Le Filtre Glomérulaire PDF
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Université Paul Sabatier (Toulouse III)
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Ce document traite du filtre glomérulaire, explorant sa structure, ses fonctions et son implication dans le phénomène de protéinurie. Il décrit des aspects histologiques et structurales. L'utilisation de diagrammes et d'illustrations rend la description du sujet plus accessible.
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LE FILTRE GLOMÉRULAIRE INTRODUCTION Nous allons nous intéresser au filtre glomérulaire, à sa structure, à ses fonctions et à son implication dans le phénomène de protéinurie. I. Rappels histologiques Sur la coupe transversale d’un glomérule de rat en coloration PAS, on observe:...
LE FILTRE GLOMÉRULAIRE INTRODUCTION Nous allons nous intéresser au filtre glomérulaire, à sa structure, à ses fonctions et à son implication dans le phénomène de protéinurie. I. Rappels histologiques Sur la coupe transversale d’un glomérule de rat en coloration PAS, on observe: - le floculus (en rouge) - la chambre urinaire, située autour du floculus, elle contient l’urine primitive - le feuillet pariétal de la capsule de Bowman, en bordure Sur le glomérule en lui-même, on retrouve: - la macula densa : c’est un replis du tubule contourné distal qui se blottit le long du glomérule entre 2 artérioles. Elle se situe à la base du glomérule. - l'épine mésangiale : c’est un assemblage de cellules mésangiales autour desquelles viennent s’entourer les capillaires glomérulaires. - les podocytes : ils bordent les capillaires glomérulaires. Ils sont caractérisés par une image en croissant à l’extérieur du capillaire avec un gros noyau et une cytosol rose. Sur cette image en microscopie électronique, on observe les trois couches du filtre glomérulaire (la cellule endothéliale fenêtrée, la membrane basale, et un podocyte avec ses pédicelles). II. Structure et rôle du filtre glomérulaire A l’intérieur du capillaire glomérulaire, le sang traverse les trois couches du filtre glomérulaire, à savoir: - la cellule endothéliale largement fenêtrée (bordée par un riche et épais glycocalyx chargé électro négativement). La fenestration représente environ 25% de la surface capillaire glomérulaire. - la membrane basale, composée de laminine et de collagène IV. - les pédicelles (en vert) Environ 20% du plasma qui traverse les capillaires glomérulaires est ultrafiltré pour former l’urine primitive. Entre les pédicelles, il existe un réseau de maillage protéique longitudinal et perpendiculaire à l’axe des pédicelles constitué de protéines comme la néphrine, la podocine et Neph 1. 1 Lorsque l’une de ces protéines est mutée, la permsélectivité du filtre glomérulaire est altérée et il y a une fuite protéique importante comme notamment d’albumine. C’est le cas par exemple lors d’une mutation inactivante de la néphrine au cours du syndrome néphrotique finnois. L’ultrafiltrat du plasma donne donc naissance à l’urine primitive qui contient peu de colloïdes (< 100 mg/L). Les molécules fortement liées aux protéines seront donc peu filtrées. L’ultrafiltrat ne contient pas de cellules donc pas d’hématies. En fonction de l’équilibre de Gibbs Donnan, il y a plus de protéines dans le secteur plasmatique que dans l’urine primitive, il y aura alors une redistribution des charges électriques de part et d’autre de la membrane avec plus d’anions (x1.05) et moins de cations (x0.95) du côté de l’urine primitive. III. La perméabilité glomérulaire La perméabilité glomérulaire est avant tout définie par la porosité membranaire. Le filtre glomérulaire comporte des éléments qui déterminent largement sa perméabilité. C’est un rôle dédié à la slit membrane tendue entre les pédicelles des podocytes réalisant un effet de tamis moléculaire. La structure longitudinale des assemblages moléculaires crée une fente très fine qui détermine la sélectivité de la perméabilité moléculaire aux grosses