Sources Du Droit - Polycopié FR 3 PDF

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This document is a French-language handout about the sources of law. It explores historical and material sources, as well as formal sources of law, including the concept of custom. The handout is intended for undergraduate students in a legal studies course.

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27 TITRE IV LES SOURCES DU DROIT SECTION 1 DÉFINITION ET NOTION 28 Il existe différentes sources du droit. Tout d'abord les sources histo...

27 TITRE IV LES SOURCES DU DROIT SECTION 1 DÉFINITION ET NOTION 28 Il existe différentes sources du droit. Tout d'abord les sources historiques. Aujourd'hui, ces sources sont surtout utiles pour expliquer l'évolution de nos institutions juridiques. Il existe également des sources matérielles, c'est-à-dire les phénomènes sociaux qui contribuent à former la matière du droit. Ces sources du droit relèvent de l'étude de l'origine du droit, qui consiste à savoir comment le droit est né et s'est développé. Il existe enfin les sources formelles, c'est-à-dire les faits qui donnent à une règle le caractère de droit applicable (ou « positif »). Le présent cours s’intéresse aux sources formelles du droit, qui seront détaillées dans les sections suivantes. SECTION 2 LA COUTUME 29 La coutume peut être définie comme étant le droit non édicté et en principe non écrit qui résulte d’un usage implanté durablement dans une collectivité et tenu par elle comme juridiquement obligatoire. La coutume est formée de la conjonction de deux éléments, l'un objectif, l'autre subjectif. L'élément objectif de la coutume est l'observation uniforme d'une règle par l'ensemble des intéressés et l'application de celle-ci pendant de nombreuses années (caractère immémorial). Le second élément de la coutume est subjectif. Il s'agit d'un aspect psychologique. Un usage, même bien établi, ne peut devenir une coutume que si les intéressés qui le respectent ont la conviction que la coutume est obligatoire et qu'ils sont obligés d'agir comme ils le font, qu'ils sont liés par la pratique communément admise. Les exemples de coutume sont relativement rares. On peut mentionner le 30 secret bancaire, avant qu’il ne soit reconnu dans la loi. La coutume étant une règle de droit non écrite, il n'est pas aisé d'en établir l'existence. Il incombe à celui qui allègue une coutume de la prouver. 22 Les difficultés liées à la démonstration de l’existence ou de l’inexistence d’une coutume (lorsqu’elle était par exemple tombée en désuétude) font que les coutumes ont progressivement été remplacées par des lois. Ces inconvénients de la coutume font également qu’elle est totalement exclue en droit pénal suisse. En effet, l’art. 1 CP prévoit qu’une peine ou une mesure ne peuvent être prononcées qu'en raison d'un acte « expressément réprimé par la loi ». SECTION 3 LA LOI 31 Chapitre 1 Les traités internationaux 32 Un traité international consiste, comme un contrat, en deux ou plusieurs manifestations concordantes de volonté, qui émanent de deux ou plusieurs sujets de droit international public (par exemple : des États), et qui créent des règles de droit en vertu de l’ordre juridique international. Par sujets de droit international, on entend les États et les organisations internationales. À titre d’exemples de traités internationaux, on peut citer la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (« CEDH ») ou les nombreuses Conventions en vue d’éviter les doubles impositions conclues par la Suisse avec d’autres États. Chapitre 2 La Constitution fédérale §1 La notion de Constitution 1. Définition et fonctions de la Constitution 33 La Constitution est la loi fondamentale d'une nation. Elle est la base de son système juridique. En Suisse, il s’agit de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (« Cst. »), totalement révisée en 1999. La Constitution est un texte qui