Gestion Chapitre 1 PDF
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Ce document de cours présente une introduction au panorama des entreprises, abordant les enjeux économiques et les origines des entreprises. Le texte explore les différents aspects de l'activité économique, et les enjeux environnementaux, sociaux et politiques liés aux entreprises.
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Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne CHAPITRE 1 : PANORAMA DES ENTREPRISES 1. Eléments de cadrage et enjeux économiques 1.1 Une première définition simple Entreprise = Unité économique dotée d’u...
Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne CHAPITRE 1 : PANORAMA DES ENTREPRISES 1. Eléments de cadrage et enjeux économiques 1.1 Une première définition simple Entreprise = Unité économique dotée d’une autonomie juridique qui combine des facteurs de production pour produire des biens et des services destinés à être vendus sur un marché. 1 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne 1.2 Les enjeux économiques de l’entreprise Les entreprises jouent un rôle central dans l’activité économique Croissance économique → Mesurée par le PIB Emploi → Les entreprises fournissent des emplois à l’économie (Attention : on distingue emplois privés et emplois publics). 2 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Valeur ajoutée (VA) = Chiffre d’affaire (CA) – Consommations intermédiaires (CI) ▪ Problème de mesure de la contribution des administrations publiques - Valorisation du prix de vente ? - Problème de rémunération L’entreprise est, à la fois, une unité de production et de répartition. Unité de production -L’entreprise combine des facteurs de production de la manière la plus productive pour que le rendement soit positif. En cela, elle intéresse l’économiste : quels usages des facteurs de production ? Dispose-t-on des facteurs de production en quantités, en qualité suffisante, à quel prix ? Unité de répartition -Les richesses créées servent à rémunérer l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise. Comment se répartit la richesse créée ? Cette répartition est-elle efficace économiquement ? Durable ? Etc… Unité de répartition : cette répartition suit un ordre précis et réglementé 3 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Action = Titre de propriété, elle donne droit à des dividendes (plus risqué mais potentiellement plus rentable). Obligation= Titre de créance, elle donne droit à des intérêts (potentiellement moins rentable mais moins risqué). Unité de répartition : cette répartition suit un ordre précis (et réglementé) Ces enjeux économiques se combinent avec des enjeux politiques et sociaux : ▪ Panier de consommation / Pouvoir d’achat ▪ Niveau d’emploi / Qualité de l’emploi / Localisation de l’emploi ▪ Bien-être au travail ▪ Impact environnemental ▪ Questions éthiques (ex : bioéthique, protection des données) ▪ Articulation avec le système de protection sociale ▪ Impacts sur le système politique 4 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne ▪ Impacts géopolitiques ▪… → Les entreprises sont des acteurs incontournables d’un système économique dont il convient d’avoir connaissance. 2. Les origines de l’entreprise 2.1 Les prémices de l’entreprise Bien que quelques compagnies aient existé avant la révolution industrielle, l’émergence des entreprises est un phénomène relativement récent, lié notamment à l’évolution des modes de production. -Dans le système traditionnel, dit de putting-out, l’artisan travaille chez lui, le marchand lui avançant souvent les matières premières. -L’émergence des machines coûteuses marchant à la vapeur implique la concentration des activités dans de grands ateliers, dans des centres industriels émergents comme Manchester début XIXè siècle, surnommée « Cottonopolis » ou Warehouse City ». -On parle alors de factory system car les rôles sont différents et les interactions plus complexes que dans le putting-out. « « La discipline de travail dans l’atelier… combinée à la spécialisation technique, la coordination, et l’utilisation d’énergie non humaine … La concentration de la propriété du lieu de travail, des machines, de la source d’énergie et des matières premières dans une