Introduction à la neurophysiologie - Cours PDF

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Ce document est un cours d'introduction à la neurophysiologie, destiné aux étudiants de deuxième année de VetAgro Sup. Le cours détaille l'organisation et le fonctionnement des neurones et des cellules gliales, la transmission de l'information nerveuse et les synapses. Ce polycopié vise à présenter les bases nécessaires à la compréhension des cours ultérieurs.

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Introduction à la neurophysiologie Mathieu Magnin 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Objectifs de ce cours Ce cours a pour objectif global de vous apporter les connaissances de base de la neurophysiologie et ainsi de comprendre les cours à venir. Il es...

Introduction à la neurophysiologie Mathieu Magnin 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Objectifs de ce cours Ce cours a pour objectif global de vous apporter les connaissances de base de la neurophysiologie et ainsi de comprendre les cours à venir. Il est fort probable que vous sachiez déjà de nombreuses informations dans ce poly grâce à votre cursus antérieur. Si ce n’est pas le cas, ce poly vous permettra de vous mettre « à niveau ». De manière plus détaillée, les objectifs d’apprentissages de ce cours sont : - Connaître l’organisation et le fonctionnement des neurones - Connaître les différentes cellules du système nerveux - Connaître les différentes étapes de la transmission de l’information nerveuse et les éléments cellulaires que cette transmission met en jeu - Connaître les deux principales synapses du système nerveux central (glutaminergique et GABAergique), les récepteurs qu’elles contiennent et le rôle des neurotransmetteurs qu’elles libèrent (glutamate et GABA) - Connaître le fonctionnement de la jonction neuromusculaire - Connaître l’organisation de base du système nerveux Signalétique Les éléments en gras sont particulièrement importants (ils correspondent généralement aux objectifs d’apprentissage cités au-dessus). Les éléments en italique sont à lire mais ne sont pas nécessairement à retenir par cœur. Ils sont là pour vous communiquer des informations supplémentaires qui peuvent vous aider à comprendre. Les commentaires entre parenthèse (quand ils ne correspondent pas à l’explication d’une abréviation) sont aussi des informations supplémentaires que vous n’êtes pas obligés de retenir. Abréviations - PA : potentiel d’action - PPS : potentiel postsynaptique (PPSE : PPS excitateur / PPSI : PPS inhibiteur) - RE : réticulum endoplasmique - SNA : système nerveux autonome - SNC : système nerveux central - SNP : système nerveux périphérique Toute reproduction, même partielle, est interdite sans l’accord écrit de son auteur. Ce cours est destiné aux étudiants de 2ème année de VetAgro Sup, pour leur usage personnel. Merci de ne pas le diffuser sur internet. 2 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Sommaire SOMMAIRE 3 LES NEURONES ET LES CELLULES GLIALES 4 I. LES NEURONES 4 A. LES DENDRITES 5 B. LE CORPS CELLULAIRE OU SOMA 6 C. L’AXONE 8 II. LES CELLULES GLIALES 10 A. LES ASTROCYTES 10 B. LA MICROGLIE 12 C. LES OLIGODENDROCYTES ET LES CELLULES DE SCHWANN 12 LE FONCTIONNEMENT DU NEURONE ET LA TRANSMISSION DE L’INFORMATION NERVEUSE 14 I. LA MEMBRANE NEURONALE ET LES CANAUX IONIQUES 14 A. LES CANAUX IONIQUES 14 B. LE POTENTIEL MEMBRANAIRE DE REPOS 15 II. LA CREATION DES SIGNAUX ELECTRIQUES 17 A. LES POTENTIELS POSTSYNAPTIQUES 17 B. LES POTENTIELS D’ACTION 18 LES SYNAPSES ET LA TRANSMISSION NEUROCHIMIQUE 23 I. LA TRANSMISSION SYNAPTIQUE 24 A. LES ETAPES PRESYNAPTIQUES 24 B. LA FENTE SYNAPTIQUE 24 C. LES ETAPES POSTSYNAPTIQUES 24 D. L’INTEGRATION POSTSYNAPTIQUE 26 II. LES NEUROTRANSMETTEURS 26 A. LES CRITERES DEFINISSANT UN NEUROTRANSMETTEUR 26 B. CLASSIFICATION DES NEUROTRANSMETTEURS 27 C. PROPRIETES DES PRINCIPAUX NEUROTRANSMETTEURS 28 III. LES RECEPTEURS DES NEUROTRANSMETTEURS 30 A. LES RECEPTEURS IONOTROPIQUES 30 B. LES RECEPTEURS METABOTROPIQUES 31 IV. LA PLASTICITE SYNAPTIQUE 32 V. LA JONCTION NEUROMUSCULAIRE 33 LES RESEAUX DE NEURONES ET LE CODAGE DE L’INFORMATION 36 I. PRINCIPE GENERAL DE CONVERGENCE-DIVERGENCE 36 II. LES CIRCUITS DE NEURONES ELEMENTAIRES 36 III. LES GRANDS RESEAUX DE NEURONES 37 IV. LE CODAGE NEURONAL 38 L’ORGANISATION GENERALE DU SYSTEME NERVEUX 39 I. TERMINOLOGIE EN NEUROPHYSIOLOGIE 39 A. REPERES ANATOMIQUES 39 B. LES ENSEMBLES DE NEURONES 39 C. LES ENSEMBLES D’AXONES 40 II. LE SYSTEME NERVEUX PERIPHERIQUE 40 III. LE SYSTEME NERVEUX CENTRAL 42 BIBLIOGRAPHIE 44 3 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Les neurones et les cellules gliales Les cellules du système nerveux sont généralement classées en deux catégories : les neurones et les cellules gliales. Les neurones sont des cellules hautement spécialisées utilisant des signaux électrochimiques pour coder les informations transmises. Les cellules gliales représentent la majorité des cellules du système nerveux central. Elles sont indispensables au maintien des fonctions cellulaires des neurones. I. Les neurones Les neurones sont constitués de trois parties (figure 1) : un arbre dendritique, le corps cellulaire, ou soma, et un prolongement unique ramifié à son extrémité : l’axone. L’extrémité distale de l’axone est appelée bouton synaptique. Cette organisation définit une polarisation anatomique qui répond à une polarisation fonctionnelle : le neurone reçoit des informations d’autres neurones sur la surface de la membrane des dendrites et du soma : c’est la zone réceptrice. Le soma joue également un rôle métabolique majeur : il contient différents organites qui permettent la synthèse des protéines, il assure ainsi la maintenance des expansions du cytoplasme, principalement de l’axone. L’axone synthétise et transporte des transmetteurs chimiques qu’il délivre à son extrémité dans la fente synaptique grâce à l’arrivée d’un potentiel d’action (PA) qui parcourt sa membrane du soma vers la synapse. La zone présynaptique de l’axone correspond donc à la zone émettrice. On distingue les neurones pyramidaux ou principaux (80 à 90 % des neurones), qui projettent leur axone dans une structure autre que celle qui contient leur soma, des interneurones (10%) qui projettent dans la même structure. Les premiers libèrent généralement du glutamate (un neurotransmetteur excitateur) et jouent un rôle dans la transmission de l’information. Les seconds libèrent généralement du GABA (neurotransmetteur inhibiteur) et jouent plutôt un rôle de modulation locale de l’activité. Les neurones sont organisés sous forme de réseaux/circuits neuronaux. Dans la totalité du neurone, les protéines du cytosquelette sont très abondantes : ces molécules participent au transport de protéines et à la rigidité des expansions cytoplasmiques. 4 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Figure 1 : La polarisation du neurone (d’après Neurophysiologie, Elsevier, Campus illustré 3ème édition) a. Les dendrites Les dendrites sont des prolongements hautement ramifiés qui rappellent les branches d’un arbre (figure 2). Ces réseaux dendritiques fournissent ainsi une grande surface de contact avec l’extérieur de la cellule. La membrane dendritique est caractérisée par une grande richesse en zones postsynaptiques hautement spécialisées via le contenu de leurs récepteurs (qui sont des canaux activés chimiquement ou mécaniquement, et non des canaux voltage-dépendant, comme on le verra plus tard). 5 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Les dendrites d’un neurone peuvent recevoir des centaines voire des milliers de synapses d’autres neurones. Figure 2 : Arbre dendritique d'un neurone de Purkinje du cervelet (d'après Neurosciences médicales, De Boeck, Traduction de la 1ère édition) b. Le corps cellulaire ou soma La membrane du soma peut également recevoir des synapses mais celles-ci ne représentent qu’une petite fraction de la totalité des entrées synaptiques. Néanmoins, leur influence sur la genèse des PA est importante car ces synapses sont proches du site d’initiation. C’est sur cette membrane que s’effectue la sommation des signaux reçus. Le soma est le centre métabolique du neurone et renferme la plupart des organites impliqués dans la synthèse des macromolécules indispensables à ses fonctions (les neurones font partie des cellules les plus métaboliquement actives de par leur complexité structurale et la nécessité de synthétiser les constituants nécessaires de la membrane et du cytosquelette très développé). On retrouve dans le cytoplasme du soma un grand noyau, un réticulum endoplasmique (RE) associé à des ribosomes (principal lieu de synthèse des protéines), un appareil de Golgi (tri et répartition des protéines en fonction de leur destination dans le neurone), et de nombreuses mitochondries (synthèse d’ATP) (figure 3). 