véhicule un projet politique, un symbole. Elle énonce les règles cardinales d’un État quant à son fonctionnement et aux droits fondamentaux des citoyens. En ce sens, la Constitution a donc notamment une fonction idéologique. Elle est le reflet de la conception que les citoyens qui l’ont adoptée se font du rôle de l’État. 23 2. Les diverses conceptions de l’État (aperçu historique) i) La conception patrimoniale On a rencontré, surtout au Moyen-Âge, la conception patrimoniale ou patriarcale de l'État qui veut que l'État, la population et le territoire appartiennent au prince comme un élément de son patrimoine. Ces conceptions n'ont guère eu d'influence sur la Constitution suisse. ii) La conception du pacte social Les conceptions absolutistes ont été attaquées dès le XVIIIe siècle par Montesquieu (L'esprit des lois, 1748) et surtout par Rousseau dans le « contrat social » (1762). Cette conception implique l’aliénation de toute ou partie des droits des citoyens en faveur de la Communauté en échange d’une liberté plus restreinte, mais garantie. iii) La conception libérale Selon la conception libérale de l'État, qui s'implante en Suisse vers 1830, la liberté est le plus grand bien des Hommes. Cependant, la liberté ne saurait être absolue. Elle est en effet limitée par la liberté des autres, mais uniquement dans cette mesure, ce qui suppose un certain ordre étatique. Le libéralisme s'oppose aussi au pacte social, car il ne suppose pas l'aliénation de libertés ou de pouvoirs aux organes de l'État, mais simplement la délégation de ces pouvoirs. iv) La conception étatiste Pour contrecarrer le libéralisme très strict qu’a connu le XIXe siècle, des conceptions beaucoup plus étatistes se sont développées. L'indépendance de l'individu doit céder le pas aux besoins de l'État, qui devient le protecteur du faible en particulier, et du peuple en général. On parle alors de l'État providence. Ce n'est plus l'individu qui est placé au sommet, mais l'État. 3. La révision totale de la Constitution fédérale en 1999 La Constitution suisse a fait l'objet d'une révision totale en 1999. La Constitution de 1848 avait impliqué le passage d'une Confédération d'États à un État fédéral dont le pouvoir central disposait déjà d'attributions étendues. La Constitution de 1874 a encore considérablement étendu les pouvoirs de la Confédération. Notre Constitution était et reste nettement marquée du sceau libéral, tout en reconnaissant les droits sociaux (État providence). 24 §2 La séparation des pouvoirs 34 En ce qui concerne la structure de l'État, il convient de relever que notre Constitution consacre, bien qu'implicitement, le principe de la séparation des pouvoirs. On distingue aujourd'hui de façon générale : - Le pouvoir législatif (le Parlement), qui a pour activité première d'élaborer les lois. Au niveau de la Confédération, le pouvoir législatif est exercé par l’Assemblée fédérale, qui est formée de deux chambres : le Conseil national (200 membres), formé des représentants du peuple, le nombre de sièges par canton étant proportionnel à sa population (art. 149 Cst.), et le Conseil des États (46 membres) formé des représentants des cantons, chaque canton possédant deux sièges, à l’exception des cantons d’Obwald, Nidwald, Bâle- Ville, Bâle-Campagne, Appenzell Rhodes-Extérieures et Appenzell Rhodes-Intérieures qui ont chacun un siège (art. 150 Cst.). - Le pouvoir exécutif (le gouvernement et l'administration), chargé de l'exécution des lois et de la gestion de l'État. Au niveau de la Confédération, le pouvoir exécutif est exercé par le Conseil fédéral, formé de sept membres (Conseillers fédéraux), et de l’administration fédérale qui lui est subordonnée (art. 174 et 175 Cst.). - Le pouvoir judiciaire (les tribunaux), qui a pour tâche d’appliquer la loi, qu'il s'agisse de tribunaux civils, pénaux, administratifs ou militaires. En Suisse, la plus haute instance du pouvoir judiciaire est le