommes puis aussi aux femmes à partir de la seconde moitiéescla du XXème siècle. Pour Aristote il y a deux espaces pour les êtres humains l'oïkos (qui a donné économie) c'est dire le foyer ou la maison (aussi traduit par la famille ou la tribu : oïkos) et la polis qui désigne la cité. Cependant il y a des interactions entre ces deux espaces pour que la société puisse fonctionner. Au départ Aristote pose dans La Politique que l'Homme est un animal politique. Animal traduit le mot zoon qui a donné zoologie. Cela signifie que l'Homme appartient au règne du vivant ( zoon ou bios ) mais aussi à la polis qui a donné politique. Pour lui les Hommes ou anthropos sont des membres du règne du vivant (de la phusis) comme les animaux ou les plantes. Anthropos rentre dans la catégorie du bios ou zoon donc du vivant et donc de par sa nature cet Homme vit naturellement dans des groupements qui sont la famille ou la tribu oikos et la cité polis. Il a donc deux groupes dans les anthropos, ceux qui restent confinés dans l’oïkos et ceux qui peuvent en sortir pour participer aux décisions politiques de la polis. L'idée d'Aristote est que ce regroupement dans la Cité (polis) a pour but le juste bien (eu zen) et que viser ce juste bien cet équilibre c’est cela la justice générale (Dike) , à savoir que chacun puisse à la place qui lui est assignée dans la Nature (le cosmos) : certains hommes sont nés pour être libres d'autres pour être esclaves (notamment les étrangers des pays vaincus par les grecs, mais aussi les femmes, les domestiques même libres qui ont le même statut que les animaux domestiques utilisés pour le travail des champs). La fonction des femmes par exemple est de participer au devenir de la cité grâce à la reproduction c'est de là que vient le terme « travail » en latin lors de l'accouchement. (Dire de quelqu’un qu’il est laborieux encore aujourd’hui consiste à insister sur la pénibilité visible des tâches qu’il accomplit) Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 12 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. 2. Les distinctions entre les hommes et leurs modes de vie naturels selon leur naissance 1. Le travail (du corps), l’ouvrage (le travail de ses mains) et l’œuvre (création de l’esprit) ou oikos, tekhne et polis ou philosophia En latin on a la distinction entre le travail du corps (manger, dormir et par extension produire les biens nécessaires à la vie (la nourriture, les vêtements) et la préparer ou les confectionner, porter les enfants) labor et le travail qui n'est plus le travail du corps mais celui des mains de l’artisan qui s'appelle le negocium qui a donné le négoce et donc le commerce. Le ne-gocium est une privation de l'otium qui a donné le mot oisiveté, donc du loisir de s’occuper d’autre chose que de produire des ressources naturelles (travail du corps) ou des outils ou des objets (ceux-ci sont dans la Tekhne dans l’artisanat). Ceux qui sont dans l'otium sont ceux qui ont le luxe d'aller réfléchir et décider de l'avenir de la cité parce que d'autres sont dans la tekhne et le labor. Tout comme dans l'Antiquité ceux qui vont se battre sont ceux qui peuvent être formés et se payer une formation militaire ceux qui peuvent réfléchir sont les personnes qui peuvent s'appuyer sur d'autres personnes pour leur assurer leur otium par leur labor. Ce sont les esclaves, les femmes et les domestiques. Hommes et femmes sont complémentaires et la femme est dépendante de l’Homme qui en est le maître de par leur nature Il en va de même pour l’esclave (dans la théorie de l’esclavage naturel que développe Aristote) 3. Autarkia et autonomia L’oikos sert à assurer le nécessaire pour la vie matérielle qui est non une fin mais un moyen. Elle est le moyen de vivre autrement que simplement vivre physiquement biologiquement pour vivre en harmonie ( to eu zen) en équilibre et atteindre ce eu zen qui est la définition du Bonheur B la question de l’esclavage et des relations entre les citoyens et les non citoyens 1. L’esclavage est naturel ou conventionnel : le droit naturel antique et la justification naturelle de l’esclavage Théorie de l’esclavage chez Aristote Aristote et l'esclavage par Marie-Paule Loicq-Berger http://bcs.fltr.ucl.ac.be/FE/13/esclavage.htm 1) Énoncé de la thèse générale (Politique, 1252a30 ss. ; 1254a17) a) proposition principale : au point de départ, il y a la nature (φύσις/phusis) qui crée d’une part des êtres que leur intelligence destine à commander, d’autre part des êtres que leur seule force corporelle voue à l’obéissance ; b) postulat corollaire : tous deux, commandants et commandés, ont même intérêt. Le sujet (rapports maître-esclave) sera étudié dans une perspective à la fois théorique et pratique, sans escamoter les divergences de vue concernant le fondement — science ou violence — de l’autorité. Aristote propose ici une première définition de l’esclave : c’est un objet animé (κτῆμά τι ἔμψυχον Ktema ti amphukon), un instrument destiné à l’action (ὄργανον πρακτικόν/. Organon pratikon), qui commande aux autres instruments, un bien appartenant en propriété exclusive à son maître. 2) Développement de cette thèse (Politique, 1254a21-1255a2) L’esclavage est conforme à une ordonnance générale et avantageuse de la nature. Celle-ci destine à cet usage (et voici une seconde définition de l’esclave) l’être capable de percevoir la raison sans pour autant la posséder en propre (κοινωνῶν λόγου τοσοῦτον ὅσον αἰσθάνεσθαι ἀλλὰ μὴ ἔχειν), et doté d’une vigueur corporelle singulière. Le maître, quant à lui, est par nature doté d’intelligence et d’aptitude à la vie civique. On admettra toutefois que, dans cette sélection intellectuelle et corporelle, la nature n’est pas à l’abri d’erreurs ; le Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 13 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. maître doit avoir les qualités du maître et l'esclave, celles de l'esclave, néanmoins « le contraire se produit souvent » : συμβαίνει δὲ πολλάκις καὶ τοὐναντίον (1254b22). Au terme de cette démarche circulaire, la conclusion de (2) rejoint (1) : l’esclavage est naturel, juste et bénéfique. 