6 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin On distingue trois types de neurones en fonction du nombre de leurs expansions dendritiques (figure 4) : - Les neurones multipolaires : nombreuses dendrites. Il s’agit du type principal du système nerveux central (SNC). - Les neurones bipolaires : un prolongement dendritique et un prolongement axonal. La plupart de ces neurones sont situés dans les structures sensorielles (rétine, épithélium olfactif etc). Ils transmettent des signaux sensoriels de la périphérie vers le SNC. - Les neurones pseudo-unipolaire : un prolongement qui se sépare ensuite en un axone et une dendrite. Ils se retrouvent dans le système nerveux périphérique (SNP) et transportent les signaux provenant de la peau, des muscles et des articulations, vers le SNC. Figure 3 : Organisation générale du neurone. Focus sur les organites du soma (d'après https://www.reflexions.uliege.be/cms/c_7861/fr/neurone) Figure 4 : Classification des neurones en fonction de leurs expansions cytoplasmiques (d'après Neurosciences médicales, De Boeck, Traduction de la 1ère édition) 7 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin c. L’axone i. Organisation générale de l’axone L’axone représente un prolongement cytoplasmique très volumineux et très long. Il est obligé d’importer les protéines nécessaires à sa maintenance. Il possède une membrane excitable (ce qui permet la transmission d’informations sous forme de PA), il synthétise les neurotransmetteurs puis les stocke à son extrémité distale (partie présynaptique de la synapse). La partie proximale de l’axone, au contact du soma, est appelée col ou cône. C’est la zone où s’initie les PA. La partie distale de l’axone est généralement arborisée, chaque ramification se termine par un bouton synaptique qui contient les vésicules de neurotransmetteurs et des mitochondries en très grand nombre. Il existe également des « renflements » le long de l’axone (appelés « boutons en passant ») qui permettent le contact avec des cellules cibles. Les ramifications de l’axone permettent de multiplier le nombre de contacts avec les cellules cibles : un neurone peut ainsi envoyer des informations à plusieurs autres neurones potentiellement situés dans des structures différentes du système nerveux. En outre, il n’est pas rare qu’un neurone ait de nombreux contacts synaptiques avec un autre neurone. Figure 5 : Les flux axoplasmiques rapides. A : Transport antérograde des vésicules et transport rétrograde des corps plurivesiculaires. B : Transport antérograde des mitochondries et transport rétrogrades des produits de dégradation de ces dernières) 8 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin ii. Les flux axoplasmiques Il existe des flux axoplasmiques rapides (antérograde et rétrograde), un flux antérograde lent et un mouvement antérograde des mitochondries (figure 5). Le flux antérograde rapide transporte des molécules qui permettent le renouvellement de la membrane (en particulier des canaux voltage-dépendants qui permette la transmission des PA). Le transport est assuré par les microtubules du cytosquelette. Les vésicules sont transportées activement comme sur des rails par des molécules de « kinésine » (figure 6). Le flux antérograde lent transporte principalement les éléments d’entretien du cytosquelette. Le flux rétrograde rapide permet le retour, vers le soma, des produits de dégradation de l’axone. Il permet ainsi de rapporter des éléments qui seront recyclés et joue un rôle d’information, pour le corps neuronal, concernant l’état de santé de l’extrémité distale. Les vésicules agglutinées sont transportées sur des rails de tubuline par les molécules de dynéine. Le flux rétrograde fournit un moyen de propagation à de nombreux virus et toxines, comme le virus de l’herpès, le virus de la rage ou encore la toxine du tétanos. Le flux des mitochondries s’effectue dans le sens antérograde pour approvisionner le bouton synaptique. Lorsqu’elles ne sont plus fonctionnelles, elles dégénèrent et les produits de cette dégradation sont rapportés vers le soma par le flux rétrograde. Figure 6 : Modèle explicatif du déplacement des vésicules le long des microtubules grâce aux molécules de kinésine. iii. La régénération axonale Lorsque le corps cellulaire d’un neurone est détruit, ses expansions cytoplasmiques ne sont plus approvisionnées et dégénèrent. Ce neurone ne sera pas remplacé et sa perte va nécessiter des modifications des connexions entre neurones : on parle de plasticité. En revanche, si un axone périphérique (du SNP) est lésé, il pourra être régénéré avec les protéines apportées par le flux antérograde. Lorsque l’axone est lésé, la partie distale dégénère, la partie proximale de la lésion se referme puis forme bourgeons qui vont croitre et se frayer un chemin vers la cellule cible. Dès qu’un bourgeon atteint la cible, les autres sont détruits. La vitesse de régénération est égale à la vitesse du flux 9 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin antérograde lent (1mm/jour : cette vitesse conditionne la durée de récupération après un traumatisme nerveux). A l’inverse, il semble que les axones des neurones centraux (du SNC) ne soient pas capables de se régénérer. iv. La myélinisation Les axones sont toujours au contact avec une cellule gliale satellite : les cellules de Schwann dans le SNP et les oligodendrocytes dans le SNC. Ces cellules produisent des expansions cytoplasmiques qui vont s’enrouler autour de l’axone, comme nous le verrons dans la prochaine partie, et ainsi former une gaine que l’on nomme myéline. II. Les cellules gliales Les cellules gliales assurent quatre fonctions principales : - Elles entourent les neurones, les maintiennent en place et les isole des autres neurones. - Elles assurent un support énergétique et l’apport de nutriments. - Elles assurent la protection des neurones en détruisant les pathogènes et les neurones morts. - Elles jouent un rôle clé dans la neurotransmission, dans les connexions synaptiques. Les astrocytes peuvent recevoir, conduire et transmettre l’information. On distingue trois grands types de cellules gliales : les astrocytes, la microglie et les oligodendrocytes (et les cellules de Schwann pour le SNP). a. Les astrocytes Ces cellules ont une forme d’étoile caractéristique (figure 7). Les astrocytes ont longtemps été considérés comme jouant seulement un rôle de soutien structurel des neurones (figure 8). On sait maintenant qu’ils participent aussi dans la transmission et le traitement de l’information. Ils ne produisent pas de PA mais réalisent la gliotransmission. Ils peuvent être activés par de nombreux neurotransmetteurs. Cette activation induit des fluctuations de la quantité du calcium intracellulaire. Les vagues calciques ainsi déclenchées se transmettent d’astrocyte en astrocyte via les jonctions gap qui les unissent. In fine, des neurotransmetteurs peuvent être libérés par ces cellules et vont alors se fixer sur des récepteurs neuronaux. Les jonctions gap permettent également les échanges de métabolites et de neuromodulateurs qui peuvent affecter les réseaux neuronaux. Au niveau de la synapse, les astrocytes interviennent dans la recapture et le recyclage des neurotransmetteurs (dont le glutamate et le GABA) et produisent également certains nombres de coagonistes modulant l’efficacité de la synapse. Ils jouent ainsi un rôle actif dans la communication neuronale. Cette forte implication a amené le développement du « modèle de la synapse tripartite », composé d'un espace présynaptique, d'un espace post-synaptique et d'un espace astrocytaire. 10 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin La recapture du glutamate, un neurotransmetteur excitateur permet de réguler l'activité de la synapse et de prévenir l'excitotoxicité qui intervient notamment dans la physiopathologie des crises convulsives (à forte concentration, ou présent trop longtemps dans la fente synaptique, le glutamate devient toxique pour le neurone). Dans les astrocytes, le glutamate est transformé puis recédé aux neurones qui le recycle en GABA. Les astrocytes régulent les concentrations ioniques (notamment du potassium) de l’espace extracellulaire et jouent ainsi une fonction de tamponnage cruciale pour la régulation locale de l’excitabilité et la prévention de l’excitotoxicité. En réaction à de nombreuses agressions cérébrales se met en place un état réactionnel d’astrogliose : les astrocytes réactionnels présentent des propriétés différentes des astrocytes normaux et empêchent notamment la repousse axonale. Les astrocytes sont directement impliqués dans la physiopathologie de l’épilepsie, des tumeurs cérébrales, de la maladie d’Alzheimer, des troubles dépressifs etc… Figure 7 : Astrocyte et interactions astrocyte/neurones (https://jonlieffmd.com/blog/astrocytes-control-synapse-function) 11 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin b. La microglie Les cellules de la microglie sont les macrophages résidents du SNC. Elles réalisent l’épuration des débris tissulaires et des agents infectieux. Elles peuvent reconnaître les éléments du « non-soi » et les incorporent pour servir de cellules présentatrices d’antigènes aux lymphocytes. Elles synthétisent des facteurs impliqués dans l’inflammation, dont des cytokines, mais également des facteurs de croissance. Ces éléments affectent le fonctionnement des neurones. Elles sont impliquées dans la physiopathologie de maladie dégénératives et inflammatoires Figure 8 : Les cellules de la microglie (d’après Neurophysiologie, Elsevier, Campus illustré 3ème édition) c. Les oligodendrocytes et les cellules de Schwann Ces cellules produisent des prolongements en feuillets de leur membrane qui s’enroulent de façon répétée autour de l’axone avec lequel elles sont en contact, formant la couche de myéline. Chaque axone myélinisé est ainsi engainé par une succession de segments de myéline séparés les uns des autres par de courts segments nus appelés nœuds de Ranvier. Cette disposition permet l’accélération de la transmission des PA, comme nous le verrons dans la prochaine partie. Cette gaine permet également d’isoler les neurones les uns des autres et ainsi d’éviter qu’un PA passe d’un axone à l’autre. Les oligodendrocytes jouent également un rôle trophique via la production de facteurs de croissance. Les cellules de Schwann peuvent également entourer directement plusieurs axones de petit calibre, sans réaliser de gaine de myéline à proprement parler (figure 10). 12 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Ces cellules sont impliquées dans les maladies demyelinisantes, comme la sclérose en plaque et dans les gliomes cérébraux. Figure 10 : les cellules de Schwann (à gauche) et les oligodendrocytes (à droite). En bleu : les cellules de Schwann ou les oligodendrocytes, en Jaune : les axones – A gauche : Les cellules de Schwann. A. Myélinisation d'un axone de gros diamètre. B. Protection sans myéline de plusieurs axones de fin diamètre. C. Fibres myélinisées en coupe transversale en microscopie électronique. Dans les fibres nerveuses myélinisées, à un niveau donné, une seule cellule de Schwann entoure une seule fibre nerveuse et constitue par l'enroulement de sa membrane cytoplasmique la gaine de myéline. A droite : La myélinisation des axones centraux par l'oligodendrocyte. 