Politique Économique - Licence Economie-Gestion 3e Année PDF
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Université Savoie Mont Blanc
Jean-Louis PIN
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These lecture notes provide an overview of economic policies, covering both the classical and Keynesian models. They detail the concepts and principles behind economic theory.
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POLITIQUE ECONOMIQUE Licence Economie-Gestion 3è Année Jean-Louis PIN CHAPITRE 2 : La formalisation basique de la politique économique Section 1 : Le modèle classique et le modèle keynésien Section 2 : De l’économie fermée à l’économie ouverte : le modèle IS-LM et...
POLITIQUE ECONOMIQUE Licence Economie-Gestion 3è Année Jean-Louis PIN CHAPITRE 2 : La formalisation basique de la politique économique Section 1 : Le modèle classique et le modèle keynésien Section 2 : De l’économie fermée à l’économie ouverte : le modèle IS-LM et IS-LM-FE Section 3 : Le modèle offre globale – demande globale à prix flexibles et la courbe de PHILLIPS Jean-Louis PIN 2 CHAPITRE 2 Section 1 A/ Le modèle macroéconomique classique 1/ Les fondements de la macroéconomie classique 2/ L’équilibre macroéconomique classique 3/ Quel rôle pour les politiques économiques ? B/ Le modèle macroéconomique keynésien 1/ La théorie keynésienne de la monnaie, de l’intérêt et de l’emploi 2/ La notion d’équilibre dans la théorie keynésienne 3/ Le diagramme à 45° 4/ Le multiplicateur de dépense 5/ Le multiplicateur : précisions et illustrations 6/ Le paradoxe de l’épargne 7/ Equilibre et déséquilibres dans la théorie keynésienne Jean-Louis PIN 3 Les fondements de la macroéconomie classique Jean-Louis PIN 4 De FISHER à la théorie quantitative de la monnaie 𝑷×𝒀 (1) 𝑴 (2) 𝒅 (3) 𝑴𝒅 (4) 𝑷 (5) 𝟎 (6) 𝑴 × 𝑽𝟎 (7) 𝒀𝟎 Jean-Louis PIN 5 La Loi des débouchés de Jean-Baptiste SAY « Il est bon de remarquer qu’un produit terminé offre, dès cet instant, un débouché à d’autres produits pour tout le montant de sa valeur. En effet, lorsque le dernier producteur a terminé un produit, son plus grand désir est de le vendre pour que la valeur de ce produit ne chôme pas entre ses mains. Mais il n’est point moins empressé de se défaire de l’argent que lui procure sa vente, pour que la valeur de l’argent ne chôme pas non plus. Or, on ne peut se défaire de son argent qu’en demandant à acheter un produit quelconque. On voit donc que le fait seul de la formation d’un produit ouvre, dès l’instant même, un débouché à d’autres produits. » Jean-Baptiste SAY, Traité d’économie politique, 1803 Jean-Louis PIN 6 La Loi des débouchés de Jean-Baptiste SAY (2) On a ici une conception très étroite de la monnaie : « La monnaie n’étant qu’un instrument qui sert à faciliter nos échanges, la quantité de monnaie dont un pays a besoin est déterminée par la somme des échanges que les richesses de ce pays et l’activité de son industrie entraînent nécessairement. » « Lorsque vous ne vendez pas facilement vos produits, dites- vous que c’est parce que les acquéreurs manquent de voitures pour les emporter ? Eh bien ! l’argent n’est que la voiture de la valeur des produits. Tout son usage a été de voiturer chez vous la valeur des produits que l’acheteur avait vendus pour acheter les vôtres ; de même, il transportera, chez celui auquel vous ferez un achat, la valeur des produits que vous aurez vendus à d’autres. » Jean-Louis PIN 7 L’équilibre macroéconomique classique Jean-Louis PIN 8 L’équilibre macro-économique classique Un modèle de courte période en économie fermée La structure du modèle 3 agents : entreprises, ménages, Etat 4 marchés : travail, capital, monétaire, biens et services 4 équilibres : biens et services, travail, titres, monnaie Les variables endogènes : salaire réel, niveau d’emploi, production en volume, épargne, investissement, taux d’intérêt réel, consommation, niveau général des prix, données en valeur. Les variables exogènes : impôts, dépenses publiques, offre de monnaie. Jean-Louis PIN 9 L’enchaînement logique du modèle classique Marché du travail Marché du capital Fonction de Marché monétaire production Jean-Louis PIN 10 L’équilibre macro-économique classique (2) Du marché du travail au niveau de la production 1 Demande de travail et salaire réel 2 Offre de travail et salaire réel 3 Salaire réel et niveau d’emploi à l’équilibre 4 Du niveau d’emploi au niveau de la production L’équilibre sur les marchés de capitaux 1 Epargne et taux d’intérêt réel 2 Investissement et taux d’intérêt réel 3 Taux d’intérêt d’équilibre 4 La répartition entre consommation et investissement Jean-Louis PIN 11 La demande de travail des entreprises On retrouve ici une règle de microéconomie : pour maximiser son profit, l’entreprise rémunère ses facteurs de production à leur productivité marginale, ici le facteur travail : 𝝏𝒀 𝒘 𝒘 𝝏𝑵 𝒑 𝑫 𝒑 Partons d’une situation d’équilibre, w/p = PmL : - Si w/p augmente et devient supérieur à la PmL, l’employeur rémunère l’unité supplémentaire de travail plus cher que cela