3) Controverse (Politique, 1255a3-1255b15) Cette « évidence » fait l’objet d’une contestation dont il est en un sens (τρόπον τινά) impossible de nier le bien- fondé. C’est qu’en réalité le terme esclave s’applique à deux situations différentes, un statut de nature (φύσει) et un statut légal ou de convention (νόμῳ) : c’est à propos de ce dernier qu’interviennent des divergences d’opinion. En effet, il est communément admis (ὁμολογία/homologuia) que, les prises de guerre appartenant au vainqueur, les vaincus soient réduits en esclavage ; disposition conventionnelle, c’est-à-dire légale : les Grecs, on le sait, reconnaissent l’autorité de la loi fondée sur la coutume. Disposition, toutefois, que nombre de juristes récusent, alors que d’autres, même des sages, l’admettent. Voilà posé le problème du droit du plus fort. Le texte, à cet endroit, apparaît embarrassé, faute de différencier et de départager nettement les thèses en présence. C’est que la notion de force est susceptible de s’amalgamer avec celle de vertu et, si l’on ne prend soin de préciser la portée exacte de ces termes, aussi ambigus en grec qu’en français classique, on arrive à la conclusion alternative que le droit réside soit dans la force violente (βία), soit dans la force morale, c’est-à-dire la qualité de l’intention (εὔνοια, « bon vouloir, bienveillance »). Au reste, l’esclavage résultant de la guerre ne peut, aux yeux mêmes de ses partisans, être jugé équitable dans le cas où cette guerre est injuste — et dès lors qu’il s’agit de vaincus grecs, car la servitude en pareille circonstance peut être appliquée à des barbares. Conformément au préjugé — que partage encore le Stagirite — de l'indubitable supériorité hellénique, les Barbares, en effet, sont des peuples « naturellement voués au despotisme », c'est-à-dire à l'esclavage, de par leur infériorité intellectuelle et éthique. Dans ce cas, la nature ratifie opportunément la convention. Touchant l’esclavage par nature à l'intérieur du monde grec, reste tout de même à poser une question existentielle, question dont la portée réelle est finalement esquivée par une réponse toute théorique : dans le cas (mais dans ce cas seulement, et il n’est pas général) où existent des êtres conditionnés par la nature pour être respectivement maître et esclave, cette relation sert les intérêts des deux parties et produit une amitié réciproque. 4) Questions annexes (Politique, 1255b21ss. ; 1259b22ss. ; 1260a35ss.) Science et vertu existent-elles chez l’esclave ? Bien que ce ne soit pas la science mais la nature qui façonne maître et esclave, tous deux possèdent néanmoins une science propre : celle du premier est d’utiliser à bon escient des esclaves dont tout le savoir réside dans l’exacte formation à la pratique du service. Quant à la vertu au sens plénier du terme, Aristote prétend d'abord généraliser le problème (la vertu est-elle relative à la fonction ?) pour se résoudre finalement à concéder à l’esclave le minimum de moralité indispensable à l’exécution correcte de sa tâche, minimum que lui inculquera son maître par la voie du raisonnement. Pour Aristote le principe qui relie les différentes catégories d’Hommes inégaux naturellement entre eux est la philia c'est à dire l'amitié, il y a une complémentarité et une réciprocité entre ceux qui sont dans l'oïkos, qui est le travail du corps et ceux qui sont dans la tekhne, les artisans et commerçants et ceux qui sont dans la polis, les citoyens. Ceux qui sont dans la polis sont donc ceux qui décident pour les personnes qui sont dans l'oïkos et dans la tekhne les bonnes règles pour vivre ensemble. Les non citoyens ont besoins des citoyens pour obtenir des règles et les citoyens ont besoin des non citoyens pour subvenir à leur besoins : chacun a ce qui lui revient en fonction de sa place : « A chacun selon son statut » c’est la devise très différente de nos démocraties modernes où la formule clé est « à chacun selon son mérite » et jamais « à chacun selon ses besoins »… 2. L’amitié (philia entre citoyen) entre le maître et l’esclave et dans le couple et la prudence (phronesis) du citoyen La complémentarité ou philia selon Aristote (philosophie veut dire amour, amitié, affection pour la sagesse : bienheureuses les Sophie leur nom veut dire sage !) Philia : Être dans l'amitié. Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 14 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. Le maître a besoin de l'esclave pour avoir la richesse suffisante qui lui permet d'être citoyen et donc de bien s’occuper de la protection de la Cité (polis) tout comme l'esclave a besoin du maître pour pouvoir vivre dans une cité prospère qui ne le traite pas comme une bête de somme, ne le maltraite pas, ne le crève pas à la tâche. 3. Une nouvelle relation la dialectique du maître et de l’esclave Le philosophe allemand du XIXème siècle Hegel (1770-1831) dans La Phénoménologie de l’esprit fera une parabole des relations de complémentarité et d’interdépendance entre le maître et l’esclave (https://fr.wikipedia.org/wiki/Dialectique_du_ma%C3%AEtre_et_de_l'esclave Il y a une dialectique de la relation maître/esclave : le maître a besoin de l'esclave au moins autant que l'esclave a besoin du maître. Et si l’esclave devient maître à son tour il ne saura plus rien faire seul et aura besoin du maître devenu l’esclave pour survivre. Le maître a droit de mort sur son esclave mais dépend de lui pour sa vie quotidienne donc va le traiter avec ménagements. Hegel et la dialectique du maître et de l’esclave : « Il semblait que, dans et par le travail, l'Esclave est asservi à la Nature, à la chose, à la « matière première », tandis que le Maître, qui se contente de consommer la chose préparée par l'Esclave et d'en jouir, est parfaitement libre vis-à-vis d'elle. Mais en fait il n'en est rien. Certes, le Désir du Maître s'est réservé le pur acte-de nier l'objet en le consommant, et il s'est réservé - par cela même - le sentiment de-soi-et-de-sa-dignité non mélangé éprouvé dans la jouissance. Mais pour la même raison cette satisfaction n'est elle-même qu'un évanouissement ; car il lui manque l'aspect objectif-ou-chosiste, c'est-à-dire le maintien-stable. Le Maître, qui ne travaille pas, ne produit rien de stable en dehors de soi. Il détruit seulement les produits du travail de l'Esclave. Sa jouissance et sa satisfaction restent ainsi purement subjectives : elles n'intéressent que lui et ne peuvent donc être reconnues que par lui ; elles n'ont pas de « vérité », de réalité objective révélée à tous. Aussi, cette « consommation », cette jouissance oisive de Maître, qui résulte de la satisfaction « immédiate » du désir, peut tout au plus procurer quelque plaisir à l'homme ; elle ne peut jamais lui donner la satisfaction complète et définitive. Le travail est par contre un Désir refoulé, un évanouissement arrêté ; ou en d’autres termes, il forme et éduque. Le travail transforme le Monde et civilise, éduque l'Homme. L'homme qui veut - ou doit - travailler, doit refouler son instinct qui le pousse à « consommer » « immédiatement » l'objet « brut ». Et l'esclave ne peut travailler pour