Patrimoine, la préservation entre tensions et concurrences - Étude de cas Paris PDF
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This document is a student's notes on the preservation of heritage in France, specifically Paris. It details the history of Paris, from its origins to the 19th century, and describes the challenges of balancing heritage preservation with modern urban development.
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Patrimoine, la préservation entre tensions et concurrences Introduction : Le patrimoine est de plus en plus préservé depuis le XIXe siècle. Mais cette préservation (sauvegarde) du patrimoine met en concurrence des usages différents. Le patrimoine sert de locomotive é...
Patrimoine, la préservation entre tensions et concurrences Introduction : Le patrimoine est de plus en plus préservé depuis le XIXe siècle. Mais cette préservation (sauvegarde) du patrimoine met en concurrence des usages différents. Le patrimoine sert de locomotive économique au tourisme, génère des richesses et des emplois. Les habitants de ces villes en tirent des avantages mais aussi beaucoup d’inconvénients. DIAPO : Les villes deviennent souvent des musées à ciel ouvert, et il est difficile de les modifier. Ces lieux sont exceptionnels et le géographe M. Lussault les définit comme des « hyper-lieux » : « des carrefours du monde, les emblèmes du contemporain où l’on peut découvrir le meilleur, pire et surtout le banal de l'époque ». Hyper-lieux, les nouvelles géographies de la mondialisation, Seuil, 2017 Gérer une ville au riche patrimoine, c’est donc faire face aux difficultés de la politique urbaine, pour ne pas dénaturer le patrimoine (jalon Paris). Le patrimoine est l’objet de menaces et de destructions. Trop de tourisme peut mettre le patrimoine en danger (cf. Venise jalon 3). Au Mali, c’est la guerre qui a ruiné le patrimoine du pays (jalon 2). Face à tous ces dangers, la protection du patrimoine se mène de plus en plus à l’échelle mondiale. Problématique : Dans quelle mesure les politiques de préservation du patrimoine peuvent-elles être source de tension ou de conflits ? Quels usages mettent-elles en concurrence ? I) Urbanisation, développement économique et préservation du patrimoine : Paris entre protection et nouvel urbanisme Le patrimoine d’une métropole est son image de marque, qui attire les touristes ; mais c’est aussi une contrainte, la vie moderne doit s’insérer dans un ensemble urbain pluri-centenaire. Comment une « ville musée » peut-elle être modernisée ? En quoi Paris doit concilier un patrimoine exceptionnel et un nouvel urbanisme ? 1) Paris : un patrimoine majeur – quelques rappels Le patrimoine parisien est un des plus riches et diversifiés au monde. L’anthropisation est ancienne. Document 1 p. 274 Le site, dans un méandre de la Seine, remonte à l’époque gauloise, avec la tribu des Parisii qui a installé son village, Lutèce : DIAPO Après la conquête romaine, Lutèce devient Paris et commence à s’agrandir, mais c’est une ville de taille modeste (quelques milliers d’habitants, et d’autres villes sont beaucoup plus importantes comme Lyon). Clovis la choisit comme capitale, cette fonction disparait ensuite jusqu’au XIIème où Louis VI la Thème 4, Axe 2 Patrimoine, la préservation entre tensions et concurrences, Jalon 1 1 reprend comme capitale. La croissance est concentrique, de part et d’autre de la Seine. Des enceintes successives, jusqu’au XIXe, protègent la ville ; la dernière, celle de Thiers, est construite en 1844, et détruite en 1919. La ville n’a jamais été détruite, pas d’incendies majeurs, donc le patrimoine témoigne de différentes périodes (rappel : en 1944, le général von Choltitz refuse d’obéir à Hitler, qui avait planifié la destruction de Paris : le visage de Paris aurait été totalement différent aujourd’hui). Aujourd’hui on distingue : ֍ Le Paris antique : les thermes de Cluny, les Arènes de Lutèce : DEUX DIAPOS ֍ Le Paris royal : les constructions religieuses, les hôtels particuliers mais aussi les