ne lui rapporte. Il recrute à perte et va chercher à relever sa PmL. L’emploi va décliner. - Si w/p décline, il devient au contraire rentable de recruter et l’emploi augmente. Au total, la demande de travail est bien fonction décroissante du salaire réel : 𝝏𝑵𝑫 𝒘 𝝏 𝒑 Jean-Louis PIN 12 Un exemple de détermination de la demande de travail Soit une fonction de production de courte période : Pour maximiser le profit, l’entreprise calcule : On cherche alors : Ce que l’on peut encore transformer : Jean-Louis PIN 13 Le marché des facteurs : le travail Salaire réel Offre Quantité de travail Jean-Louis PIN 14 Le marché des facteurs : le travail Salaire réel Offre ∗ 𝒘 𝒑 A Demande Quantité de travail ∗ 𝑵 Jean-Louis PIN 15 L’équilibre macro-économique classique (2) Du marché du travail au niveau de la production 1 Demande de travail et salaire réel 2 Offre de travail et salaire réel 3 Salaire réel et niveau d’emploi à l’équilibre 4 Du niveau d’emploi au niveau de la production L’équilibre sur les marchés de capitaux 1 Epargne et taux d’intérêt réel 2 Investissement et taux d’intérêt réel 3 Taux d’intérêt d’équilibre 4 La répartition entre consommation et investissement Jean-Louis PIN 16 Le marché du capital Taux d’intérêt Offre de FP 𝒓∗ A Demande de FP Fonds prêtables ∗ 𝑭𝑷 Jean-Louis PIN 17 L’équilibre macro-économique classique (3) L’équilibre sur le marché monétaire 1 L’équation quantitative de la monnaie 2 La demande de monnaie 3 Equilibre monétaire et détermination du niveau général des prix Le bouclage du modèle 1 Le marché monétaire boucle le modèle 2 La monnaie n’a pas d’influence sur l’activité réelle 3 La loi de WALRAS et l’équilibre général 4 La détermination des variables nominales Jean-Louis PIN 18 La Loi de WALRAS L’équilibre étant déjà réalisé sur le marché du travail, le marché du capital et le marché des biens, reste donc à déterminer le niveau général des prix, pour ensuite déterminer toutes les variables nominales. C’est le rôle du marché monétaire, dont l’introduction ne doit pas modifier/perturber les autres équilibres. C’est tout l’intérêt de la Loi de WALRAS. Elle établit une relation entre les demandes nettes (demandes moins offres) d’un individu ou d’une économie, formulées sur la base d’un même système des prix. Cette identité comptable énonce que la somme des demandes nettes globales de tous les agents est nulle. Jean-Louis PIN 19 La Loi de WALRAS (2) Dans une économie aux marchés interdépendants, si la somme des demandes nettes sur tous les marchés sauf un est nulle (tous les marchés sauf un sont donc en équilibre), alors la demande nette du marché restant est également nulle (le dernier marché est aussi en équilibre). Un système de n équations qui définit un équilibre ne contient que (n-1) équations indépendantes : la modélisation de ces (n- 1) relations suffit à le définir. Dans une économie à 4 marchés interdépendants, si trois d’entre eux sont simultanément en équilibre, alors le quatrième le sera aussi par définition. Ce dernier n’est rien d’autre que le marché monétaire : neutralité de la monnaie. Jean-Louis PIN 20 Taux d’intérêt Marché du travail (1) réel Marché du capital (3) 𝑵𝒔 𝑭𝑷𝒔 Salaire réel r 𝒘⁄𝒑 I+G 𝑵𝒅 C 𝑭𝑷𝒅 N Niveau d’emploi Capital Niveau de Niveau de production production Y = f(N) Y Y 45° N Niveau d’emploi Niveau de NGP production Fonction de production (2) L’enchaînement du modèle classique 𝑴𝒔 𝑽 P 𝑷= 𝒀 Niveau de Marché monétaire (4) Y production Jean-Louis PIN 21 La dichotomie classique monétaire / réel P OA Marché des biens et Salaire nominal / salaire réel investissement DA w/p Y Production 𝑫 𝑺 Marché du travail Y=F 𝟎, L L Jean-Louis PIN 22 Quel rôle pour les politiques économiques ? Jean-Louis PIN 23 Les politiques économiques dans le modèle classique Une économie de CPP avec une parfaite flexibilité des prix rend toute politique économique inutile Les réglementations sont préjudiciables à l’équilibre des marchés Quels sont les effets attendus d’une politique budgétaire ? Quels sont les effets attendus d’une politique monétaire ? Jean-Louis PIN 24 La théorie keynésienne de l’intérêt, de la monnaie et de l’emploi Jean-Louis PIN 25 La monnaie chez KEYNES Un raisonnement direct en prix monétaires : articulation étroite entre sphère réelle et sphère monétaire La préférence pour la liquidité La monnaie est la liquidité par excellence Le taux d’intérêt est le prix de la renonciation à la liquidité Rappel des trois motifs de la demande de monnaie Jean-Louis PIN 26 Salaire réel 𝑵𝒔 𝒘⁄ 𝒑 Chômage involontaire 𝒘⁄ 𝒑 𝟏 A ∗ 𝒘⁄ 𝒑 Le chômage involontaire 𝑵𝒅 chez KEYNES 𝑵𝟏 Produit Fonction de production 𝑸∗ 𝑸𝟏 𝑵𝟏 𝑵∗ Niveau d’emploi Jean-Louis PIN 27 L’enchaînement de l’analyse keynésienne Fonction de demande de Offre de monnaie Revenu monnaie Efficacité marginale Fonction de consommation : Taux d’intérêt du capital PmC Multiplicateur Fonction d’investissement Epargne Consommation Demande Demande d’investissement de consommation Demande effective Population active : Emploi demandé Production Fonction d’emploi : Productivité