Cours : Introduction au travail social (Service social) PDF
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Institut National de l'Action Sociale
Mohamed Haouari
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This document provides an overview of the history of social work, tracing its development from charitable practices to a professional discipline. It explores the factors contributing to this transformation, including the rise of industrialization, the emergence of social sciences, and the establishment of social work as a recognized profession.
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Institut National de l'action sociale \- Tanger - **Cours : Introduction au travail social** **(Service social)** **Pr. Mohamed Haouari** **Axe : Histoire et évolution du travail social** Le travail social trouve ses racines dans des traditions de solidarité, d\'abord exprimées à travers la ch...
Institut National de l'action sociale \- Tanger - **Cours : Introduction au travail social** **(Service social)** **Pr. Mohamed Haouari** **Axe : Histoire et évolution du travail social** Le travail social trouve ses racines dans des traditions de solidarité, d\'abord exprimées à travers la charité religieuse, bien avant la formalisation du concept moderne du travail social. Cette évolution a permis un passage d\'une logique d\'assistance à des formes plus intégrées d\'accompagnement social. À l\'origine, la charité, issue de valeurs religieuses, était perçue comme un devoir moral et individuel. Elle visait à soulager temporairement la souffrance des plus démunis, souvent dans le but d'obtenir une place au paradis ou de répondre à un sentiment de pitié. Cependant, la charité ne s'inscrit pas dans une logique d'intervention systématique, et ne reconnaît pas de droit ni de responsabilité collective face à la pauvreté. Historiquement, l\'aide en cas de maladie, de chômage ou de décès était principalement assurée par des solidarités familiales ou villageoises. ### De la charité religieuse à l'assistance sociale Dans les sociétés préindustrielles, la pauvreté était généralement perçue comme un phénomène lié à des statuts sociaux inférieurs, des individus marginalisés (tels que les vagabonds), ou des événements conjoncturels comme les famines et épidémies. Cependant, la pauvreté du prolétariat, qui se développe avec l'industrialisation, prend une dimension nouvelle en raison du progrès de l'industrie, devenu l\'élément clé du système capitaliste. La charité religieuse, en tant que principale forme d\'aide dans ces sociétés, reposait sur la générosité individuelle des églises, des monastères et des familles aisées. Elle visait à soulager temporairement les besoins des veuves, orphelins et malades, mais cette aide restait ponctuelle et ne traitait pas les causes profondes de la pauvreté. En effet, la charité religieuse n'engageait pas de responsabilités collectives et ne remettait pas en question les structures sociales qui engendraient la pauvreté. Les hospices religieux, bien qu'offrant un soutien immédiat, ne résolvaient pas les problèmes structurels de la société, comme l\'absence de droits sociaux. L'industrialisation au XIXe siècle a révélé les limites de la charité individuelle. L\'urbanisation et la prolétarisation ont engendré une pauvreté massive, visible dans les villes industrielles. Face à cette situation, il est apparu que la charité traditionnelle ne suffisait plus. Des initiatives plus structurées ont alors vu le jour pour répondre à ces nouveaux défis sociaux. En 1869, à Londres, la création de la Charity Organization Society (COS) a marqué un tournant, en introduisant des enquêtes systématiques pour évaluer les besoins des individus et coordonner l\'aide de manière plus rationnelle. Ce modèle a influencé l'émergence d'un cadre législatif plus formel, avec l\'adoption de lois d'assistance publique à la fin du XIXe siècle. Ces lois ont progressivement reconnu l'aide sociale comme un droit et ont jeté les bases de l'État providence. La responsabilité collective, longtemps absente dans les systèmes de charité, a ainsi commencé à se structurer autour de l'idée que l'aide aux plus démunis devait être un droit garanti et non une simple action charitable. **2. Professionnalisation et accompagnement social** A travers son histoire, le travail social est passé d'une logique d'assistance à des formes d'accompagnement social. Avec la mise en place de l'assurance obligatoire et