Cours de Déontologie et Législation à la Sorbonne Université - Octobre 2023 PDF

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Ce document présente le cours de déontologie et de législation pour étudiants en psychomotricité et orthophonie à la Sorbonne Université, ainsi que le droit de la santé. Le document aborde les points fondamentaux de la notion de règle de droit en France.

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Faculté de médecine, Sorbonne université «Déontologie et législation» Troisième année en psychomotricité et en orthophonie par Bénédicte BEVIERE - BOYER, Maître de conférences-HDR à l’Université de Paris 8, Faculté de droit, Centre de recherches juridiques d...

Faculté de médecine, Sorbonne université «Déontologie et législation» Troisième année en psychomotricité et en orthophonie par Bénédicte BEVIERE - BOYER, Maître de conférences-HDR à l’Université de Paris 8, Faculté de droit, Centre de recherches juridiques de Paris 8 Lundi 9 octobre 2023, Amphi F au 105 Boulevard de l’hôpital 75013 Paris Cours introductif Objectifs: «Déontologie et législation» - Réfléchir ensemble sur les grandes notions du droit de la santé (droit du patient, obligations des professionnels de santé, droit de la responsabilité) et de la législation concernant directement les psychomotriciens et orthophonistes. - Appréhender la déontologie - Envisager des éléments sur le vieillissement, notamment la fin de vie, les soins en psychiatrie, la protection de l’enfance - Envisager quelques éléments en droit du travail Enjeux: faire comprendre que le droit est omniprésent dans votre profession et que vous avez tout intérêt à le connaître pour mieux vous protéger. I – INTRODUCTION AU DROIT ET DROIT DE LA SANTE A – PRESENTATION GENERALE DU DROIT La notion de règle de droit ∙ La règle de droit, appelée aussi droit objectif, est constituée par l’ensemble des règles juridiques qui régissent la vie des hommes vivants en société. Le droit de la santé, le droit de la bioéthique, la politique de santé publique sont constitués d’une multitudes de règles de droit. ∙ Le droit positif est le droit en vigueur dans un pays donné, à une époque donnée. Les fondements de la règle de droit ∙ La règle de droit est élaborée en raison: − d’un besoin de sécurité puisque la règle de droit permet d’établir ce qui peut être fait et ce qui ne peut pas l’être, − d’un besoin de justice puisque la règle de droit doit être juste, ce qui implique l’équité. Par exemple, il ne saurait y avoir de discriminations dans l’accès aux soins. L’impossible discrimination dans l’accès à la prévention ou aux soins Article L1110-3 du code de la santé publique Aucune personne ne peut faire l'objet de discriminations dans l'accès à la prévention ou aux soins. Un professionnel de santé ne peut refuser de soigner une personne, y compris refuser de délivrer un moyen de contraception en urgence, pour l'un des motifs visés au premier alinéa de l'article 225-1 ou à l'article 225-1-1 du code pénal ou au motif qu'elle est bénéficiaire de la protection complémentaire en matière de santé prévue à l'article L. 861-1 du code de la sécurité sociale, ou du droit à l'aide prévue à l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles. Toute personne qui s'estime victime d'un refus de soins illégitime peut saisir le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le président du conseil territorialement compétent de l'ordre professionnel concerné des faits qui permettent d'en présumer l'existence. Cette saisine vaut dépôt de plainte. Elle est communiquée à l'autorité qui n'en a pas été destinataire. Le récipiendaire en accuse réception à l'auteur, en informe le professionnel de santé mis en cause et peut le convoquer dans un délai d'un mois à compter de la date d'enregistrement de la plainte. Hors cas de récidive, une conciliation est menée dans les trois mois de la réception de la plainte par une commission mixte composée à parité de représentants du conseil territorialement compétent de l'ordre professionnel concerné et de l'organisme local d'assurance maladie. En cas d'échec de la conciliation, ou en cas de récidive, le président du conseil territorialement compétent transmet la plainte à la juridiction ordinale compétente avec son avis motivé et en s'y associant le cas échéant. En cas de carence du conseil territorialement compétent, dans un délai de trois mois, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie peut prononcer à l'encontre du professionnel de santé une sanction dans les conditions prévues à l'article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale. Hors le cas d'urgence et celui où le professionnel de santé manquerait à ses