seule et même main. Cette combinaison n’était que rarement remplie avant le 18ème siècle » Max Weber, 1928, General Economic History La construction des cathédrales (XIIè siècle) ◾ Points communs avec la vision moderne de l’entreprise : - Financement important, issu des revenus terriens de l’Eglise et des dons 5 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Personnalité juridique de la « fabrique » - Gestion (administrateurs, trésoriers…) - Organisation et rationalisation du travail. ◾ Mais… - Caractère temporaire (ex. 3ans pour Troyes à…2 siècles (ou « 107 ans ») pour Notre-Dame de Paris) lié à un projet spécifique. - Il ne s’agit pas ici de produire des biens marchands. Les compagnies financières (XIVè siècle) ◾ Points communs avec la vision moderne de l’entreprise : - Concentration du capital - Structure organisationnelle (DG, directeurs de succursales) - Distinction entre prêteurs non impliqués dans la gestion et associés - Prise de risques de l’entrepreneur ◾ Mais… - Entreprise « familiale » (mais modèle toujours très présent de nos jours) - Centrés sur le commerce et son financement ≠ production de biens. - Profit souvent utilisé à des fins politiques (exemple des Medicis) 6 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Les entreprises textiles (XVIIIè siècle) ◾ Points communs avec la vision moderne de l’entreprise : - Division du travail - Concentration croissante (ex. production et commercialisation) - Intégration verticale croissante - Transferts technologiques, voire espionnage ◾ Mais… - L’entreprise reste essentiellement familiale - « Privilège » : dépendance vis-à-vis du pouvoir pour les simplifications administratives (bureau des corps de la draperie) - Pas encore de clientèle de masse, mais clergé ou magistrature. L’industrie des indiennes (cotonnades imprimées) ouvrira davantage le marché. 7 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne 2.2 Les facteurs techniques et économiques Révolutions industrielles et évolutions des modes d’organisation 2.3 Les facteurs juridiques Liberté d’entreprendre Article 4 de la DDHC de 1789 : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ». Article 7 de la Loi du 17 mars 1791 portant suppression de tous les droits d’aides, de toutes les maîtrises et jurandes d’établissement des droits de patente : « A compter du 1er avril prochain, il sera libre à toute personne de faire tel négoce ou d’exercer telle profession, art ou métier qu’elle trouvera bon ; mais elle sera tenue de se pourvoir auparavant d’une patente, d’en acquitter le prix suivant les taux ci-après déterminés et de se conformer aux règlements de police qui sont ou pourront être faits. » Préambule de la loi Le Chapelier (1791) : « Il n’est permis à personne d’inspirer aux citoyens un intérêt intermédiaire, de les séparer de la chose publique par un esprit de coopération. » 8 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Le décret d’Allarde et la Loi Le Chapelier vont ainsi permettre de libérer l’activité économique. On était alors dans une société d’ordre et de corps, un système extrêmement hiérarchisé des corporations de métiers contraire à la liberté du travail, du commerce et de l’industrie. Tout le monde ne parvenait pas encore à exercer librement la profession de son choix. Les prix, les volumes ou les techniques de production pouvaient être contrôlés. Ainsi, sous réserve de respecter l’ordre public, l’exercice de toute profession est désormais libre, bien que dans certains cas, il reste soumis à déclaration. Avoir le droit d’accéder à une activité professionnelle est considéré comme une condition d’accès à la liberté. La société, terme juridique ◾ En droit, le terme d’entreprise n’est pas clairement défini. Il renvoie en général aux entreprises dites individuelles. → 1er progrès : la possibilité de réunir des fonds pour établir une société ◾ Contrat de société : « La société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d'affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter. […] Elle peut être instituée, dans les cas prévus par la loi, par l'acte de volonté d'une seule personne. » (art. 1832 du Code Civil) ◾ La société acquiert le statut de personne morale, avec des droits et des obligations comparables à ceux