1 : corps cellulaire de l'oligodendrocyte ; 2 : expansions cytoplasmiques vers les axones ; 3 : myéline ; 4 : axone. Figure 9 : Les cellules du SNC (http://gfme.fr/maladie/immun.html) 13 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Le fonctionnement du neurone et la transmission de l’information nerveuse Toutes les cellules des mammifères présentent une légère asymétrie de répartition des ions de part et d’autre de leur membrane plasmique. La membrane est polarisée : il y a davantage de charges positives directement au contact de l’extérieur de la membrane et davantage de charges négatives directement au contact de l’intérieur de la membrane. Cette différence de potentiel électrique est le potentiel de repos de la membrane. En revanche, la propriété unique des neurones et des cellules musculaires par rapport aux cellules est leur capacité de propager des signaux électriques (potentiels d’action) sans atténuation sur une longue distance, et sont donc des cellules excitables. I. La membrane neuronale et les canaux ioniques a. Les canaux ioniques La membrane des neurones possède de nombreux types de canaux ioniques qui varient en fonction de la zone et du type de neurone (figure 12). La pompe Na/K ATPase est une pompe active qui maintient les gradients de concentration du sodium et du potassium (figure 11). Pour rappel, l’intérieur de la cellule est riche en K+ et pauvre en Na+, l’extérieur de la cellule est pauvre en K+ et riche Figure 11 : la pompe Na/K ATPase (d'après Neurosciences médicales, De Boeck, Traduction de la 1ère édition) en Na+. 14 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Il existe également des canaux ioniques qui laissent passer passivement les ions (selon le gradient de concentration). Les principaux canaux ioniques passifs sont les canaux à Na+, K+, Cl- et Ca2+ (figure 12). La perméabilité de ces canaux n’est pas figée mais varie en permanence en fonction de divers facteurs. A ce titre, on distingue trois types de canaux en fonction de leur mode de fonctionnement : - Les canaux activés mécaniquement : lors de l’étirement de la membrane, les canaux se déforment et laissent passer les ions. On les retrouve sur la membrane des récepteurs sensoriels du toucher par exemple. - Les canaux activés chimiquement : la fixation d’un ligand (souvent un neurotransmetteur) induit l’ouverture de ces canaux. On les retrouve sur la membrane de la zone réceptrice des neurones et sont généralement absents de la surface de l’axone. - Les canaux activés électriquement (ou voltage-dépendants) : l’ouverture de ces canaux à lieu lorsqu’un certain seuil de dépolarisation de la membrane est atteint. On les retrouve sur la membrane du cône et de l’axone (= la base de l’axone). Ils sont à l’origine de l’initiation et de la propagation des PA. Lorsque ces canaux s’ouvrent, on observe une sortie de K+ et à une entrée de Na+, Ca2+ et Cl- (les ions se déplacent en fonction du gradient de concentration). Figure 12 : les principaux canaux ioniques et les mouvements d'ions à travers la membrane neuronale (il y a une erreur dans la figure : la pompe Na/K fait sortir 3 Na+ et entrée 2 K+) b. Le potentiel membranaire de repos Les neurones maintiennent une haute concentration cytoplasmique en potassium (K+) et en protéines chargées négativement. De l’autre côté de la membrane, le milieu extracellulaire est riche en sodium (Na+), chlore (Cl-) et en calcium (Ca2+). En raison de la différence de répartition des molécules chargées électriquement de part et d’autre de la membrane, le cytoplasme proche de la membrane a, au repos, un excès de charge négatives par rapport au milieu extracellulaire. Cette différence de charge est à l’origine du potentiel de repos de la membrane, compris entre -70 et -60 mV. Quand la différence de charge de part et d’autre de la membrane diminue suite à l’entrée d’ions positifs (ou à la sortie d’ions négatifs), le potentiel membranaire se rapproche de zéro, on parle de dépolarisation. A l’inverse, le potentiel devient plus négatif (entrée d’ions négatifs ou sortie d’ions positifs), on parle d’hyperpolarisation. En réalité, l’essentiel du cytoplasme et du milieu extracellulaire sont neutres électriquement. Seuls les ions qui bordent les surfaces membranaires déterminent l’amplitude du potentiel membranaire (figure 13). 15 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Figure 13 : le potentiel membranaire (d'après Neurosciences médicales, De Boeck, Traduction de la 1ère édition) Les gradients de concentration des ions sont maintenus par les pompes Na/K ATPase dont le fonctionnement est associé à la consommation d’énergie (ATP). La pompe fait entrer deux ions K+ et sortir trois ions Na+ (figure 11). Elles participent à l’instauration du potentiel membranaire puisqu’elles font sortir plus de charge positives qu’elles n’en font entrer. Dans une large mesure, la polarité négative de la membrane au repos est due à la perméabilité des canaux K+ voltage-dépendants. Pour comprendre ce phénomène, imaginons ce qui pourrait se passer si un neurone avait un potentiel de membrane neutre et que sa membrane n’était perméable qu’aux ions K+ (figure 14). Dans ces conditions, les ions K+ sortiraient du neurone (car ils sont 30 fois plus concentrés dans le cytoplasme). Cette sortie de charges positives est associée à la polarisation de la membrane avec une accumulation de charges positives à l’extérieur et de charges négatives à l’intérieur. Au bout d’un moment, la sortie des ions K+ est ralentie en raison de l’attraction électrostatique du cytoplasme (chargé négativement) sur les ions K +. Bien que quelques ions K+ puissent encore traverser la membrane, le flux, dans les deux sens, se fait à vitesse constante et aboutit à un flux net de K + égale à zéro. Le potentiel de la membrane qui résulte de ces échanges correspond au potentiel d’équilibre du potassium. Figure 14 : Le rôle du K+ dans la mise en place du potentiel membranaire de repos. Un potentiel membranaire de repos négatif se développe si la membrane est sélectivement perméable aux K+. Au départ, le potentiel membranaire est nul mais il devient négatif au fur et à mesure que les K+ suivent le gradient de concentration. L’équilibre est atteint lorsque la force du gradient de concentration chimique est contrebalancée par une force électrique agissant en direction opposée (d'après Neurosciences médicales, De Boeck, Traduction de la 1ère édition). 16 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Toute augmentation de la perméabilité d’un type de canal ionique déplace le potentiel de membrane vers le potentiel d’équilibre de cet ion. Ainsi, si un neurotransmetteur provoque l’augmentation de la perméabilité des canaux Na+, l’entrée de sodium est à l’origine d’une dépolarisation et le potentiel de membrane se rapproche du potentiel d’équilibre du sodium qui est de +60 mV. A l’inverse, l’augmentation de la perméabilité des canaux potassiques est à l’origine de la sortie de cet ion et le potentiel de membrane tend alors vers -86 mV, le potentiel d’équilibre de cet ion. Le potentiel de repos de la membrane étant de -60 à -70 mV, on comprend bien l’importance des ions K+. Néanmoins, le potentiel de repos de la membrane n’est pas égal à -86 mV car la membrane est aussi légèrement perméable aux autres ions, au repos. II. La création des signaux électriques L’ouverture conjuguée des différents types de canaux détermine la valeur du potentiel de membrane et créent ainsi des signaux électriques sur la membrane. Ceux-ci vont être de deux types : soit des potentiels postsynaptiques (PPS), soit des PA. Schématiquement : les PPS sont locaux et leur amplitude diminue avec la distance. Les PA sont des signaux auto-régénérés de grande amplitude qui se propagent sans atténuation sur de grandes distances. a. Les potentiels postsynaptiques Les PPS sont des variations locales du potentiel de membrane. Ce sont des dépolarisations et des hyperpolarisations (en fonction des mouvements d’ions enclenchés). On peut les enregistrer sur les dendrites ou à la surface du soma, près du bouton synaptique d’un autre neurone. Ils sont généralement déclenchés suite à l’ouverture de canaux qui fait suite à la libération et la fixation de neurotransmetteurs au niveau du bouton synaptique. L’amplitude des PPS est proportionnelle à la quantité d’ions qui traversent la membrane. Ils peuvent également être dus à l’ouverture de canaux activés mécaniquement ou électriquement. Plus le PPS est ample et plus il risque d’affecter le comportement du neurone. Si l’ion impliqué est du K+ ou du Cl- (le K+ sort alors que le Cl- rentre dans la cellule), cela entraine une hyperpolarisation de la membrane qui rendra la cellule moins excitable. En revanche, s’il s’agit d’une entrée de Na+, cela entraine une dépolarisation qui pourra être à l’origine de la création d’un PA si la dépolarisation membranaire enregistrée à la base de l’axone atteint de seuil de déclenchement du PA. La zone de déclenchement (ou trigger zone) située à la base de l’axone est très riche en canaux Na+ voltage-dépendants. Elle est très sensible aux variations du potentiel de membrane : si le PPS observé dans la zone est inférieur au seuil de décharge (généralement autour de -55 mV sur les neurones de mammifères), alors rien ne se passe. En revanche, si la dépolarisation de la zone est supérieure à ce seuil, de nombreux canaux Na+ s’ouvrent permettant une entrée massive de sodium qui augmente encore plus la dépolarisation membranaire (nous avons vu plus haut que l’entrée de sodium est associée à une dépolarisation membranaire qui tend alors à atteindre le potentiel de repos de l’ion, qui est de + 60 mV). Cette entrée de sodium génère le PA qui se propagera alors sur la surface de l’axone jusqu’à son extrémité (figure 15). 