devoirs d'humanité, le principe énoncé au premier alinéa du présent article ne fait pas obstacle à un refus de soins fondé sur une exigence personnelle ou professionnelle essentielle et déterminante de la qualité, de la sécurité ou de l'efficacité des soins. La continuité des soins doit être assurée quelles que soient les circonstances, dans les conditions prévues par l'article L. 6315-1 du présent code. Les modalités d'application du présent article sont fixées par voie réglementaire. Les caractères de la règle de droit La règle de droit est une règle de conduite sociale. − Elle a pour objectif de permettre d’organiser la vie en société par un tissu de rapports juridiques. − Il peut s’agir : + de rapports entre des personnes, + de rapports entre des actes (contrats), + de rapports entre des biens (meubles, immeubles). Elle est générale. Ainsi, aux termes de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, elle « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». − Elle s’applique uniformément à tous les individus (égalité pour tous dans l’application de la règle de droit). − Elle est impersonnelle et ne tient pas compte des intérêts et des particularismes individuels, ce qui lui donne un caractère objectif. Elle est absolue. Elle est abstraite. Elle est obligatoire pour tous, tant pour les individus, que pour les juges. A cet égard, selon l’adage « nul n’est censé ignorer la loi », tous les individus doivent la respecter et s’y soumettre. Elle est sanctionnée par l’autorité publique par la contrainte. − La loi doit être assortie de sanctions appuyées par l’autorité publique. − Ce peut être une sanction pénale lorsque l’infraction met en jeu les rapports de l’individu avec la société. − Ce peut être une sanction civile lorsqu’elle concerne des rapports d’individus entre eux. La sanction civile peut être + soit préventive Ex : le rôle du maire dans le mariage, + soit coercitive Ex : une saisie pour contraindre un débiteur à payer ses dettes, + soit réparatrice Ex : des dommages et intérêts pour réparer un dommage. Le processus législatif de la règle de droit La distinction entre le droit public et le droit privé Le droit public ∙ Le droit public est « l’ensemble des règles qui, dans un Etat donné, ont pour objet l’organisation de cet Etat et les rapports entretenus entre l’Etat, ses agents et les particuliers ». ∙ L’objectif est la satisfaction de l’intérêt général. ∙ Ce droit est impératif. Il est impossible d’y déroger. ∙ Le droit public se décompose aussi en d’autres branches du droit telles que : − le droit constitutionnel composé par l’ensemble des règles relatives à la forme de l’Etat, à la constitution du gouvernement et des pouvoirs publics, à la participation des citoyens à l’exercice de ces pouvoirs − le droit administratif composé par l’ensemble des règles relatives à l’organisation des collectivités locales (Etat, Régions, Départements, Communes) et des services publics (Enseignement, santé), ainsi qu’à leurs rapports avec les particuliers. − le droit des finances publiques composé par l’ensemble des règles relatives aux ressources et aux dépenses de l’Etat, des collectivités publiques et des services publics (budget, impôt, taxes). − le droit international public composé par l’ensemble des règles relatives aux rapports entre Etats (traités internationaux) et aux fonctionnements des organisations internationales (ex : ONU, OMPI). ∙ Ce droit est de la compétence des juridictions administratives : le Conseil d’Etat, les Cours d’appel administratives, les tribunaux administratifs. Si un professionnel de santé exerce dans un établissement public hospitalier, ses actes relèvent du droit public, il convient d’en appliquer les règles (plus les règles du code de la santé publique) Le droit privé est « l’ensemble des règles qui gouvernent les rapports des particuliers entre eux ou avec les collectivités privées, telles que les sociétés ou les associations ». − Plus précisément, il s’agit de l’ensemble des règles relatives à la personne, laquelle est envisagée + elle-même (état civil, nom), + dans ses rapports avec les autres personnes que ce soit au sein de la famille proprement dite (mariage, filiation, succession), + hors de la famille (contrat, propriété, responsabilité). ∙ L’objectif est la satisfaction des intérêts individuels. − Ce droit insiste particulièrement sur la volonté individuelle. Les règles sont souvent supplétives : les sujets de droits peuvent décider de les écarter. − Ce droit est de la compétence des juridictions judiciaires : la Cour de cassation, les Cours d’appel, les tribunaux d’instance, de grande instance, les tribunaux de commerce… Le droit privé comprend: Le droit