CM Médiévale : Histoire de l'Europe Occidentale (XIIe-XVe siècles) PDF

Summary

Ce document est un cours sur l'histoire de l'Europe occidentale au Moyen Âge, du XIIe au XVe siècle. Il examine les aspects sociaux, religieux, politiques et agricoles de cette période. Le texte analyse les clichés associés au Moyen Âge dans les médias modernes et critique les idées reçues sur la période. Il aborde également les progrès agricoles et démographiques.

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**CM Médiévale : Histoire de l'Europe Occidentale** **( XIIe-XVe siècles )** ---------------------- Code Moodle : kehvgc ---------------------- [Introduction :] Dans les films, on retrouve tous les mots clés qui caractérisent le Moyen Age : **pouvoir, tyrannie, violence, peste, famine, roi...

**CM Médiévale : Histoire de l'Europe Occidentale** **( XIIe-XVe siècles )** ---------------------- Code Moodle : kehvgc ---------------------- [Introduction :] Dans les films, on retrouve tous les mots clés qui caractérisent le Moyen Age : **pouvoir, tyrannie, violence, peste, famine, roi omnipotent, représentant de Dieu sur Terre.** Ces clichés sont attachés à la période médiévale pour que le spectateur se repère à la bonne période. Le Moyen Age est donc très présent dans nos sociétés de divertissements, il est traité avec humour ( *Kaamelot* ), moqué, avec des séries de fictions comme *Game of Thrones*. Le Moyen Age est extrêmement présent aujourd'hui pourtant l'Europe Occidentale entretient un lien assez paradoxal avec le Moyen Age : c'est une période d'un passé lointain mais qui nous parle davantage que la période antique, c'est un peuple qui a initié beaucoup de pensées, elle est vue comme une sorte de période idéale de l'éclosion. C'est donc une période qui peut sembler familière, portée par les jouets et films de notre enfance, les contes qui viennent du Moyen Age ; c'est une matière riche visuellement, esthétiquement si l'on veut également regarder les efforts pour reconstruire des châteaux à la mode médiévale ou l'essor des fêtes. C'est un Moyen Age qui est fascinant et pourtant qui semble paradoxal car la période traine une sorte d'envers de la modernité. Cette volonté de considérer le Moyen Age comme un archaïsme ne date pas d'aujourd'hui, les hommes de la Renaissance ont eux-mêmes construit cette image détestable du Moyen Age pour se démarquer de l'époque gothique. Le siècle des Lumières, avec la redécouverte des écrits antiques, ont aggravé cette idée d'un Moyen Age repoussant, de fanatisme, de désorganisation économique. Les humanistes italiens comme Pétrarque ont inventé ce Moyen Age dévalorisé, la Réforme purificatrice de Luther proposait de sortir de ce monde qualifié de « longue nuit » pour ouvrir à la Lumière du monde moderne. C'est ainsi que le Moyen Age, cette période intermédiaire, se voit qualifiée comme un âge « moyen ». Ces stéréotypes des âges sombres, irrationnels vont faire le succès des séries d'aujourd'hui : cette répétition de l'obscurantisme médiéval émane depuis le XVIe siècle. Aux alentours des XVIIe et XVIIIe siècles, quelques esprits ont feint de reconnaitre les « terreurs de l'an mil » pour mieux ridiculiser cet obscurantisme médiéval. Au tournant en effet du premier et du deuxième millénaire, on raconte que les hommes auraient été en proie à une terreur de la fin du monde, or on voit apparaitre des angoisses millénaristes que l'on retrouve chez certains auteurs comme le moine Abbon de Fleury, mais cette angoisse de la fin des temps n'est pas plus poussée qu'au VIIIe ou au XIIIe siècles. Ce cliché est donc en partie erroné mais ne doit pas masquer de véritables dynamiques à l'œuvre qui marquent une véritable embellie des temps à partir des XIIe et XIIIe siècles. Ce Moyen Age est porté d'une nouvelle dynamique qui est la preuve d'une nouvelle richesse réinvestie partiellement dans le sacré avec une population multipliée par deux, plus remuante. **De l'Apocalypse au Renouveau.** L'Occident va se faire conquérant, vers l'Espagne ou encore l'Orient avec les croisades. Vers l'an mil, l'Europe est déjà une zone exportatrice de bois de fer, d'esclaves et importatrice de matériaux, d'épices, etc. C'est un monde qui en revanche va connaitre quelques soucis à partir des années 1300 ( identifiées comme le Bas Moyen Age ) connait une rétraction des épidémies, des famines, des guerres, des divisions religieuses qui vont contribuer à un désordre qui va se révéler moteur à la création : les Hommes vont essayer de se relever de ce désordre au moins jusque 1450. Dans cette volonté de surmonter des difficultés régulières va ouvrir une nouvelle période d'expansion : l'Europe va explorer le monde. Le Moyen Age se révèle dans le discours ambiant, une sorte de symétrie. L'Europe est durant ces 500 ans foncièrement différente de l'Europe d'aujourd'hui : même si on peut faire des parallèles et alerter notamment le politique, mais les conditions, le contexte culturel feront que les réponses ne seront pas les mêmes face aux crises. L'Europe est essentiellement rurale, difficile à appréhender depuis notre individualisme contemporain. Le Monde médiéval est travaillé par l'Eglise, qui se recompose régulièrement pour faire bouger les frontières, faire évoluer les territoires et donner des naissances à des Etats qui vont se centraliser comme en France autour d'un roi ou comme dans l'Empire germanique. Enfin, l'Europe est appelée à des conquêtes qui sont propres à l'Occident. Comme le disait **Thierry de Chartes**, nous sommes « des nains juchés sur des épaules de géants ». +-----------------------------------------------------------------------+ | **Plan** : | | | | I. La société dite « féodale » des XIe- XIIIe siècles | | | | II. L'emprise de la religion | | | | III. Les lignes de force politiques et l'évolution des XIVe- XVe | | siècles. | +-----------------------------------------------------------------------+ 1. ***La croissance dans le cadre seigneurial*** **Chapitre 1 : L'essor démographique et agricole** I. La Révolution démographique Le Moyen Age n'est pas propice aux chiffres fiables. Il est difficile notamment en démographie d'établir des chiffres exactes, en l'absence de recensement réguliers. On ne dispose pas pour la période haute de registres de naissances et de décès. On peut toutefois compter sur des documents exceptionnels de recensement à caractère fiscal comme le Domesday Book réalisé en 1086 en Angleterre pour établir une enquête pour savoir sur quelles richesses on pouvait compter. On dispose également de quelques documents qui permettent d'essayer de comprendre à quel degrés de population on avait affaire. Il s'avère selon les historiens que la progression de la population entre le XIe et le XIIIe siècle correspondait pour l'Angleterre d'une population qui est passée de 1.5 à 3.7 millions d'habitants, pour le domaine germanique et italiens de 5 à 10 millions et pour la France de 6 à 15 voire 18 millions d'habitants. Par endroit, on a vu assister à des triplements de population. C'est un phénomène qui ne sera jamais réitéré avant la fameuse révolution industrielle. Comment expliquer ce doublement de la population ? D'abord par une hausse de fécondité, on passe de 4/5 à 6 enfants par couple à l'époque. Également, la mortalité recule : les grandes famines se font plus espacées jusqu'à disparaître au XIIIe siècle. On va sortir d'un monde extrêmement précaire qui pouvait conduire à des atrocités comme l'anthropophagie. Au pire, la sous-nutrition va voir apparaitre des disettes localisées. Il résulte ainsi une hausse de l'espérance de vie : au XIIIe siècle, elle se situe à 35 ans. La mortalité infantile rends particulièrement dangereuse la première année de l'existence, les accouchements sont des moments extrêmement périlleux pour la femme comme pour l'enfant. Parvenu à l'adolescence, un homme du Moyen Age peut raisonnablement envisager de faire des vieux os. Également, il ne faut pas oublier que pendant la splendeur antique, l'espérance de vie y était de 20 ans. Les densités, là encore, sont variables. Depuis les régions très peuplées, urbanisées du Nord de l'Italie, de la Flandres jusqu'aux régions montagneuses, quasi désertes, les densités de population sont très variées. C'est pendant cette période que se met en place la « Banane Bleue » prenant le Benelux, le sud de l'Angleterre soit une région très urbanisée avec des pôles très denses en habitats face à des pôles répulsifs comme le Massif central. C'est un royaume de France qui occupe 440 000 m2 et en 1348 une densité de 8 feu ( foyer fiscal ). Le foyer fiscal varie également mais en moyenne, on va avoir une densité de 40 habitants au kilomètres carré. Dans le Midi, on retrouve en moyenne 35 habitants au kilomètres carrés, et en Picardie en moyenne 123. On s'aperçoit que des mécanismes d'auto-régularisation se mettent en place quand le seuil des progrès techniques est franchi. Des améliorations technique sont cesse mis en place mais des épisodes de grande mortalité comme en 1316 apparaissent, avant même le grand épisode de Peste de 1348. II. Les progrès agricoles Le climat est le principal facteur des récoltes agricoles. L'Europe connait une période de réchauffement climatique au début du Xe siècle et à la fin du XIIIe siècle, ce qui en fait une période faste. Les glaces vont reculer et laisser la végétations gagner en altitude ce qui va faciliter l'élevage montagnard, l'eau souterraine va également augmenter ce qui va favoriser l'installation de villages. Les conditions sont réunies pour que la céréaliculture soit optimale en Europe du Nord. Les Hommes décident donc de s'inscrire dans ce nouveau paysage. Pour cela, on parle de cette vague de défrichement avec, carte à l'appui, des surfaces cultivées qui vont augmenter. Les friches représentaient les ¾ du sol. L'extension aura lieu en 3 temps : - Au XIe siècles, des villages vont s'accroitre autour des domaines cultivés. On commence à repousser le saltus à proximité de sa maison. - Au XIIe siècle, on voit apparaitre des zones villageoises ou monastiques à des endroits auparavant vierges de cultures. Les moines cisterciens, agriculteurs, jouent un rôle important dans ce développement. - Au XIIIe siècle, on va développer des terrains que l'on jugeait auparavant répulsifs pour la culture comme des marais, des bords de mer inondés, des versants escarpés. On va poldériser, apprendre à drainer, irriguer des zones éloignées de puits, nappes phréatiques pour favoriser les cultures. La base du système à l'époque est celui de la culture de céréales qui va enregistrer des hausses régulières de rendement grâce à la favorisation du climat. En 1200, on passe de 1 grain semé pour 4 voire 6 grains récoltés ce qui va donner lieu à une agriculture plus « intensive ». En effet, le climat est favorable mais on connait mieux son métier : on va adapter la céréale à son milieu, on connait mieux les engrais. Le seigle est une céréale pratique mais peut se révéler dangereuse à cause de l'ergot de seigle, appelé également le « Feu Saint-Antoine ». L'orge est de préférence destiné à l'alimentation animale, l'avoine nourrit les chevaux et est utile pour la confection de la bière. L'assolement biennal va utiliser un sol un an sur deux en alternant avec la jachère. La parcelle est donc laissée en repos et est engraissé par les animaux. Au XIIe siècle, on va passer à un assolement triennal : on va laisser une part en jachère, une part en assolement hivernal et une part en assolement pour le printemps. Ainsi, ça contribue à l'amélioration du corps, donc à une augmentation de la démographie et enfin une construction d'une identité politique autour de la pratique agricole. Presque partout, on reste fidèle au labours triple : la terre est sale, les rendements sont faibles. Par contraste, la Flandre obtient plus de rendement au prix de 9 labours par ans. Le sol est généralement mieux préparé en particulier par le passage progressif de l'arrère ( outil romain ) à la charrue qui va réaliser un labours plus profond et efficace qui va mettre en valeur les sols lourds et favoriser l'activité métallurgique. On a donc un sol aéré qui va pouvoir être semé. Le