Neuropsychologie - Chapitre 6 - PDF
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Ce chapitre de neuropsychologie se concentre sur l'attention, explorant les troubles attentionnels, le rythme circadien, l'alerte et la sélectivité. Il aborde les fonctions attentionnelles et exécutives, ainsi que les mécanismes impliqués dans l'alerte tonique et l'alerte phasique.
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Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie Chapitre 6 : neuropsychologie de l’attention 1. Troubles attentionnels Avec les troubles de la mémoire, les troubles de l’attention constituent une des conséque...
Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie Chapitre 6 : neuropsychologie de l’attention 1. Troubles attentionnels Avec les troubles de la mémoire, les troubles de l’attention constituent une des conséquences les plus fréquentes d’un dysfonctionnement cérébral. Les manifestations cliniques peuvent être très variées (baisse de la vigilance, ralentissement moteur ou idéatoire, distractibilité, sensibilité à l’interférence, etc.). Les troubles attentionnels sont constatés chez 80% des patients victimes d’un traumatisme crânien. Ce sont les troubles les plus « persistants ». Le patient est facilement fatigable et n’arrive pas à mener à bien une tâche de longue durée. Le terme « attention » englobe plusieurs notions spécifiques telles que l’alerte, la sélectivité, l’attention focalisée, etc. Ces différentes composantes peuvent contribuer à des déficits spécifiques. L’efficience attentionnelle est cruciale dans la vie quotidienne et dans les interventions thérapeutiques pour les patients cérébrolésés. L'examen neuropsychologique doit inclure une évaluation des aspects de l'attention en raison de son impact sur d'autres activités cognitives, même en l'absence de signes manifestes ou de plaintes explicites. Les auteurs Van Zomeren et Brouwer classent les fonctions attentionnelles selon deux axes : 1) L'intensité. L'axe de l'intensité englobe des aspects tels que l'alerte et la vitesse de traitement. 2) La sélectivité. L’axe de la sélectivité concerne des fonctions telles que la focalisation, la flexibilité et la capacité de traitement. Les fonctions attentionnelles et exécutives se chevauchent, en particulier dans les aspects de sélectivité, où les mécanismes exécutifs de contrôle attentionnel interviennent. 2. Axe intensité 2.1. Alerte et vitesse de traitement de l’information L’alerte est une fonction de base qui concerne l’état d’éveil, de réactivité de l’individu, c’est-à-dire sa disposition à traiter les informations et à répondre rapidement aux stimulations de l’environnement. Dans l’alerte, deux niveaux doivent être distingués : l’alerte tonique et l’alerte phasique. 2.1.1. L’alerte tonique L'alerte tonique se réfère au niveau général d'activation corticale d'un individu, influençant sa capacité à réagir adéquatement aux stimuli environnementaux. Elle est associée aux fluctuations diurnes du niveau d'éveil et des performances, régulées en grande partie par le rythme circadien et influencées par des facteurs tels que l'alimentation et la prise de certains médicaments. 1 Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie ☞ Le rythme circadien Le rythme circadien est un cycle biologique qui régule les fonctions physiologiques telles que le sommeil et l'éveil. Ce rythme est principalement influencé par la lumière du jour et est contrôlé par diverses structures cérébrales. Les cellules ganglionnaires de la rétine jouent un rôle crucial dans cette régulation en détectant la lumière bleutée et en envoyant des signaux au cerveau pour synchroniser notre horloge biologique interne. Les noyaux de l'hypothalamus sont centraux dans ce processus, agissant comme le "chef d'orchestre" du rythme circadien. Ils reçoivent les informations lumineuses des cellules de la rétine et régulent la production de mélatonine, une hormone clé impliquée dans la régulation du sommeil. Chez les patients dans le coma, il a été observé que le rythme circadien peut être altéré voire absent, ce qui est considéré comme une condition préalable à la sortie du coma. Cette recherche suggère l'importance du rythme circadien dans les processus de conscience et de récupération après des états comateux. La régulation de l'alerte tonique repose sur des structures cérébrales telles que la formation réticulée du tronc cérébral et les noyaux hypothalamiques de l'éveil. Après un traumatisme cérébral, une perte neuronale dans ces régions peut entraîner un ralentissement global, moteur et cognitif, affectant les performances