marginale Taux de salaire Taux de chômage Emploi offert du travail réel Jean-Louis PIN 28 La demande effective chez KEYNES La « demande effective » (effective demand), contrairement aux idées reçues, est bien une demande anticipée, efficace, qui n’a rien d’effective : « elle est la somme des dépenses de consommation et des dépenses d’investissement, telles que les entrepreneurs les prévoient lorsqu’ils fixent le volume de l’emploi. La demande effective a la nature d’une commande ou d’une dépense et ne doit pas être confondue avec la demande potentielle, qui intervient dans la loi de l’offre et de la demande. De plus, elle est une demande attendue et c’est par là qu’elle se distingue du revenu. » Jean-Louis PIN 29 La demande effective chez KEYNES (2) Cette « demande effective » garantit-elle le plein emploi ? Rien n’est moins sûr. KEYNES réfute la Loi de SAY qu’il résume par la célèbre formule « l’offre crée sa propre demande ». En réalité, c’est la Loi de WALRAS que KEYNES vise et conteste : l’impossibilité d’un déséquilibre éventuel de même signe sur tous les marchés (pas de surproduction générale). Face à cet « équilibre de sous-emploi », que faire ? Soutenir la demande, notamment du côté de l’investissement. Jean-Louis PIN 30 KEYNES et le modèle classique Le chômage « involontaire » est dû à une insuffisance de la « demande effective » et non pas à un dysfonctionnement du marché du travail. Refus de la théorie quantitative de la monnaie et de la Loi de SAY : La monnaie n’est pas neutre Les débouchés ne sont pas garantis La monnaie a une fonction de réserve de valeur La discussion des deux postulats classiques introduit la Théorie générale. Jean-Louis PIN 31 La notion d’équilibre dans la théorie keynésienne Jean-Louis PIN 32 Revenu d’équilibre et revenu de plein emploi « L’équilibre est un état où les forces se compensent exactement. Comme le revenu national est un flux, le niveau d’équilibre du revenu national correspond à un équilibre qui se répèterait année après année si toutes les forces qui agissent sur cet équilibre demeuraient invariables… Un niveau d’équilibre de revenu est un niveau qui, une fois atteint, se maintiendra, sauf modification ultérieure dans l’économie. » LIPSEY, STEINER Le niveau de revenu de plein emploi garantit la pleine utilisation des facteurs de production, notamment la main- d’œuvre, sans inflation. Jean-Louis PIN 33 L’équilibre offre-demande globales L’épargne et l’investissement sont souvent réalisés par des individus différents et pour des motifs en grande partie indépendants. Si les décisions d’épargne sont surtout le fait des ménages, l’investissement (la formation nette de capital) est surtout le fait des entreprises. L’investissement dépend de nombreux facteurs, autres que le revenu : technologie, politique, prévisions optimistes et pessimistes, « confiance », fiscalité, dépenses budgétaires, mesures législatives, taux d’intérêt, offre de crédit, contraintes financières, etc. Ce que l’on peut résumer par la formule : 𝟎 𝟎 Jean-Louis PIN 34 L’équilibre offre-demande globales (2) En résumé, on connaît l’extrême variabilité de l’investissement, dépendant notamment, mais pas seulement, du taux d’intérêt. De son côté, l’épargne dépend « passivement », un résidu (tout ce qui n’est pas consommé est épargné) du revenu : 𝟎 Dans le modèle classique, avec la loi de SAY et la théorie quantitative de la monnaie, l’équilibre du marché des biens et services supposait que l’épargne soit égale à l’investissement. L’identité entre dépense et production était donc maintenue. Jean-Louis PIN 35 L’équilibre offre-demande globales (3) De plus, un mécanisme équilibrait automatiquement l’épargne à l’investissement : les fluctuations du taux d’intérêt. Rappelons enfin que le modèle démarrait avec le marché du travail et supposait l’existence du plein emploi. Dans l’approche keynésienne, ce mécanisme d’équilibre épargne/investissement ne joue plus, puisque l’épargne ne dépend pas du taux d’intérêt, mais du revenu. Au final, voici le problème : Jean-Louis PIN 36 L’équilibre offre-demande globales (4) L’épargne et l’investissement dépendent de variables différentes et reflètent des comportements non coordonnés d’agents le plus souvent différents. Il n’y a donc aucune raison a priori pour que l’épargne décidée pour l’essentiel par les ménages soit justement égale à la valeur des investissements décidée pour l’essentiel par les entreprises. La loi des débouchés ne tient plus et l’équilibre entre offre et demande globales n’est plus garanti : les agents ne parviennent plus à réaliser leurs plans : le déséquilibre (O/D) est plus que probable, ou plutôt l’équilibre de sous-emploi. Jean-Louis PIN 37 Le diagramme à 45° Jean-Louis PIN 38 Diagramme à 45° et équilibre La présentation la plus connue de la détermination du revenu chez KEYNES est celle proposée par SAMUELSON, connue sous le nom de « Diagramme à 45° ». Ce diagramme permet non seulement de déterminer le revenu d’équilibre, mais aussi d’envisager les déséquilibres (déflationniste et inflationniste) et d’introduire graphiquement le concept de multiplicateur de dépense. Un incontournable en macroéconomie. « Etant donné la propension à consommer et le taux des nouveaux investissements, il existe un seul niveau d’emploi compatible avec l’équilibre. » JM KEYNES, TG, 1936 Jean-Louis PIN 39 Diagramme à 45° et équilibre (2) Comment l’épargne et l’investissement interagissent pour déterminer l’équilibre du revenu correspondant à des conditions de plein emploi, de sous-emploi ou de suremploi ? Comment les fonctions de consommation et d’investissement se combinent pour déterminer cet équilibre du revenu ? Au départ, on suppose l’absence d’Etat (pas de dépenses budgétaires, d’impôts ou de revenus de transferts). Dans ce cas, simple hypothèse pédagogique, nous n’avons pas (encore) à distinguer le revenu du revenu disponible. Jean-Louis PIN 40 Diagramme à 45° et équilibre (3) On sait que la consommation est fonction croissante du revenu, , mais précisons. Chaque point de la droite indique combien la collectivité désire continuer à consommer pour un niveau de revenu donné. De même, pour la droite d’épargne. On sait que l’on peut écrire :. Ces deux droites sont ainsi des sœurs siamoises qui se rejoignent invariablement sur la bissectrice. Jean-Louis PIN 41 Consommation 𝛼 𝑪 = 𝒇 𝒀 = 𝒄𝒀 + 𝑪𝟎 B 𝟒𝟓𝟎 Revenu Epargne 𝑺 = 𝒇 𝒀 = 𝒔𝒀 − 𝑪𝟎 𝛽 B Revenu Jean-Louis PIN 42 Comment l’épargne et l’investissement déterminent le revenu 𝑰, 𝑺 𝑺 E 𝑰 = 𝑰𝟎 = 𝟑𝟎𝟎 B 0 Revenu 𝒀𝑬 𝒀𝑷𝑬 Jean-Louis PIN 43 La détermination du revenu d’équilibre Dépense totale 𝑪+𝑰 E 𝐼 𝑪 45° D B 𝒀𝑬 Revenu Jean-Louis PIN 44 La détermination du PIB par l’égalité du produit et de la dépense « Le seul cas où les entreprises maintiennent durablement leur équilibre global est celui où le niveau de l’épargne projetée est exactement égal à celui de l’investissement projeté. S’il en est ainsi, leurs ventes sont juste suffisantes pour les décider à maintenir le niveau courant de production globale, en sorte que le PNB ne se gonfle, ni ne se contracte. » Paul SAMUELSON, L’économique, Tome 1, 1980 Jean-Louis PIN 45 Les injections et les fuites Une fuite correspond à tout revenu qui ne retourne pas dans le circuit : un revenu non dépensé en achat de biens et services. Une fuite diminue donc le niveau de revenu. Les fuites recouvrent notamment l’épargne (S), les impôts (T), les importations (M). A l’inverse, une injection correspond à toute dépense créatrice de revenu provenant de l’extérieur du circuit : un emprunt. Une injection augmente donc le niveau de revenu. Les injections recouvrent notamment l’investissement (I), les dépenses publiques (G) les exportations (X). Le revenu atteint ainsi une situation d’équilibre, lorsque la somme des injections est égale à la somme des fuites. Jean-Louis PIN 46 Le diagramme à 45° et la détermination de l‘équilibre DG, OG OG = Y DG = C + I 45° 𝑬 Revenu National Y Jean-Louis PIN 47 Le schéma injections-fuites et la détermination de l’équilibre S, I S 𝟎 𝟎 0 𝑬 Y 𝟎 Jean-Louis PIN 48 Deux façons graphiques de déterminer le revenu d’équilibre OG, S, I DG OG S DG I 45° 𝑬 Y 𝑬 Y Jean-Louis PIN 49 La détermination algébrique du revenu d’équilibre On peut tout d’abord le déterminer en partant de l’équation macro- comptable : OG = Y = DG = C + I + G + X – M (1) On insère ensuite dans l’équation les différentes fonctions, pour enfin isoler Y. On peut également partir de l’égalité entre les injections et les fuites : I + G + X = S + T + M (2) On introduit ensuite pour chacune de ces fonctions son expression, avant d’isoler Y. Naturellement, ces deux méthodes donne le même résultat. C’est donc aussi un moyen de vérifier son résultat Jean-Louis PIN 50 Diverses situations macroéconomiques envisageables 1/ Economie fermée sans Etat : Y = C + I ; ou encore : S = I 2/ Economie fermée avec Etat : Y = C + I + G ; ou encore : S + T = I + G 3/ Economie ouverte sans Etat : Y = C + I + X – M ; ou encore : S + M = I + X 4/ Economie ouverte avec Etat. On retrouve alors les deux formules initiales Jean-Louis PIN 51 Le multiplicateur de dépense Jean-Louis PIN 52 Le multiplicateur de dépense : origine et principes « Si la propension à consommer dans les diverses circonstances imaginables (ainsi que quelques autres conditions) est prise comme donnée et si l’on suppose que l’autorité monétaire ou une autre autorité publique prenne des mesures en vue de favoriser ou de contrarier l’investissement, la variation du volume de l’emploi sera une fonction de la variation nette du montant de l’investissement » JM KEYNES, Théorie Générale, 1936 « Nous appellerons k le multiplicateur d’investissement. Il nous indique que, lorsqu’un accroissement de l’investissement global se produit, le revenu augmente d’un montant égal à k fois l’accroissement de l’investissement », JM KEYNES, Théorie Générale, 1936 Le multiplicateur apparaît ainsi comme un mécanisme symétrique et un instrument de politique économique. Jean-Louis PIN 53 Petits rappels sur le multiplicateur de dépense Le fondement du