sol doit donc être retourné régulièrement pour accueillir les semences. La traction animale est améliorée : les bœufs et mules vont céder leur place aux chevaux qui sont plus rapides et doublent la parcelle de travail. Également, le collier d'épaule et la ferrure permettent de mieux harnacher le cheval qui peut développer toute sa masse musculaire de traction. En plus, le cheval va pouvoir permettre le transport des humains et des céréales. Son usage va permettre de resserrer le lien entre villes et campagnes avec le développement des marchés. L'élevage va aussi connaitre une diversification avec toujours des chevaux, des bovins, des ovins, des moutons pour le cuir et la laine ainsi qu'énormément de porcs qui sont une source fondamentale de protéine animale. Les régions méridionales pratiquent un élevage extensifs, au nord l'élevage se fait sur les pâtures et la jachère pour optimiser la production céréalière qui reste la priorité. Au XIIe siècle, le nombre de tête de bétail est multiplié par deux. Les produits de jardins, cultivés sur le terrain de la maison, est un complément de l'alimentation avec les légumes, lentilles et fruits. La vigne règne partout en Europe autant pour sa symbolique ( l'eucharistie ) que pour son apport nutritif ( l'eau est impropre ), on en retrouve jusqu'en Scandinavie. Les vignobles sont situés près des voies d'eaux et vont bénéficier d'une véritable commercialisation : le vin est beaucoup parfumé, on retrouve des domaines comme en Bourgogne. III. Les Transformations techniques en arrière-plan Il faut aussi considérer les transformations techniques en arrière-plan. Le Moyen Age n'est pas une période statique qui n'accueillerait pas les innovations technologiques en retrouvant ce que les anciens avaient créer. Dans cette mentalité médiévale, innover serait créer et donc concurrencer Dieu ce qui serait donc mauvais. On ne peut pas parler de Révolution Technique à proprement parler ( il ne s'agit pas d'une ère industrielle ) mais on assiste à la diffusion empirique de techniques découvertes auparavant et qui vont faire l'objet d'améliorations, d'innovations qui procèdent par incrémentations ( par petites modifications, l'objet change ). L'esclavage antique avait freiner le recours à d'autres outils et les machines vont se réintroduire au fur et à mesure que l'esclavage, le servage disparaissent. Le moulin à eau se banalise, son utilisation est systématique à partir du XIIIe siècle. Partout, on utilise la force hydraulique qui va servir dans les activités quotidiennes pour moudre la farine par exemple ou dans une activité plus professionnelle comme pour les presses hydrauliques afin de faciliter le travail humain. Le monde médiéval reste néanmoins préindustriel car il n'existe pas de production de masse à prix bon marché, les produits restent chers mais sont en revanche de très bonne qualité. On ne jette rien, on réutilise indéfiniment, ce qui permet de garder les outils longuement. En l'absence d'usines, c'est le petit atelier familial qui domine la production même si au fil du Moyen Age, on voit des qualifications qui se spécialisent. Également, l'équipement lourd est rarissime, les outils sont souvent en bois, les machines sont tenues avec une certaine suspicion ( on croit quelles sont moins performantes que l'Homme ). Les investissements sont modestes : un métier à tisser vaut certes moins cher qu'un sac de laine. Bien sûr, cette force motrice disponible est immobile. Ce monde n'est donc nullement préindustriel. On assiste cependant au développement de la métallurgie industrielle : les mines de fer sont plus nombreuses, les forges vont se multiplier dans les forêts. Cette domestication de la métallurgie va entrainer la dispersion des outils de travail, les fers pour les chevaux et sans parler des épées et des armes qui ne cessent de se développer. Au village, le forgeron est détenteur d'un savoir précieux, quasi magique, qui est beaucoup plus respecter que le meunier. Le fer a engendré sa propre mythologie face à cette transformation du métal ; les épées sont pourvues de noms spécifiques, elles sont bénies ( Martin Aurel, **L'épée médiévale** ). La demande militaire a entrainé également un progrès continu de la sidérurgie. La guerre est un moment d'accélération technologique, qui entraine une course à l'armement. L'abondance de bois, et donc de charbon, a constitué un atout précieux lors des affrontements contre l'Islam qui était, elle, pauvre en bois et donc en fer durant les Croisades. Des villes comme Milan ou Nuremberg sont respectées pour la technicité et l'allure de leurs armures. Dans ce cadre, il ne faut pas oublier que tout le monde n'est pas paysan. L'artisanat est développé en ville : on travaille dans ces ateliers familiaux la laine, on brasse sa bière, etc. On estime que la part des artisans proprement dit se situe aux alentours de 10 à 15% de la population rurale. On a affaire à un monde qui n'est pas cloisonné : on va se débrouiller pour pouvoir ajouter quelques revenus au foyer, nombreuses sont les paysannes qui s'entendent en vannerie. Les historiens se sont perdu en conjecture pour interpréter cette croissance avec les progrès techniques, la démographie, les soucis de rentabilité avec une valorisation idéologique du travail. A partir de cette période, la valeur du travail ne cesse de se déployer particulièrement au XVIe siècle avec la réforme Luthérienne, par exemple, avant même l'Industrialisation. Il est plus prudent finalement de dire que c'est la logique du système qui a amené à cet essor prodigieux qui a permis aux hommes et femmes de vivre plus longtemps. **Chapitre 2 : Le village et la seigneurie** Ce sont deux mondes qui se côtoient mais qui ne partagent pas les mêmes valeurs. On a une idée reçue du paysan bestial, sale alors qu'à l'inverse les nobles ont des valeurs, un honneur qu'ils ne partagent pas avec les paysans. Au XIIIe siècle, on a la volonté de montrer que cette société d'honneur n'est pas réservée aux chevaliers mais aussi pour les paysans qui n'ont pas le même type d'honneur cependant. Cet honneur permet de voir que cette société est cloisonnée mais partage également un certain nombre de valeurs, un socle de relations personnelles, un honneur à défendre de chaque manière possible. I. L'encellulement des hommes et la naissance du village. Par contraste avec la période précédente, la tendance est au regroupement des Hommes, à la fixation de l'habitat rural qui commence à être en pierre et pas uniquement en bois et en chaux. Ce phénomène fait que vers 1100, la quasi-totalité des campagnes est regroupée sous forme de villages ( = groupement compact de maison fixe avec également une prise de conscience communautaire ). La chronologie est forcément différenciée. Le processus démarre au Xe siècle en Italie centrale sous le contrôle rigoureux des seigneurs : les populations vont alors se regroupé dans des villages perchés, entre deux châteaux seigneuriaux : on parle alors d'incastellemento. Dans les régions atlantiques, c'est le seigneur qui décide de l'emplacement des villages, sans fortifications mais qui sont délimités par des bornes physiques ou naturelles ( bois, arbres, cerisiers, talus ). La mise en place est plus tardive dans l'Europe septentrionale avec des regroupements basés sur le volontariat. Un dernier cas de figure se présente dans les zones de colonisation ( Espagne, Allemagne orientale mises en avant en comparaison au bagne ), il n'est pas question de regrouper un habitat déjà existant mais d'implanter des groupes de « colons » dans des territoires pour des habitats nouveaux. De manière générale, cette manière de vivre s'appelle un encellulement soit l'organisation autour d'un centre avec un territoire structuré par des parcelles et des chemins. La cohabitation de ces petites unités se fait grâce à un réseau seigneurial, avec des habitations politiques. II. Les types de relation impliqués par la seigneurie. La seigneurie est l'ensemble des droits du seigneur. Contrairement à ce que laissaient entendre les manuels secondaires, le servage n'est pas la forme centrale d'exploitation du féodalisme. Le statut du serf ( intermédiaire entre l'esclavage et la liberté ) ne s'applique qu'à une part réduite de la population ( 10/15 % de la population rurale qui peut former jusqu'à 95% de la population globale ). Le serf se repère grâce au servage ( taxe personnelle dont la paie s'accompagne d'un geste humiliant : on se présente au seigneur avec quelques deniers sur la tête ou la tête courbée ), la mainmorte ( le maitre du serf saisie le bien du serf à sa mort ou, selon les coutumes, en prélève une partie ) ou encore le formariage ( taxe sur le mariage en dehors de la seigneurie ). Les conditions de vie du serf ne sont pas systématiquement pires que celles de leurs voisins libres, c'est leur statut qui est humiliant. De toute façon, en dehors de quelques ilots, la tendance est au déclin par déguerpissement ( les hommes partent en ville ) ou par affranchissement ( rachat ou par abandon de ces pratiques ). C'est en Angleterre que le servage subsiste jusqu'en 1400 ; en Picardie ou en Normandie, il disparait vers 1100. La vraie matrice de ce monde est la domination seigneuriale. Dans la seigneurie, le maitre exploite une grande partie du sol : il exploite de manière directe la réserve ( environ le quart ou la moitié des terres ), le reste est formé par les parcelles cultivées librement et individuellement par les tenanciers qui peuvent être transmises à leurs descendant. C'est une concession laissée par le seigneur en échange de taxes. Ces principales taxes sont la taille ( donnée contre la protection du seigneur, elle devient fixe et annuelle au XIIIe siècle ), on lui doit également le cens ( loyer de la terre d'abord payé en une part de la récolte et qui se transforme progressivement en argent ). Les paysans doivent par ailleurs des corvées : un travail sur les terres exploitées par le seigneur ou plus rarement un travail domestique au château. Les situations sont variables : les corvées sont lourdes en terres germaniques ( 3 ou 4 jours par semaine ) mais insignifiantes en France ( 5 ou 6 jours par année ). On a en revanche cette possibilité pour le seigneur d'avoir un corps d'homme pour disposer de ses terres surtout lors de la récolte ce qui provoque une entrave à la récolte du paysan, ce qui entraine un mauvais travail et donc un mauvais rendement. Les seigneurs vont donc s'entendre avec les paysans pour la conversion des corvées en rente d'argent. Par ailleurs, le seigneur a une seigneurie banale ( un droit de commandement ), il dispose de structures comme le moulin, les fours, les pressoirs qui sont offertes aux villageois en échanges des banalités payées par les paysans. Les paysans payent également des tonlieus soit le péage sur la marchandise, le passage d'une rivière, la vente au marché, etc. La seigneurie est également justicière, les seigneurs ont accaparé cette ancienne attribution des comtes carolingiens et postcarolingiens. C'est encore une fois une source de revenus non négligeable. En Catalogne, les plaids comtales cessent de se réunir dès le début du XIe siècle au profit des Justices seigneuriales. Plus au Nord, la justice comtale a réussie à se maintenir jusqu'au milieu du XIIe siècle. Le seigneur va d'abord statuer sur des questions foncières ( amendes, confiscations, mauvaise utilisation des bois ), pour se faire il va se faire aider par des gardes, des sergents chargés de surveiller les récoltes, les corvées, inspecter les forêts, appliquer les décisions de justices et va lui-même travailler avec le prévôt ( sorte d'intendant responsable de la tenue de la seigneurie qui gagne une part de terre et une fraction des amendes ). Le prévôt est mal vu des villageois. Chaque jugement est fondé sur des coutumes, qui sont des lois non-écrites, et jusqu'au XIIIe siècle, l'appel n'est pas possible. Certains seigneurs s'arrogent même la haute justice ( le droit de condamner à mort ) et font élever des gibet ( ce sont des droits presque régaliens ), posséder un gibet est une marque de pouvoir extrêmement importante. En Angleterre ou les institutions ont été bien