de l'Etat providence, l'assistance caritative s'est effacée peu à peu du paysage de nombreux pays pour donner place à l'aide sociale et à l'action sociale professionnalisée **2.1 Naissance du travail social moderne** Le développement des sciences sociales et humaines a joué un rôle clé dans l'émergence du travail social moderne, en introduisant une rationalisation scientifique des méthodes et techniques d\'assistance. La période de 1900 à 1939 marque les débuts spécifiques du service social, et les auteurs s\'accordent à dire qu'au tournant du XXe siècle, le travail social connaît une première phase de professionnalisation. Bien que la date exacte de la naissance du travail social soit difficile à déterminer, la fin de cette première période est clairement marquée par les premières ébauches de professionnalisation. Cela se traduit par la création des premières écoles de formation et l'émergence des premières professionnelles consacrées à temps plein aux œuvres sociales. Un événement marquant de cette période est la mise en place de l'outil scientifique de l'« enquête sociale », une réponse organisée aux besoins sociaux croissants, particulièrement après la Première Guerre mondiale. **Le développement de la profession (1914-1939)** La période de 1914 à 1939, allant de la Première à la Seconde Guerre mondiale, est caractérisée par un développement marqué des actions sanitaires et sociales. C'est également une époque où le travail social devient plus structuré et reconnu, avec la création des premiers diplômes pour les travailleuses sociales, telles que les infirmières visiteuses et les assistantes sociales. L'élargissement du nombre et des domaines d'activités des travailleuses sociales traduit l'importance croissante de cette profession dans la société. En 1932, la création du diplôme d\'État d'assistant de service social en France représente une étape décisive dans la professionnalisation du secteur, conférant aux travailleurs sociaux des compétences systématiques et leur permettant de devenir des acteurs essentiels dans l'évaluation des besoins sociaux et la mise en œuvre de solutions adaptées. **L\'après-guerre et l\'intégration dans les politiques sociales (1939-1949)** La décennie de 1939 à 1949 marque un tournant supplémentaire dans l'évolution du travail social, avec l'apparition d'une nouvelle profession : les éducateurs spécialisés. En outre, cette période est également marquée par l\'intégration du travail social dans les politiques sociales de l\'État, renforçant ainsi son rôle en tant que profession clé dans la réponse aux besoins sociaux. Cependant, les assistantes sociales se retrouvent souvent confrontées à la question de la légitimité de leurs actions lorsqu'elles semblent aller à l\'encontre des normes juridiques en vigueur, soulevant ainsi des débats sur les tensions entre éthique professionnelle et légalité. **2.2 L\'État providence et l\'élargissement des missions** **L\'État providence et la centralité de l\'État (1950-1980)** Les années 1950 à 1980, également appelées les \"Trente Glorieuses\", se caractérisent par l'évolution du rôle de l\'État, devenu de plus en plus central dans la régulation de l\'économie et le maintien de la paix sociale. C'est à partir des années 1960 que l'État prend en charge une part importante de la responsabilité sociale, assumant un rôle actif dans la définition et la gestion des problèmes sociaux. Cette période marque un tournant majeur dans le développement des services sociaux, avec une prise en charge « globale » des enjeux sociaux à l'échelle mondiale. Durant cette période, l\'État providence a structuré le travail social autour de la protection sociale, une nouvelle organisation qui permet d'élargir les missions des travailleurs sociaux à des domaines essentiels comme la santé, le logement et l'éducation. Leur rôle devient alors celui d\'intermédiaires entre les citoyens et les institutions publiques, visant à favoriser l'insertion sociale et l'autonomie des individus. **La montée de la précarité et la décentralisation (1980-début des années 2000)** À partir des années 1980, le travail social se trouve confronté à de nouveaux défis, notamment la montée de la précarité et de la pauvreté, causée par les transformations de l'économie et l'affaiblissement des solidarités collectives. Ces changements ont profondément affecté les missions et le cadre de l'action sociale. C'est également à cette période que la décentralisation