multiplicateur repose sur la « demande effective » : la demande anticipée par les entreprises, lorsqu’elles déterminent leur niveau de production et donc leur niveau d’emploi. Aussi, une hausse des dépenses budgétaires/publiques se traduit d’abord par une hausse de la demande effective : les entreprises voient leurs carnets de commande se gonfler. Elles vont donc investir, embaucher, verser des salaires qui seront en partie dépensés/consommés (la PmC), etc. La production va ainsi augmenter, mais avec un principe d’amortissement de la dépense initiale : au fil des périodes, le revenu augmente, mais de moins en moins. Jean-Louis PIN 54 Petits rappels sur le multiplicateur de dépense Autre limite : il existe des fuites au mécanisme. Une partie de ce revenu supplémentaire sera épargnée par les ménages, plutôt que consommée, une partie de ce revenu supplémentaire peut aussi se porter sur des biens importés, etc. Existe aussi le risque d’un creusement du déficit budgétaire et d’une hausse de la dette publique, avec deux effets négatifs possibles : la hausse des taux d’intérêt et l’effet d’éviction, le risque d’une dette incontrôlable. Au final, la politique de relance budgétaire est toujours un pari sur l’avenir : stimuler la demande pour stimuler la production. Les effets vertueux devraient finalement l’emporter. Jean-Louis PIN 55 Petits rappels sur le multiplicateur de dépense Enfin, la valeur du multiplicateur dépend de la position de l’économie dans le cycle économique. En bas de cycle (récession), le multiplicateur est élevé : un plus grand déficit entraîne une baisse du chômage, du fait des capacités de production non employées et d’un taux de chômage élevé, d’où une hausse rapide de la production. En période d’expansion, une hausse du déficit entraînera surtout un effet inflationniste, les entreprises ne pouvant pas répondre à cette incitation de façon immédiate par une hausse de la production. D’où la hausse des prix et, au final, la dégradation de la compétitivité-prix et du solde extérieur. Jean-Louis PIN 56 Diagramme à 45° et multiplicateur de dépense Comment une variation de l’investissement affecte-t-elle le PIB ? Logiquement, une hausse de l’investissement augmente le produit et l’emploi. Mais de combien ? Une hausse de l’investissement augmente le PIB d’un montant supérieur : il existe un mécanisme multiplicateur. Le multiplicateur est donc le nombre par lequel doit être multipliée la variation de l’investissement pour obtenir la variation du PIB qu’elle engendre. Jean-Louis PIN 57 La définition du multiplicateur de dépense « En effet, l’analyse moderne du revenu prouve qu’un accroissement de l’investissement net fait augmenter le revenu national à raison d’un montant multiple et, par conséquent, supérieur à cet accroissement lui-même ! Les dollars d’investissement – et il en va de même pour n’importe quelles variations autonomes des dépenses publiques, des dépenses extérieures ou des dépenses familiales – sont des dépenses à haute puissance, qui, pour ainsi dire, mettent les bouchées doubles. Cet effet amplifié de l’investissement sur le revenu a été qualifié de théorie du « multiplicateur », ce terme désignant le coefficient numérique indiquant l’accroissement de revenu correspondant à chaque accroissement des dépenses d’investissement. » Paul SAMUELSON, L’économique, Tome 1, 1980 Jean-Louis PIN 58 Diagramme à 45° et multiplicateur de dépense (2) Pourquoi un multiplicateur supérieur à un ? Lors d’une dépense d’investissement de 1000 dollars, les fournisseurs de cet équipement vont toucher un revenu supplémentaire de 1000 dollars, mais ce n’est pas tout. Si la PmC de tous ces producteurs est de 2/3, ils vont à leur tour dépenser 666,67 dollars en nouveaux biens de consommation, etc. Ainsi, la dépense initiale d’investissement de 1000 dollars déclenche toute une série en chaîne sans fin de dépenses secondaires de consommation. Jean-Louis PIN 59 Diagramme à 45° et multiplicateur de dépense (3) Mais, bien que sans fin, cette chaîne va s’amenuisant et l’addition de toutes les dépenses, initiales et dérivées, donne un montant fini, égal à 3000 : Graphiquement, on retrouve bien le même résultat. Jean-Louis PIN 60 Illustration graphique du multiplicateur de dépense 𝑰, 𝑺 𝑺 E’ 𝑰 100 E 𝑰 B 0 Revenu 𝒀𝑬 𝒀′𝑬 𝒀𝑷𝑬 300 Jean-Louis PIN 61 Le diagramme à 45° et le multiplicateur DG, OG OG = Y DG1 DG = C + I ΔDG 45° 𝑬 𝟏 ΔY Revenu National Y Jean-Louis PIN 62 Le schéma injections-fuites et le multiplicateur S, I S 𝟎 𝟎 𝟎 𝟎 𝟎 0 𝑬 𝟏 Y ΔY 𝟎 Jean-Louis PIN 63 Le multiplicateur : précisions et illustrations Jean-Louis PIN 64 Le multiplicateur : approche algébrique Déterminons, dans une économie fermée et sans Etat, le revenu d’équilibre de la période 1 noté : On trouve : 𝟎 𝟎 (1) Dans cette économie, en période 2, seul l’investissement augmente : On trouve : 𝟎 𝟎 𝟎 (2) Jean-Louis PIN 65 Le multiplicateur : approche algébrique (2) Comparons à présent les deux périodes, par simple différence (2) – (1) : On trouve : 𝟎 (3) Apparaît k le multiplicateur : ; car 0 < c < 1 La variation de l’investissement, l’impulsion, exerce un effet plus que proportionnel sur le revenu. La valeur du multiplicateur sera d’autant plus élevée que la PmC sera forte : Jean-Louis PIN 66 Le multiplicateur : analyse statique et dynamique Jusqu’ici, le raisonnement, en particulier le diagramme à 45°, portait sur le multiplicateur statique. Celui-ci ne fait qu’exprimer le niveau unique de revenu compatible avec les dépenses autonomes, compte tenu de la PmC. Les deux niveaux de revenu observés ne correspondent qu’à deux niveaux de dépenses autonomes différents. Le multiplicateur statique ne fait donc que comparer deux situations : avant et après une injection de revenu. On ne se préoccupe pas du déroulement du processus lui-même. Comment, et surtout en combien de temps, passe-t-on alors d’un niveau de revenu à un autre ? Jean-Louis PIN 67 Le multiplicateur : analyse statique et dynamique (2) Cette question des délais est importante, notamment en politique économique : à quelle échéance pourront se produire les accroissements de revenu espérés lors d’une politique de relance de l’activité ? Pour cela, il faut introduire le temps de façon continue, par un décalage de type ROBERTSON : (4) On suppose ainsi un décalage entre la perception d’un revenu et sa transformation en dépense. Jean-Louis PIN 68 Exemple 1 : injection unique avec 𝟎 et PmC = 0,8 t Jean-Louis PIN 69 Les résultats observés Dans ce Tableau, on note que les colonnes ne portent que sur des variations. Calculons la somme des accroissements de revenu au bout de 4 périodes : 1000 + 800 + 640 + 512 1000 Jean-Louis PIN 70 Le multiplicateur dynamique Pour toute période différente de l’infini, calculons la somme des accroissements de revenu : Σ∆𝑌 = ∆𝑌 + ∆𝑌 + ∆𝑌 + … + ∆𝑌 ∑ ∆𝑌 = ∆𝐼 1 + 𝑐 +𝑐 + … + 𝑐 (a) Multiplions cette dernière par c puis calculons la différence : 𝑐 Σ∆𝑌 = ∆𝐼 𝑐 +𝑐 + … + 𝑐 (b) (a) – (b) : Σ∆𝑌 − 𝑐 Σ∆𝑌 = 1 − 𝑐 Σ∆𝑌 = 1 − 𝑐 ∆𝐼 En généralisant, on comprend alors d’où provient la formule 6 : 𝟏 𝒄𝒏 𝟏 𝒏 𝟏 𝒏 𝟎 𝟎 (5) Car : lim 𝑐 = 0 𝟏 𝒄 𝟏 𝒄 → Jean-Louis PIN 71 Les résultats observés (2) A partir de ce même exemple, on peut calculer ainsi le multiplicateur dynamique pour une durée de 4 périodes : 1000 1000 (1 + 0,8 + 0,64 + 0,512) 1000 x 2,952 = 2952 Mais on peut aussi le calculer ainsi : Jean-Louis PIN 72 Exemple 2 : injection renouvelée avec 𝟎 et PmC = 0,8 Périodes I t C t Y t Y t 1 1000 1000 1000 2 1000 800 1800 2800 3 1000 1440 2440 5240 4 1000 1952 2952 8192 5 1000 2361,6 3361,6 11553,6 6 1000 2689,28 3689,28 15242,88 7 1000 2951,424 3954,424 19197,304 8 1000 3161,1392 4161,1392 23358,443 9 1000 3328,9114 4328,9114 27687,355 1000 4000 5000 Jean-Louis PIN 73 Cas d’une injection renouvelée : généralisation Notons les variations de revenu : (a) (b) (a) – (b) : D’où finalement : Jean-Louis PIN 74 Cas d’une injection renouvelée : généralisation (2) Notons la somme des variations de revenu : Le supplément de revenu observé en n, lorsque l’injection est renouvelée, est à lui seul égal à l’ensemble des revenus supplémentaires observés lorsque l’injection était unique. Le phénomène devient alors divergent, cumulatif ou explosif. Jean-Louis PIN 75 Le paradoxe de l’épargne Jean-Louis PIN 76 Frugalité et paradoxe de l’épargne Si les agents ont l’intention d’épargner davantage, pourront-ils effectivement y parvenir ? Pour un individu pris isolément sans doute. Mais pour une collectivité, est- ce aussi certain ? Dans le diagramme injections/fuites, une frugalité accrue se traduit par un déplacement vers le haut de la droite d’épargne. Pour un même niveau d’investissement, l’effet sera de réduire le niveau du revenu d’équilibre de en. Pour quelles raisons ? Jean-Louis PIN 77 Le paradoxe de l’épargne S, I 𝟎 𝟎 0 𝑬 𝑬 Y 𝟎 Jean-Louis PIN 78 Frugalité et paradoxe de l’épargne (2) Si les ménages réduisent leurs dépenses de consommation et que les entreprises ne sont pas disposées à investir davantage, les ventes vont diminuer et la production sera comprimée sans tarder. Jusqu’où ? Jusqu’au point où les ménages se sentiront tellement appauvris qu’ils cesseront finalement de tenter d’épargner davantage que ce que les entreprises acceptent de continuer à investir. Le multiplicateur apparaît ainsi comme un mécanisme symétrique : pour une PmC égale à 2/3, une hausse de l’épargne de 100 réduirait finalement le revenu de 300. Jean-Louis PIN 79 Frugalité et paradoxe de l’épargne (3) Et SAMUELSON de conclure : « En résumé, si les dépenses d’investissement sont des « dépenses à haute puissance » exerçant des effets de multiplicateur sur le revenu, les dépenses de consommation […] exerceront des effets tout aussi puissants. » Ainsi, une tentative de stimuler l’épargne peut, dans certaines conjonctures (sous-emploi), ne pas aboutir à une épargne accrue, mais entraîner au contraire purement et simplement une réduction du revenu. Jean-Louis PIN 80 Frugalité et paradoxe de l’épargne (4) Ce constat serait-il le même si, à présent, on ne considère plus l’investissement comme un élément autonome et