lieux du pouvoir politique : Le Louvre, les places royales… DEUX DIAPOS ֍ Le Paris du XIXe : ce sont les travaux du baron Haussmann (cf. Cours de Première tronc commun) Questions 2 et 3 p. 278 Avec l’arrivée au pouvoir de Napoléon III (second Empire 1852-1870), le paysage urbain parisien subit une transformation en profondeur. Napoléon III charge le baron Haussmann, préfet de la Seine, de planifier et réaliser des travaux de modernisation de la ville. Pour l’Empereur, les travaux répondent à différents objectifs : Embellir la ville (supprimer les héritages médiévaux, les maisons en bois, les rues étroites…quasi-disparition du Paris médiéval), en faire une capitale témoignant de la nouvelle France industrielle ; volonté de rivaliser avec Londres, qui, à l’époque, est en pleine transformation – politique de prestige déjà Aérer la ville : créer des avenues, des jardins publics (squares, parcs), des équipements publics (préoccupations hygiénistes) Favoriser la circulation dans la ville : pour les marchandises et la prospérité économique mais aussi pour l’armée, éviter les révolutions Les travaux d’Haussmann ont été décriés mais ont formé le patrimoine parisien prestigieux actuel, c’est une nouvelle identité architecturale (les bâtiments haussmanniens) qui est aujourd’hui un patrimoine unique avec une ville plutôt « horizontale », des rues et avenues rectilignes, des immeubles assez uniformisés (4 à 5 étages, pierre de taille, alignement…), l’opéra Garnier, des gares … Un Paris très bourgeois mais qui est attractif aujourd’hui. Si les travaux d’Haussmann ont fait disparaitre le Paris populaire (destructions des maisons médiévales, des taudis) ils ont en même temps préservé de grands monuments et créé le patrimoine actuel (donc protection et nouvel urbanisme). ֍ Le Paris du XXe : des modifications assez mineures : Quelques destructions comme les Grandes Halles en 1971 ; ces Halles Baltard avaient été construites au XIXème, à côté de l’église Saint-Eustache ; elles sont détruites lorsque celles de Rungis sont construites. DEUX DIAPOS dont une VIDEO : Les Halles de Baltard : retour sur l'histoire du "Ventre de Paris" - YouTube A la place le Forum est construit en 1979 pour abriter des galeries commerciales. Aujourd’hui à nouveau transformé en Canopé : DIAPO Mais l’État et la ville procèdent dans ce même temps à des sauvegardes majeures : La loi Malraux de 1962, sur les secteurs sauvegardés, permet de protéger le quartier du Marais Création ou réhabilitation de sites : Pompidou et Beaubourg. Giscard : le Musée d’Orsay Thème 4, Axe 2 Patrimoine, la préservation entre tensions et concurrences, Jalon 1 2 – sauvegarde de l’architecture industrielle, métallique de l’ancienne gare, le bâtiment utilitaire, menacé, devient ainsi patrimoine. Mitterrand : multiples les grands travaux en intégrant le patrimoine ancien : Opéra Bastille, Pyramide du Louvre, quartier de Bercy (document 5 p. 277) avec la BNF ; surtout reprise du grand axe royal est-ouest : la Grande Arche. Chirac : musée du Quai Branly : 8 DIAPOS ֍ Donc selon les périodes, le patrimoine peut être sauvegardé ou en partie détruit, au gré des circonstances, selon la politique de l’État ou de la municipalité, en fonction des projets de développement mais aussi de la prise en compte de l’opinion publique. 2) Les différents usages du patrimoines parisien ֍ Il sert d’abord d’identité au peuple français. Depuis François Ier, la Bibliothèque de France reçoit un exemplaire de chaque livre publié en France, c’est un immense patrimoine écrit qui est centralisé à Paris, la mémoire du pays. Les Républiques successives, depuis la Révolution, ont enrichi le patrimoine parisien et ont fait un élément de propagande républicaine. Le patrimoine devient un outil de l’unité nationale, de la formation civique, il est instrumentalisé pour servir à la formation d’une conscience nationale. Exemple : la tombe du Soldat inconnu (1920) qui s’inscrit dans une logique d’utilisation politique de l’espace. Double utilisation du patrimoine : arc de triomphe napoléonien glorifiant la grandeur de la France + tombe du soldat inconnu glorifiant les sacrifices de la nation, de ses fils. Le lieu patrimonial devient lieu de mémoire, avec des cérémonies républicaines : DIAPO Exemple : le Champ de Mars : jardin public de près d’1km de long sur 200 m de large ; est un lieu patrimonial fort, lié à la démocratie : fête de la Fédération le 14 juillet 1790 ; devenu un lieu de détente mais aussi un lieu de concert gratuit le 14 juillet. Le patrimoine a donc une valeur symbolique et émotionnelle. À noter que la présence de la Tour Eiffel, symbole de Paris dans le monde, vient renforcer l’importance du lieu : DIAPO ֍ Il est aussi composé de « monuments fonctionnels ». Ce patrimoine est toujours utilisé. Les bâtiments historiques sont encore le siège de lieux de pouvoir, comme l’Élysée, le Palais Bourbon (Assemblé nationale), le Palais du Luxembourg. Il y a aussi des lieux de culte (Cathédrale Notre- Dame, Église de la Madeleine), des habitations, des cafés restaurants, des cabarets… : DEUX DIAPOS ֍ Enfin, il est surtout utilisé comme attraction touristique. Paris, « ville lumière », se met en scène comme une ville d’art et de culture, et ce depuis le XIXe s (premières expositions universelles). Doc. 4 p. 277 Le patrimoine est donc un vecteur de l’activité touristique, c’est une stratégie à l’échelle mondiale. Pour le Grand Paris, en 2019, c’est 38 millions de touristes, dont la moitié sont des touristes internationaux : entrées payantes des monuments ou musées, produits dérivés, locations (Airbnb…), hôtellerie (on a compté plus de 17 millions d’arrivées hôtelières dans les quelques 2000 hôtels de Paris en 2019, dont 60 % d’étrangers). Les touristes sont aussi attirés par la ville du « luxe », la capitale de la mode, la joaillerie, les grands magasins… Cela génère environ 400 000 emplois, 12% de l’emploi salarié du Grand Paris et plus de 21 milliards d’euros de chiffres d’affaires en 2109. Mais cela fige la ville dans une situation de « ville-musée » et certains parlent de « Disneylandisation ». On pourrait d’ailleurs rajouter Disneyland, premier employeur d’Ile de France. Thème 4, Axe 2 Patrimoine, la préservation entre tensions et concurrences, Jalon 1 3 3) Paris : des enjeux urbanistiques ֍ Une ville patrimoniale doit donc préserver mais dans un monde où les villes mondes sont de plus en plus en concurrence se pose la nécessité d’évoluer, de transformer, d’adapter. ֍ L’équilibre est fragile entre des politiques parfois contradictoires et donc entre différents acteurs. ֍ Le Conseil de Paris (le conseil municipal) définit un PLU (plan local d’urbanisme) qui fixe les règles de construction et d’occupation du territoire. Cela permet de raisonner sur l’aménagement du territoire : la répartition des équipements, l’autorisation des permis de construire, la préservation du patrimoine. Cependant le PLU parisien ne s’applique pas à certains sites ou quartiers. ֍ Une partie du patrimoine parisien est en effet totalement protégé, par l’État, dans la base Mérimée : ce sont des monuments classés ou inscrits au titre du patrimoine ; ils ne peuvent donc être détruits par des projets nouveaux : DIAPO ֍ En 1999, l’État a créé le label « Patrimoine du XXe s », qui est devenu en 2016 le label « Architecture contemporaine remarquable » : il vise à protéger des bâtiments de moins de 100 ans, car cette catégorie est peu présente dans la base Mérimée. A Paris, c’est le cas de Beaubourg ou du quartier de la Défense. ֍ La loi de juillet 2016 a aussi créé le label SPR, sites de patrimoine remarquable, pour protéger des sites (villes ou quartiers de ville, villages) qui ont un intérêt patrimonial culturel ou naturel. A Paris, il existe deux SPR : le quartier du Marais (3e et 4e arrondissements) afin de protéger les hôtels particuliers du Paris aristocratique des XVII et XVIIIème Siècle et quelques bâtiments industriels ; le 7e arrondissement, qui concentre une richesse considérable de sites (Invalides, Tour Eiffel, Musée