molécules. Ces molécules sont filtrées en fonction de leur taille, leur forme (les molécules longues passent plus facilement que les rondes), leur charge électrique (comme l’assemblage est électronégatif, les molécules négatives sont mises en répulsion alors que les positives passeront plus facilement à travers ce filtre glomérulaire). Sur l’expérience de droite, on a administré chez des rats des ficolls de charges électriques et de tailles moléculaires variables. Pour un poids moléculaire donné, les ficolls cationiques ont un coefficient de tamisage plus élevé que les ficolls anioniques. Ces dernières années, une attention a été portée au rôle du glycocalyx endothéliale dans la permsélectivité. Ce glycocalyx est épais et lorsqu’il est endommagé, une protéinurie peut être déclenchée. Comme il est chargé négativement cela à abouti à une théorie : il existerait un effet de répulsion électromagnétique lié au déplacement des molécules protéiques électronégatives à la surface de l’endothélium. Plus le débit sanguin est fort, plus le frottement des charges négatives de l’albumine le long du glycocalyx électronégatif va créer une force de répulsion électromagnétique (= force de Laplace). Ce phénomène pourrait expliquer le phénomène de protéinurie orthostatique observé parfois chez le sujet sain jeune. En effet, la diminution du débit sanguin en position debout va ralentir fortement le flux de perfusion rénale, cela diminue la force de répulsion électromagnétique. Si le glycocalyx n’est pas tout à fait mature, cela pourrait expliquer le passage de quelques molécules d’albumine supplémentaires par rapport à la valeur physiologique et l’apparition temporaire d’une albuminurie en position debout qui disparaît aussitôt en position couchée. 2 Ce qui est important à retenir est que la première protéine à n’être pratiquement pas filtrée au niveau du filtre glomérulaire est l’albumine. Pour rappel, c’est une protéine de 66.5 kDa, son rayon de stock stein est de 35.5 Å et son coefficient de tamisage est de 0.001% ce qui explique que l’on en retrouve très peu dans l’urine. IV. Protéinurie 1) Devenir des protéines filtrées Finalement, très peu de ces protéines seront éliminées par les voies urinaires car la plupart seront capturées au niveau du tubule proximal par un système de récepteur membranaire scavenger (système constitué de la cubuline + mégaline). Ainsi, 6g d’albumine filtrés sont capturés par ce complexe en 24h. Les protéines captées par le système cubuline/mégaline sont ensuite internalisées à l’intérieur de la cellule tubulaire proximale puis fusionnent avec un lysosome et sont dégradées pour libérer des acides aminés qui seront réabsorbés pour éviter le gaspillage. → Finalement, sur 6g d'albumine filtrés par 24 heures dans nos urines, moins de 30 mg seront éliminés dans les urines. Dans l’insuffisance rénale chronique, avec atteinte glomérulaire et protéinurie abondante, le phénomène de réabsorption, par le système cubuline/mégaline, est de plus en plus important au fur et à mesure que la fuite protéique glomérulaire augmente. L’augmentation de production lysosomale et de dégradation des vésicules d’endocytose finit par générer un stress cellulaire épithéliale important qui va générer une dégradation progressive de l’état cellulaire tubulo-interstitiel. Cette fibrose semble contribuer à l’évolution de la maladie rénale chronique induite par la protéinurie glomérulaire. 