d’une personne physique. Elle dispose d’une raison sociale (son nom), d’un patrimoine propre etc. ◾ Cette construction juridique simplifie grandement le fonctionnement économique (élargit les possibilités de financement). Adaptation des régimes juridiques pour favoriser la création d’entreprise Début XIXè : 3 types de sociétés sont possibles, cependant, la grande majorité sont des sociétés de personnes (SNC) où les associés sont nommés intuitu personae (favorise le capitalisme familial). Ainsi, la société en nom collectif engage tout le patrimoine des actionnaires. Les associés en nom sont tenus indéfiniment et solidairement du passif social. Si un associé disparaît, la dissolution est prononcée. → 2ème progrès : l’instauration d’une responsabilité limitée ◾ Le Code de Commerce de 1807 crée les Sociétés en Commandite par Actions (SCA) et les Sociétés Anonymes (SA) institutionnalisant la pratique des « sociétés composées uniquement d’actionnaires ». Les actionnaires ne sont responsables que dans la limite de leurs apports initial. ◾ Ainsi, un créancier ne peut pas poursuivre un actionnaire pour une dette contractée au nom de la société. Cette faculté limite le risque de l’entrepreneur et encourage grandement l’émergence des entreprises. La responsabilité limitée ◾ La société en commandite offre les mêmes caractéristiques mais des associés peuvent n’être que de simples investisseurs qui ne souhaitent pas participer à la gestion de l’entreprise. En revanche, les commanditaires ne sont tenus des dettes sociales qu’à la hauteur de leurs apports. ◾ La société anonyme : chaque actionnaire n’est responsable qu’à hauteur de la somme qu’il a investie. ◾ Cependant, entre 1807 et 1867, leur développement reste limité en raison de la nécessaire autorisation publique. La plupart sont d’anciennes compagnies de l’Ancien Régime : par exemple, Saint-Gobain, ancienne Manufacture royale de glaces de miroirs fondée par Louis XIV en 1655, devient SA en 1830. ◾ La loi de 1867 supprime le besoin d’autorisation publique et encourage le décollage des SA. ◾ La création de la SARL en 1925 marque un nouveau tournant. 9 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Les divers statuts juridiques Evolution du cadre juridique ◾ Depuis, il y a eu d’autres innovations : - La création de l’EURL (1985) - La création des SAS (1994) -cf. précédemment - La création du statut de micro-entrepreneur (2008) - La création de l’EIRL (2011) - La création du statut de société européenne (directive de 2001 transposée en 2005) 10 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne ◾ L’objectif est d’accompagner les mutations de l’activité économique → exemple : Les startups optent ainsi très majoritairement pour le statut de SAS ◾ Le but est aussi d’apporter une solution politique au chômage Evolution du cadre juridique - les cas des créations récentes Evolution du cadre juridique - le cas des entrepreneurs individuels 11 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Facteurs culturels, sociologiques et démographiques - Levée progressive des oppositions religieuses à l’usure - Montée de l’individualisme - Croissance du marché intérieure - Urbanisation : cercle vertueux salariat industriel / demande - Idée du progrès - Goût pour la concurrence, risque, anticonformisme Facteurs scientifiques et techniques - Développement des techniques bancaires et comptables - Nouveaux moyens de transport / de communication / sources de l’énergie ⇾ Exemple : 1420 premières caravelles portugaises permettent de franchir les océans (expansion de l'horizon, développement des échanges commerciaux), charbon et machine à vapeur… - Diffusion des connaissances : imprimerie (1454), transferts de technologie, émergence de l’espionnage industriel Contexte juridique, réglementaire et institutionnel - Garantie de la propriété privée - Liberté d’entreprise - Assouplissement des carcans réglementaires et fiscaux - Suppression des corporations bridant l’initiative (décret d’Allarde 1791) - Mise en place des bourses de valeurs mobilières - Nouvelles formes juridiques : Société en commandite, Société Anonyme - Brevets et droits de propriété Le classement Doing Business de la Banque Mondiale ⇾ Analyser les facteurs d’émergence des entreprises