du sujet dans les tâches nécessitant une réactivité rapide. La lenteur mentale est souvent observée après un traumatisme crânien et peut expliquer de nombreux troubles de l'attention. Évaluer les capacités d'alerte tonique est crucial en neuropsychologie clinique pour différencier l'impact de la vitesse de traitement des autres aspects de l'attention. Les tests couramment utilisés pour mesurer l'alerte tonique incluent les tâches de temps de réaction simple. Les ≠ troubles de l’alerte tonique sont : Coma ; Trouble du cycle circadien ; Bradypsychie : ralentissement du fonctionnement cognitif se manifestant par une baisse globale des fonctions intellectuelles lorsque la durée de réalisation est limitée, contrastant théoriquement avec des résultats corrects, ou notablement améliorés, lorsque la tâche est exécutée sans limitation de temps ; Somnolence. 2.1.2. L’alerte phasique L'alerte phasique se réfère à la capacité d'un individu à améliorer instantanément et de manière généralisée sa performance en réponse à un signal avertisseur. Ce signal prépare l'individu à réagir de manière adéquate à l'apparition imminente d'un stimulus. Par exemple, un athlète se préparant à démarrer lors du signal de départ ou une personne se préparant à attraper un objet lancé après avoir entendu "Attention!". Contrairement à l'alerte tonique qui représente un état général d'activation, l'alerte phasique est un changement soudain et transitoire, se manifestant dès 100 millisecondes après la présentation du signal, avec un effet maximal entre 500 et 1000 millisecondes. Les tests classiques pour évaluer l'alerte phasique incluent des tâches de temps de réaction où un signal avertisseur est présenté avant l'apparition de la cible. Les temps de réaction diminuent progressivement pour les intervalles les plus courts, atteignant un minimum pour les intervalles intermédiaires avant de remonter pour les intervalles les plus longs. 2 Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie Il est important de noter que l'introduction d'un signal avertisseur peut parfois perturber les temps de réaction, en particulier chez les individus ayant des troubles d'inhibition. De plus, des déficits de l'alerte phasique peuvent être mesurés électrophysiologiquement et peuvent avoir des effets délétères sur les performances, notamment en entraînant des réponses imprécises ou des échecs lors d'exigences de tâches accrues. En outre, la modalité du signal avertisseur (auditif ou visuel) peut également avoir un impact sur les performances, les signaux auditifs étant parfois moins perturbateurs que les signaux visuels dans les tâches de temps de réaction. 3. Attention soutenue et vigilance Il s’agit ici de la capacité à maintenir un niveau attentionnel suffisant pendant des périodes prolongées. Dans certains travaux, les notions d’attention soutenue et de vigilance sont utilisées indifféremment, comme des synonymes. En fait, on peut les considérer comme situées aux deux extrêmes d’un continuum : dans le cas de la vigilance, le niveau attentionnel doit être maintenu dans une situation où très peu de stimuli sont présentés ; à l’inverse, dans l’attention soutenue, le flux d’informations, rapide et continu, nécessite de la part du sujet un traitement actif ininterrompu. 3.1. Attention soutenue/maintien d’alerte L’attention soutenue consiste à maintenir un niveau d'efficacité attentionnelle stable sur des périodes prolongées. Dans des situations nécessitant une attention soutenue, un rythme de traitement de l'information trop rapide peut entraîner une surcharge du système et une interruption de l'activité en cours. Par exemple, dans le cas des interprètes effectuant une traduction simultanée lors d'une conférence, un débit de parole trop rapide peut surcharger leur système et entraîner des interruptions dans la traduction. Les situations nécessitant une attention soutenue sont nombreuses, telles que la conduite automobile en circulation dense ou le suivi d'un cours ou d'une conférence. Un déficit d'attention soutenue se manifeste souvent par une fatigue croissante au fil des activités, ce qui est fréquent chez les patients cérébrolésés. L'évaluation des capacités d'attention soutenue se fait à l'aide de tâches qui enregistrent de manière prolongée et continue la qualité et la rapidité des performances du sujet. Par exemple, la "Paced Auditory Serial Addition Task" (PASAT) consiste à additionner des chiffres présentés à un rythme de plus en plus rapide, et est sensible aux pathologies cérébrales. En outre, certains paramètres comme la fluctuation des temps de réaction