2) Dépistage des protéinuries a) Fonctionnement de la bandelette urinaire L’outil le plus simple pour dépister une protéinurie est la bandelette urinaire. On trempe une bandelette dans l’urine, on l’égoutte délicatement et on attend le temps indiqué sur la notice d’utilisation (ce temps varie en fonction de ce que l’on souhaite étudier). Sur cet exemple, selon la quantité de protéines présentes dans l’urine, on observe un verdissement progressif de la bandelette. Il s’agit d’une réaction colorimétrique. Cette couleur peut poser problème car la dyschromatopsie au vert est assez fréquente dans la population. Aujourd’hui, il est recommandé d’utiliser les bandelettes urinaires avec des appareils de lecture qui ont l’avantage d’imprimer le résultat. Les bandelettes urinaires sont des outils de dépistage et sont susceptibles de générer des faux positifs en particulier si le recueil urinaire a été fait dans un flacon contenant un désinfectant de la famille ammonium quaternaire ou si elles 3 ont été prélevées longtemps avant et laissées à l’air en présence d’une population bactérienne urinaire. L'alcalinisation progressive des urines qui en résulte peut générer un faux positif. Inversement, il existe des faux négatifs. Le plus classique est la présence de chaînes légères dans les urines qui, si on dose les protéines, seront détectées mais si on ne fait qu’une bandelette ne sont pas bien dépistées par la réaction colorimétrique qui reconnaît essentiellement l’albumine. → les protéinuries chaînes légères peuvent échapper au dépistage d’une bandelette ! b) Interprétation Ce tableau représente la semi-quantification de la protéinurie vue par une bandelette. Dès l’instant où l’on dépiste des traces, il faut suspecter une protéinurie. Cependant, ces traces peuvent être détectées sur des urines très concentrées du matin alors qu’il n’y a pas de protéinurie pathologique (la valeur est faible mais l’effet de concentration fausse le résultat). Par contre, dès qu’il y a une croix de protéinurie, il y a de fortes chances que le patient en soit réellement porteur. Il faudra alors faire un dosage de ces protéines pour confirmer et quantifier la protéinurie. 3) Quantification des protéinuries Historiquement, on recueillait les urines des 24h puis on dosait la protéinurie. Le tout était exprimé sur 24h. Cependant, on s’est rendu compte que la fréquence des recueils urinaires incomplets posait problème. Des études épidémiologiques ont montré que pour prédire l’évolution de la maladie rénale chronique et les risques cardio-vasculaire, le recueil d’une urine spot du matin était plus fiable sous réserve que la valeur de protéinurie dosée soit corrigée pour l’effet de dilution (si le patient a bu beaucoup ou pas). Pour cela, on dose la créatininurie (produits de catabolisme de la créatinine endogène dont la production est constante chez le sujet à jeun). Si le sujet a beaucoup bu, les urines sont diluées mais la créatininurie et la protéinurie sont toutes deux également diluées. Ainsi, le ratio des deux reste valide. Aujourd’hui, on utilise la première urine du matin qui permet de s’affranchir des éventuelles protéinuries orthostatiques chez le sujet jeune. Ici, on peut retrouver l’interprétation du ratio protéinurie sur créatininurie : On parle de syndrome néphrotique au-delà de 3,5 g de protéinurie par gramme de créatininurie. Il existe une zone intermédiaire entre la valeur physiologique et pathologique (entre 200 et 300 mg/g). Une albuminurie (augmentation du passage d’albumine à travers le filtre glomérulaire) peut générer ces valeurs intermédiaires, il faut donc être prudent lorsque l’on observe ces valeurs et les revérifier. 4 Une autre mesure possible est celle de l'albuminurie seule, assez faisable aujourd’hui en routine. Ici encore, on fait un ratio albuminurie/créatininurie, la valeur physiologique est extrêmement faible (moins de 30 mg/g de créatininurie) et on parle de microalbuminurie pour une valeur compris entre 30 et 300 mg/g de créatininurie, au delà il ne s’agit pas d'une macro-albuminurie (terme un peu obsolète) mais tout simplement d’une protéinurie car c’est la définition de la protéinurie pathologique. Il existe un certain nombre de limites à cette mesure mais elle reste aujourd’hui celle recommandée et la plus facile à mettre en œuvre : - Premièrement la creatinurie est plus faible chez la femme, les personnes agées, ou les personnes qui ont une forte réduction de masse musculaire. Il convient donc de s’en méfier puisque le ratio protéinurie/créatininurie