a pu être considéré comme un modèle de référence pour analyser (expliquer) le retard économique des pays en voie de développement. ⇾ Ces analyses ont contribué à formuler des prescriptions Les critères du classement : - Régulation du marché du travail (depuis 2017) - Création d’entreprise - Obtention d’un permis de construire - Raccordement à l’électricité - Transfert de propriété - Obtention de prêts - Protection des investisseurs minoritaires - Paiement des taxes et impôts - Commerce transfrontalier - Exécution des contrats - Règles de l’insolvabilité Scandale en septembre 2021 sur le classement Doing Business : erreur volontaire de la Banque Mondiale qui aurait influencé ce classement en faveur de certains pays (pressions de certains pays). La Banque Mondiale a donc décidé de mettre fin à ce classement. 12 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne 13 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne 3. Typologie des entreprises 3.1 Définition et profilage Quatre catégories d’entreprise (Loi de Modernisation de l’Economie [LME] de 2008) ◾ La catégorie des microentreprises est constituée d’entreprises qui : - D’une part occupent moins de 10 personnes - D’autre part ont un CA annuel ou un bilan total de bilan n’excédant pas 2 millions d’euros. ◾ La catégorie des PME est constituée d’entreprises qui : - D’une part occupent moins de 250 personnes - D’autre part ont un chiffre annuel n’excédant pas 50 millions d’euros ou un total de bilan n’excédant pas 43 millions d’euros. ◾ La catégorie des entreprises de taille intermédiaire (ETI) est constituée des entreprises qui n’appartiennent pas à la catégorie des petites et moyennes entreprises, et qui : - D’une part occupent moins de 5000 personnes - D’autre part ont un chiffre d’affaires n’excédant pas 1 500 millions d’euros ou un total de bilan n’excédant pas 2 000 millions d’euros. ◾ La catégorie des grandes entreprises (GE) est constituée des entreprises qui ne sont pas classées dans les catégories précédentes. Une définition plus précise Rappel : Il n’y a pas de définition juridique de l’entreprise. Il s’agit d’une entité dotée d’une personnalité physique (entreprises individuelles) ou d’une personnalité morale, qui de ce fait présente des droits et obligations. ⇾ Ancienne définition économique « L’entreprise est une unité économique dotée d’une autonomie juridique qui combine des facteurs de production pour produire des biens et des services destinés à être vendus sur un marché ». ⇾ Nouvelle définition économique (adoptée par l’INSEE) « L’entreprise est la plus petite combinaison d’unités légales qui constitue une unité organisationnelle de production de biens et de services jouissant d’une certaine autonomie de décision, notamment pour l’affectation de ses ressources courantes ». 14 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Cette nouvelle définition permet de mieux appréhender l’organisation en groupes. ◾ L’organisation en groupe d’entreprises permet : - De mutualiser certains moyens de productions (y/c les salariés, il s’agit alors d’un groupement d’employeur) - De mutualiser des achats (groupement d’achat privilégié par les PME) - D’augmenter ses chances de remporter des appels d’offres - De gérer astucieusement les effets de seuil - Procéder à l’optimisation fiscale (méthode des prix internes) ◾ En 2013, l’INSEE a publié une étude estimant que 14% des unités légales indépendantes appartiennent à un groupe. Ce seuil atteint 54% pour les entreprises de plus de 20 salariés. ◾ Méthode du profilage : regrouper certaines unités légales pour prendre en compte l’organisation effective… L’intérêt du profilage 3.2 Création d’entreprises et répartition sectorielle Evolution récente des répartitions 15 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Création d’entreprises : un indicateur insuffisant Profil des créateurs et défaillances ◾ Survie : environ la moitié des entreprises nouvellement créées disparaissent dans les 5 ans. Toutes entreprises confondues, le nombre de défaillances annuelles est d’environ 60 000 (stable). ◾ Néanmoins, le chiffre d’affaires moyen des auto-entrepreneurs reste faible à environ 1 000 euros par mois. Environ 70 000 auto-entrepreneurs par an (sur 1 million +) rejoignent le régime général. ◾ Des créateurs plus diplômés : 43% des créateurs d’entreprise ont le baccalauréat en 2010 vs 30% en 2002. ◾ 30 à 40% des créateurs sont chômeurs. ◾ Des créateurs plus jeunes : 37% des créateurs d’entreprises individuelles ont moins de 30 ans (51% pour les micro- entreprises contre 23% pour les El classiques). ◾ De plus en plus de femmes : 40% des créateurs d’entreprises individuelles sont des femmes en 2015 contre 30% en 1987. 