plus précoces qu'en France, la justice relève du roi. Ses représentants vont circuler dans tout le royaume. En l'absence des profits de cette justice, les seigneurs ont maintenu des conditions difficiles dans leurs villages ( servage, etc. ). III. Les sources de tensions Le quotidien du paysan n'est pas aussi misérable que la caricature visuelle ne veut bien nous le faire croire. Evidemment, le vilain pauvre qui ne dispose que du minimum pour vivre existe, mais il existe plusieurs statuts de paysans et il faut placer ce statut en contraste avec celui du paysan un peu plus aisé avec plus de terres, de bonnes qualités. Ce paysan va pouvoir racheter des corvées, pouvoir convertir en rente fixe des impôts, il peut vendre également ses excédents au marché voisin et avec ces bénéfices il peut acheter des outils plus performants, des aliments plus variés qui vont le renforcer physiquement et renforcer ses rendements. La société villageoise au XIIIe siècle est plurielle et voit croitre les inégalités. Chaque communauté possède alors une élite composées de quelques laboureurs qui, par mariage, ont réussi à composer des parcelles plus grandes. A partir du moment où ils ont une assise économique, ils peuvent alors jouer un rôle politique. De l'autre côté on retrouve les salariés sans terres ( manouvriers ) et qui sont très sensibles à la misère. Ils sont vraiment à la merci des commandes formulées à leur endroit. La majorité vit d'un lopin bêché, d'un jardin et d'une vache. Les luttes sociales vont apparaitre et se déchainer contre les seigneurs laïques ou ecclésiastiques. Les frictions apparaissent de plus en plus aux XIIe et XIIIe siècles avec des raisons multiples qui comment déjà par le rachat des corvées qui peut se faire âprement. Pour contrer les effets de la dévaluation monétaires, les seigneurs vont créer de nouvelles taxes complémentaires ( surcens par exemple ). Le principal point de discorde est l'usage du saltus, que les seigneurs utilisent pour la chasse etc. Les seigneurs tentent par tous les moyens de récupérer des liquidités et qui va jusqu'à la remise en place du servage sur des paysans bien moins dociles ( ils ont eu des améliorations de leur train de vie ). La résistance des villageois est d'autant plus forte que la population villageoise a appris à s'organiser : ils se regroupent et apprennent à agir de leur propre iniatives, ils vont se structurer pour porter une voie de la contestation. Ces premières structures autonomes sont religieuses : les confréries paroissiales qui sont des confréries de dévotion et d'entraide qui font partie des œuvres du chrétien. Ces confréries peuvent amener à l'acquisition d'une terre en commun, l'association pour entretenir l'église, l'enterrement des plus pauvres ce qui favorise la parole et la circulation des échanges. On voit également que divers occasions et fêtes vont souder ce groupe avec des célébrations de banquets qui vont façonner le groupe paysan et qui introduit au XIIe siècle l'émergence d'une personnalité morale pour les villageois. A partir de cette date, les communautés villageoises vont se réunir pour traiter de questions importantes ( réparation d'un chemin, recrutement d'un berger ) et qui peuvent élire un représentant à l'année : les villageois sont désormais assez forts pour obtenir des concessions de charte de franchise. On en trouve dans les domaines francs, germaniques et hispaniques : ces chartes vont fixer par écrit les obligations respectives les obligations des villageois et des seigneurs. Elles définissent le bourg, les parcelles et les Hommes libres. On reconnait une certaine autonomie du village qui peut même élire les maires et les jurés. Ainsi, la charte permet le renforcement de la conscience communautaire. **Chapitre 3 : Aristocratie, chevalerie et féodalité** Vers l'an Mil, les clercs conçoivent la société comme divisée par la volonté divine. Cette société est divisée en trois ordres spécialisés et solidaires : les Oratores ( qui assurent la prière pour le salut des autres ), les Bellatores ( qui vont maintenir la paix à l'intérieur ) et les Laboratores ( qui nourrissent le monde ). Ce qui est intéressant, c'est qu'il s'agit d'un Etat de Fait mais aussi d'un Etat de droit. La société dépeinte est bonne puisqu'elle est divine : le Clergé est censé se placer à la tête de l'ensemble même si lui aussi est extrêmement diversifié. Les évêques, les abbés sont à l'origine des nobles, les moines et chanoines à l'origine des chevaliers et les prêtres des paysans. On pourrait ainsi dire qu'il n'existe que deux ordres, mais il y a quand même cette tripartition sociale. Cette noblesse constitue la classe dominante par son pouvoir sur la terre, par son commandement des Hommes et par le quasi-monopole de l'activité guerrière. La noblesse a conscience de sa supériorité et va développer une sorte d'hétos, un mode de vie pour affirmer des manières, des valeurs, un art de vivre qui est le vivre noblement ( bénéficier d'un héritage, de droits, de propriété mais aussi de manière d'agir, de se comporter ). Ce groupe nobiliaire résulte de la fusion de deux ensemble : d'une part, il y a les descendants de la noblesse carolingienne et d'autre part ceux qu'on qualifie de milites ( des chevaliers, des hommes d'armes qui étaient initialement des guerriers au service des chatelains ). Les hommes d'armes vont s'ancrer dans leur territoire, développer leur fortune et former une nouvelle caste : la chevalerie qui se détache par des habitudes de vie qui vont constituer des codes qui consacrent cette noblesse chevalière. L'adoubement ( reconnaissance de l'autre ) va se codifier de plus en plus précisément et se doter d'un code d'éthique et d'honneur remarquable. Cette chevalerie est consubstantielle à ce métier d'arme : la noblesse s'agrège car elle s'identifie à elle, et le noble a pour but de devenir chevalier car tous les nobles ne le sont pas. L'Aristocratie se définit d'abord par le sang, l'hérédité. C'est une appartenance qui peut néanmoins s'acquérir selon des modalités précises : quand on manifeste des caractéristiques précises qui peuvent mener à un adoubement. L'adoubement intervient à la fin de l'adolescence au terme d'une formation idéologique et militaire, il s'accompagne de festivités. S'il y a des adoubements exceptionnels comme la veille d'une bataille, c'est à la Pentecôte qu'on les pratique le plus. Le jeune chevalier va recevoir ses armes d'un noble, le plus éminant possible, qui applique le Geste de la Collée ( coup marqué sur la nuque ou l'épaule avec la main ou le plat de l'épée ). Tout cela permet à la caste de se sentir supérieur, d'avoir une sorte de grâce qui lui permet de se renforcer. Le rituel se christianise progressivement et abouti à une forme achevée classique au XIIIe siècle puisque l'adoubement est précédé d'une nuit de prière. I. **Les activités aristocratiques** Le château va constituer le symbole du pouvoir de la noblesse. Le cas de l'Angleterre est assez extraordinaire avec un nombre important de châteaux construits aux XIe et XIIIe siècles. En 1066, on ne connaissait que deux châteaux, en 1080, Guillaume le Conquérant tient le pays avec 80 châteaux et en 1154 on en compte 250. Au XIe siècle, il s'agit encore de structures en bois construit sur des mottes, et protégés par des fossés. Au XIIe siècle, le château se construit de plus en plus en pierre : les Croisés en ont vu en Terre Sainte et au Moyen-Orient. La simple tour, appelée Donjon, va se voir adjoindre des extensions : des enceintes, des défenses qui n'auront cessé de se sophistiquer. Le château est le lieu d'habitation du seigneur, de sa famille et de ses soldats ; il est également le lieu de refuge en cas de raids ennemis pour les populations. Il abrite une sorte de petit village avec les propres dépendances du seigneur : écuries, ateliers, une chapelle et même parfois un collégial pour assurer les besoins spirituels du chatelains qui peut en faire une nécropoles pour sa dynastie. Il a également une fonction symbolique non négligeable puisque c'est au château que les paysans viennent payer leurs redevances et c'est également là où se tient le tribunal seigneurial. L'activité principale du noble est de faire la guerre. Cette guerre demeure en générale de faible envergure : souvent des coups de mains contre les seigneurs voisins, des pillages, des captures pour pouvoir faire des rançons. La grande bataille rangée est exceptionnelle : elle est facilement appelée à cette époque le Jugement de Dieu. La guerre noble se pratique à cheval, le combat est un choc de chevaliers à cheval ( une ligne qui charge au trot puis au gallot sans se désunir et qui cherche à rompre la ligne inverse et qui se reforme pour recommencer la manœuvre ). Les unités sont organisées en Conrois qui sont des unités féodo-vassaliques bien groupées autour de leur seigneur : elles sont rassemblées sous une bannière, par un cri de guerre. Ce sont des hommes qui ont grandi, sont éduqués ensemble et sont souvent apparentés. La formation permet cet exercice guerrier, elle s'acquiert dès le plus jeune âge. Vers l'âge de 7 ans, le garçon est envoyé chez le seigneur ou il grandit accompagné par ses frères d'armes. On apprends à soigner et monter les chevaux, à entretenir et se servir des armes, on sert les chevaliers en tant qu'écuyer. L'adoubement arrive vers les 15 ans. Les armes, telles qu'elles apparaissent dans des trouvailles archéologiques, sont assez diverses et ne vont cesser de se sophistiquer. On parle de la brogue ( cuirasse de cuir, renforcée de fer ), de cote de maille ( qui est un haubergeon qui recouvre le torse, le tronc ou le haubert qui recouvre la tête et la poitrine ), du heaume qui recouvre la tête, la nuque, le nez, mais aussi un écu ( bouclier d'abord aussi haut que l'homme puis plus petit et maniable ). Le cheval fait le chevalier mais l'épée également. Elle est un véritable objet de révérence : elle reçoit un nom, elle est bénie. On reçoit également une lance pour désarçonner l'adversaire dans la charge. En tout, le barda est de 15 kilos ou davantage d'un armement qui est fort couteux puisqu'on a estimé qu'il fallait 15 hectares de rendements de viens foncier pour l'obtention de cet attirail. Il faut également penser à une selle haute, aux étrier et un animal qui coute cher. La conséquence immédiate de la lourdeur de cet arsenal est que les fils malingres sont écartés de la chevalerie pour en faire des clercs. Aux XIe et XIIe siècles, les fantassins ( libres ruraux et milices urbaines ) sont un peu sollicitées. Mais c'est surtout au XIIIe siècle qu'ils vont être davantage embarqués dans les guerres seigneuriales. Pour s'entrainer, il existe des tournois qui sont en réalité très proche de la bataille seigneuriale ( mettre en place des charges collectives dans des endroits très vastes ). On « joue » à la guerre qui aboutissent à des mêlées confuses mais qui ont pour but de capturer et d'obtenir des rançons, sans oublier de pratiquer l'aumône et le don au moment du banquet. Le tournoi en lice est plus tardif il ne date que de la fin du XIIIe siècle : on a des tournois à la lance, à la masse ou encore à l'épée. Les cadets sans héritage viennent donc rafler des rançons et se faire remarquer des dames, pour repérer éventuellement une riche héritière. L'Eglise condamne vers 1130 ce qu'elle estime être une débauche de violence : le sang des chrétiens coule en vain et la noblesse se détourne de taches justes mais néanmoins ces hommes adorent ces jeux et le succès ne faiblit pas, si bien qu'au XVIe siècle, les rois de France tournoient. Le noble est également un chasseur : elle allie activité physique et démonstration de prestige. Il s'agit également d'une démonstration du pouvoir seigneurial. Parmi les chasses les plus nobles se situe la chasse au loup qui permet la diminution d'un nuisible qui s'attaque au bétail. Pour Gaston Phoebus, la chasse est aussi une vertu chrétienne : elle déploie un certain nombre d'aptitudes, de grâces. I. **Valeurs chevaleresques et amour courtois** Les chansons de geste sont des récits épiques de bravoures chantés par les ménestrels, les troubadours qui viennent divertir les cours