Chapitre 4 : La Mémoire - PSYCHOLOGIE COGNITIVE PDF
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Ce chapitre du manuel de psychologie porte sur la mémoire humaine. Il décrit les différents types de mémoire, les processus impliqués dans le stockage et le rappel d'informations, ainsi que les facteurs qui influencent la mémoire.
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PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Chapitre 4 : La mémoire SECTION 1 : ÉTUDIER LA MÉMOIRE 1. Le rôle central de la mémoire dans la vie mentale Perception-attention-mémoire = trio essentiel pour comprendre la base de la vie mentale et les déf...
PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Chapitre 4 : La mémoire SECTION 1 : ÉTUDIER LA MÉMOIRE 1. Le rôle central de la mémoire dans la vie mentale Perception-attention-mémoire = trio essentiel pour comprendre la base de la vie mentale et les déficits cérébro-lésées. Mémoire = utilisation au présent des informations du passé. Intervient dans de nombreuses activités : perception, langage, compréhension, résolution de problèmes. Plus complexe qu’un énorme lieu de stockage. — Représentation mentale = se représenter par l’esprit une info mémorisée ou imaginée d’un objet physique d’un concept, d’une idée ou d’une situation. Ex : « Combien avez-vous de fenêtres chez vous ? » — représentation spatiale. — Inférence, corrélation = lien entre deux variables. Ex : « Est-ce qu’un éléphant mange plus de nourriture qu’une poule? » = poids d’un animal et quantité de nourriture. « Est-ce que Taylor Swift a des pouces? » — inférence à partir d’une connaissance que les êtres humains ont des pouces. 2. Questions à se poser pour étudier la mémoire Processus mnésiques = divers processus qui permettent de mémoriser et rappeler de l’info via les différents systèmes de mémoire. a) Comment l’info perceptive est-elle mise en mémoire ? Mémorisation, stockage de l’info, encodage = le fait de faire entrer en mémoire une information. Degré d’abstraction = certains souvenirs sont détaillées, mais la plupart a un caractère très abstrait, càd qu’ils ne représentent qu’une partie très synthétisée de l’info qui était contenue dans les situations perceptives de départ. Nature de codage : codage visuel, codage verbal, codage tactile, gustatif, autres types de codage (par ex. sémantique). 1 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 b) Une fois mise en mémoire, qu’arrive-t-il à l’information ? —> Dépend du degré de stabilité de l’info. Rétention = fait de maintenir une information en mémoire Oubli = quand l’info se dégrade progressivement avec le temps. c) Comment retrouve-t-on l’information stockée en mémoire ? = Récupération. L’incapacité à retrouver une info en mémoire ne signifie pas forcément que l’info a été réduite ou oubliée, on peut juste avoir un problème d’accès à l’information. Ex : « mot sur le bout de la langue » = on est sur le point de retrouver un souvenir mais on n’y arrive pas, mais si on nous propose plusieurs possibilités de réponse, on la reconnaît directement. Différentes façons de sonder la mémoire pour récupérer une info : Rappel libre ou indicé = si l’info est bien stockée en mémoire et si les processus de récupération fonctionnent bien. Parfois, on donne l’indice pour faciliter la récupération d’info. Reconnaissance = trouver, parmi plusieurs propositions, laquelle est celle que vous deviez mémoriser. Cette tache permet d’étudier les processus de stockage en limitant l’intervention des processus de récupération. —> + facile que la tâche du rappel libre. d) Un ou plusieurs systèmes médiques ? Système de stockage sensoriel = mémoire iconique/ échoïque. Zone tampon qui permet de stocker très brièvement les infos brutes provenant de nos sens. Mémoire à court terme (MCT) = partie interprétée des données sensorielles (le résultat du traitement perceptif), maintien du percept (= représentation perceptive) pour comparaison avec informations en mémoire à long terme. Mémoire à long terme = ensemble de nos connaissances sur nous et sur le monde. SECTION 2 : LA MÉMOIRE À COURT TERME (MCT) 1. Introduction Ex.: on doit cherche rue vélo de notre ami dont le code est 89315. MCT qui conserve les infos sur un délai assez bref. 3 caractéristiques : 2 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Répétition : si on veut maintenir les informations en MCT, il faut les répéter à voix haute ou en tête. Stockage temporaire : une fois le cadenas est ouvert, le code disparait de notre mémoire. La capacité limitée 2. Capacité de la MCT Capacité limitée, on peut pas y mettre trop d’information. Tâche d’empan (=capacité) mnésique = listes de mots à mémoriser en 1 min pour mesurer les capacités de la MCT. « Quelle est la taille de la MCT ? » ✦ Le nombre magique (article de 1956, Miller) — Estimation de taille de la MCT. Selon lui, on peut mettre environ 7 éléments dans la MCT. —> différences inter-individuelles (différences entre les individus) « 7 plus ou moins 2 » ! On se rappelle tjs en moyenne 7 mots même si on a une liste de 15, 30, 50 mots. Limitation provient de la capacité de la MCT. ✦ Des regroupements On peut dépasser cette limite de capacité de la MCT en adoptant une stratégie de regroupement (ne pas considérer les items à stocker de manière individuelle, mais en groupe). Ex: 1407 1515 0805 1945 8 2006. —> 7 +/- 2 éléments ou groupes d’éléments (chunks) ✦ Effets de récence et de primauté (Postman et Phillips, 1965) 1. Un effet de primauté : on rappelle mieux les mots du début que, par exemple, les mots du milieu. —> Les mots du début seraient stockés et récupérées dans la MLT. Explication ? Métaphore des casiers : mémoire est une boite avec 7 casiers qui peut stocker 7 items. Ces casiers servent non slm à stocker mais aussi à faire du traitement cognitif. —> Au début, plein de casiers vides pour faire du traitement. On y fait de l’imagerie mentale. Très vite après les premiers mots, la MCT est pleine (les casiers sont remplis). 