16 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Répartition sectorielle Répartition sectorielle de l’EMPLOI - l’importance du secteur tertiaire Répartition sectorielle du PIB – l’importance du secteur tertiaire 17 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne L’apparition d’un secteur « tertiel » Les secteurs les plus employeurs Capitalisation des entreprises françaises 18 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Performances à l’export 3.3 Capitalisme et entreprises « championnes » Eléments caractéristiques et évolution du capitalisme français ◾ Historiquement, rôle important des banques (Société Générale, BNP Paribas, AXA, Allianz-AGF, Crédit Agricole) et participations croisées « cœur financier », entraînant souvent la présence réciproque des dirigeants dans les conseils d’administration des firmes. Ces réseaux permettent une certaine maîtrise de l’actionnariat et limitent notamment les risques d’OPA. Actionnariat relativement concentré. ◾ Importance de l’Etat : près de 50% des dirigeants des 200 plus grandes entreprises françaises sont issus de la sphère publique. ◾ Ce « cœur-financier » connaît son apogée en 1996 après les privatisations Balladur (1993-95), puis s’efface peu à peu depuis la fin des années 1990, avec une part croissante d’investisseurs institutionnels ; la part des actionnaires étrangers dans le CAC 40 augmente sensiblement au tournant de la décennie, pour atteindre 47,6% en 2016 contre 33% en 1997 (recul en 2018 avec environ 39%). Source : Morin et Rigamonti, 2002, Evolution et structure de l'actionnariat en France 19 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne ◾ Le capitalisme français apparaît maintenant comme dual : - Survivance d’un capitalisme patrimonial à actionnariat stable avec actionnaire de référence (groupes familiaux ex. LVMH, L’Oréal, BIC… ; groupes adossés à l’Etat comme Renault mais baisse de la part de l’Etat : 15% fin 2010 vs 44% en 2001 ; cœur financier en voie de disparition) - Capitalisme de marché financier avec actionnariat dispersé (ex. Air Liquide, Lafarge) Source : Morin et Rigamonti, 2002, Evolution et structure de l'actionnariat en France Les participations croisées ⇾ En 2009, 99% des résolutions présentées en AG des sociétés françaises sont adoptées (Le Maux, 2008) Les champions français 20 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Les champions « cachés » ◾ Concept popularisé par Hermann Simon dans les années 1980. Il observe un paradoxe : - La France compte bien plus de grands groupes mondiaux que l’Allemagne. - L’Allemagne affiche au niveau macro-économique des performances bien plus favorables En réalité, 70% des exportations allemandes sont réalisées par les entreprises de taille moyenne, le Mittelstand ◾ Trois critères : - L’entreprise est le numéro un de son secteur sur son continent d’origine ou figure parmi les trois plus grands acteurs du domaine à l’échelle mondiale - Son chiffre d’affaires est inférieur à trois milliards d’euros - Elle est méconnue du grand public « La société Laporte, spécialiste mondial en lanceurs et accessoires de ball-trap, qui emploie 125 personnes dans les Alpes-Maritimes et réalise un chiffre d’affaires de 25 millions d’euros en fabriquant ses pigeons d’argile en France et en les vendant jusqu’en Chine. Elle est fournisseur officiel des Jeux olympiques et fournisseur exclusif de la famille royale d’Angleterre. 