sera artificiellement majoré. Inversement, chez l’homme de forte masse musculaire et chez le mangeur de viande, le débit urinaire de créatinine tendra a augmenté et le ratio tendra artificiellement à diminuer minorant un peu la protéinurie. Ces modulations sont assez faibles et ne posent en général pas de problèmes pratiques. - Une autre particularité, c’est que doser l’albuminurie seule plutôt que la protéinurie risque de faire négliger une protéinurie qui n’est pas faite d’albumine comme par exemple les protéinuries tubulaires. Et dans toutes les circonstances où on a raison de redouter une protéinurie tubulaire il faut savoir doser la protéinurie ainsi que l’albuminurie de manière à faire le ratio des deux. - Par ailleurs, il faut aussi se méfier des protéinuries orthostatiques qui sont des protéinuries de type glomérulaire avec un passage d’albumine dû à la position debout chez le sujet jeune. Elles ne sont en soit pas pathologiques, il existe des manœuvres qui permettent de s’affranchir de l’artefact de la protéinurie orthostatique. Doser une urine spot (première urine du matin) est à coup sûr (si la personne est restée couchée pendant toute la nuit) un bon moyen de s’en affranchir. - Enfin il faut tenir compte des rares protéinuries faites de chaînes légères, on la voit dans les hyperyglobuminurie au cours de syndrome inflammatoire (une réponse de type anticorps prononcée) elles n’ont pas de valeurs pathologiques quant à la filtration glomérulaire, elles ne sont que l’indicateur d’une augmentation forte de y globulines. 4) Mécanisme des protéinuries On retrouve deux mécanismes : - Soit le filtre glomérulaire devient anormalement perméable il y a alors passages de molécules qui normalement ne passent pas comme l’albumine ou d’autres molécules plus grosses. 5 - Soit le tubule contourné proximal qui normalement réabsorbe les protéines qui ont fuit à travers le glomérule ne fait plus son travail et laisse passer des petites protéines puisque la filtration glomérulaire en amont est normale. L’anomalie de permsélectivité qui définit la protéinurie glomérulaire est caractérisée par une protéinurie avant tout composée d’albumine et un débit de 300 mg/g de créatininurie ou 3,5 g/24h. C’est typiquement la protéinurie qu’on observe dans les néphropathies diabétiques ou la néphropathie hypertensive et aussi dans un nombre important de glomérulonéphrites. La protéinurie tubulaire, dûe à un défaut de réabsorption tubulaire proximale des protéines est composée de petites protéines (aussi un peu plus d’albumine que la normale mais pas beaucoup). Le débit de protéines est généralement inférieur à 2g/24h (ne fait pas la différence avec une protéinurie glomérulaire modérée. Donc on peut quand on a entre 300mg et 2g avoir aussi bien à faire à l’une qu'à l’autre). L’archétype de la protéinurie tubulaire c’est ce qu’on appelle le Syndrome de Fanconi et ses formes médicamenteuses où le tubule proximal souffre, où le débit d’énergie dans le tubule proximal diminue fortement, ne permettant plus la récupération, par le complexe megaline/tubuline, des protéines filtrées et donc génère leur fuite dans les urines. Pour distinguer les deux la méthode est simple et repose sur le dosage et de la protéinurie et de l’albuminurie et sur le rapport des deux. En fait il faut s'assurer d’abord qu’il y ait vraiment une protéinurie (c'est-à-dire un débit protéine urinaire > 300 mg/g de créatininurie) et après cette confirmation, il faut faire un ratio de l’albuminurie/protéinurie. → Si c’est supérieur à 50% on aura une anomalie de permsélectivité et donc une protéinurie glomérulaire. → Si c’est inférieur à 50% on aura un défaut de réabsorption tubulaire des petites protéines donc une protéinurie tubulaire. Cette méthode fonctionne extrêmement bien et permet de distinguer facilement, beaucoup plus plus qu’une électrophorèse des protéines urinaires (toujours difficile à interpréter) à quels mécanismes de protéinurie nous avons à faire. 6