seigneuriales et princières. Ces chansons promettent la fidélité, l'honneur, les prouesses et la largesse, le don qui s'affiche dans le vêtement. On dépense avec excès pour montrer sa supériorité : on dit qui on est par l'argent que l'on dépense. L'Eglise va tenter de mettre de l'ordre dans cette idéologie. Elle voit dans ces actes de « prouesse » de la démesure. Elle va distinguer des valeurs nobles : les pillards, violents sont à proscrits et va mettre en place le Mouvement de Paix de dieu pour canaliser et encadrer la violence. La Papauté va tenter de détourner les ardeurs belliqueuses contre les populations qui ne croient plus en Dieu comme lors des croisades sous le joug d'Urbain II. On va aussi avoir des ordres militaires sous le joug monastique comme les Templiers, les chevaliers teutoniques, etc. Mais l'adéquation entre l'Eglise et la Chevalerie n'est jamais totale mais on constate une acceptation vers 1205 de l'Eglise. L'amour courtois est un idéal pour le chevalier qui apparait dans la littérature du Midi sous le nom de Fin'amors et se repend dans le Nord dans les années 1150. C'est une manière pour le chevalier se de comporter en être raffiné, dédié à sa dame dont il défends les couleurs et porte un symbole au combat. Néanmoins, il y a toujours une tension érotique dans ces récits et on peut songer à l'amour adultère de Lancelot et Guenièvre. La femme exaltée est placée en position de suzerain par rapport au héros avec une relation symbolique, allégorique qui fait de l'exploit chevaleresque une forme de sublimation du désir. Là aussi, l'Eglise va essayer de faire évoluer ces textes avec des motifs traditionnels qui vont se combiner aux valeurs du Christianisme. Dans **[Perceval]** de Chrétien de Troyes, la thématique amoureuse passe au second plan et l'idéal suprême de la chevalerie devient la quête du Graal qui devient le moteur de l'action chevaleresque. II. **Les relations féodo-vassaliques** Cette relation est fondée sur des liens de personnes, unissant le seigneur à son vassal. Ce lien a servi qualifier la société tout entière sous le terme de Féodalité. Pourtant, c'est un portion infime de la population ( pas plus de 2% ), ici on est dans une relation de fidélité et d'échange de services et d'obligations. Cette société est structurée de manière pyramidales. Le vassal doit à son maitre le conseil : il doit siéger au plaid pour aider à juger. Il va également délivrer des conseils politiques et il lui doit aussi le service qui recouvre des obligations miliaires ont la durée va être déterminée pour se réduire à 40 jours par an en dehors de la période de garde du château ( estage ). Il lui doit également une aide financière ( aide aux quatre cas ) pour l'adoubement de son fils ainé, pour le mariage des enfants du seigneur, pour le paiement de la rançon si le seigneur est capturé et pour son départ en croisade ou en pèlerinage. Le seigneur promet en échange sa protection, un certain respect et des grâces, des cadeaux comme la prise en charge de l'éducation du fils du vassal. Il lui octroie aussi un fief, le plus souvent une terre. Il est donc seigneur fieffé. Ça peut être aussi des droits sur une taxe, des péages, un office. Le seigneur conserve un droit éminent sur le fief ( en quelque sorte le salaire du vassal ). Cet engagement personnel s'accompagne d'un rituel de l'hommage vassalique : le vassal va s'engager verbalement, il se commande au suzerain, il se donne à lui. Cette manière de se donner au suzerain se manifeste par un geste, avec une dimension performative, soit l'Immixtio manuum ( ils se prennent les mains ). Le seigneur va lui remettre un objet qui symbolise l'investiture de son fief. Parfois dans certaines parties de l'Europe a lieu le baiser sur la bouche qui signifie la paix, l'amitié, ou encore l'égalité. En Catalogne, la relation vassalique est établie au XIe siècle sous la forme d'un contrat. Bien que les rites soient dissemblables, on va assister à une féodalisation généralisée des terres qui font disparaitre les alleux au profit des fiefs. Mais certains problèmes ont commencé à émerger : on met en place un hommage-lige ( hommage préférentiel ). Par ailleurs, on voit que le fief se transmet de plus en plus en héritage à la mort du vassal, le seigneur doit alors réitérer l'hommage pour réencrer les biens de fidélité. Le seigneur va alors profiter de cette transition pour réclamer un droit de succession ( souvent un bout du fief ) pour permettre au fils d'en profiter. Néanmoins, le seigneur a le droit de confisquer le fief en cas de faute grave ( commise du fief ) si le vassal s'est comporté en félon ( il romps ses engagements en trahissant son seigneur ). Malgré tout, les relations s'apparentent à un rapport de force avec une aliénation des vassaux qui sont allés jusqu'à sous-inféoder le fief. Les mariages permettent également la concentration des patrimoines ce qui peut constituer une menace pour le suzerain qui peut se comporter en tyran en mettant la pression sur le fils du vassal, en coupant le bois, etc. Mais l'inverse est possible avec des vassaux qui ne prêtent pas serment. En France, cette époque féodale va céder le pas à une période de royauté plus administrative et éliminant progressivement les pouvoirs féodaux des seigneurs ( comme l'ost du seigneur remplacé par une armée ). **Chapitre 4 : Villes et commerce** I. **Le secteur tertiaire** Les villes vont se multiplier dans cette période de croissance. Les changements opérés dans le secteur tertiaire est énorme. Vers l'an mil, le commerce lointain et important est très rare. L'économie qui était pratiquée visait surtout la subsistance, les produits qui circulent alors son léger et les marchands sont des colporteurs assez marginaux. Aux alentours de 1150, les progrès du transport et des techniques d'échange vont faire que l'Europe de 1300 est quadrillée de routes commerciales tandis que le commerce va pénétrer jusqu'aux campagnes : les marchés deviennent bientôt régionaux voir internationaux. L'Europe se quadrille de routes commerciales, les pondéreux vont pouvoir être amenés plus loin et le marchand devient le maitre de l'économie. Les transports vont se moderniser, devenir plus efficaces, avec une supériorité des transports sur l'eau qui permettent de transporter des quantités plus importantes. Les routes sont en effet chaotiques : le roulage n'est possible que dans les pays sans reliefs excessifs. Le cheval peut aller jusqu'à 75 kilomètres par jours ce qui en fait l'animal le plus fréquent. Dans cette période, les moindres rivières sont naviguées : en Flandres, on les canalise vers 1150 pour favoriser l'import de grain d'Artois vers la Flandres. Les navires se spécialisent : en Méditerranée on retrouve des galères qui sont faciles à manœuvrer mais laisse peu de place à la cargaison. On va également retrouver la nef qui est difficile à manœuvrer mais est un très gros porteur. En Méditerranée, la navigation est assez précise grâce à la boussole, aux cartes. Dans les mers du Nord, on privilégie la barque normande et après 1150 on va diversifier les navires pour utiliser les cogues ( gros porteurs à voile ) et la navigation se fait en suivant les côtes. Les outils de navigation sont nombreux comme les cartes ou les boussoles qui permettent de délimiter les mers, mais la navigation se fait surtout à l'estime. **B) Un essor commercial vigoureux** Cet essor commercial se fait à trois niveaux : au niveau local en épousant les pratiques alto-médiévales, régionales mais aussi à l'échelle continentale. Dès la fin du XIe siècle, des marchés réguliers se mettent en place, ils se tiennent dans les villages mais aussi dans l'avant-cour d'un monastère ou dans la ville si elle n'est pas trop éloignée. On va y trouver au niveau local des produits de l'agriculture, également de l'artisanat rural ( poterie, vannerie, pièces textiles ) ; à la ville on trouve la même chose mais également des outils davantage manufacturés, de la cire, des poissons salés et des industries un peu plus importantes comme celles qui permettent la fabrique de la bière ; le marché continental va s'adapter à une production plus spécialisée, davantage renommée ou qui vient de destinations plus lointaines et qui touchent surtout le textile, la métallurgie. Il y a des bassins de spécialisation auquel les métiers sont très attachés. Il y a une notoriété qui s'établit et un commerce qui se développe. L'Axe Nord-Sud va constituer une voie commerciale essentielle, ainsi que l'axe Est-Ouest depuis le XIIIe siècle et qui se développe depuis la Mer Baltique jusqu'à la hanse. On va y trouver des fourrures, du bois, de l'ambre ( très apprécié des orfèvres ) et qui vont faire apparaitre des comptoirs commerciaux. Les foires sont nombreuses. Beaucoup ont un aspect festif, certaines ont une dimension régionale et d'autre ont une vocation internationale. On dénombre des foires en Angleterre, en Flandres, en Champagne et qui s'imposent comme le Grand Rendez-vous de connexion des marchands du Nord ( Anglais, Flamand ) et du Midi ( Languedocien, « Italien » ). Ces foires connaissent un succès exceptionnel car elles sont très bien organisées. Les comtes de Champagne sont gagnants, contre des revenus supplémentaires ils assurent la protection des marchands. Chaque foire dure 6 semaines. Les marchands règlent leurs dettes à la fin qui sont payables soit directement soit à la prochaine foire. Ces foires constituent un grand marché aux capitaux et très rapidement on voit que ce commerce se double d'une activité banquière qui se dissimule, et qui dure même lorsque les foires commencent à diminuer. Par la suite, le commerce va se centraliser plus au Nord du côté de Bruges qui va se constituer comme une foire permanente et devient un centre commercial. **C) Les types de marchands** Le marchand itinérant était celui de règle avant 1150. Les marchands du Sud de la France allaient dans les foires du Nord pour ensuite revendre les produits dans leurs boutiques ou aux marchés. Le marchand sédentaire apparait au XIIe siècle, il travaille avec des valets, des facteurs et des associés pour limiter les risques. On voit apparaitre des contrats de commande qui vont lier un associé passif ( personne riche qui va apporter le capital, il récupère ¾ des bénéfices ) et l'associé actif qui va faire fructifier ce patrimoine. Ce marchand est souvent spécialisé et prête beaucoup à intérêt. Dans ce monde marchand, il faut reconnaitre que les marchands italiens apparaissent comme les moteurs de leur Italie. Les premiers à être positionnés sur tout le bassin méditerranéens sur leur galère sont les Pisans et les Génois, ils vont libérer la Méditerranée de l'emprise musulmane. Les génois et les vénitiens ont en quelque sort une ubiquité : ils sont présent aussi bien à l'Occident qu'à l'Orient de la Méditerranée. Les italiens sont aussi maitre des échanges de produits de luxe comme la soi, le cotons, le sucre, les épices, des ivoires qui vont être travaillés par des spécialistes de la taille sur ivoire, de l'or, des parfums, et en échange on va apporter de la laine, du sel, du bois, etc. Cette puissance comporte déjà quelques aspects coloniaux : on dirige des plantations de Canne à Sucre sur les côtes en faisant travailler les esclaves par exemple. Les aspects commerciaux surprennent par leur ampleur, par leur avance avec ce système de comptoirs, des convois pour assurer les bateaux contre la piraterie, et des assurances maritimes misent en place vers 1300. Ces italiens sont donc présents dans toute l'Europe, ce sont surtout des Toscans même si l'Europe continue de les appeler de manière générique les Lombards. Il est celui qui acquiert le contrôle de l'ensemble du commerce sur le Continent. Après 1200, ils vont surtout se mettre au service du Pape à Rome. Ils vont devenir des associés mais aussi des concurrents pour les marchands flamands, d'autant qu'une fois présents en Flandres ils vont essayer de mettre la main sur l'artisanat local. Ils sont donc des marchands du banquier et vont mettre en place beaucoup de techniques financières. Tout d'abord, ils vont se comporter comme une banque de dépôt qui sont rémunérés. Ils tiennent les