constant, mais induit ? Les entreprises sont davantage disposées à développer leur activité, à investir, quand leurs ventes sont fortes, par rapport au capacités de production. L’investissement serait aussi fonction croissante du revenu : ; avec Jean-Louis PIN 81 Frugalité et paradoxe de l’épargne (5) Reste surtout à savoir si l’économie est ou non en situation de dépression. Au plein emploi, le principe de frugalité reste correct : une frugalité accrue et une consommation moindre sont bien synonymes d’investissement accru (le revenu s’élève, tout comme l’épargne). En revanche, dans une situation de sous-emploi, la tentative d’épargner va se traduire par moins, et non plus, d’épargne. L’individu qui épargne ampute sa consommation va transmettre à ses fournisseurs moins de pouvoir d’achat qu’auparavant. Le revenu de quelqu’un d’autre sera donc aussi réduit d’autant. Jean-Louis PIN 82 Frugalité et paradoxe de l’épargne (6) Si un individu réussit à épargner davantage, un autre particulier a été probablement contraint de désépargner. En situation de sous-emploi, une consommation élevée « induit » un investissement lui-même élevé : consommation et investissement sont complémentaires. Tout ce qui soutient l’un soutient généralement l’autre. Cette fois, une tentative de frugalité accrue, en présence d’investissement induit, se traduira même désormais par une épargne effectivement réduite. Cette frugalité accrue réduit le revenu, mais entraîne aussi une baisse de l’investissement, d’où une baisse encore accrue du revenu. Au final, l’épargne va bien finalement baisser. Jean-Louis PIN 83 Le paradoxe de l’épargne S, I 𝟎 𝟎 𝟎 0 𝑬 Y 𝒀𝑬 𝟎 Jean-Louis PIN 84 Frugalité et paradoxe de l’épargne (7) La conclusion du paradoxe est simple. « On ne devrait jamais plus, en période de dépression, inciter le public à serrer davantage sa ceinture, à épargner davantage, aux fins de restaurer la prospérité. Il y a, en effet, de grandes chances pour que le résultat soit juste l’inverse, à savoir une aggravation de la spirale vicieuse de déflation. » Paul SAMUELSON, L’économique, Tome 1, 1980 Jean-Louis PIN 85 Exercice Une économie sans Etat, avec : ;. 1/ Déterminez le revenu d’équilibre puis le niveau de l’épargne. 2/ Déterminez le revenu d’équilibre, puis le niveau d’épargne, si les ménages décident d’épargner davantage 𝟎. 3/ Avec la fonction d’investissement , déterminez le revenu d’équilibre et le niveau de l’épargne. 4/ Calculez l’effet d’une même variation que celle envisagée en question 2. Jean-Louis PIN 86 Equilibre et déséquilibres dans la théorie keynésienne Jean-Louis PIN 87 Equilibres inflationniste et déflationniste Dans le diagramme à 45°, la bissectrice est aussi l’ensemble des points pour lesquels l’offre globale (OG) est égale à la demande globale (DG). L’égalité nous donne le niveau de revenu d’équilibre. C’est bien une présentation keynésienne : c’est le niveau de la demande qui détermine le revenu d’équilibre, et non l’inverse (comme dans le modèle classique). Ainsi, rien ne garantit que cet équilibre assure le plein emploi des facteurs de production, notamment le travail. Jean-Louis PIN 88 Equilibres inflationniste et déflationniste (2) Ce revenu n’a pas été déterminé, en tenant compte du volume des facteurs de production disponibles. Il a été déterminé par les producteurs, selon la demande à laquelle ils pensent être confrontés à l’équilibre. « Les entreprises fixent le niveau d’emploi à leur convenance ». C’est le principe de la demande effective. Il n’est pas certain que la demande réelle atteindra finalement le niveau anticipé par les producteurs. Le marché des biens et services risque donc d’être déséquilibré. Jean-Louis PIN 89 Logique keynésienne Demande anticipée Niveau de Niveau d’emploi (demande effective) production offert Logique du modèle classique Niveau d’emploi Fonction de Niveau de (plein emploi) production production Jean-Louis PIN 90 Equilibres inflationniste et déflationniste (3) Et, même si leurs anticipations sont correctes et qu’ils rencontrent effectivement une demande suffisante pour écouler toute leur production, rien ne garantit que ce niveau de production soit précisément celui qui permet d’offrir un travail à chacun. On peut donc avoir un équilibre sur le marché des biens et services, mais un déséquilibre sur le marché du travail (chômage). Ce chômage provient d’une insuffisance de la demande globale qui peut s’avérer durable, puisque, au point , l’offre est bien égale à la demande et que les producteurs ne sont pas incités à produire davantage : un équilibre de sous-emploi. Jean-Louis PIN 91 Equilibres inflationniste et déflationniste (4) Pour en sortir, il faudrait que les entreprises anticipent une augmentation de la demande future et, ainsi, se remettent à investir, tirant la DG vers le haut. Si l’investissement est faible, le niveau de revenu d’équilibre correspondra à un chômage étendu et à un gaspillage considérable de ressources. Le seul niveau de revenu considéré comme désirable est ainsi celui qui se rapproche du