2. Un effet de récence : l’ID qu’on rappelle mieux les mots qu’on vient récemment d’entendre que les mots du milieu par exemple. —> Cet effet est directement lié à la récupération directe de la MCT. Arguments empiriques ? 3 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Hypothèse de l’expérience des chercheurs : Donner une tache qui « vide » la MCT juste avant le rappel servait faire disparaitre l’effet de récence uniquement. — groupe 1 : comptage à rebours pendant 10 sec. — groupe 2 : Comptage à rebours pendant 30 sec — groupe 3 : rappel immédiat. Effet de primauté ne bouge pas que l’on fasse du comptage à rebours ou pas. Impact sur l’effet de récence, effet disparait// quasiment au niveau des mots au milieu. —> On peut considérer que l’effet de récence est un effet de la MCT. —> On peut considérer que l’effet de primauté est un effet de la MLT. ! Amène à revoir la capacité de la MCT : 4 +/- 2. 3. Durée de stockage et oubli en MCT. La MCT se caractérise par la faible durée pendant laquelle elle peut stocker les informations. Au delà d’une dizaine de secondes —> Oubli ! Tâche de Brown-Peterson. Le sujet voit un stimulus contenant trois lettres (par ex. RKV), puis il entend un nombre (par ex. 561). Il doit alors compter à rebours de 3 en 3 à partir de ce nombre, et ce jusqu’à ce que l’expérimentateur lui dise « stop ». A ce moment-là, le sujet doit rappeler les 3 lettres mémorisées. Variable manipulée : temps écoulé entre le moment où les 3 lettres sont annoncées et le moment où il faut les rappeler (3, 6, 9, 12, 15 ou 18 sec).—> chaque sujet fait 64 essais au total. Pq on oublie presque tout de suite ce qu’on vient d’entrer en MCT? — Théorie de l’effacement de la trace = métaphore de la trace de pied qui est dégradée au fur et à mesure du temps par les vagues. —> Infos sont oubliées en MCT car elles ont disparu. — Théorie de l’interférence = métaphore de la trace de pas qui est recouverte par des traces plus récentes, qui sont alors plus visibles. —> Infos sont oubliées en MCT car remplacées par des nouvelles infos qui arrivent. 4 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Pour séparer ces 2 théories : Ex.: Waugh et Norman (1965), expérience avec 16 chiffres qui se succèdent. 5196351428627394 La tache demandée aux sujet est, une fois le dernier chiffre affiché (4, la « cible »), d’essayer de se parler celui qui le suivait dans la série lors de sa présentation précédente. Ici, la réponse est 2. 2 facteurs varient : le nombre de chiffres entre les deux présentations de la cible et le rythme de présentation des chiffres (1 ou 4 chiffres / sec). Selon la théorie de l’effacement, on devrait être moins bon pour rapporter la réponse quand le rythme est lent que quand il est rapide. Le temps de présentation des lettres devrait jouer un rôle majeur. Si l’oubli survient en MCT car une info qui arrive en chasse une autre (théorie de l’interférence), le temps de présentation devrait peu influencer les performances. Le nombre de chiffres séparant les deux cibles devrait jouer un rôle majeur. Les résultats soutint quelles théories parmi les deux ? La théorie de l’interférence. — les courbes sont presque superposables — un chiffre vu 4 secondes avant n’est pas moins bien rappelé qu’un chiffre vu une seconde avant. (—> Temps de présentation n’affecte donc pratiquement pas les performances.) — le nombre d’éléments séparant les deux cibles joue un rôle très important. + le chiffre à rappeler est loin en arrière dans la série, - bonnes sont les performances. L’oubli en MCT est dû à un phénomène de substitution en mémoire = une pensée en chasse une autre et si la pensée qui transite en MCT n’a pas été transféré en MLT, celle-ci est définitivement perdue. 5 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 4. La nature du codage en MCT. ✦ Codage verbal. 🗣 Conrad (1964) présente visuellement des chaines de lettres à des sujets et leur a fait faire un rappel immédiat de ces lettres. Quand les sujets faisaient des erreurs, ils avaient tendance à rappeler une lettre qui « sonnait » comme la bonne lettre. Ex.: M au lieu de F, « èm » / « èf ». >< très rare le cas de E au lieu de F (proches visuellement) —> Les infos qu’on stocke en MCT sont sous forme verbal (les lettres recodées verbalement) ✦ Codage visuel 👁 👁 Des stimuli verbalisables = mots, lettres, chiffres. Étude de rotation mentale (Shepard & Metzler, 1971) On a montré aux participants deux dessins complexes en trois dimensions, un à la fois. Ils devaient alors juger si le second était dessiné comme si c’était une rotation du premier (réponse «même ») et on mesurait leur temps de réaction (chronométrie mentale = technique de mesure des processus mentaux) pour répondre. Pour répondre correctement, les participants devaient faire mentalement une rotation du 2ème dessin afin de pouvoir le comparer au 1er stocké en MCT. Aparté : La chronométrie mentale. Ex: participant doit appuyer le + vite possible quand il voit un éléphant. Reconnaître un éléphant : +/- 500 ms. Reconnaitre un mammifère : +/- 750 ms. —> Suggère soit qu’il a bcp d’étapes de traitement soi traitement difficile. ! Aller vite mais faire de son mieux pour réussir. 