Tribunal fédéral (art. 188 al. 1 Cst.). Le principe de la séparation des pouvoirs, appliqué de façon absolue, veut, d'une part, que tous les organes restent dans leur sphère de compétence (séparation des compétences) et, d'autre part, que chacun de ces organes se compose de personnes différentes (séparation des personnes). §3 L’État de droit 35 Notre Constitution consacre le principe de l'État de droit et de la volonté du peuple ou, si l'on veut, de la démocratie. L'État de droit suppose en effet, sur un plan formel, que les pouvoirs des gouvernants ne soient pas en contradiction avec les normes du droit positif et, sur un plan matériel, que l'activité de l'État s'inspire de l'idéal de la justice, de la liberté et de la dignité humaine. Le citoyen suisse 25 participe ainsi activement à la formation de la volonté de l’État (initiatives populaires et référendum notamment, auxquels il faut ajouter les élections), tandis que les libertés individuelles sont garanties. §4 L’État fédéral 36 La Constitution consacre également l'État fédéral qu'est la Suisse. De manière très générale, le fédéralisme implique une structure étatique à deux niveaux, chacun disposant d’une autonomie et d’un ordre juridique propres. En Suisse, la Confédération est formée du peuple et des 26 cantons (art. 1 Cst.). Elle acquiert une personnalité propre. Ainsi, l’État fédéral est un État différent des États membres (soit les cantons), avec des compétences différentes. La Confédération peut ainsi légiférer dans les domaines prévus par la Constitution, notamment le droit civil et le droit pénal, étant précisé que le droit fédéral prime le droit cantonal (art. 49 al. 1 Cst.). à Schéma récapitulatif des grands principes de la Constitution fédérale : cf. slides 37 du cours. §5 La procédure de modification de la Constitution fédérale 38 L’art. 192 al. 1 Cst. dispose que la Constitution peut être révisée en tout temps, totalement ou partiellement. De manière générale, une révision de la Constitution peut être proposée par le peuple ou décrétée par l’Assemblée fédérale (art. 193 al. 1 et 194 al. 1 Cst.). Lorsque c’est le peuple qui propose une révision, à savoir au moins 100'000 citoyens ayant le droit de vote (art. 138 al. 1 et 139 al. 1 Cst.), on est en présence d’une initiative populaire. Les révisions de la Constitution sont soumises au référendum obligatoire, c’est-à-dire au vote du peuple et des cantons (art. 140 al. 1 lit. a Cst.). Au niveau fédéral, l’initiative populaire s’applique exclusivement au niveau constitutionnel, ce qui veut dire qu’elle ne peut porter que sur une modification de la Constitution (et non d’une loi fédérale ou d’une ordonnance). Elle peut être proposée par 100’000 citoyens ayant le droit de vote. En droit cantonal, l’initiative populaire peut aussi porter sur une loi (initiative législative). À titre d’exemple en droit de l’entreprise, on peut citer l’initiative populaire 39 « Minder », lancée suite à plusieurs scandales financiers, dont en particulier celui de la compagnie aérienne Swissair. L’opinion publique avait alors été choquée par les rémunérations et les indemnités de départ, jugées abusives, versées aux 26 dirigeants lorsqu’ils quittaient des entreprises qui enregistraient pourtant des pertes financières. En substance, l’initiative prévoit l’interdiction des indemnités de départ (parachutes dorés) ainsi qu’un contrôle renforcé des dirigeants de l’entreprise (conseil d’administration et direction) par l’assemblée générale, quant à leur élection et leur rémunération (art. 95 al. 3 Cst.). Chapitre 3 La loi fédérale §1 La notion de loi fédérale 40 Les lois fédérales sont la forme par excellence de l’acte normatif par lequel la Confédération exerce les compétences que la Constitution lui attribue. Le législateur fédéral intervient normalement dans les domaines qui sont de la compétence de la Confédération en adoptant une loi fédérale. On appelle législateur