le Maître, c'est-à-dire pour un autre que lui, qu'en refoulant ses propres désirs. Il se transcende donc en travaillant ; ou si l'on préfère, il s'éduque, il « cultive », il « sublime » ses instincts en les refoulant. D'autre part, il ne détruit pas la chose telle qu'elle est donnée. Il diffère la destruction de la chose en la transformant d’abord par le travail ; il la prépare pour la consommation ; c'est-à-dire il la « forme ». Dans le travail, il transforme les choses et se transforme en même temps lui-même : il forme les choses et le monde en se transformant, en s'éduquant soi-même ; et il s'éduque, il se forme, en transformant des choses et le Monde. » Hegel, La Phénoménologie de l’esprit, 1807, trad. commentée par A. Kojève dans Introduction à la lecture de Hegel, Gallimard, 1967, p. 28. "Le Maître force l'Esclave à travailler. Et en travaillant, l'Esclave devient maître de la Nature. Or, il n'est devenu l'Esclave du Maître que parce que – au prime abord – il était esclave de la Nature, en se solidarisant avec elle et en se subordonnant à ses lois par l'acceptation de l'instinct de conservation. En devenant par le travail maître de la Nature, l'Esclave se libère donc de sa propre nature, de son propre instinct qui le liait à la Nature et qui faisait de lui l'Esclave du Maître. En libérant l'Esclave de la Nature, le travail le libère donc aussi de lui-même, de sa nature d'Esclave : il le libère du Maître. Dans le Monde naturel, donné, brut, l'Esclave est esclave du Maître. Dans le Monde technique, transformé par son travail, il règne – ou, du moins, règnera un jour – en Maître absolu. Et cette Maîtrise qui naît du travail, de la transformation progressive du Monde donné et de l'homme donné dans ce Monde, sera tout autre chose que la Maîtrise "immédiate" du Maître. L'avenir et l'Histoire appartiennent donc non pas au Maître guerrier, qui ou bien meurt ou bien se maintient indéfiniment dans l'identité avec soi-même, mais à l'Esclave travailleur. Celui-ci, en transformant le Monde donné par son travail, transcende le donné et ce qui est déterminé en lui-même par ce donné ; il se dépasse donc, en dépassant aussi le Maître qui est lié au donné qu'il laisse – ne travaillant pas – intact. Si l'angoisse de la mort incarnée pour l'Esclave dans la personne du Maître guerrier est la condition sine qua non du progrès historique, c'est uniquement le travail de l'Esclave qui le réalise et le parfait. [...] Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 15 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. Le travail transforme le Monde et civilise, éduque l'Homme. L'homme qui veut - ou doit - travailler, doit refouler son instinct qui le pousse à "consommer" immédiatement l'objet "brut". Et l'Esclave ne peut travailler pour le Maître, c'est-à-dire pour un autre que lui, qu'en refoulant ses propres désirs. Il se transcende donc en travaillant ; ou si l'on préfère, il s'éduque, il "cultive", il "sublime" ses instincts en les refoulant. [...] Il transforme les choses et se transforme en même temps lui-même : il forme les choses et le Monde en se transformant, en s'éduquant soi- même ; et il s'éduque, il se forme, en transformant des choses et le Monde." Alexandre Kojève, Commentaire de la Phénoménologie de l'Esprit (Section A du Chap. IV) in Introduction à la lecture de Hegel, 1947, éd. Gallimard, coll. Tel, pp. 28-30. http://philo52.com/articles.php?lng=fr&pg=804 Dans le monde antique on a une vision de la société et des relations entre les anthropos, organisées dans la polis où il y a des cercles de dépendances la femme dépend de l’homme pour gérer l’oikos dans sa dimension d’unité productive, les enfants du père, l’esclave du maître, et les citoyens protègent et agissent dans l’intérêt défini par eux des non citoyens. Cela fonctionne dans les cités grecques avec une étanchéité des catégories et des espaces moins dans l’empire romain parce qu'une personne peut passer d'une caste à l'autre : un esclave peut être affranchi voire adopté par son ancien maître une fois devenu libre et même s’il a le même âge que le maître et cela arrivera souvent et de façon croissante quand l’Empire s’étendra. Pour qu'une polis (une société politique) fonctionne dans la modernité (à partir de 1789) il faut que les personnes puissent changer de castes de groupes mais aussi qu’il y ait natalité importante pour pouvoir avoir une force de travail importante. ¨Pas dans le modèle antique de la démocratie athénienne ! Dans l’Antiquité la polis (le public) est valorisée par rapport à l'oïkos (le domestique, la sphère privée)!!! « La chrétienté va faire émerger l'idée selon laquelle l'Homme est une créature de dieu qui doit être régie par des concepts divins. Pour Saint Paul et Saint Augustin l'ordre divin va s'imposer sur Terre et chacun doit se soumettre au verdict de sa destinée d'être humain mortel, l'Homme est une créature divine. L'homme va donner le meilleur de lui-même quand il va s'enfermer dans le monastère ou le couvent pour consacrer sa vie à Dieu. En effet il s’extrait de la vie ordinaire pour devenir un servant de dieu. Bref cette conception valorise le privé le for intérieur, l’homme qui sort de la polis pour se consacrer à Dieu qui l’absorbe tout entier. » Un nouveau changement aura lieu à l’époque contemporaine où nous valorisons le privé dans sa sphère la plus étroite du rapport de soi à soi (l’intime) Cf Hannah Arendt Condition de l’Homme moderne) III Les fins de la polis : le bonheur est dans l’équilibre. Le bonheur est l’un des buts de cet animal politique qu’est l’homme c’est-à-dire des hommes vivant en société. Il peut s’agir d’un but collectif : le bien commun, la justice qui donne à chacun ce qui lui revient (suum cuique tribuere) ou ce dont il a besoin de par sa nature d’être vivant et mortel en matières de biens de première nécessité mais aussi de confort (philosophie matérialiste ou marxiste) ou d’accès aux loisirs, à la culture à la justice, aux libertés fondamentales (philosophie des droits humains) ui bien sûr va être envisagé différemment à l’époque moderne que dans les société antiques et à l’époque contemporaine (où le bonheur occidental est conçu comme un bonheur individuels d’individus poursuivant leurs désirs et leurs intérêts individuelles et cherchant à satisfaire les premiers en poursuivant sans relâche les Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 16 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. seconds à éprouver du plaisir de la jouissance de ces biens matériels. Le bien commun c’est celui de la Cité ou de la famille ou de la tribu considérés comme des