6 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Pour l’étude de Shepard et Metzler, plus l’angle de rotation est élevé, plus le participant prend du temps à répondre. —> On est capable de mesurer l’info de manière purement visuelle. Les participants manipulent dans leur mémoire une image visuelle de la figure. + dépend du matériel à mémoriser SECTION 3 — DE LA MÉMOIRE À COURT TERME À LA MÉMOIRE DE TRAVAIL 1. Les problèmes avec la MCT Après les travaux sur la MCT dans les années 1970 : le terme « MCT » à été remplacé par le terme « mémoire de travail » à cause du constat de deux problèmes. ✦ Problème 1 : la MCT n’est pas unitaire, elle possède des sous-structures qui encodent les informations sous différents formats. Ex: tâche de soustraction visuelle mentale (Brandimonte, Hitch et Bishop, 1992). Participants ont dû mémoriser un set de 6 images. — Une fois que c’est fait, on demande à la moitié des participants de se représenter un des 6 items, puis on leur affiche une partie de cet item qu’ils doivent soustraire à l’image qu’ils ont en mémoire. Nommer la figure qui résulte de la soustraction mentale, qui mène à un item « nommable ». —> 1 seule tâche, 3 objets rapportés. Autre moitié des participants fait la même chose avec une suppression articulatoire. —> empêche de se représenter verbalement les infos en MCT. À chaque essai, pendant la soustraction mentale, doivent répéter à haute voix et en continu « la la la la… » Ces syllabes vont remplir le système de stockage verbal. —> Double tâche, 4 objets rapportés. Toute leur « énergie mental » (leur attention !) va pouvoir se concentrer sur le casier du système de stockage visuel. Leurs performances vont alors être meilleures, alors que les autres peuvent avoir leur pensées dans tous les sens 7 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 ✦ Problème 2 : le traitement de l’info ne semble pas se dérouler au même endroit que le stockage. Hypothèse : Plus la MCT est « grande » (=plus elle a de casiers), meilleures doivent être les capacités de traitement. Ex.: calculer 32 ✖ 472 —> Différentes étapes —> très vite la MCT est saturée. Travaux montrent que la capacité de notre MCT est et les performances de traitement ne sont pas liées. On n’est pas meilleur en calcul mental (tâche très couteuse cognitivement) quand on a une MCT plus « grande » que quand on a une MCT aux capacités plus limitées. —> dans la MCT, le traitement a lieu dans un espace différent de celui de stockage. Plus généralement, suite à l’identification de ces deux problèmes, de nouveaux modèles de MCT ont été proposés à partir des années 1980. Ils se sont accompagnés d’un changement de nom : on parle désormais de mémoire de travail (MDT). 2. La nouvelle proposition Baddelay et Hitch (1974) — proposent un modèle dans lequel le stockage et le traitement d’infos à court terme impliquent 3 composantes : 8 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 1. Une boucle phonologique = responsable du maintien et de la manipulation des infos basées sur le langage. 2. Un calepin visuo-spatial = responsable du maintien et de la manipulation des infos visuelles. 3. Un centre exécutif = fonction de sélection des stratégies et d’intégration des infos. ✦ La boucle phonologique Constituée de 2 composants : un registre phonologique qui conserve les informations verbales pour environ 2 secondes et un mécanisme de répétition qui maintient les informations en activité dans le registre (c’est la voix intérieur que certains entendent pendant la lecture ou les pensées) Cette répétition renforce la trace de l’info dans notre MCT, en particulier dans le registre phonologique. —> Permet d’expliquer les erreurs phonologiques lors du rappel qui concernent des sons similaires entre eux. ✦ Le calepin visuo-spatial Permet de maintenir et de manipuler des images visuelles et des informations spatiales. —> Ce composant fonctionnerait séparément de la boucle phonologique. Confirmé dans les travaux utilisant la tomographie par émission de positions (PET scan) = technique d’imageries pour essayer de mettre en images ce qu’il y a dans le cerveau, injection d’un traceur qui se couple avec des cellules du glucose. Cela donne une indication de quelle région du cerveau est active pendant la réalisation de la tache cognitive. Smith et Jonides (1997) ont fait faire 3 tâches de mémoire simples à des participants : — Tâche de mémoire verbale (condition A) : 4 lettres apparaissent brièvement, après un blanc de 3 sec sur l’écran, une lettre apparait et il faut dire si oui ou non elle faisait partie des 4 premières. — Tâche de mémoire spatiale (condition B) : 3 poins apparaissent sur l’écran, puis un espace est désigné par un rond et il faut décider si l’un des points de l’image précédente se trouvait dans cet espace. — Tâche de mémoire visuelle (condition C) : 2 figures complexes sont présentées, puis une figure apparait et il faut dire si oui ou non elle faisait partie des figures présentées antérieurement. —> les régions responsables des traitement spatiaux : hémisphère droit —> les régions responsables des traitements verbaux : hémisphère gauche. 