l’organe compétent pour adopter, modifier ou abroger les lois formelles. En Suisse, le législateur est formé par l’Assemblée fédérale et le peuple, car les lois fédérales émanent de l’Assemblée fédérale, mais doivent être soumises au vote du peuple (référendum facultatif) lorsque 50’000 citoyens ou huit cantons le demandent (art. 141 al. 1 lit. a Cst.). La Constitution fédérale détermine la forme et le contenu de la loi fédérale. Celle-ci se caractérise en premier lieu par le fait qu’elle est soumise au référendum facultatif (art. 141 al. 1 lit. a Cst.) et qu’elle contient des règles de droit importantes (art. 163 al. 1 et 164 al. 1 Cst.). §2 La procédure législative fédérale L’élaboration d’une loi commence par une initiative législative. Elle émane généralement du Conseil fédéral (art. 181 Cst.), mais aussi de l’Assemblée fédérale ou des cantons (art. 160 al. 1 Cst.). Une fois cette impulsion donnée, un avant-projet de loi est élaboré par un expert mandaté par l’administration ou par une commission d’experts externes dans laquelle peuvent être représentés différents groupes d’intérêts (scientifiques, représentants des groupes économiques et professionnels, etc.). Le projet est ensuite soumis au Conseil fédéral qui, s’il l’accepte, ouvre la procédure de consultation des cantons, des partis politiques et des milieux intéressés (art. 147 Cst.). Cette phase de la procédure s’achève par un projet de loi accompagné d’un message que le Conseil fédéral adresse aux chambres fédérales. Dans la phase suivante, une commission parlementaire examine le projet de loi du Conseil fédéral. Une fois le travail des commissions parlementaires terminé, 27 le projet fait l'objet de délibérations au sein des deux Conseils puis d'un vote d'ensemble et enfin d'un vote final. Si le projet est rejeté par un Conseil ou par les deux Conseils, il est réputé n'avoir pas abouti. À la suite du vote final des deux chambres, le texte est publié dans la feuille fédérale (soit l’organe de publication officiel de la Chancellerie fédérale) avec indication de la date jusqu’à laquelle le délai référendaire de 100 jours court (art. 13 al. 1 lit. e LPubl). En effet, comme nous l’avons mentionné, la loi peut faire l'objet d'un référendum facultatif si, dans les 100 jours qui suivent sa publication, 50'000 citoyens ou huit cantons au moins le demandent (art. 141 al. 1 lit. a Cst.). S'il n'y a pas eu de référendum, ou qu'il n'a pas abouti, le Conseil fédéral fixe la date d'entrée en vigueur de la loi et ordonne sa publication dans le recueil officiel du droit fédéral ainsi que dans le recueil systématique du droit fédéral. Chapitre 4 Les ordonnances du Conseil fédéral 41 Le Conseil fédéral jouit aussi d’un pouvoir réglementaire et peut adopter des règles de droit sous la forme d’ordonnances, à condition que la Constitution fédérale ou une loi fédérale l’y autorise (art. 182 al. 1 Cst.). Ces ordonnances contiennent des règles de droit, mais ne sont jamais soumises au référendum, contrairement aux lois fédérales (art. 141 al. 1 lit. a Cst. a contrario). Elles peuvent par exemple contenir des dispositions d’exécution qui viennent concrétiser et préciser les dispositions d’une loi fédérale. Les ordonnances du Conseil fédéral peuvent être classées en diverses catégories : Une distinction entre les ordonnances législatives et les ordonnances administratives ; Une distinction entre les ordonnances d’exécution et les ordonnances de substitution ; Une distinction entre les ordonnances indépendantes et les ordonnances dépendantes. À titre d’exemple d’ordonnance et d’illustration de la hiérarchie des normes décrite dans les chapitres précédents, citons les règles concernant le bail à loyer. La Constitution prévoit que le droit privé, dont le droit du bail fait partie, est du ressort de la Confédération (art. 122 al. 1 Cst.). Sur cette base, le législateur fédéral a pu adopter le Code des obligations (soit une