entités, dans la vision antique ce que Aristote va appeler le eu zen (le juste bien) qui n’implique pas l’égalité entre humains ni entre groupes pour parvenir à l’équilibre, mais d’attribution à chacun en fonction de sa place « naturelle », libre ou assujetti naturellement. Dans la vision des penseurs du droit naturel moderne, le bonheur commun doit permettre de garantir à chaque individu conçu comme êtres rationnels et désirant la tranquillité et la prospérité le droit d’y accéder : le droit au bonheur. A l’époque contemporaine ce droit au bonheur va de pair avec une survalorisation de l’espace du privé de l’intimité et une désaffection un désamour pour le bien public. Évidemment la question qui se pose est de savoir le lien entre le bonheur privé et le bonheur public ce qui sera envisagé au travers des conceptions philosophiques antiques et modernes du bonheur (II) et de la conception politique telle qu’elle s’exprime par exemple dans la DDHC ou dans la Déclarations d’indépendance américaine. Les constitutions des régimes démocratiques doivent-elles simplement garantir les libertés et les droits fondamentaux à tous (puis à toutes et tous) également pour elles-mêmes ou en vue d’assurer la prospérité de la société et la paix civile permettant aux individus et groupes qui la composent de bien vivre, de mener une bonne vie ? S’interroger sur le bonheur c’est questionner les finalités (les buts) des sociétés politiques et les moyens mis en œuvre dans la société pour y parvenir. La joie, la béatitude et le bonheur sont différents. Nietzsche préfère la joie au bonheur, le plaisir dionysiaque à la sagesse apollonienne. La joie est un bien être présent et de courte de durée. Schopenhauer définit le désir dans ‘’Le Monde comme représentation’’ et ‘’Le monde comme volonté’’. Aristote oppose deux formes de bonheur. A.Le bonheur des philosophes. A/1. Le bonheur selon Aristote1 L’eudémonisme qui vient du grec ‘’eudemonia’’ qui veut dire ‘’être heureux’’. Il décrit la façon de vivre ensemble dans ‘’l’éthique à nicomaque’’ où il décrit le bonheur comme la finalité de l’existence humaine. Aristote dit que le bonheur: - Est par nature, désirable - Ne peut pas rendre malheureux - Tous les désirs sont supposés nous amener à être heureux Le désir caractérise l’imperfection humaine. Il reflète notre incomplétude (Platon, le banquet). Dans le mythe de Penia et Poros, la servante Penia viole le Dieu Poros qui est saoul è C’est la pauvreté qui viole la richesse car elle envie toute la richesse. Leur enfant a donné Eros. Il y a trois formes de désirs amoureux chez les grecs : - Agape (l’amour qui donne sans attendre en retour) - Philia (amour comme lien d’amitié) - Eros (amour physique) Aristote distingue deux formes d’accès au bonheur et deux formes de bonheur : celui de la vie pratique et celui de la vie contemplative.La vie pratique est la vie en société, c’est l’interaction entre les hommes d’une cité qui permet d’atteindre le bonheur. La vie contemplative est préférée par Aristote. Elle permet de penser sur soi-même et sur le monde et ainsi d’avoir une réflexion sur le monde qui nous entoure. Elle est réservée à quelques hommes libres qui peuvent philosopher et faire de la science A.2/ Le bonheur selon Epicure2 Epicure, lui, a la philosophe de l’hédonisme. On a longtemps associé l’hédonisme aux plaisirs dionysiaques. En réalité, au contraire, Epicure distingue 3 types de plaisirs : Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 17 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. - Les plaisirs naturels nécessaires (manger, boire) - Les plaisirs naturels non-nécessaires (manger un truc bon) - Les plaisirs non-naturels non-nécessaires (iPhone etc..) 3 œuvres d’Epicure : ‘’Lettre à Phytoklès’’ (sur la métaphysique) ‘’Lettre a Hérodote’’ ‘’Lettre à Ménécée’’ où il énonce les 4 remèdes tetra pharmakon : il n’y a rien à craindre des dieux, rien à craindre de la mort, on peut supporter la douleur et on peut atteindre le bonheur. En effet, les Dieux sont dans des intermondes, ils ne se préoccupent pas de nous. Épicure dit qu’il ne faut pas craindre la mort parce que quand je suis vivant, la mort n’est pas là et quand la mort survient, on n’est plus là ! La douleur est supportable car si on contrôle l’esprit, on peut faire abstraction des douleurs physiques (douleur s’oppose à souffrance, la souffrance étant mentale) Enfin, on peut accéder au bonheur car il est fait de plaisirs sensibles du quotidien (pas sûr d’avoir bien compris cette partie) 2 Épicure (342 Av J.C – 270 Av J.C) (en grec Epicouros) est un philosophe grec. Il est le fondateur, en 306 av. J.- C., de l'épicurisme, l'une des plus importantes écoles philosophiques de l'Antiquité. En physique, il soutient comme Démocrite que tout ce qui est se compose d'atomes indivisibles. Les atomes se meuvent aléatoirement dans le vide et peuvent se combiner pour former des agrégats de matière. L'âme en particulier serait un de ces agrégats d'atomes, et non une entité spirituelle, notamment d'après son disciple Lucrèce. En éthique, le philosophe grec défend l'idée que le souverain bien est le plaisir, défini essentiellement comme « absence de douleur ». En logique ou épistémologie, Épicure considère que la sensation est à l'origine de toute connaissance et annonce ainsi l'empirisme. Il a parlé des 5 éléments et étapes dans la quête du bonheur : - La catharsis (purgation des passions) - L’apathie (absence de douleur) - L’aphasie (absence de souvenirs du passé et immobilité) - L’aponie (tranquillité du corps) absence de douleur - L’ataraxie (absence de trouble) - C’est la façon d’arriver au bonheur par l’équilibre entre le corps et l’esprit. Démocrite définit dans ce sens le bonheur comme béatitude : c’est l’euthymie. Les cyniques puis les stoïciens propose une philosophie du bonheur analogue. Il s’agit de cultiver les principes philosophiques d’action selon la vertu et l’amour de la sagesse « Le cynisme est une attitude face à la vie provenant d'une école philosophique de la Grèce antique, fondée ou du moins inspirée par Antisthène et connue principalement pour les propos et les actions spectaculaires de son disciple le plus célèbre, Diogène de Sinope. Cette école a tenté un renversement des valeurs dominantes du moment, enseignant la désinvolture et l'humilité aux grands et aux puissants de la Grèce antique. Radicalement matérialistes et anticonformistes, les cyniques, et à leur tête Diogène, proposaient une autre pratique de la philosophie et de la vie en général, subversive et jubilatoire. L'école cynique prône la vertu et la sagesse, qualités qu'on ne peut atteindre que par la liberté. Cette liberté, étape nécessaire à un état vertueux et non finalité en soi, se veut radicale face aux conventions communément admises, dans un souci constant de se rapprocher de la nature. Le cynisme a profondément influencé le développement du stoïcisme par Zénon de Kition et ses successeurs à partir de 301 av. J.