17 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Les PPS peuvent correspondre à une dépolarisation (intervention de canaux Na+ ou Ca2+, comme on vient de voir) et permettre potentiellement le déclenchement d’un PA. On parle de PPSE pour PPS excitateur. Ils peuvent également correspondre à une hyperpolarisation (intervention des canaux K+ ou Cl-), on parle alors de PPSI (inhibiteur), car la membrane du neurone est alors moins excitable. Nous avons vu que pour qu’un PA soit déclenché, il fallait que le potentiel membranaire de la base de l’axone dépasse un certain seuil. Pour que ce phénomène ait lieu, il est souvent nécessaire que plusieurs PPSE s’additionnent au niveau des dendrites et du soma. Cette sommation spatiale et temporelle s’effectue à la base de l’axone. Si plusieurs synapses sont activées simultanément et induisent différents PPS (E ou I) sur la surface d’un neurone, alors les PPS se somment algébriquement ; c’est la sommation spatiale. Si une synapse est activée plusieurs fois de suite et induit plusieurs PPS (E ou I) au même endroit mais à des moments différents, on observe également une sommation algébrique : c’est la sommation temporelle. Figure 15 : Aperçu général de la communication entre neurones (AP = PA, IPSP = PPSI, EPSP = PPSE, d'après Textbook of Veterinary physiology, 6th edition) b. Les potentiels d’action Les PA diffèrent des PPS car ils sont tous identiques pour un même neurone (leur amplitude est toujours la même), leur amplitude et leur durée de dépolarisation ne diminuent pas au cours de la transmission. Ce sont des dépolarisations brutales, rapides (1ms) et réversibles dont l’amplitude est d’environ 100 mV. Ils suivent la loi du « tout ou rien » : si la 18 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin dépolarisation membranaire atteint le seuil de déclenchement, un PA est créé (« tout »), si la dépolarisation est inférieure au seuil, alors rien ne se passe. Le PA se propage le long de l’axone en restant identique en tout point grâce au phénomène du tout ou rien qui lui permet de s’auto-régénérer lors de sa progression. i. Genèse du potentiel d’action Le PA présente un décours temporel en 4 phases (figure 16) : - Le prépotentiel qui correspond au PPSE qui déclenche le PA. Il n’est visible que si le PA est enregistré sur le soma. Il n’est pas visible sur l’axone. - La dépolarisation rapide : entrée de Na+ via des canaux voltage dépendant - La repolarisation rapide : sortie de K+ (et un peu de Na+) via des canaux voltage dépendant - L’hyperpolarisation : sortie de K+ via des canaux voltage dépendant Figure 16 : le décours temporel du potentiel d'action (en rouge : la zone réfractaire absolue, en rose : la zone réfractaire relative, en vert : la membrane est à son potentiel de repos, donc sensible à l'activation) Lorsque le PPSE est supérieur au seuil de déclenchement du PA, les canaux sodiques voltage-dépendants présents au niveau de la base de l’axone s’ouvrent, le sodium rentre dans le neurone (suivant son gradient de concentration) et une dépolarisation rapide de la membrane a lieu (le potentiel de membrane tend alors vers le potentiel d’équilibre du sodium, soit autour de + 60 mV, figure 16 et 17). Après environ 0,2 ms, les canaux sodiques sont désactivés et la porte se ferme : l’entrée de Na+ est 19 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin bloquée, la repolarisation s’amorce (la pompe Na/K ATPase fait ressortir progressivement le Na+). La repolarisation est également liée à une ouverture retardée des canaux potassiques voltage-dépendants qui permet la sortie de K+ (qui sort en suivant son gradient de concentration). L’activation des canaux potassiques a lieu grâce au PPSE, au même moment que l’activation des canaux sodiques, mais le processus d’ouverture est plus lent, la sortie de K+ n’a donc lieu qu’après l’inactivation des canaux Na+. La sortie de K+ est à l’origine du phénomène d’hyperpolarisation membranaire. Le potentiel membranaire de repos est ensuite restauré grâce aux pompes Na/K ATPase. Pendant les phases de dépolarisation et repolarisation rapide, le neurone est insensible à toute stimulation (aucun PPSE ne peut déclencher de PA car les canaux sodiques sont rapidement inactivés) ; c’est la période réfractaire absolue. Pendant la phase d’hyperpolarisation, le potentiel membranaire est inférieur au potentiel de repos : la membrane est donc moins sensible à la stimulation qu’en période de repos (il faudrait un PPSE plus important qu’au repos pour dépasser le seuil de déclenchement du PA et initier la formation d’un nouveau PA). On parle de période réfractaire relative. Ces périodes réfractaires permettent la transmission unidirectionnelle du PA sur l’axone : le PA ne peut être récréé que du côté où la membrane est sensible à la stimulation. Nous détaillerons les mécanismes de transmission du PA ci-après. Figure 17 : Les mécanismes de genèse du potentiel d'action ii. La propagation du potentiel d’action dans les axones non myélinisés Une fois initié à la base de l’axone, le PA va se propager, non pas comme une onde, mais en se récréant à l’identique de proche en proche et donc sans aucune atténuation. 20 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin L’initiation du PA est associée à une entrée massive de Na + dans l’axone. Après leur entrée, les ions vont diffuser passivement dans l’axone (attirés par les charge négatives environnantes) et sont progressivement renvoyés vers l’extérieur par les pompes Na/K ATPase. La diffusion interne des ions est à l’origine d’une dépolarisation de la membrane axonale dans la zone adjacente à celle de déclenchement du PA (figure 18). Cette dépolarisation dépasse le seuil de déclenchement et un nouveau PA est créé à côté du précédent qui est en train de disparaître. Le PA ne se recrée que d’un côté (du côté où la membrane est au repos) car la membrane de l’autre côté est réfractaire à la stimulation. Figure 19 : Effets de la dépolarisation de la membrane (PPSE) qui vont induire la génération du potentiel d'action (GNa, Gk : conductance des canaux ionique au Na et au K) Figure 18 : Propagation d'un potentiel d'action dans un axone non myélinisé (d'après Textbook of Veterinary Physiology 6th edition et Neurosciences médicales, De Boeck, Traduction de la 1ère édition) iii. Propagation saltatoire du PA sur les axones myélinisés La gaine de myéline qui entoure certains axones est un très bon isolant et empêche la diffusion des ions à travers la membrane. Cette gaine de myéline est discontinue, interrompue par les nœuds de Ranvier, très riches en canaux ioniques. Dans ces conditions, les PA ne peuvent naitre qu’un niveau des nœuds de Ranvier (figure 19). Schématiquement, après l’initiation d’un PA et l’entrée massive de Na dans l’axone, les ions Na+ diffusent à l’intérieur de l’axone jusqu’au prochain nœud de Ranvier, dépolarisant ainsi la membrane à ce niveau au-dessus du seuil de déclenchement, ce qui permet à un nouveau PA d’être créé. Ainsi, le PA se propage en se récréant de nœud 21 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin en nœud : c’est la conduction saltatoire. Cette conduction saltatoire permet d’augmenter de 5 à 7 fois la vitesse de conduction du PA et permet d’économiser de l’énergie puisque les échanges sont confinés aux nœuds de Ranvier. iv. Exploration fonctionnelle des vitesses de conduction nerveuse On peut calculer la vitesse de conduction de l’influx nerveux à l’aide d’examens comme l’EMG (électromyogramme ou electroneuromyogramme). Ces mesures permettent d’apporter des informations pour le diagnostic des neuropathies, des myopathies ou des atteintes de la jonction neuromusculaire (myasthénie). Figure 20 : La conduction saltatoire des potentiels d'action à la surface d'un axone myélinisé (d'après Textbook of Veterinary Physiology 6th edition et Neurosciences médicales, De Boeck, Traduction de la 1ère édition) 22 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Les synapses et la transmission neurochimique Les neurones sont organisés en réseaux qui permettent la transmission de l’information nerveuse dans l’ensemble de l’organisme. Les neurones étant des cellules individualisées, sans continuité d’un neurone à l’autre, la transmission de l’information se fait donc malgré la présence de zones de rupture. Ces zones de connexion entre deux neurones sont appelées synapses. Cette organisation discontinue des réseaux de neurones est associée à la nécessité d’un changement de modalité du codage de l’information. Sur la membrane de l’arbre dendritique et du soma, l’information est codée par l’amplitude de variation du potentiel membranaire (PPSE/PPSI). L’information est ensuite véhiculée par l’axone sous forme de PA. Dans cette région, l’information est codée par la fréquence d’émission des PA (en réalité c’est plus complexe que ça, comme nous le verrons dans le prochain chapitre). Plus la dépolarisation détectée au niveau de la base de l’axone est importante et prolongée et plus la fréquence des PA émise sera grande. Une fois arrivée à l’extrémité distale de l’axone, l’information codée en fréquence de PA sera transmise sous forme chimique via la libération de neurotransmetteurs par la partie présynaptique de l’axone. Des récepteurs à ces neurotransmetteurs sont présents à la surface de la membrane de la région postsynaptique (deuxième neurone ou cellule musculaire). L’activation de ces récepteurs par la fixation d’un neurotransmetteur induit l’ouverture de canaux ioniques, l’entrée d’ions et une dépolarisation (ou hyperpolarisation) de la membrane correspondant au PPSE ou au PPSI. La boucle est bouclée : l’information chimique est de nouveau convertie en information électrochimique codée par l’amplitude de la réponse post-synaptique (figure 20). Figure 21 : La transmission synaptique 23 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin I. La transmission synaptique a. Les étapes présynaptiques L’élément présynaptique correspond à la terminaison axonale, renflée à son extrémité, séparée du neurone postsynaptique par la fente synaptique. L’élément présynaptique possède divers équipements permettant la transformation de l’information reçue (sous forme de PA) en libération de neurotransmetteurs. La membrane plasmique de cette zone est riche en canaux Na+, K+ et Ca2+ voltage-dépendants. Ainsi, la réception de PA dans la zone induit l’ouverture de ces canaux, l’entrée d’ions (dont le Ca2+). Cette entrée de calcium déclenche une machinerie complexe qui vise à transporter des vésicules, stockées dans le cytoplasme et contenant des neurotransmetteurs, contre la membrane plasmique du neurone. La membrane des vésicules fusionne alors avec la membrane axonale ce qui permet la libération des neurotransmetteurs, par exocytose, dans la fente synaptique. Plus la fréquence de PA reçue est élevée, plus la quantité de calcium rentrant est grande et