comptes-courant des virement, opèrent les virement sur un ordre oral ou écrit ( le chèque est inventé vers 1350 ). Les marchands vont travailler en famille et vont cumuler leur Capital et leur Travail, ils sont rémunérés au Prorata de leurs rapports. Ces compagnies vont placer de nombreux représentants dans l'Europe. C'est parce qu'ils y sont présent, qu'ils vont pouvoir faire circuler la lettre de change ( voir schéma Moodle ). La comptabilité à partie double écrit ce qui sort et rentre ce qui permet de savoir en continue les stocks des marchands. **D) La monnaie** Elle joue trois rôles : - Elle permet d'estimer les valeurs - Elle permet de faciliter l'échange - Elle permet l'épargne La période est un tri-métallisme, trois métaux sont utilisés pour l'argent : on parle de monnaie noire ( argent fortement allié ), de monnaie blanche ( argent pure ) et monnaie dorée ( or ). Le denier ( argent noir ) se révèle insuffisant pour les gros paiement. Pour faciliter ces gros paiement, Venise, en 1201, invente le gros d'Argent pur qui valait 1 sous ( 1 livre = 20 sous = 240 deniers ). Quelques temps plus tard, Florence frappe un Florin d'or ( qui vaut approximativement 1 livre ). Cette monnaie est très instable car elle est dépréciée : les pièces s'usent ou sont rognées, sans parler des dévaluations brutales, volontaires dans le cadre de guerre par exemple. On peut également évoquer les problèmes du ratio or/ argent : en 1266, Saint Louis émet un écu d'or et un gros d'argent mais l'or n'arrive pas et le roi frappe très peu d'écu, les émissions de gros d'argent sont importantes à l'inverse. Les espèces abondent essentiellement grâce au travail dans les mines d'argent mais les quantités sont insuffisantes et les crédits deviennent indispensables. On peut citer l'engagère ( on engage un bien chez un banquier qui fait le profit du prêteur ), le prêt sur gage ( taux d'endettement à plus de 40% ), par reconnaissance de dette. **E) La question de la moralité économique** Le profit du marchand est d'abord mal vu par l'Eglise : il ne produit rien et son gain est honteux car il travaille avec le temps. Mais le temps n'appartient qu'à Dieu, c'est donc un travail immoral. Néanmoins, l'Eglise a besoin de cet argent. Thomas d'Aquin, vers 1270, réhabilite le travail des Marchands, de manière à éviter que les marchands partent du côté des hérétiques. Il dénonce les corporations, les ententes qui peuvent faire baisser les salaires. Le crédit est partout, les thomistes ( successeurs de Thomas d'Aquin ) vont définir trois cas qui ne peuvent être du pécher d'usure : - Si l'intérêt est un cadeau de l'emprunteur - Si le profit n'est pas connu d'avance - S'il y a dommage pour le prêteur La morale chrétienne s'est remarquablement adaptée à l'évolution de la société et à la nécessité de l'économie. Ceux qui ont emprunté une somme importante doivent fonder une association pieuse II. **Le monde urbain** A. **L'essor urbain** Cette ville médiévale est difficile à définir : seules les villes épiscopales sont définies comme des cités. Pour le reste, on parle de ville, de village, de bonnes villes, de villes champêtres, etc. Le nombre d'habitant ne distingue pas forcément la ville du village, la fortification n'est pas non plus un critère. C'est toujours difficile de définir la ville : elle se définit par un faisceau d'activités, de privilèges qui vont faire d'elle une ville sur le plan générique. Pour Jacques Le Goff, la présence des couvents mendiants permet de distinguer la ville du village. La densité de l'habitat est variable : en ville, les espaces verts sont importants. Il n'existe qu'une différence de degrés entre le village et la ville. Mais la ville est la forme la plus complexe de l'organisation sociale, elle domine la campagne par son lieu d'innovation et de commerce. Elle permet les grands rassemblements, toutes les campagnes sont sous influence urbaine. L'essor commercial demeure le facteur principal de la réaffirmation du fait urbain. La ville va drainer les populations. La croissance urbaine accroit ce développement. Des bourgs commencent à se former autour des murailles antiques et progressivement, ces murailles vont se multiplier car la ville grouille d'habitants. Au XIVe siècle, les grandes villes comptent de 100 et 200 000 habitants avant la Grande Peste. Néanmoins, la plupart des villes ne dépassent pas les 10 000 habitants. B. **Le gouvernement municipal des métiers** Les villes ont des structures gouvernementales et des privilèges qui varient. Elles vont obtenir des franchises par l'intermédiaire de Chartes qui comportent l'exemption de droit seigneuriaux, la possibilité de lever des taxes et aussi des privilèges. Elles obtiennent également l'exercice d'une justice propre et ponctuellement la formation d'une justice urbaine. Cette progressive identité propre est due à des négociations, notamment face aux seigneurs ecclésiastiques qui ont été particulièrement opposés à ces franchises. Il arrive aussi que les ducs, les comtes jouent un rôle favorable aux villes de manière à négocier la sécurité des marchands. Le roi peut parfois nommer les autorités principales, ce qui va signifier et appui et renfort de l'autorité royale en France. Ponctuellement émergent des communes qui s'appuient sur des conjurations ( serment collectif ), elles deviennent une personnalité morale qui est bien intégrée dans la société féodale. Il y a des jurés et des échevins au Nord, et des Consuls au Sud. La ville se dote d'une personnalité morale par l'usage de symboles. Cette personnalité morale apparait particulièrement bien dans les sceaux urbains ( coffre, beffroi, cloche ). Elle a la volonté d'acquérir des nouveaux privilèges afin de négocier avec le seigneur ou avec l'appui du roi pour son développement. Elle est intégrée dans ce système féodal. La noblesse est souvent présente en ville, surtout en Italie. Elle se signale par la circulation de ses hommes en armes, par ses palais, par sa domesticité ( qui porte les livrets de la famille ) et donc par ses symboles. Les tours montrent la domination spatiale de ces familles, elles se hérissent à l'intérieur des paysages urbains. Elles sont la pour marquer l'empreinte des familles à l'intérieur du site urbain, mais aussi une fonction militaire : les clans s'opposent à l'intérieur des cités urbaines. Ces conflits de l'ordre de la Grande Histoire gangrènent la ville. Les liens sont toujours fort avec la campagne environnante : des parties de campagnes dépendent d'une ville, les nobles en ont des propriétés. Les familles seigneuriales dominent la vie politique dans la société du XIIe siècle, elles commencent à structurer les premières institutions urbaines. La ville ne s'isole pas de la campagne. Le Populo Grasso ( peuple gras = artisans, travailleurs ) oblige les nobles à leur concéder des assemblées et des pouvoirs. Ces pouvoirs sont rythmés par des formes constantes de lutte pour le pouvoir entre la noblesse et le peuple qui s'enrichie et cherche des représentants dans ce pouvoir. Néanmoins, quand ces familles enrichies accèdent à des pouvoirs, elles se considèrent comme les seigneurs urbains et on parle d'oligarchie, avec une dynastie d'échevins ( dans le Nord ). Le populo Minuto ( travailleurs inférieurs, salariés ) cherche à avoir lutter contre les seigneurs et ils sont souvent manipulés par le populo Grasso bien qu'il souhaite se faire entendre pour revendiquer ses droits. Ce populo Minuto est intégré dans le métier urbain : les corporations. Elles intègrent des hommes riches comme pauvres et forment des métiers culturels ( rites ) qui permettent de faire corps pour se sentir moins seul. Elles réglementent l'art du métier, la vie économique, les normes de productions, les conditions de travail, les salaires, les règles de l'embauche ( apprenti pendant 8 à 10 ans, logé et nourri par le maitre sans salaire ). La structure d'ensemble est donc corporative et non pas capitaliste : la qualité l'emporte sur la quantité de production, les investissements sont très limités en raison de l'épargne et de l'investissement dans la terre ( pour accéder à un éventuel anoblissement ), ou alors dans des fondations pieuses. C'est une société ou les rapports personnels prédominent, le pouvoir s'organise de manière réticulaire ( en réseau = tout tiens sur des relations ). C. **Renouveau et insertion dans la tradition** La ville est un lieu d'émergence de nouveaux groupes sociaux. L'aristocratie foncière affecte de mépriser les marchands et les artisans, l'Eglise diabolise la ville qui est considérée comme le pécher de la tentation mais elle garde l'idée de Jérusalem Céleste. L'Eglise s'ouvre peu à peu aux citadins. Le paysage urbain aurait donc de quoi surprendre car on trouve des terres cultivées, du bétail dans les villes. Les ruelles sont mal éclairées avec des maisons à étages qui débordent sur la rue, les échoppes débordent de produits divers. La ville est sale, les immondices sont très difficiles à éliminer, les cochons sont chargés comme éboueurs, Philippe Auguste veut faire pavé Paris. A Lille, il faut attendre le XIVe siècle pour que la place de la déesse soit sortie des hauts. Sur la place publiques, les emblèmes de l'autorité urbaine figurent. Ce sont les hôtels de Ville et les beffroi, ce sont également les tavernes, les bains publiques, les Halles, les lieux de prostitutions autorisés, etc. C'est un état d'esprit nouveau dans ces villes ou l'on détecte l'omniprésence de l'argent avec une valorisation du labeur, de l'esprit comptable et donc des hommes de plus en plus lettrés. Il y a une activité intellectuelle animée, d'abord autour des écoles cathédrales, des collèges, des universités et ainsi alimentées par une production des livres manuscrits que l'on retrouve dans une hausse constante dans les ateliers laïques et qui dépasseront bientôt les scriptorium. Ces milieux scolaires entrent en interaction avec le milieu urbain, il est fondamental dans ce milieu intellectuel. La ville reste la fille du dynamisme féodal, l'imbrication est forte entre ville et campagne, la ville garde une position dominée dans le schéma des trois ordres même si les classes urbaines s'efforcent de copier le modèle aristocratique et rêvent de prendre pied à la campagne en se fondant dans l'ancienne noblesse. Si l'on revient sur le schéma de la tripartition sociale, on se rend compte de l'insuffisance de cette tripartition. C'est une construction imaginaire du féodalisme mais qui correspond de moins en moins à cette vie qui voit l'émergence de laboratores qui s'enrichissent. Elle tient cependant compte des tensions entre seigneurs et roi, moines et évêques tout en gardant cette vie urbaine inférieure. Cette tripartition est maintenue car les Oratores sont en première place dans cette société féodale : ils sont ceux qui accompagnent l'homme dans sa vie, l'idéal reste d'accéder au paradis et donc de respecter leur première place. 