-C. Le mode de vie à suivre pour le cynique est celui du chien. Le chien mord, urine sur n'importe qui et copule n'importe où. La société est perçue comme corruptrice et changeante, tandis que la nature est vertueuse et universelle. Diogène se revendique ainsi cosmopolite, c'est-à-dire citoyen du monde. Son souci est de vivre selon des règles de vertu universelles12. Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 18 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. Les armes du cynique sont la transgression, l'ironie et le quotidien de façon plus générale13. En transgressant tous les interdits, le cynique prétend démontrer qu'aucune des règles sociales n'est essentielle et que seule compte l'éthique naturelle, universelle : la vertu14. Platon ayant défini l'homme comme un animal bipède sans plume, et l'auditoire l'ayant approuvé, Diogène déclara à l'assistance en tenant un coq plumé au bout d'une laisse : « Voilà l'homme selon Platon5. » À la suite de cet incident, Platon aurait ajouté à sa définition que l'homme avait « des ongles plats ». L'école cynique a été vivace durant toute l'Antiquité, de la Grèce jusqu'à Rome. Elle influença considérablement la morale stoïcienne qui développa à sa suite les notions de vie selon la nature, de l'indépendance du sage et de cosmopolitisme. Zénon de Cition, fondateur du stoïcisme fut un disciple du cynique Cratès de Thèbes. » notice Wikipédia extraits « Le stoïcisme est une école de philosophie hellénistique fondée par Zénon de Kition à la fin du IVe siècle avant notre ère à Athènes. Le stoïcisme est une philosophie de l'éthique personnelle influencée par son système logique et ses vues sur le monde naturel. Il prône l'acceptation sereine du destin et la maîtrise de soi, en s'efforçant de vivre en accord avec la nature et en se détachant des émotions perturbatrices. Selon ses enseignements, en tant qu'êtres sociaux, la voie de l'eudémonisme (εὐδαιμονία / eudaimonía, « le bonheur, la prospérité ») pour les humains consiste à accepter le moment tel qu'il se présente, à ne pas se laisser contrôler par le désir du plaisir ni la peur de la douleur, à utiliser son esprit pour comprendre le monde et à faire sa part dans le plan de la nature, à œuvrer avec les autres et à les traiter de manière juste et équitable. Les stoïciens sont particulièrement connus pour leur enseignement moral, selon lequel « la vertu est le seul bien » pour les humains et les choses extérieures telles que la santé, la richesse et le plaisir ne sont ni bonnes ni mauvaises en soi (ἀδιάφορα / adiáphora), n'ayant de valeur qu'en tant que « matière sur laquelle la vertu peut agir ». Avec l'éthique aristotélicienne, la tradition stoïcienne constitue l'une des principales approches fondatrices de l'éthique occidentale de la vertu. » Diogène de Sinope vers413 av. J.-C. Sinope (Paphlagonie en Turquie actuelle) Décès Vers 323 av. J.-C. (à 90 ans environ) Tableau chronologique des principaux stoïciens Le cynisme est une attitude face à la vie provenant d'une école philosophique de la Grèce antique, fondée ou du moins inspirée par Antisthène1 et connue principalement pour les propos et les actions spectaculaires de son disciple le plus célèbre, Diogène de Sinope. Le stoïcisme est une école de philosophie hellénistique fondée par Zénon de Kition à la fin du IVe siècle avant notre ère à Athènes. Tableau chronologique des principaux stoïciens Philosophie de l'école stoïcienne. « École philosophique fondée au iiie s. avant J.-C. par Zénon de Cition, le stoïcisme se prolonge à travers toute l'Antiquité, tant en Grèce que dans l'Empire romain, et reste influent jusqu'à notre époque. Pour cette philosophie de l'acceptation et du courage, à la fois fataliste (pour ce qui ne dépend pas de nous) et volontariste (pour ce qui en dépend), qui dit oui à tout ce qui arrive et à tout ce que la situation donnée, la vertu ou la raison exigent de nous, le bonheur est le souverain bien et la vertu, le seul bonheur. Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 19 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. Les œuvres des premiers stoïciens ne sont pas parvenues jusqu'à nous : outre quelques fragments et le fameux Hymne à Zeus de Cléanthe, nous ne les connaissons que par les citations qu'en ont fait les doxographes ou commentateurs, notamment Diogène Laërce, Sextus Empiricus et Cicéron. En revanche, nous disposons de beaucoup d'œuvres du stoïcisme impérial, parmi lesquelles les traités et les Lettres à Lucilius de Sénèque, le Manuel et les Entretiens d'Épictète, enfin les Pensées pour moi-même de Marc Aurèle. Une longue histoire Le stoïcisme n'est pas né de rien, ni du seul cerveau de Zénon. Outre une éventuelle influence de la pensée orientale, qui reste difficile à établir, les stoïciens se nourrissent de trois sources principales : Héraclite d'Éphèse, qui marquera surtout leur physique ; les philosophes de l'école de Mégare, qui influenceront surtout leur logique ; enfin ceux de l'école des cyniques – et, par eux, Socrate –, qui inspirent bien des traits de leur morale. Marc Aurèle Si le stoïcisme est un « système » (les stoïciens inventèrent d'ailleurs le mot), il sut aussi s'adapter à travers l'histoire et intégrer les importantes variations proposées par ses disciples. On distingue traditionnellement trois périodes : l'ancien stoïcisme (Zénon, Cléanthe et surtout Chrysippe), qui couvre tout le iiie s. avant J.-C. ; le moyen stoïcisme (Panaitios de Rhodes, Posidonios), qui traverse les iie et ier s. ; enfin le stoïcisme impérial, le mieux connu, qui s'épanouit durant les deux premiers siècles après J.