peuvent être utilisés pour évaluer l'attention soutenue. Des fluctuations importantes de temps de réaction sont observées dans des conditions telles que les lésions frontales, la maladie à corps de Lewy et le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité. 3 Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie Les "trous" attentionnels, également connus sous le nom d'attentional lapses, sont des épisodes transitoires et brefs de relâchement de l'attention pendant une activité, et ils sont directement liés à l'attention soutenue. Ces lapsus attentionnels peuvent se manifester de deux façons principales : - Absence de réponse : Pendant une tâche continue, il peut y avoir des moments où le sujet ne répond pas aux stimuli présentés, ce qui peut être interprété comme un "blanc" attentionnel où l'attention semble momentanément absente. - Allongement soudain des temps de réaction : Dans d'autres cas, les temps de réaction peuvent soudainement s'allonger de manière significative, dépassant deux écarts-types par rapport à la moyenne. Cela peut indiquer un moment où l'attention du sujet a brièvement fléchi, ce qui a retardé sa capacité à répondre aux stimuli. Ces lapsus attentionnels sont généralement de courte durée, ne durant que quelques secondes, mais ils peuvent avoir un impact sur les performances globales dans des tâches nécessitant une attention soutenue. 3.2. Vigilance La vigilance est définie comme la capacité à maintenir un niveau d'attention suffisant pour détecter et réagir à des changements discrets dans l'environnement, souvent sur de longues périodes et dans des tâches monotones. Il s'agit de surveiller constamment l'apparition d'événements rares et pertinents, même lorsque ceux-ci sont peu fréquents voire inexistants. Par exemple, un chasseur en embuscade doit rester attentif pendant de longues heures pour détecter l'arrivée du gibier, ou un gardien de nuit doit surveiller en permanence plusieurs écrans vidéo pour assurer la sécurité d'une entreprise. Dans ces situations, les événements pertinents sont rares, mais l'attention du sujet doit rester constamment en éveil pour réagir rapidement en cas de besoin. L'évaluation de la vigilance se fait généralement à l'aide de tâches qui exigent du sujet de surveiller continuellement pendant plusieurs dizaines de minutes. Les performances sont évaluées en fonction du taux de détection des événements pertinents, du nombre d'omissions (manquer un événement pertinent) et de fausses alarmes (réagir à un événement non pertinent). L'analyse de la performance au fil du temps est également importante pour détecter toute dégradation de l'efficacité attentionnelle. Par exemple, la batterie Zorglub inclut un test de vigilance qui dure 25 minutes et présente différents types de stimuli au sujet. Les performances sont mesurées en fonction des temps de réaction, du nombre de réponses correctes, d'omissions et de fausses alarmes, ainsi que de la comparaison entre la première et la deuxième moitié de l'épreuve. 4. Axe sélectivité 4.1. L’attention sélective En 1890, William James a défini l'attention comme "la prise de possession par l'esprit, sous une forme claire et vivante, d'un objet parmi ce qui semble être plusieurs objets ou trains de pensées … elle implique le retrait de certaines choses afin d’en traiter efficacement d’autres ». L'attention sélective est un aspect crucial de l'attention, qui consiste à se concentrer sur des éléments spécifiques tout en ignorant les distractions. Ce processus de sélection est fondamental dans la gestion des informations complexes et nombreuses auxquelles nous sommes confrontés quotidiennement. Un modèle classique de l'attention sélective est le modèle du filtre précoce, proposé par Broadbent en 1958. Selon ce modèle, notre système attentionnel agit comme un filtre pour sélectionner les 4 Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie informations pertinentes et inhiber les distractions, dès le début du traitement de l'information. Cette notion de sélectivité a évolué pour inclure différents niveaux de traitement, du niveau sensoriel au niveau cognitif. D'autres propositions théoriques ont mis en avant différents types de contrôle attentionnel. Par exemple, Braver et al. (2007) ont distingué entre un contrôle proactif, qui oriente l'attention en fonction des objectifs de manière soutenue, et un contrôle réactif, qui régule l'attention de manière instantanée en réponse à des informations conflictuelles. La distractibilité est le revers de la médaille de la focalisation attentionnelle. Les individus distractibles ont du