transforme radicalement l\'organisation des politiques sociales, modifiant le cadre global de l\'action sociale. Cette décentralisation permet une meilleure adaptation des services sociaux aux besoins locaux, mais introduit aussi de nouveaux défis, notamment en matière de coordination et de gestion des ressources. **La construction du travail social comme discipline (fin des années 2000)** En parallèle, la fin des années 1990 et le début des années 2000 marquent l\'essor du travail social comme discipline académique au sein des sciences sociales. Le travail social devient ainsi une branche spécialisée, intégrant des méthodologies et des approches théoriques qui lui sont propres, tout en poursuivant son évolution au sein du cadre législatif et des politiques publiques. ### 3. Enjeux contemporains du travail social #### 3.1 Mondialisation et diversification des enjeux sociaux Depuis les années 2000, le travail social est confronté à des problématiques mondiales croissantes, telles que les migrations, la pauvreté, et les crises sanitaires. Ces défis requièrent une approche interculturelle et une collaboration internationale renforcée, notamment avec des organisations telles que la Fédération Internationale des Travailleurs Sociaux (FITS). Ces initiatives permettent de développer des solutions adaptées aux besoins des populations déplacées ou vulnérables. Parallèlement, l\'impact des accords internationaux favorisant la libéralisation des marchés et des services sociaux, ainsi que celui des réformes dans les secteurs de l\'éducation et de la santé, a poussé les associations internationales représentant la profession, telles que la FITS et l\'Association Internationale des Écoles de Travail Social (AIETS), à définir des règles et accords adaptés aux contextes historiques et politiques spécifiques des pays. Ces enjeux mondiaux affectent également le travail social dans les pays dits « du Sud », où les dispositifs d'action sociale sont souvent sous-exploités ou inexistants. Là où le travail social est présent, il est généralement centralisé au niveau national, avec un nombre limité de travailleurs sociaux, et une marge de manœuvre restreinte pour ces derniers. En dépit de ces défis, le travail social continue de prendre tout son sens, particulièrement dans le cadre des programmes de développement dans les pays du Sud. Par son approche centrée sur l\'individu, la communauté et l\'environnement, ainsi que par sa méthodologie fondée sur l\'autodétermination et la participation, il s\'inscrit comme un levier essentiel de transformation sociale. #### 3.2 Accompagnement social participatif L\'accompagnement social contemporain privilégie une approche participative, où la co-construction des solutions avec les bénéficiaires devient centrale. Cette méthode permet d'encourager l'autonomie et la responsabilisation des individus, en les impliquant activement dans la définition de leurs parcours. Des projets communautaires collaboratifs, tels que des espaces de soutien scolaire pour enfants issus de quartiers défavorisés, illustrent cette dynamique participative. Ces initiatives visent non seulement à répondre aux besoins immédiats, mais aussi à favoriser l'autonomisation des bénéficiaires sur le long terme. #### 3.3 Adaptation aux crises modernes Les crises économiques et sanitaires récentes ont mis en évidence l'importance d'une réponse sociale rapide et adaptée. Face à ces situations, les travailleurs sociaux collaborent avec des partenaires locaux et internationaux pour offrir des solutions holistiques, couvrant à la fois les besoins matériels, psychologiques et sociaux des populations vulnérables. Parmi les initiatives notables, des programmes de réinsertion professionnelle ont été mis en place, combinant formations techniques et suivi psychosocial. Ces programmes visent à améliorer l\'employabilité des individus tout en renforçant leur inclusion dans la société, particulièrement dans des contextes de crise. En guise de conclusion, le travail social, fruit d\'une évolution complexe, reste un outil indispensable pour répondre aux défis sociaux contemporains. Sa force réside dans sa capacité à s'adapter aux mutations sociales tout en restant fidèle à ses principes éthiques fondamentaux: la justice sociale, la solidarité et l'autonomie des individus. En restant flexible face aux enjeux actuels, le travail social continue d'être un acteur clé de la transformation des sociétés contemporaines.