plus la quantité de neurotransmetteurs secrétés dans la fente synaptique est importante (figure 21). b. La fente synaptique La fente synaptique est étroite (20 à 50 nm) ce qui permet la diffusion rapide du neurotransmetteur vers des récepteurs présents en grande quantité à la surface de la membrane de la zone postsynaptique. c. Les étapes postsynaptiques La fixation d’un neurotransmetteur sur un récepteur présent dans la membrane de la cellule postsynaptique (qui est soit un neurone, soit une cellule musculaire) active ce dernier et induise l’augmentation (ou la diminution) de la conductance de la membrane pour les ions transportés par le récepteur en question. En d’autres termes, la fixation du neurotransmetteur sur le récepteur chimio-dépendant permet « l’ouverture » du canal ionique du récepteur. Il existe deux catégories de récepteurs : les récepteurs ionotropiques et les récepteurs métabotropiques (ou couplés au protéines G). Les récepteurs ionotropiques sont des canaux ioniques transmembranaires dont l‘ouverture est déclenchée par la fixation d’un ligand. Ils sont perméables à un ou plusieurs ions : Na+, K+, Ca2+, Cl-. Le flux d’ion alors déclenché déterminera l’effet postsynaptique. Par exemple, tous les récepteurs au glutamate sont perméables au Na+ : leur ouverture conduit à une entrée de Na+ dans le neurone postsynaptique et donc à une dépolarisation de la membrane de ce dernier (ou PPSE). A l’inverse, si le récepteur est un canal au Cl- (par exemple un récepteur de type GABA A), la fixation du neurotransmetteur induira une entrée de Cl - et donc une hyperpolarisation de la membrane postsynaptique (ou PPSI). Ces deux types de synapses : la synapse excitatrice glutaminergique et la synapse inhibitrice GABAergique, sont les deux types de synapses majoritaires dans le cerveau. 24 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin L’effet du neurotransmetteur sur le récepteur postsynaptique est transitoire. Le neurotransmetteur quitte ensuite le site de fixation et peut être recapturée par le neurone présynaptique, captée par un astrocyte ou métabolisée dans la fente synaptique. Quelle que soit la modalité d’élimination du neurotransmetteur, il est généralement dégradé puis recyclé (voir la figure 22 pour la visualisation du cycle des vésicules synaptiques mettant en évidence un exemple de processus de recyclage). Certains neurotransmetteurs peuvent diffuser librement dans la fente synaptique puis en dehors de la synapse, se fixer sur des récepteurs non synaptiques et moduler ainsi le fonctionnement neuronal sur de plus longues durées. Certaines substances peuvent se fixer sur les récepteurs des neurotransmetteurs et peuvent ainsi renforcer (on parle de substances agonistes) ou inhiber leur action (on parle de substances antagonistes). De nombreux toxiques et médicaments présentent ce type de propriété. L’efficacité d’une synapse peut être modulée par des processus qu’on nomme plasticité synaptique (voir plus loin). Figure 22 : la transmission neurochimique et le cycle de la vésicule synaptique (Neurosciences médicales, De Boeck, Traduction de la 1ère édition) 25 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin d. L’intégration postsynaptique Les potentiels postsynaptiques s’intègrent les uns aux autres sur le soma, à la base de l’axone. Ils s’additionnent dans le temps, si les PA qui les ont engendrés sont assez rapprochés dans le temps (= sommation temporelle), et dans l’espace, si les zones de réception sont assez peu éloignées (= sommation spatiale) (figure 22). Figure 23 : Les phénomènes de sommation des potentiels postsynaptiques II. Les neurotransmetteurs a. Les critères définissant un neurotransmetteur Un neurotransmetteur est une molécule libérée par les neurones et qui modifie l’activité électrique d’autres neurones (ou de cellules musculaires). Des critères formels précis ont été établis afin de déterminer si une molécule peut être classée dans la catégorie neurotransmetteur : 26 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin - La substance chimique est présente dans la région présynaptique du neurone qui la libère. - La substance est libérée par le neurone présynaptique lors de la dépolarisation causée par l’arrivée de PA. - L’application de la substance sur le neurone postsynaptique mime les effets physiologiques produits par la stimulation de ce neurone. - Il existe un mécanisme d’inactivation de la substance chimique au niveau de la synapse. b. Classification des neurotransmetteurs On classe généralement les neurotransmetteurs dans deux groupes principaux : les neurotransmetteurs à petite molécule et les neuropeptides. Les premiers sont synthétisés dans le cytosol présynaptique grâce à des enzymes produites dans le soma et exportées via le transport axonal lent. Les neuropeptides sont synthétisés dans le soma et transportés dans les vésicules jusqu’à la zone présynaptique. Il n’est pas rare d’observer différents types de vésicules dans la même terminaison présynaptique. Alors que certains neurones contiennent plus d’un neuropeptide, il est très rare qu’un neurone produise plus d’un type de neurotransmetteur à petite molécule. En revanche, de nombreux neurones contiennent un type de neurotransmetteurs à petite molécule et au moins un type de neuropeptide. Ainsi, la présence d’au moins deux types de neurotransmetteurs au niveau d’une même synapse permet au neurone de fonctionner avec deux modes de transmission différents. Figure 24 : Principaux neurotransmetteurs (Neurosciences médicales, De Boeck, Traduction de la 1ère édition) 27 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin c. Propriétés des principaux neurotransmetteurs i. L’acétylcholine (ou ACh) C’est le principal neurotransmetteur du SNP. Elle est présente dans toutes les jonctions neuromusculaires, dans les neurones préganglionnaires sympathiques et dans les neurones pré- et postganglionnaires du SN parasympathique. Elle agit comme un neurotransmetteur excitateur dans la plupart des synapses. La myasthénie est une affection auto-immune associée à la production d’anticorps dirigés contre les récepteurs musculaires à l’ACh (voir encadré 1). La perte de ces récepteurs cholinergiques diminue la réponse des muscles à l’ACh libérée par les motoneurones ce qui se manifeste par des faiblesses musculaires. ii. Le glutamate Le glutamate est un neurotransmetteur excitateur qui est retrouvé dans pratiquement toutes les régions cérébrales (figure 24). C’est le neurotransmetteur utilisé par la plupart des neurones principaux pour relayer les signaux excitateurs d’un noyau à l’autre. Des taux excessifs de glutamate extracellulaire peuvent hyper-stimuler les neurones et provoquer leur mort (on parle d’excitotoxicité). La toxicité au glutamate résulte de l’activation excessive de récepteurs postsynaptiques qui ouvrent les canaux calciques. L’augmentation de l’entrée de Ca2+ active des protéases qui peuvent produire des radicaux libres qui lèsent la membrane neuronale et les organites. Figure 25 : La transmission synaptique. A. Illustration d'une synapse excitatrice entre une cellule pyramidale présynaptique libérant le neurotransmetteur glutamate et une cellule pyramidale postsynaptique comportant des récepteurs au glutamate. Noter la différence de durée entre le potentiel d'action (PA) présynaptique et le potentiel postsynaptique excitateur (PPSE) postsynaptique. B. Illustration d'une synapse inhibitrice entre un interneurone présynaptique libérant le neurotransmetteur GABA et une cellule pyramidale postsynaptique comportant des récepteurs au GABA de type A. PPSI : potentiel postsynaptique inhibiteur. 28 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin L’excitotoxicité du glutamate pourrait expliquer une partie des lésions cérébrales secondaire à l’ischémie (réduction de la perfusion). Quand un vaisseau cérébral est obstrué, même pour un court laps de temps, la concentration en glutamate extracellulaire augmente significativement. Cette dernière atteint des niveaux toxiques car la récupération du glutamate par les terminaisons synaptiques est un processus qui nécessite de l’énergie et est donc impacté par le manque d’oxygène. L’excitotoxicité intervient également dans la physiopathologie de l’épilepsie (nous aborderons ce point dans un prochain cours). iii. Le GABA et la glycine Le GABA et la glycine sont les principaux neurotransmetteurs inhibiteurs utilisés par les neurones du SNC (figure 24). Les neurones qui utilisent ces substances jouent un rôle important en empêchant l’excitation prolongée des neurones. En ouvrant les canaux Cl- de la membrane postsynaptique, la transmission GABAergique maintient le potentiel de membrane du soma à des niveaux infraliminaires (c’est-à-dire inférieurs au seuil de déclenchement d’un PA). La toxine du tétanos (la tétanospasmine) bloque la libération de ces neurotransmetteurs et induit une paralysie spastique (voir encadré 1). iv. Les catécholamines Les catécholamines utilisées comme neurotransmetteurs sont : la dopamine, la noradrénaline et l’adrénaline. L’adrénaline est beaucoup moins utilisée par les neurones que les deux autres molécules. Une des fonctions des catécholamines est de moduler le tonus général de l’activité nerveuse dans des régions cérébrales particulières. Le niveau d’activité des voies catécholaminergiques jouent un rôle décisif dans la régulation de l’humeur. La diminution de la transmission catécholaminergique provoque un état dépressif (c’est pourquoi de nombreux antidépresseurs agissent en bloquant la dégradation des catécholamines ou en inhibant leur récupération synaptique). A l’inverse, l’hyperstimulation catécholaminergique peut conduire à un état maniaque et à des troubles psychotiques. La maladie de Parkinson est une affection dégénérative secondaire à la perte sélective des neurones dopaminergiques de la substance noire ce qui conduit à une diminution de l’activité locomotrice et à l’augmentation de la raideur musculaire et des tremblements de la tête et des membres. v. La sérotonine La transmission sérotoninergique est impliquée dans la régulation de l’humeur et joue un rôle dans le contrôle des différents états de l’éveil. 