mal à maintenir leur attention sur une tâche en raison de stimuli distracteurs, ce qui peut entraîner une perte de contrôle interne. Cette distractibilité est souvent observée chez certains patients et peut constituer un handicap significatif dans leur vie quotidienne. Pour évaluer l'attention sélective, on utilise généralement des tâches de barrage, où le sujet doit répondre uniquement à certains stimuli tout en ignorant les autres. Par exemple, le test "d2" de Brickenkamp et al. est une épreuve couramment utilisée qui mesure la capacité du sujet à détecter rapidement des cibles parmi des distractors. Le paradigme "go/no go" est également utilisé, où le sujet doit réagir uniquement aux stimuli "go" et inhiber sa réponse aux stimuli "no go". Il y aurait plusieurs réseaux pour l’orientation attentionnelle : Le réseau attentionnel dorsal (DAN) : focalisation contrôlée et liée à la tâche à détection de stimuli attendus. = attention top-down Le réseau attentionnel ventral (VAN) : réseaux attentionnels plus automatiques et liés au stimulus. à détection de stimuli non- attendus. Enfin, l'effet Stroop est une autre mesure de l'attention sélective, où le sujet doit nommer la couleur de l'encre dans laquelle les mots sont écrits tout en ignorant le mot lui-même. Cette tâche met en évidence la compétition entre le traitement automatique du mot et le traitement contrôlé de la couleur de l'encre, ce qui permet d'évaluer la capacité du sujet à inhiber les réponses automatiques. 5 Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie 5. Déplacement du foyer attentionnel et flexibilité La capacité de déplacer et de réorienter constamment l'attention, ainsi que la souplesse avec laquelle ce contrôle est exercé, sont des aspects de ce qu'on appelle la flexibilité cognitive. Cette flexibilité est cruciale pour s'adapter à des situations changeantes et pour être capable de percevoir, traiter et réagir à diverses situations de manière appropriée. En clinique, un déficit de flexibilité se traduit souvent par un comportement persévératif, où le sujet a du mal à changer de tâche ou de stratégie, et manque généralement de souplesse mentale. Par exemple, une personne présentant un déficit de flexibilité pourrait rencontrer des difficultés à passer d'une activité à une autre ou à s'adapter à de nouvelles exigences. Les épreuves utilisées pour évaluer la flexibilité cognitive sont souvent basées sur le concept de « set shifting », qui implique le passage d'un type de registre mental ou d'opération cognitive à un autre. Ces tâches exigent généralement du sujet qu'il ajuste son comportement en fonction de nouvelles règles ou de nouvelles informations. Par exemple, un test courant de flexibilité cognitive est le test de tri de cartes de Wisconsin, où le sujet doit trier des cartes selon différentes règles qui changent au cours de la tâche. La capacité du sujet à s'adapter à ces changements de règles est indicative de sa flexibilité cognitive. 6. Capacités de traitement et attention divisée Il est essentiel de reconnaître que les ressources attentionnelles dont dispose une personne sont limitées. Au-delà d'un certain niveau de sollicitation, il devient difficile voire impossible d'aborder efficacement certaines situations. C'est particulièrement vrai dans le cas de situations qui exigent la réalisation simultanée de deux tâches, surtout lorsque ces deux tâches requièrent des ressources de traitement pour être exécutées correctement. è Exemple : prendre des notes en téléphonant ou discuter tout en conduisant. Il est important de noter que certaines activités peuvent être effectuées de manière automatique, sans nécessiter de contrôle attentionnel conscient. Ces activités, souvent répétées et familières, peuvent être réalisées avec un minimum de ressources attentionnelles, voire sans aucune implication consciente de l'attention. Dans de telles situations, il n'y a pas de division de l'attention car chaque tâche est gérée automatiquement. Cependant, lorsque les ressources attentionnelles d'une personne sont limitées, comme cela peut être le cas après une lésion cérébrale, les situations qui exigent le partage de ces ressources entre deux activités consommatrices de ressources deviennent extrêmement difficiles à réaliser. Par exemple, une personne atteinte de la maladie de Parkinson peut avoir besoin de concentrer toutes ses ressources attentionnelles pour marcher sans tomber, ce qui rend difficile la réalisation d'une conversation en même temps. En outre, les patients cérébrolésés peuvent également rencontrer des difficultés lors de l'exécution de tâches quotidiennes autrefois automatisées. Après une lésion cérébrale, ces tâches peuvent nécessiter un effort attentionnel accru, car les automatismes précédents peuvent être perdus. Les patients peuvent alors se retrouver à devoir concentrer leur attention sur des activités qu'ils effectuaient auparavant sans y penser. Cette diminution des ressources attentionnelles peut également rendre difficile la réalisation d'autres activités concurrentes, mettant en évidence les défis auxquels sont confrontés les patients cérébrolésés dans leur vie quotidienne. 