revenu de plein emploi. Et cela n’est possible que si les occasions d’investissement suffisent pour absorber l’épargne de plein emploi. Jean-Louis PIN 92 Equilibres inflationniste et déflationniste (5) « A moins que cette épargne de plein emploi ne soit ’’absorbée’’ par l’investissement privé (ou par des interventions gouvernementales), la nation ne peut continuer à jouir du plein emploi. Dans la négative, l’économiste reconnaît l’existence d’un « trou ou écart déflationniste » (deflationary gap), dont l’importance équivaut à l’insuffisance d’investissement par rapport à l’épargne de plein emploi. », Paul SAMUELSON. Tant que la DG est inférieure au revenu de plein emploi, l’économie se trouve en situation d’écart déflationniste. Jean-Louis PIN 93 Equilibres inflationniste et déflationniste (6) Supposons que le revenu de plein emploi soit de 3200 milliards et que les dépenses projetées soient de seulement 3000 milliards, correspondant au point G. Un écart déflationniste de 200 milliards subsiste entre G et. Que va-t-il alors se produire ? Le revenu va fléchir, mais non pas de seulement 200 milliards, mais bien davantage, en raison du mécanisme multiplicateur (à la baisse). Au final, le revenu, pour une PmC toujours de 2/3, diminuera du triple du montant de l’écart déflationniste. Jean-Louis PIN 94 Les écarts déflationniste et inflationniste Dépense totale Ecart déflationniste 𝑷𝑬 𝑬𝑷𝑬 𝟏 3200 3000 G 𝑬𝟏 45° 𝒀𝟏 𝒀𝑷𝑬 𝒀𝟐 Revenu 3200 Jean-Louis PIN 95 Equilibres inflationniste et déflationniste (7) En revanche, si la demande est trop importante, par rapport aux capacités de production, et amène la DG en , au-delà du revenu de plein emploi, la production est impossible, car tous les facteurs de production disponibles sont déjà pleinement utilisés. L’investissement projeté est, cette fois, plus élevé que l’épargne de plein emploi et davantage de biens seront demandés aux entreprises qu’elles ne peuvent en produire : les prix commencent à augmenter. C’est une situation d’écart inflationniste : « l’inflation de demande », ou l’inflation par la demande (demand pull), une dépense due à une demande excessive qui a pour résultat de faire monter les prix et les salaires. Jean-Louis PIN 96 Equilibres inflationniste et déflationniste (8) On se retrouve ainsi au point G’, avec un écart inflationniste de 200 milliards. Quelle en sera la conséquence ? La production ne peut être accrue de 600 milliards, car chaque travailleur est déjà pleinement employé et les entreprises exploitent déjà entièrement leurs capacités de production. Si un écart inflationniste est symétriquement l’inverse d’un écart déflationniste, ses effets sur l’emploi et la production sont quelque peu différents. Un écart déflationniste peut déplacer le niveau de production vers la gauche, en comprimant le volume à 90%, voire à 70%, du volume de plein emploi. Jean-Louis PIN 97 Equilibres inflationniste et déflationniste (9) En revanche, un écart inflationniste ne pourra pas déplacer le niveau de l’emploi vers la droite en tirant le volume à 150% du plein emploi. L’économie ne peut pas, en termes réels, se déplacer bien loin vers la droite, au-delà du plein emploi. Si le revenu ne peut guère se déplacer vers la droite, ce sont alors les prix qui augmentent, et ils vont augmenter tant que subsistera cet écart inflationniste. Au final, tant que la DG reste inférieure au revenu , ce sont les quantités produites par les entreprises qui augmentent (et non les prix) : l’OG est alors parfaitement élastique, du fait des capacités de production inutilisées. Jean-Louis PIN 98 Equilibres inflationniste et déflationniste (10) Mais, dès que la DG excède le revenu , ce sont alors les prix qui s’élèvent (et non pas les quantités produites). On retrouvera d’ailleurs l’influence de ces deux constats, très keynésiens, dans la courbe de PHILLIPS et dans le modèle OA-DA. Jean-Louis PIN 99 Les écarts déflationniste et inflationniste Dépense totale Ecart inflationniste 𝑫𝑮𝟐 𝑬𝟐 G’ 𝑷𝑬 3400 3200 𝑬𝑷𝑬 45° 𝒀𝟏 𝒀𝑷𝑬 𝒀𝟐 Revenu 3200 Jean-Louis PIN 100 Les écarts déflationniste et inflationniste Dépense totale Ecart déflationniste 𝑬𝟐 𝑷𝑬 𝑬𝑷𝑬 𝟏 𝑬𝟏 45° 𝒀𝟏 𝒀𝑷𝑬 𝒀𝟐 Revenu Jean-Louis PIN 101 Les écarts déflationniste et inflationniste Dépense totale Ecart Ecart déflationniste inflationniste 𝑫𝑮𝟐 𝑬𝟐 𝑷𝑬 𝑬𝑷𝑬 𝟏 𝑬𝟏 45° 𝒀𝟏 𝒀𝑷𝑬 𝒀𝟐 Revenu Jean-Louis PIN 102 La politique monétaire chez KEYNES Peut-on compter sur la politique monétaire pour soutenir l’activité ? « Pour notre part, nous sommes aujourd’hui assez sceptique sur les chances de succès d’une politique purement monétaire destinée à agir sur le taux de l’intérêt. Nous nous attendons à voir l’Etat… prendre une responsabilité sans cesse croissante dans l’organisation directe de l’investissement. Il est probable en effet que les fluctuations dans l’estimation de l’efficacité marginale des divers types de capitaux… seront trop considérables pour qu’on puisse les compenser par les variations pratiquement possibles du taux de l’intérêt. » JM KEYNES, La théorie générale, 1936 Jean-Louis PIN 103