2. ***La domination de l'institution ecclésiale*** Il convient de distinguer l'église ( bâtiment ou se rassemble les fidèles et ou se déroule le culte ) et l'Eglise qui peut elle-même regrouper la communauté des croyants ( chrétienté ) et l'institution ecclésiastique ( clercs et moines. L'Eglise comme communauté est la société dans sa globalité à l'exception des minorités juives et musulmanes dans cette Europe occidentale. Comme Institution, elle est en revanche la partie dominante. C'est cette institution qui détermine les principales règles de fonctionnement de la communauté chrétienne. C'est l'histoire d'une séparation entre clercs et laïcs et du renforcement du pouvoir de l'institution ecclésiale jusqu'au craquement du grand Schisme. **Chapitre 5 : L'Eglise, définition et fonction** I. Un monde divers et uni Cette hiérarchie socio-économique est retrouvée au sein de l'Eglise : les institutions les plus hautes sont à la Noblesse. De ce point de vue, le Clergé et la Noblesse se retrouvent complice dans la domination de ce troisième ordre, mais ils peuvent aussi se retrouver concurrent dans la vie féodale lorsqu'ils s'opposent pour une domination seigneuriale ou des terres. Pour défendre des prérogatives, l'Eglise n'hésite pas à qualifier les nobles de débauchés, de rapaces, etc. L'écart de richesse au sein de l'Eglise est très important entre les simples moines, les simples prêtres qui sont plus modestes et les clercs les plus riches ( abbé, archevêques, etc. ) Il existe également une différence de nature entre les clercs réguliers, et les clercs séculiers. Les clercs réguliers ont fait le choix d'un ordre monastique coupé du monde dans un ordre pénitentiaire, ils servent Dieu par la prière, l'étude et parfois le travail manuel. Par opposition, le clergé séculier vit au contact des laïcs avec pour mission le soin des âmes ( la Cura Animarum qui a donné le nom de Curé, responsable de la paroisse ), ils procèdent aux sacrement et diffusent la parole divine à petite dose. L'unité de l'Eglise en tant qu'ordre vient de cette distinction entre clercs et laïcs, ils n'ont pas les mêmes droits et devoirs. Le Décret de Gratien a été l'ouvrage fondateur du droit canonique : cette Eglise relève d'un droit particuliers. C'est le droit qui définit les clercs par leur renoncement au mariage et normalement au travail de la Terre et à toute possession privée. Les clercs bénéficient du « Fort ecclésiastique », ils relèvent de la justice ecclésiastique ( ils ne peuvent être condamnés à mort ). Dans la réalité, les choses tendent à se compliquer. D'abord, car il existe diverses façons de devenir clerc et de s'engager dans cette vie : recevoir la tonsure est le premier degré pour suivre des cours universitaires et bénéficier des privilèges. On peut en outre accéder aux ordres mineurs ( portier, lecteur, exorciste, acolyte ) et la véritable césure à lieu avec les ordres majeurs ( sous-diacre, diacre, évêque, prêtre ou la prise de la vie monastique ). Dans les cadres des ordres majeurs, ils sont symbole d'abstinence sexuelle et d'un mode de vie à part. A la fin du Moyen Age, un tiers des clercs peuvent donc se déclarer marié s'il a reçu les ordres mineurs. Il faut signaler quelques statuts intermédiaire entre les clercs et les laïcs. C'est celui par exemple des convers ( laïcs religieux qui vivent dans le cadre du monastère, voués aux activités matérielles ), aussi des Membres de Tiers-Ordres ( regroupement de laïcs pieux désireux de participer à la vie spirituelle sans rompre avec la vie familiale ou professionnelle ) ou encore les béguines ( femmes adeptes d'une piété particulière et qui, sans prononcer de vœux, vivent en villes isolées ou en regroupement de béguinages ). Les clercs forment un groupe privilégié et investit d'un prestige sacré. On ne peut pas parler de l'Eglise sans en évoquer la richesse et la capacité de redistribution de cette richesse. II. Richesse et redistribution L'Eglise ne cesse de s'enrichir car elle bénéficie de donations pieuses abondantes et qu'elle concentre dans la construction d'Etat monastiques. L'Eglise, selon les estimations, possèdent 1/3 des terres en France et en Angleterre au XIIIe siècle. A titre collectif, les communautés de chanoines, les évêques, les abbés sont de puissants seigneurs féodaux. Ils ont cet avantage sur les seigneurs laïques que leurs terres se partagent lors de la succession. Bien sûr, lors de période de crises, des usurpations vont se faire au dépend de l'Eglise qui, en des temps agités, se voit obligée de concéder des fiefs en échange de protection. L'Eglise reste riche. Cette Eglise a reçu nombre d'édifices, de terres, des propriétés religieuses, des reliquaires, des vases, des objets précieux, etc. Ces reliquaires invitent évidemment à les visiter car ils contiennent des reliques de saints qui sont à l'origine de pèlerinages qui engendrent des dépenses au sein de l'Eglise et dans les villes alentours ( auberges, aumônes, argent auprès des statues ). Enfin, Charlemagne a rendu la dime obligatoire ( 1/10 de la récolte ) pour l'entretien des clercs en charge de l'âme. Elle a été fréquemment détournée auprès des seigneurs laïques mais elle est solidement réattribuée à l'Eglise au XIIe siècle. Cette dîme est profondément réglementée : 1/3 va au clerc séculier, un autre à l'évêque et le reste aux pauvres. Si l'Eglise cumule autant de richesse, c'est car on lui reconnait une force redistributrice importance : parmi ses devoirs, l'Eglise compte l'hospitalité et l'assistance aux pauvres et aux malades. Les monastères bénédictins doivent accueillir les pèlerins, les voyageurs au sein d'un petit bâtiment en marge de la vie recluse des moines. Les soins sont dispensés à l'hôtel Dieu ( cathédrale ), au sein d'Hôpitaux, d'hospices voir d'hôpitaux spécialisés ( léproseries ) même si au XIIIe siècle, les villes mettent en place leurs propres hôpitaux. Le pauvre a une position dans cette société qui évolue : il est le principal destinataires des dons même si a la fin du Moyen Age, le discours va progressivement évoluer vers un pauvre fustigé. Néanmoins, l'Eglise a surtout vocation a la prière et aux rites : on prie pour les anciens ( morts ), pour les vivants et pour les descendants. Les communautés monastiques prient de plus en lus pour les morts, pour les accompagner dans les voyages vers l'au-delà. On établit également des donations pour le soulagement de l'âme : les monastères prient pour les morts dans les familles qui ont fait des donations pour leur salut. Les clercs, eux, transmettent les sacrements qui marquent la vie du chrétien. Ce sont des rituels ( fonction performative ), au nombre de sept. Les chrétiens reçoivent donc le baptême pour entrer dans la communauté des chrétiens, la confirmation, la confession, l'eucharistie, l'ordination du prêtre ( faire de sa vie, une vie de clerc ) le mariage et enfin l'extrême onction. Tout ces rites marquent les étapes principales de la vie et conditionnent l'espoir de salut dans l'autre-monde. On ne peut donc vivre en tant que chrétien sans prêtre. Les dons offerts par les chrétiens sont en quelques sorte spiritualisé. Malgré l'apparence de marchandage, on donne et on reçoit mais on ne saura donner pour recevoir et on ne reçoit pas parce qu'on donne. L'Eglise n'est qu'un intermédiaire dans cet échange dont Dieu et les Saints sont les seuls véritables destinataires. Les dons sont redistribués au Clergé, aux pauvres, aux parents et aux donateurs sous la prière dans l'idéal. Si l'Eglise intègre, il lui arrive aussi d'exclure : les clercs supérieurs ont le pouvoir de l'excommunication ( rejet du pécheur hors de la société chrétienne ). C'est un pouvoir extrêmement important car il interdit d'accéder aux sacrement ce qui peut privé de salut et risquer d'être enterré ailleurs que dans une terre sainte, c'est une damnation. L'excommunié risque de mourir en pécher mortel : sans avoir reçu l'extrême onction, sans se confesser. Le Pape peut utiliser cette arme contre les hérétiques mais aussi contre les rois ou les seigneurs qui leur sont opposés. En plus de l'excommunication, les évêques te les papes ont la possibilité d'étendre l'excommunication à tout le territoire d'un prince à l'aide d'un interdit. Les clercs reçoivent alors l'ordre de stopper toute cérémonie liturgique ce qui revient donc à ne plus donner les sacrements et donc à condamner les habitants. III. La puissance intellectuelle Les clercs possèdent un casi monopole sur l'écrit et l'usage de la langue latine jusqu'à un âge avancé du Moyen Age. Du reste, seul les littératie ( ceux qui savent lire le latin ) ont accès à la Bible dont les livres sont copiés et assemblés dans les scriptoria des Monastères. Le nombre de manuscrit ne va cesser d'augmenter au fil des siècles, au XIIe siècle, le nombre est multiplié par quatre puis par deux au XIIIe siècle. Les ateliers laïcs vont permettre une production en série ce qui va faire baisser le prix des livres. Également, des chartes sont rédigées dans les monastères, copiés et qui vont permettre de faire loi. Les décisions épiscopales, royales, princières sont dues à des clercs qui tiennent la plume. Les scriptoria sont les lieux de savoir, de mémoire, de transmission dans des groupes restreints avec une censure qui s'opère. Néanmoins, on voit apparaitre des inventions qui vont contribuer à « démocratiser » la production aristocratique : des clercs passent au service des princes et contribuent à diffuser la langue vernaculaire. Cette langue, réservée à l'oral, va donc s'appliquer à l'écrit dans différents textes. Néanmoins, le caractère oral est toujours très importants, les textes sont oralisés pour être diffusés, chantés, parlés pour faire en sorte que personne ne puisse être ignorant de la loir ( le texte est lu régulièrement pour que tout le monde sache son rôle ). L'éducation des laïcs urbains progresse, ce qui fait d'eux des semi-lettrés ( ils possèdent des manuscrits, signe de prestige, et savent signer ). Les clercs essayent de limiter l'accès des laïcs à la Bible par peur des mauvaises interprétations et donc des hérésies, d'où toute une série de mesure pour restreindre l'accès à la connaissance. Plus généralement, on assiste à un fractionnement ( on apprends à lire au psautier ) ce qui va garder la majorité des livres aux clercs, on pratique également la glose, et longtemps on doit se contenter d'une Bible incomplète. Le premier texte complet de la Bible en français apparait sous le règne de Charles V. C'est donc un texte exceptionnel car la Bible est le texte central, davantage comme monument que comme texte discuté. L'Eglise est donc d'une extrême vigilance, de même que contre les prédications laïcs et donc les hérésies qui se multiplient au XIIIe siècle. **Chapitre 6 : la Constellation monastique** Les moines vont avoir un rôle essentiel pour assurer le Salut des Hommes. Les monastères contribuent à la postérité économique dans la mesure où ils sont des cellules agricoles. Chaque nouvel ordre prétend à la Réforme, ils se considèrent comme des marqueurs qui permettent d'avoir des repères dans cette diffusion de la foi. I. Cluny, le monachisme à l'aise dans la féodalité L'abbaye de Cluny, en Saône et Loire, est fondée en 910 grâce à une donation de Guillaume, duc d'Aquitaine et comte de Macon. Elle se pose immédiatement en monastère bourguignon exigent pour réparer les dérives du temps qui marquent cet univers monastique. Le succès rencontré est rapide et se situe grâce à trois raisons : c'est tout d'abord sa dédicace immédiate à Saint-Pierre et Saint-Paul ce qui fait qu'ils sont directement dans la main du Pape. Cette prise de distance vis-à-vis des instances locales est complétée en 998 par une exemption totale par rapport à l'évêque, elle est étendue en 1097 à tous les établissements qui dépendent de Cluny. Cluny va se comporter en réseau. L'abbaye mère dirige bientôt un empire de maisons placées sous sa dépendance, qu'elles soient abbaye ou simples prieurés. Apparait alors un vaste réseau d'établissement qui est unifié par l'adoption d'usage identique et tous sont soumis à l'autorité unique de l'Abbé de Cluny. On va organiser au XIIe siècle dix provinces monastiques avec la nécessité de se rendre annuellement à un Chapitre Général pour les abbés et les prieurs afin d'expliquer les difficultés, comment fonctionne les relations avec les locaux, etc. Enfin, Cluny apporte une réponse adéquate aux besoins de l'aristocratie. Les moines clunisiens vont se spécialiser dans la liturgie ( actes cultuels, déroulement des offices religieux ) et notamment dans la liturgie funéraire. La noblesse de Bourgogne veut en effet assurer à ses défunts une mémoire : des prières pour leur assurer le Salut. Pour pouvoir assurer les prières continues pour les défunts, elle fait des donations généreux aux mones clunisiens ce qui va par la suite engendrer le même comportement chez les autres nobles européens. La chance est également de la partie puisque Cluny bénéficie d'une certaine unité de direction, il y a une succession bien ordonnée d'abbé qui répondent à une même conduite, il y a une certaine fluidité dans le pouvoir dans une période d'apogée avec de long abbatiats qui correspondent aux abbatiats de Maieul ( 954-994 ), Odilon ( 994-1046 ) ou d'Hugues de Semur ( 1049-1109 ) qui comptent parmi les personnages les plus influents de leur temps car ce sont aussi des sommités intellectuelles. On pourrait même