6.1. Attention divisée La notion d'attention divisée, selon Van Zomeren et Brouwer (1992), englobe deux mécanismes distincts : - Le monitoring ou traitement simultané de plusieurs sources d'informations : Cela se produit lorsque nous devons gérer plusieurs flux d'informations en même temps. Un exemple de cela est notre capacité à gérer les conversations croisées, où chaque interlocuteur doit intégrer les propos 6 Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie de différents intervenants pour pouvoir participer de manière adéquate aux échanges. Dans ce cas, nous devons distribuer notre attention sur plusieurs sources potentielles ou effectives d'informations à traiter en même temps. Cette surveillance active et simultanée de plusieurs sources caractérise le monitoring simultané. - La réalisation conjointe de plusieurs tâches : Cela se produit lorsque nous essayons d'accomplir plusieurs activités en même temps. Par exemple, cela peut inclure la nécessité de répondre à un e- mail tout en écoutant une présentation. Dans ces situations, nous devons diviser notre attention entre les différentes tâches et être capables de passer efficacement d'une tâche à l'autre. Un exemple d'évaluation des capacités de monitoring simultané est fourni par le test "Attention divisée" de la batterie TAP (Test of Attentional Performance ; Zimmermann & Fimm, 2009). Ce test demande au sujet de traiter simultanément deux sources d'informations : l'une visuelle et l'autre auditive. Le sujet doit émettre une réponse à l'apparition d'un pattern graphique particulier tout en détectant les irrégularités dans l'alternance de sons aigus et graves. Ce test évalue la capacité du sujet à diviser son attention et à traiter efficacement deux flux d'informations simultanément. Lorsqu'il s'agit de réaliser simultanément plusieurs tâches, il s'agit non seulement de contrôler ces tâches en même temps, mais aussi d'émettre conjointement des comportements différents. Les exemples de telles situations dans la vie quotidienne sont nombreux : prendre des notes tout en téléphonant, planifier une action ou résoudre un problème complexe tout en marchant, etc. En fait, les situations d'attention divisée sont plus courantes que rares dans la vie quotidienne. Dans ces situations, la performance du sujet dépend principalement de deux facteurs : - Le degré d'automatisation des tâches : Plus un sujet est compétent ou expert dans une tâche donnée, plus il lui sera facile de la réaliser en même temps qu'une ou plusieurs autres. - Le degré d'interférences réciproques entre les tâches : Plus les tâches sollicitent les mêmes canaux d'informations ou les mêmes structures cérébrales, plus elles auront tendance à interférer entre elles lorsqu'elles sont exécutées simultanément. La capacité à gérer l'exécution simultanée de différentes tâches se mesure à l'aide des épreuves de "double tâche". Dans ces épreuves, on évalue d'abord le niveau de performance du sujet pour les tâches individuelles, puis pour les tâches exécutées conjointement. Par exemple, dans la double tâche de Baddeley, le sujet doit d'abord répéter à voix haute des séries de chiffres pendant un certain temps, puis effectuer une tâche motrice consistant à cocher rapidement une succession de carrés sur une feuille. En condition de double tâche, le sujet doit réaliser simultanément la tâche motrice et la tâche de mémoire à court terme verbale. Des études ont montré qu'il y a une diminution de la performance en condition d'attention divisée chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer, mais pas chez les sujets âgés normaux. 