21 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne La société Babolat fabrique des cordages de raquettes et désormais des chaussures de tennis. Fournisseur officiel du tournoi de Roland-Garros […] Rossignol Technology, une petite entreprise de la vallée de l’Arve, est leader mondial de la tige de commande de frein et d’embrayage. Elle équipe près de la moitié des véhicules neufs dans le monde. […] Clextral, leader mondial de l’extrusion bivis ; Haemmerlin, leader européen de la brouette ; La Buvette, leader européen des abreuvoirs pour bétail ; Cornilleau, spécialiste de la table de pingpong ; Somfy, spécialiste des moteurs électriques et automatismes de portail ; ARaymond, qui fabrique des clips de fixation pour l’automobile. » 3.4 Economie sociale et entreprises publiques L’économie sociale Le profit n’est pas toujours une finalité pour les entreprises. « Les acteurs de l’économie sociale s’inspirent des principes fondateurs datant de 1845, principes repris dans la charte de 1980 de l’économie sociale : ◾ Une gouvernance démocratique qui s’appuie sur le principe « une personne = une voix ». Chaque membre dispose ainsi du même droit de vote indépendamment de son apport en capital dans une coopérative, ou de son temps de travail dans une association ◾ La solidarité qui est un fondement originel de l’économie sociale ◾ La juste répartition des excédents : sans but lucratif, les acteurs de l’économie sociale peuvent dégager des excédents. Mais elles ne les distribuent pas en fonction de la détention de fonds propres, sauf dans les coopératives, mais dans la limite d’un plafond. ◾ La gestion autonome et indépendante : nulle collectivité publique, nul groupe, nul fonds de pension ou nul concurrent ne peut prendre le contrôle des entreprises de l’économie sociale parce qu’elles ne sont pas cotées en bourse. ◾ La liberté d’adhésion qui suppose une liberté totale dans l’initiative d’adhésion à une structure de l’économie sociale et autorise également les adhérents à quitter cette structure quand ils le souhaitent. » D’après INSEE, Laurent Bisault, Le « tiers secteur », un acteur économique important ◾ L’économie Sociale et Solidaire représente une part importante des entreprises françaises, et environ 10% de l’emploi salarié. Formes les plus courantes : - Associations (environ 80% des établissements de l’économie sociale) - Coopératives (14%) - Mutuelles (4%) - Fondations (1%) ◾ L’économie sociale est surtout tertiaire : action sociale autour des personnes âgées ou handicapées, enseignement, hospitalisation, banque et assurances. ◾ Une myriade de petites unités mais aussi quelques grosses entreprises dont l’effectif dépasse les 5 000 salariés tout établissements confondus : Caisse d’Epargne d’Ile de France, Macif, Maif, Croix-rouge française… Entreprise publique – Définition « Une entreprise publique, ou une entreprise d'État, est une entreprise sur laquelle l’État ou d’autres collectivités territoriales peuvent exercer directement ou indirectement une influence dominante du fait de la propriété, de la participation financière ou des règles qui la régissent », selon la définition de l’Union européenne. L’influence dominante est présumée lorsque les pouvoirs publics, directement ou indirectement à l’égard de l’entreprise, détiennent la majorité du capital souscrit de l’entreprise ou disposent de la majorité des voix attachées aux parts émises par l’entreprise ou peuvent désigner plus de la moitié des membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance d’entreprise. 22 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Entreprise publique – L’Etat actionnaire Entreprise publique – Le désengagement progressif de l’Etat ◾ La France de l’après-guerre se caractérise par un nombre important d’entreprises publiques, dans de nombreux secteurs industriels (ex. automobile, métallurgie), industries de réseaux (ex. électricité, transport, PTT), banques, assurances, médias, etc. ◾ Depuis le milieu des années 1980, la tendance est à la privatisation des entreprises publiques, c’est-à-dire leur revente totale ou partielle à des investisseurs privés. 23 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Exemples de vagues de privatisations : - 1986-87 (Gouv. Chirac) : Saint Gobain, Suez, Société Générale, CCF, TF1… - 1993-1995 (Balladur) : Rhône-Poulenc, Elf-Aquitaine, Renault (partiel), UAP… - 1996 (Juppé) : AGF, Péchiney, Usinor-Sacilor (Arcelor)… - 1997-1999 (Jospin) : Air France (partiel), Crédit Lyonnais, France Télécom (partiel)… - 2005 (Villepin) : EDF (partiel), ADP (partiel)… 4. Les politiques de soutien en direction des entreprises 4.1 Les politiques de soutien ◾ Le rôle et la place qu’occupent les entreprises dans l’économie justifient que les Etats soient tentés de venir en aide à leurs entreprises nationales. ◾ Ils disposent pour ce faire de plusieurs moyens - Agir sur leur environnement (économique, législatif, réglementaire) - Jouer sur la fiscalité - Accorder des subventions Ces dernières sont toutefois limitées par les réglementations européennes (notamment celle sur l’Etat). 