dire qu'à cette époque, l'abbé de Cluny représente presque une influence supérieure à celle du Pape car il a la main sur un réseau d'abbaye extrêmement tenu. Les clunisiens encouragent d'abord les mouvements de Paix et les Trèves de Dieu. Ils vont également aider Guillaume le Conquérant à réorganiser les monastères anglais, accompagner les rois hispaniques dans leur volonté de reconquête. Le pape Urbain II, qui lance la première croisade, est un ancien clunisien. Cluny restera d'une très grande prudence lors de la querelle des investitures qui oppose le Pape à l'Empereur pour lequel l'Ordre se garde bien de prier. Evidemment, les abbayes vont se gonfler de nombreuses richesses, de terres, et c'est aussi une raison de leurs problèmes à venir. Pour établir un bilan, on dira qu'en 1109, l'ordre est un réseau de 1184 maisons aux réseaux de la Chrétienté avec quelques maisons en Terre Sainte et quelques abbayes de moniales. Cette richesse va permettre à la maison mère de ne cesser de se développer et en 1130, est consacrée l'abbatiale de Cluny III qui mesure 187 mètres de long : c'est la plus grande abbaye d'Europe. Les abbés participent activement à la vie religieuse voir à la vie politique comme Pierre le Vénérable ( 1122-1156 ) et qui va rédiger plusieurs traités contre les hérétiques, contre les juifs, contre les musulmans et qui est également connu pour les polémiques qu'il a commis contre son grand rival. Dans la mesure où il est très instruit dans son temps, l'écart entre les réguliers et séculiers se réduit, d'autant que les moines clunisiens, souvent prêtres, s'implantent souvent dans le réseau paroissial et peuvent y intervenir. Ils sont très impliqués dans les affaires du siècle. Ils commencent à s'empêtrer dans une richesse qui commence à leur nuire : les donations entachent l'image des clunisiens, dont la robe noire est extrêmement chère dû à la teinte de leurs vêtements. Les donations vont commencer à fléchir et la tutelle du Pape se fait de plus en plus pesante. Les moines ont démesurément allonger la prière orale, l'office a également était allongée : on lit toute la Bible en un an et on chante tous les psaumes chaque jour. Deux offices pour les morts ont été inventées : la veille et le lendemain de la Toussaint. Les offices des Saints sont fleurissants, on en orne de plus en plus d'interminables vocalises, et qui engendrent ainsi un dégout des moines qui n'ont plus le temps pour autre chose, et surtout pas pour la vie intellectuelle. Les clunisiens évoluent donc dans le confort, le luxe, la splendeur et même si les aumônes immenses ont permis l'accueil, il est surtout dédié à des invités de marque : l'esprit de la règle de Saint-Benoît est oublié. II. Le développement de formes plus strictes Vers la fin du XIe et le début du XIIe siècle, deux nouveaux ordres vont apparaitre qui réaffirment la définition érémitique du monachisme. Elle apparait d'abord chez les Camaldules, italiens qui se regroupent autour de Saint Romuald dès 1012, où la vie en commun est entrecoupée d'une vie en montagne. L'ordre de Fontevraud de Robert d'Arbrissel voit également le jour, il est suivi par des pénitents des deux sexes, des nobles dont le mouvement pèlerin fait peur d'un herétisme, il fonde vers 1100 l'Abbaye de Fontevraud, mixte et dirigée par une abbesse. L'ordre des Chartreux, fondé par saint Bruno et Saint Hugues de Grenoble, est sous forme de cellule et de solitude totale : les frères ne se rencontrent qu'à la messe. Le plus important ordre de Réforme contre Cluny est l'ordre de Cîteaux, fondé par Robert de Molesme en 1098 et développé par saint Bernard de Clairvaux ( 1090-1153 ). Les cisterciens vont prendre le contrepied du monachisme clunisiens. Néanmoins, les cisterciens vont prôner un retour à la pureté originelle de la règle de Saint-Benoît et vont se faire appeler les « moines blancs » car ils refusent la teinture austère des moines clunisiens par préférence pour une robe écrue. Ils vont s'implanter dans des zones isolées, sauvages, pour apporter des compétences dans ces zones agricoles. Ils évitent les images, les sculptures, qui ne permettent pas une bonne prière. Ils prônent une prière sans chants, refusent le confort et refusent de posséder des fiefs, une dîme, des rentes : ils exploitent directement leur domaine. Cette familiarité avec l'activité paysanne va permettre à ces hommes de devenir des experts pour la paysannerie et pour la pratique métallurgique car ils diffusent un certain nombre d'informations et d'inventions. Néanmoins, eux aussi sont victimes de leur succès : on compte 600 établissements à la fin du XIIe siècle, ils reçoivent des dons et la nature humaine de ces moines fait que le gout de l'austérité recule. Le désir de Réforme est marqué mais le succès corromps l'idéal premier. En revanche, le tableau ne serait pas complet si l'on évoquait pas la figure des chanoines. Les chanoines sont méconnus mais aussi divers que les moines avec des chanoines réguliers qui se plient à la règle de Saint-Augustin et des chanoines séculier qui sont attachés aux églises cathédrales et qui reçoivent des revenus ( prébende ) qui leurs permettent de vivre et de soutenir l'activité de prédication et de secours aux âmes du siècle. Ce sont des personnages puissants que l'on va retrouver aux côtés mais aussi rivaux de l'évêque. Ils sont consacrés à l'apostolat, ils vont faire œuvre de missionnaire ( notamment dans les régions païennes comme en Allemagne orientale ) et on retrouve des ordres réformés de chanoines comme Saint-Victor de Paris, l'ordre des Prémontré ( fondé par Norbert de Xanten en 1120 ). On a pu parler entre le IXe et le XIIe siècle de véritables siècles monastiques. La décadence est cependant générale aux XIIIe et XIVe siècle, à tel point que la question de la Réforme se pose : les moines sont trop riches, même les cisterciens acquièrent des biens, ils n'attirent plus les élites chrétiennes qui vont donc dériver vers d'éventuels mouvements hérétiques et du moins du message officiel de l'Eglise ce qui va entrainer la naissance de nouveaux courants religieux comme celui des Frères Mendiants. **Chapitre 7 : La Réforme Grégorienne** Des Réformes sont entreprises pour revenir à une pureté antérieure. Cette vaste entreprise de réforme pour le nom de Réforme Grégorienne car de nombreux évènements importants se déroulent durant le Pontificat de Grégoire VII. I. La séparation entre clercs et laïcs La lutte entre le Pape et l'Empereur va marquer ce mouvement tout comme la Réforme morale du Clergé. Derrière les épisodes « hauts en couleur », se structurent une volonté de Réforme globale de la société chrétienne sous la conduite de l'institution ecclésiale. C'est le Pape Léon IX ( 1049-1054 ) qui lance le mot d'ordre qui vise à desserrer l'emprise des laïcs et à empêcher leur intervention dans les principes de l'Eglise. C'est ce qu'on appelle le principe de Libertas Ecclesiae soit la libération de l'Eglise de l'emprise des laïcs qui cherchent à contrôler les élections épiscopales, dont celle du Pape. Elle se comprend comme une opposition immédiate contre l'Empereur qui propose des candidats au trône de Saint Pierre, dont Léon IX est placé par l'Empereur. Ce conflit atteint son acuité maximale sous Grégoire VII qui va utiliser l'excommunication contre Henri IV de manière répétée afin de prendre le dessus. Il oblige l'empereur à venir s'humilier devant lui à Canossa. Cette situation tendue est marquée par le rituel de Canossa et la tentative impériale de déposition du Pape qui meurt en exil. Les suprématies de ces deux instances puissantes se révèlent presque incompatibles, notamment dans le manifeste de Grégoire VII Le Dictatus Papae de 1075 qui réservent la domination du monde au successeur du Pape. Les moyens de l'opposition sont des textes idéologiques avec des traités, des textes canoniques : le droit est développé et certains historiens parlent alors de Révolution totale puisque la lutte structure la société. On va également multiplier le développement militaire. Les communes italiennes vont prendre parti entre l'empereur et le Pape, de même que les communautés monastiques ( mis à part Cluny ). Vers 1050, les évêques sont les pasteurs des diocèses : en principe, ils sont élus par le Clergé et les grands hommes du Peuple. Ils sont fidèles du roi et leur prête hommage, ils peuvent leur rendre des services vassaliques. En France et en Italie, la mission spirituelle est souvent oubliée, ils vivent souvent comme des princes laïcs et c'est aussi contre eux que le Pape veut lutter pour retrouver de véritable évêques. C'est le mouvement de la Querelle des Investitures. En Allemagne, l'Empereur met en place l'investiture par la crosse et par l'anneau, mais aussi par l'épée : l'évêque est reconnu dans sa fonction de prince d'Empire et de seigneur de sa communauté, de son diocèse. Au terme d'un demi-siècle de tensions, il faut aboutir à un compromis. Un compromis est trouvé entre Henri IV et Calixte II par le Concordat de Worms en 1122 qui permet de distinguer les pouvoirs temporels et spirituels. Désormais, l'empereur remet le sceptre, mais ce sont les clercs qui vont investir par l'anneau et la crosse. L'année suivant, au premier concile du Latran en 1123, il est précisé que pour toute la chrétienté, c'est aux chanoines d'élire les évêques : les rois sont exclus de cette élection en principe. Le combat contre les prêtres jugés indigne est également entamé. A Milan, la Pataria est une vague de fond qui est apparue en 1157 et qui va perdurer pendant deux décennies contre l'archevêque indigne. Elle est animée par une colère contre des servants indignes. Tous les prêtres accusés de corruption sont déposés et remplacés par la population. Les deux maux qui gangrènent cette Eglise de desservants sont la **Simonie** ( en référence à Simon le Mage qui voulait acheter à Saint-Pierre le pouvoir de faire les miracles ) consiste en l'acquisition illicite de choses sacrées par le biais de moyens matériels et le **Nicolaïsme** qui qualifie le mariage ou le concubinage des clercs ayant reçu les ordres majeurs. Le premier problème vise les interventions des laïcs dans les affaires de l'Eglise : notamment la détention seigneuriale des dimes et des lieux sacrés durant la période de trouble. Les réformateurs demande la restitution des églises détenues par les laïcs. Le mouvement de retour de ces patrimoines a eu lieu à une cadence plutôt lente. Les laïcs ne contrôlent plus que 5% des églises au XIIIe siècle dans le bassin parisien, alors qu'en Normandie ils possèdent 40%. La lutte contre le Nicolaïsme souligne aussi un soucis de distinction des clercs qui ne doivent pas se compromettre avec les laïcs sur le plan sexuel : l'idée est de sacraliser le Clergé en le distinction du bien commun. II. L'affirmation de l'autorité pontificale La Papauté se réaffirme après une période peu glorieuse, assez trouble. L'Eglise a son sommet était elle-même abîmée par les princes romains, Papes indignes à tel point que face à cette indignité, l'Empereur les déposait pour nommer de bons papes allemands. Les réformateurs de l'Epoque expliquait qu'il y avait une sorte de « divine providence » qui animait l'Empereur qui doit conduire au Salut le peuple chrétien par la sacralité de son statut. Alors que le Pape n'est plus très digne, l'Empereur prends son devoir au sérieux et n'hésite pas à les déposer. Dans cette configuration, le Pape ne serait plus le chef de l'Eglise universelle puisque les grecs ne lui reconnaisse qu'une primauté honorifique. Les orientaux vont se séparer de cette chrétienté d'Occident qui s'éloigne de la leur. En 1054, les grecs vont former leur chrétienté orthodoxe face à la chrétienté catholique. Ce trouble à la tête de l'Eglise chrétienne a eu des répercussions et la part orientale a conduit à une séparation. Le Pape était dans une posture fragile, il est au cœur d'une Eglise d'évêques qui refusent son intervention dans leurs affaires et il n'apparait plus comme le chef de l'Eglise Catholique : il n'était plus que l'évêque de Rome avec un rôle liturgique lié à sa prière et une compétence locale. En 1059, Pascal II fonde le Collège des Cardinaux