7 Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie 7. Troubles attentionnels 7.1. Accident vasculaire cérébral Dans la pathologie vasculaire cérébrale, le ralentissement de l'action constitue le trouble le plus fréquent, souvent associé à un ralentissement des processus sensorimoteurs. En plus de cela, des troubles de l'attention soutenue et de l'alerte ont également été observés chez les patients présentant des lésions dans certaines régions cérébrales. Plus spécifiquement, des études ont montré que les lésions dans la partie droite du cerveau, notamment dans la région frontale, peuvent entraîner des troubles de l'attention soutenue. Ces troubles se manifestent par une difficulté à maintenir l'attention sur une tâche pendant de longues périodes. De plus, les lésions dans l'hémisphère cérébral postérieur peuvent également contribuer à ces difficultés d'attention. En ce qui concerne les troubles de l'alerte, ils sont principalement associés à des lésions dans la partie dorsale droite du cerveau et dans le thalamus. Ces troubles se caractérisent par une diminution de la capacité à réagir rapidement et efficacement aux stimuli externes. Quant à la division et à la sélectivité de l'attention, des études ont principalement examiné les perturbations dans la pathologie frontale. Les patients présentant des lésions dans cette région cérébrale peuvent rencontrer des difficultés à diviser leur attention entre plusieurs tâches simultanées et à sélectionner les informations pertinentes tout en ignorant les distractions. Ces troubles peuvent avoir un impact significatif sur les capacités cognitives et fonctionnelles des patients atteints de pathologie vasculaire cérébrale. 7.2. Les pathologies neurodégénératives corticales Les pathologies neurodégénératives corticales, telles que la maladie d'Alzheimer, la démence à corps de Lewy et la dégénérescence lobaire fronto-temporale, présentent différentes altérations cognitives, y compris des troubles de l'attention. Pour la maladie à corps de Lewy, les troubles d'attention soutenue sont bien documentés, avec des fluctuations attentionnelles faisant partie des critères diagnostiques majeurs de cette pathologie. Les patients atteints de cette maladie peuvent éprouver des difficultés à maintenir leur attention sur une tâche pendant de longues périodes, et ces fluctuations peuvent entraîner des fluctuations dans leur capacité à rester alertes et attentifs. En ce qui concerne la maladie d'Alzheimer, les patients peuvent présenter des troubles de l'attention divisée. Cela signifie qu'ils peuvent avoir du mal à diviser leur attention entre plusieurs tâches simultanées. Par exemple, ils pourraient rencontrer des difficultés à suivre une conversation tout en effectuant une autre tâche, comme la préparation d'un repas. Ces troubles d'attention peuvent avoir un impact significatif sur la vie quotidienne des patients, affectant leur capacité à interagir socialement, à accomplir des tâches quotidiennes et à maintenir leur indépendance. Ils nécessitent souvent une prise en charge spécifique et des stratégies d'adaptation pour aider les patients à gérer leurs symptômes. 8 Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie 7.3. La maladie de Parkinson Dans la maladie de Parkinson, le ralentissement de l'action est une caractéristique courante. Même aux stades précoces de la maladie, ce ralentissement peut être observé. Il est important de noter que ce ralentissement de l'action n'est pas seulement limité aux mouvements moteurs, mais il peut également affecter les processus cognitifs et attentionnels. Des études telles que celle menée par Roussel et ses collègues en 2017 ont confirmé cette observation du ralentissement de l'action chez les patients atteints de la maladie de Parkinson. Ce ralentissement peut se manifester dans divers aspects de la vie quotidienne, tels que les mouvements physiques, la pensée, la prise de décision et l'attention. De plus, ce ralentissement de l'action est également observé dans d'autres pathologies neurodégénératives sous-cortico-frontales, en plus de la maladie de Parkinson. Cela suggère des altérations similaires dans les régions cérébrales sous-corticales et frontales qui contrôlent les processus moteurs et cognitifs. 7.4. La sclérose en plaques La sclérose en plaques (SEP) est une maladie auto-immune qui affecte le système nerveux central, entraînant une variété de symptômes neurologiques. Parmi ces symptômes, le ralentissement de l'action est fréquent et constitue l'un des troubles les plus courants chez les personnes atteintes de SEP. Des études telles que celles menées par Deloire et al. (2006) et Ruet et al. (2013) ont confirmé que ce ralentissement de l'action peut être observé dès le stade rémittent de la maladie, ce qui souligne son impact précoce sur les fonctions motrices et cognitives. Le ralentissement de l'action observé dans la SEP peut être attribué à divers mécanismes, notamment des lésions du système nerveux central, des altérations de la transmission des influx nerveux et des dysfonctionnements dans les circuits neuronaux impliqués dans le contrôle moteur. De plus, le ralentissement de l'action chez les patients atteints de SEP est souvent associé à un trouble d'attention soutenue. Les études, telles que celles menées par Stoquart et al. (2010), ont montré que les patients atteints de SEP peuvent rencontrer des difficultés à maintenir leur attention sur une tâche pendant de longues périodes, ce qui peut contribuer au ralentissement global de l'action observé dans cette population. 