civil, qui constitue, par ses principes, le droit commun, applicable à toute situation dès lors qu’il n’existe pas de règle spéciale. Il se décompose en spécialités distinctes telles que : le droit des personnes, le droit de la famille, le droit des obligations, le droit des contrats spéciaux (vente, bail, entreprise),le droit des successions. Les autres branches du privé sont des droits d’exception. La réglementation, qui en est à l’origine, est particulière et spécifique. − Le droit des affaires : qui concerne les commerçants, les actes de commerce, le fonds de commerce, les sociétés commerciales. − Le droit pénal : qui réprime les infractions par des sanctions. − Le droit international privé : qui régit les personnes privées lorsque leurs rapports comportent un élément d’extranéité, c’est-à-dire un élément étranger. Ex : mariage d’une française avec un étranger. − Le droit du travail : qui s’applique aux relations individuelles et collectives du travail entre les employeurs et les salariés (contrat de travail, conventions collectives, droit de grève, syndicats). le droit de l’immobilier, le droit des assurances, le droit bancaire, financier, boursier, le droit de la concurrence, le droit de la consommation. Si un professionnel de santé exerce dans un établissement de santé privé (clinique), les règles du droit Les cas d’imbrication droit privé/droit public De plus en plus, Droit privé et Droit public s’imbriquent ou du moins ne sont pas aussi indissociables qu’ils n’y paraissent. − Par exemple, le droit pénal, qui réprime un délinquant lorsqu’il cause un dommage à une victime, relève a priori du droit privé. Néanmoins, en même temps, son objectif est d’assurer la cohésion sociale, ce qui relève du droit public. De même, le code de la santé publique a vocation à s’appliquer autant pour l’exercice des professionnels de santé, qu’il exercent dans des établissements publics ou dans des établissements privé de santé. A ce titre, les règles relative à la responsabilité médicale intégrées dans le code de la santé publique ont vocation à s’appliquer à l’ensemble des professionnels de santé, qu’ils relèvent d’un établissement public hospitalier ou d’un établissement privé (clinique). Une inflation législative majeure Des réflexes professionnels de santé à avoir pour l’appréhension du droit - Se fier uniquement au droit positif accessible en ligne (cours, ouvrages et autres sont souvent obsolètes) Code civil Code de la santé publique (comprenant les codes de déontologies) Code de l’action sociale et de la famille Code de la sécurité sociale Code du travail Code pénal, etc. - Tous les codes, textes de lois et jurisprudences sont accessibles gratuitement en ligne : https://www.legifrance.gouv.fr/ Très important pour les professionnels de santé d’accéder à legifrance La hiérarchie des normes Organisation juridictionnelle B – LE DROIT DE LA SANTE La plupart des textes relatifs au droit de la santé intégrés dans le Code civil (droit commun) et dans le Code de la santé publique Dans le Code civil: grands principes fondamentaux qui sont aussi repris dans le code de la santé publique Article 16 : La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie. Article 16.1: Chacun a droit au respect de son corps. Le corps humain est inviolable. Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l'objet d'un droit patrimonial. Article 16.3: Il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l'intérêt thérapeutique d'autrui. Le consentement de l'intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n'est pas à même de consentir. Code de la santé publique Comprend de nombreuses règles sur: - Le droits des personnes malades et des usagers de santé - Droit de la recherche - Droit des professionnels de santé - Politique de santé publique, etc. - Etablissements de santé (article L.6111-2 du code de la santé publique) - Les règles concernant les professionnels de santé et les codes de déontologie d’entre eux, etc. Code de la santé publique: parties législatives et règlementaires Partie législative: les règles de droit exposées de manière générale Partie règlementaire: les règles de droit exposées en détail. Indispensable lors d’un problème juridique à régler d’aller voir autant la partie législative que règlementaire Le droit à l’information de la personne sur sa santé (article L.1111-2 du code Article L1111-2 de la santé publique) I. - Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Elle est également informée de la possibilité de recevoir, lorsque son état de santé le permet, notamment lorsqu'elle relève de soins palliatifs au sens de l'article L. 1110-10, les soins sous forme ambulatoire ou à domicile. Il est tenu compte de la volonté de la personne de bénéficier de l'une de ces formes de prise en charge. Lorsque, postérieurement à l'exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d'impossibilité de la retrouver. Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel. La volonté d'une personne d'être tenue dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de transmission. II. - Les droits des mineurs mentionnés au présent article sont exercés par les personnes titulaires de l'autorité parentale ou par le tuteur, qui reçoivent l'information prévue par le présent article, sous réserve des articles L. 1111-5 et L. 1111-5-1. Les mineurs ont le droit de recevoir eux-mêmes une information et de participer à la prise de décision les concernant, d'une manière adaptée à leur degré de maturité. III. - L'information prévue au présent article est délivrée aux personnes majeures protégées au titre des dispositions du chapitre II du titre XI du livre Ier du code civil d'une manière adaptée à leur capacité de compréhension. Cette information est également délivrée à la personne chargée d'une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne. Elle peut être délivrée à la personne chargée d'une mesure de protection juridique avec assistance à la personne si le majeur protégé y consent expressément. IV. - Des recommandations de bonnes pratiques sur la délivrance de l'information sont établies par la Haute Autorité de santé et homologuées par arrêté du ministre chargé de la santé. En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen. L'établissement de santé recueille auprès du patient hospitalisé les coordonnées des professionnels de santé auprès desquels il souhaite que soient recueillies les informations nécessaires à sa prise en charge durant son séjour et que soient transmises celles utiles à la continuité des soins après sa sortie. Le droit à l’information de la personne sur sa santé (article R.1111-1 et suivants du code de la santé publique) Article R1111-1 L'accès aux informations relatives à la santé d'une personne, mentionnées à l'article L. 1111-7 et détenues par un professionnel de santé ou un établissement de santé, est demandé par la personne concernée, son ayant droit, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité en cas de décès de cette personne, la personne ayant l'autorité parentale, la personne chargée d'une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne ou, le cas échéant, par le médecin qu'une de ces personnes a désigné comme intermédiaire. L'accès peut également être demandé par la personne chargée d'une mesure de protection juridique avec assistance à la personne si le majeur protégé y consent expressément. La demande est adressée au professionnel de santé et, dans le cas d'un établissement de santé, au responsable de cet établissement ou à la personne qu'il a désignée à cet effet et dont le nom est porté à la connaissance du public par tous moyens appropriés. Avant toute communication, le destinataire de la demande s'assure de l'identité du demandeur et s'informe, le cas échéant, de la qualité de médecin de la personne désignée comme intermédiaire. Selon les cas prévus par l'article L. 1111-7 précité, le délai de huit jours ou de deux mois court à compter de la date de réception de la demande ; lorsque le délai de deux mois s'applique en raison du fait que les informations remontent à plus de cinq ans, cette période de cinq ans court à compter de la date à laquelle l'information médicale a été constituée. Article R1111-2 A son choix, le demandeur obtient du professionnel de santé ou de l'établissement de santé communication des informations demandées, soit par consultation sur place, avec, le cas échéant, remise de copies de documents, soit par l'envoi de copies des documents. Les frais de délivrance de ces copies sont laissés à la charge du demandeur dans les conditions fixées par l'article L. 1111-7. Dans le cas où les informations demandées sont détenues par un établissement de santé et si les dispositifs techniques de l'établissement le permettent, le demandeur peut également consulter par voie électronique tout ou partie des informations en cause. Dans le cas d'une demande de consultation sur place adressée à un établissement de santé, le demandeur est informé du dispositif d'accompagnement médical organisé par l'établissement dans les conditions fixées à l'article R. 1112-1. Les copies sont établies sur un support analogue à celui utilisé par le professionnel de santé ou l'établissement de santé, ou sur papier, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques du professionnel ou de l'organisme concerné.

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