et lui attribue l'élection du pape pour la soustraire aux influences traditionnelles de l'Empereur et de la Noblesse italienne. Ce système rencontre une système instabilité pouvant aller jusqu'au schisme en 1131 menant à une double élections. Dans les années 1190, la Papauté réorganise les rouages administratifs, ses recettes dans un premier temps sur le patrimoine de Saint Pierre ( à proximité de Rome ) et ensuite à rayonner sur l'ensemble de l'Occident. La papauté commence à régler tous les litiges ecclésiastiques de son aire d'influence. On va donc diffuser des lettres, on va envoyer des Légat ( missions, représentants ) du pape munis de pleins pouvoirs pour organiser localement des conciles réformateurs qui n'hésitent pas à déposer certains évêques indignes. Le Pape, lui-même, juge dans de nombreux cas. La Papauté a également contraint les évêques à des visites ad limina ( au seuil de l'Eglise de Saint-Pierre ) en signe d'obéissance de l'autorité romaine. Tout nouvel élu doit se présenter devant le Pape. Par un curieux renversement, Cluny qui avait été favorisé par le pape va être délaissé par le pape qui va s'appuyer sur les évêques et les favoriser dans les territoires. Ce ressaisissement passe par la nouvelle procédure de canonisation : seul le Pape peut reconnaitre la canonisation de personnages d'exceptions. Sous Innocent III et Grégoire IX, le pouvoir pontifical devient donc une puissante monarchie. Cette évolution et cette prétention du pape passe par l'appellation de Vicaire de Pierre à Vicaire du Christ : il n'est plus le servant du premier Pape mais du Christ. Le Pape se considère comme le chef de l'Eglise, de ce corps dont le Christ est la tête. Le Pape va se coiffer d'une tiare qui allie la couronne ( symbole de la royauté du Christ ) à la mitre des Evêques. Les rituels distinguent encore la personne fragile, humaine, de l'institution qui elle est éternelle. Même si Boniface VIII ( 1294-1303 ) tend à confondre son corps avec celui de l'Eglise et consommait de l'or potable pour acquérir l'immortalité ce qui va lui valoir l'accusation de Magie. Ce temps est celui de l'affirmation de la doctrine de la primauté pontificale. Selon laquelle le Pape constitue la source de tout pouvoir dans l'Eglise. La question qui se pose alors est de savoir si le Pape doit exercer un pouvoir suprême ? Est-ce qu'on doit reconnaitre cette suprématie au pape ? La première moitié du XIIIe siècle correspond à un conflit violent entre le conflit violent entre le Royaume de France mais aussi l'Empire qui s'opposent à cette théocratie du Pape. L'Eglise, par le pouvoir même qu'elle exerce sur les populations et les évêques, devient un pouvoir politique encombrant pour ces dynasties royales. **Chapitre 8 : Les renouveaux religieux du XIIIe siècle** Les caractéristiques principales des changements qui affectent l'Eglise sont d'abord très visible. En effet, au tournant du XIIIe siècle, un style architectural laisse sa place à un autre qui se développe dans toute l'Europe. Parallèlement, des ordres nouveaux sont créés. Dans cet esprit de renouveau, il y a une demande humaine de laïc qui cherchent à vivre leur foi plus intensément, ils cherchent à s'engager dans cette vie religieuse ce qui donne lieu à des mouvements homologués ou non. Le dénominateur commun de ces éléments est la ville, nouvel élément de dynamisme, les cathédrales sont sans conteste urbaine ( elles prennent pied en ville ), même si longtemps c'est l'argent des campagnes qui en donne les moyens. Les Frères Mendiants s'implantent également en ville pour répondre aux questions spirituelles. I. La mutation spirituelle derrière l'évolution architecturale : le passage du roman au gothique. Le changement de style qui s'opère est parallèle au changement de monde qui a lieu. L'art roman se reconnaît aux traits suivants : des arcs en plein cintre, une voute de pierre en berceau et des murs latéraux qui doivent supporter la voute et l'architecture et doivent donc être massifs, avec d'étroites fenêtres laissant filtrer une lumière irrégulière. Ces particuliers reflètent une idéologie : l'Eglise, volontiers monastique, affiche des allures de forteresses massives avec cette tour-clocher qui symbolise la vigilance de la Citadelle Divine. Cette Eglise romane est conçue comme un ilot de pureté spirituelle. L'art gothique est une appellation fautive donnée à la Renaissance. Il est né en France et se dissémine dans toute l'Europe. L'arc est ogival et la voute s'installe sur des arcs brisés, centralisé par une clé de voute. C'est une prouesse technologique qui va aérer dans l'espace d'autant plus qu'on découvre l'utilité des arcs extérieurs qui servent à rendre les murs plus léger et percer des fenêtres plus amples. Lors de la reconstruction du cœur de Saint-Denis, entre 1130 et 1144, l'abbé Suger accorde sa bienveillance aux maitres des cathédrales qui vont mettre en place ce nouveau système. Le gothique va alors se répandre en Europe avec pour la première, la Cathédrale de Sens. Un style français se met en place, est adopté par l'Europe et on retrouve des constructions de ce style dans toutes les grandes villes européennes. Comme les murs latéraux ne sont plus essentiels, ils peuvent être remplacés et recevoir des grands vitraux qui donnent naissance à une profusion de représentations colorées et lumineuses. La ou le roman ce faisait un art mur, le gothique est résolument un art de la Lumière ( Erwin Panofsky ). Le gothique montre principalement un désir de spiritualisation par la négation du mur au profit de la lumière. Il y a un certain orgueil urbain pour faire plus haut, l'Eglise se livre à une certaine compétition pour faire la cathédrale la plus haute. Beauvais, à 48 mètres de hauteur, s'effondre et finit alors cette compétition. Ces cathédrales s'appuient également sur une structure complète : un palais épiscopale, un enclot pour les chanoines. Ces cathédrales constituent le cœur de la ville médiévale et sont les représentations de l'âme de la communauté car elles sont financées par les dons des fidèles et par les revenus seigneuriaux, ecclésiastiques. Elles sont également marquantes. C'est la marque de la puissance de l'Eglise au cœur de la ville. II. Les frères mendiants : la pauvreté et la parole Ils vont apporter un nouveau souffle à l'Eglise au XIIIe siècle. Les principaux ordres mendiants sont les franciscains et les dominicains. La vie de Saint-François a été retravaillée sur l'espace de 40 ans dans des textes qui essayent de fortifier son culte. Il faut lire ces documents comme le reflet des valeurs idéales du temps. Saint-François ( 1181-1221 ) est la quintessence de cet esprit en quête de changement : c'est un homme dans une ville centrale d'Italie, fils d'un riche marchand. Il a une carrière chevaleresque bourgeoise avant qu'une révolution ne lui tombe dessus au retour d'une bataille où il a une vision qui l'invite à changer de vie. Il renonce ainsi à l'héritage familial, il s'oblige à le refuser et pour marquer sa volonté de renouer avec cet idéal de pauvreté évangélique, il se déshabille sur la place d'Assise pour restituer à son père les riches tissus dont il fait commerce. Il se place sous la protection de l'Evêque. Son message est limpide : il faut vivre avec l'Evangile pour unique règle et faire pénitence. La dévotion qu'il pratique se combine à une certaine joie, de sorte que son désir de pénitence mène à l'amour de ce monde tel qu'il se présente. Une petite communauté se met en place autour de lui, jusqu'à ce que les disciples se multiplient. Le Pape Innocent III reçoit Saint-François, le fait s'exprimer et approuve, non sans réticence, approuve son mode de vie et lui accorde le droit de prêcher. Le groupe doit s'en tenir à la morale et à la théologie. A partir de là, chacun loue la proximité de Saint-François qui va prêcher en Italie, dans le monde arabe. Le Pape Honorius III fait cependant rédiger une règle, même si Saint-François n'est pas d'accord, en 1223 la *regula bullata* est signée. François renonce donc à être le chef de sa communauté et décide, une fois la règle appliquée, il se retire en ermite dans les montagnes italiennes. En 1224, le miracle de la stigmatisation prends place. François a en effet une vision divine avant de s'éteindre sous la forme d'un séraphin ( ange à trois ailes ) à tête du Christ et il reçoit les cinq plaies de la Passion du Christ. Ce signe ultime fait de lui un saint parfait, presqu'un saint angélique, et c'est l'aboutissement d'une vie entièrement dédiée à l'imitation du Christ et en 1226, il est canonisé. Le mouvement franciscain prend une ampleur importante. François est resté laïc, proche des pauvres et a pris soin de ne jamais heurter l'Eglise et la hiérarchie. On parle de lui comme d'un « rebelle intégré » car il ne s'est pas opposé à l'Eglise. Cette tension constante entre cette rébellion et le Clergé a perduré après la mort de François et a été source de tension entre les membres du mouvements entre la tendance spirituelle favorable à François et la tendance conventuelle qui reste auprès de l'Eglise. Ce sont les conventuels qui l'importe et prennent la direction de l'ordre avec à leur tête Saint-Bonaventure. Cet ordre se cléricalise, les couvents urbains vont remplacer les cabanes de buchage et le débat va évoluer vers la pauvreté. La question de la pauvreté est une exigence absolue pour les spirituels, le Christ n'aurait jamais rien possédé, alors que les conventuels disent qu'ils ne possèdent rien et ne sont que des relais entre l'Eglise et les pauvres et doivent donc avoir de l'argent pour s'en occuper. Ceux qui sont spirituels vont dévier pour certains vers une hérésie fractitielle. Le deuxième mouvement est celui des dominicains, lié à Saint Dominique, beaucoup plus classique. Domingo de Guzman est né en 1170 en Castille dans une famille de petite noblesse. C'est un cadet de famille qui opte pour une carrière ecclésiastique jusqu'à devenir un chanoine régulier de cathédrale. C'est un personnage extrêmement puissant et intelligent, il devient ambassadeur, rencontre le pape et accompagne son évêque dans le sud de la France ou il découvre le catharisme contre lequel il cherche à lutter. Vers 1206, il prêche dans la région de Carcassonne, est rejoint par des disciples et fonde un premier couvent à Toulouse. En 1217, le Pape approuve le nouvel ordre crée qui se place sous la règle de Saint-Augustin : il y a une vie commune, des prières collectives et individuelles, des pratiques de pénitence et adaptés à la mission des dominicains qui vivent dans le Siècle. Ils vont de par le monde, là où on les envoie pour évangéliser. Le cœur d'action des dominicains est la prédication, l'étude est essentielle pour lutter contre les ennemis de l'Eglise. Ils sont appelés des frères prêcheurs et connaissent un succès rapide. Dominique meurt en 1221 et est canonisé en 1234. La trajectoire des dominicains est beaucoup plus liée au courant ecclésiale. Les dominicains vont se faire une spécialité des taches inquisitoriale, ils vont rechercher et juger les hérétiques. Ils vont multiplier les études à travers toute l'Europe. Ces deux ordres sont qualifiés de mendiants car à leurs débuts ils ne veulent rien posséder, vivent d'aumône et sont très populaires. Les prêcheurs sont 7000 vers 1250 et leurs couvent sont 700 à la fin du XIIIe siècle. Les mineurs, autre nom des franciscains, qui vivent dans l'humilités sont vêtus d'une robe écrue avec une simple corde autour de la taille, ils sont appelés les Cordeliers également. Ces franciscains sont encore mieux considérés et pullulent dans la seconde moitié du siècle puisqu'on trouve 1600 établissements en 1300. Deux autres mendiants sont reconnus en 1274 par le Concile de Lyon II : les Carmes ( fondés en 1185 ) et les Ermite de Saint-Augustin, fondé en 1256. Chacun d'eux comporte une composante féminine comme Claire d'Assise, disciple de François et qui fonde les Clarisse. Chaque ordre est sous la direction d'un général et de responsables provinciaux, leur cohésion est très forte. Également, dans ce mouvement de ferveur générale, on voit apparaitre des

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