29 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin vi. Les neuropeptides Un grand nombre de peptides sont des hormones libérées par des cellules endocrines ou par des régions endocrines du cerveau. Outre des fonctions hormonales exercées sur leurs organes cibles respectifs, plusieurs peptides agissent comme neurotransmetteurs dans des régions spécifiques du SNP et SNC. La substance P et les peptides opioïdes sont les neuropeptides les plus étudiés. La substance P, localisée dans les nerfs périphériques, est libérée par les terminaisons synaptiques de la moelle épinière où elle transmet l’information nociceptive en réponse à une lésion du tissu périphérique. Les opioïdes de la moelle épinière (endorphines, enképhalines, dynorphines) inhibent la neurotransmission assurée par la substance P et abolissent la perception douloureuse. Les opioïdes sont distribués dans tout le cerveau et jouent un rôle majeur dans la réponse comportementale à la douleur ou à d’autres formes de stress. III. Les récepteurs des neurotransmetteurs Les récepteurs postsynaptiques répondent aux neurotransmetteurs spécifiques, libérés dans la fente synaptique, en modifiant le flux des courants ioniques au travers des canaux spécifiques. Généralement, la fixation d’un même neurotransmetteur est à l’origine de la même réponse postsynaptique (PPSE ou PPSI). La différence majeure entre la transmission chimique des jonctions neuromusculaires et celle des synapses entre neurones réside dans la diversité des réponses postsynaptiques qui peuvent être déclenchées par les neurotransmetteurs du SNC. Alors que la jonction neuromusculaire utilise l’ACh pour produire une dépolarisation rapide et une contraction des fibres musculaires, les synapses du SNC libèrent des neurotransmetteurs qui produisent divers effets synaptiques. a. Les récepteurs ionotropiques Pour ce type de récepteur, la liaison avec le neurotransmetteur produit des modifications de conformation des sous-unités protéiques qui le compose, permettant une augmentation ou une diminution de la conductance du canal ionique du récepteur (figure 25). Ces récepteurs permettent une réponse rapide et brève. Quelques exemples de récepteurs ionotropiques : Les récepteurs nicotiniques de l’ACh : ce sont les récepteurs présents dans la région postsynaptique de la jonction neuromusculaire. Ils sont également présents dans le SNC (sous une autre conformation). Les récepteurs au glutamate : Il existe trois grands types de récepteurs glutaminergiques ionotropiques : les récepteurs AMPA, NMDA ou kainate. Les effets post-synaptiques de la conduction glutaminergique varient largement dans le cerveau, car certaines synapses au glutamate ne possèdent qu’un seul sous-type de récepteur, alors que d’autres en contiennent de nombreux. 30 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin o L’activation des récepteurs AMPA par la fixation du glutamate ou kainate provoque l’ouverture des canaux et l’entrée de cations (Na+, K+) dans le neurone ce qui induit un PPSE. o Les récepteurs NMDA sont des canaux qui, lorsqu’ils sont ouverts, permettent l’entrée de Ca2+, de Na+ et de K+ dans le neurone. Ce sont des canaux voltage-dépendants et chimio-dépendant. En effet, le canal des RNMDA est obstrué par un ion Mg2+. Ainsi, la fixation de glutamate sur le RNMDA ne suffit pas à ouvrir le canal. Pour que le canal s’ouvre il faut à la fois que du glutamate se fixe sur le RNMDA mais aussi que l’ion Mg 2+ soit chassé. Pour ce faire, il faut que la membrane autour du RNMDA ait été dépolarisé par la présence d’un PPSE. Les RNMDA jouent un rôle dans l’apprentissage et la mémorisation en renforçant l’efficacité synaptique. Les récepteurs au GABA : Il en existe deux types : GABA A et GABA B. Les GABA A sont ionotropiques (les B métabotropiques). L’activation des GABA A par la fixation de GABA induit l’ouverture des canaux et l’entrée de Cl-. Pour la majorité des neurones, le potentiel d’équilibre du Cl - est proche du potentiel de repos de la membrane. Ainsi, l’entrée de Cl - ne produit pas ou peu de modification du potentiel de la membrane. Néanmoins, l’entrée de Cl- fait que la membrane a du mal à se dépolariser et devient donc moins sensible à la stimulation, réduisant considérablement la probabilité de décharger du neurone : c’est l’effet inhibiteur. De nombreux tranquillisants se fixent sur les récepteurs au GABA (benzodiazépines, barbituriques etc…). L’alcool agit également sur ces récepteurs, d’où le risque important d’effets secondaires lié à la consommation concomitante de médicaments. b. Les récepteurs métabotropiques Ces récepteurs sont physiquement séparés de leurs canaux ioniques et par conséquent doivent activer des protéines intermédiaires afin de réguler la conductance du canal (figure 26). Les réponses liées à l’activation de ce type de récepteur sont plus lentes à se mettre en place et durent généralement plus longtemps. Les récepteurs métabotropiques peuvent aussi modifier l’expression de certains gènes servant à réguler la synthèse des enzymes ou d’autres protéines qui interviennent dans la transmission synaptique. Ces mécanismes sont impliqués dans les modifications à long terme de l’efficacité des synapses nécessaires à la mémoire. 31 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Exemples de récepteurs de ce type : le récepteur muscarinique à l’ACh, les récepteurs métabotropiques glutaminergiques (mGluR). Figure 26 : les récepteurs postsynaptiques (Neurosciences médicales, De Boeck, Traduction de la 1ère édition) IV. La plasticité synaptique L’efficacité des synapses, c’est à dire leur fonctionnalité, évolue constamment en fonction de l’activité. Les mécanismes les renforçant, ou au contraire les affaiblissant, sont à l’origine d’un phénomène nommé plasticité synaptique. De manière caricaturale, les synapses actives seront renforcées alors que les synapses peu utilisées seront déprimées (figure 27). Il s’ensuit que le cerveau est en permanence reconfiguré à l’échelle synaptique selon ses activités. Le mécanisme le plus connu est celui de la potentialisation à long terme (ou LTP pour long-term potentiation). Son mécanisme est relativement simple et fait intervenir les synapses excitatrices au glutamate. Ces synapses comportent généralement, en présynaptique, des vésicules contenant du glutamate, et en postsynaptique des récepteurs AMPA (R-AMPA) et NMDA (R-NMDA). Lors de leur activation par un potentiel d’action présynaptique, le glutamate libéré se fixe sur les R-AMPA qui s’activent et produisent un PPSE et sur les R-NMDA, qui, bien qu’activés, ne s’ouvrent pas, car leur canal est obstrué par un ion Mg2+ attiré par la négativité intracellulaire. Lors d’une stimulation à haute fréquence, la synapse est activée de manière prolongée. Via les R- AMPA, activables, la membrane postsynaptique va se dépolariser de manière prolongée, conduisant à la levée du bouchon anionique des R-NMDA. Ces derniers vont alors laisser rentrer les ions Na+ et Ca2+. C’est l’augmentation de la concentration calcique intracellulaire qui déclenche une multitude de phénomènes à l’origine de modifications synaptiques. En phase précoce, on observe une phosphorylation des R-AMPA qui va 32 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin permettre d’augmenter leur efficacité, et une augmentation du nombre de récepteurs à la surface de la membrane. Plus tardivement, on observe une surexpression par le noyau des gènes codant pour les R-AMPA. Ainsi, pour un même PA présynaptique, la libération de glutamate va activer plus de R-AMPA postsynaptiques et donc augmenter l’amplitude du PPSE. La LTP a également un pendant présynaptique : l’augmentation du calcium intracellulaire va induire une augmentation de la production de monoxyde d’azote qui conduit à la libération de plus de vésicules contenant du glutamate. La plasticité synaptique module le fonctionnement synaptique en fonction de l’activité et est à la base des processus physiologiques d’apprentissage et de mémoire. Figure 27 : Le modèle de la plasticité cérébrale selon Hebb V. La jonction neuromusculaire La jonction neuromusculaire est un type particulier de contact formé par la terminaison d’un motoneurone (neurone qui conduit une information motrice) périphérique sur une fibre musculaire squelettique (figure 28). Contrairement aux synapses centrales qui utilisent divers neurotransmetteurs, les motoneurones libèrent uniquement de l’ACh au niveau de leur terminaison synaptique, ce qui provoque la contraction des fibres musculaires squelettiques. Il s’agit du seul neurotransmetteur libéré dans la jonction neuromusculaire ; ainsi, n’y a-t-il aucun mécanisme par lequel les nerfs périphériques peuvent inhiber directement la contraction des fibres musculaires. L’arrivée d’un PA dépolarise la terminaison axonale du motoneurone et entraine l’ouverture des canaux calciques voltage-dépendants. L’entrée instantanée du Ca 2+ provoque la fusion des vésicules synaptiques à la membrane présynaptique, libérant d’ACh dans la fente synaptique qui sépare le motoneurone de la fibre musculaire. Le transmetteur active les récepteurs cholinergiques présents au niveau de la plaque motrice de la fibre (récepteurs nicotiniques). Cette activation provoque l’entrée de Na + qui produit une dépolarisation localisée appelée potentiel de plaque motrice. Ce 33 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin potentiel de plaque motrice ouvre les canaux Na+ voltage-dépendants présents dans la membrane de la fibre musculaire et déclenche un PA comparable à ceux observés sur l’axone d’un neurone. Une fois émis, ce PA parcourt la surface de la fibre musculaire et pénètre à l’intérieur des tubules transverses qui perforent le muscle à intervalles réguliers. Le passage du PA dans ces tubules stimule la libération de Ca 2+ par le réticulum sarcoplasmique de la fibre et l’entrée de Ca 2+ depuis le milieu extracellulaire. L’augmentation de la concentration calcique intracellulaire active le mouvement des ponts qui relient l’actine et la myosine et induit la contraction du muscle. Figure 28 : La transmission de l'information nerveuse au niveau de la jonction neuromusculaire 34 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Encadré 1 Myasthenia