9 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 ✦ Le centre exécutif Mécanisme qui nous permet de sélectionner quelle action ou stratégie choisir parmi plusieurs solutions possibles lorsqu’on traite de l’information. Permet d’allouer l’attention à différentes sous-systèmes de la MDT, de les coordonner et d’utiliser leurs résultats ensemble. « Chef d’orchestre » ex.: Info donnée de façon verbale est manipulée en mémoire pour se représenter sous manière visuelle. On nous décrit le chemin à emprunter. La mémoire tampon épisodique = système de stockage capable d’intégrer les codes de mémoire de différentes modalités. C’est à partir de lui qu’on peut former mentalement une carte à partir de renseignements verbaux par exemple. MCT ou MDT ? Le terme « MDT » met l’emphase sur le travail mental qui est fait alors que le terme « MCT » met l’emphase sur la taille limitée su système. Une façon de voir les choses et de considérer que la MCT est une composante (maintien des traces en mémoire) de la MDT. La MDT désigne alors l’ensemble de ce système de mémoire, où le centre exécutif serait responsable de l’attention contrôlée. Dans l’utilisation classique, à partir du moment où il y a une transformation ou un traitement sur les données encodées, on dit que la MDT est engagée. Su l’on fait référence uniquement au stockage, on parle volontiers de MCT. 10 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 SECTION 4 — STOCKAGE DES INFORMATIONS EN MÉMOIRE À LONG TERME Mémoire à long terme = ensemble des connaissances sur le monde et sur nous, stockées en mémoire pour de longues durées (toute notre vie?). Pour faire passer l’information d’une mémoire à court terme à la mémoire à long terme, il faut faire des efforts. 1. Introduction Ex.: Le cas du patient HM (Scoville & Milner, 1957) < Amnésie Épilepsie très grave, handicapante depuis son enfance. Opération pour supprimer le foyer épileptique du cerveau —> lésion cérébrale. —> Troubles épileptiques s’améliorent mais il perd la capacité à faire entrer de nouvelles infos dans sa MLT. Sa MCT fonctionne relativement normalement Chaque jour il a l’impression de découvrir de nouvelles personnes, est perdu dans sa chambre, incapable de donner sa nouvelle adresse après le déménagement et retourne à l’ancienne… 2. Répéter pour mémoriser ? Répétition = mécanisme qu’utilise notre mémoire pour mémoriser durablement des infos. Le principe est que des événements qui se répètent vont être conservés prioritairement en MLT. Expérience de Rundus (1971) : 20 mots à apprendre, données à l’oral, 5 secondes entre chaque mot. À la fin, rappel libre par les participants. Suggestion : répétez-les ! Les participants mettent en place des différentes stratégies : certains répètent en boucle le dernier mot rencontré, d’autres rappellent le dernier mot et les précédents. Plus le mot a été répété, mieux il a été rappelé. 11 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Craik et Watkins (1973) => « La simple répétition ne suffit pas ! » Écouter une liste de mots (prononcés toutes les 1 sec) —> après on donne le consigne: « Rapportez le dernier mot commençant par « G » —> Quasiment 100% de bonnes réponses. Font varier la durée pendant laquelle un mot devait être maintenu en MCT (et donc répété) en mettant entre 0 et 12 items pur séparer deux « mots-G ». Ensuite, surprise, doivent rappeler tous les mots dont ils se rappellent après les 27 listes. Hypothèse : plus un mot est répété en MCT, plus il serait bien mémorisé en MLT. Résultats : la probabilité de rappeler un mot ne dépend pas de la durée pendant de maintien en MCT (= de nombre de répétitions). 12% des mots remplacés immédiatement ont été rappelés (ex.: garage) 5% des mots séparés de 12 items du mot cible suivant ont été rappelés. —> Même avec bcp de répétitions, le taux de rappel reste similaire, ce qui montre que la répétition seule ne garantit pas de nouvelles connaissances durables. 3. La profondeur de traitement/niveau de traitement (depth/level of processing) Sémantique = le fait d’évoquer la signification d’un objet. Craik et Lockhart (1972) : Autre chose que la répétition = la profondeur de traitement. C’est la quantité d’énergie pour traiter l’info qui va faire que l’on mémorise l’info dans la MLT. Selon eux, une info peut faire l’objet d’un traitement superficiel ou plus profond. - Traitement super ciel = traitement qui porte sur les caractéristiques physiques des stimuli. Ex: se focaliser sur la voix qui prononce les mots quand on a liste à apprendre. - Traitement profond = caractéristiques sémantiques d’un stimulus. Ex: traitement de signification d’un mot « être-vivant, feuilles » Craik & Tulving (1975) - l’hypothèse de la profondeur de traitement. Expérience : présentation des mots sur un écran, à chaque mot, les participants devaient faire une tâche qui nécessitait de répondre OUI ou NON. 12 fi PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 3 groupes des sujets : Groupe « majuscule » : les participants devaient dire si les mots étaient écrits en majuscule ou pas = traitement superficiel Groupe « rime » : les participants devaient juger la forme sonore des mots, par exemple dire si les mots relaient avec « drap ». Groupe « sémantique » : devaient porter un jugement sur le sens des mots, par exemple dire s’ils désignaient un animal ou pas. À la fin, doivent entourer sur une liste de mots ceux qu’ils se rappellent avoir vu. —> L’activité qu’on réalise sur l’info qu’on veut mémoriser est déterminante. Description correcte des résultats : « Le pourcentage de réponses correctes varie en fonction du type de traitement : ce pourcentage semble être plus grand dans la condition « sémantique » que « rime », lui-même semblant être plus grand que la condition « majuscule ». Kapur et al. (1994). Condition 1 : détecter la présence d’une lettre dans un mot présenté (ex: si le « chat » contient un A) Condition 2 : Décider si le mot appartient au monde vivant ou pas (meilleure mémorisation) —> Enregistrement avec PET Scan pendant la tâche. L’activation dans le cerveau est plus importante pour le traitement profond que pour le traitement superficiel (plus de ressource sont été mobilisées lors du traitement sémantique) Problème de la circularité (« on tourne un peu en rond dans le raisonnement ») : fait l’hypothèse que les traitements dits « profonds » mènent à de meilleurs performances en mémoire. En même temps, la théorie dit que dès que les performances