loi fédérale), qui règle la matière du bail à loyer aux art. 253 ss CO. Dans ce cadre, la loi prévoit expressément que le Conseil fédéral édictera des dispositions d’exécution, notamment pour les locaux d’habitation (art. 253a al. 3 CO). Sur cette base à 28 nouveau, le Conseil fédéral a adopté une ordonnance, l’ordonnance sur le bail à loyer et le bail à ferme d'habitation et de locaux commerciaux, qui a pour objet de préciser les dispositions légales du CO en matière de bail à loyer. Chapitre 5 L’application de la loi 43 La loi est souvent précise et claire. Il en va ainsi, par exemple, de l'art. 14 CC selon lequel « la majorité est fixée à 18 ans révolus ». Il existe cependant de nombreux cas où la loi est plus imprécise. Souvent, la loi fait référence à des « concepts juridiques indéterminés », qui lui permettent de garder le caractère général et abstrait qui caractérise la règle de droit. Par exemple, l'art. 337 CO prévoit que l'employeur et le travailleur peuvent résilier immédiatement le contrat de travail pour de « justes motifs ». Dans un tel cas, la loi fait référence au pouvoir d’appréciation du juge (art. 4 CC). Cette notion doit donc être appréciée en tenant compte de l’ensemble des circonstances et laisse au juge un véritable pouvoir d’appréciation. Lorsque le pouvoir d’appréciation du juge est réservé, celui-ci doit appliquer les règles du droit et de l’équité (pouvoir d’appréciation de l’art. 4 CC, qui doit être distingué de l’interprétation de la loi selon l’art. 1 CC). Il s’agit dans ces cas de préciser le contenu normatif dans un cas concret, sur invitation du législateur. Il peut arriver que le texte de la loi ne soit pas clair, auquel cas se pose la question de son interprétation. Le juge interprète la loi en se fondant sur différentes méthodes d’interprétation : - La méthode littérale consiste à étudier le texte même de la loi, la manière dont les alinéas sont disposés, les virgules placées, si les mots sont reliés par un « ou » ou par un « et ». La loi s’interprète en premier lieu selon la méthode littérale. Ce n’est donc que si le texte n’est pas absolument clair ou si plusieurs interprétations sont possibles que le juge utilisera les autres méthodes, décrites ci-dessous, en choisissant celle qui paraît la plus adéquate dans le cas particulier, sans ordre de priorité entre ces méthodes (ATF 83 I 178 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_701/2014 du 13 avril 2015, consid. 6.1). Les textes de loi rédigés dans les trois langues officielles sont équivalents dans leur version respective (cf. art. 70 al. 1 Cst.). Il n'y a donc pas de prédominance d'une langue sur l'autre. 29 - La méthode historique consiste à rechercher la volonté du législateur en examinant les travaux préparatoires de la loi (Message du Conseil fédéral, procès-verbaux des délibérations, exposé des motifs, etc., élaborés dans le cadre de l’adoption de la loi). - La méthode téléologique consiste à interpréter la loi dans le sens qui paraît à l'heure actuelle donner satisfaction à la justice, en tenant compte de l’évolution des circonstances. En d’autres termes, l’interprétation téléologique recherche le but que poursuit une norme pour en déterminer le sens. - La méthode systématique part de l'idée que l'ordre juridique forme un tout et l'on cherche à mettre la disposition concernée en harmonie avec les autres lois faisant partie du même système législatif. Seules les situations dans lesquelles le législateur a omis d’envisager une éventualité ou n’a pas songé à régler un point essentiel permettent au juge de créer une règle de droit (il s’agit des lacunes « proprement dites »). À l’inverse, lorsque la loi ne s’exprime pas sur une question parce que le législateur a intentionnellement souhaité résoudre négativement cette question, il s’agit d’un silence qualifié de la loi (lacunes « improprement dites »), que le juge ne peut pas combler. Enfin, pour terminer cet examen de la loi en tant que source formelle du 48 droit, il est nécessaire de mentionner les trois règles suivantes : 1. Les lois spéciales priment les lois générales (lex specialis derogat generali). 