-C., grâce aux œuvres de Sénèque, Épictète et Marc Aurèle. Ces œuvres sont, pour le stoïcisme en général, notre source principale. Malgré certaines évolutions ou divergences, les stoïciens resteront fidèles, durant ces cinq siècles, aux inspirations premières du Portique (stoa, en grec), comme on désignait alors l'école de Zénon, qui enseignait sous un portique d'Athènes. Cette constance bien rare doit beaucoup à la force intrinsèque du système, et c'est elle qu'il faut essayer de comprendre. » https://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/sto%C3%AFcisme/93970 Dans le monde chrétien médiéval le bonheur est conçu comme béatitude de celui qui après la mort sera admis au Paradis s’il est un bon chrétien respecte le dogme et les règles de la vie du bon chrétien Saint Thomas d’Aquin3 et Saint Augustin4 (évêque) voient le bonheur par rapport à Dieu (comme Pascal). « Augustin va expliquer les Béatitudes comme la description des sept degrés qui conduisent le chrétien de l’humilité ou pauvreté en esprit jusqu’à la sagesse qu’il voit désignée dans la Béatitude des pacifiques : au dernier et septième degré est « la sagesse même, soit la contemplation de la vérité qui pacifie tout l’homme et assume la ressemblance de Dieu ». Quand on y regarde de près, on s’aperçoit que le commentaire d’Augustin est directement inspiré par sa propre expérience telle qu’il la décrira bientôt dans les Confessions, où il voit un exemple du cheminement moral et spirituel que Dieu fait parcourir à l’homme qui se convertit et s’efforce de mettre en pratique l’enseignement de l’Écriture. Le lien entre son explication des Béatitudes et le récit des Confessions est si étroit qu’on a pu proposer une division de cette dernière œuvre, et même du De Trinitate, à partir de l’itinéraire vers la sagesse décrit dans notre commentaire. Le rapport entre les Confessions et les Béatitudes est d’ailleurs explicitement mentionné au début du livre XI, où Augustin s’interroge une fois encore sur le pourquoi de cette œuvre, au moment d’aborder sa méditation sur la Genèse : Ce sont donc nos sentiments envers toi que nous dévoilons en te confessant nos misères et tes miséricordes sur nous, afin que tu achèves de nous délivrer, puisque tu as commencé ; afin que nous cessions d’être malheureux en nous-mêmes et devenions heureux en toi, puisque tu nous as appelés ; afin que nous soyons des pauvres en esprit, des doux, de ceux qui pleurent, qui ont faim et soif de justice, des miséricordieux, de cœurs purs, des pacifiques. (Conf. XI, I, 1) » Pinckaers, S. (2009). Le commentaire du Sermon sur la montagne par saint Augustin et la morale de saint Thomas. Revue d'éthique et de théologie morale, n°253(1), 9-28. https://doi.org/10.3917/retm.253.0009. Thomas d’Aquin lui emboîte le pas « Les dons du Saint-Esprit ne sont pas des grâces additionnelles, facultatives ou extraordinaires ; ils sont indispensables à l’exercice plénier des vertus chrétiennes et pour parvenir à la Béatitude promise par l’Évangile. En d’autres termes, les dons sont requis pour parcourir le chemin des vertus ou des Béatitudes, comme l’avait bien vu saint Augustin. Quand il commente les Béatitudes (à la qu. 69, a.3.), saint Thomas montre, à propos de chacune, comment elle s’accomplit par la vertu et, d’une façon plus parfaite, par le don correspondant (…) Ainsi les dons du Saint-Esprit sont-ils, pour saint Thomas, une partie intégrante et nécessaire de la morale chrétienne ; ils exercent leur rôle dans tout le domaine des actions humaines, des plus hautes aux plus humbles.En conséquence, les dons du Saint-Esprit seront accordés à tous les chrétiens comme les vertus théologales et morales infuses, dans la mesure même où tous sont appelés à la perfection de la charité et à la Béatitude en Dieu, au Royaume des cieux. Sans doute l’œuvre propre des dons est-elle de disposer les chrétiens à une perfection supérieure ; mais rien d’autre n’est requis pour cette œuvre que d’avoir la foi, l’espérance et la charité, sans oublier l’humilité, et de les mettre Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 20 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. en pratique. Les dons ne sont pas réservés à une élite, si ce n’est celle des pauvres et des humbles. » Pinckaers, S. (2009). Le commentaire du Sermon sur la montagne par saint Augustin et la morale de saint Thomas. Revue d'éthique et de théologie morale, n°253(1), 9-28. https://doi.org/10.3917/retm.253.0009. C’est la béatitude qui est ainsi atteinte Béatitude A.− RELIG., MYSTIQUE 1. Félicité éternelle que goûte l'homme jouissant de la vision de Dieu : 2. Perfections évangéliques exaltées par le Christ dans le sermon sur la Montagne (Matthieu V, 1-12; Luc VI, 20-22 8 béatitudes ) comme moyens d'accéder à la félicité de la « vie éternelle » : − P. ext. a) Sérénité apportée à l'âme par la contemplation : b) Sérénité de la nature dans certaines circonstances : c) Euphorie caractéristique de certains états pathologiques et pouvant résulter de l'usage des stupéfiants : d) Euphorie obtenue par la satisfaction des appétits naturels : A partir du moment où on accepte Dieu en son être et qu’on voit le monde comme conception divine, on peut accéder au bonheur puisqu’on a une infime partie de Dieu en soi. Thomas d’Aquin est le penseur du droit tel qu’il a existé au Moyen-Âge à partir du 13ème siècle : le droit canon. C’est la modalité de transfert du droit romain au droit moderne. L’équivalent de l’eudémonisme antique L’eudémonisme (du grec : εὐδαιμονία / eudaimonía, « béatitude ») est une doctrine philosophique posant comme principe que le bonheur est le but de la vie humaine. Le bonheur n'est pas perçu comme opposé à la raison, il en est la finalité naturelle. L'eudémonisme qualifie les doctrines éthiques qui font du bonheur le souverain bien et le critère ultime de choix des actions humaines : c'est le cas depuis Socrate de la quasi-totalité des écoles de philosophie antiques, mais celles-ci s'opposent en ce qui concerne les moyens pour atteindre le bonheur. L'eudémonisme se fonde sur une confiance générale en l'homme qui reste la clé irremplaçable de l'humanisme. La doctrine se concentre sur cette seule chance d'épanouissement que constitue la vie terrestre et c'est par conséquent à la réussite de cette vie, au bonheur immédiat ou rationalisé sur un temps long, tant au sien qu'à celui d'autrui, qu'elle consacre logiquement l'essentiel de son effort. (…) L'eudémonisme place comme valeur fondamentale le bonheur et l'hédonisme le plaisir. L'un n'implique pas forcément l'autre et les deux ne sont pas forcément contradictoires non plus. Tout dépend de la manière dont on définit la recherche du bonheur et de la manière dont on définit la recherche du plaisir. Si on définit le bonheur comme une joie spirituelle qui s'oppose au plaisir charnel, comme chez Platon, l'eudémonisme exclut dans ce cas l'hédonisme. Si au contraire on définit l'hédonisme comme la recherche de n'importe quel plaisir de l'instant, sans se soucier des conséquences, alors l'hédonisme s'oppose à l'eudémonisme. https://fr.wikipedia.org/wiki/Eud%C3%A9monisme A.3/ Le bonheur vu par les philosophes contemporains entre le 16ème siècle et le 19ème siècle. Dans les Essais de Michel de Montaigne(1533- 1592), la conception du bonheur est d’aimer ce qu’on possède, ce qui est à notre portée. Si on se contente uniquement de ce qu’on peut avoir, on peut espérer atteindre le bonheur. Le bonheur du sage consiste à aimer la vie et à la goûter pleinement : « C'est une perfection absolue et pour ainsi dire divine que de savoir jouir loyalement de son être » Chez Rousseau (1712- 1778), dans le passage des dames de Warens, il y a l’introduction du terme de nostalgie. La vie que l’on mène est tellement dure, que c’est en idéalisant le passé qu’on peut parvenir au bonheur. (Au même titre que les Romantiques comme Chateaubriand ou V. Hugo). Chez les romantiques, le bonheur se trouve dans la contemplation de la Nature. Les poètes allemands Hölderlin et Novalis ont exprimé cette pensée. Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 21 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. Schopenhauer7, dans ‘’Le monde comme volonté’’ parle de l’unique pensée, qui est le vouloir vivre. Il oppose la conception du monde réel et celle qu’on pourrait s’en faire : ‘’Le désir ne tient jamais ses promesses’’. En effet, le désir étant un état de manque, on se fait toujours une idée du désir, on est à la fois désespéré par ce qu’on a le désir et qu’on s’ennuie mais aussi parce que le désir ne correspond pas à ce que l’on espérait. Il dit dans ‘’les 50 manières de ne pas être malheureux’’ qu’il faut se donner une raison de vivre pour être heureux. La philosophie de 7 Schopenhauer, philosophe allemand (22 février 1788- 21 septembre 1860) est notamment inspirée de celles de Platon, d'Emmanuel Kant. Ainsi il écrit : « Les écrits de Kant, tout autant que les livres sacrés des Hindous et de Platon, ont été, après le spectacle vivant de la nature, mes plus précieux inspirateurs. »Selon Christophe Bouriau : « Au plan moral, Schopenhauer s’oppose à l’eudémonisme de Baruch Spinoza [...] ». Sa philosophie présente également une très forte convergence de points de vue avec la philosophie bouddhiste, si bien qu'on l'a parfois considéré au XIXe siècle comme un « philosophe bouddhiste »n 3. Schopenhauer aurait écrit : « Bouddha, Eckhart et moi-même, nous enseignons pour l'essentiel la même chose8. » Schopenhauer considérait le Criticon du jésuite Baltasar Gracián comme le plus grand roman allégorique de tous les temps, et a repris à son compte ce qui lui a semblé être la philosophie contenue dans le roman : le pessimisme. B./ L’idéal de la bonne vie et du bonheur des citoyens dans le eu zen (la justice). La réponse aristotélicienne 1. Donner à chacun ce qui lui revient et une place dans la cité des hommes Pour Aristote, la cité politiquement organisée est le mode de regroupement que la nature a voulu pour les Hommes. La Nature voulait que les Hommes, comme d’autres espèces animales, vivent regroupés et aient un langage. Il y a en effet d’autres animaux qui ont un langage corporel, comme par exemple les fourmis qui vivent en société organisée ou les abeilles qui organisent une division au sein de la ruche. Le but de ce regroupement sert à permettre le ‘’eu-zen’’ qui veut dire le ‘’juste bien’’. Cela permet à chacun d’être bien à sa place dans la cité et de contribuer à sa prospérité et ainsi d’être heureux. L’amitié (philia) comme l’amour entre adulte (Eros) ou l’amour (Agape) du maître pour son disciple chez Aristote relève de l’interdépendance (l’esclave a besoin du maitre pour bien le traiter et voter de bonnes lois et le maitre a besoin de l’esclave pour s’occuper des tâches pendant qu’il va à l’Agora). La femme doit rester à la maison pour s’en occuper et s’occuper des enfants. Ainsi, la place de chacun lui est donnée en fonction de ce que la nature lui a accordé à la naissance. Thomas d’Aquin le traduit par ‘’sum cuique tribuere’’ è donner à chacun ce qui lui revient de droit, naturellement. Parfois, ces droits ne sont pas respectés, le maitre peut battre son esclave, le cordonnier peut mal faire les chaussures etc…, causant un dommage d’un citoyen contre un autre citoyen qui doit être compensé. Ainsi par exemple, le cordonnier devra baisser les prix de ses chaussures s’il les a mal faites. Le juge doit trouver une solution qui compense le dol à la hauteur du dommage subi, c’est la justice commutative (c’est le cas pour les contentieux entre les personnes de même rang). La justice est alors égalitaire. En revanche, selon Aristote, on ne juge pas de la même façon un esclave et un citoyen. Ainsi, on compense à la hauteur du préjudice subi en prenant en compte la position occupé par celui qui a subi le dommage dans la société. On a un traitement qui n’est pas égalitaire mais équitable, proportionnel à la place occupée dans la société. Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 22 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. 2. Les trois formes de justice chez Aristote universelle, commutative et proportionnelle ; Il faut faire la différence entre justice commutative (entre personnes de même rang) et la justice proportionnée (équité) (entre personnes de rangs différents). Il y a un cas particulier de la justice comme proportion. Dans le cas du cordonnier et de l’architecte, si l’architecte commet une erreur, il va être davantage sanctionné que le cordonnier qui a mal fait la chaussure. En effet, le dommage commis par l’architecte est plus grave pour la cité que la malfaçon de la chaussure. Cette théorie n’est pas propre au modèle occidental. Dans le code d’Hammourabi, il est prévu par exemple que l’architecte qui a construit un bâtiment qui s’effondre est puni de mort. « Pendant l'Antiquité, la justice est distinguée entre deux concepts différents : le Droit et la Morale. La justice- morale ou Diké (Δίκη) est différente de la justice légale ou droit comme pouvait la considérer les romains au travers du droit romain. Pour les Grecs, le juste est dikaion (terme dérivé de « Diké », la justice). La justice est une vertu et non une règle. Le juste est ce que nous devons établir dans nos relations avec les autres. Le juste établit l’égalité et l'équité entre les membres de la Cité. Pour Platon, il existe une analogie, un lien essentiel entre la justice dans l'âme et la justice dans la Cité. Faire régner l'harmonie entre les différentes parties de l'âme humaine permet de faire régner l'harmonie dans la Cité. Il n'existe pas de cité juste sans hommes justes9. Aristote distingue la justice "commutative" celle qui concerne l'achat et la vente (égalité) et la justice "distributive"10. Cette dernière consiste à répartir les ressources (revenu, propriété, activités et autres avantages) et les contraintes (répartition des dommages