en mémoire sont bonnes, elles résultent d’un traitement profond. Il faut faire un traitement élaboré sur l’information pour qu’elle ait plus de chances d’être stocké de façon permanente en MLT. 13 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 4. Les souvenirs « ash » : encodage sans répétition ? Mémorisation durable d’un évènement, sans répétition, sans effort de traitement sémantique. En général, ces souvenirs ont un contenu émotionnel fort. Peut concerner aussi bien un événement traumatique qu’un événement heureux. Brown et Kulik (1977) = ont interrogé les personnes sur le moment où elles ont appris l’assassinat du président Kennedy. => les gens avaient les souvenirs précis des circonstances accompagnant ce moment : où ils se trouvaient, etc. —> Ces souvenirs ne sons pas nécessairement fiables ! < Talarico et Rubin (2003). Le 12 septembre 2001 : écrire en détails tout ce dont les enfants pouvaient se souvenir au moment de l’annonce des attentats du 11 septembre (situation rare et très chargée émotionnellement). Et aussi rappeler les souvenirs anodins de la veille et décrire en détails (le souvenir d’une situation banale). Même exercice avec les memes participants 7, 42 et 224 jours plus tard. Les détails du souvenir ont été soit comme « consistants » (même mot ou mot proche utilisé pour décrire l’événement) ou « inconsistants » (mot différent ou erreur dans le souvenir). Pour chaque souvenir, les participants devaient porter un jugement de confiance sur l’exactitude de leurs souvenirs, sur une échelle de 1 à 7. Pour l’événement quotidien, les participants se le rappellent de moins en moins bien et introduisent de + en + d’éléments inconsistants. Leur confiance dans le souvenir décline. Pour le souvenir flash, la précision se dégrade tout autant, mais la confiance dans l’exactitude du souvenir reste forte, alors même que de plus en plus d’éléments inconsistants sont rapportés au fur et à mesure des jours. —> Les souvenirs flash se caractérisent probablement plus par la grande confiance que nous leur accordons que par leur précision. —> la répétition n’est pas une condition nécessaire et suffisante pour stocker des infos en MLT. 14 fl PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 5. Les moyens mnémotechniques — Métacognition = notre conscience et connaissance de notre propre système cognitif. — Métamémoire = connaissance de chacun sur son propre fonctionnent de mémoire. — Moyens mnémotechniques = stratégies de mémorisation. ✦ Méthode des lieux ID de former une image mentale qui va intégrer des lieux avec les informations à mémoriser. Se promener mentalement dans ces lieux devraient faire apparaitre les images mentales que l’on s’est faite et donc les choses à faire. ✦ Méthode des acronymes ex: acronyme PASS (pull, air, squeeze, sweep) utilisé pour mémoriser les étapes d’utilisation d’un extincteur (en anglais) ex: acronyme KISS (keep, improve, start, stop) pour mémoriser les points où porter l’attention dans l’examen d’une situation Qu’est-ce qui fait qu’un moyen mnémotechnique est efficace ? 1. Fournit une structure au matériel à apprendre 2. Permet un traitement en profondeur (mise en lien avec connaissances antérieures) 3. Guide la recherche de l’information (indices) 6. Les formes de codage en MLT MCT : format verbal et visuel, en général. —> préserve la forme littérale de ce qui a été présenté MLT : format sémantique. —> caractéristique physiques des infos disparaissent mais leur sens reste. La lecture des textes est un bon outil pour étudier la MLT et l’activation des connaissances antérieures.. Ex: « Après avoir couru sous l’orage, elle arriva chez elle complètement trempée », c’est parce que vous avez activé en mémoire au moins deux connaissances antérieurement mémorisées : 1) l’orage est, la plupart du temps, accompagné de pluie et 2) la pluie mouille. 15 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Sachs (1967) : lecture de textes à des sujets, dans ces textes il y a une phrase cible. À un moment imprévisible, Sachs s’arrête. Cet arrêt est soit après la phrase cible soit plus tard dans l’histoire. Quand elle s’arrête, elle va interroger les participants sur cette phrase cible. Va montrer une phrase et demander si elle a été dit telle quelle dans l’histoire. —> les participants interrogés plus tard ont une performance pratiquement au niveau du hasard (= probabilité de trouver la bonne réponse à une question par chance, en fonction du nombre de réponses possibles) Score proche de 50% (quand 1 chance sur 2) = niveau du hasard Si une chance sur 4 d’avoir la bonne réponse, le niveau du hasard est à 25%… Ce qu’on retient vrm dans la MLT c’est la signification des informations et non pas leurs caractéristiques physiques (ordre, voix, etc). SECTION 5 — RÉCUPÉRATION DES INFORMATIONS EN MLT À priori, notre MLT a une capacité infinie. 1. Les dif cultés de récupération sont utiles Difficultés de récupération : Heureusement qu’il y en a ! Récupération de connaissances le plus souvent automatique, sans aucun effort. Risque : excès d’informations ! Dans ce système il y a un certain équilibre entre une recherche automatique et difficile. Les connaissances relatives aux différentes situations sont naturellement activées et guident nos actions. Équilibre entre recherche trop difficile d’infos (risque de trop d’efforts permanents de remémoration) et une recherche trop facile ou automatique (fait remonter trop de souvenirs tout au long de notre vie.) 16 fi PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 2. Effets de contexte lors de la récupération Pq est-ce qu’on a du mal à se souvenir d’où on connait la personne quand on voit un visage familier? Par exemple, le boulanger de notre quartier à la plage Pcq une personne est en dehors de son contexte —> démonstration intuitive. Effet de congruence des contextes = Stocker et récupérer une information dans des contextes identiques ou contextes différents. —> affecte les performances du rappel ou pas? Godden et Baddeley (1975) Ont recruté des plongeurs sous-marins qui devaient apprendre 40 mots. —> Devaient rappeler 24h après (soit sous l’eau, soit sur la plage). 