7.5. Les traumatismes crâniens sévères Effectivement, les traumatismes crâniens sévères peuvent entraîner un ralentissement de l'action ainsi que des troubles de la division de l'attention. Les études, telles que celles menées par Van Zomeren & Brouwer (1994) et Azouvi et al. (2017), ont mis en évidence ces déficits chez les individus ayant subi des traumatismes crâniens graves. Ces troubles peuvent avoir un impact significatif sur les capacités cognitives et fonctionnelles des patients, nécessitant souvent une rééducation et une prise en charge spécialisée. Les encéphalopathies alcoolo-carentielles, qui résultent de la consommation excessive et prolongée d'alcool, sont également associées à un ralentissement de l'action. Ce ralentissement peut se manifester avant l'apparition des troubles de la mémoire, comme le soulignent les études telles que celle de Pitel et al. (2008). Ces déficits peuvent être liés aux effets neurotoxiques de l'alcool sur le cerveau et à d'autres complications médicales associées à la consommation excessive d'alcool. Dans le cas des tumeurs cérébrales primitives bénignes, telles que les gliomes, le ralentissement de l'action est également un déficit fréquemment observé. Les études, comme celles de Klein et al. (2002) et Boone et al. (2016), ont documenté ces altérations dans le fonctionnement cognitif des patients atteints de telles tumeurs. Ces déficits peuvent être attribués aux effets directs de la tumeur sur les régions cérébrales impliquées dans le contrôle moteur et les processus cognitifs. 9 Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie 7.6. Le trouble déficitaire de l’attention de l’adulte (TDA) Le trouble déficitaire de l'attention de l'adulte (TDA), souvent associé au TDAH (trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité) chez l'enfant, peut affecter différents composants de l'attention chez les adultes. Parmi ces composants, on retrouve le maintien de l'alerte, la sélectivité attentionnelle et d'autres aspects de l'attention exécutive. Chez les adultes, le TDA est souvent détecté à l'aide de questionnaires spécifiques conçus pour évaluer les symptômes typiques de ce trouble. Ces questionnaires, tels que l'échelle d'évaluation des symptômes du TDAH (ASRS) ou le questionnaire de Conners, peuvent aider à identifier les caractéristiques du TDA chez les adultes. Le diagnostic du TDA chez l'adulte repose généralement sur les critères établis dans le DSM (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) ou d'autres systèmes de classification internationale des troubles mentaux. Ces critères incluent souvent des symptômes tels que des difficultés à se concentrer, à rester organisé, à terminer les tâches, ainsi que des comportements impulsifs ou hyperactifs. Bien que les tests attentionnels et exécutifs puissent être utiles dans le processus de diagnostic du TDA chez l'adulte, il est important de noter qu'un tableau clinique typique peut parfois suffire à poser le diagnostic, même en l'absence d'anomalies significatives dans les résultats des tests. Cela est dû au fait que les symptômes du TDA peuvent varier en fonction du contexte et peuvent ne pas toujours être capturés de manière adéquate par les évaluations neuropsychologiques standardisées. 8. Fatigue et attention L'incidence de la fatigue après une lésion acquise varie considérablement, allant de 20 à 70 % selon les caractéristiques de la population étudiée. Bien que la fatigue tende à diminuer dans les premiers mois suivant la lésion, plus de 30 % des personnes signalent encore des niveaux importants de fatigue invalidante six mois après un traumatisme crânien. De plus, la présence de fatigue peut prédire la durée des symptômes post-commotionnels, ce qui indique que la fatigue consécutive à un traumatisme cranio- cérébral est à la fois prévalente et persistante, ayant un impact significatif sur la qualité de vie des personnes touchées. La fatigue est reconnue comme un concept multidimensionnel par l'Organisation mondiale de la santé, affectant à la fois la fonction et la structure du