causés à autrui, peines correctives et impôts payés) en fonction du mérite (équité) » « La justice politique se divise en deux espèces, l’une est naturelle, l’autre légale. », (Traité de la morale, section VII).. Justice « particulière » Également tourné vers le bien commun, ce type de justice fondamentale ordonne et règle le comportement d'un individu auprès d'un autre ; elle est davantage casuistique. Elle se subdivise elle-même en deux types, selon qu'elle règle les rapports entre particuliers (justice commutative) ou entre particuliers et société (justice distributive), conception venant d'Aristote13. Justice commutative Article détaillé : justice commutative. La justice commutative (ou corrective) est inspirée par Aristote. Elle « vise simplement la réalisation de la rectitude dans les transactions privées »14. Elle est « un genre de justice qui fait abstraction des mérites personnels pour déterminer selon une stricte égalité arithmétique ce qui est dû à chacun »3. Elle a pour but de rétablir l'égalité lorsque celle-ci est rompue au moment d'un échange, lorsqu'un cocontractant a exécuté son obligation et l'autre pas encore, ou d'un dommage. Rendre une justice commutative est le rôle propre du juge dans les procès où il intervient comme tiers entre les parties en conflit (Éthique à Nicomaque, V, 7)14. Du latin distributiva justitia signifiant : « le juste dans les distributions », la justice distributive règle la répartition des biens entre les membres de la société pour le bien commun. Elle considère les mérites des individus, et distribue les biens selon une part proportionnelle à ceux-ci15. L'échelle des mérites n'est pas universelle et varie en fonction du régime politique et des valeurs qu'il proclame : la vertu pour l'aristocratie, la richesse pour l'oligarchie, la liberté ou le mérite en lui-mêmenote 3 pour la démocratie, etc. À la différence de la justice commutative, la justice distributive est fondée sur une égalité géométrique.(…) On doit à Aristote une distinction essentielle entre deux aspects de la notion de justice : une justice relative, individuelle, qui dépend d'autrui et une justice globale et communautaire. La première est une vertu ; la seconde concerne les lois et la constitution politique et relève de la raison. Cette distinction se maintiendra dans la tradition occidentale jusqu'à la Théorie de la justice de John Rawls, un ouvrage qui présente la justice comme un refus de prendre plus que ce qui nous est dû26. D'idéale, la justice devient ainsi politique. Aristote dit de la diké (« justice » en grec) qu'elle est l'ordre objectif de la communauté politique. Dans le livre V de son ouvrage fondateur l'Éthique à Nicomaque, il distingue l'injuste du juste par le fait que ce dernier est « ce qui produit et conserve le bonheur et ses parties pour la communauté politique »27. Aristote ne se contente pas de reprendre l'idée de Platon selon laquelle la justice est la vertu principale. Pour lui : « La vertu de justice est la vertu par laquelle l'être humain accomplit sa finalité éthique »26. Au contraire de Platon, il fait dépendre cette vertu d'une situation et, en conséquence, d'éléments extérieurs à l'action de l'homme vertueux. Si pour Platon la justice consiste à donner à chaque partie (et à chaque homme) la place qui lui revient dans le tout, pour Aristote elle consiste à conformer nos actions aux lois afin de conserver le bonheur pour la communauté politique23: « le juste est le bien politique, à savoir l'avantage commun »28 Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 23 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. https://fr.wikipedia.org/wiki/Justice#cite_ref-33 Cours d’introduction à la science politique H THOMAS L1 DSP FDSP-AMU 2024. 24 Ne pas citer. Ne pas diffuser hors de la division. Annexe 1 Annexe 1 La finalité d'une action en est le « pourquoi », le sens, par opposition à son « comment », aux mécanismes ou fonctionnements qu'elle met en jeu. Le mot « finalité » et l'expression « cause finale » sont démodés ; on les emploie souvent entre guillemets, comme antiscientifiques. La finalité est éprouvée comme une évidence lorsque l'on entreprend de faire quelque chose, d'obtenir un résultat. Cette évidence conduit à interpréter comme « finalisée » l'action observée d'un autre : Que veut-il faire ? Quel est le sens de son acte ? On pense observer de la finalité, non seulement dans l'action d'un homme, mais dans le comportement ou la structure d'un organisme, même supposé inconscient, si l'on y voit une certaine adaptation de moyens à une fin, si ses actes ou ses organes semblent appropriés à sa survie. On en trouve de même dans tout système constitué, vivant ou non, lorsque ses parties parais- sent agencées relativement à une fonction de l'ensemble. Un appareil qui résulte de notre « faire » nous savons qu'il est finalisé – par nous. Un équipement industriel sert aux usagers, son fonctionnement a une fin. Par analogie, les systèmes naturels donnent l'impression d'avoir une fonction bénéfique ou maléfique. L'impression de finalité s'étend à tout être dont la présence, la nature – même sans agencement interne – paraît lourde de sens, semble exprimer quelque chose, avoir une vertu ou une force quelconque. La finalité est de l'ordre de la compréhension, non de l'explication. Là même où la finalité est intuitive, ou saisissable par analogie directe, elle n'est jamais un ensemble d'« observables », au sens strict du mot, que l'on peut voir, photographier, ou relever par un appareil enregistreur. Elle est seulement descriptible ou observable en gros ; elle échappe à la méthode scientifique rigoureuse. Elle est extraite de l'expérience par une lecture ou une traduction plus ou moins libre, non par une observation scientifique. On perçoit des signes d'intention : un animal gratte à la porte, il est donc impatient d'entrer. La compréhension par des signes est plus spontanée et plus facile que l'explication scientifique ; elle peut être hésitante dans tel cas particulier (par exemple, quand on essaie de deviner l'intention d'un adversaire qui cache son jeu), mais elle n'est pas hésitante en tant que procédé général de lecture. Elle fait appel à l'imagination animante et n'a pas à élaborer péniblement un système de lois générales, un enchaînement déterminé de causes et d'effets. Elle interprète chaque cas par sympathie, dans l'émotion de son propre effort, conjugué ou opposé aux intentions des autres. » Raymond RUYER, « FINALITÉ », Encyclopædia Universalis [en ligneURL : http://www.universalis-edu.com.lama.univ-amu.fr/encyclopedie/finalite/ « Aristote