Gravis La myasthénie (du grec μύς « muscle » et ἀσθένεια « faiblesse »), en latin myasthenia gravis, est une maladie neuromusculaire auto-immune chronique, qui se manifeste à des degrés divers par une faiblesse et une fatigabilité excessive des muscles striés squelettiques, c'est- à-dire ceux qui sont activés volontairement. La physiopathologie supposée de la myasthénie consiste en une atteinte de protéines de la membrane post-synaptique de la jonction neuromusculaire par des auto-anticorps circulants. Le principal anticorps identifié cible le récepteur à l'acétylcholine (un neurotransmetteur), et se comporte comme un inhibiteur compétitif de l'acétylcholine et accélère la dégradation du récepteur par modulation antigénique. Il en résulte une augmentation du nombre nécessaire de molécules d'acétylcholine pour produire la dépolarisation de la membrane post-synaptique, entraînant un épuisement plus rapide et profond des réserves présynaptiques d'acétylcholine et se traduisant cliniquement par une fatigabilité musculaire. À moyen terme, la présence de ces anticorps peut induire, via l'activation du système du complément, des altérations anatomiques de la membrane post-synaptique, diminuant encore son excitabilité. À ce stade, dans les formes les plus sévères, des déficits permanents peuvent s'installer. Deux vidéos de chiens avec une myasthénie : https://www.youtube.com/watch?v=ZRKTNHkyaDk https://www.youtube.com/watch?v=HnLkzGQi6z0 Le tétanos Le tétanos (en grec ancien : τέτανος, « rigidité spasmodique du corps »), est une toxi- infection touchant l'être humain et certains animaux. Il est dû à une infection locale par la bactérie Clostridium tetani produisant une neurotoxine, la tétanospasmine, ciblant le système nerveux central. La tétanospasmine bloque le relargage synaptique de la glycine et du GABA. Le blocage de cette voie de transmission, qui normalement inhibe les effets du motoneurone qui innerve les muscles squelettiques, induit une excitation incontrôlée des motoneurones et donc une stimulation continue des muscles, ce qui se manifeste par une hypertonie et des spasmes musculaires. L’affection est de très mauvais pronostic lorsque les muscles respiratoires sont touchés. La paralysie spastique est généralement ascendante. La toxine se déplace dans l’organisme via les circulations sanguine et lymphatique et via le transport axonal rétrograde. Des vidéos illustrant les signes cliniques du tétanos : https://www.youtube.com/watch?v=EG68o3YbCP4 https://www.youtube.com/watch?v=iHS4jKGUwPk 35 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Les réseaux de neurones et le codage de l’information Les neurones ne sont jamais isolés. Ils communiquent entre eux et forment des réseaux aux seins desquels l’information transite, est modifiée, améliorée, extraite etc… les différents types de circuits ne sont pas encore, et de loin, tous élucidés. C’est le cas en particulier de ceux qui sont capables de générer la conscience, la pensée, qui sont encore très mystérieux, ne serait-ce que parce que ces réseaux ne peuvent être étudiés expérimentalement chez des animaux, qui ont surement ce genre de fonction supérieure, mais ne peuvent pas l’exprimer de manière compréhensible pour les humains. I. Principe général de convergence-divergence Ce n’est jamais un axone unique qui apporte une information sur un neurone unique. La même information est véhiculée simultanément par de nombreux axones, et elle est distribuée sur de nombreux neurones cibles. Tous les axones n’ont pas exactement la même longueur. Ainsi, l’information partie en même temps d’un même point arrive à l’endroit cible par différentes voies de manière légèrement désynchronisée. D’une manière générale, le système nerveux fonctionne sur une base statistique et va faire la moyenne pondérée des informations, ce qui assure sa fiabilité. Cette organisation en réseaux redondants apporte également une sécurité : si les axones amenant de l’information sont lésés, celle-ci n’est pas nécessairement perdue du fait de la redondance, de même si un neurone est lésé (figure 29). Figure 29 : Principe de divergence – convergence (en gris : neurone lésé) II. Les circuits de neurones élémentaires Le circuit d’inhibition récurrente Ce circuit renvoie l’information, par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs interneurones inhibiteurs, sur le neurone qui l’a émise. Cela réalise un limitateur de 36 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin fréquence, car plus le neurone décharge vite et plus il est inhibé, ce qui a pour effet de limiter sa fréquence de décharge des PA à une valeur maximale (figure 30A). Le circuit d’inhibition latérale Ce circuit ressemble au précédent, si ce n’est qu’il ne renvoie pas l’information sur le neurone qui l’a produite, mais sur ses voisins. Ceci permet de faire ressortir l’activité du neurone générant l’information et les inhibitions latérales, et donc d’augmenter le contraste (figure 30B). Circuit d’inhibition antagoniste Ce circuit implique deux systèmes, dont l’un doit être au silence lorsque l’autre est actif. C’est le cas du système des extenseurs/fléchisseurs de membres : pour qu’un mouvement ait lieu, lorsque l’extenseur est actif, le fléchisseur doit être passif. Dans ce circuit, chacun des neurones effecteurs vient inhiber d’autres neurones effecteurs de manière croisée, par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs interneurones (figure 30C). Circuit de blocage ou portillon Ce circuit permet de contrôler la transmission d’un neurone à un autre par l’information venant d’un troisième neurone. Ce blocage peut être le fait d’une connexion synaptique ou présynaptique (figure 30D). Circuit réverbérant ou de rétroaction positive Ce circuit maintient un niveau d’activité permanent grâce à un retour excitateur, direct ou indirect, vers le neurone ayant lui-même envoyé l’information (figure 30E). Circuit amplificateur Ce circuit amplifie le signal provenant d’un neurone en le distribuant à plusieurs neurones qui eux-mêmes le redistribuent à plusieurs neurones etc., lesquels peuvent eux-mêmes converger vers un seul neurone (figure 30F). III. Les grands réseaux de neurones Le SNC n’est lui-même qu’un immense réseau de neurones, ou plutôt un ensemble de réseaux reliés entre eux. C’est de la compréhension du fonctionnement de ces grands réseaux que marque le tout début de la compréhension des fonctions supérieures. Une des propriétés intéressantes de certains grands réseaux est la possibilité d’exprimer des propriétés qualifiées d’émergentes, c’est à-dire des propriétés qui émergent de l’activité en réseau des neurones et qui n’étaient pas prévisibles d’après les propriétés des neurones pris individuellement. En d’autres termes, les propriétés émergentes sont des propriétés nouvelles, qui n’existent pas chez les neurones pris dans leur individualité mais qui apparaissent grâce à la mise en réseau (on parle de propriétés émergentes des systèmes complexes). De nombreux neurones sont spécialisés dans une fonction et ne servent qu’à celle- ci. Mais la plupart des neurones sont impliqués dans plusieurs fonctions. Ces organisations en réseaux partagés vont permettre de synchroniser des activités 37 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin différentes. C’est le cas par exemple de la synchronisation entre la mastication et la respiration. Figure 30 : Les différents types de circuits de neurones élémentaires. A : inhibition récurrente ; B : inhibition latérale ; C : inhibition antagoniste ; D : circuit portillon ; E : circuit réverbérant ; F : circuit amplificateur. Les flèches indiquent une excitation, les points indiquent une inhibition. Les interneurones bleus sont inhibiteurs, les roses et orange sont excitateurs. IV. Le codage neuronal On appelle codage neuronal la manière dont les informations sensorielles ou motrices sont codées par les neurones : il caractérise la relation entre le stimulus et la réponse. Les PA représentent des éléments ponctuels et de fait, l’information portée par un seul PA est binaire : présence ou absence. Transmettre des informations plus complexes que présence/absence va donc nécessiter un codage, un peu comme en morse où à partir de séquences de la présence/absence d’un son, des lettres sont codées. Il existe différentes modalités de codage de l’information. La modalité la plus simple est le codage en fréquence : l’information est contenue dans la fréquence de décharge (= la fréquence d’émission des PA) du neurone. C’est la fréquence moyenne qui compte et non une séquence spécifique de PA. C’est un type de codage peu efficace mais très robuste. Une seconde modalité est le codage temporel. L’information est contenue dans des fluctuations de fréquence de décharge ou dans la date d’arrivée du premier PA. Enfin, le codage de population représente les stimuli à l’aide des activités combinés d’un certain nombre de neurones. Chaque neurone a une distribution des réponses pour un certain jeu de stimuli en entrée, et les réponses combinées de nombreux neurones déterminent une sortie globale du réseau en fonction du stimulus d’entrée. Ce chapitre est très synthétique. Pour plus d’informations : chapitre 4 de Neurophysiologie, de la physiologie à l’exploration fonctionnelle, 3ème édition (disponible en pdf sur vetagrotice). 