corps, ainsi que l'activité et la participation du patient. Parmi les différents sous-types de fatigue, la fatigue cognitive est particulièrement importante à considérer dans le cas des lésions cérébrales. Les personnes souffrant de traumatismes crâniens rapportent souvent 10 Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie une fatigue cognitive, qui est associée à des performances plus faibles dans les tâches attentionnelles. Cela se manifeste par des temps de réponse plus lents, une plus grande variabilité des réponses et davantage d'interruptions de l'attention. La fatigue cognitive semble être liée à l'effort mental nécessaire pour surmonter les difficultés d'attention et le ralentissement du traitement. Les études en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) ont montré une activation accrue dans les zones attentionnelles chez les personnes souffrant de symptômes post-commotionnels persistants. Cela suggère que ces individus utilisent plus de ressources attentionnelles ou que leurs réseaux attentionnels doivent travailler plus dur pour soutenir les processus liés à la tâche. De plus, des difficultés à désactiver le réseau par défaut du cerveau, qui est normalement inhibé pendant les tâches nécessitant une attention externe, peuvent contribuer à la fatigue cognitive. Un autre aspect important est le déséquilibre entre l'effort cognitif et la récompense perçue par certaines zones cérébrales impliquées dans la motivation et la récompense. Ce déséquilibre peut être ressenti comme une "fatigue cognitive" par l'individu. En somme, la fatigue cognitive après une lésion cérébrale peut résulter d'une combinaison de difficultés d'attention, d'activation excessive de certaines zones cérébrales et de perturbations dans le système de récompense du cerveau. 9. Prise en charge des troubles attentionnels Il est crucial de prendre en compte divers facteurs lors de l'évaluation et du traitement des difficultés attentionnelles, notamment ceux liés à la lésion cérébrale et d'autres aspects tels que les problèmes auditifs, visuels, la fatigue, les troubles du sommeil, l'anxiété, la dépression, la douleur, l'utilisation de substances et les médicaments. Exploration des facteurs contributifs : Il est recommandé d'explorer l'impact potentiel de ces facteurs lors de l'évaluation de l'attention à l'aide de mesures neuropsychologiques et d'échelles d'évaluation, et de les prendre en considération dans la mesure du possible. Traitement pharmacologique et non pharmacologique : Des interventions telles que l'utilisation de méthylphénidate pour traiter la fatigue et des interventions individualisées pour les troubles du sommeil et de l'éveil peuvent améliorer l'attention. Cependant, des études contrôlées sont nécessaires pour évaluer l'efficacité de ces interventions. Entraînement cognitif : Les programmes d'entraînement informatisé peuvent cibler différentes fonctions attentionnelles. Bien que ces programmes aient montré des effets positifs, les gains peuvent être limités et la question du transfert dans la vie réelle reste controversée. Gestion de la pression temporelle : La méthode de gestion de la pression temporelle (TPM) vise à enseigner des stratégies permettant aux patients de compenser les conséquences de leur lenteur mentale. Cela implique de sensibiliser le patient aux conséquences de son ralentissement et de l'amener à réfléchir stratégiquement aux étapes de l'activité pour maximiser les anticipations. Aménagement des tâches et de l'environnement : Il est également important d'aménager les tâches et l'environnement pour diminuer l'impact des difficultés attentionnelles. Cela peut inclure l'organisation de l'espace de manière claire, la minimisation des distractions, la planification de pauses régulières et la réduction du bruit ambiant lors des discussions. En combinant ces approches, il est possible d'aider les patients à mieux gérer leurs difficultés attentionnelles et à améliorer leur fonctionnement quotidien. 9.1. Modèle du triple A - Acquisition : psychoéducation aux patients sur leurs difficultés et forces et apprennent des stratégies de compensation pour leur quotidien 11 Boulert Camille Psycho B3 Neuropsychologie - Application : Les patients pratiquent les stratégies au travers d’entrainements lors des sessions pour augmenter leur conscience du trouble et construire leur efficacité - Adaptation : les patients généralisent dans la vie réelle, à différentes activités L’objectif est d’augmenter la prise de conscience, l’autonomie, la gestion émotionnelle, l’acceptation et la gestion des troubles cognitifs. 12