4.2 L’effet d’aubaine Définition (dans le champ économique) Désigne le fait qu’un bénéficiaire d’une aide publique aurait adopté le comportement que cette aide cherche à encourager, même en l’absence de cette aide. Exemple 1 : analyse du recours aux emplois aidés (Chiffres DARES – 2015) Une embauche sur 5 en contrat aidé a conduit à la création d’un emploi pérenne. 24 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - 58% des entreprises l’auraient fait de tout façon, avec le même profil et au même moment - 19% des entreprises n’auraient pas embauché sans ce dispositif - 14% auraient embauché un profil un peu différent - 9% auraient embauché un peu plus tard Pour les entreprises de 50 salariés ou plus, c’est 74% qui reconnaissent avoir profité de la mesure de façon opportune. Faire la chasse aux « effets d’aubaine » Exemple 1 : La suppression des zones franches urbaines Les entreprises implantées dans les ZFU-TE bénéficient d'une exonération d'impôt sur les bénéfices fixée à : 100 % pendant les 5 premières années ; 60 % pendant la 6e année ; 40 % pendant la 7e année ; 20 % pendant la 8e année. L’objectif était de favoriser la création d’emplois sur certains territoires à fort taux de chômage mais cela a surtout générer des « déplacements d’entreprise ». ◾ En 2013, le rapport Queyranne plaide pour une rénovation des aides publiques accordées aux entreprises, aides dont le montant est estimé à 100 milliards d’euros par an. ◾ La proposition est de supprimer environ 170 dispositifs d’Etat, soit le quart de ceux qui existent. → JUSTIFICATION : La pertinence, l’efficacité et/ou l’efficience de certains de ces dispositifs d’aide est soumise à caution. 4.3 Fiscalité des entreprises Cadre général ◾ Fiscalité nationale : Impôts sur les sociétés, TVA, Taxe sur les activités polluantes, TIPP, etc. ◾ Fiscalité locale : Taxe foncière sur les terrains, Contribution Economique Territoriale calculée en fonction de la valeur ajoutée. ◾ Les cotisations sociales (propres au système de protection sociale bismarckien) ne relèvent pas de la fiscalité mais sont souvent intégrées dans le débat relatif à la pertinence des prélèvements opérés. → Les comparaisons internationales et chronologiques sont donc complexes. L’IS – L’impôt sur les Sociétés 25 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne La taxation ne se résume pas à l’IS Comparaisons internationales des taux actuels – Allemagne : taux fédéral à 15% mais s’ajoute un impôt local variant de 7 à 15% mais s’ajoute un impôt local variant de 7 à 15% (finalement la moyenne est aux alentours de 29%). – Italie : 27,9 % – Espagne 25 % – Irlande : 12,5% – Royaume-Uni : 19% (17% en 2020) – Etats-Unis : taxe fédérale de 35% abaissée en 2017 à 21% – Chine : 25% (20% pour les PME) – Japon : 30% ◾ En Europe : le projet d'assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés (ACCIS) vise à « harmoniser » les taux d'imposition des sociétés en Europe. Ce système permettrait aux entreprises de pouvoir compenser leurs pertes et profits à l'échelle de l'Union et de n’avoir qu’un seul interlocuteur pour leurs déclarations fiscales. Le projet BEPS DE l’OCDE ◾ Projet initié en 2012, en vue de coordonner les politiques fiscales et/ou de favoriser la coopération entre autorités fiscales. ◾ L'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfice (BEPS – Base Erosion and Profit Shifting) concerne « les stratégies de planification fiscale qui exploitent les lacunes du système fiscal international pour transférer les bénéfices dans les lieux où il y a peu ou pas d'activité économique ou de fiscalité » (OCDE). ◾ Les pertes de recettes ont été évaluées entre 100 et 240 Milliards de dollars par an (soit 4 à 10% des recettes d’impôts sur les sociétés). Mais par nature, le manque à gagner est difficilement mesurable. ◾ Modalités : prix de transfert ; transfert des bénéfices au moyen d’actifs incorporels (ex : niveaux élevés de redevance pour l’usage d’une licence) ; transfert de bénéfices au moyen d’intérêts, de créances et de dettes internes Planification fiscale ◾ Selon, Pascal Saint Amans, directeur du centre de politique et d'administration fiscale de l'OCDE, les établissements bancaires des Bermudes et des îles Caïman ont dans leurs actifs quelques 2 600 milliards de dollars de profits de sociétés américaines non rapatriés. ◾ Il s’agit de pratiques légales : les entreprises utilisent des failles de la législation. 