4 groupes expérimentaux : 2 groupes de participants entendaient les mots à apprendre sur la plage, avant d’aller plonger. 2 autres groupes entendaient les mots à mémoriser sous l’eau. 2 groupes = contextes d’encodage et de rappel sont congruents. 2 autres groupes = les contextes sont incongrues (encodage sur terre et rappel sous l’eau, et vice versa) Un effet d’interaction = entre deux facteurs : se produit lorsque l’effet d’un facteur sur la variable dépendante est influencé par les modalités de l’autre facteur. Ex: bois de la cambre (trajet d’un point A à un point B) : deux groupes : en vélo ou en voiture. L’effet du type de véhicule sur le temps mis pour traverser le bois est influencé par le fait qu’il ait ou pas du traffic. Deux facteurs manipulées : le type de véhicule et le trafic. Quand on dit « ça dépend » on exprime un effet d’interaction entre 2 facteurs. L’interaction entre deux facteurs manipulées : lieu d’encodage et le lieu de rappel. 17 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Oui, le n° de mots correctement rappelés est plus important quand le rappel a lieu sur terre que sous l’eau, mais ça dépend du lieu d’encodage : en fait, ça n’est vrai que quand l’encodage avait eu lieu sur terre ! —> Lorsque le contexte d’encodage et de rappel sont congruents = performances sont meilleures que si les contextes sont différents. Est-ce que ces effets de contexte se produisent à plus long terme ? Expérience de Aggleton et Waskett (1999) Jorvik Viking Centre (York, UK) — musée qui recrée la vie des Vikings avec des odeurs, participants qui y ont été il y a 20 ans sans y être revenus depuis. Ils leur ont demandé à 2 reprises de décrire le contenu du musée, en rappelant un maximum d’objets qu’ils avaient vus 20 ans auparavant. 3 groupes doivent rappeler les souvenirs: Groupe de contrôle (« pas d’odeur ») : tenter de rappeler le contenu du musée à 2 reprises Groupe 2 (« odeur au 1er test ») : même tâche mais on leur faisait sentir les odeurs avant le 1er rappel Groupe 3 (« odeur au 2ème test ») : même tâche mais les odeurs avant le second rappel —> Contexte olfactif !!! Notre MLT n’encode pas juste le souvenir mais aussi le contexte lié à ce souvenir. Ce contexte va nous servir parfois de clé d’entré (indices) de ce souvenir. On ne code pas slm les éléments sémantiques mais aussi par exemple les éléments olfactif (dans ce cas). 18 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 3. Oubli et interférence Théorie de l’oubli = plus une trace en mémoire est ancienne, plus elle a de chance d’être oubliée. Loi de la désuétude (Thorndike, 1914) : Les habitudes et les souvenirs qui sont utilisées régulièrement sont renforcées et les habitudes qui ne sont pas utilisées sont affaiblies. Si on ne réactive pas notre souvenir en MLT, il finirait par être oublié. —> NON ! Théorie de l’interférence = Ce sont les activités qui se déroulent entre le moment d’encodage d’une info et le moment de sa récupération qui produisent l’oubli (McGeoch, 1932) —> Ces activités produisent de l’interférence sur les souvenirs passées. Oubli = échec de la récupération/perte de l’accès à l’info : aspect fondamental de la MLT. — Perdue dans la mémoire (et non : perdue de la mémoire) Il est possible qu’il n’y ait pas de vrai oubli dans la MLT : qq chose qui entre dans la MLT y reste pour toujours. Ex: cas du phénomène de « mot sur le bout de la langue » (TOT) — Très souvent, concerne les noms propres — information partiellement disponible — à peu près 1x par semaine (plus fréquents avec l’âge) — 50% des TOT sont retrouvés dans 1 minute Tulving & Pearlstone (1966) - démonstration des échecs de récupération 2 groupes ont mémorisé la même liste de 48 items, constituée de 4 mots différents de 12 catégories sémantiques. Les items étaient précédés du nom de leur catégorie. — encodage similaire (env. même quantité de mots rappelés) — groupe 1 (rappel libre): 40% de mots correctement rappelés — groupe 2 (rappel indicé) : 62% de mots correctement rappelés. —> Le vrai oubli en MLT serait en fait un déficit de récupération. L’indice efficace permet de « localiser » l’info. 19 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 4. Les faux souvenirs La mémoire est souple : on peut faire entrer dans notre mémoire des souvenirs inventés ! Travaux d’Elisabeth Loftus : Est-ce qu’on peut se fier à la mémoire des témoins ? Impact en recherche fondamentale (comprendre commet la MLT fonctionne) et de recherche appliquée (résultats scientifiques qui ont un impact dans la vie de tous les jours). La recherche fondamentale = travaux expérimentaux ou théoriques qui sont conduits avant tout dans le but d’acquérir de nouvelles connaissances sur des phénomènes. N’envisage pas d’application ou d’utilisation directe des découvertes. Le recherche appliquée = aussi des travaux originaux pour acquérir des connaissance nouvelles avec un but pratique déterminé. ✦ Peut-on in uencer les témoignages ? Loftus et Palmer (1974). Après visionnage de la vidéo, elle demande aux participants à quelle vitesse roulaient les voitures au moment de l’impact. Sauf que la formulation de la question n’est pas la même en fonction du groupe : commence par « À quelle vitesse allaient les