2. La nouvelle loi l'emporte sur la loi ancienne (lex posterior derogat priori). 3. Une loi ne prévoit de dispositions que pour l'avenir, elle n'a pas d'effet rétroactif. 30 SECTION 4 LA JURISPRUDENCE Chapitre 1 Le rôle de la jurisprudence 49 La jurisprudence est l'ensemble des décisions rendues pas les tribunaux (soit par les juges). Le rôle de la jurisprudence, ou si l'on préfère des juges, est considérable dans le développement et l'évolution du droit. Il se manifeste notamment sous l’angle de : - l'application de la loi, notamment en présence d’un concept juridique indéterminé ; - l'interprétation de la loi en vue, le cas échéant, du comblement d’une lacune proprement dite. Chapitre 2 Les effets de la jurisprudence 50 En pratique, un jugement rendu par un tribunal a toujours une double portée : - Une portée concrète : le jugement met fin à un litige ou sanctionne la violation d'une règle de droit. Cet effet ne concerne que les parties au procès. - Une portée générale : en prenant sa décision, le juge fait un raisonnement qui l'amène à appliquer la règle générale et abstraite au cas particulier. En raison du principe de la sécurité du droit et afin d’éviter de se livrer à l’arbitraire, les tribunaux respectent les décisions antérieures, raison pour laquelle tout jugement a également un effet sur les litiges ultérieurs. Ainsi, la jurisprudence joue un rôle capital dans l'élaboration du droit. Les règles qui se dégagent de la jurisprudence n'ont évidemment pas la même force que celles qui résultent de la loi. Mais si, de façon régulière, la jurisprudence interprète et applique la loi dans le même sens, les principes ainsi établis vont acquérir une force normative. C'est dans ce sens que l'on peut dire que la jurisprudence est une source du droit. Les jugements des tribunaux n'ont pas tous la même importance. On distingue deux sortes de décisions : 31 - Les décisions d'espèce : ce sont des décisions dans lesquelles le juge se borne à appliquer la loi au cas concret, sans pour autant régler un problème nouveau. - Les décisions de principe : ce sont les décisions qui se distinguent d'une décision d'espèce par le fait que, pour trancher une affaire qui se présente sous un aspect particulier, le juge fait un pas de plus en posant une règle, un principe qui, à ses yeux, a un caractère général, valable pour d'autres cas futurs et qu'il énonce au terme d'une discussion dans laquelle il tente d'élever le débat au-dessus du cas particulier. Chapitre 3 Le revirement de jurisprudence 53 Nous l’avons vu, les décisions de justice comportent une portée générale, en ce sens que les tribunaux auront en principe tendance à faire preuve de continuité et à appliquer la loi de manière identique au fil du temps. Cela n’empêche toutefois pas le juge d’opérer un changement de jurisprudence. Le revirement de jurisprudence peut être défini comme un changement de pratique judiciaire provoqué par une nouvelle décision allant à l’encontre des décisions rendues jusqu’alors. Les revirements de jurisprudence sont relativement rares en droit suisse, car ils peuvent nuire à la sécurité du droit et créer une inégalité de traitement. Ils peuvent se justifier en présence de motifs sérieux, lorsque les conceptions juridiques ou les circonstances (état de la science, mœurs) ont évolué. SECTION 5 LA DOCTRINE 54 La doctrine est l’ensemble des textes rédigés par des auteurs sur des sujets juridiques. Les juges doivent s'en inspirer (art. 1 al. 3 CC). Il est cependant évident que les avis émis par la doctrine n'ont pas la même force obligatoire que la loi. Cas pratique : Charlie et son entreprise « EasyFlight » 57 Résolution 58 32

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