38 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin L’organisation générale du système nerveux Le système nerveux est un système complexe dont le fonctionnement correct dépend aussi bien du fonctionnement de ses composants élémentaires (les neurones) que de leurs connexions et de leur organisation. Tout est tellement imbriqué qu’il est impensable d’aborder la neurophysiologie sans posséder des bases solides de neuroanatomie. La Physiopathologie neurologique s’appuie bien plus que d’autres disciplines sur la neuroanatomie : l’emplacement des lésions ne pourra généralement être déterminé que par un examen clinique soigneux (examen neurologique) et après un raisonnement qui s’appuie sur de bonnes connaissances de neuroanatomie et de neurophysiologie. Nous rappellerons ici l’organisation générale du système nerveux nécessaire à la bonne compréhension de son fonctionnement normal ou pathologique. I. Terminologie en neurophysiologie Le système nerveux est subdivisé en SNC et SNP, dont fait partie le système nerveux autonome (SNA), aussi appelé système nerveux végétatif. a. Repères anatomiques On emploie les mots homolatéral ou ipsilatéral pour indiquer « du même côté » et les termes hétérolatéral ou controlatéral pour indiquer « du côté opposé ». b. Les ensembles de neurones - Substance grise : désigne de manière générique une zone qui contient des corps cellulaires neuronaux dans le SNC. - Cortex cérébral : ensemble de neurones qui forment une mince couche à la surface du cerveau. - Noyau : une masse de neurones bien individualisée, en profondeur dans le cerveau (ne pas confondre avec le noyau de la cellule). - Substance : groupes de neurones reliés fonctionnellement entre eux, dans la profondeur du cerveau, mais dont le contour est généralement moins bien délimité que celui des noyaux. - Locus : petit groupe de cellules bien défini. - Ganglion : un ensemble de neurones du SNP. 39 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin c. Les ensembles d’axones - Nerf : groupe d’axones dans le SNP (un seul ensemble d’axone porte le nom de nerf dans le SNC : le nerf optique). - Substance blanche : terme générique désignant un ensemble d’axones. - Voie : ensemble d’axones du SNC dérivant du même site d’origine et ayant la même destination. - Faisceau : ensemble d’axones suivant le même trajet mais qui n’ont pas nécessairement la même origine et la même destination. - Capsule : ensemble d’axones reliant le cerveau antérieur au tronc cérébral. - Commissure : ensemble d’axones qui établit une communication entre les deux côtés du cerveau. - Lemnisque : faisceau d’axones qui s’insinue dans le cerveau comme un ruban. II. Le système nerveux périphérique ! La figure ci-dessus est à connaître ! 40 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Le SNP se compose de tous les éléments autres que le cerveau et la moelle épinière (qui constituent le SNC). Il est subdivisé en SNP somatique, qui concerne les nerfs innervant la peau, les articulations et les muscles, et le SNP végétatif ou autonome (SNA), qui innerve les viscères, les vaisseaux sanguins et les glandes. Les éléments des nerfs spinaux et crâniens qui assurent des fonctions motrices sont (1) les axones des neurones du SNP somatique qui apportent des informations aux muscles depuis le SNC, (2) les axones des neurones viscéraux qui apportent des informations aux muscles lisses et au myocarde. Les composants du SNP qui assurent des fonctions sensitives sont les axones des neurones des systèmes sensitifs périphériques qui achemine l’information vers le SNC. Les axones des nerfs périphériques du tronc et des membres convergent vers la moelle et la rejoignent via les foramens intervertébraux. Les zones de convergence proches de la moelle épinière sont nommées racines nerveuses (ou racines médullaires). Les axones des nerfs moteurs efférents (qui partent de la moelle) et les axones des nerfs sensitifs afférents (qui arrivent à la moelle) sont séparés : les axones efférents (moteurs) partent de la moelle via la racine ventrale alors que les axones sensitifs afférents arrivent à la moelle via la racine dorsale. Le corps cellulaire des neurones afférents (des neurones qui apportent l’information nerveuse du corps vers le SNC) se trouve dans les ganglions spinaux, alors que le corps cellulaire des neurones efférents (ceux qui véhicule l’information du SNC vers le reste du corps) se trouvent dans la moelle épinière (figure 31). Les axones des nerfs provenant ou allant sur la face sortent du crane via de nombreux foramens. Figure 31 : La moelle épinière et les racines médullaires (la première image est extraite de Textbook of Veterinary Physiology 6th edition) 41 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin III. Le système nerveux central Le système nerveux central comprend (figure 31) la moelle épinière, la médulla, le pont, le mésencéphale, le diencéphale, le télencéphale et le cervelet (le cervelet est parfois considéré à part). (Attention, si vous dites en consultation de neurologie qu’une affection est d’origine centrale, cela signifie qu’elle peut provenir également d’une lésion à la moelle épinière, même si instinctivement et à tort, on aurait tendance à la qualifier de périphérique. Dans l’absolu, si vous voulez éviter de vous faire houspiller, éviter de dire « origine centrale » et essayer de donner la neurolocalisation plus précise : atteinte de la moelle épinière, du tronc cérébral, du cerveau etc…) La moelle épinière est la région la plus caudale du SNC. Elle reçoit des informations sensitives qui proviennent de la périphérie et envoie des réponses motrices via le SNP. Elle contient les corps cellulaires et les dendrites des neurones moteurs (ou motoneurones). Les axones de ces motoneurones sortent de la moelle via les racines médullaires ventrales. Elle contient également les axones sensitifs (dont les corps cellulaires sont dans les ganglions spinaux, en amont de la moelle épinière) qui acheminent l’information nerveuse sensitive jusqu’au cerveau. La moelle épinière est capable de contrôler des reflexe simples, comme on le verra dans un prochain cours. La médulla ou moelle allongée, ou bulbe rachidien est crâniale à la moelle épinière. Par l’intermédiaire des nerfs crâniens, elle reçoit des informations sensitives provenant de récepteurs internes et superficiels, et elle envoie des informations motrices à des muscles squelettiques ou à des muscles lisses. Ces muscles sont principalement localisés dans le cou et la tête. Les corps cellulaires des neurones sensitifs afférents et des neurones moteurs efférents sont agrégés dans les noyaux sensitifs et moteurs des nerfs crâniens situés dans la médulla. Les noyaux présents dans la médulla jouent un rôle majeur dans le contrôle de fonctions vitales comme la respiration, la circulation cardiaque et l’alimentation. Le pont contient les neurones qui transmettent les informations à destination et en provenance du cervelet. Certains noyaux du pont contrôlent le toucher de la région orofaciale et contrôlent la mastication. Le cervelet joue un rôle important dans la coordination des mouvements, la réalisation de mouvements précis et dans l’apprentissage moteur. Le mésencéphale contient des régions qui relaient les informations visuelles et auditives. Il contient les noyaux des nerfs crâniens qui contrôlent les mouvements oculaires, le diamètre pupillaire. Une région (la substance grise périaqueducale) joue un rôle particulièrement important dans le contrôle endogène de l’analgésie (= suppression de la douleur). Le tronc cérébral comprend le mésencéphale, le pont et la moelle allongée. Il fait la liaison (aussi bien au sens anatomique que physiologique) entre le cerveau 42 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin antérieur et la moelle épinière. Il contient de nombreux noyaux rassemblant les corps cellulaires de neurones mais également de la formation réticulée. Elle intervient dans la régulation de grandes fonctions vitales (comme les cycles veille- sommeil), le contrôle d'activités motrices réflexes ou stéréotypées, comme la marche ou le tonus postural et dans des fonctions cognitives telles que l'attention. De par son rôle central dans la régulation de la vigilance, les lésions de la formation réticulée entraînent souvent une baisse de la vigilance voire un coma. Le diencéphale contient le thalamus et l’hypothalamus, structures qui contiennent de nombreux noyaux. Le thalamus est une station relais et un modulateur des informations transmises au cortex cérébral par les systèmes sensoriels et d'autres régions du cerveau. L’hypothalamus régule le SNA, contrôle la sécrétion d’hormones par l’hypophyse et joue de nombreux rôles dans l’homéostasie (homéostasie : phénomène par lequel un facteur clé (par exemple, la température) est maintenu autour d'une valeur bénéfique pour le système considéré, grâce à un processus de régulation. Exemples de régulations contrôlées par l’hypothalamus : contrôle de la température corporelle, de la pression artérielle, de la soif etc). Le télencéphale (aussi appelé hémisphères cérébraux) est composé du cortex cérébral et de structures sous-corticales comme l’hippocampe ou les ganglions de la base (seule structure du SNC qui porte le nom de ganglion). Le cortex cérébral contrôle les formes les plus complexes d’intégration sensorielle et de perception consciente. Il initie également les mouvements volontaires. Les ganglions de la base modulent les fonctions motrices initiées par le cortex cérébral. L’hippocampe joue un rôle fondamental dans l’apprentissage spatial et dans la mémorisation. Le corps calleux est une commissure transversale du cerveau. C’est un faisceau d'axones interconnectant les deux hémisphères cérébraux. C'est la plus importante commissure du cerveau car elle relie les quatre lobes du cerveau entre eux. Le corps calleux assure donc le transfert d'informations entre les deux hémisphères et ainsi leur coordination. Figure 32 : Le système nerveux central (d’après Textbook of Veterinary Physiology 6th edition) 43 1. Introduction à la neurophysiologie – Mathieu Magnin Pour résumer simplement le fonctionnement du système nerveux, il collecte des informations sensorielles des environnements internes et externes, intègre ces différentes informations de manière consciente et inconsciente afin de formuler des réponses, puis initie ces réponses motrices. Le SNP joue principalement le rôle de la captation des informations sensorielles et dans l’exécution des réponses motrices. Le SNC intègre l’ensemble des informations et initie les réponses. Bibliographie ▪ Neurophysiologie : de la physiologie à l’exploration fonctionnelle. 2ème édition. Vibert et al. ▪ Cunningham’s Textbook of Veterinary physiology. 6ème edition. Klein ▪ Neurosciences médicales : Les bases neuroanatomiques et neurophysiologiques. Traduction de la 1ère édition. Pritchard et al Remerciements Je remercie le Dr Juliette Tariel-Adam pour sa relecture attentive, ses corrections et la pertinence de ces nombreux commentaires. 44

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