voitures quand… » – Groupe 1 : «... elles se sont écrasées l’une >< l’autre ». – Groupe 2 : «... elles sont entrées en collision ». – Groupe 3 : «... elles se sont rentrées dedans ». – Groupe 4 : «... elles se sont heurtées ». – Groupe 5 : «... elles sont entrées en contact ». Explications : 1. Les participants auraient du mal à évaluer la vitesse et se basent uniquement sur le verbe utilisé dans la question 2. La question a en fait modifié l’événement stocké dans la mémoire des participants (la modification d’interprétation suggère une modification du souvenir en MLT en fonction de la question posée) Une semaine plus tard, ils ont demandé aux participants de deux groupes extrêmes (1 et 5) si ils se souvenaient avoir vu des morceaux de verre au sol. —> En fonction de comment on a posé la question, certains participants ont eu l’impression d’une scène + violente que d’autres. 20 fl PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 ✦ Peut-on modi er des souvenirs d’enfance ? Hyman, Husband, Billings (1995) Les chercheurs ont préalablement contacté les familles des participants (après leur autorisation). Les étudiants devaient se souvenir d’anecdotes de leur enfance racontées par leurs parents. — 3 séances sur 3 jours, où ils devait rappeler plus de détails possibles — parmi les anecdotes vraies, des événements inventés ont été ajoutés (comme un visite à l’hôpital pour une infection à l’oreille) — J1 : aucun participant ne se souvenait des événements inventés — J2 : certains ont commencé à « se souvenir » des faux événements — J3 : 30% d’entre eux se rappelaient des détails inventés des événements jamais existants. —> La répétition des expériences de remémoration augmente considérablement le nombre de faux souvenirs. Donc, il est possible de faire des recommandations à la justice pour ne pas multiplier les séances durant lesquelles les témoins doivent chercher à se souvenirs d’événements anciens. ✦ Comprendre les facteurs qui modulent les faux souvenirs Le fait de représenter de manière imagée la scène au moment où l’on cherche à se la remémorer est très important. —> un des moyens pour introduire des représentations imagées = confronter les participants à des photographies. Wade, Garry, Read & Lindsay (2002) Une expérience similaire à celle de Hyman et al. (1995) — ont demandé aux parents de participants de fournir des anecdotes sur leur enfant et aussi des photos de famille. — le participant était confronté aux anecdotes fournies ainsi qu’aux photos et il devait tenter de se remémorer ce qui s’est passé ce jour-là. Pour une partie des participants, les auteurs ont créé de fausses photographies à partir d’une photo fournie par leurs parents et d’une photo non liée au participant. —> participants doit se remémorer de ce qui s’est passé ce jour-là sur lune photo truquée. — Répétition des expériences de remémoration — représentations des images mentales imagées. Résultats : J1 : 30% des participants donnent des détails sur les événements de ce jour-là. J2 : 50%. Le taux de faux souvenirs est supérieur quand on utilise des images. 21 fi PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 ✦ Implications pour le métier de psychologue (surtout le psychologue clinicien) Cas de souvenir retrouvé = un souvenir « oublié » qui refait surface des années après : une personne « retrouve » un souvenir d’abus sexuel pédophile. —> faire parler de situations (douloureuses) sur base de souvenirs. L’absence de ce souvenir pendant des années suggère que l’expérience a été refoulée, càd intentionnellement oubliée. La récupération peut être spontanée et résultée d’un travail de psychothérapie, dans lequel le thérapeute et la personne ont fait un « travail de mémoire » pour ramener à la conscience ce souvenir. On ne peut pas mesurer ou vérifier la véracité d’un souvenir qui a eu lieu il y a des dizaines d’années. Les aspects à questionner : 1. Refoulement = un oubli intentionnel d’expériences traumatiques ou douloureuses (Freud, 1923). Utilisé en clinique, peut d’évidence empirique. 2. Le poids des techniques thérapeutiques pour aider un patient à faire « remonter à la surface » un souvenir. Elles utilisent des méthodes similaires à celles utilisées pour augmenter les faux souvenirs : imagerie mentale, questions suggestives et répétition. Prendre conscience que les « souvenirs » sont malheureusement sujets à distorsions et erreurs. Parfois : très grande puissance accordée à la MLT dans le travail du psychologue. SECTION 6 — Y’A-T-IL PLUSIEURS TYPES DE MLT ? 1. Mémoire sémantique et mémoire épisodique (Tulving, 1993) ✦ La mémoire épisodique = un système de mémoire qui nous permet de rappeler des événements personnels passées (nos « épisodes de vie » ). Des souvenirs d’expériences particulières (par ex. Voir l’océan pour la première fois, embrasser son premier petit ami, aller dans un bon restaurant, etc.) constituent les événements de la mémoire épisodique. Ces événements sont tjs stockés avec une référence autobiographique. Elle est assez susceptible aux changements et aux distorsions, mais elle sert de base pour reconnaitre des événements déjà rencontrés dans le passé (des personnes, des lieux, des objets, etc) 22 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Différences mémoire épisodique >< mémoire sémantique : 1. Une organisation plus temporelle (basée sur le temps passé) que la mémoire sémantique. Quand on souvient d’un événements, on a tendance à nous rappeler les aspects de cet événement sous forme d’une série temporelle de micro-événements. Ex: voyage pour assister au match de football : le trajet en voiture — la fête d’avant-match dans le parking — suivie du match — trajet de retour. 