d’Orsay, mais aussi c’est le quartier des ministères, de l’Hôtel Matignon, de l’Assemblée nationale, de multiples ambassades…). (Le PLU ne s’applique pas non plus au Jardin du Luxembourg, géré par le Sénat). ֍ Tous ces labels créent des contraintes : une « ville-musée » peut devenir une contrainte pour ses habitants : beaucoup de normes à respecter, des coûts de rénovation importants, intervention des architectes des bâtiments historiques dans de nombreux quartiers (afin de conserver le contexte, l’environnement dans lequel a été construit le bâtiment) … Activité « Préparer un exposé » p. 277 : sous forme de Grand Oral ֍ Le Conseil de Paris n’a donc pas de totale liberté pour transformer Paris, notamment pour le plein centre, alors que certains choix patrimoniaux sont peu adaptés : les immeubles haussmanniens ne sont plus fonctionnels tant comme espaces de bureaux que comme logements (cout de chauffage…) ; la place de l’Etoile C. de Gaulle voit converger 12 avenues… ֍ Mais surtout une ville-monde doit absolument être en transformation constante, ce qui a toujours été le cas pour Paris jusqu’au XXème siècle, mais est moins vrai aujourd’hui. Londres, Berlin acceptent cette modernisation, c’est plus difficile pour Paris. Construire la Ville de demain, c’est construire en fait le patrimoine futur. ֍ Les politiques urbanistiques peuvent parfois être en contradiction avec les politiques Thème 4, Axe 2 Patrimoine, la préservation entre tensions et concurrences, Jalon 1 4 patrimoniales : l’exemple des tours de grande hauteur en est une parfaite illustration. Ces projets sont aujourd’hui soutenus par la municipalité qui rompt ainsi avec l’interdiction, prise après la construction de la tour Montparnasse en 1975, d’ériger intra-muros des immeubles de plus de 37 mètres, correspondant au standard haussmannien. Cela passe par une modification du PLU : document 2 p. 276 ֍ Ce sont des projets polémiques, à l’instar des tours Duo dans le 13ème arrondissement ou de la tour Triangle dans le 15e. Les tours trouvent leur place en périphérie et non en plein centre ֍ Exemple : La tour Triangle est un de ces projets (document 3 p. 276 + DIAPO VIDEO TOUR TRIANGLE en péril FRANCE 3 19/20 Paris IdF 20/10/14 ) il a été finalement validé par le Conseil de Paris en 2015, et doit aboutir en 2024 (en vue des JO). Hauteur de 180 m, 42 étages, essentiellement de bureaux pour attirer de nouvelles activités. Coût supérieur à 500 millions d’euros. ֍ Mais beaucoup d’oppositions et de conservatismes : Une majorité de Parisiens semblent contre ces nouvelles tours ; les associations de défense du patrimoine dénoncent là une absence de cohérence et d’harmonie architecturales. Se pose aussi la question de la place des fonds privés dans ces projets : document 2 p. 274 ֍ Autre exemple : le projet de rénovation de La Samaritaine où cohabiteront un hôtel de luxe et des logements sociaux, dans un quartier cerné par les immeubles haussmanniens, relève, pour son concepteur, de la revitalisation urbaine et peut éviter la gentrification excessive de la ville : DIAPO VIDEO Polémique autour de la démolition de la Samaritaine à Paris - YouTube ֍ Autre débat, la préservation du patrimoine est parfois accusée de conservatisme : elle favoriserait la gentrification de la capitale. La gentrification est l’afflux d'une population aisée dans un quartier auparavant populaire, à la suite d'opérations immobilières, dans les 19 e et 20 e arrondissements notamment. ֍ Rappel : débats sur la reconstruction de Notre-Dame : dossier p. 279 Question 2 p. 275 Conclusion : Le patrimoine est en fait vivant, une ville ne peut être muséifiée. Paris ne peut simplement vivre de sa « rente patrimoniale » même si c’est un atout considérable pour le tourisme. Développer la ville par une urbanisation moderne ne semble pas incompatible avec la mise en valeur patrimoniale : les lieux patrimoniaux doivent être insérés dans un nouvel espace dynamique. Thème 4, Axe 2 Patrimoine, la préservation entre tensions et concurrences, Jalon 1 5