26 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Exemple Nike : ◾ Ventes en 2016 de 34 milliards de dollars, et bénéfice de 4,2 milliards d’euros sur lesquels elle n’a payé que 2% d’impôts ◾ Siège européen : Nike Hollande a signé un contrat avec Nike International Ltd, immatriculée aux Bermudes (qui détient tous les droits d’usage hors US des marques du groupe Nike). Entre 2000 et 2012, Nike Hollande a reversé près de 4 milliards de royalties ; abaissant d’autant son bénéfice imposable en Europe. A partir de 2014, la société utilise une faille de la législation néerlandaise. Elle établit des contrats avec les distributeurs qui deviennent alors des commissionnaires. Pour l’année 2016, Nike Hollande a reversé 1 milliard d’euros de droits de licence, à une structure localisée aux Bermudes. 27 Gestion Chapitre 1 L1 Economie S1 Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Adaptation de la fiscalité à l’économie numérique La numérisation a conduit à une déterritorialisation du profit : on ne sait plus d’où vient le profit et où il va. Projet de directive GAFA ◾ Une taxe de 3% sur le chiffre d'affaires des géants du web (pour un chiffre d’affaires supérieurs à 250 millions d'euros dont 50 millions au sein de l'UE). ◾ Cette solution est aujourd’hui présenté comme temporaire à défaut d’accord entre membres de l’UE (en matière fiscale, la règle de l’unanimité prévaut). La médiatisation de ces cas entache l’image des entreprises concernées ◾ En décembre 2017, Facebook a annoncé que ses revenus publicitaires seraient comptabilisés localement à partir de 2018 et ne seraient plus affectés à son siège de Dublin. ◾ Les travaux de la mission BEPS ont abouti à un accord sur l’échange automatique d’informations et l’obligation d’un reporting de l’activité pays par pays. Conclusion ◾ Définition : « L'entreprise est une unité économique dotée d'une autonomie juridique qui combine des facteurs de production pour produire des biens et des services destinés à être vendus sur un marché. » ◾ Cette définition appelle un grand nombre de segmentations possibles : - Les caractéristiques structurelles et juridiques de cet « unité économique » : s'agit-il d'un individu seul (entreprise individuelle) ou d'un groupe de plusieurs milliers de personnes ? Quelle est sa forme juridique : SA, SARL, SNC, SAS, GIE ?... - La nature des biens et services : le caractère « marchand » de la production permet de distinguer l'entreprise d'autres types d'organisations (comme les administrations). Mais de nombreuses segmentations restent possibles. Parle-t-on de services bancaires, de produits agricoles etc. ? Haut de gamme ou bas de gamme ? A destination des particuliers ou d'autres entreprises (au sein d'une filière industrielle) ? - La finalité de l'entreprise : on notera que la finalité de profit n'est pas explicitement mentionnée dans cette définition. Par exemple, les entreprises de l'économie sociale (coopératives, mutuelles, associations) n'ont pas de capitaux à rémunérer. - La propriété de l'entreprise : Nationale ou Internationale. Public ou privé. Les administrations publiques sont exclues de la définition car elles produisent des services non marchands ; néanmoins il peut tout à fait exister des entreprises publiques : ex. la SNCF (Établissement public à caractère industriel et commercial) ou la Poste (EPIC devenu SA en 2010) sont des entreprises possédées par l'Etat. Conclusion : on ne peut envisager les entreprises comme un ensemble homogène, faisant face aux mêmes réalités et contraintes, au risque que les politiques publiques soient inefficaces ou créent des effets d’aubaine. 28