2. Association entre souvenir et source: la mémoire épisodique associe un souvenir à sa source spécifique (ex : un événement vu ou entendu), tandis que la mémoire sémantique ne nécessite pas cette association source-souvenir. 3. Utilisation en témoignage : la mémoire épisodique permet aux gens de rapporter ce qu’ils ont personnellement vécu, ce qui est crucial pour les témoignages en justice. 4. Véri cation de la véracité : Dans la mémoire sémantique, la véracité d’un fait repose sur le consensus d’un groupe (ex : reconnaitre un objet comme une table) Dans la mémoire épisodique, la véracité est déterminée de manière subjective par l’individu ( ex : se souvenir d’avoir été au cinéma la veille suffit pour y croire) 5. De nouvelles informations arrivent constamment. ✦ La mémoire sémantique = la mémoire des mots, des concepts, des règles, des idées abstraites. Elle contient nos connaissances générales sur le monde, qui sont indépendantes de nos expériences de vie. Type de mémoire utilisé par le langage (reconnaitre les mots lorsqu’on lit le texte, choisir des mots pour parler = retrouver leur sens dans notre mémoire sémantique) Impliquée dans la vie quotidienne (conversation, résolution de problème, lecture d’un livre). Contenu facilement imageable. Caractéristiques de la mémoire sémantique : 1. Organisation se fait sur base du contenu (et non temporelle): un concept évoque des concepts similaires, même si les éléments n’ont pas été vécus ensemble (un mot « chat » active le mot « chien », car ils sont sémantiquement liés même si on les n’a pas appris ensemble en même temps) 2. Permet de faire des interférences sur les propriétés des concepts. Pour des questions simples, on accède directement à des infos stockées (ex : un rouge-gorge est un oiseau). Pour des questions plus complexes, on fait la déduction basée sur sur des concepts généraux (ex: un rouge-gorge est fait de molécules car il est un animal, donc un objet physique). Les concepts plus spécifiques sont membres de super-ensembles plus généraux. Cette organisation hiérarchique permet de déduire des propriétés sans les avoir apprises directement. 23 fi PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 3. Les infos ne sont pas liées directement à l’info sur la source de la connaissance. Par exemple, quand on utilise le mot « bleu », on accède à une connaissance générale, sans référence à un moment précis où on a appris ce concept (le ton de voix, etc.). 4. Plus stable et moins sujette à l’oubli que la mémoire épisodique. Les souvenirs se dégradent plus vite en raison de l’arrivée de nouvelles infos, tandis que les connaissance générales, comme multiplier 5 par 3, sont mieux préservées dans le temps. Modèle de mémoire sémantique (Collins & Quillian, 1969) Dans ce modèle de mémoire sémantique, chaque mot est représenté par des « nœuds» reliés à d’autres mots, formant un réseau de significations. Par exemple, le mot « canari » est lié à ses attributs « jaune » et « peut chanter », et aussi au nœud « oiseau », qui contient les propriétés générales des oiseaux (comme « peut voler »). Ce modèle est économique, car les informations communes (ex. : capacités d’un oiseau) sont stockées une seule fois et non répétées pour chaque oiseau. 2. Mémoire procédurale et mémoire déclarative Mémoire déclarative (mémoire épisodique + mémoire sémantique) = repose sur le langage et contient des infos faciles à imaginer. Une seule exposition peut suffire. 24 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Mémoire procédurale = implique la connaissance sur la réalisation d’activités (s’habiller, faire les lacets, lire un mot, faire du vélo). Dans ce cas, les souvenirs ne sont pas verbalisables (ou très difficilement) mais ils impliquent une connaissance de l’action à effectuer. Autre différence centrale : le temps qu’il faut pour que l’info entre dans la mémoire. — La mémoire épisodique (un type de mémoire déclarative) nécessite une seule expositions à l’élément pour qu’il entre en mémoire (une fête de 18 ans) — la mémoire procédurale nécessite bcp de temps pour acquérir des habiletés procédurales. Ex : quand on apprend à nager, chaque mouvement nécessite un effort mais au fil des semaines ou des mois, il apparaît l’automatisation. 3. Évidences neuropsychologues pour différents systèmes ✦ Le cerveau de la mémoire ✦ Etudes de cas de patients amnésiques L’amnésie = l’oubli suite à l’atteinte au cerveau (les autres fonctions cognitives ok et le niveau intellectuel est ok aussi) Maladie d’Alzheimer = développement de plaques séniles qui empêchent le Glutamate —> dégradation dans le tissu des neurones —> pertes de mémoire. Le 1er type des souvenirs qui disparaissent (ceux de mémoire épisodique) Syndrome de Korsakoff (souvent associé à l’alcoolisme) = les troubles en mémoire dus à une grave carence en vitamine B1. L’amnésie rétrograde = perte de mémoire des événements antérieurs à la lésion cérébrale. L’amnésie antérograde = perte de mémoire pour les événements postérieurs à la lésion. 25 PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYC-E-102 Le cas KC; Tulving (1989) Un cas d’un homme de 30 ans qui avait su un grave accident de moto en 1980 alors qu’il rentrait du travail. Il semble être figé dans un monde où il n’y a pas ni futur, ni passé. Mémoire sémantique conservée >< mémoire épisodique atteinte. Le cas HM (Scorville & Milner, 1957) Épilepsie sévère —> Souvenirs antérieurs ok —> ne pouvait plus stocké aucune nouvelle information —> MCT plutôt ok —> amnésie antérograde —> dans certains cas, à son insu, HM pouvait apprendre de nouvelles infos même s’il ne s’en souvenait pas. Une tâche de copie en miroir —> mémoire procédurale 26